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Manager la science et les chercheurs : quel rôle des managers?

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Academic year: 2022

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Manager la science et les chercheurs : quel rôle des managers ?

Auteur : Jean-Yves OTTMANN

Affiliation : Chercheur associé, Université Paris – Dauphine PSL, DRM, Equipe Management et Organisation

Coordonnées :

jean-yves.ottmann@dauphine.psl.eu

Place du Maréchal de Lattre de Tassigny - 75116 Paris

Auteur : Claire PICQUE-KIRALY

Affiliation : Maître de conférences, Université Paris II Panthéon – Assas, LARGEPA Coordonnées :

Claire.Picque-Kiraly@u-paris2.fr

Maison des Sciences de Gestion, 1 rue Guy de la Brosse - 75005 PARIS

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« Un chercheur c’est un peu comme un jardinier. Il faut qu’on fournisse une bonne terre dans laquelle on peut planter des graines mais après, le chercheur c’est le jardinier qui fait pousser les fleurs. Ça, on a un peu tendance à l’oublier. Il faut fournir le bon terreau, les bonnes conditions pour que les fleurs puissent pousser si on fait venir un bon jardinier. »

Par cette comparaison, ce directeur de département de R&D privée industrielle met en évidence la nécessité de fournir les bonnes conditions pour que le chercheur puisse fournir le meilleur travail possible. Cela s’inscrit dans des conditions externes : ces dernières décennies ont vu des changements rapides dans la nature du travail : d'une économie industrielle à une économie de la connaissance (Le Masson et al., 2006) et du travail salarié au travail déréglementé (Leighton, 2016). Le contexte de la recherche et d’activité scientifique, tant dans le public que le privé, s’est également fortement renouvelé : financements décroissants (Hubert

& Louvel, 2012; Louvel, 2007), besoin de production plus intensive et concurrence effrénée (Gilbert et al., 2018). Tout ceci impacte les organisations et le management de la recherche et donc les conditions internes à la charge des directions d’organismes de recherche.

Des études classiques en sociologie des sciences, sociologie des professions et sciences de gestion (Engel, 1970; Kerr et al., 1977; Kornhauser, 1962; Merton, 1973; Scott, 1965;

Strauss, 1963) mettent en évidence les tensions inhérentes entre les valeurs et objectifs des chercheurs, en tant que corporate professionals (Barley & Kunda, 2006), et les organisations.

Un management spécifique doit donc être mis en place pour ces populations spécifiques. Des outils de gestion spécifiques sont à cet égard développés, comme la double échelle (Shepard, 1958). Toutefois, la littérature sur le sujet se place au niveau organisationnel et reste très peu développée au niveau du management, c’est-à-dire au niveau de l’activité concrète du manager.

Cet article vise donc à répondre à la problématique suivante : quel est le rôle des managers dans le management des chercheurs et de la recherche scientifique ?

Afin de mieux comprendre le rôle des managers, nous avons choisi de mener une étude qualitative et comparative dans un centre de recherche publique française et centre de Recherche et Développement (ci-après R&D) industrielle française.

1. R

EVUE DE LITTERATURE

1.1. La science comme organisation

Dès la fin des années 1990 et surtout des années 2000, de nombreux changements ont affecté l’organisation de la recherche, tant publique privée, entrainant de nombreuses évolutions du management de la science dans ces organisations.

Concernant la recherche publique, les principes directeurs de sa gouvernance ont évolué depuis la fin du XXème siècle. Ces principes dépendent du lien implicite ou explicite qui est fait entre science et société (Jouvenet, 2011; Vinck, 2007). Historiquement, le budget de la recherche était « donné » aux institutions de recherche publique sans contrepartie directement identifiable, avec un pouvoir de répartition de ces dernières relativement discrétionnaire (Louvel, 2007). Le discours politique a nettement changé depuis le début de la décennie 2000

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3 en proposant comme nouveau paradigme que la recherche devait d’une part être performante et d’autre part avoir des débouchés économiques (Gaulejac, 2012; Malissard et al., 2003;

Montlibert, 2004; Vilkas, 2009).

Ces nouveaux modes de financement ont des répercussions en France sur la gouvernance interne des organismes de recherche publique. Évaluer l’adaptation de la recherche publique française à ce nouveau fonctionnement pose question : il est difficile de percevoir des résultats clairs en termes de productivité scientifique (Mongeon et al., 2016), alors que par ailleurs le monde de la recherche dénonce le stress et les difficultés de cette situation (e.g. Durat & Brunet, 2014; Flot, 2014; Guyon, 2014; Thomine, 20141). A l’inverse, il existe des travaux qui montrent que le nouveau système produit des effets positifs, telle la disparition des « mandarins », les directeurs de laboratoire inamovibles et omnipotents (e.g. Barrier, 2011).

L’organisation des institutions de recherche et leur gouvernance sont affectées par les modes de financement de la recherche, qui induisent une recomposition des rapports de pouvoir et d’autonomie.

Concernant la régulation formelle de l’activité scientifique, un laboratoire et l’ensemble des membres qui le composent sont en général placés sous la supervision d’un responsable dont le titre et les modes de nomination varient (Castagnos & Echevin, 1981; Louvel & Musselin, 2015; Tapie, 2006). Ce responsable pourrait de fait être considéré comme le manager intermédiaire ou de proximité dans le cadre d’une activité d’expertise. Or, la question du rôle des directeurs de laboratoire par rapport à l’autonomie du champ n’est que peu ou pas étudiée par les science studies.

Deux enjeux majeurs pèsent particulièrement sur les R&D et ont des conséquences importantes en termes d’organisation de la recherche et de gestion du personnel : la concurrence accrue et la nécessité de produire plus vite tout en réduisant les coûts.

Pour faire face à la concurrence accrue, les R&D doivent repenser leurs interactions avec l’environnement. Cela comprend la nécessité de gérer les effets de l’internationalisation, au-delà de la nécessité pour les équipes de R&D de travailler dans des équipes multiculturelles (Chevrier & Segal, 2011), l’internationalisation et plus encore l’innovation impliquent un engagement plus important des managers des laboratoires R&D dans l’accompagnement de ce changement qui provoque des craintes (Laperche & Lefebvre, 2012).

Par ailleurs, une rationalisation de l’activité de R&D s’opère également. Cela se traduit par le développement important du mode projet qui pose de nombreuses questions de management et de GRH : cohérence entre missions et projets, articulation entre projets et carrière, knowledge management (Paraponaris, 2003), évaluation (Martin & Paraponaris, 2003) ou encore reclassement des équipes à la fin du projet (Asquin et al., 2007; Midler, 2008). Les centres privés de R&D connaissent également des contraintes financières et une chute des investissements en R&D (Gilbert et al., 2018, p. 87), les chercheurs se muent alors en « gestionnaires de la recherche » (Pigeyre & Valette, 2006).

1 Thomine, C. (2014, 19 février). Le burn-out des labos. Le Monde, p. 1-5. France

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4 En conclusion, l’organisation de la recherche et son management connaissent de nombreux changements depuis une vingtaine d’années entraînant une porosité de plus en plus forte entre secteurs publics et privés (Fixari & Fort, 2005) bien qu’elle ait évidemment des limites (Louvel, 2007).

1.2. Manager les scientifiques comme des professionnels du savoir

Au-delà du contexte renouvelé dans lequel se place leur activité, les chercheurs sont des professionnels, ce qui justifie un management spécifique à leur égard.

L’abondante littérature en sociologie des professions distingue généralement trois types de professionnels (Barley & Kunda, 2006) : les « free professionals » ; les « professional firms

»; et les « corporate professionals » qui sont des professionnels salariés d’une organisation comptant diverses professions. Les chercheurs sont donc considérés comme des « corporate professionals ». À la différence des deux premières formes d’organisation des professionnels, les « corporate professionals » bénéficient d’un salaire régulier de l’organisation, d’une relative sécurité de l’emploi et le coût de leur employabilité est supporté par l’organisation. Le manager ne serait pas un membre de la profession (ibid.).

Parmi les différentes approches de la littérature professionnelle, si l'on regarde l'approche fonctionnaliste, les professionnels sont définis grâce à des caractéristiques. Certains auteurs en définissent six (Kerr et al., 1977; Thévenet, 2006): l’expertise; l’autonomie;

l’implication dans le travail et la profession; l’identification avec la profession et les professionnels; l’éthique; l’entretien collégial des standards. En matière de gestion des professionnels, ces caractéristiques impliquent un besoin d'autonomie - au moins une autonomie opérationnelle (Bailyn, 1985) ; la passion du travail doit être prise en compte (Sié &

Yakhlef, 2009) ainsi que l'intérêt pour le sujet (Roger, 1991) ; la liberté de communiquer avec le groupe/profession de référence et donc en dehors de l'organisation doit être donnée ; les valeurs du groupe doivent également être prises en compte (Mudambi & Swift, 2009), comme l'éthique dans le cas des chercheurs. Enfin, certains auteurs ont également remarqué un besoin d'autonomie, de sécurité et de reconnaissance parmi les chercheurs (Hourquet & Roger, 2005;

Leclair, 1991; Roger, 1991).

Du fait de ces différentes caractéristiques, les professionnels expérimentent des tensions entre leurs logiques professionnelles et les logiques organisationnelles. Ces tensions ont été analysées dans de nombreuses publications notamment sociologie des sciences (Engel, 1970;

Kerr et al., 1977; Scott, 1965; Strauss, 1963) depuis les années 1960 et théorisées à travers les concepts de “cosmopolites” and “local” (Merton, 1973). Par exemple, selon Kornhauser (1962), il existe cinq " built-in strains between work establishments and professional institutions" en ce qui concerne : (a) les objectifs du travail professionnel ; (b) les contrôles ; (c) les incitations et récompenses; (d) l’influence sur le travail professionnel.

Ces tensions doivent être gérées par l’organisation et s’incarnent dans la mise en place d’outils de gestion spécifiques des chercheurs, par exemple la double échelle (Shepard, 1956, 1958). Les différents acteurs de l’organisation sont impactés par ces tensions : les chercheurs

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5 et leur manager, la direction de l’organisation. Toutefois, ces études se concentrent sur le niveau organisationnel et mettent peu en évidence les conséquences de ces tensions dans le travail de recherche et dans l’activité de management du manager hiérarchique.

1.3. Manager la science et manager les scientifiques

Afin de produire du savoir scientifique et de nouveaux produits, la science est organisée, managée. Toutefois, malgré la spécificité du management des chercheurs, l’organisation, le fonctionnement et le management des laboratoires de recherche en science dure ainsi que la relation de travail entre le chercheur et son manager sont encore peu étudiées en sciences de gestion. En s’appuyant sur les tensions et contraintes analysées notamment par Kornhauser (1962), il est possible de mettre en évidence les limites de la littérature en termes de management des chercheurs.

Concernant le management de la science dans sa dimension de production de savoir scientifique, il s’agit de prendre en compte le fait que l’activité de laboratoire est très particulière, tant par son déroulement quotidien que son histoire (Bourdieu, 1976; Kornhauser, 1962; Kuhn, 1996; Latour et al., 2013; Merton, 1973; Shapin, 2008; Vinck, 1995; Whitley, 2000). Ces particularités sont dues à des “matrices disciplinaires”, concept proposé par l’historien des sciences T.S. Kuhn. Elles sont présentes à tout moment dans la communauté scientifique mais rarement explicitées (Kuhn, 1996; Vinck, 2007). Ces matrices regroupent tous les éléments qui structurent la production de savoir scientifique, donc tout ce qu’on peut regrouper sous le terme de « travail scientifique » : les généralisations symboliques, les paradigmes métaphysiques ou pratiques, les méthodes, les valeurs, etc. Toutefois, les études sur la science n’étudient en général pas les directeurs de laboratoire dans la recherche publique comme des managers de proximité : la place des directeurs de laboratoires ou directeurs de recherche n’est très souvent étudiée que pour son poids dans la production finale (la prédominance de leurs paradigmes scientifiques, leurs réseaux…) (Bourdieu, 1976; Shinn, 1988), comme si le rôle d’un manager dans le cadre de la science se résumait à des questions épistémologiques.

En ce qui concerne la gestion des chercheurs en R&D, le rôle du manager reste sous- exploré malgré les tensions entre experts et managers qui appartiennent à deux "guildes professionnelles" différentes (Mudambi & Swift, 2009). Le manager de R&D reste un "OGNI"

(Objet de Gestion Non Identifié) (Malleval & Falcoz, 2013) dont le rôle navigue entre expertise et management classique. Cela remonte au milieu du 20e siècle, lorsque les chercheurs ont commencé à être promus gestionnaires afin de reconnaître leur travail en tant que scientifiques (Shepard, 1958). Experts et managers apparaissent donc responsables de la production scientifique et technique, ce qui pose alors la question de la gestion de l’activité.

Par ailleurs, l’organisation par gestion de projets n’est pas sans conséquence en termes de travail des chercheurs et de GRH. Sur ce premier point, les métiers ou expertises sont placés dans une configuration où ils doivent expliciter leur point de vue dans le temps qui est celui du projet et négocier. Comme le développent Asquin, Garel et Picq (2007), le projet peut alors déstabiliser l’expert dans son identité professionnelle. De plus, la cohérence entre missions et

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6 projets ou encore le reclassement des équipes à la fin du projet (Asquin et al., 2007; Midler, 2008) déjà mentionnés sont autant de nouveaux enjeux de management de l’activité mais également des chercheurs.

Concernant l’autonomie, la littérature sur le management des professionnels place leur autonomie dans leur travail comme élément central de leur productivité , donc comme « bonne manière » de les manager (Drucker, 1999; Hourquet & Roger, 2005; Thévenet, 2006). Ainsi, les organisations professionnelles au sens de Mintzberg (1982) voient leurs travailleurs bénéficier d’une large autonomie. Poser que l’autonomie est au centre de l’organisation du travail de ces populations entraîne toutefois des ambiguïtés quant à la place concrète du management de l’activité. En effet, le terme d’autonomie recouvre des dimensions variées et très larges, notamment un aspect proche de l’indépendance. De fait, les professionnels tendront à défendre leur autonomie comme une indépendance, notamment dans la confrontation de leur champ à d’autres champs (Abbott, 2010). Cela interroge la place du management dans les organisations de professionnels (Ackroyd et al., 2008). Le cas de la recherche scientifique est le paroxysme de cette situation : l’activité de laboratoire est très particulière et la recherche publique, en tant que champ, s’inscrit dans une longue histoire de défense de ses frontières et de son autonomie (Bourdieu, 1976; Shapin, 2008).

La littérature pointe deux dimensions pouvant encadrer ou restreindre l’autonomie allouée aux chercheurs. Tout d’abord, les laboratoires de R&D ont la spécificité de devoir articuler l’autonomie consubstantielle au métier – et défendue par les professionnels – avec la volonté de l’entreprise de diriger les sujets de recherche tout autant que l’organisation du travail (Gastaldi & Gilbert, 2006; Kornhauser, 1962; Roger, 1991).

Ensuite, les personnes d’une équipe et l’activité d’un laboratoire sont généralement placées sous la supervision d’un responsable, y compris dans le cas de la recherche publique.

Le titre et les modes de nomination de ce responsable d’équipe peuvent varier selon les institutions et les époques (Castagnos & Echevin, 1981; Louvel, 2007; Tapie, 2006), mais il peut être amené de fait à un rôle de manager de proximité dans le cadre d’une activité d’expertise et de professionnels. C’est particulièrement vrai dans le contexte de l’évolution des contraintes et enjeux de l’activité en sciences dures (Louvel & Musselin, 2015) et c’est aussi sensible à travers les dérives des situations de « mandarinat » (Barrier, 2011; Pourmir, 1998)..

Enfin, les chercheurs étant des salariés de l’organisation, leur management implique également la prise en compte de leur motivation et fidélisation par exemple. Or plusieurs études mettent en évidence une inadéquation des méthodes et outils du management traditionnel pour impliquer, motiver (Allen & Katz, 1986), fidéliser les professionnels (Kornhauser, 1962;

Tarondeau, 2003), ou encore reconnaître les chercheurs. De plus, les différentes contraintes qui peuvent peser sur la recherche ou être imposées aux chercheurs doivent être prises en compte dans leur travail et un équilibre fin semble être à trouver entre la stimulation ou la démotivation que ces contraintes peuvent produire. Une trop forte pression exercée sur les chercheurs est négative pour l’innovation et la productivité (Andrews & Farris, 1972). Le pilotage de l’activité doit donc également prendre en compte le management des personnes.

En conclusion de cette revue de littérature, nous pouvons voir que le contexte de production du savoir scientifique et technique évolue de manière importante ces dernières ce

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7 qui amène à questionner le management de la recherche dans les organisations, notamment centres publics et privés, aujourd’hui. Par ailleurs, alors que de nombreuses contraintes entourent la production scientifique et le management des chercheurs, cette revue de littérature met en évidence certaines limites, à savoir le niveau d’analyse organisationnel des études tant en sociologie des sciences qu’en sciences de gestion. Afin d’adresser cette limite, cet article propose l’étude du management des chercheurs et de la science au niveau micro, à travers le rôle du manager.

La question de recherche est donc : quel est le rôle des managers dans le management des chercheurs et de la recherche scientifique ?

2. M

ETHODOLOGIE

2.1. Cas

Afin de répondre à cette question, nous avons mené une étude qualitative comparée (Vigour, 2005) entre un cas du secteur public et un cas du secteur privé. Alors même que les évolutions récentes des contextes de recherche mettent en évidence une porosité forte entre les deux secteurs, comparer ces cas est donc pertinent pour comprendre le rôle des managers et du management des chercheurs et de la recherche scientifique.

Notre premier cas est celui d'une grande agence française de recherche publique, PublicPower (2P). Historiquement, ses services étaient dédiés aux politiques publiques telles que la recherche nucléaire. Les données collectées proviennent des différents laboratoires, certains sont plus centrés sur la recherche fondamentale, tandis que d'autres sont centrés sur la recherche appliquée. Ces laboratoires sont représentatifs des différentes unités organisationnelles de recherche (départements, instituts, etc.) qui emploient au total 2 500 personnes.

Notre deuxième cas concerne un centre de R&D privé, Lux, dans une société industrielle française, qui a maintenant diversifié ses produits à partir de son cœur de métier historique. Lux emploie 500 personnes. Ses activités se caractérisent par une recherche en amont en partenariat avec des organismes publics et une recherche appliquée en association avec les opérations.

Dans les deux cas, les métiers sont les mêmes - scientifiques, ingénieurs et techniciens - et relèvent des mêmes domaines techniques et scientifiques dans certains cas, par exemple la physique, la chimie, les mathématiques. Certains chercheurs du secteur privé ont une expérience dans le secteur public, tandis que certains d'entre eux ont même travaillé dans l'organisme de recherche étudié dans cet article avant d'obtenir leur emploi dans l'entreprise privée. Par conséquent, la principale différence entre les deux cas est le secteur auquel ils appartiennent : privé ou public. La méthodologie utilisée dans ce document vise à mettre en évidence les similitudes et les différences en matière de gestion afin d'identifier ses principes généraux.

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2.2. Collecte de données et analyse

Cette étude, fondée sur une épistémologie interprétative (Denzin, 2001), est constituée d'un corpus de 129 entretiens semi-structurés, dont 73 ont été réalisés dans le secteur public et 56 dans le secteur privé. Dans les deux cas, des directeurs, des responsables des ressources humaines, du personnel scientifique et technique ont été interrogés, comme le montre le tableau 1. La diversité des fonctions dans chaque cas montre la spécificité de l'organisation du travail et de l'homme dans chaque activité.

Grâce à l'implication à long terme des chercheurs sur le terrain - contrat de trois ans dans chacun d’entre eux - les données collectées comprennent également un journal ethnographique (Beaud & Weber, 2010) - 35 pages pour 2P et 160 pages pour Lux - et des données internes telles que les politiques RH, les organigrammes, les informations stratégiques et opérationnelles, etc.

Tous les entretiens ont été retranscrits et codés dans NVivo 12. Nous avons utilisé des données qualitatives pour élaborer de manière inductive une théorie fondée (Glaser & Strauss, 2017) et le codage a été suivi selon la méthodologie de Gioia (2013).

Afin de comparer les différents cas et conformément aux recommandations de la méthode comparative (Vigour, 2005), nous avons produit des tableaux comparatifs intermédiaires pour chacun des codes de second ordre.

Tableau 1 : Répartition des entretiens dans les deux centres

3. R

ESULTATS

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3.1. 2P : Manger les objectifs et les chercheurs, pas la science

3.1.1. Institution

2P est un centre de recherche publique français de grande taille, historiquement en charge de répondre aux attentes de l'État et des politiques publiques en matière de recherche scientifique. Les salariés n’y ont pas le statut de fonctionnaire, mais bénéficient, malgré cela, d’une sécurité de l’emploi et d’une autonomie de recherche relative. L’organisme recourt de plus en plus à des formes de travail précaires – doctorats et post-doctorats, contrats de recherche – liées au financement par projet. Les chercheurs n’ont pas de charge d’enseignement. Les laboratoires se composent de chercheurs – docteurs et HDR –, d’ingénieurs de recherche pouvant ou non avoir des fonctions différentes des chercheurs, de techniciens de laboratoires et de jeunes chercheurs – doctorants, post-doctorants et stagiaires. Les proportions des différents statuts varient selon la nature de l’activité du laboratoire : la conduite d’expérimentations implique davantage d’ingénieurs et de techniciens dans les effectifs.

Les activités de recherche de l’organisme sont diversifiées : de nombreuses disciplines différentes, certains de recherche fondamentale et d’autres de recherche appliquée. Les sources de financements de l’institution et des différents laboratoires étudiés sont diverses : subventions publiques directes, fonds de l’ANR, fonds de l’Europe (H2020, ERC, etc.), partenariats industriels (majoritaire pour un quart de l’organisme), etc. Les chercheurs expérimentés et directeurs de Laboratoire ont une importante mission de recherche de financements, en sus de la conduite de leurs recherches.

L’organisme est en cela relativement atypique : s’il est indéniablement inscrit dans la recherche publique, il a un fonctionnement plus structuré et plus structurant pour les équipes de recherche que ne peut l’être l’université française. Toutefois, il a en réalité peu de niveaux administratifs pour un organisme de plus de 20 000 personnes. Il possède seulement 7 niveaux hiérarchiques de son Administrateur Général au chercheur dans son laboratoire : AG / Direction / Institut / Département / Service / Laboratoire / Chercheur. Les équipes sont de taille assez importante, avec en général 10 à 25 personnes pour les laboratoires de recherche. Malgré la lourdeur qu’elle peut avoir, il y a une volonté organisationnelle que la structure hiérarchique et administrative soit un soutien plus qu’une contrainte, comme le résume ce chercheur :

« l’institution, c’est quand même une machine assez efficace quand on a besoin de monter des projets, on a quand même des choses qui sont assez efficace au niveau, bah, on va, je sais que si j’ai besoin de faire une fiche financière je peux obtenir de l’aide sans problème, quoi. Il y a un certain nombre de choses où on peut avoir quand même pas mal d’aide sans problème »

3.1.2. Science et financement

Une politique scientifique est décidée au niveau de l’organisation et les recherches doivent entrer dans ses axes ou missions.

Les équipes de recherche ont d’importantes marges de manœuvre malgré des axes imposés par 2P. L’autonomie dans le travail de recherche se développe naturellement au fil de l’acquisition de compétences (stagiaire, doctorant, post-doctorant, jeune chercheur, directeur

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10 de recherche…). Lorsque la carrière d’un chercheur est assez avancée, la capacité d’obtenir des financements sur ses recherches propres est une garantie d’autonomie pour lui dans la fixation d’objectifs de recherche. Toutefois ces objectifs tendent à être définis par l’obtention de financements. Ce qui réussit à être financé devient de facto l’objectif scientifique.

Il y a une forme d’« invisibilité » du financement interne à savoir les salaires des permanents, les locaux et les fluides. Lorsqu’il est visible (ressources de fonctionnement), il est associé à des axes programmatiques. Les chercheurs ont l’obligation d’aller chercher des financements externes et gagnent ainsi une significative autonomie d’orientation des sujets.

Poussé à l'extrême, un directeur adjoint explique que cette autonomie d’orientation peut être très grande grâce aux financements acquis :

« à partir du moment où les chercheurs arrivent à avoir un financement pour les faire, il n’y a pas de raison qu’ils ne puissent pas le faire. Parce qu’on reste quand même dans un fonctionnement assez libre. Le chercheur ramène de l’argent pour financer son laboratoire…

Oui certes, il y a des thématiques et des directives, mais après on est quand même assez libre. » Du fait des restrictions de budget étatique pour la recherche, 2P n’est plus en mesure de financer en interne les sujets émergents, ce qui donne l’impression qu’il les « refuse ». Les

« grands projets » ont des financements propres, négociés politiquement, qui s’imposent aux chercheurs et imposent en conséquence les sujets. Le cas échéant, un écart entre les exigences d’objectifs et la réalité des ressources affectées est utilisé par les managers pour re-négocier les objectifs. L’instabilité des financements nécessite une vision de moyen-terme, qui articule cohérence des programmes et efforts avec le nécessaire et incertain renouvellement scientifique - et ce tant pour du financement « académique » qu’« industriel ».

Pour faire face à ces contraintes, le management met en place des mécaniques de solidarité financière. D’ailleurs, des équipes de taille importantes (15-20) garantissent la possibilité de mettre en place des mécaniques de solidarité financière entre sujets ou thématiques, là où des petites équipes peuvent perdre tous leurs financements d’un coup.

L’ensemble des points précédents est dû à une prise en compte historique et précoce des problématiques de financement, et à leur gestion par la technostructure associée à une forte responsabilisation des chercheurs.

3.1.3. Managers et management

Nous constatons chez 2P une très large autonomie opérationnelle des équipes : organisation du travail au quotidien ou sur un plus long terme, décision dans la manière de procéder, gestion du temps, par exemple gestion des deadlines. Tout au plus, dans le cadre de projets en partenariat avec l’extérieur, les chercheurs doivent effectuer des reportings assez réguliers. Ils ont toutefois souvent le soutien de la technostructure ou du management afin de les décharger de ces tâches « non scientifiques ». Une fonction de « chef de projet » peut même parfois exister pour décharger le plus possible les chercheurs de cette charge, et notamment leur éviter d’être en contact direct avec les partenaires externes. Lorsque les équipes sont plus petites, le chef de laboratoire est en général plus impliqué dans le fonctionnement scientifique

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11 et technique quotidien de l’équipe (car il est alors directeur de recherche direct de plusieurs des sujets).

L’implication du manager dans l’opérationnel scientifique dépend totalement de sa légitimité scientifique et technique. En effet, il y a une transmission du savoir et de la compétence technique qui suit la légitimité des statuts (chercheur sénior jusqu’à stagiaire…).

Le manager de proximité chez 2P est en général directeur de recherche, il est donc légitime dans son rôle de transmission. Les managers au-dessus ne le sont plus (même s’ils l’ont tous été) et donc ne s’impliquent pas dans l’opérationnel scientifique. Toutefois, globalement tout le monde peut avoir une maîtrise technique, une astuce, à transmettre, tant qu’il le démontre, quel que soit son statut.

Cette large autonomie (opérationnelle et sujets) des équipes est laissée par le manager aux chercheurs, ce qu’ils apprécient. Il est fréquemment exprimé que le manager essaie de maintenir un espace de liberté pour les chercheurs pour qu’ils puissent travailler sur des sujets qui les intéressent (mais toujours dans les axes de la politique scientifique) et qu’ils se fassent plaisir.

Concernant la gestion des personnes, elle n’est pas réellement dissociée (voire dissociable) de la gestion de la science, comme l’explique ce chef de laboratoire :

« Parce qu'en fait la gestion des chercheurs c'est la gestion des égos. Les chercheurs ont, pas tous, mais beaucoup ont des égos assez développés, et beaucoup pensent que leur recherche est vraiment très importante et qu’évidemment c'est la recherche la plus importante du monde entier et de l'univers. Et donc leur dire tu sais ce que tu fais en ce moment il faudrait peut-être que tu arrêtes un petit peu pour consacrer un petit peu de tes forces à si d'autres, certaines choses que moi patron de ton unité j’estime être plus importantes, le chercheur lambda va te dire non non, moi je ne suis pas d'accord, je pense que c'est ce que je fais moi qui est vachement bien. »

En conséquence ou en parallèle de cela, le management n’est pas directif en termes de carrière et motivation (plutôt implicite d’ailleurs) et le manager a un rôle de facilitateur. Il cherche à fluidifier les rouages, il fait confiance à son équipe. Le manager a une mission d’interface avec le formalisme du système (carrière, avancements, revues, etc…).

Le chef de laboratoire doit trouver les ressources en matière de financement ce qui a des conséquences sur ses ressources humaines, et crée également des tensions entre les chefs et des comportements particuliers (l’équipe comme pré-carré). Cela l’oblige aussi à avoir une vision à plus long terme des enjeux scientifique que les chercheurs qui ont “le nez dans leur sujet”. Ils ont donc un vrai rôle de prévision des ressources, rôle difficile du fait des aléas de la recherche.

Ils doivent « se battre » et négocier pour avoir les ressources (financières donc humaines).

Cette vision scientifique de moyen terme est explicitement une des missions des chefs de laboratoire, donc les managers de proximité, là où les niveaux hiérarchiques supérieurs s’occupent davantage de fonctionnement, de consolidation organisationnelle et budgétaire, et moins de science - excepté pour les grands projets (inter)nationaux.

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3.2. Lux : des managers pour manager la science et les chercheurs, pas les objectifs

3.2.1. Institution et financements

Le second cas est constitué d’un centre de R&D français de 500 personnes, en CDI. Le financement « invisible » (salaires des permanents, locaux et fluides…) semble présent de manière implicite dans les opinions, avec l’intériorisation d’un « devoir de subordination » qu’on peut relier à cela. Les cadres – ingénieurs et docteurs – représentent deux tiers de cette population. Les départements de la R&D sont organisés par domaines scientifiques et les équipes possèdent une organisation hiérarchique classique, et non pas une organisation de type laboratoire.

Plusieurs types de recherche y sont pratiqués : des recherches amont sont effectuées dans certains services et donnent lieu à des publications, et communications scientifiques, brevets et communications grand public. Cette recherche s’appuie sur des partenariats avec des organismes de recherche publics et les universités. La recherche appliquée et le développement restent les activités majoritaires, alors que et le développement de produits s’effectue en mode projet. Certains chercheurs sont toutefois reconnus dans le milieu scientifique académique (publications d’articles …).

Les équipes comprennent en général 5 à 10 personnes. Certains managers ont seulement 1 ou 2 collaborateurs et sont considérés comme des managers à part entière (nomination officielle, accès à des réunions statutaires etc). De grosses équipes, plus de 15 personnes, sont considérées comme difficilement gérables. L’organisation est pyramidale et très hiérarchique.

Le nombre important de niveaux hiérarchiques engendre des difficultés à faire transiter l’information à la fois descendante et remontante, et parfois à obtenir des décisions (ou du moins des décisions rapides), comme le résume ce chercheur :

« ici entre [Manager] et [Directeur R&D] y’a peut-être 6 niveaux, ‘fin je sais pas [il compte]…ouais y’a 4 niveaux donc euh…tout de suite ça devient plus compliqué et c’est là où l’histoire de niveaux, à qui tu parles, participer à la réunion ou pas, être au courant.. ».

Le travail est également très organisé et structuré par des processus - programmes, projets, comités - ce qui implique des étapes de validation qui prennent du temps et des ressources.

L’organisation cherche à corriger les lourdeurs causées par l’organisation par plus d’organisation menant à des rôles qu’un manager qualifie de « contrôleurs de contrôleurs ».

3.2.2. Science

Les objectifs scientifiques sont fixés par le management et en particulier le comité de direction malgré les limites que ce mode de décision puisse comporter : appétence pour le risque par exemple ou intérêts technologiques. Une réorganisation a mené à une organisation selon des roadmaps, c’est-à-dire des feuilles de route technologiques et celle-ci a été décidée par le directeur de la R&D.

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13 Ces objectifs scientifiques peuvent parfois être co-construits avec des experts - et cette co- construction est un enjeu de négociation ou de pouvoir. Ce processus de décision est vu et vécu comme top-down même si une remontée bottom-up est possible dans certains cas et grâce à certaines pratiques ou initiatives. Un chercheur résume ainsi :

« Donc, c’est en plus né d’une réflexion à deux, on avait porté le sujet jusqu’à [Directeur de département] et il nous a dit « Allez-y, ouvrez le programme ». Bon, mais il s’avère que entre- temps (Rire) les ressources sont parties dans les Roadmaps et que le programme, il est en stand- by. »

De plus, la maîtrise de l’organisation et de ses contraintes et lourdeurs permet certains contournements pour regagner de l’autonomie. Il est possible pour les chercheurs de préserver une certaine « invisibilité », et donc liberté, et de mettre en place des stratégies de contournement du pouvoir hiérarchique quand celui-ci paraît inadapté. C’est, paradoxalement, le management qui aurait le pouvoir d’aller défendre des sujets émergents auprès de la hiérarchie.

Les managers ont un rôle de relais de l’information et des sujets qui viennent de la hiérarchie et du top management. La priorisation des ressources et les choix faits sur les sujets (arrêt d’un sujet par exemple) sont acceptés par les chercheurs dès lors qu’ils sont expliqués et compris tant d’un point de vue technique que stratégique. Or cette explication manque souvent.

Les managers ont un pouvoir assez important sur la planification et l’attribution des ressources.

Lorsque des sujets ne sont pas stratégiques ils cessent de se voir affectés des ressources (notamment humaines) et « meurent » faute de ressources, tant financières qu’humaines. Au sein de Lux, il existe le cas particulier des « walking deads » qui sont des sujets dont la portée stratégique évolue et pour lesquels des investissements en temps et en ressources, humaines et financières, sont nécessaires pour les développer du fait de leur nature disruptive.

Ces blocages par le financement font craindre aux équipes de recherche une difficulté au renouvellement scientifique.

En théorie, du temps est laissé aux chercheurs pour qu’ils puissent travailler en autonomie et sur des sujets non priorisés par l’organisation. Dans les faits, l’organisation est très peu prescriptive vis-à-vis de cette autonomie. En matière de travail réel, les chercheurs disposent ou s’octroient cette liberté - cela peut aller jusqu’à un véritable « travail en perruque ». Elle reste toutefois mineure. Pour essayer de la développer et ce, malgré un soutien faible des managers, Lux a décidé la mise en place d’organisations alternatives littéralement sans managers, des communautés de pratiques, appelées Communautés Techniques (CT) pour donner de la liberté d’objectif et du temps. Dans les faits, cette organisation s’avère peu efficace.

La trop grande liberté sans objectif clair, le fait que les membres des CT appartiennent au même service, le manque de temps pris par les chercheurs et le manque de pilotage des CT sont les principales raisons du peu d’activité, résultat produit et visibilité des CT. Toutefois, dans la CT qui fonctionne bien, les experts qui en font partie apprécient cette liberté donnée.

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3.2.3. Managers et management

Nous constatons une tension permanente sur la place des managers dans les décisions scientifiques : entre autonomie de fait, autonomie de prescription et contrôle scientifique.

Certains managers laissent consciemment de l’autonomie à leurs équipes, en particulier une autonomie opérationnelle. Toutefois, même celle-là peut être remise en question lorsque le manager est expert et ne gère qu’une petite équipe, comme l’explique clairement ce manager :

« moi j'ai 3-4 personnes, d'autres personnes ont 15, il fait plus des points d'activité ou des entretiens annuels. On a moins le temps de s'asseoir et de continuer à réfléchir ». En effet, une distinction est exprimée entre le manager scientifique, possible avec de petites équipes, et le manager non scientifique, dans les grandes équipes ; mais la tension entre les deux ne semble pas vraiment résolue par l’organisation.

Les chercheurs souhaitent souvent avoir un manager qui puisse comprendre les contraintes et aléas de la recherche - et ils confèrent alors davantage de légitimité à leur manager. Ils souhaitent également que les managers puissent les aider et prendre les bonnes décisions au regard de la technique. Mais les managers ayant acquis leur légitimité sur la technique peuvent avoir tendance à trop rentrer dans le détail technique, à tous les niveaux. Ce micro-management technique se retrouve également au niveau top management.

Paradoxalement, il est admis que ça n’est pas le rôle d’un manager, et que ça peut même être un problème s’il s’impose techniquement à ses équipes. Il y a donc là encore une tension qui ne semble pas résolue par l’organisation.

Le manager étant technique et les équipes petites, les managers ont tendance à moins considérer le rôle de gestion des personnes. Ils préfèrent régler les problèmes techniques que les problèmes humains. Ils sont peu formés et peu accompagnés au management des personnes.

Ils ont toutefois souvent un intérêt marqué et se posent beaucoup de questions sur la carrière de leur collaborateur et la motivation, même si cela semble être un positionnement individuel, pas forcément un process organisationnel clair. Ils mettent aussi en avant un manque d’outils pour évaluer leurs collaborateurs et leur proposer une carrière. Cela se retrouve également pour la reconnaissance : les managers ont peu de marge de manœuvre financière (pour les augmentations par exemple). Du fait de ce peu de méthodes ou d’outils, les managers sont obligés de développer une compétence managériale personnelle pour y arriver.

4. D

ISCUSSION

4.1. Manager la science et manager les chercheurs

Le management de la science dans les organisations ne semble pas dépendre directement de la nature publique ou privée de l’institution. En effet, si les deux cas étudiés présentent des différences significatives, elles sont dues à des caractéristiques qu’on ne saurait réduire au statut. En effet, certains des grands projets publics dans lesquels est engagée 2P demandent une coordination de l’action collective équivalente, si ce n’est supérieure aux enjeux d’une firme industrielle ; certains laboratoires engagés dans des contrats industriels présentent les mêmes enjeux de contrôle et autonomie que chez Lux; et à l’inverse l’entité R&D Lux étudiée ici est

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15 d’une taille suffisante et suffisamment séparée de l'activité industrielle pour bénéficier d’une autonomie significative dans son fonctionnement.

Les différences entre les deux situations étudiées semblent donc dépendre notamment de situations organisationnelles. Deux axes semblent distinguer les deux cas : les modalités de financement (et la place des chercheurs dans ces modalités), et la taille des équipes.

Chez 2P, les financements internes sont insuffisants ce qui nécessite un financement

« par projets », que ce soit via des agences de financement publiques ou des partenariats industriels. Cela conduit à un financement fragmenté dont les enjeux et les échéances sont indissociables des décisions scientifiques. Par ailleurs, les équipes sont de tailles relativement importantes. Cette double situation conduit les managers à ne pas s’impliquer dans la conduite opérationnelle des recherches, et même à peu s’impliquer dans les décisions d’orientation scientifique. Par contre, comme la capacité de financement d’un projet ou d’un sujet scientifique devient un critère de sa viabilité, on constate deux situations possibles : si le chercheur a par lui-même obtenu le financement, il acquiert en cela une relative autonomie par rapport à son management. Si à l’inverse le financement a été négocié ou obtenu par le management, le chercheur doit suivre les axes scientifiques qui lui sont en conséquence imposés.

Chez Lux, le financement est une question mineure, même s’il apparaît parfois comme contraignant en termes de ressources humaines. Le financement est garanti par l’organisation, ce qui en contrepartie donne tout pouvoir à la ligne hiérarchique sur la maîtrise de sujets.

Comme par ailleurs les équipes sont de taille restreinte, les managers se retrouvent dans une large mesure à s’impliquer dans la gestion de la technique et de l’orientation des sujets, entraînant en cela des tensions avec leurs chercheurs. Ces derniers se retrouvent privés d’autonomie scientifique et cherchent à devenir managers afin de l’acquérir.

Manager des chercheurs n’est donc pas exactement la même chose que manager la recherche scientifique.

D’une part, nos résultats semblent montrer que comme l’indique la littérature sur les professionnels, les chercheurs n’ont pas besoin d’être managés (Mintzberg, 1998). Ils ont une expertise technique qui leur permet d’avoir une autonomie opérationnelle totale - et ils s’en réclament. Le contrôle est donc particulièrement délicat. Par ailleurs, et contrairement à ce que peut suggérer une partie de la littérature (Kornhauser, 1962), ils semblent en général alignés avec leur organisation, qu’elle soit de recherche publique ou de R&D industrielle. Dans les deux cas, les chercheurs adhèrent aux valeurs et comprennent les contraintes de l’organisation qu’ils ont choisie.

D’autre part, les différences entre nos deux cas montrent que dans une large mesure, le management de la recherche scientifique consiste essentiellement en de l’affectation de ressources. Si les ressources sont disponibles, c’est alors les critères de leur affectation qui est l’acte de management de la recherche. Toutefois, la conjonction de ces deux dimensions, management des chercheurs et management de la science, crée des tensions, puisqu’elle peut conduire des chercheurs autonomes scientifiquement à se voir privés de financement et donc

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16 privée de fait de leur autonomie. Le rôle de managers de chercheur devient donc alors, de fait, de gérer ces tensions et contradictions. Cela passe parfois par le pilotage des orientations scientifiques, toujours par la gestion de la jonction entre les enjeux scientifiques et les enjeux organisationnels, et parfois par la gestion des personnes.

Nos résultats nous ont amené à distinguer trois rôles du manager de chercheurs dans les organisations : rôle de management de la science, rôle d’intégration des enjeux scientifiques à l’organisation et rôle de gestion des personnes. Dans les deux cas étudiés, ces missions managériales sont toutes trois présentes mais à des degrés différents.

Chez 2P, situation qu’on peut généraliser à une partie du secteur de la recherche publique (mais probablement pas à l’université, à cause de ses missions d’enseignement), le manager d’équipe scientifique manage parfois la science en train de se faire, mais surtout les objectifs de la science. Il en charge d’orienter les objectifs scientifiques à court et moyen terme, et notamment d'assurer par cette orientation les enjeux de financements. Par ailleurs, le management par la gestion de projet est dans le cas de 2P bien perçu, car considéré comme une ressource face aux contraintes externes.

En revanche, le manager ne manage pas l’humain. Si cette situation permet la production d’une science de qualité tout en défendant sa pérennité elle pose des problèmes. Tout d’abord, beaucoup de temps est consacré à la recherche de financement au lieu de faire de la recherche.

Ensuite, on peut constater des problèmes de reconnaissance du travail (investissement, temps).

A l’inverse, chez Lux, situation qu’on peut supposer généralisable à une partie de la R&D privée (Kornhauser, 1962), le management est en charge de la définition des objectifs scientifiques, qui s’imposent ensuite aux chercheurs. Les outils de gestion de projet sont alors perçus comme une contrainte, car utilisés pour imposer les enjeux internes. Par ailleurs, les managers n’ont pas de recherche de financement à faire et comme ils sont en charge de petites équipes d’un domaine dont ils sont en général experts, ils continuent à avoir un important rôle de management de l’activité scientifique quotidienne. Ils sont par contre désemparés face au management des personnes, notamment car ils se retrouvent à devoir gérer une tension causée par leur propre pratique managériale centrée sur la pratique scientifique. En effet, la situation entraîne une tension à propos de la réalisation de la science entre les managers et les chercheurs, qui en sus de se voir dépossédés de l’orientation scientifique globale, se voient dépossédés aussi des décisions opérationnelles et scientifiques pour atteindre ces objectifs. Le rôle de management des personnes est également peu favorisé par le fait que les équipes sont petites.

4.2. Contributions managériales

Cette étude nous permet également de proposer différentes recommandations managériales.

Au niveau organisationnel, il s’agit de permettre aux chercheurs et managers d’avoir non plus uniquement une autonomie opérationnelle mais également une autonomie stratégique. Cette recommandation se décline en plusieurs propositions : libérer les chercheurs de la recherche de

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17 financement ce qui peut être mis en œuvre en renforçant les aides dans le public au niveau de l’Etat ; dédier des salariés à la recherche de financement et la gestion de projet.

Ensuite, dans le public mais surtout dans le privé, l’autonomie stratégique peut être développée en donnant du temps aux chercheurs pour faire de la recherche hors orientations business. Ce temps doit être sacralisé et non une simple intention.

De plus, nous pensons qu’il est nécessaire que les managers mettent en avant les trois rôles que nous avons distingués et cela de manière équilibrée. Cet équilibre est favorisé lorsque les équipes sont de taille moyenne et qu’elles bénéficient d’autonomie stratégique et opérationnelle. Dans ce cadre, les managers pourront alors réellement jouer leur rôle de gestion des personnes en matière d’accompagnement et de reconnaissance notamment.

Conclusion

Alors que la littérature classique en sociologie des sciences, des professions et en sciences de gestion sur les chercheurs a mis en évidence les tensions existantes dans les organisations de recherche scientifique tant publiques que privées, celles-ci ont principalement été étudiées au niveau organisationnel. Ce papier a, quant à lui, cherché à analyser ces tensions au niveau du management et plus particulièrement ses conséquences dans le rôle du manager.

Nous avons ainsi mis en évidence que manager la science n’est pas manager les chercheurs et que le rôle du manager vise précisément à gérer les tensions, paradoxes et contradictions de l’organisation et peu de manager l’activité de recherche scientifique.

Une des limites de cette étude est qu’elle se place dans le cadre d’organisations hiérarchiques. Afin de compléter cette question du management de la science et des chercheurs, il serait nécessaire de la compléter par l’étude des enseignants-chercheurs dans les universités ou au CNRS, en France (Castagnos & Echevin, 1981).

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