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RESILIENCE DES PRODUCTEURS DE COTON FACE AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES DANS LE NORD DE LA COTE D’IVOIRE : CAS DES PRODUCTEURS DE NAPIELEODOUGOUpp. 122-140.

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Université Péléforo Gon Coulibaly de Korhogo sinanadaman@yahoo.fr

Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, n° 21 - 2016

RESILIENCE DES PRODUCTEURS DE COTON FACE AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES DANS LE NORD DE LA COTE D’IVOIRE : CAS DES PRODUCTEURS DE NAPIELEODOUGOU

RESUME

Depuis quelques décennies, des mutations profondes liées aux changements climatiques affectent les différents secteurs d’activités agricoles dans la région de Korhogo, en particulier le coton. En effet, les pluies tardives ou précoces, sécheresse prolongée, sont autant de facteurs climatiques qui influent à la fois sur les comportements agricoles. Le secteur de l’agriculture fortement tributaire de stimuli climatiques se trouve bouleversé. Et les paysans, désorientés et désemparés, n’ont plus de repères temporels d’activités agricoles.

Dans cette logique, les producteurs de coton de ladite zone tentent bien que mal de s’adapter en développant diverses stratégies qui leur sont propres (provocation de pluies à travers des rituels, diversification des cultures, modification du calendrier des semis) faisant aussi recours aux moyens d’alternatives offertes par les progrès techniques c’est-à-dire les semis sélectionnés. Le recours d’une part aux variétés nouvelles dites sélectionnées adaptées à ces aléas climatiques et, d’autre part de l’usage d’intrants agrochimiques pour accompagner la production constitue leur seul espoir dans cet environnement changeant.

En conséquence, la production et la productivité des systèmes agricoles dans une optique durable sont devenues un réel défi pour les acteurs du secteur. Notre préoccupation majeure dans cette étude est de chercher à comprendre les stratégies d’adaptation adoptées par les producteurs de coton de Napiéléodougou face au changement climatique.

Mots-clés : Résilience, producteur de coton, changements climatiques, perception paysanne.

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ABSTRACT

Recent decades, profound changes related to climate change affect different sectors of agricultural activities in the region of Korhogo, in private cotton. Indeed, not mastery of agricultural practices calendar of the late rains early are prolonged dry factoring climate who flock to the liver on agricultural behaviors. The agriculture sector strongly stimuli tributary climate is upset and peasants disoriented and the forsaken have, over time markers of agricultural activities.

In this sense, the area of cotton producers attempt well said name as evil adapting by developing various strategies who their are clean (provoking rains travers rituals, crop diversification, changing the semifinals schedule ) making use of the alternative media techniques.

Progress the use of part of june in new varieties tell selected adapted climate hazards an system and, another part of using agrochemical inputs production accompany their only hope formed in this changing environment.

Consequently, the production and productivity of agricultural systems in a sustainable are optical not become real challenge for actors in the sector. However, the techniques of use, perceived as solution mitigate the effects of climate change seem uncertain since groping and disturbing producers.

Keywords: Resilience, producer of cotton, climate change, peasant perception.

INTRODUCTION

Depuis quelques décennies, les scientifiques ont pu observer et mesurer de très nombreuses modifications importantes telles que la hausse de températures moyennes dans la majorité des régions, augmentation des températures des eaux de surface des océans, fonte des glaces, migration de la faune, apparition de certains végétaux dans de nouvelles régions, réduction des terres cultivables, baisse de la production alimentaire mondiale, insécurité alimentaire. Autant d’indices qui témoignent de façon indirecte qu’un changement ou une variation climatique est en cours (Chotte et Kosuth, 2015).

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Les savanes d’Afrique de l’Ouest, du Sénégal au Tchad, constituent des territoires homogènes qui, d’un point de vue écologique, sont définis par une végétation formée d’un tapis herbacé et d’une strate arbustive, résultant d’un climat à une saison des pluies et une longue saison sèche. Elles sont marquées par l’histoire de sociétés largement rurales, souvent islamisées, qui ont peuplé ces espaces en incluant des zones fortement habitées et des zones vides. Ces sociétés développant des systèmes de production variés comprenant une gamme étendue de produits agricoles, avec des conditions spécifiques liées à la pluviométrie et aux sols, dans un environnement économique plus ou moins stimulant (Faure, 2005). La Côte d’Ivoire, l’un des pays de l’Afrique de l’Ouest, n’est pas en marge de ce phénomène mondial que constitue le changement climatique.

La région Nord ou savane soudanienne, vaste zone septentrionale de la Côte d’Ivoire constitue une entité territoriale particulière. Le département de Korhogo, située dans la région du Poro n’échappe pas à la réalité de ce phénomène qui se pose avec acuité. En effet, les conséquences de ces variations climatiques se font de plus en plus ressentir dans différents secteurs d’activités (eaux, pêche, aires protégées, élevage, agriculture). Notamment, le secteur de l’agriculture fortement tributaire des stimuli climatiques se trouve énormément menacé par le changement climatique. De plus, la maîtrise du changement climatique est devenue aujourd’hui l’un des enjeux primordiaux de politique nationale et internationale compte tenu de la capacité reconnue du climat à affecter, souvent négativement, la croissance économique et la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement.

Dans cette perspective de maîtrise des effets du changement climatique sur les activités agricoles, cette étude se propose de chercher à comprendre la résilience des producteurs de coton dans la zone nord de la Côte d’Ivoire précisément dans de la localité de Napiéléodougou, afin d’atténuer et réduire les effets du changement climatique dans leurs activités quotidiennes.

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1. MÉTHODOLOGIE ET DONNEES D’ANALYSE 1.1.1 Champ de l’étude

Cette étude a porté sur les villages périphériques de la commune de Napiéléodougou située à environ 16 Km du chef-lieu de région Korhogo, à savoir Kiémou, Ladjikaha, Kékaha.

Carte du terroir : ANADER 2006

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1.1.2 La population d’étude

Le cadre sociologique de l’étude, prend en compte l’ensemble des producteurs de coton de la commune de Napiéléodougou. Il s’étend également aux responsables des structures d’encadrement des producteurs de coton à savoir: l’Agence Nationale d’Appui au Développement Rural (ANADER), Union Régionale Coopérative de Coton de la Zone des Savanes-Côte d’Ivoire (URECOS- CI), la Compagnie Ivoirienne de Coton (COIC), SECO et l’Animation Rurale de Korhogo (ARK). Tous les acteurs de ces différentes structures prodiguent des conseils aux producteurs pour mieux faire face aux aléas climatiques.

1.1.3 La recherche documentaire

Elle se réfère à la littérature existante (ouvrages, mémoires, articles, etc.) sur les changements climatiques ayant fait objet de consultation lors de cette étude et qui traitent surtout des stratégies d›adaptation développées par les producteurs de divers domaines agricoles en Côte d’Ivoire et dans la région du Poro de façon particulière. L’analyse critique des résultats issus de la recherche documentaire a permis de faire le point des connaissances antérieures en rapport avec le sujet, mais aussi d›en identifier les aspects non encore ou pas suffisamment explorés afin d’approfondir la recherche dans ce domaine du changement climatique.

1.1.4 L’échantillonnage

Le but de l›échantillonnage est de fournir suffisamment d›informations pour que les inférences concernant la population puisent être faites.

1.1.4.1 Technique de sélection des répondants

Etant donné que les producteurs sont disséminés sur un espace géographique très vaste, l’échantillonnage par boule de neige1 a été choisi. En vue de garantir la représentativité de l’échantillon

1- Echantillonnage non-probabiliste qui consiste à identifier en premier lieu un enquêté et à utiliser par la suite le réseau de connaissance de celui-ci afin d’identifier une seconde enquêté et ainsi constituer le quota d’enquêtés requis pour notre étude.

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d›enquête, il a été procédé à la réalisation d’une typologie de sélections des répondants dans la production du coton dans la zone d’étude. Par hypothèse, il est supposé que les stratégies d’adaptation mises en œuvre par les producteurs de coton face aux modifications climatiques vécues seront fonction des perceptions et réalités culturelles de ces producteurs mais aussi des structures d’encadrement qui opèrent dans ce domaine agricole. Il importait donc de tenir compte de la diversité de structures existantes au niveau des exploitations agricoles de la zone d’étude. Ainsi les répondants pour l’enquête se divisent en deux catégories qui sont : - Les producteurs des coopératives des villages de Napiéléodougou intervenant dans la

production du coton.

- Les responsables des structures d’encadrement des producteurs de coton.

Pour le choix des différents sites d’enquête, trois (03) villages ont été sélectionnés. Une (01) Coopérative par village et l’ensemble des structures d’encadrements opérant dans la zone d’étude. Les acteurs qui intéressent l’étude au niveau des organisations de producteurs sont: vieux - adultes – jeunes. Le choix de ces villages se justifie par le fait qu’ils sont bien organisés et qu’ils produisent plus que les autres.

1.1.4.2 Taille de l’échantillon

L’étude, il a recensé cinq (5) villages abritant des coopératives de producteurs de coton dans la commune de Napiéléodougou.

Ces villages sont composés de plusieurs coopératives ayant un champ d’action disséminé sur l’ensemble desdits villages et dont le nombre des producteurs adhérents n’est pas estimé à ce jour dans un registre.

Cependant, parmi les cinq (05) villages, trois (03) ont été choisis parce qu’ils cultivent en grande partie, la production de coton dans la zone d’étude à savoir environ 80% et renferment en leurs seins un grand nombre de producteurs de coton. Ainsi pour les besoins de l’étude, il a été enquêté trente (30) producteurs sur l’ensemble des trois (03) villages choisis afin d’avoir l’unité statistique requise pour

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une enquête de type quantitative. Le tableau ci-dessous présente la répartition des producteurs enquêtés par village :

Tableau 1 : Répartition de enquêtés Identification des

Villages Nombres des Producteurs Pourcentage

KEKAHA 10 33,33%

KIEMOU 10 33,33%

LADJIKAHA 10 33,33%

Total 30 100%

Source : Notre enquête, octobre- novembre 2015

1.2 La collecte des données 1.2.1 L’étape de l’enquête

Elle s’est déroulée en trois étapes de deux semaines chacune, correspondant aux trois zones d’études, Gogbala, Kiémou et Ferké 2 en plus des entretiens avec les agents forestiers. Chaque étape a été réalisée en trois phases. La première, a consisté à interroger les autorités du village, avec comme instrument de collecte, un guide d’entretien. La seconde phase, elle a permis de réaliser les entretiens avec les producteurs de coton qui se transmuent parfois en producteurs de charbon de bois. La dernière phase, a servi à interviewer les familles des productions de coton.

1.2.2 Le guide d’entretien

Cette technique a permis d’avoir auprès des responsables des structures d’encadrement et de coopératives de coton et des producteurs des informations en ce qui concerne les diverses représentations du changement climatique, ses effets négatifs et les stratégies d’adaptation mises en place.

1.2.3 La grille d’observation

Aux fins de valider ou d’invalider les informations recueillies, nous avons eu recours à l’observation directe. Les observations directes faites au sujet du processus de production, des rapports entre

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producteurs et les acteurs du développement , nous ont permis de considérer et de mettre en valeur les logiques de ces rapports et ce qui les sous-tend.

2. PRÉSENTATION ET ANALYSE DES RÉSULTATS

2.1.1 Perception paysanne des causes des changements climatiques en pays Senoufo

2.1.1.1 Une diversité de représentations liées aux changements climatiques

Etymologiquement du latin percipere, percevoir, c’est « prendre ensemble », «récolter », c’est à dire organiser des sensations en un tout signifiant. En psychologie, la perception est le processus de recueil et de traitement de l’information sensorielle. C’est une lecture de la réalité. Selon Lalande (1985), la perception est « l’acte par lequel un individu, organisant ses sensations présentes, les interprétant et les complétant par des images et des souvenirs, s’oppose un objet qu’il juge spontanément distinct de lui, réel et actuellement connu de lui». Notre perception du monde est donc finalisée et orientée en fonction des capacités de nos organes sensoriels mais aussi en fonction de nos centres d’intérêt, de nos connaissances antérieures, des normes et valeurs qui gouvernent notre société.

Le discours des enquêtés sur le changement climatique vécu montre que le changement climatique est un phénomène tout à fait naturel souvent provoqué par les actions de l’homme sur l’environnement .C’est en cela qu’un enquêté dit : «bon le changement climatique c’est un phénomène naturel ».Cette perception des changements climatiques n’est point partagée par les anciens des villages lorsqu’ils affirment ceci «si la période de pluie arrive, il faut qu’il pleuve. S’il ne pleut pas, c’est que nous sommes en fautes et les génies sont fâchés contre nous. Donc ils sont en train de nous corriger ». Ce discours révèle la perception culturelle des aléas climatiques au vu de l’attachement de ces enquêtés aux acteurs du monde invisible (génies) considérés comme responsables des changements climatiques. Selon les anciens, les paramètres comme les vents violents, l’intensité de la chaleur excessive, la durée des saisons sont devenus plus importants ces dernières années.

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Tableau 2 : Causes des modifications du climat Selon vous qu’est ce qui provoque les modifications du climat ? Étiquette de valeur Valeur Fréquence % Pourcentage

valide Pourcentage cumulé Déforestation/

industrialisation 1,00 10 33,33 33,33 33,33

remise en cause des valeurs tradition- nelles (coutumes, mœurs, lieux sacrés…)

4,00 20 66,67 66,67 100,00

Total 30 100,0 100,0

Source : Notre enquête, octobre- novembre 2015

Le tableau ci-dessus présente les fréquences des répondants à la question « Selon vous qu’est ce qui provoque les modifications du climat ? ». À cette question, nos enquêtés ont répondu en majorité la « remise en cause des traditions, coutumes, mœurs, et lieux sacrés». Cependant, il faut souligner, la fréquence des répondants à la proposition « déforestation/industrialisation » est significative. Ce qui représente 33,33%. En effet, pour les producteurs de coton de la zone d’étude, la remise en cause des valeurs traditionnelles ainsi que la déforestation sont les causes majeures des modifications du climat dans leur localité. Les producteurs de coton sont certes conscients de la nouvelle réalité qui s›impose à eux. Cependant, les explications qu’ils nous fournissent sur les causes des variations climatiques sont variées. Ils se donnent des raisons liées majoritairement à leurs propres comportements sur la profanation des liens ancestraux et naturels.

2.1.1.2 La désacralisation des pratiques ancestrales

La croyance est le fait de tenir quelque chose pour vrai, et ceci indépendamment des preuves éventuelles de son existence, réalité ou possibilité. De nos jours, la croyance des populations est diverse.

Le catholicisme, l’islam et les nouveaux mouvements religieux ont eu une influence sur les adorations des ancêtres. Selon les propos de nos enquêtés, le non-respect de la croyance en des pierres, des arbres,

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des rivières et des eaux provoquent des bouleversements dans nos vécus quotidiens. Or cette croyance était la seule qui animait la vie des populations anciennes. Les fondateurs des villages adoraient la terre. Cette pratique devient une institution à perpétuer de génération en génération. Pour eux, le non-respect de ces traditions constitue un dysfonctionnement au plan cosmogonique2, une rupture d’avec les ancêtres. Il s’avère ainsi nécessaire d’avoir leurs faveurs dans la réalisation de projet, de travail de la terre. Car la terre désacralisée ne répond plus aux aspirations des populations paysannes Aussi, la divergence de croyance nourrit des comportements pluriels et contradictoires.

2.1.1.3 L’exploitation abusive de la flore

Selon les producteurs de coton, la cause majeure de la diminution des pluies et du décalage des saisons reste la déforestation. Pour ces derniers, la préparation du sol pour les activités agricoles ou le processus de la mise en valeur d’une terre agricole obéit toujours aux défrichements suivis d’abattage des arbres et puis du brûlis.

Ainsi tous ces déterminants provoquent la disparition de la forêt provoquant ainsi le réchauffement climatique.

L’expansion des activités de subsistance comme l’agriculture et la récolte du bois pour les activités domestiques est la cause la plus plausible de la déforestation dans cette zone. Selon les données de nos enquêtes, les besoins en charbon de bois augmentent avec l’accroissement des populations. Ce qui constitue une cause majeure de déboisement. La vente du bois en grume a manifestement appauvri la région en forêt dense. Pour les populations, la destruction de la forêt a connu une recrudescence pendant la crise militaro politique de 2002, ce qui a plongé le pays dans un « état de sans loi ». Ainsi cela a favorisé la création de nouvelles formes d’exploitations forestières surtout au niveau de la production de charbon de bois.

2- Relatif à cosmogonie Théorie (scientifique ou mythique) expliquant la formation de l’univers, ou de certains objets célestes.

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2.2.1 Incidences des changements climatiques sur le quotidien des producteurs de coton au nord de la Côte d’Ivoire

2.2.1.1 Les effets induits par le changement climatique sur la production du coton

Tableau 3 : Les effets des modifications des climats

Quels sont les effets des modifications des climats sur vos activités agricoles Étiquette de valeur Valeur Fréquence % Pourcentage

valide Pourcentage cumulé

mauvais rendement 2,00 13 43,33 43,33 43,33

perturbation du

calendrier cultural 3,00 13 43,33 43,33 43,33

Appauvrissement des sols,

dessèchement des plantes, etc.

1,00 04 13,33 13,33 100,00

Total 30 100,0 100,0

Source : Notre enquête, octobre- novembre 2015

A parti du tableau ci-dessus, on identifie deux incidences des variations climatiques sur la production du coton dans la localité de Napiéléodougou selon nos répondants. En effet, l’analyse des proportions contenues dans ce tableau montre que selon les producteurs, le mauvais rendement, la perturbation du calendrier cultural, l’appauvrissement des sols, sècheresse longue, tarissement des rivières et cours d’eau constituent quelques incidences des changements climatiques sur la production du coton, soit une proportion égale à 43,33 % et 13,33 % pour chacune des incidences citées. A partir de ces statistiques, l’on peut dire le mauvais rendement, la perturbation du calendrier cultural, et sécheresse sont les incidences majeures des variations climatiques sur la production du coton.

2.2.1.2 Les rendements agricoles

Pour les producteurs, les effets néfastes du changement climatique sur la productivité du coton sont la perte de la qualité du coton et la baisse des rendements. En effet, l’arrivée tardive des pluies et

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l’arrêt précoce des pluies occasionnent une mauvaise germination des plants de coton, qui nécessite, d’après les producteurs de ressemer, elles empêchent aussi la maturité du coton. Ce qui influence considérablement le rendement entrainant ainsi une baisse de la production provoquant un faible niveau des revenus .Aussi l’arrivée des pluies pendant la saison de la récolte du coton à une certaine répercussion sur la qualité du coton, sur la date de commercialisation, car le coton mouillé ne doit pas être récolté, ce qui retarde non seulement la récolte mais aussi la période de commercialisation à laquelle s’ajoute la mauvaise qualité. Il faut souligner que le prix d’achat du coton varie en fonction de sa couleur et de sa propreté. Ainsi le coût du coton blanc et bien propre appelé coton de premier choix s’élevé a 250F/Kg et celui du coton de couleur jaune ou grise appelé coton de deuxième choix coûte 225F/Kg.

2.2.1.3 Le calendrier cultural

Selon les paysans de Napiéléodougou, la date prévue pour les pluies et la durée de la saison pluvieuse sont deux paramètres essentiels pour la culture du coton. Car elles déterminent d’une part, la date de semis et donc la position des cycles culturaux, et, d’autre part, la durée de la période des précipitations pendant laquelle le coton peut bien germer. Face à la perturbation de la saison des pluies, le calendrier cultural des producteurs se trouve perturber surtout en ce qui concerne les dates de semis. En effet, les dates de semis sont généralement prévues du 21 Mai au 30 Juin sur tout le territoire du grand nord particulièrement à Napiéléodougou.

Mais, il se trouve qu’à cette période, certains villages de cette zone comme Kiémou où domine la culture du coton ne bénéficient pas des précipitations. Il ne pleut dans ces villages que dans le mois de juillet. Ce qui retarde le démarrage des activités agricoles.

Notre enquête sur le terrain nous a permis de relever les données sur l’évolution de la production du coton graine dans la coopérative COWONA de 2008 à 2015. Ces données présentées dans le tableau ci-dessous nous situent sur la baisse de la production du coton.

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Tableau 4 : Evolution de la production du coton graine dans la coopérative COWONA

Année Production de coton graine (kg)

2008–2009 4.257.121

2009–2010 3.336.519

2010–2011 1.067.843

2011–2012 981.980

2012–2013 3.247.580

2013–2014 3.153.245

2014–2015 1.819.889

Source : Notre enquête de octobre –novembre 2015 2.2.1.4 La santé des producteurs

Selon les données de nos enquêtes, les paysans de Napiéléodougou sont exposés à divers maladies liées aux variations des paramètres climatiques. En effet, l’irrégularité des pluies

fait que les travaux champêtres deviennent de plus en plus pénibles pour les producteurs entrainant ainsi de nombreuses lassitudes la fatigue et le vieillissement du corps. De plus le paludisme, la méningite provoquée par l’harmattan au cours de la saison sèche, les infections respiratoires sont les maladies auxquelles sont confrontées les producteurs face la variation de la température.

Par ailleurs, il faut indiquer qu’en ce qui concerne la santé humaine, l’augmentation des cas de cancer de la peau, de cataractes et de dépression du système immunitaire est la grave conséquence de l’appauvrissement de la couche dû au changement climatique.

Pourtant la santé des populations est un enjeu majeur dans le développement socio-économique de la ville de Napiéléodougou.

2.2.1.5 Les effets écologiques

Les données de nos enquêtes montrent que certains villages sont marqués par une baisse de la pluviométrie, une hausse de la température et des vents violents qui influencent considérablement les activités agricoles. En effet, pour les producteurs, l’augmentation de la chaleur due au soleil ardent, engendre des modifications de plusieurs espèces végétales et animales. Cette dégradation de

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l’environnement a pour conséquence directe l›avancée du désert et l›accroissance de la sécheresse. Les pluies se raréfient et les saisons climatiques changent.

3. RÉSILIENCE DES PRODUCTEURS DE COTON FACE AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES EN PAYS SENOUFO

3.1.1 Stratégies d’adaptation développées par les paysans Les nouvelles situations humaines appellent à une réflexion allant à trouver des solutions idoines ou partielles. Ainsi, les populations paysannes font face au changement climatique en développant des stratégies plus ou moins particulières.

3.1.1.1 Provocation des pluies à travers des rituels

Les producteurs de coton entament parfois les semis avant la tombée des pluies, car ils sont sûrs que la pluie tomberait dans le temps prévu c’est-à-dire dans les mois de Mai et de Juin. Cependant, les premières pluies tombent tardivement. Ce qui provoque des changements dans la pluviométrie qui influencent considérablement les rendements. Ainsi, pour remédier à cette situation de mauvaises récoltes du coton du fait du manque de pluie, les paysans font souvent appel à la clémence des génies par des rituels. Pour les paysans, ces rituels se font par des offrandes de riz, des bœufs, des moutons, des poulets et des colas puis suivis des prières d’adoration aux génies protecteurs des forêts et considérés comme des dieux.

Cela leur permet de venir en aide et de compatir à leurs souffrances en leur offrant la pluie. Mais, selon eux, cette stratégie culturelle d’adaptation à laquelle ils ont toujours eu recours présente des limites face à la gravité des changements climatiques actuels.

3.1.1.2 La production de charbon de bois

Pour pallier aux difficultés liées à la vie champêtre, les paysans se reconvertissent peu à peu dans la production du charbon de bois. La production du charbon de bois devient la seconde activité lucrative. Le bois des forêts est transformé en charbon dans des fours de fabrication artisanale puis et vendu sur les marchés des villes environnantes. De plus en plus, des points de vente s’érigent dans les villages et certains paysans se spécialisent dans cette fonction sans toutefois abandonner la culture du coton.

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Cette stratégie permet aux producteurs de coton ont de diversifier leurs revenus, en plus du coton et en fonction des opportunités du moment. Ils s’adonnent à certaines activités comme la production du charbon de bois afin de maximiser leurs revenus pour répondre aux besoins croissants de leurs familles.

Par ailleurs, certains producteurs de coton, devant la baisse énorme de leur rendement et dans le souci d’accroitre leurs revenus sur le marché, imbibent d’eau le coton déjà récolté et destiné à la commercialisation afin d’augmenter sa masse. Mais cette action pratiquée par quelques producteurs de coton est loin d’être sans effets sur la propriété et la couleur du coton. Une fois arrivé sur le marché, le coton est soumis à des contrôles par les experts, ce qui fait que parfois, le coton perd sa valeur.

3.1.1.3 La diversification des cultures

Cette stratégie consiste, pour la majorité des producteurs à diversifier leur production par la pratique de nouvelles cultures en complément du coton. En effet, pour les producteurs de coton, la culture du coton est occidentale donc afin de faire face aux besoins de leurs familles, les producteurs de coton s’adonnent à d’autres cultures telles que : la culture du maraîcher (chou, carottes, tomates appelées les cultures de contre-saison etc.), des tubercules (patates, ignames…), le riz, l’anacarde. Ces paysans font des champs à des endroits différents (bas-fond, autour des rivières et fleuves) mais ils font également la rotation de cultures afin de maximiser leurs chances de production. L’association de ces cultures donne nécessairement une bonne récolte. Cependant, pour les paysans, cette pratique s›avère souvent difficile à réaliser car souvent la couverture de plusieurs champs devient hypothétique. Malgré ces stratégies adoptées par les paysans, les difficultés subsistent et persistent au sein cette population vulnérable aux affres du changement climatique.

3.1.1.4 La modification du calendrier des semis

Le début des pluies ainsi que sa durée occupent une place cruciale dans la culture du coton parce qu’elles permettent le démarrage de cette culture. Face aux aléas climatiques (rareté de pluie, sécheresse, vent violents et secs), les producteurs de coton ont

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tendance à modifier les dates de semis afin de réaliser le cycle des cultures pendant une période favorable. Cette situation calamiteuse les oblige donc à repenser leur calendrier cultural en faisant des aménagements pour favoriser de bon rendement. Selon les données de nos enquêtes, les semis commencent désormais à partir du mois de juillet alors qu’avant la période des semailles était prévue pour le mois de mars.

Cependant en vue de mieux s’adapter à l’évolution du temps, les producteurs mettent d’abord en pratique les méthodes et stratégies proposées par les structures d’encadrements puis leurs propres stratégies afin de pallier certains obstacles sur le terrain.

3.1.2 Stratégies des structures d’encadrement 3.1.2.1 Utilisation de semences sélectionnées

Etant donné que la recherche sur le coton est assurée par le CNRA (Centre National de Recherche Agronomique), les sociétés cotonnières(COIC, SECO, URESCO-CI ) chargées de l’encadrement des producteurs de coton développent avec l’appui du Centre National de Recherche Agronomique (CNRA), des stratégies permettant aux producteurs de coton de faire face aux changements climatiques, voire de réduire les incidences des changements climatiques sur la production du coton .Cette première stratégie à savoir l’utilisation des semences sélectionnées mises à la disposition des producteurs, consiste notamment à sélectionner des variétés améliorées répondant aux créneaux de vente sur le marché international et à la fourniture de semences à qualités génétiques correspondantes à ces variétés et au pouvoir germinatif indéniable des sols de la zone nord de la Côte d’Ivoire afin de pallier aux insuffisances de ceux-ci.

3.1.2.2 Approvisionnement en intrants

Cette deuxième stratégie est un système basé sur le crédit d’intrants des égreneurs aux producteurs à travers leurs organisations auxquelles ils appartiennent avec en retour l’obligation de livrer le coton graine. En effet, c’est un peu plus de 15 milliards FCFA d’intrants qui sont distribués par campagne.

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3.1.2.3 Modernisation du système de production

Enfin celle-ci se manifeste par une fourniture en matériels et équipements de traction (semences sélectionnées, des engrais des tracteurs,) soit 25% des producteurs de coton et 49% des parcelles cotonnières car les rendements moyens en culture attelées se situent à 645 kg de fibre par hectares contre 430 kg par hectares en culture manuelle. C’est donc dire que ces outils modernes contribuent à atténuer les effets pervers du changement climatique.

CONCLUSION

A travers cette étude qui a pour sujet : « résilience des producteurs de coton face aux changements climatiques dans le nord de la Côte d’Ivoire : cas des producteurs de Napiéléodougou», notre préoccupation a été de comprendre les stratégies d’adaptation adoptées par les producteurs de coton de Napiéléodougou face au changement climatique. Pour rendre les résultats de cette étude plus objectifs, nous avons eu recours à des outils de collectes de données et des méthodes d’analyse. Au niveau des outils, des questionnaires et des guides d’entretien ont été utilisés pour l’obtention des données.

A l’analyse, il ressort de cette étude que l’irrégularité des pluies provoquées par les changements climatiques présente des conséquences négatives accentuées sur les activités agricoles notamment le coton. Et les principaux effets induits par le changement climatique se résument à la chute de la pluviométrie, à la hausse des températures, aux vents violents et la chute de la productivité du coton, à la perturbation du calendrier cultural. Mais face à ce phénomène, les paysans ne s’avouent pas vaincus. Bien que certains s’accordent à la providence de Dieu, d’autres adoptent des stratégies leur permettant de réduire les conséquences négatives du changement climatique (modification du calendrier cultural, diversification des cultures, utilisation des semences sélectionnées et approvisionnement en intrants). Pour la majorité des paysans, les pratiques anthropiques sont principalement à la base des modifications climatiques. Ainsi, à travers des expériences vécues, les paysans trouvent des stratégies telles que les actes rituels, le changement dans les dates de semis, la diversification des cultures qui leur permettent de s’adapter aux variations climatiques. Elles permettent de travailler moins et de résister à la longue sècheresse et

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aux pluies irrégulières. Fort malheureusement, ces stratégies semblent insuffisantes face aux défis actuels qui ne cessent de s’accentuer.

Par ailleurs, les producteurs sont soutenus dans cette lutte contre les variations climatiques par les structures d’encadrements qui leur proposent des stratégies pour faire face à ce phénomène à savoir : Utilisation de semences sélectionnées, approvisionnement en intrants et modernisation du système de production. Cependant, ces techniques d’usage perçues comme solutions pour atténuer l’ampleur des effets du changement climatique semblent incertaines pour les paysans, puisqu’elles restent encore tâtonnantes et voir même inquiétantes pour ces derniers.

Toute situation nouvelle mérite une réflexion profonde et approfondie afin d’y remédier. Nous n’avons pas la prétention de donner la panacée au phénomène mais il apparait nécessaire de donner quelques exhortations. La lutte contre le changement climatique doit être gérée localement en prenant de plus en plus en compte les savoirs et pratiques locaux. Des études à grande échelle permettront de cerner les vraies réalités locales voire les changements réels. De plus, les producteurs sont peu informés sur la question du changement climatique. Alors, la formation des paysans par des experts sur les données météorologiques, hydrologiques et agronomiques permettra à ceux-ci de mieux cerner les contours des variations climatiques. Toutes ces actions doivent être menées par l›Etat car son économie reste toujours agricole. L›on n›exclut pas l›apport des organismes en charge de l›agriculture ivoirienne.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

1- BOKO Michel, 1988, Climats et communautés rurales du Bénin : Rythmes climatiques et rythmes de développement, Thèse de Doctorat d’Etat ès Lettres et Sciences Humaines, non publiée, Université de Bourgogne, Dion, Centre de Recherche de Climatologie, 2 vol, 607 p.

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3- DJE Bernard, 2014, Document de stratégie du programme national changement climatique, Rapport, non publié, Abidjan, Programme national changement climatique (PNCC), Direction Générale de l’Environnement, de la Salubrité Urbaine et du Développement Durable, 84 p.

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4- DJE Bernard, 2014, Document de stratégie du programme national changement climatique, Rapport, non publié, Abidjan, Programme national changement climatique (PNCC), Direction Générale de l’Environnement, de la Salubrité Urbaine et du Développement Durable, 84 p.

5- DOUMBIA Sékou et DEPIEU Meougbé Ernest, 2013, « Perception paysanne du changement climatique et stratégies d’adaptation en riziculture pluviale », Journal of Applied Biosciences, 64, p.4822-4831.

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