L A PRISE DE TOULON
,
paît héroïque,
EN UN ACTE, EN PROSE,
Mêlé de Vaudevilles)
PAR LES CITOYENS BIZET ET FACIOLLE.
er.u
au Théâtre de
la Cité.Promis au Public
par
l'affiche,&
ritirésans l'aveu des Auteurs.
•V
A PARIS,
Ciiez
M a R A d A N
,Libraire
,
rue du
Cimetière-Saint-
André, N°.
9.
An deuxieme de
laRépublique
Françoise-
122ENEWBERKYUBRARÏ^
AUX SANS-CULOTTES
DE L’ARMÉE DE TOULON.
O u
sER votions préliminaire du Citoyen
F a
c ioLLE
yun des Auteurs.
T
iE crime
avoltvendu Toulon
àlatyrannie.Le courage venoit
cle leconquérir à
la [inerte.La
nouvelle de
la victoire arrive, je 1apprends
, ét le soirmême,
je projeté clemettre
sur lascène
ce faithéroïque.
Bizet,mon ami
, sunit amoi:
nous
écrivons.Vingt-quatre heures apres
lapu-
blicationdu triomphe
cle larépublique
, 1ou- vrage
est fini; Bizet leporte au
théâtre cle la Cité , il est luau comité
, il estreçu
,on va
lejouer sous peu
clejours, assure Saint-Edme, factotum.
,à ce
qu’il paroît,de
cetteadministration.Le lendemain
cle laréception
, lecitoyen Lenoir
,
oncle
,, paroît désirerque l’ouvrage
soitfondu avec un
autresur
lemême
sujet. Bizet écrit,
en démontre
l’impossibilité;Saint-Edme en con-
vient, etpromet
,sur son honneur
,devant
les citoyens Saint Clair etDu maniant,
lescitoyennes Cléricourt
etColbert, que
lapièce
sera,jouée incessamment.
Je
suissans prétentions,moi,
etj’avoue
qu’il est possibleque
l’ouvrage respire lecivisme, plutôt
qu’ilne
brillecle talent ;mais
enfin, il étoitreçu
; et s’ileut
été refuséau
théâtrede
la Cité,un
autre
l’eûtaccepté
eteût compté pour quelque chose
la prestessede
lacomposition. J’attendok donc
l’effetdes solemnelles promesses de
Saint1-Edine, que
j’avais labonhomie républicaine
*A
i}iv OBSERVATIONS
«de
regarder comme un engagement
irrévocable*Cependant quoiqu’annoncée par
les affiches,
la
pièce
estlong-tems sans
sejouer,
et enfin1
annonce
sesupprime. Revenant de mes travaux
,(car
je suisun
franc sans-culotte,qui
n’aipas
le
tems de
fêter,
de
carresser les directeurs-gé-néraux
des théâtres); je jettelesyeux sur
l’affiché, et je voisque ma pièce
,ou plutôt notre pièce
estmise de
côté. J’entrechez
Bizet, je lui
déduis
le fait
j il
f
ignoroit, etpourtant me
rassure,en
me rappelant
laparole d’honneur de Saint-Edme, Moins
confiant, jesuismoins
tranquille. J’avois,
d
ailleurs, aspireaux honneurs de
l’impression,pour pouvoir
être lupar vous
,
mes braves ca- marades. Un imprimeur
avoit traitéavec moi
,comptant que
lapièce
seroitjouée,
il falloitsavoira quoi
s'en tenir.J’engage
Bizet à écrire * etsur
ma
prière,un
billetdépêché
àSaint-Edrne
luidemande des
éclaircissemens.Trois
jours s’écou^lent, et
Monsieur
le directeur-général,occupé des
detailsimmenses de
ses coulisses , n’apas
letems de répondre. Impatient de connoître
saprose,
comme un
volontairel’estde combattre
,
j’engage
Bizetà
écrireun second
billet, il
cède
, il écrit,
et le
lendemain nous recevons
laréponse que
je Vais transcrireexactement.
Réflexions.
Apparemmentledirecteur-général , attendusesgrandes affaires théâtrales
,
ou sonservice militaire,
comme
aide- de-camp du général Henriot, ignore quelquefois qu’onlui faitremettredés lettresjautanten eutditjadis unpre*.
«lier gentilhomme de la chambre.
lettre du
citoyen SaINT-Ed M
E.Jetéi
g
noroispas, ci-toyen
,quevous inavie£
déjà fait remettre une
lettre.
PRÉ LIM
3*en ai reçu encoreunehier soirdans Laquelle vous vous plaigne\ du silence d'un indi- vidu qui valerompreaujour- d'hui, et voicila réponse tant deuos oncleque de lui
, seuls
admi nistrateurs.
Leprojetducitoyen Lenoir avoit toujoursété
quon
réunit les deux ouvrages, c'est-à- dire, celui de Tissot et le vôtre, ce que tous deux vous ave\refusé.En
conséquence, il falloit fairefairedes décorationspour Tissot.La
difficultédes ou- vriers, a retardélabesogneeta mis la pièce dansle casde nepasêtrejouée
.
En
secondlieu? lesuccès de la piè^c delaprise de Toulonaux
Italiens,etàla rue Fey- deau,- ferait tonaux
deux ouvrages, étant
aux
cartons de Vadministration duthéâtre de la Cité,puisqu'enleur ac- cordant le mérite qui leur est du,ilsne pourraientsurpasser
lesdeuxpremiers ouvrages.
En
conséquence, le citoyen I.enoir a décidéqueces deux ouvrages ne pouvaient être joués•I
N A
IR E
S.Je doute
, je l'avoue,quela réponse ait été approuvée du citoyen Lenoir,oncle, aumoins
il en eût changé eu corrigé la forme.
Ah
! Saint-Edme, an peude*bonne-foi
5 rappelez-vous que vous avez vous-même reconnu,' l'impossibilité de la réunion
,
lorfque vous avez donné votre parole d’honneur que la pièce seroit jouée.
Que
ne donniez-vousma
pièce, pour laquelle on avoit les décorations , pendant qu'on travaiiloit à celles de Tissotf dontl'ouvragenede voit,aviez- vousdit
,passer qu'aprèslemien.
Je n’entends pascommentle succès d'un sujet â un théâtre, empêche de le mettre sur u»
autre. Jecroyois le contraire:
maisSaint
Edme
oublieques'ileût voulu dégager sa parole d’honneur, ayant la pièce 2.4
heuresaprèslanouvelle,-ilpou- vait devancertous lesthéâtres.
Fortbien»Le citoyenLenoir décide; le citoyen Saint-Edme exécute
; et les humbles écri- vains d’une pièce civique,n'ap- prennent qu'après deux lettres
I
PERSONNAGES
.ROBESPIERRE,
UN GÉNÉRAL
Anglois.DOM GUSMAN,
général Espagnol.LE MARQUIS
de"R O QUE BRU NE.
SAINT CHAUMONT.
BELLEVAL.
Un
Chefde Bataillon.P ÊR CE VAL,
Commandant de Bataillon* muet#Un
Aide-de-Camp Anglois.Un
SoldatFrançois.Un
SoldatAnglois.Un
Commissaire.La
CitoyennePERCEVAL.
La
CitoyenneVINCENT.
Deux
Enfans.Idem.
,
BEAUVAIS
Généraux muets.
DUGONNEN
D U P U Y,
VINCENT,
CODEFROY
LA
LA PRISE
DE TOULON,
fait héroïque.
En un acte, en
pe o
s e,MÊLÉ DE VAUDEVILLES.
Za
scène estdans
laplace de la villede Toulon (Tun
cotédelasçene seraune prison, de Vautre la
Maison- Commune
, ouVpn pourra
placer,si on veut , lepavillon blanc ;
au fond
9 ilfaudra
tacher de présenter desmaisons
sur lesquelles tomberont desbombes quilesenflant- meront à Vinstantou les patriotesrompront
les barricades ; il
y aura
une chdine tenduedans
unerue qui arrivesur laplace,SCENE PREMIERE.
VINCENT, D U P U
Y.Vincent?.
Quelle
affreuse existence,mon ami,
nous traînons dans cette ville exécrable, depuis que la trahison falivrée ànos tyrans !B
1
2 LA PRISE DE TOULON,
D U
PU
Y.Il fuit
, diton,
du
courage pour mourir$moi,
je pensequ’ilen faut encore plus pour supporterla
*ds ,
quand on
a sous les yeux le despotisme triomphant, le patriotisme livré à lamort,
à l’esclavage \ enfin l’aristocratie élevant son trône sanglant sur les cadavres mutilés des amis de la liberté.Vincent.
Mon cœur
déchiré partage bien ces sentiment Croisque,si la liberté pouvoir périren France, je
nelui survivrois pas: j’ai juré de vivrelibre
ou
de mourir, etjen’ai pas fait un vain serment.Quand Rome
fut asservie ,Caton
seul préféra lamort
à la honte de subir la loidu
tyran. Si la cause del’égalité avoitle dessous enFrance,
on
yverroitdes milliers de Catons.Tous
ceux qui ne seroientpas morts en défendantla république, s’immoleroient eux-mêmes
, plutôt que de voir triompher les despotes : mais la liberté est impérissable; cette conviction seule a soutenumon
courage; j’ai
pu
dissimuler
mes
vrais sentinjens; jeme
suis abaisséà feindre pour être encoreutileàmon
pays.Air : Commentgoûter,quelque reposï
J3ai dévoré dans nos revers
Les chagrins qui navroient
mon
âaie.Quand j'ai vu cette ville infâme
fait héroïque.
*A
genoux demander des fers:De
quel p.fixme
devient la vie?Juge quel est notre bonheur?
Nous pouvons au seindumalheur
,
Servir encornotre patrie.
D y
pu
y.Eh
! que pouvons-nous faire pour elle? à quoiîui servent nos bras désarmés? les traîtres seulsont:
des armes dans cette ville déshonorée; les autres habitans portent des fers. Les unsjetés dans des
cachots,
y languissent ou ont péri sous le fer as- sassin; le reste,
comme
vous etmoi,
surveillé, observé par les farouches satellites des Rois, parles soupçonneux tyrans qui nous oppriment , e§c réduità laplus désespérante impuissance»
Vincent.
Ecoute,
mon
voisin:j’aihésité jusqu’àcejour à teconher
mon
secret : mais enfin tu vas l’apprendre: je ne te faispas 1injure de douter de tonpatriotisme, de tabonne
foi; tu sauras tout:maissi tuabuçois de
ma
confiance, si tu pouvois..,,.D U
PU
Y.Ton
soupçon est une injure»Air :
Ne
dites pas notre secret»
Ami
, ta craintem'humilie;
Mon
cœur,fidèle à sapatrie,
3 LA PRISE DE TOULON,
Estincapable d5unforfait:
L’ennemipeut, danssa furie Mille fois m’arracherlavie
,
Et non m’arracher ton secret.
V
IN
C JSN
T.Eh
bien1 apprensqu’il estencore quelquespatriotes échappés,comme
nous, aux fataleslistes de pros- criptions dressées par ces François qui nous ont trahis, parlesexécrables sujetsdeLouisXVII.
D U
Pü
.Y*Je le soupçonnois , mais je n’oscis
me
flatter qu’ilseussentpu
seréunir, s’entendre, faire quelque chose d’utile.Vincent.
Hélas ! ils ont pu lien peu de chose; mais les
effortsde notrezèle n’ont pas été tout à-fait infruc- tueux; si nous n’avons
pu
sauver nos concitoyens cruellementimmolés,
nous avons soulagé la cap«tivitë de ceux qui sont encore dansles fers.
Air:
La
comédieestunmiroir.Malgré nos tyrans forcenés,
Malgré leur fureur sanguinaire, Souvent, de ces infortunés
Nous adoucissonsla misère;
Quand nous pénétrons auprès d’e-ux
,
Nous calmons au moins leurs alarmesj
Ah
! de ces frères malheureux Qu’il est doux d’essuyer les larmes]fait héroïque.
sD U
PU
y.Avec
quelle joie, si j’avois été instruit, j’aurois joinsmes
secours aux vôtres !Vincent.
Ce
n’est pas tout; nous avons encore servi les patriores qui assiègentla ville,en leur faisantpar- venir divers avis importans.
Nous
avons, parmi eux, plusieurs denos citoyens qui, danslespremiersmomens
de latrahison, ontfuileur patrie, devenue pour eux
un
objet d'horreur.D u
pu
Y.Je le sais; que de fois j’ai envié leur sort ! je
me
serois trouvé heureux depouvoircomme
eux, embrasantmes
propres foyers, écraser sous les- toits enflammés des maisons les vils esclaves quiles habitent, et les odieux étrangers auxquels ils- les ont ouverts.
Vincent.
Le moment où
ils croulerontsur toutes ces têtes coupablesn’est pas éloigné.Des
forces imposantes sont ralliées sous les étendarts de la république , et j’ai des avis sûrs, que ce matin
même
, les pa- triotes font une attaque décisive.B
36 LA PRISE DË TOULON,
D Ü
PU
Y.Que
la foudre frappema
tête,
pourvu qu’ellë atteigne et terrasse la tyrannie.
Air:
De
Paiiéllo.Vous V
'ordonne^*O
liberté ! soutiens notre espérance!Daigne guider nos braves défenseurs : Qu’en expirantje les sache vainqueurs
;
Voilà les vœux que je fais pour la France.*
V
IN
C EN
T.Ils seront exaucés.
Le
feu des canons et des mortiers n’a cessé que depuis quelquesheures.San-s-doute les républicains prennent quelques
mornens
de repospour développertoutes leurs forces à l’atta-que
qu’ils méditent.Pour
nous,mon ami
, qui
ne pourrions nous réunir dans la ville sans
nous
exposeràunemort
certaine,noussommes
convenus d’attendre lemoment
favorable; si les braves as*siégeansapprochent des remparts, à
un
signalcon- venu, nousirons,
pardivers chemins, nous joindre à eux; nous leur aiderons à vaincre et à sauver
du
massacre les patriotes qui gémissent dans lesprisons. y
D U
PU
Puissionsnous y réussir ,
mon
cher Vincent (tar je ne doute pas que si l’ennemi est obligé
fait héroïque.
?•d’évacuer la ville, il ne laisse, en ^éloignant de nouvelles traces de sa barbarie.
SCENE
I I,LES M È M ES, GODEFROY.
G o D
E Froy
{bas à.Vincent).J’ai à te parler : suis-moL
Y
IN
C EN
T.Tu
peux t’expliquer devantDupuy.
Je l’ai ren- contré par hasard,promenant
,comme moi
, scs inquiétudes et sesallarmes; ce que j’aiapprisdeluirécemment
m’a décidé à m’ouvrir à lui. Il est des nôtres, ainsitupeuxdire ceque tu sais de nouveau.G O B
E FR O
Y.Mon
ami , le feu continuel des batteries, la quantité debombes
et de boulets jetés dans cette ville rebelle, ont appris auxtroupes étrangèresque
lespatriotesvouloient vaincreoupérir; etlesennemis ont pris , de concert avec les traîtres qui leur ont ouvert le port et la ville, des résolutions de- sespérées.
Dupuy.
B £
Que
veulent-ils faire l'S la prise de Toulon#
Godefroy.
J
aisu,paruneintelligencequejeme
suisménagée
dansleurs conseilssecrets, le parti qu’ils ont arrêté danslecasoulestroupes delarépubliqueparoîtroienÊ avoir l’avantaee.O
V
IN
c' EN
TvCest
sans doute quelqu’atrocité que leur aur&Suggérée leur fureur.
G O D
EF
RO
Y.On
nesaufoitattendreautrechose deces monstres.Us
ont décidéd abord, que les bâtimensétrangers qui sont en rade, doiinefoient rétraite aux aristo- crates
, aux émigres3 et que les prisonniers, les
habirans soupçonnés d aimer la république
,seront chargés de fers,
emmenes
en otage avec leursfemmes
, leurs enfans, et égorgés à la moindre' résistance.Des
ce matin , dit-ôn, orî doit arrêter encore ceuxdont onse défiele plus.D U
PU
Y.Quelle horteur ! Mais ce sera
du
moins la dernière.Tyrans
! si jè meurs votre victime, jeserai consolé en pensant que
mon
sang fera fleurirîarbre de la liberté
, que des rnains victorieuses eé
FAIT H É R O
IQ U
Ë.ÿ
patriotes replanteront dans peu, sur ces bords*- Si vous voulez
me
traîner sür unsterre étrangère, eh bien 1 je sais mourir.-Godefroy.
Mon
ami, unhomme
libre fait plus-, il souffre ta vie, il brave les despotes.Chargé
de chaînes, son regardfaitencorebaisserlesyeuxàleurs soldats;il leur apprend qu’un vrairépublicainpeut honorer
les 1ers dont la trahison a chargé ses mains.
O
SCENE
IIL
1 ES MÊMES, LA C
rie.VINCENT,
La Citoyenne Vincent.
Ah
!mon ami
,
j’aüois te chercher. SauVe-toi; des soldats sortent de chez- nous pour t’arrêtef.- L's te pourfiiivent: dérobe-toi àleurs fureurs-,mets- à l’abri de leurs coups ce que j’ai de plus cher aïs
monde.
Air : Vaudeville d'Arlequin afficheur, ConsefVe-tôi pour tes ênrans,
Conserve-toj pour la patrie
j
Fuis
, puisqu’il en est encore tems’
Fuis leur détestable furie:
Conserve, dans notre malheury
J
So l'A PRISE DE TOULON,
(Tous nos cœurs t’en font la prière),
A
ton pays, un défenseur,A
tes cnfans, un père.D ü
PU
y.Viens, je t’offre
un
asyleoù
tu pourras te de-*terminer sur le parti que tu dois prendre.
Godefroy.
Ne
reste pas ici plus long-tems : il pourroit«venir quelqu’un.
Le
jour va paroître;
on
se défie toujours de ceux qu’on opprime; et siun
de ces étrangers nous voyoit réunis, nous serions tous- perdus,V
IN
G EN
T,Je cèdeàvos instances,
mes
amis; je vais chezDupuy;
toi, Godefroy, resteavecma
malheureusefemme
$ tu auras dans peu, demes
nouvelles. Si les patriotes attaquent la ville avec succès, etqueje sois libreencore , nosamis
me
verront ausignalconvenu me
joindre àmes
frères, et vaincreou
mourir avec eux.fait héroïque. It
SCENE IV.,
IA FEMME VINCENT, GODEFROY*
La Citoyenne Vincent.
Que
le Ciel protège aujourd'hui les amis de là liberté et de la vertu !Simon
mari doit perdre la vie, que ce soiten combattantcontreles traîtres qui voudroient l’immoler, désarméetsans secours.
Si je luiavois toutdit, il n’auroit
pu
se résoudre à fuir,Godefroy.
Qüe
lui avez-vousdonc
caché ?La Citoyenne Vincenï.
Ce
sontdesmenacesquine regardentquemoi
,
je les brave.
On
m’a annoncé quesi, sousdeuxheures,il ne se trouvoit pas,
mes
enfans etmoi
serions arrêtés à sa place.Godefroy.
Ilsnerespectent rien; l’innoGencëet la foiblesse sont les victimes qu’ils aiment à s’immoler. Mais voici quelques unsdes cesodieuxétrangers, fuyons.
Ha LA PRISE DE TOULON,
SCEN E V.
UN GÉNÉRAL A N G L O
IS,
UN AIDE-DE-CAMP.
Le Générai..
He
biên,Monsieur,avez-vous portémes
derniers1 cidres à Ja grande redoute; tout est-il prêt pour
la défensel
L’aide-dê-camp.
Oui, Milord,
jaiexécuté tout ce que vous m’avez prescrit; mais je ne puis vous dissimuler que le
découragement des troupes est extrêmej
on
amur- muré
assez haut.Le Généra
e.Peu
m’importe, pourvuqu’ils combattent, qu’ils obéissent.C
est aiijourdhui que nous avons besoin de toutes nos forces; il paroît que l’affaire sera
chaude^
L’aïde-dê.camp.
Avez
-vous vu le général Espagnol et celui de Sardaigne?fait héroïque. i*
Le Général.
Leurprévoyante sagesse dispose les
moyens
de retraite : ils songent beaucoup plus à évacuer qu’à combattrej et en cela ils imitent tous les émigrés François.On
vient de tenir un conseil, où on a prisdes résolutionsquiannoncent plus de prudence que despoir, plus de précautions que de courage.
Si les patriotes triomphent, si nous nous retirous, je ne sais
comment
nous serons reçus à Londres.V A
ID E
-D E
-C A M
P.Il est vraisemblable que le peuple Anglois se lassera d’apprendre des revers. Il ne veut pas la
guerre,lui
^et leministre qui la faitmalgrélui,ne travaille pas à la lui faire aimer.
Le Général.
Je voudrois que Pitt vînt une fois au
moins
diriger les belles opérations quil arrête dans son cabinet
j jevoudroissur-tout le voirici aujourd’hui.
Sas
*4 LA PRISE DE TOULON*
S C E N E V
I.LES MÊMES, DOM G U SM A N, L E C O M TE DE C A
ST R O,
LE MARQUIS DE ROQUEBRU NE,
Le Généra
l.Vous
voilà déjà de retourdu
port. Messieurs, y prépare-t-on nos vaisseaux?Don G
ij sm a
n.Tout
est enmouvement
sur fescadre: elle sera prête à appareillersouspeud’heures0Le M a r q u
i s.Oui, pourvu
que le vent permette de mettre la voile.Le Généra
l.Hé
î Messieurs, nous n’aurons peut-être pas besoindu
vent;nous nesommes
pasencorebattus.Le Marquis.
Mdord
, ce malheur est possible; et la pré- pyapceFAIT HEROÏQUE.
le Général.
Ilestbientems.Monsieur,d’en avoiraujourd’hui.
Ce
langage dans votreboucheme
semble étrange.Il falloir prévoir les événemens, au lieu de nous bercerd’espérancesdontaucunes nesesontréalisées.
Mais en ce
moment
, le devoir d’un officier, d’unhomme comme
vous ,c’est d’affronter le périlavecxeux
qu’ilya exposés.Le Marquis.
Mais
, général, cen’estpas notre faute à nousinous comptionssurdesintelligencesdansl’intérieur.
Nous
croyions que les François étoient tels qu’au tems de la monarchie : pasdu
tout; ces gens-là sont inconcevables; ce sont des enragés
, qui n’en- tendent pas ce qu’on veut leur dire,
ou
qui ré-pondent à coups de canon.
Dom Gus man.
Il estvrai quelesFrançois sont d’une impétuosité à laquelle rien ne résiste.
Le Généra
l.Vous
lesconnoissez à présent.Dieu
veuille que nous ne les connoissions pas encoremieux
souspeu
de tems 1du
moins, ditesbien àvos maître^i6 1 A PRISE DE TOULON,
comme
je ferai savoir au mien, de se défier de tout ce qu on lui aira de la valeur er delaforce des aristocrates François, et de la foibfesse des patriotes.Le Marquis.
Mon
général, si nouspartons5 je puis compte*sur une place à votre bord?
L
eGénéra
l.Monsieur
lemarquis, vouspouvez vous y rendit -d’avance, sivousvoulez.il
e Marquis.
Général,cestseulementpour vousrappeler votre
•promesse
i j’ai
donné
lesordrespourfairearrêter leshabitans
qu
on soupçonneencore de patriotisme :les listes sont faites.
Ce
seront des otages sion
ivacue la place.Le Généra
l.Votre prudencene se
dément
pas. (on entendle bruit de lartillerie) Mais il paroît que l’attaquerecommence
; allons, Messieurs , allons soutenir l’effort des ennemis.
Le Mar q u
i s.Je
yeillerai àl’exécution des arrêtésdu
conseil.DOM GUSMAN.
fait héroïque. 17
D O M G U
SM A
N.Monsieur le marquis n« vient pas avec nous
à îa redoute 1
Le Marquis.
Je vousyrejoindrai dans l’instant.
SCENE VIL
Le Marquis
seul.Qu’iraije faire à la redoute? je ne
commande
xpas de troupes,
moi
; je suis, depuis la révolution, colonelad
honores.
O
ailleurs, sion me
faisoitprisonnier, ces républicains Air :
De
la croisée.J’ai fait mes preuves de valeur.
Mais je ne puis en conscience Exposer a.tant de chaleur
Un
des jolishommes
de France, je sens toutmon
cœur frissonnerQuand je songe à ces patriotes;
On
peut tout perdre, et rien gagnerAvecles Sans-Culottes. (lis).
D’un
autre côté,j’ai vraiment à faireici;ilfaut
C
18 IA PRISE DE TOULON,
s'assurer que les patriotes échappés aux premières recherches ne s’uniront pas aux assiégeans.
SCENE VIII.
LE MARQUIS DE SAINT
-CHAUMONT,
BELLEVAL.
Saint-Chaumont.
Tout
va bien, marquis;on
arrête les patriotes à force; ces scélérats-là ne pourront pas s’armer contre nous;et sinous
succombons,
ilsne jouiront pasdu
triomphe de leur république.Belleval.
Je n’aipoint oubliésur laliste cettejeune
femme
qui nous a si maltraités fautre jour.
Son
mari estdans l’armée des patriotes
, ainsielle leméritebien.
Sa femme
payerapour
ses rigueurs etpourlepa- triotisme de son mari. Tiens, marquis, regarde5
h
voilà ; elle esc toujours jolie.fait héroïque ip
.SCENE IX.
LES MEMES,
unejeune femme nommée
PERCEVAL, SOLDATS A N G L O
I
S.
(
Les
soldats traînent lajeune femme
échevelée.)
Un Soldat
la tirant.Marche
,
goddem
!La Citoyenne Percevae.
Je vous suis autant
que
je le puis, maismes
fûrces (
Appercevant
les officiers.)Ah
!Mes-
sieurs, c’est
un
de vous, dit-on,quia donné
ordre de m’arrêter; on m’a arrachée dema
maison,où
je vivois en paix.
Air : Daigne\ niépargnerle reste.
Un
enfant jeune et sans secours.Une
mère tendre et chérie,Sans moi vont terminer leurs jours
Que
feront*iis sans leur amie? jA mon
triste sortaujourd’hui Par pitié daignezme
soustraire,Ou ma
mère n’a plus d’appui, Etmon
fils n’a plus de mère.Du
moins, ditesmoi,
quelestmon
crime}
C
ïJO LA PRISE DE TOULON,
Le Marquis.
Comment,
quelestvotre crime?Vous
êteslafemme
d’un
homme
ennemi de sa religion et de son toi,
qui
combat
contre eux.C
est bien assez, je crois.On
nepeutrienpourvous.Allez, allez.(Ortlamène
enprison); les troisautres entrent
à
laMaison Commune
.
SCENE X.
LA C. VINCENT, DEUX ENF ANS, UN COMMISSAIRE
( en robe).Plusieurs groupes de soldats
mènent
des pri- sonnièreschacun
deleur cotéet lesmaltraitent.On
distingue unefemme
attachée etdeux
enfans liés
par
le bras.On
la conduitjusqu
à la porte de la prison.La Citoyen
Air :
Pan,
pan.SilesFrançois sont vainqueurs
,
Redoutez notre furie } SilesFrançois sontvainqueurs
,
Redoutez nos bras vengeurs :
En
ces lieuxvosdéfenseursVotis trouveront tous sans vie,
fait héroïque.
En quittant ces lieux d’horreur
Nous vous percerons le cœur.
Le Commissaire.
Vous
ne voulez doncpasdite oùestvotre mari vous payerez pour lui, je vous en avertis.L A Citoyenne Vincent.
J’ignoreouest
mon
mari , je voust’avdit;si saveis , vous ne l’ignoreriez pas moins.je le
Air : Lisechantaitdans la prairie.
Puisse-je aux dépens de
ma
vie Sauver les jours demon
époux î Mourir pour lui, pourla patu-, Quel trépas honorable etdoux 1A
ce prix, la mortdevient chère;Tyrans ! je puis braver vos coups, je suis républicaine et mère,
J s saurai (bis) mourir et
me
taire.Le C o m m
i s sa
ïR
Air : Charmantes fleurs..
En
cemoment
votre tendresse oublieDe
vos enfans, hélas ! le triste sortjDans votre sein ils ont reçu la vie, Et.vosrefus les mènent à la mort.
C 3
IA PRISE DE TOULON, La Citoyenne.
Air :
L Amour
rnafaitlapeinture.Le
ciel doit son assistanceA
la oibîess , aumalheur- Mes enfans ! la providence Sera de votre innocenceLe
soutien ou le vengeur.Ls Commissaire.
Vous
minsp'rez de lapitié. Jevoudrois lessau- ver, etvousmême
aveceux. Implorezlaprotection des officiers de police, des émigrés.La Citoyenne.
Moi
! implorer la promotion de ces monstres qui ont trahi leur patrie dont la haine poursuit la plus chere moitié demoi-même
; jamais jamais.
La mort me
seroit plus douce qu'une exis- tence que je leur devrois.Le C ® m
i s sA
IR
e.,
[' ’
;; \ ;
r
//. •:>
Puisque vous c tes inflexible, il fautque j’exécute
mes
ordres : (,il lafait entrer enprison).fait héroïque* 23
SCENE XL
Pendant
les dernieres scènes ona
entendu le bruitdu
canon.Ilredouble:desbombes
passent sur la ville^ on bal la générale. Les soldats courenty s'assemblent : desfemmes
éperdues passent avec des enfans , des effets , desmalles, etc,
LE MARQUIS DE BEL LE VAE,
SAINT-CHAUMONT
Sortent
delà Maison- Commune,
B E L L E V A
L.D’eù
vient ce vacarme? il y a sans-doute cîii nouveau •, assurons-nous de ce que ce peut erre»Le Marquis,
Tu
verrasque noussommes
battus. Messieursfprenons nos précautions.
Saint-Chaumo NT»
Marquis, tu
me
procureras une place sur ura vaisseau, n’est-ce pas?C 4
±4 LA PRISE DE TOULON, Le Marquis.
Ma
foi,mon
cher,dansun
cascomme
celui-ci, chacun pour soi.SCENE' XI
I.LES MÊMES, DOM GUSMAN
(Jépéeàlamain.}Les
troisFrançois ensemble.Y
ous voilà, général, quelles nouvelles?D O m «Gusman,
Affreuses, détestables, horribles, nous
sommes
vaincus..
Les
trois ensemble*Ali!
mon
dieu, courons.Dom Gusman.
Iî est inutile. Messieurs
, d’aller à la redoute, elle estprise en ce
moment;
je le parie.Les
trois ensemble.Oh
! nous allons du. côtédu
port, assure/ la retraite.fait héroïque.
DoM Gus MA
N.2
*
C’est fort saee, Messieurs, niais attendez au- paravantles ord es du général, dontjesuischargé*
et vous les.exécuterez sous peine de resteraterre.
Les tro's ensemble*.
Oh
! nousobéirons»D 0 M G U
SM A
NvJ’ai envoyé ordre a divers officiers de se rendre
ici; en attendant: qu’ils arrivent, apprenez ce qui
s’estpassé.
Nous sommes
allés à la granderedoute-Angiome
, quidomine
lesforts.Iletoit nuit encore.Le
°bruir de iartillerie se faisait seul entendre;l’éclat des
bombes
éclairoit de tems en tems
lescolonnesennemies marchantensilence;hiertôt des
hymnes
à laliberté se sont fait entendre; et après une seule décharge cle mousqueterie, les pa- triotes ont attaqué la edoute à larme blanche.Long
rems nous avons résisté à leurs efforts, mais;ces républicains sont plus que des
hommes.
Guidés par des représentaris, tout a pliésousleurscoups*tout a cédé à l’invincible élan de leur intrépide courage. Ils ont forcé le premier retranchement;
bientôt sur des
monceaux
de nos soldats égorges,ils ont franchi le second» Enfin, leur valeur
m-
*6 L A PRISE DE TOULON,
domptable,lapertedeplus dedeuxmilleAnglois,la prise d’un grand
nombre
d’autres, annonçant qui!falloir céder la victoire et évacuer la ville, je suis
yenu
faire les préparatifs.Le, Marquis.
La
retraite est nécessaire.B E L LE V A
L.Ce
sont deslégions de diables queces bataillons bleus.D O M Gus-man-
Oui
, mais ces diables-là ne se chassent pas avec de Te au- bénite.(
fait héroïque. 2 7
SCENE XIII.
Fendant
les précédentes scènes, on a toujoursvu un grand mouvement
sur la place.Des Anglais
, desEspagnols
et des Sardes se sont rassemblés,des cannoniers ontamené
unepièces les troupes sont desdeux
cotés, les officiers et une troupe de citoyens se rassemblent en cercle.LES M Ê M E
S.( Les officiers3 troupes de
peuple
t soldats.)D O M G ü
SM A
N.La
supériorité des forces ennemies oblige d’é- vacuer la ville.Vous
allez entendre les ordresdu
général en chef.O
(Ildonne lesignal, ®n bat
un
banc8 )«
Tous
les citoyens qui ont prêté serment à» Louis
XVII
, et qui voudront se rendre au port» seront embarqués sur les vaisseaux des alliés,
u
Des
officielsyconduirontlesprisonniers deguerre» ainsi que les rebelles détenus qui serviront
j> d’otages; en cas de résistance, ils seront mis à
2 8
LA PRISE DE TOULON,
» morr.
Le
feu sera mis aux vaisseaux dégréés et h aux arsenauxou
magasins ».Un profond
silence suit,\ Lescitoyens s'cio -gnent
, les officiersrestent,les troisofficiersfilent
doucement
..G U
sM A N
continue.Vous,
Messieurs,barricadezcetterue parlaquelle fennemi
peutvenir\unissez-vousaux autres troupes pourfavoriserrembarquement,enretardantlamarche du
vainqueur. Je vous commanderai.Les
troupespassent surla scène, lescannoniers chargent leurs pièces et les pointent. D'autresforment
une barricade;lagénérale bat;tesbombes
tombent, etc.Le
généralEspagnol commande
les
manœuvres. Fendant
lemême
tems dessoldats- viennentàla
prisony avecteCommissaire
y et des*hommes
et desfemmes
attachésdeux
àdeux
yditnombre
desquels est lajeune Perceval.PAIT HÉROÏQUE. 29
scE NE XIV..
On
continue de sortirles prisonnierspendant
que les cannoniers et les troupesmanœuvrent,
et qu'avecles chaînes,desfaunes,
etc. onforme
la barricade.
T
FS MÊMES, LE COMMISSAIRE
DE POUCE, LA CIT. VINCENT,
troupe de prisonniers.
Le Commissaire de Police (Au moment
où la citoyenne Vincent paraît).J’éprouve pour vous et vos enfans,
un
intérêt quejeme
reproche :mais jene puisvous sauver.La Citoyenne.
Les inhumainsqui nous oppriment sontpeut-être plus à plaindre que nous.
Tout
ce que jevo.sm’annonce
quele règne de la trahisonest peut-etre prêt à finir.
Le Commissaire.
Ne
vousfélicitezpastantdes succès despatriotes,ils pourroientvous être funestes.
On
vousemmene
en otage*
30 LA PRISE DE TOULON, La Citoyenne.
„
SlIalibertétriomphe
, jebénirai
mon
esclavage;jespere qu'on ne
me
séparera pas deces deux innocentes créatures.
Air:
Du
souterrain.La
tendresse de mes enfansAdoucira mes maux et
ma
souffrance îJespère que leur innocence Désarmera jusqu’aux tyrans
Du
moins, ils sécheront ia;trace
De
mespleurs et de mes soucis;Il n’est point de maux que o efface
Un
baiser quon donne à son fils.GUSMAN. Les manœuvres
doiventcesser en ce
moment
;on entendlebruit qui s’approche,
1[semble quel’ennemi approche.
(Au
commissairede
policeetaux
soldats qui sontavec lui): laissez le terrem libre,
emmenez
ces prifonniers; si vous
en avez le tenu, vous viendrez chercher
les au- j
S' prisonniers partent
avec
leurescorte.Us font
des gestesde désespoir
; les soldats les maltraitent
.)
Le brun
redouble, on entendbattre la charge cannonters tiennent
la
mèche
prête.Le
général tnvironnéd’officiers.Une
voixcrietyoilà l'ennemi.fait héroïque. **
Dom Gusman commande
lesmanœuvres;
unepartit destroupesestderrière la barricade, une autre autour delapiècede canon.Des Anglois
arrivent en désordre : leurscamarades
s'ouvrentpour
les laisserpasser,puis font
face aux
patriotes qui les poursuivent et tirent sur eux au-dessus de la barricade.On
se mêle àV arme
blanche.Pendant
ce tems, une autre colonne vientdu fond du
théâtre9commandée par
Fréron. Filemarche
en ordreau pas
decharge; quand
elle est k une certainehauteur
, lescannoniers et les troupes qui sontprès d'eux, fontfeu
sur elles9ce
feu met
le désordredans
lesrangs.SCENE XV.
LES MÊMES,
(Exceptélesprisonnierset le
Commissaire
Frérori)9
FRÉRON, UN CHEF DE BATAILLON,
( Colonnes de troupes patriotes).