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Phénomènes de transfert de chaleur et de masse dans les
composites de bois de palmier dattier : comportement
sous sollicitations dynamiques
Nawal Chennouf
To cite this version:
Nawal Chennouf. Phénomènes de transfert de chaleur et de masse dans les composites de bois
de palmier dattier : comportement sous sollicitations dynamiques. Mécanique des matériaux
[physics.class-ph]. Université Paris-Est; Université Echahid Hamma Lakhdar d’El Oued (Algérie), 2019. Français. �NNT : 2019PESC0012�. �tel-03157556�
THÈSE
Présentée à l’Université Paris-Est Créteil
en vue de l’obtention du titre
de
Docteur de l’Université Paris Est
Spécialité : Sciences, Ingénierie et Environnement
PHENOMENES DE TRANSFERT DE CHALEUR
ET DE MASSE DANS LES COMPOSITES DE BOIS
DE PALMIER DATTIER : COMPORTEMENT
SOUS SOLLICITATIONS DYNAMIQUES
Par
Nawal CHENNOUF
Soutenue le 20 /04 /2019, devant la commission d’examen :
Rapporteurs
M. Rafik BELARBI Professeur, Université de la Rochelle, France M. Mohammed LACHI Professeur, Université de Reims, France
Examinateurs
M. El Habib GUEDDA Professeur, Université d’El-Oued, Algérie M. Fethi BOURAS Professeur, Université d’El-Oued, Algérie
Directeurs de Thèse
M. Abderrahim BOUDENNE MC HDR, Université Paris-Est Créteil, France M. Boudjemaa AGOUDJIL Professeur, Université Batna, Algérie
Remerciements
Je souhaite dans un premier temps, adresser mes très sincères et vifs remerciements à l'ensemble des membres du jury pour l'intérêt qu'ils ont manifesté à l'égard de ce travail, en me faisant l'honneur d'évaluer et de juger ce manuscrit. Merci au professeur El Habib Guedda d’avoir accepté de présider le jury. Je tiens à remercier les professeurs Rafik Belarbi et Mohammed Lachi d’avoir accepté d’être rapporteurs de ces travaux de thèse. Je remercie également, le professeur Fethi Bouras, d’avoir bien voulu faire partie du jury de soutenance et de juger mes travaux.
J’adresse en toute ma gratitude aux messieurs Boudjemaa Agoudjil et Abderrahim Boudenne mes directeurs de thèse pour leur grande bienveillance dès le début de ma thèse et jusqu’à présent et pour avoir créé les conditions propices qui m’ont permis de travailler dans un cadre parfaitement adéquat. Je les remercie chaleureusement pour cette collaboration aussi enrichissante techniquement que sur le plan humain.
Je tiens également à exprimer ma reconnaissance au professeur Evelyne Géhin, directrice du Centre d’Études et de Recherche en Thermique, Environnement et Systèmes (CERTES) de m’avoir accueilli ainsi qu’aux autres membres du laboratoire.
Ce travail de thèse n’a pas pu être possible sans le soutien financier du projet PHC TASSILI 2016 n°35092QK. Pour cela, je remercie tous les responsables du projet.
Je souhaite également remercier Karim Benzarti, directeur de recherche à l’IFSTTAR qui a suivi mes travaux avec intérêt et bienveillance, et ses contributions lors des différentes étapes de ces travaux.
J'aimerais également remercier mes collègues du laboratoire Tarek et Bourhandine, qui ont permis de rendre cette expérience enrichissante.
Enfin, je tiens à remercier ma famille, mes parents, mon frère et mes sœurs qui m’ont toujours encouragée et soutenue inconditionnellement dans mon parcours universitaire, comme dans la vie.
i
Table des matières
Introduction générale ... 6
Chapitre I : Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés I. Introduction ... 12
II. Problématique énergétique ... 12
II.1. Solutions et alternatifs ...14
II.2. Matériaux biosourcés ...14
II.2.1. Fibres végétales ...16
II.2.2. Propriétés caractérisant les matériaux biosourcés ...18
III. Bois de palmier dattier ... 20
III.1. Propriétés de bois de palmier dattier ...21
III.1.1. Structure et morphologie...22
III.1.2. Propriétés thermophysiques ...23
III.1.3. Propriétés mécaniques ...24
III.1.4. Propriétés chimiques ...26
III.1.5. Propriétés hydrophiliques ...27
III.2. Composites à base de bois de palmier dattier ...27
III.2.1. Fibres de palmier dattier ...28
III.2.2. Composites à matrice polymère ...28
III.2.3. Composites à base de gypse ...30
III.2.4. Béton à base de bois de palmier dattier (DPC) ...32
A. Propriétés mécaniques………..……….………..33
B. Propriétés thermophysiques……….33
C. Propriétés hygrothermiques ...35
D. Comportement hygrothermique à l’échelle paroi……….…...36
IV. Effet du couplage entre les transferts de chaleur et de masse ... 38
ii
Chapitre II : Caractérisation hygrothermique du béton à base de bois de palmier dattier (DPC) à l’échelle du matériau : méthodes et matériels
I. Introduction ... 44
II. Comportement hygrothermique ... 44
II.1. Echelle du matériau ...44
II.2. Echelle du composant ou de la paroi ...45
II.3. Echelle du Bâtiment ...46
III. Transfert hygrothermique ... 46
IV. Mise en œuvre des échantillons ... 48
IV.1. Ciment...48
IV.2. Sable ...48
IV.3. Eau de mélange ...49
IV.4. Fibres de bois de palmier dattier ...49
IV.5. Concentration massique des composants...50
V. Essais et mesures ... 51
V.1. Stockage de l’humidité : courbe de sorption ...51
V.2. Hystérésis ...53
V.2.1. Courbe de sorption des fibres de BPD ...55
V.2.2. Courbe de sorption de mortier DPC ...56
V.3. Perméabilité ...57
V.3.1. Approche de Künzel pour la séparation des contributions vapeur et liquide ...59
V.4. Valeur du tampon hydrique ...60
V.4.1. Capacité du tampon hydrique du DPC ...61
iii
Chapitre III : Caractérisation hygrothermique du béton de bois de palmier dattier (DPC) à l’échelle du matériau : résultats et discussion.
I. Introduction ... 70
II. Isotherme de sorption ... 70
III. Phénomènes d’adsorption dans les fibres végétales ... 71
IV. Résultats et discussion ... 74
IV.1. Courbe isotherme de sorption des fibres de bois de palmier dattier (BPD) ...74
IV.1.1. Courbe de sorption du DPC ...77
IV.1.2. Effet d’hystérésis ...80
IV.2. Perméabilité à la vapeur d'eau ...84
IV.2.1. Diffusivité hydrique ...85
IV.3. Valeur du tampon hydrique ...86
IV.3.1. Classification de la valeur du MBV pour le DPC...86
IV.3.2. Effet de la température sur la valeur du tampon hydrique ...87
iv
Chapitre IV : Étude expérimentale du comportement hygrothermique à l’échelle de la paroi
I. Introduction ...97
II. Passage de l’échelle matériau à l’échelle de la paroi ...97
II.1. Etat de l’art du comportement hygrothermique à l’échelle de la paroi : partie expérimentale ...98
III. Dispositif expérimental pour la paroi en DPC...102
III.1. Caractéristique de la paroi DPC ...103
III.2. Mesure et acquisition de données ...104
III.3. Principe et description du dispositif expérimental ...105
III.4. Scénarios de sollicitations hygrothermique appliqués ...107
IV. Sollicitations statiques ...109
IV.1. Cycle long d’adsorption-désorption ...109
IV.2. Cycle long en température ...112
V. Sollicitations cycliques ...113
V.1. Sollicitation dynamique en température à HR constant ...113
V.2. Sollicitation dynamique en température sans contrôle de l’humidité ...117
V.3. Sollicitation dynamique en température et en humidité...119
VI. Conclusion ...122
Conclusion générale et perspectives ...125
Perspectives...127
v
Nomenclature
Romain
A Une surface exposée (m2)
bm Effusivité humidité (kg / m2 Pa s1/ 2)
CGj Paramètre d'ajustement
dp, 1% Profondeur de pénétration (m)
Dw Diffusivité d'humidité
e épaisseur de l'échantillon (m) G Taux de variation de masse (kg / s) g Accélération de pesanteur (9,81 m2 /
s)
kj Paramètre d'ajustement
Ml Masse molaire d'eau (18g / mol)
MBV Valeur tampon d'humidité (kg / m2
Pa s1 / 2)
m Masse (kg) m0 Poids sec (kg)
mw Poids humide (kg)
nj Paramètre d'ajustement
pv Pression de vapeur (Pa)
pvs Pression de vapeur à saturation (Pa)
R Constante de gaz idéale (8.134J / mol K)
HR Humidité relative (%)
Sdtot Epaisseur totale de diffusion de
vapeur (m)
T Température (K) t Temps (s)
tp Durée du cycle (24 heures) w Teneur en eau (kg/kg)
grec
δ0 Perméabilité à sec (kg / (m s Pa))
δ* Perméabilité fictive (kg / (m s Pa)) α Paramètre d'ajustement θ Capacité d'humidité Indices ads Adsorption des Desorption f Saturation libre hys Hystérésis sat Saturation
Introduction générale
7
La réduction de la consommation énergétique et le développement de la bio-économie font partie des préoccupations majeures du développement durable. Dans le domaine de la physique du bâtiment, de nombreux programmes politiques ont été lancés dans le monde [1], tels que: le plan de construction durable et la loi sur la transition écologique et énergétique en France; la norme zéro carbone et l’acte sur le changement climatique en Angleterre ; le programme privilégié aux États-Unis ; la stratégie de croissance verte aux Émirats arabes unis, etc.
Le développement des « filières vertes » et des matériaux biosourcés dans la construction constitue une approche d’actualité innovante qui contribue à la mise en œuvre de la transition énergétique. En effet, l’utilisation des matériaux d'origine végétale, qui «stockent» le carbone et dont la production et les transformations successives ont un impact réduit sur l’environnement. Ces matériaux biosourcés s’imposent de plus en plus clairement dans le secteur du bâtiment moderne et dans la réhabilitation des constructions existantes.
Parmi les matériaux biosourcés, le bois de palmier dattier qui constitue un fort potentiel en tant que matériau de construction isolant. Il s'agit d'un matériau renouvelable et abondant, sa production mondiale moyenne sur la période 1993-2013 est de 6.35 × 109 kg, principalement
produite en Asie (63.5%) et en Afrique (35.9%) [2]. La production mondiale annuelle est estimée à plus de 1 200 000 tonnes de pétioles, 410 000 tonnes de feuilles et 300 000 tonnes de grappes [3].
Les fibres de bois de palmier dattier peuvent être utilisées comme renfort dans différents types de matrices tel que les polymères, le gypse et le mortier. En effet, la formulation de béton réalisée (mortier avec 15%fibres de bois de palmier dattier) possède des propriétés qui satisfassent à la fois les exigences thermiques et mécaniques pour des matériaux de construction. De ce fait, ce type de béton biosourcé pourrait être utilisé comme un nouveau matériau biocomposite à efficacité énergétique dans le bâtiment [4].
Par ailleurs, il est avéré que la température ainsi que l'humidité de l'air intérieure ont un impact sur la perception du niveau de confort intérieur des occupants dans un habitat. Afin de limiter les fluctuations d'humidité et de température interne, les matériaux constituant l'enveloppe d'un bâtiment doivent pouvoir stocker et libérer de l'humidité. Cette capacité peut être quantifiée par la détermination de la valeur tampon hydrique (MBV) et de la capacité hydrique de sorption. Dans ce cadre, l’objectif principal de cette thèse est de contribuer à la caractérisation hygrothermique de béton de bois de palmier dattier (DPC). Ce travail s’inscrit dans le cadre du
Introduction générale
8
projet bilatéral Hubert Curien (PHC) Tassili (16MDU976) intitulé : Développement de nouveaux matériaux biosourcés à base de bois de palmier dattier (BPD) pour l’ISOLation thermique dans l'HABitât (IsolHab). Ce projet est le fruit d’une collaboration étroite entre l’équipe du laboratoire de physique énergétique appliqué (LPEA) à l’université Batna 1 et du Centre d'Etude et de Recherche Thermique, Environnement et Systèmes (CERTES) à l’université Paris Est Créteil (UPEC) et d’une récente collaboration avec le Département Matériaux et Structures de l’IFSTTAR (ex-laboratoire des ponts et chaussées). Ce travail est structuré en 4 chapitres qui ont pour but de répondre aux objectifs fixés en se basant sur les points suivants :
A. Caractérisation des propriétés hydriques d’un béton à base de bois de palmier dattier sous des conditions statiques à travers les mesures de la courbe isotherme de sorption, la perméabilité sèche et humide ainsi que l’estimation de phénomène d’hystérésis. B. Caractérisation du comportement hygrothermique du béton à base de bois de palmier
dattier (DPC) sous des conditions dynamiques en mesurant la capacité du tampon hydrique sous des conditions non isotherme.
C. Etudes de comportement hygrothermique d’une paroi à base DPC.
Le premier chapitre met l’accent sur le contexte environnemental et scientifique dans lequel s’inscrit cette thèse ainsi que sur l’état de l’art des derniers travaux effectués englobant les composites à base de bois de palmier dattier.
Dans le deuxième chapitre, la formulation du béton de bois de palmier dattier (DPC), la méthodologie retenue pour lesmesures des propriétés hygrothermiques, ainsi quel’inertie hydrique sont présentés. Ces méthodes concernent notamment des mesures expérimentales pour déterminer la perméabilité à la vapeur d’eau (méthode de la coupelle sèche et humide), l’isotherme de sorption, ainsi que la capacité tampon hydrique du matériau (méthode Nordtest). Le troisième chapitre est dédié à la présentation et à l’interprétation des résultats expérimentaux relatif à l’étude hygrothermique à du DPC à l’échelle du matériau. Dans cette partie, les résultats obtenus sur les propriétés hydriques de béton de palmier dattier ainsi que l’influence de la température sur la capacité de régulation hydrique (MBV) sont discutés et comparés avec ceux de plusieurs matériaux de construction classique ou biosourcés.
Introduction générale
9
Le quatrième chapitre porte sur l’étude du comportement hygrothermique d’une paroi en DPC. Ce travail a été réalisé avec l’aide d’une enceinte climatique en imposant plusieurs scenarios permettant de faire des variations de la température et d’humidité pour des régimes statiques ou dynamiques.
Introduction générale
10
Références
[1] A. Kylili and P. A. Fokaides, "Policy trends for the sustainability assessment of
construction materials: A review," Sustainable cities and society, vol. 35, pp. 280-288, 2017.
[2] F. Asdrubali, F. D'Alessandro, and S. Schiavoni, "A review of unconventional sustainable building insulation materials," Sustainable Materials and Technologies, vol. 4, pp. 1-17, 2015.
[3] B. Agoudjil, A. Benchabane, A. Boudenne, L. Ibos, and M. Fois, "Renewable materials to reduce building heat loss: Characterization of date palm wood," Energy
and buildings, vol. 43, pp. 491-497, 2011.
[4] N. Benmansour, B. Agoudjil, A. Gherabli, A. Kareche, and A. Boudenne, "Thermal and mechanical performance of natural mortar reinforced with date palm fibers for use as insulating materials in building," Energy and Buildings, vol. 81, pp. 98-104, 2014.
Chapitre I : Contexte et état de l’art
des matériaux biosourcés
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
12
I. Introduction
Le premier chapitre de ce manuscrit est consacré à un état de l’art concernant les enjeux du développement durable en Génie Civil. Le contexte environnemental de cette étude sera présenté ainsi que la problématique liée à l’épuisement des ressources minières et les impacts environnementaux dû à la croissance progressive des émissions de gaz à effet de serre. Ceci suscite une mobilisation à l’échelle nationale et mondiale et surtout dans le secteur du bâtiment avec l’ambition de passer d’une approche énergétique à une approche environnementale. C’est ainsi que les matériaux biosourcés aurons leur évolution. Dans ce contexte, la première partie de ce chapitre est dédiée à la problématique environnementale globale et aux solutions et alternatifs qui en découlent. Nous présenterons les thématiques écomatériaux et matériaux biosourcés. Particulièrement le bois de palmier dattier (BPD) en Algérie et la valorisation de ses déchets. Les propriétés principales de bois de palmier dattier seront rapportées en premier. La deuxième partie est plutôt consacrée à l’essor des composites de bois de palmier dattier. Nous rappellerons les travaux antérieurs sur les matériaux composites à base de bois de palmier dattier. La préparation des fibres, les composites à base de polymères, gypse et béton (DPC) seront présentés ainsi que les principaux résultats obtenus. Cette synthèse
bibliographique permettra par la suite de bien positionner les objectifs de cette thèse.
II. Problématique énergétique
Récemment, plusieurs défis économiques, sociologiques et environnementaux sont devenus les enjeux majeurs des chercheurs et scientifiques : la population mondiale continue à croître. Elle est été multiplié par sept au cours des deux derniers siècles et devrait continuer à croître jusqu’à atteindre peut être 11 milliards à la fin du XXIe siècle [1]. Des études récentes montrent que les
sept milliards actuels de personnes sur la planète déploient l’équivalent d’une planète et demie en valeurs de ressources chaque année pour subvenir à leurs besoins. Par ailleurs, aujourd’hui, un habitant de la planète sur sept vits dans un bidonville. Selon ONU Habitat, en 2030, il faudra en compter un sur cinq, soit l’équivalent de la population actuelle de la Chine [2]. L’augmentation des surfaces utilisées par habitant et le niveau accru de performances des bâtiments viennent encore amplifier le besoin actuel et futur en matériaux de construction. Cette consommation en croissance exponentielle engendre des conséquences très lourdes sur les objectifs de développement durable, tant environnementaux que socio-économiques.
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
13
Le domaine de la construction est le principal utilisateur de matières premières dans le monde, loin devant les besoins de l’énergie. Et, surtout depuis un siècle, l’extraction des matériaux de construction a été multipliée par 34, alors que celle des énergies fossiles a été multipliée par 12. A titre d’exemple, le béton est, après l’eau, la matière la plus consommée dans le monde. La production mondiale de ciment est en augmentation permanente et émet-elle seule de 5 à 6% des gaz à effet de serre (GES).
Dans l’ensemble du cycle de vie d’un bâtiment, la part des matériaux joue un rôle important au niveau du bilan environnemental : en concevant des bâtiments plus isolants et en optimisant les apports ainsi que l’efficacité des systèmes, cela augmente la consommation de la matière première et également l’énergie de production des matériaux (Figure I-1).
Figure I-1 : Distributions des impacts environnementaux en fonction de la performance d’un
bâtiment [3].
Le secteur du bâtiment est responsable du tiers des émissions de dioxyde de carbone ; ce qui en fait le deuxième plus grand émetteur de CO2 après l’industrie [4]. Les émissions de CO2 sont
responsable de 55% de l’accroissement de l’effet de serre et par conséquent de réchauffement climatique [5]. Il est donc devenu primordial de s’interroger sur les matériaux de construction conventionnels actuels et penser à ceux de demain. A cet égard, le recours à des ressources d’énergie renouvelables dans le secteur du bâtiment est un pilier principal sur lequel se basent les objectifs actuels visant à aboutir au bâtiment durable qui respecte l’environnement.
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
14
II.1. Solutions et alternatifs
Afin de répondre aux problématiques actuelles, l’augmentation de la performance énergétique des bâtiments (enveloppe et équipements) doit donc permettre de réduire efficacement leur consommation d’énergie tout en assurant un bon niveau de confort et en limitant les émissions de CO2. De nombreux secteurs d’activités se tournent vers les potentiels offerts par le biosourcé.
En ce qui concerne le secteur de bâtiment cette ressource est très diverse et les possibilités d’utilisations sont larges : éléments de structure, isolants, matériaux de couverture, granulats pour bétons, etc.
Plus que pour tout autre secteur d’activité, l’utilisation de matières premières issues du biosourcé peut apporter un ensemble de réponses pertinentes à ces besoins. Renouvelables par nature, stockant durablement du carbone, demandant généralement peu d’énergie grise et vecteurs de développements locaux. En outre, ces matériaux biosourcés sont exploitable dans presque tous les pays, y compris dans des zones arides ou semi-arides à condition d’en avoir une exploitation raisonnée. Le développement des écomatériaux se fonde sur plusieurs critères qui représentent les piliers fondamentaux de développement durable :
❖ Critères économiques : ils s’expriment par la prise en compte du coût global, c'est à-dire la somme des coûts d’investissement, de fonctionnement et de maintenance ainsi que de démantèlement. Il dépend, notamment, de la durabilité de l’ouvrage,
❖ Critères environnementaux : ils concernent la consommation des matières premières renouvelables ou non, locales ou acheminées sur de plus ou moins longues distances, l’énergie grise des matériaux ou des techniques de mise en œuvre, l’émission de polluants et/ou de gaz à effet de serre, les natures et quantités des futurs déchets, ❖ Critères liés aux conforts : thermique, hygroscopique, acoustique et visuel,
❖ Critères sanitaires : durant les phases de construction et d’exploitation, la conception du bâtiment doit garantir un environnement sain et sans danger pour ses usagers.
II.2. Matériaux biosourcés
Les matériaux biosourcés sont, par définition, des matériaux issus de la biomasse d’origine végétale ou animale. Ils couvrent aujourd’hui une large gamme de produits et trouvent de multiples applications dans le domaine du bâtiment et de la construction, en tant qu’isolants (laines de fibres végétales ou animales, de textile recyclé, ouate de cellulose, chènevotte, anas,
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
15
bottes de paille, etc.), mortiers et bétons (béton de chanvre, de bois, de lin, etc.), panneaux (particules ou fibres végétales, paille compressée, etc.), matériaux composites plastiques (matrices, renforts, charges) ou encore dans la chimie du bâtiment (colles, adjuvants, peintures, etc.). De nombreux variétés de biosourcés existent (figure I-2), le choix d’une matière provenant d’un milieu naturelle se fait en tenant compte [6] :
➢ Origine et fonction : les fibres présentent des performances mécaniques élevées ont un rôle structurel dans la nature ;
➢ Disponibilité avec des propriétés métrisées : une fibre naturelle est considérée comme disponible si le volume de fibres disponibles sur le marché est suffisant pour réaliser des pièces industrielles ;
➢ Composition et structure souvent complexes.
Figure I-2 : Les différents types de fibres naturelles [6].
Les plantes, qui produisent des fibres naturelles, sont classées comme primaires et secondaires en fonction de leur utilisation.Les plantes primaires sont celles qui poussent pour leur teneur en fibres, tandis que les plantes secondaires sont des plantes dans lesquelles les fibres sont produites en tant que sous-produit. Le jute, le chanvre, le kénaf et le sisal sont des exemples de plantes primaires. Ananas, palmier à huile et fibre de coco sont des exemples de plantes secondaires [7]. Le tableau I-1 présente les principales fibres utilisées commercialement dans les composites dans le monde entier.
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
16
Tableau I-1: Principales sources de fibres sur le plan commercial [7]. Source de fibres Production mondiale (103 tonnes)
Bambou 30 000 Jute 2300 Kenai 970 Lin 830 Sisal 378 Chanvre 214 Coco 100 Ramie 100 Abaca 70
La bagasse de la canne à sucre 75000
Herbe 700
II.2.1. Fibre végétale
Les fibres végétales sont les plus utilisées car ce sont les plus disponibles. Leur structure complexe est éligible à celle des matériaux composites. Les fibres végétales comprennent des fibres provenant des poils séminaux et grains (coton, kapok) ; les fibres libériennes extraites de tige de plantes (lin, chanvre, jute, ramie) ; les fibres dures extraites de feuilles (sisal) ; de tronc (chanvre de manille) d’enveloppe de fruits (noix de coco). La cellulose est le constituant principal de toutes les fibres cellulosiques et la plupart des fibres végétales (à l’exception du coton) sont composées de cellulose, d’hémicelluloses, la lignine, les cires et certains composés solubles dans l'eau [8].Les avantages et les inconvénients de l'utilisation de fibres sont présentés dans le tableau I-2.
Dans le cadre du projet MaBioNat [10], une première compilation de caractérisations des performances acoustiques des matériaux biosourcés a été construite sous la forme d’une base de données. La base de données rassemble les propriétés de plus de 60 matériaux, issus des 4 grandes familles suivantes :
A. Laines végétales (laines de lin, de chanvre, de coco, de bois …),
B. Granulats végétaux en vrac (chènevotte, particules de pin, moelle de tournesol …), C. Bétons végétaux (béton de chanvre, béton de bois),
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
17
Tableau I-2 : Principaux avantages et inconvénients des fibres végétales [9]. Avantages Inconvénients
Faibles couts Absorption d’eau
Biodégradables Faible stabilité dimensionnelle
Neutres pour l’émission de CO2 Mauvaise tenue en vieillissement
Pas d’irritation cutanée lors de la
manipulation des fibres Faibles tenue thermique (200 à230°c max) Pas de résidus après incinération Fibres anisotropes
Resource renouvelable Variation de qualités en fonction de lieu de croissance, de la météo… Demande peu d’énergie grise Une gestion de stock est nécessaire pour les applications industrielles Propriétés mécaniques spécifiques
appréciables (résistance et rigidité) Renfort discontinu Bonne isolation thermique et acoustique
Non abrasif pour les outillages
Tableau I-3 : Les types de matériaux biosourcés les plus étudiés [11].
Pays Types de biomasses
France Tournesol, chanvre, lin, bois, paille, bagasse, balle de riz Royaume-Uni Paille, bois, cosses de noix de coco, bagasse, chanvre
Italie Kenai, liège, panneaux de carton, chanvre, roseau, vieux papiers et textiles, bois, pierre d'olive Turquie Coton, paille, balle de riz, tournesol, graines d'olive, déchets textiles, bois Algérie Bois, paille, palmier dattier
Liu et al. [11] ont réalisé une revue sur le développement historique des bio-isolants de 1974 jusqu’à 2016. Selon cette revue, Il y a de nombreux types de biomasses dans chaque pays, y compris des résidus forestiers et agricoles. Cependant seuls cinq premiers pays sont pris en compte.
Le tableau I-3 montre les matériaux biosourcés étudiées qui sont très différentes. Les biomasses favorables sont le tournesol, le chanvre et la feuille, qui ont occupé ensemble 76% de la recherche totale en France. En Royaume-Uni, 77% des recherches portent sur la paille et le chanvre. Au lieu de cela, il n'y a pas de traits distinctifs en Italie, en Turquie et en Algérie, où la recherche est très dispersée et peu de données ne permet pas d'indiquer clairement ces tendances [11].
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
18
II.2.2. Propriétés caractérisant les matériaux biosourcés
Les matériaux biosources innovés doivent toujours satisfaire à diverses exigences, notamment thermiques, mécaniques, acoustiques, hydrauliques et économiques, etc. Les propriétés communes des matériaux biosourcés utilisées sont[11] :
1. MOE (module d'élasticité) : Rapport de la contrainte à la déformation peut également
être présenté comme "module de Young" ou "module de masse" et MOR (Module de rupture) indique le rapport de la contrainte maximale à la section transversale de rupture du matériau. En détail, il fait référence à la résistance ultime obtenue lors des essais de flexion ou de torsion. Dans le test de flexion, le module de flexion ou la rupture est la contrainte maximale exercée sur la fibre à la rupture. Dans l’essai de torsion, le module de rupture est la défaillance maximale de la contrainte de cisaillement du bord le plus à l’extérieur de la tige circulaire. MOR est parfois appelé résistance à la flexion ou à la torsion.
2. Résistance à la flexion : Indique la capacité du matériau à résister à la flexion sans se
rompre, la détermination du comportement en flexion est toujours mesurée avec la méthode de flexion en trois points.
3. IBS / IB : Résistance horizontale de la liaison interne : Signifie toujours la
détermination de la résistance à la traction parallèlement aux faces.
4. Résistance à la traction : Résistance verticale de la liaison interne signifie toujours la
détermination de la résistance à la traction perpendiculairement aux faces.
5. Résistance à la compression : Exemple de résistance ultime de la force externe
(pression).
6. Résistance au choc : Généralement défini comme un échantillon à casser ou à se
fracturer sous l'effet de la charge d'impact, égal à l'énergie absorbée par la section transversale de l'unité.
7. Masse volumique : C’est la masse par unité de volume de la substance, c'est un
paramètre important des matériaux biosourcés, généralement une densité faible d'un biomatériau est favorable.
8. Épaisseur : La distance des côtés relativement minces. D'une manière générale, avec la
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
19
9. Gonflement de l'épaisseur (causé par absorption de l'eau): Taux de dilatation en
épaisseur après immersion dans l'eau pour24 h, il détermine les performances d'absorption d'eau à court terme.
10. Gonflement en épaisseur (causé par pressage) : Taux de dilatation en épaisseur après
compression élevée, il détermine la déformation de dilatation naturelle après compression
11. Coefficient d'absorption d'eau avec la pression atmosphérique : Eau absorbée par
unité de masse (volume) par immersion directe dans l'eau.
12. Coefficient d’absorption d’humidité : Quantité de vapeur absorbée par unité de masse
(volume) à pression atmosphérique par exposition à l'air.
13. Teneur en eau (taux d'humidité) : Poids de l'eau par unité de masse (volume) d'un
échantillon.
14. Perméabilité à la vapeur d’eau : définit sa capacité à se laisser traverser par un gaz
sous l’action d’une pression entre ses deux faces opposées. Dans le cas où le gaz est la vapeur d’eau, il s’agit du rapport de la quantité de vapeur d’eau traversant un matériau par unité d’épaisseur, de temps et par unité de différence de pression de vapeur régnant de part et d’autre du matériau. Cet indicateur est toujours nécessaire de tester les biomatériaux à structure poreuse. Toutefois, une perméabilité à l'eau plus grande ou plus petite ne représente pas une performance thermique pire ou meilleure, parfois même il y aura un résultat opposé.
15. Conductivité thermique : Caractérise la capacité d’un matériau à transmettre la
chaleur par conduction.
16. Diffusivité thermique : Égal au rapport de la conductivité thermique au produit de la
capacité calorifique et de la densité. La diffusivité thermique fait référence à la capacité de diffusion de la chaleur interne des objets.
17. Acoustique : Représente la capacité d’isolation et d’absorption acoustique. De manière
générale, une meilleure performance acoustique de biomatériau est favorable.
18. Résistance au feu : La résistance à la chaleur et au feu avec ou sans air. C'est un
indicateur significatif, lié à la sécurité de la vie humaine.
19. Antimicrobien (mildiou) : C’est la capacité à prévenir la moisissure, la prolifération
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
20
20. Durabilité : La capacité de résistance à long terme aux dommages causés par le
matériau lui-même et par l'environnement naturel. D'une manière générale, la durabilité élevée des isolants à base de biosourcés est favorable.
21. Les composés organiques volatils « COV » les matières particulaires peuvent
s'évaporer dans l'air. Les COV sont toujours générés par l'utilisation de liants pendant la période de construction, et les matières particulaires sont toujours générées par la période de coupe, d'installation et de construction des isolants.
22. Radioactivité : Désigne les éléments radioactifs émettant des rayons spontanément à
partir de noyaux atomiques instables. Certaines isolants biosourcés sont toujours mélangées à des matériaux fossiles pour certaines fonctions pouvant contenir des substances radioactives.
23. Indice de PH de concentration en ions hydrogène : Indicateur permettant de mesurer
le niveau de PH d'une solution, car certaines bio-isolants sont produites à partir de biomasses brutes sans aucun traitement. Ensuite, le PH déterminera l'environnement microbien, ce qui affectera la durabilité des biomatériaux.
24. Microstructure : Caractéristiques des structures de matériaux sous les microscopes.
L'analyse de la microstructure contribuera à expliquer les propriétés thermiques et mécaniques des matériaux au niveau macro.
25. Réflectivité : Rapport entre la lumière réfléchie et reçue sur une certaine surface. Cette
propriété n’est testée que si les bio-isolants sont utilisés directement comme mur extérieur ou comme un parement et face au soleil.
26. Dilatation thermique : C’est la déformation due à l’augmentation ou à la diminution
de la température. Cette propriété est très importante, cependant, personne n’y a prêté attention jusqu’à présent.
III. Bois de palmier dattier
La production mondiale totale de palmiers dattiers en 2016 était de 8.46 Mt (FAOSTAT 2016). Les plantations de palmier dattier sont réparties dans tout le Moyen-Orient, l'Afrique du Nord et le sud du Sahel, l'Afrique de l'Est et du Sud, le sud-ouest des États-Unis, l'Amérique centrale et du Sud et même l'Europe du Sud (notamment en Espagne et en Italie) [12]. Les palmiers dattiers doivent encore être développés dans d'autres régions du globe où les climats sont secs et où il existe un besoin pressant de stabilisation et de création de nouveaux environnements
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
21
macro et micro durables [13]. C'est une plante à feuilles persistantes et peut jouer un rôle vital dans la conservation des sols mais aussi dans l'équilibre environnemental et écologique. En raison de sa capacité à résister à la fois à la saturation en eau et à la sécheresse.
Selon les statistiques récentes (2015) du Ministère Algérien de l’Agriculture et du Développement Rural, le palmier dattier occupe en Algérie une superficie évaluée à 167.000 hectares pour un nombre de palmier estimé à plus de 18.6 millions d’unités. Les régions phoenicicoles se situent généralement au sud de l’atlas saharien et couvrent 16 wilayas. Les wilayas de Biskra et d’El Oued sont les premières régions phoenicicoles avec respectivement 27.4% et 22% de la superficie totale, et respectivement 23.1% et 22.4% du nombre total de palmiers dattiers.
Le palmier dattier peut vivre jusqu’à un âge d’environ 200 ans, et peut atteindre une hauteur de plus de 80 pieds (environ 24 mètres). Les opérations de nettoyage des palmiers dattiers consistent principalement à éliminer les organes végétatifs qui ne sont plus fonctionnels, en particulier les palmes sèches. Le nombre des palmes peut atteindre 50 à 200 chez un arbre adulte, avec une durée de vie de trois à sept ans, selon la variété et le mode de culture [14].
III.1. Propriétés de bois de palmier dattier
Le développement de nouveaux matériaux composites principalement adaptés à l’isolation thermique dans différents secteurs, notamment dans le domaine des bâtiments durables, constitue l’objectif principal de la thématique Matériaux et Thermique de l’Habitat (MTH). Dans ce contexte, une démarche repose sur l’utilisation des sous-produits naturels et renouvelables du palmier dattier pour l'isolation thermique de l'habitat est adopté par le projet PHC Tassili 16MDU976 intitulé Développement de nouveaux matériaux biosourcés à base de bois de palmier dattier (BPD) pour l’ISOLation thermique dans l'HABitât (IsolHab).
L'originalité de cette démarche consistera à valoriser et à réduire les déchets en les intégrant dans des matériaux plus performants afin de réduire la consommation énergétique des bâtiments. En outre, le projet est basé sur une approche intégrée, partant de la collecte du bois de palmier dattier (BPD), passant par le séchage, le découpage, le broyage, la mise en œuvre des composites et la caractérisation multi-échelle et multidisciplinaire pour aboutir à des propositions de différents produits selon l'utilisation finale. L’avancement de cette approche relève dans les travaux antérieurs, le présent travail et d’autres travaux qui sont en cours.
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
22
III.1.1. Structure et morphologie
Le bois de palmier dattier a une structure fibreuse. Les images MEB de la fibre de pétiole (Figure I-3) présente une surface cylindrique et irrégulière avec de nombreuses impuretés, cellules et pores. L’analyse de la structure et de la morphologie d’un autre type de fibre de palmier dattier (fibres entourant la tige de palmier dattier) a révélé des résultats similaires (Figure I-4). La fibre de palmier dattier est de forme cylindrique. L’image MEB montre que la surface extérieure n’est pas lisse et recouverte d’impuretés artificielles (sable et poussière) et de la lignine résiduelle. En outre, la vue transversale révèle que la fibre de palmier dattier est une collection de fibres multicellulaires chacune contenant un vide central (lumen), ces fibres ont un diamètre d’environ 2 – 5 µm.
Figure I-3 : Images MEB d’une fibre de bois de palmier dattier : vue longitudinale (A), vue transversale (B), zoom de la vue transversale (C) [12].
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
23
Figure I-4 : Images MEB d’une fibre de palmier dattier : vue longitudinale (A), vue
transversale dans une matrice polymère (B) [15].
III.1.2. Propriétés thermophysiques
Les propriétés thermophysiques du bois de palmier dattier ont été étudiées en utilisant des échantillons sous forme parallélépipédique (kornaf) (Figure I-5). Les résultats de l’étude thermophysique ont révélés que [12]:
➢ L’effet de l’orientation des fibres sur la conductivité thermique est négligeable.
➢ Les variétés de palmier dattier ont un faible effet sur la conductivité thermique avec une valeur moyenne de 0.083 W.m-1. K-1 mesurée à la pression atmosphérique.
➢ La conductivité thermique de bois de palmier dattier est proche de la gamme de nombreux matériaux naturels d’isolation.
➢ La masse volumique de bois de palmier dattier est légèrement supérieure à celle de liège et du chanvre (276 kg.m-3pour la partie pétiole de palmier dattier de type Deglet-Noor).
Les résultats de l’analyse thermogravimétrique (perte de masse vs. température) sur les fibres entourant la tige de palmier dattier ont révélé que la température de dégradation est d’environ 250°C. Ces résultats sont comparables à ceux obtenus avec d’autres types de fibres naturelles telles que le sisal [15].
Enfin, les auteurs de [12] ont indiqué que le bois de palmier dattier est un bon candidat pour le développement des matériaux moins coûteux pour l’application dans le domaine de l’isolation thermique.
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
24
Figure I-5 : Base pétiolaire (ou kornaf) (a), échantillons avec différentes directions des fibres
(b), (c) [12].
III.1.3. Propriétés mécaniques
Les propriétés mécaniques des fibres de palmier dattier ont été déterminées et comparées à d’autres fibres naturelles (Tableau I-4).
Tableau I-4 : Propriétés mécaniques de certaines fibres naturelles [7]. Fibre Résistance à la traction MPa Module de Young GPa Allongement à la rupture % Palmier dattier 97-196 2.5-5.4 2-4.5 Chanvre 690 70 1.6 Sisal 511-635 9.4-22 2.0-2.5
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
25
Figure I-6 : Courbe typique contrainte-déformation des fibres de palmier dattier (10 mm de
longueur) [12].
La courbe contrainte-déformation (Figure I-6) est caractérisée par une région initiale linéaire suivie par une courbure indiquant l’augmentation de taux de déformation avec la contrainte. Ce comportement est similaire à d’autres types de fibres naturelles [15]. Les valeurs typiques de la résistance à la traction des fibres de palmier dattier se situaient entre 97 et 196 MPa, tandis que les valeurs pour le module de Young se situaient entre 2.5 et 5.4 GPa. En outre, l’allongement à la rupture se situait entre 5 et 10%.
Selon la comparaison faite dans le Tableau I-4, la résistance à la traction des fibres de palmier dattier est faible par rapport aux autres fibres naturelles. En outre, une observation similaire peut être faite sur le module de Young. Ces faibles propriétés mécaniques des fibres de palmier dattier peuvent être attribuées à leurs grands diamètres qui se situaient entre 100 et 1000 µm (Figure I-7) [15]. Cette gamme de diamètre est plus grande en général que les autres fibres naturelles.
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
26
Figure I-7 : Module de Young de fibre de BPD palmier dattier en fonction du diamètre [15] III.1.4. Propriétés chimiques
Les compositions chimiques des fibres de palmier dattier par rapport aux autres fibres naturelles sont présentées dans le Tableau I-5. A sec, tous les murs de cellules végétales sont principalement constitués de polymères à base de sucre (cellulose, hémicelluloses) qui sont combinés avec de la lignine [7].
Tableau I-5 : Composition chimique de certaines fibres naturelles [7, 15]. Fibre Cellulose
%masse Hemicelluloses %masse Lignin%masse
Palmier dattier 43 8 35
Chanvre 68 15 10
Sisal 65 12 9.9
Il est très clair que la grande quantité de cellulose est une bonne indication de la résistance de la fibre. Les fibres de chanvre, qui ont la plus grande résistance à la traction (Tableau I-4), ont en même temps la plus grande teneur en cellulose (Tableau I-5). La fibre de palmier dattier a 18%masse d’hémicelluloses et 20%masse de lignine. La quantité d’hémicelluloses est similaire à
celle des fibres naturelles usuelles. Cependant, la teneur en lignine est généralement supérieure à celle des fibres usuelles. La teneur en lignine des fibres peut influencer leur structure, leurs propriétés et leur morphologie [15]. L’analyse chimique des fibres de palmier dattier
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
27
mentionnées dans le Tableau I-5 pourrait être affectée par l’origine de la plante, la qualité du sol et les conditions météorologiques [15].
III.1.5. Propriétés hydrophiliques
Le caractère hydrophile de fibres de palmier dattier a été comparé à d’autres fibres naturelles usuelles et les résultats sont présentés dans le Tableau I-6. Dans un premier temps, on peut constater que l’absorption d’eau des fibres naturelles est très élevée; elles ont la capacité, pour la majoritaire d’entre elles, d’absorber une masse d’eau supérieure à leur propre masse [16]. La fibre naturelle a une teneur élevée en hydroxyle de la cellulose qui la rend susceptible d’absorber de l’eau : les molécules réagissent avec le groupe hydroxyle (-OH) des molécules de cellulose pour former des liaisons hydrogènes [17].
Nous remarquons que l’absorption d’eau par les fibres de palmier dattier est relativement similaire à celle du sisal, plus élevée que celle de fibres de chanvre. Cette variation de la capacité d’absorption d’eau des fibres naturelles peut être attribuée à la taille de fibre et à la teneur en cellulose.
Tableau I-6 : Absorption d’eau de certaines fibres naturelles usuelles [16, 17]. Fibre Absorption à la saturation
%
Palmier dattier* 241
Chanvre 158
Sisal 190– 250
*Fibre naturelle à partir de broyage de bois de palmier dattier.
III.2. Composites à base de bois de palmier dattier
Un composite est un matériau qui combine les propriétés de ses composants pour améliorer certaines caractéristiques qui seront mieux adaptés à certaines applications, comme la résistance à la rupture, ou la rigidité, pour des composites à usages mécaniques[18].Dans le cadre de développement des matériaux de construction à faible coût économique dédiés à l’isolation thermique, de nombreux travaux scientifiques ont étudiés les propriétés mécaniques et thermophysiques des matériaux composites à fibres de palmier dattier.
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
28
III.2.1. Fibres de palmier dattier
Les déchets de palmier dattier ont été prélevés à partir les oasis de Biskra (Algérie), puis ils ont été soumis à un broyage mécanique à deux niveaux (broyage grossière et concassage) pour produire des fibres de différentes tailles. L’analyse granulométrique permet de classer les échantillons selon leurs tailles. Deux types de fibres ont été obtenus : (i) fibres fines avec un diamètre moyen de 3 mm, (ii) fibres grossières avec un diamètre moyen de 6 mm. Les étapes de broyage du bois de palmier dattier sont illustrées dans la Figure I-8.
Figure I-8 : Préparation des fibres de bois de palmier dattier : (A) bois de palmier dattier,
(B) broyeur mécanique (moteur de base), (C) appareil de tamisage du bois de palmier dattier,
et finalement (D) les fibres de bois de palmier dattier avec différentes tailles.
III.2.2. Composites à matrice polymère
Haddadi et al.[19] Ont évalué la possibilité d'utiliser des déchets de bois de palmier dattier dans des matrices polymères pour obtenir un matériau biocomposite à faible conductivité thermique afin de réduire les pertes de chaleur dans les bâtiments. L’étude se concentre d’une part sur l’étude de la morphologie, des propriétés thermiques et du comportement à la sorption d’une
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
29
matrice de résine renforcée par des fibres de bois de palmier dattier. Les composites utilisés sont préparés avec de la colle de résine vinylique blanche en tant que matrice et des fibres de bois de palmier dattier de 3 mm de diamètre moyen et une densité de 388 kg.m-3 (figure I-9).
150 x 150 x 20 mm3
Figure I-9 : Schéma de la préparation de composites à matrice polymère renforcés avec des
fibres de palmier dattier[19].
La conductivité thermique et le comportement d'absorption d'eau du polymère chargé de fibre de bois de palmier dattier ont été étudiés en fonction de la charge de fibres de bois de palier dattier. L'étude du comportement thermophysique montre que l'augmentation de la concentration de la matrice polymère diminue la conductivité thermique des biocomposites (figure I-10).
Le test d'absorption d'eau a révélé la forte tendance des composites à absorber de l'eau et que cette absorption a tendance à augmenter avec l'augmentation du contenu de la charge. Enfin, on peut conclure que l’utilisation du BPD en tant que matrices polymériques de renforcement permet d’obtenir des résultats intéressants pour la conductivité thermique de composites remplis dotés d’une isolation thermique améliorée.
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
30
Figure I-10 : Conductivité thermique effective des composites en fonction de la concentration
en fibres de bois de palmier dattier [19].
III.2.3. Composites à base de gypse
Chikhi et al. [20] ont réalisé des matériaux composites à bas de gypse dans le laboratoire contenant différentes tailles et concentrations massiques de fibres de bois de palmier dattier. Le composite gypse-fibres a été préparé en laboratoire selon la méthode suivante : (i) mélanger dans un malaxeur automatique pendant 5 minutes la poudre de gypse et l’eau avec un rapport eau/gypse égale à 0.6 qui produit une pâte bonne à travailler, donc une ouvrabilité meilleure, (ii) ajouter des fibres au mélange et mélanger les composants pendant 5 minutes, (iii) verser rapidement le mélange dans les moules.
A. Propriétés mécaniques
L’étude de comportement mécanique des composites de Gypse de Bois de Palmier Dattier a montré que la résistance à la compression et à la flexion des composites gypse-fibres diminue avec l’augmentation de la concentration des fibres.
Les auteurs ont révélé aussi que les valeurs de la résistance à la flexion et à la compression des composites chargés avec des fibres fines sont plus élevées que celles des composites préparés avec des fibres grossières et pour des concentrations supérieures à 2% (figure I-11).
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
31
Figure I-11 : Résistance à la compression des composites gypse-fibres au 28èmejour [20].
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
32
B. Propriétés thermophysiques
Les mesures de la conductivité thermique ont été effectuées sur plusieurs composites pour deux tailles de fibres et pour différentes concentrations (jusqu’à 10%). Les résultats ont révélé que lorsque la charge des fibres augmente, une diminution significative de la conductivité thermique et de la masse volumique est constaté (Figure I-12). Par ailleurs, l’effet de la concentration des fibres sur la conductivité thermique et la masse volumique des composites est plus significative que l’effet de la taille des fibres. Les auteurs ont démontré expérimentalement que l’ajout de 10% de fibres de palmier dattier a produit des composites avec une conductivité thermique comprise entre 0.15 et 0.17 W.m-1.K-1
L’effet de la concentration des fibres est le paramètre le plus influent sur les propriétés thermophysiques (conductivité thermique). Tandis que, les propriétés mécaniques de ces composites sont influencées par les deux paramètres, la concentration des fibres et leur taille (pour des concentrations supérieures à 2%).
Les auteurs recommandent l'utilisation de 5% de fibres de palmier dattier dans la matrice de gypse afin d'obtenir des composites avec de bonnes propriétés thermiques et mécaniques. Selon les résultats de l’étude, les auteurs recommandent l’utilisation de ces matériaux pour une application d’isolation thermique dans les panneaux solaires ou dans les façades intérieures des bâtiments. En outre, les auteurs suggèrent l’utilisation d’une nouvelle matrice comme le ciment pour produire des composites dédiés aux applications structurelles avec meilleurs performances en compression.
III.2.4. Béton à base de bois de palmier dattier (DPC)
Benmansour et al. [21]ont étudié un nouveau composite à base de ciment (peut aussi être nommé béton) préparé en mélangeant des fibres de BPD, ciment et sable (0/5 mm) dans un mélangeur pendant une durée de 3 minutes. L’eau de gâchage est ensuite ajoutée progressivement jusqu’à ce que le mélange devienne homogène et plus malléable. Finalement, le mélange est rapidement versé dans les moules.
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
33
A. Propriétés mécaniques
L’étude de la variation de la résistance à la compression de béton de bois de palmier dattier (DPC) en fonction de la teneur en fibres de palmier dattier a été effectuée. Les résultats montrent que la résistance à la compression diminue avec l’augmentation de la concentration des fibres (Figure I-13).
Figure I-13 : Résistance à la compression en fonction de la teneur en fibres [22].
La résistance à la compression des composites peut être affectée par la taille des fibres ; pour la charge de fibres supérieure à 5%, les composites chargés avec des fibres grossières présentent des résistances mécaniques supérieures à ceux chargés avec des fibres fines.
B. Propriétés thermophysiques
L’emploi des fibres de palmier dattier a pour première conséquence une diminution de la masse volumique de béton. De plus, un matériau allégé nécessite des fondations moins importantes lors de la construction. Les résultats de la conductivité thermique révèlent que l’addition des fibres de palmier dattier dans une matrice à base de ciment réduit la conductivité thermique du composite (Figure I-14).
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
34
Figure I-14 : Evolution de la conductivité thermique en fonction de la teneur en fibres [22]
Les auteurs ont conclu que la concentration optimale des fibres de palmier dattier se situe entre 5-15%. Pour ces concentrations, la résistance mécanique et la conductivité thermique des composites à fibres de palmier dattier sont compatibles avec l’utilisation dans le domaine de l’isolation thermique des bâtiments (Tableau I-7).
Tableau I-7 : Propriétés mécaniques et thermophysiques à 28ème jour[21, 22].
Concentration massique % Résistance à la Compression MPa Conductivité thermique W.m-1.K-1 Masse volumique kg.m-3 0 34.87 0.80 1890 15 (fibres fines) 1.44 0.14 984 15 (fibres grossières) 2.67 0.22 1254
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
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C. Propriétés hygrothermiques
On se basant sur les résultats de Benmansour et al.[21] la formulation de béton avec 15% de charge de fibres de bois de palmier dattier a été développé par la suit par Haba et al.[23]. En premier temps, une étude expérimentale des propriétés hydriques et de la conductivité thermique de DPC a été réalisée. L’étude expérimentale a révélé que le DPC est un matériau perméable à la vapeur d’eau en raison de sa microstructure. Sa résistance à la diffusion de la vapeur d’eau a été estimée à 4.4, nettement inférieure à celles des matériaux de construction traditionnels tels que le béton solide et le béton cellulaire autoclavé qui ont des valeurs élevées de 130 et 10, respectivement.
Tableau I-8 : Résultats de diffusivité hydrique [23]. Concentration massique
% Résistance à la diffusion de la vapeur d’eau -
Référence
DPC 4.4 [23]
LHM-wall 4.8 [24]
Béton solide 130 [25]
Béton cellulaire autoclavé 10 [25]
La diffusivité hydrique de DPC a été estimée en fonction de la perméabilité à la vapeur d’eau et l’isotherme de sorption. L’allure de cette courbe est en accord avec la théorie de De Vries. La valeur moyenne déterminée dans le domaine hygroscopique présentait une forte diffusion hydrique de DPC.
La conductivité thermique sèche est inférieure à 0.3 W.m-1. k-1, et la même chose pour le béton
de chanvre "LHM-wall". Selon la classification de RILEM, le béton des granulats légers avec une conductivité thermique inférieure à 0.3 W.m-1. K-1peut satisfaire les exigences de l’isolation
thermique. En revanche, l’influence de l’humidité (80% HR) sur la conductivité thermique était limitée et les résultats restent dans la gamme qui peut satisfaire les exigences de l’isolation thermique.
Plusieurs études conduites sur la caractérisation des propriétés thermo-physiques des matériaux bio-sourcés confirment la dépendance de la conductivité thermique et de l’humidité en raison de la forte hygroscopie de ces matériaux [26 -29].
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
36
La présence de l’humidité dans l’échantillon diminue la proportion d’air dans les pores et le pouvoir isolant de l’échantillon s’en trouve diminué, tout comme sa capacité thermique, [30]. La valeur de la conductivité thermique apparente peut croître d’un tiers par exemple lorsque la teneur en eau de l’échantillon passe de 2% à 11% à une température ambiante de 30°C.
Figure I-15 :Evolution de la diffusivité hydrique pour DPC[23]. D. Comportement hygrothermique à l’échelle paroi
les travaux de thèse de Haba [31] ont porté sur la prédiction numérique du comportement hygrothermique de DPC à l’échelle mur sous les conditions climatiques de la région de Batna (Nord-est d’Algérie) en utilisant le logiciel Wufi [31]. Les résultats ont révélé que ce biomatériau présentait une inertie thermique non négligeable sous conditions estivales. Les résultats de déphasage et de taux d’amortissement ont été estimés à 6 heures et 6%, respectivement. Ces résultats ont été comparés à ceux du béton traditionnel. Une paroi avec une bonne inertie thermique peut retarder le pic de température intérieure jusqu’à la nuit pendant le jour d’été ainsi que l’amortissement de la température extérieure, ce qui limite la surchauffe en été et contribuer à assurer le confort thermique. Des phénomènes d’évaporation de l’humidité peuvent probablement se produire dans la paroi en DPC sous l’effet de l’augmentation de la
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température à l’extérieur. En revanche, les conditions hivernales se caractérisent par un haut niveau d’humidité relative, cependant, aucun risque d’humidité ne peut être observé dans le mur en DPC pendant la période d’étude en ce qui concerne la croissance des moisissures. Cependant, la condensation superficielle et la croissance des moisissures sur la surface intérieure de la paroi en béton traditionnel peuvent avoir lieu, mais l’évaluation définitive nécessite des études détaillées pour de longues périodes du temps. Durant les conditions sévères de température en hiver, la paroi en DPC peut assurer la sensation de confort thermique, contrairement à celle en béton traditionnel.
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
38
IV. Effet du couplage entre les transferts de chaleur et de masse
Le transfert et le stockage de chaleur et de masse dans les milieux poreux sont deux phénomènes fortement couplés. Une bonne description du transfert hygrothermique dans les matériaux de constructions ne peut être atteinte sans tenir compte du couplage entre les transferts d’énergie et de masse. En effet, les états hydriques et thermiques d’un matériau ont un impact direct sur la cinétique du transfert hygrothermique qui peut être résumé dans les points suivants :
➢ La température et l’humidité ont un impact très important sur les propriétés thermiques et hydriques qui caractérisent le comportement hygrothermique d’un matériau poreux. Dans ce contexte, l’effet de l’état hygrothermique, particulièrement hydrique, peut varier sur les propriétés thermiques comme la chaleur spécifique et la conductivité thermique [32]. Le même effet est observé sur les propriétés hydriques qui varient à leur tour selon l’état thermique du matériau poreux, notamment la perméabilité à la diffusion de la vapeur d’eau [33] et la capacité de stockage de l’humidité (isotherme de l’adsorption).
➢ Un autre effet qui est dû aussi au couplage, sur le transfert hydrique peut se manifester. Il s’agit d’un mouvement d’humidité causé par un gradient thermique où autrement appelé « effet Soret ». En effet, la variation de température influe localement sur le taux d’humidité, en entrainant indirectement une redistribution de l’humidité dans le matériau. Différents travaux ont été réalisés afin d’étudier et d’évaluer ce phénomène de thermodiffusion. ➢ Le transfert de masse dans un milieu poreux engendre un transfert de chaleur par advection.
En outre, pour un milieu poreux humide, une chaleur spécifique supplémentaire d’eau s’ajoute dans l’enthalpie globale. Cette enthalpie due à la présence d’une quantité d’eau, dépend fortement de son état. Sa détermination exacte ne peut être possible que dans le cas où la distribution porale et la fonction de stockage d’humidité sont bien définies [34] ➢ Dans un matériau de construction exposé à des humidités élevées sous un gradient de
température, le phénomène de changement de phase qui se produit à l’intérieur du matériau a un effet non négligeable sur le transfert de chaleur. Kunzel et al. [34] ont montré que ce phénomène peut faire doubler le flux thermique dans certains matériaux isolants exposés à hautes humidités relatives. La prise en compte du phénomène de changement de phase dans le transfert thermique se traduit par l’ajout d’un terme source qui traduit la chaleur latente.
Chapitre I Contexte et état de l’art des matériaux biosourcés
39
V. Conclusion
Le déploiement des matériaux biosourcés dans la construction est l’une des solutions plausibles répondant aux nouvelles règlementations thermiques. Ainsi, les études sur le béton de bois de palmier dattier (DPC) sont en plein essor sur les plans expérimental et numérique.
Les caractérisations thermophysiques de DPC démontrent de très bonnes performances en termes d'isolation thermique, particulièrementavec15% de charges en BPD. La structure poreuse et hygroscopique du DPC a révélé une grande capacité d'absorption et de stockage de l'humidité.
Dans la suite de ce travail, nous proposons de compléter les études précédentes consacrées à la caractérisation thermophysique et mécanique de DPC par une étude complémentaire sur le comportement hygrothermique en adoptant l’analogie suivante :
Echelle du matériau : nous allons caractériser expérimentalement les isothermes d'adsorption-désorption, puis nous déterminons numériquement les capacités de sorption intermédiaires en utilisant un modèle phénoménologique qui permet enfin d’analyser le comportement hystérétique. Et finalement, nous allons caractériser le comportement de DPC dans des conditions dynamiques en étudiant la capacité de ce matériau à modérer l'effet des variations d'humidité externe.
Echelle du mur : l’étude sera focalisée sur l’étude du comportement hygrothermique d’une paroi DPC. Les recherches ont porté sur la capacité de ce matériau à modérer les variations cycliques de l’humidité et de la température. L’effet du mécanisme de couplage chaleur/humidité dans le béton du palmier dattier a également sera étudier.