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Nouvelles recherches sur le Plan de Saint-Gall

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Nouvelles recherches sur le Plan de Saint-Gall

Werner Jacobsen

To cite this version:

Werner Jacobsen. Nouvelles recherches sur le Plan de Saint-Gall. Cahiers du CRATHMA (Centre de recherche sur l’Antiquité tardive et le haut Moyen Âge), Université de Paris X-Nanterre, 2000, Le rayonnement spirituel et culturel de l’abaye de Saint-Gall, IX, pp.11-36. �hal-02910774�

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N ouvelles recherches sur le Plan de Saint-Gall*

p ar W erner JACOBSEN

L

f u n des p lu s g ra n d s trésors de la B ibliothèque cap itu laire de Saint- Gall est le fam eux « Plan de Saint- Gall » (fig. I ) 1. Il s'agit d u plan d 'u n m onastère carolingien dessiné su r parchem in et m ontrant tous les bâtim ents et leur am énagem ent. C 'est le seul exem ple d e p lan d u h a u t M oyen Âge qui n o u s soit p a rv e n u , delà son im portance pour l'histoire de l'a rt et le médiévisme.

Le plan est dessiné à l'encre rouge su r un parchem in d e 112 su r 77 centim ètres. Des com m entaires su r les différents bâtim ents et leur am én ag em en t y sont inscrits à l'encre noire. A u centre d u plan se trouve l'église ab­ batiale et le cloître des m oines ; les ateliers sont placés au su d, le cim etière et les cloîtres des novices et des m alades à l'est, au n o rd la m aison de l'abbé et l'hôtellerie des invités de m arque, à l'o u est celle des pèlerins et les éta- bles. L 'agencem ent de tous ces bâtim ents les uns p a r rap p o rt aux autres révèle une concep­ tion très approfondie. Les édifices sont rep ré­ sentés su r le p la n ; des inscriptions les com ­ m en ten t avec b e a u c o u p d 'ex a c titu d e . Des dim ensions o n t été en ou tre inscrites d ans

‘ Je rem ercie m ad am e Béatrice H em a d et m adam e A r­ iette Kosch ainsi qu e m adam e K. M erlin pou r la traduction de cet article.

1 B iblioth èq ue abbatiale de Saint-Gall, Cod. Sang. 1092.

l'église abbatiale (fig. 2) : l'église au rait une longueur totale de 200 pieds, la nef principale a u rait quarante pieds de large, les collatéraux v in g t pieds chacun. Les colonnes seraient sé­ parées p ar u n intervalle de douze pieds dans la n ef centrale et de dix p ied s d ans l'atriu m occidental. M ais ces dim ensions ne correspon­ d e n t pas aux proportions d u dessin2. Dans la dédicace, au bo rd su p érieu r d u parchem in, le scribe présente ce plan comme une copie qu'il a u rait élaborée p o u r la soum ettre à l'étude de Gozbert, son frère en religion.

Les chercheurs se sont penchés depuis p resq u e 400 ans su r ce plan. En 1604 déjà, H ein rich C anisius l'a v a it in tro d u it d ans le m onde scientifique3. C ent ans p lus tard, Jean M abillon le p u b lia d ans ses A n nales ordinis Sancti Benedicti4. Ferdinand Keller en présenta u n e édition détaillée en 18445. M ais ce n 'est que depuis 1952, avec l'éd itio n en fac-similé

2 C'est Georg D eh io qui le prem ier en fit la remarque : G eorg DEHIO/W ilhelm VON BEZOLD, D ie kirchliche Baukunst d e s A b en d la n d es, h isto r isch u n d sy stem a tisch dargestellt, Stuttgart 1887-1901,1, p. 161.

3 H einrich CANISIUS, A n tiq u ae lec tio n is seu antiqua m onum enta ad historiam m ediae aetatis illustrandam nunquam édita, Ingolstadt 1601-1608, V / 2 (1604), p. 780.

4 Jean MABILLON, A n nales o rd in is S. Benedicti, Paris 1703-1739, n , après p. 570.

5 Ferdinand KELLER, Baurifi d es K losters St. Gallen vom Jahr 820, Zurich 1844.

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12 Ca h i e rIX d uC R A T H M A

d u p la n p a r le H istorischer Verein des Kan- tons St. G allen6, que les chercheurs ont à leur disposition u n matériel de travail suffisant.

Il est donc fort com préhensible que, jus­ tem ent d u ran t ces q uaran te dernières années, cet objet unique ait été le sujet d 'u n e étude très poussée. W alter H orn en particulier a consacré u ne p artie de sa vie à ce plan , depuis ses re­ cherches à l'occasion de l'édition en fac-similé en 19527. L'opinion actuelle repose en grande partie sur ses travaux.

Les inscriptions d u p la n sont écrites en m inuscule carolingienne. Le plan est adressé à G ozbert, abbé de Saint-Gall de 816 à 837, ce qui p erm et de fixer p lu s précisém ent la date d u plan. O n a constaté il y a déjà longtem ps que les plantes des jardins d u plan correspon­ d en t à celles d u Capitulaire de V illii. Ce qui a fait conclure à une origine française m éridio­ nale e t à un ra p p o rt avec la réform e m onasti­ que d e Benoît d'A niane. C ette interprétation entraîne la question suivante : le plan de

Saint-6 D er k a r o lin g is ch e K Io ste rp la n v o n St. G a llen (Schw eiz). Facsim ile-W iedergabe in acht Farben, éd. H istori­ scher Verein des K antons St. Gallen, St. Gallen 1952.

7 N o u s m e n tio n n e r o n s ic i s e u le m e n t : W a lter H O R N /E m est BORN, The « D im ensional In consistandes » o f the Plan o f Saint Gall and the Problem of th e Scale o f the Plan, The Art Bulletin 48, 1966, p. 285-307. - ID., N e w Theses about the P lan o f St. G all. A Su m m ary o f R ecen t V iew s, D ie A b tei Reichenau. N eu e Beitràge zur G eschichte und Kultur d es Insel- klosters, Sigm aringen 1974, p. 407-480. - ID., The Plan o f St. Gall. A S tu d y o f the Architecture and E con om y of, and Life in a P arad igm atic C arolin gian M on astery, 3 vols., B e rk eley /L o s A n g eles/L o n d o n 1979.

8 A lfons DOPSCH, D as Capitulare d e Villis, d ie Brevium Exem pla un d der Bauplan von St. G allen, Vierteljahrsschrift für Sozial- un d W irtschaftsgeschichte 13,1916, p. 41-72.

Gall est-il u n « plan de construction » spécia­ lem ent élaboré p o u r Saint-G all ? O u bien s'agit-il d 'u n « plan idéal », conform e au Capi­ tulaire de V illis et à la réform e m onastique d 'A niane, et qui a u rait été diffusé d ans to ut l'em pire, m ais do n t seul cet exem plaire se se­ rait conservé ?

En analysant le parchem in, W alter H orn a trouvé une confirm ation d e cette seconde hypothèse9. Le réseau de lignes, com pliqué et très exact, a été ra p p o rté sans aucune erreur de dessin, mais aussi sans au cu n des m oyens auxquels un dessinateur aurait d û avoir en fait recours. Le dessin a été exécuté à m ain levée, mais en traits sûrs, d 'u n e m ain ferme. Les arcs de cercle dans le dessin, absides, paradis, tours rondes, ont été tracés sans com pas, m ais avec tan t d'exactitude q u 'o n a d û se servir ici d 'u n m odèle tracé au com pas. De légers déplace­ m ents dans le dessin des lignes rectangulaires en bas ont perm is à H o rn de trouver com m ent ce m odèle avait été utilisé : il s'ag it d 'u n cal- quage. Le parchem in de Saint-Gall a été placé su r le plan original et calqué ainsi. Les ins­ criptions d u plan o n t été écrites dans le m o­ nastère de la Reichenau, selon l'analyse paléo­ graphique de B ernhard Bischoff10, et le plan a donc d û avoir été calqué là aussi. O r la Rei­ chenau avait envoyé justem ent à cette époque deux m oines dans le m o n astère réform é de

9 Walter HORN, The Plan o f st. Gall - Original or C op y ?, Studien zum St. Galler K Iosterplan (M itteilungen zur vaterlàn- dischen Geschichte, 42), St. Gallen 1962, p. 79-102.

10 Bernhard BISCHOFF, D ie E ntstehung des K losterpla- n es in palâographischer Sicht, Stu d ien zu m St. Galler KIoster­ plan, op. cit., p. 67-78.

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No u v e l l e sr e c h e r c h e ss u rle Pl a nd e Sa i n t- Ga l l 13

Benoît d 'A niane à K ornelim ünster, près d'A ix- la-Chapelle, afin de p re n d re connaissance de la vie d 'u n m onastère réform é. En outre, c'est aussi d u ra n t cette pério de q u 'e u re n t lieu les deux synodes de réform e d e 816 et 817 où l'on discuta et fixa la réform e m o n astiq u e p o u r l'e m p ire to u t entier. C 'e st p o u rq u o i selon H orn on p e u t reconstruire la genèse d u p lan de Saint-Gall assez exactem ent de la m anière suivante : il a été p ro d u it d u ra n t le synode de 816 en tan t que « plan idéal » d 'u n m onastère réform é selon Aniane. Il fu t ensuite retouché lors d u synode de 817 et réduit, dans l'esp rit de la réform e, à des dim ensions plus restrein­ tes, inscrites su r le plan. Enfin il a été re p ro ­ d u it sous cette form e dernière dans la chan­ cellerie im périale et envoyé aux m onastères im périaux. C 'est ainsi q u 'u n exem plaire est p arv en u aussi à la Reichenau. Là, selon les directives d'H eito, alors abbé, on en a exécuté une copie p o u r l'abbaye voisine et am ie de Saint-Gall. Et seule cette copie de Saint-Gall nous est parvenue. Le plan doit donc avoir été dessiné entre le deuxièm e synode de 817 et la fin de l'abbatiat de Heito en 823.

C 'est seulem ent ces dernières années que cette hypothèse a été l'objet de sérieuses criti­ ques, d ues aux observations d e N orbert Sta- chura su r la surface d u parchem in11. Stachura

11 N orbert STACHURA, Der Plan v o n St. G allen - ein Original ?, Architecture 8, 1978, p. 184-186. - ID., Der Plan von St. G allen : der W estabschluÊ der Klosterkirche und sein e Va- rianten, Architecture 10, 1980, p. 33-37. - ID., D ie Entdeckung v o n Z eichn un gssp uren au f d em Plan v o n St. Gallen u n d das Problem seiner Urschriftlichkeit, Bericht über die 31. Tagung für

a trouvé dans toutes les parties essentielles du dessin un fin dessin préparatoire de réglures à la p o in te sèche, et ce m êm e p o u r des bâti­ m ents secondaires com m e la buanderie et le bain des moines au sud d u dortoir. Il a trouvé en ou tre tous les arcs de cercle tracés à la pointe sèche, avec au centre à chaque fois, les piqûres d u com pas. Il a trouvé en outre aussi sur la surface d u parchem in bon nom bre de ces dessins qui n 'o n t pas été retracés à l'encre rouge, m ais sim plem ent ignorés p ar le dessi­ n ateu r, su rto u t au n iv eau d u p a ra d is occi­ den tal (fig. 3). Avec ces découvertes de Sta­ chura, l'hypothèse de H o rn - utilisation d 'u n calque - devient superflue, ainsi que toutes les conclusions q u 'il en a v a it tirées : origine d'A niane, caractère de « p lan idéal » destiné à tous les m onastères de l'em pire, reproduction d u p lan en g ran d nom bre et p uis copie pour Saint-Gall.

Mais que signifient ces fines réglures ? Si on les e x am in e d e p rè s , q u e lq u e so it l'exactitude d u reste d u dessin, les réglures qui n 'o n t pas été repassées à l'encre rouge se trouvent seulem ent dans quelques parties peu nom breuses d u plan, c'est à dire à l'abside orientale de la chapelle, au paradis oriental de l'église abbatiale et su rto u t au p aradis occi­ dental (fig. 4). Les autres parties de l'église ont été dessinées d u p rem ier coup sans erreur. Il fau t donc q u 'il ait existé p o u r elles aussi un d essin , u n e éb au ch e, d e q u e lq u 'a m p le u r qu'elle fut.

A u sg ra b u n g sw issen sch a ft u n d B a u fo r sc h u n g (K o ld e v e y - Gesellschaft, 1980), 1982, p. 58-63.

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14 Cahier IX d u C R A TH M A

Cette su p p o sitio n se révèle sans fonde­ m ent, su rto u t en ce qu i concerne le p arad is occidental. Ici, u n g ran d nom bre d'arcs tracés à l'aiguille se recouvrent et s'excluent les uns les autres, ce qui sem blerait in d iq u er q u 'o n s'e st essayé, su r le p a rc h em in lui-m êm e, à donner p o u r la prem ière fois forme à ce p a ra ­ dis. J'ai trouvé dans cette zone, en tout, 23 arcs de cercle (fig. 5), d o n t 17 sont restés u n ique­ m ent tracés à l'aiguille, trois repassés à l'encre rouge, p o u r être ensuite effacés, et d o n t trois seu lem en t o n t été d essin és et fo rm en t a u ­ jo u rd 'h u i la partie occidentale. Tous ces arcs de cercle p erm etten t d e reconstruire n euf va­ riantes différentes de la p artie term inale occi­ dentale et sem blent b ien indiquer, ainsi que nous l'avions supposé, q u 'o n a essayé ici pour la prem ière fois de co n stru ire l'ab sid e occi­ dentale et le paradis su r le parchem in12.

Mais les découvertes de Stachura m on ­ tre n t seu lem en t les d e rn iè re s m odifications dans la représentation de l'église abbatiale. Si Ton examine le plan à la lum ière ultraviolette, on reco nn aît u n g ra n d n o m b re d e p arties grattées, effacées, su rto u t d an s la zone de la nef (fig. 6)13. Le dispositif liturgique de la nef centrale avait to u t d 'a b o rd été placé p lus à Test, de m êm e que les autels secondaires des collatéraux d o n t on n 'a v a it p rév u que trois paires.

12 W erner JACOBSEN, D er K losterplan v o n St. G allen un d d ie karolingische A rchitektur. E ntw icklu ng un d W andel von Form und B edeutung im frànkischen Kirchenbau zw isch en 751 und 840, Berlin 1992, p. 48-52.

° Ibid., p. 53-62.

P o u rq u o i cette c o n cen tratio n d a n s la p artie orientale ? U ne ligne effacée, qui avait été tracée à l'encre rouge, et qui traverse toute l'église d u n o rd au sud à la h a u te u r d u côté occidental d u cloître nous offre l'explication14. Le dessinateu r avait p rév u d ans u n p rem ier projet d 'arrêter la nef là, à cet endroit. En exa­ m inant les restes effacés, no u s pouvons m êm e voir quelle solution avait été envisagée en ce q u i con cern e cette p a rtie o c cid e n ta le de l'église. C ar la lig n e effacée c o n tin u a it à l'ex térieu r des m urs. Elle était aussi longue que la largeur du transept oriental. À l'ouest, deu x arcades p lus loin, se tro u v e u n e ligne égalem en t effacée qui trav erse au ssi to u te l'église. Il sem ble donc q u 'o n avait p ré v u ici au déb u t u n tran sep t occidental. La prem ière église du plan de Saint-Gall devait donc avoir une nef courte de cinq arcades et u n tran sept occidental sem blable au transep t oriental (fig. 7)15.

Le d e ssin a te u r a ch an g é cette form e p e n d an t son travail sur le parchem in. Le tran ­ sep t occidental déjà tracé à l'encre rouge a été abandonné, effacé, et rem placé p a r u n e nef plus longue qui se term inait de nouveau en un tran sep t occidental. Le m u r ouest de l'ancien tran sep t est dev en u le m u r oriental d u n o u ­ veau transept. Les angles ou est d u no u v eau tra n sep t ont aussi été dessinés d an s la zone des vestibules d u p a ra d is actuel. Les deux p u p itres d ev an t la paroi d u chancel, qui se

v Ibid., p . 60-62.

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No u v e l l e sr e c h e r c h e ss u rl e Pl a nd e Sa i n t- Ga l l 15

retro u v e n t aussi au tra n s e p t est, p ro u v e n t qu'il s'agissait bien là d 'u n transep t (fig. 8)16.

Mais ce nouvel arran g em en t n 'a pas sa­ tisfait non p lu s le d essin ateu r d u plan. Il l'a modifié encore p o u r en arriver au plan actuel en lignes rouges (fig. 9). Il a finalem ent aban­ donné l'id ée d 'u n tra n sep t occidental et ral­ longé la nef ju sq u 'à l'ab sid e occidentale. Le plan avait enfin acquis son aspect actuel et le dessinateur p o u v a it s'a p p u y e r su r ce dessin pour tracer enfin les bâtim ents secondaires. Ce n 'e st q u 'a p rè s leu r ach èv em en t que fu ren t apposées les inscriptions. Ces m odifications observées ici, ces changem ents dans le plan de l'église elle-m êm e, on t eu lieu sans aucun doute d u ra n t la production d u dessin. O n voit ici très clairem ent quelles discussions agitaient les esprits des dessin ateu rs d u plan p en d an t leur travail dans le scrip to riu m de la Reiche- nau.

Pour retracer leur réflexion depuis le d é­ but, il no u s fau t considérer naturellem ent la prem ière variante de l'église abbatiale avec sa nef courte de cinq arcades et son transept oc­ cidental (fig. 7). Parm i to u tes les églises de l'époque qui sont a u jo u rd 'h u i connues grâce aux fouilles archéo lo g iq u es, on ne tro u v e q u 'u n seul ensem ble que l'o n puisse com parer à cette variante, et c'est l'église abbatiale de la Reichenau (fig. 10). Elle a été commencée peu après 806 p a r l'ab b é H eito et consacrée en 81617. À p a rt les absides doubles, l'absence de

16Ibid., p. 64-67.

17 Emil REISSER, D ie frühe B augeschichte des M ünsters zu Reichenau (Forschungen zur d eutsch en K unstgeschichte, 37),

la crypte et la nef trop courte avec u n simple m u r pignon, le nouvel édifice de la Reichenau correspond à l'aspect de Saint-Gall.

Thom as P u ttfark en l'a v a it déjà rem ar­ qué18, m ais seulem ent en se ra p p o rta n t à la v ersio n finale d u plan à l'en cre rouge. On avait toujours rejeté cette com paraison en in­ sistant sur les différences, surtout à cause de la n ef si différente, si longue su r le plan. Mais cette prem ière version retrouvée su r le plan éclaire le problèm e de façon nouvelle. La p re­ m ière église du plan (fig. 7) était encore beau­ coup p lus conforme que ne le pensait Puttfar­ ken à l'église de la R eichenau, n o n p as à l'édifice term iné en 816 m ais bien p lu tô t à l'édifice complété p eu après en 830 sous l'abbé Erlebald, avec une nef d e cinq arcades et un transept occidental (fig. 11)19.

C'est, dans l'histoire de l'architecture du h a u t M oyen Âge, l'u n des exem ples les plus frap pan ts de l'utilisation directe, en tan t que m odèle, d 'u n édifice déterm iné p a r u n autre édifice. O n p eu t voir ici quel bâtim ent a servi de m odèle à l'autre. La prem ière version du p lan de Saint-Gall a été rem aniée et abandon­ née déjà d u ra n t les travaux sur le parchem in. Ce n 'e st donc pas elle qui a servi de plan de construction à l'édifice de la Reichenau. Au

Berlin 1960. - W olfgang ERDMANN/AlfonsZETTLER, Zur karo- lin gisch en und ottonischen B augeschichte des M arienmünsters z u R eichenau-M ittelzell, D ie A b tei R eichenau, op. cit., p. 481- 522.

B T hom as PUTTFARKEN, Ein neuer Vorschlag zu m St. Galler K losterplan : D ie originalen M afiinschriften, Frühmittel- alterliche Studien 2,1968, p. 78-95.

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16 Ca h i e rIX d u C R A TH M A

contraire, cette prem ière version d u plan s'est servi de la situation de la Reichenau comm e p o in t de d é p a rt des réflexions des d essin a­ teurs d u plan.

Ce fait est d 'a u ta n t m oins étonnant que le plan comme il est pro u v é a été p ro d u it à la Reichenau. M ais deu x conséquences im p o r­ tantes s'im posent. La prem ière est celle de la datation exacte d u plan. Les agrandissem ents d e l'église d e la Reichenau sous Erlebald ont été com m encés en 83020. Le p lan s'y réfère d ans sa prem ière version. En m êm e tem ps, la version finale d u plan, c'est à dire celle des m esu res inscrites, a servi de base à l'ab b é G ozbert p o u r c o n stru ire la nouvelle église abbatiale de Saint-Gall qui a été aussi com ­ m encée en 830 (fig. 12)21. Le p lan a donc d û être p ro d u it en cette année 830.

La seconde conséquence concerne le fa ­ m eux ra p p o rt d u p lan à la réform e d'A niane. En 830, d ate de la confection d u plan, la ré ­ form e de Benoît d 'A n iane avait déjà échoué. Benoît était m o rt d ep u is n eu f ans, ses p a rti­ sans étaient divisés. Et l'e m p e re u r Louis le Pieux qui avait soutenu la réform e était si af­ faibli en raison de l'évolution politique défa­ vorable, surto u t à cause d e la rebellion de ses fils en cette m êm e année 83022, que l'o n ne p e u t pas plus parler d 'u n e influence de la ré ­ form e su r les d essin ateu rs d e la Reichenau,

“ J a c o b s e n , op. cit., p. 162. 21 Ibid., p. 176-185.

22 François L ouis GANSHOF, A m Vorabend der ersten Krise der Regierung L ud w igs d e s From m en. Die Jahre 828 un d 829, Frühmittelalterliche Studien 6,1972, p. 39-54.

que sur Erlebald, dans ses agrandissem ents de l'église abbatiale de la Reichenau en 830.

O n ne p e u t pas trouver non p lus de ra p ­ p o rts avec les b â tim e n ts d e la réfo rm e d'A niane eux-m êm es. L'abbaye centrale de la ré fo rm e, K o rn e lim ü n s te r p rè s d 'A ix -la - Chapelle, présen tait un aspect architectonique to u t différent (fig. 13 f 3. C 'était u n p etit en­ sem ble avec u n tra n se p t cloisonné, term iné p a r trois absides et u n m assif occidental en tro is p a rtie s. O n p e u t jo in d re à K orneli­ m ü n ste r les b asiliq u es de M arm o u tier en A lsace (fig. 14)24 e t d e S te in b a c h d a n s l'O denw ald (fig. 15)25, to u t com m e les petites églises-halles p lu s m o d estes d 'A n ian e (fig. 16)26 et d 'A rg e llie rs (fig. 17)27, sem blables qu an t aux dim ensions com parables, à la dis­ position architecturale et à la position

politi-25 Léo FïUGOT, Kornelim ünster. U n tersu ch ung über die bau gesch ichtlich e E n tw ick lu n g der eh e m a lig en Benediktiner- klosterkirche (R h ein isch e A u sgrab u n gen , 2), C o lo g n e /G r a z 1968.

a François PÉTRY/Erwin KERN, D écou vertes archéolo­ g iq u es dan s l'a n cien n e abbatiale d e M arm outier (Bas-Rhin). R apport p rovisoire, C ahiers a lsacien s d 'arch éologie, d'art et d'histoire 20,1977, p. 39-88.

25 Otto MÜLLER, D ie Einharts-Basilika zu Steinbach bei M ichelstadt im O d en w ald , Seligenstadt 1937.

26 Brigitte UHDE-STAHL, Ein unverôffentlichter Plan des m ittelalterlich en K losters A n ia n e, Z eitsch rift für K un stge- sch ich te 43, 1980, p. 1-10. - Les 1000 m o in e s d e l'abbaye d'A niane, m entionnés par A rdon dans sa « Vita Benedicti abba- tis A nianensis et In densis » (M GH SS 1 5 /1 , p. 198-220) son t du d om ain e d e la lég e n d e et l'on ne p eu t e n tirer d e conclu sion quant aux d im en sio n s d e l'ég lise abbatiale d 'A n ian e au VIIIe siècle.

77 Marcel DURLIAT, U n e construction d e l'ép oq u e de

saint Benoit d'A n iane à A rgelliers (Hérault), R evue archéologi­ qu e de Narbonnaise 1,1968, p. 233-247.

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No u v e l l e sr e c h e r c h e ss u rle Pl a nd e Sa i n t- Ga l l 17

que de leurs co n stru cteu rs. Les dim ensions m odestes de ces édifices d'A n ian e et la con­ cen tratio n d e la litu rg ie d a n s les p a rtie s orientales sont en contradiction totale avec le bâtim ent de la Reichenau d'Erlebald et l'église dessinée su r le p la n d e Saint-Gall, et encore p lus avec les d im en sio n s inscrites d u plan. Avec quarante pieds, c'est à dire treize m ètres p o u r la larg eur de la n ef centrale, plus large que celle des cathédrales de Paris ou de Colo­ gne, ces dim ensions q u i surpassent encore le m odèle de la Reichenau, ont été réalisées très exactement, to u t aussi m onum entales, dans la construction de l'église abbatiale de Saint-Gall p ar l'abbé G ozbert en 830/835 (fig. 12). Avec ce bâtim ent de G ozbert a été bâtie à Saint-Gall une des plus grandes églises connues de toute la p ério d e caro lin gien n e. Elle signifiait u n ab an d o n des p e tits édifices de la réform e d'A niane et u n re to u r à l'architecture de re ­

présen tatio n de l'ép o q u e d e C harlem agne28. Cette conclusion s'im pose en ce qui concerne l'utilisation des chapiteaux à feuilles antiqui- sants dans l'église de G ozbert (fig. 18)29. Dans ces années à p a rtir de 830, m arquées p ar le souvenir d e l'époque dorée d u gran d Charle­ m agne, l'architecture elle aussi renouait avec cette période. U n d es exem ples les p lu s im ­ p re s sio n n a n ts en e st la c o n stru c tio n de G ozbert à Saint-Gall et le p lan de Saint-Gall m êm e qui la p ré p a rait directem ent. C 'est ce p lan qui dévoile les discussions véhém entes d 'alo rs au sujet d e la conception esthétique, des dim ensions architecturales et de l'aspect architectonique de l'église abbatiale de Saint- Gall d o n t la construction p e u t être considérée comme u n exem ple de la restauration globale des années 830/840.

W erner JACOBSEN

28 W em er JACOBSEN, Benedikt v o n A n ian e und d ie Ar- chitektur unter L u d w ig d e m From m en zw isch en 814 un d 830, A tti d el XXIV C o n gresso in tern a zio n a le d i storia dell'arte (Bologna 1979), Bologna 198 3 ,1, S. 15-22.

29 II est à d éplorer qu e ces chapiteaux trouvés en 1966 par H ans R u dolf Sennhauser n'aient pas encore fait l'objet d'une publication détaillée.

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Figure

Fig.  1  : Plan de Saint-Gall. Bibliothèque abbatiale de Saint-Gall.
Fig. 2 : Église abbatiale, mesures inscrites.W. Jacobsen.
Fig. 4 : Église abbatiale, réglures à la pointesèche. W. Jacobsen.
Fig. 6 : Église abbatiale, nef, lignesgrattées.W. Jacobsen. Fig 7 . Église abbatiale, premier projet
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