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La sexualité et l’érotisme face à face

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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a sexualité en tant que telle contient en soi une multiplicité d’as- pects et de valeurs qui s’intriquent et se complètent réciproque- ment. Il y a en premier lieu, bien sûr, la question de l’identité de chacun. Ensuite, le fait que l’univers des humains est partagé presque moitié-moitié en femmes et en hommes et que ces deux parties essen- tielles du monde biologique au sens large sont à la fois presque identi- ques et néanmoins différentes. Identiques dans leur structure biologique

de base et différentes dans la manière de percevoir et de se percevoir. En d’autres termes, femmes et hommes vivent ensemble, côte à côte, com- muniquent sans cesse entre eux, en- fin ne peuvent pas se passer l’un de l’autre et pourtant se sentent quelque peu étrangers l’un à l’autre. Qu’ils se disputent, s’aiment ou croient s’aimer, la perspective que soudain il n’y aurait plus qu’un seul sexe pourrait bel et bien être ressentie comme la pire des catastrophes.

Toujours est-il que même s’ils s’alimentent d’une manière identique, même si également ils ne dorment pas d’une manière particulière à leur sexe respectif, chacun d’eux, chacune d’elles, tient beaucoup à faire re- marquer sa singularité personnelle. Même si justement, en dormant, ils font des rêves pas tellement dissemblables, leurs projets secrets à l’état de veille se différencient passablement.

Chacun des deux sexes, notamment, semble faire des efforts pour at- teindre un point de vue commun à propos de l’activité sexuelle, surtout de celle qu’ils vont réaliser ensemble. Et pourtant, à bien des égards rien n’est plus différent que l’approche de la sexualité agie, soit par exemple pour ce qui est de la fréquence et de la durée de chaque acte sexuel, soit aussi bien par le fait que chaque mâle humain renferme en soi une part féminine, autant psycho-émotionnelle qu’hormonale, de même que chaque femelle humaine renferme, elle, une partie masculine de la même struc- ture. Cela n’empêche pas que l’usage affectif de cet aspect intérieur mino- ritaire finit par avoir un emploi différent. Sans tenir compte du fait qu’en parlant de sexualité tout court, on se réfère autant à une sexualité à visée reproductive qu’à une sexualité à visée non reproductive.

Dans le passé, il y a certes eu des moments où l’on supposait que le besoin reproductif était prépondérant plutôt du côté féminin, ou que les hommes ressentaient éventuellement le besoin d’avoir des enfants davan- tage comme héritiers que comme source d’investissement affectif propre- ment dit. Aujourd’hui, en tout cas, il ne semble plus exister une telle dis- tinction. Bref, les deux sexes tantôt se rapprochent jusqu’à presque se confondre, et tantôt s’éloignent à presque faire penser qu’ils pourraient en pratique se passer l’un de l’autre, tout en négligeant la réalité qu’il puisse y avoir des alliances imprévues entre un homme et une femme.

Et l’érotisme, dans tout cela ?

De nos jours, et peut-être à la suite de la pensée de Freud, on peut parler

La sexualité et l’érotisme face à face

«… femmes et hommes ne peuvent se passer l’un de l’autre et pourtant se sentent quelque peu étrangers l’un à l’autre …»

éditorial

Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 19 mars 2014 635

Editorial

G. Abraham

F. Bianchi-Demicheli

du professeur

Georges Abraham

Ancien professeur aux Universités de Genève et Turin

et du docteur

Francesco Bianchi- Demicheli

Consultation de gynécologie psycho- somatique et médecine sexuelle Département de gynécologie obstétrique

HUG, Genève Articles publiés sous la direction

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d’un processus d’érotisation pour bien d’autres fonctions organiques que la limiter à la pure sexualité. On peut se référer par exemple à une éroti- sation prioritaire de la fonction alimentaire et digestive, comme à une éro- tisation d’une activité musculaire ou de l’usage d’une drogue quelconque.

On pourrait évidemment parler aussi d’une possible érotisation de la technologie électronique actuelle comme de celle d’une quelconque idéologie.

Toutefois, si l’on centre la notion d’érotisation dans ses confins pour ainsi dire naturels, on se heurte de nouveau à la complexité représentée par une tentative de la part des hommes et des femmes de converger sur un accord complet et le besoin parallèle de sauvegarder une différence bien précise dans la manière de s’embarquer dans une aven- ture érotique. Dépassées que semblent être des idées reçues, telle celle d’une propen- sion nettement féminine à une durée la plus prolongée possible d’une re- lation amoureuse ou un besoin féminin d’une plus grande implication d’émotions dans un érotisme agi sexuellement.

Mis à part donc des différences liées aussi à la morphologie et à la physio- logie des deux sexes et aux inégalités de l’histoire personnelle de chacun, il reste une marge de perspectives absolument communes à certes ne pas relativiser. Il y a bien évidemment l’importance, inaliénable pour chacun, du sens de la vie, comme le fait que par exemple le vieillissement, au sein d’un couple, peut être ressenti autant comme une catastrophe que comme au contraire un devenir personnalisant.

Mais il y a en tout premier lieu deux points de repère sources possibles tantôt de conflits ouverts ou sous-jacents, tantôt à l’opposé de réflexion et d’amélioration du rapport. L’un de ces problèmes de base est la diffi- culté de tenir ensemble, de complémentariser, tant pour la femme que pour l’homme, les émotions et les sensations. Emotions et sensations peuvent en effet se dresser les unes contre les autres, autant qu’elles sont susceptibles de se renforcer mutuellement. L’autre problème est encore plus fondamental, même s’il donne l’impression de pouvoir prendre des stigmates quelque peu philosophiques. C’est le rapport inextricable et souvent paradoxal entre plaisir et douleur. Le plaisir si séduisant en soi, mais très fugace et trompeur, apte à menacer tout un chacun de solitude et d’égocentrisme, et par contre la douleur, si menaçante et hostile au dé- part, mais source spontanée de solidarité et de désir de changement.

636 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 19 mars 2014

«… le rapport inextricable et souvent paradoxal entre plaisir et douleur …»

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