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COUVERTURE DE LA CRISE MIGRATOIRE DANS LA PRESSE FRANÇAISE: ANALYSE DISCURSIVE

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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COUVERTURE DE LA CRISE MIGRATOIRE DANS LA PRESSE FRANÇAISE: ANALYSE DISCURSIVE

Elmira Harizanova

Studentennummer: 00701414

Promotor: Prof. dr. Anneleen Spiessens

Masterproef voorgelegd voor het behalen van de graad master in de Meertalige Communicatie Academiejaar: 2017 – 2018

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Verklaring i.v.m. auteursrecht

De auteur en de promotor(en) geven de toelating deze studie als geheel voor consultatie beschikbaar te stellen voor persoonlijk gebruik. Elk ander gebruik valt onder de beperkingen van het auteursrecht, in het bijzonder met betrekking tot de verplichting de bron uitdrukkelijk te vermelden bij het aanhalen van gegevens uit deze studie.

Het auteursrecht betreffende de gegevens vermeld in deze studie berust bij de promotor(en).

Het auteursrecht beperkt zich tot de wijze waarop de auteur de problematiek van het onderwerp heeft benaderd en neergeschreven. De auteur respecteert daarbij het oorspronkelijke

auteursrecht van de individueel geciteerde studies en eventueel bijhorende documentatie, zoals tabellen en figuren. De auteur en de promotor(en) zijn niet verantwoordelijk voor de

behandelingen en eventuele doseringen die in deze studie geciteerd en beschreven zijn.

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Avant-propos

Ce mémoire a été élaboré afin d’obtenir le degré de Master en Communication Multilingue.

Cela a été un grand défi. Voilà pourquoi, j’aimerais remercier ma maman sur qui j’ai toujours pu compter et qui m’a énormément soutenue durant tout le parcours de mes études et de ce travail.

Je tiens à remercier Rosie en particulier, qui a été présente du début jusqu’à la fin pour faire des révisions très utiles et pour son encouragement.

Je veux également exprimer ma reconnaissance à Mario, Nicolas, Mariam, Monique, Joline et son beau-père pour des révisions supplémentaires.

En outre, j’aimerai remercier tous mes amis qui m’ont soutenue.

Je remercie également ma promotrice, prof. Anneleen Spiessens pour sa communication claire et ponctuelle, ses bons conseils et ses compétences d'experte.

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Table des matières

Abréviations……….p. 10 Tableaux ... p. 12 Graphiques……….. p. 12

Résumé ... p. 14

1. Introduction... pp. 16-18 1.1 Calais et la crise migratoire européenne ... p.17 1.2 Objectifs de l’étude ... pp. 16-17 1.3 Structure de l’étude ... p. 17 2. Cadre théorique ... pp. 19- 33 2.1 Analyse Critique du Discours (ACD)... pp. 19 - 21 2.1.1 Général ... p. 19 2.1.2 Objectifs principaux de l’ACD ... p. 19 2.1.3 Terminologie ... pp. 19 - 21 2.2 Le « framing » ... pp. 21 - 33 2.2.1 Introduction ... pp. 21- 22 2.2.2 Définition et terminologie ... pp. 22 -23 2.2.3 Méthodes de recherche inductives et déductives ... p. 24 2.2.4 Le « framing » et la crise migratoire ... pp. 24- 28 2.2.5 Les métaphores et la migration ... pp. 28 - 31 2.2.6 Choix lexical pour référer aux « migrants » ... pp. 31 - 33 3. Méthodologie ... pp. 33 - 41 3.1 Questions de recherche ... p. 33 3.2 Sources ... pp. 33 - 34 3.3 Composition du corpus ... p. 34 3.4 Détermination de la matrice de repère ... pp. 34 - 40 3.5 Détermination de l’analyse des métaphores... p. 40 3.6 Détermination de l’analyse lexique ... p. 41 4. Résultats ... pp. 41 - 67 4.1 Résultats de l’analyse des « frames » ... pp. 41 - 50 4.1.1 Résultats de l’analyse des « frames » du quotidien « La Voix du Nord » ... pp. 41 - 50 4.1.1.1 Le cadre de menace ... pp. 43 - 45 4.1.1.2 Le cadre de responsabilité ... pp. 45 - 46 4.1.1.3 Le cadre d’intérêt humain ... pp. 46 - 47 4.1.1.4 Le cadre économique ... pp. 47 - 48 4.1.1.5 Le cadre de conflit ... pp. 48 - 49 4.1.1.6 Le cadre de moralité ... p. 49

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4.1.1.7 Les « frames » qui apparaissent les plus ensemble dans le quotidien « La Voix du Nord » pp. 49 - 50 4.1.2 Résultats de l’analyse des « frames » du quotidien « Le Monde » ... pp. 50 - 60 4.1.2.1 Le cadre de menace ... pp. 52 - 54 4.1.2.2 Le cadre de responsabilité ... pp. 54 - 55 4.1.2.3 Le cadre d’intérêt humain ... pp. 55 - 56 4.1.2.4 Le cadre de conflit ... pp. 56 - 57 4.1.2.5 Le cadre économique ... pp. 57 - 58 4.1.2.6 Le cadre de moralité ... pp. 58 - 59 4.1.2.7 Les « frames » qui apparaissent les plus ensemble dans le quotidien « Le Monde » ... pp. 59 - 60 4.1.3 Résultats de l’analyse comparative des journaux « La Voix du Nord » et « Le Monde » ... pp. 60 - 64 4.2 Résultats de l’analyse des métaphores ... pp. 64 - 65 4.3 Résultats de l’analyse lexique ... pp. 65 - 67 5. Conclusion ... pp. 67 – 71 5.1. Résumé……… . pp. 67 - 68 5.2 Résultats de l’analyse des « frames » des journaux « La Voix du Nord » et « Le monde »……… … … pp. 68 - 69 5.3 Résultats de l’analyse des métaphores……… …. pp. 70- 71

6. Bibliographie ... p. 72

Annexes

I. Clé USB avec les corpus français II. Excel avec toutes les analyses

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Abréviations

ACD Analyse Critique du Discours CDA Critical Discourse Analysis

LM Le Monde

VDN La Voix du Nord

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Tableaux

Tableau 1 : Présence des « frames » latents dévoilés dans les articles du journal « La Voix du Nord » pp. 41 - 42 Tableau 2 : Présence des thèses du cadre de menace dans le journal « La Voix du Nord » pp. 43 44 Tableau 3 : Présence des thèses du cadre de responsabilité dans le journal « La Voix du Nord » p. 45 Tableau 4 : Présence des thèses du cadre d’intérêt humain dans le journal « La Voix du Nord » p. 46 Tableau 5 : Présence des thèses du cadre économique dans le journal « La Voix du Nord » p. 47 Tableau 6 : Présence des thèses du cadre de conflit dans le journal « La Voix du Nord » p. 48 Tableau 7 : Présence des thèses du cadre de moralité dans le journal « La Voix du Nord » p. 49 Tableau 8 : Les combinaisons des « frames » les plus récurrents dans le journal « La Voix du Nord ». p. 50 Tableau 9 : Présence des « frames » latents dévoilés dans les articles du quotidien « Le Monde» pp. 50 - 51 Tableau 10: Présence des thèses du cadre de menace dans le journal « Le Monde » p. 52 Tableau 11: Présence des thèses du cadre de responsabilité dans le journal « Le Monde » pp. 54 - 55 Tableau 12: Présence des thèses du cadre d’intérêt humain dans le journal « Le Monde » pp. 55 – 56 Tableau 13: Présence des thèses du cadre de conflit dans le journal « Le Monde » pp. 56 - 57 Tableau 14: Présence des thèses du cadre de conflit dans le journal « Le Monde » p. 58 Tableau 15: Présence des thèses du cadre de conflit dans le journal « Le Monde » p. 59 Tableau 16 : Présence des « frames » les plus récurrents dans le journal « Le Monde ». p. 59 Tableau 17 : « frames » dans les articles des journaux « La Voix du Nord » et « Le monde » p. 60 Tableau 18 : Les combinaisons des « frames » les plus récurrents dans les journaux « Le Monde » et « La Voix du Nord ». pp. 61 - 62 Tableau 19 : Présence des métaphores pour les journaux « La Voix du Nord » et « Le Monde » p. 65 Tableau 20 : Résultats de l’analyse lexique pour désigner « les migrants pp. 65 - 66

Graphiques

Graphique 1 : Résultats pour « La Voix du Nord » p. 42 Graphique 2 : Résultats pour « Le Monde» p. 51 Graphique 3 : Résultats pour « La Voix du Nord » et « Le Monde » p. 61

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Résumé

Ce travail vise à exposer les structures d’inégalité des « frames » sous-jacents dans les articles des journaux « La Voix du Nord » et « Le Monde ». En effet, ces articles traitent la couverture de

l’évacuation de la lande de Calais en octobre 2016. Pour ce faire, nous avons élaboré une matrice de contrôle s’appuyant sur des études de Semetko et Valkenburg (2000), de Decker et Scholten (2015), de Horsti (2003), Van Gorp (2006) et Valkenburg et alii. (1999). Nous porterons une attention spéciale aux combinaisons de « frames » qui apparaissent le plus souvent ensemble dans les articles desdits journaux. Une brève analyse supplémentaire des métaphores et des choix lexiques désignant les « migrants » dans le discours migratoire sera également ajoutée. Il ressort des résultats que le

« frame » de menace accompagné de la métaphore de l’eau est prédominant dans chacun des journaux sélectionnés, suivi par les « frames » de responsabilité et d’intérêt humain. L’analyse métaphorique démontre que la métaphore de l’eau est la plus récurrente dans « Le Monde ». Dans le quotidien « La Voix du Nord » par contre, il s’agit de la métaphore de la mise à l’abri. En outre, l’analyse lexique montre que le journal « Le Monde » utilise plus souvent des termes péjoratifs que

« La Voix du Nord ». (222 mots)

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1. Introduction

1.1 Calais et la crise migratoire européenne

La ville de Calais est située dans le nord de la France et est un point de passage principal pour aller en Grande-Bretagne.

Ces dernières années, cette ville portuaire est devenue la ville emblématique de la crise des migrants en Europe (Verbeke, 24.06.2018). En effet, de nombreux migrants fuyant les pays en guerre comme l’Iran, le Pakistan et le Soudan essayent de passer vers l’Outre-manche en espérant y vivre une vie meilleure (Verbeke, 24.06.2018).

Dans les médias, on entend souvent parler de l’Angleterre comme étant l’Eldorado, la terre promise, le paradis des migrants. Elle est une destination très convoitée pour différentes raisons :

En Angleterre, il est premièrement plus facile de rester « invisible » que dans d’autres pays

européens, grâce au marché de l’emploi très libéral (Verbeke, 24.06.2018). Il n’y a pas de système de carte d'identité nationale, la police ne peut pas arrêter quelqu’un sans raison légale et il y a moins de contrôles de l’immigration irrégulière (Ollevier, 24.06.2018).

Deuxièmement, beaucoup de personnes qui arrivent en Angleterre sont accueillies par des réseaux qui les aident à trouver un petit emploi. De plus, beaucoup d’immigrés espèrent recevoir un permis de séjour grâce à la loi britannique concernant le regroupement familial. En effet, nombreux d’entre eux y ont déjà de la famille ou des amis (Ollevier, 24.06.2018).

Une troisième raison est le fait que beaucoup de migrants parlent déjà l’anglais et qu’elle est la lingua franca du monde. La langue anglaise est un passe-partout pour trouver du travail ou pour pouvoir faire des études en Angleterre et partout dans le monde (Ollevier, 24.06.2018).

Finalement, les Anglais ont l’habitude de vivre dans un environnement cosmopolite: déjà dans les années 1950, il y a eu une grande immigration en provenance de l’Inde et du Pakistan. Par conséquent, la contribution des migrants à la société anglaise n’est plus contestée par les Anglais (Verbeke, 24.06.2018).

Cependant, la réalité est bien différente et l’autorisation officielle pour obtenir un titre de séjour britannique prend beaucoup de temps et est souvent refusée.

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Voilà pourquoi beaucoup de migrants essayent de se cacher à bord d’un bateau ou d’un train pour pouvoir atteindre l’Outre-manche (1 jour, 1 question, 24.06.2018). Ils espèrent y vivre en situation irrégulière. Néanmoins, beaucoup n’y réussissent pas, car la frontière est très surveillée et le nombre de migrants ne cesse d’augmenter (Verbeke, 24.06.2018).

En attendant de réussir leur passage, des milliers de migrants se sont installés au Nord-Pas-De-Calais et ils y vivent dans un campement, qui est plus connu dans les médias comme « la jungle de Calais » (1 jour, 1 question, 24.06.2018).

En bref, toute cette situation crée des tensions entre la France et la Grande-Bretagne, car la France n’a pas assez de ressources pour accueillir tous ces migrants. Il y a également des tensions entre les partis politiques en France et entre les autorités locales, car cette situation perdure déjà depuis de nombreuses années et ne cesse de se détériorer : les habitants de la « jungle » vivent dans des conditions sanitaires déplorables, il y a un manque d’alimentation et une hausse de criminalité (Courrier International, 24.06.2018). De plus, beaucoup de migrants ont déjà perdu la vie lors de tentatives dangereuses de traversée de la Manche.

Le 26 octobre 2016, le gouvernement français a décidé d’évacuer définitivement 6000 migrants de la la lande de Calais et de les répartir dans 450 centres d’accueil en France (Arnoudt, 25.06.2018).

Autour de cette évacuation, beaucoup d’encre a coulé dans la presse et les médias ont adopté différents points de vue pour rapporter cet événement hautement polarisé.

1.2 Objectifs de l’étude

L’objectif de ce mémoire de maîtrise est d’analyser les articles des journaux français « La Voix du Nord » et « Le Monde » afin de repérer les « frames » sous-jacents utilisés pour encadrer les événements concernant l’évacuation de la lande de Calais et afin de comparer les résultats de ces deux journaux.

1.3 Structure de l’étude

La méthodologie dans ce mémoire s’appuie sur plusieurs cadres théoriques. Donc avant de pouvoir aborder la méthodologie utilisée, il importe d’éclaircir un certain nombre de concepts et de termes

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qui sont récurrents dans la littérature. Pour ce faire, le second chapitre servira de fil rouge à travers toute l’étude.

Dans ce second chapitre théorique nous allons premièrement, aborder ce qu’est l’analyse critique du discours, et ce que sont ses principaux objectifs. En effet, l’analyse des « frames » est l’une des manières de faire l’analyse critique. Voilà pourquoi l’importance de cette première étape.

Deuxièmement, nous allons expliquer brièvement les origines de l’analyse des « frames ». Nous essayerons également de formuler une définition adéquate pour cette étude et d’éclaircir quelques concepts nécessaires pour comprendre la manière dont on a élaboré la méthodologie pour cette recherche. Ensuite, nous étudierons aussi d’autres auteurs qui ont déjà fait des recherches afin d’élaborer un système concret pour dévoiler des « frames » dans un discours médiatique. Nous rechercherons aussi les auteurs qui ont déjà étudié les « frames » dans le contexte de la crise migratoire et nous évaluerons l’importance de ces « frames » dans notre contexte.

Enfin, dans ce second chapitre théorique quelques paragraphes seront consacrés à la littérature traitant des métaphores et des lexiques qui surgissent souvent dans le discours migratoire.

Nous terminerons en expliquant leur rapport avec le « framing »

Dans le troisième chapitre, la méthodologie utilisée dans cette étude sera présentée.

D’abord nous donneront un bref aperçu des deux sources qu’on examinera.

Ensuite nous expliquerons la manière dont on a procédé pour créer une matrice adéquate à dévoiler des « frames » latents.

Dans ce chapitre nous attacherons également de l’importance à déterminer comment nous avons procédé pour analyser les métaphores et les lexiques récurrents désignant « les migrants » dans notre corpus.

Le quatrième chapitre présentera séparément les résultats de l’analyse des « frames », l’analyse des métaphores et l’analyse des lexiques désignant « les migrants ».

Dans le cinquième chapitre nous exposerons quelques conclusions et nous expliquerons leur lien avec le chapitre théorique de cette étude.

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2. Cadre théorique

2.1 Analyse Critique du Discours (ACD)

Pour comprendre la méthodologie utilisée dans ce travail, il faut tout d’abord comprendre ce qu’est l’analyse critique du discours et ce que sont ses principaux objectifs.

2.1.1 Général

L’origine de l’approche de l’Analyse Critique du Discours (ACD) remonte aux années 1990 et trouve ses racines dans les sciences sociales et linguistiques (Montessori, 2012, pp. 19-33). D’après Rogers et al. (2005, p.367) l’ACD trouve ses racines dans trois sciences sociales, à savoir « Discourse Studies »,

« Feminist Post Structuralism » et « Critical Linguistics ».

Lors d’un congrès organisé par l’université d’Amsterdam, auquel entre autres Norman Fairclough, Ruth Wodak, Teun Van Dijk et Van Leeuwen ont participé, l’on a constaté que les participants avaient des points communs dans leur manière de faire des recherches sur les fonctions idéologiques des langues afin de clarifier des notions comme « pouvoir », « identité » et « critique» (Montessori, 2012, p. 33).

2.1.2 Objectifs principaux de l’ACD

L’ACD se concentre sur les liens entre la langue (orale ou écrite), le pouvoir et l’inégalité dans un contexte social et politique (Van Dijk, 2018, p. 357; Paltridge, 2012, p. 186). En effet, elle essaye de repérer des valeurs, des positions et des perspectives sous-jacentes dans un discours ; à savoir des constructions implicites d’inégalité concernant des questions socioculturelles et sociopolitiques comme l’identité, la race et le genre (Paltridge, 2012, p. 186). Le but principal est de dévoiler ces constructions d’inégalité, d’où les injustices cachées proviennent et de rechercher comment l’on peut s’y opposer (Van Dijck, 2018, p. 357).

2.1.3 Terminologie

Dans ce qui suit, les termes « analyse », « critique », « discours » seront expliqués, car ils représentent un point de repère important pour comprendre l’ACD.

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« Analyse »

Dans le sens général du terme, une analyse est un outil de recherche fixé à l’ avance pour pouvoir repérer et révéler des idéologies ou des phénomènes implicites dans un texte (Montessori, 2012, p.40).

Dans le domaine de l’ACD par contre, il n’est pas possible de lier l’approche à une seule

méthodologie ou un seul fondateur (Angermuller, Maingueneau & Wodak, 2014, p. 1 ). Ce qui est marquant, c’est que l’approche encourage à s’appuyer sur plusieurs méthodologies pluridisciplinaires (Wodak & Meyer, 2016, p.5). Voilà pourquoi Fairclough (2010, p.5) parle d’une « analyse

pluridisciplinaire ».

Wodak et Meyer (2016, p.5) tiennent à préciser que bien que l’on pourrait se perdre dans toutes les variantes de méthodologies de l’ACD, cette approche invite à discuter de phénomènes importants qui surgissent dans notre société. Elle est donc un pas important vers l’innovation et le changement.

Cependant, tous les analystes critiques se mettent d’accord sur un point commun : «la langue n’est pas un outil neutre pour décrire la réalité » (Montessori, 2012, p.20). Ainsi l’ACD s’oppose à la linguistique traditionnelle qui soutient cette manière de penser (Montessori, 2012, p. 20).

Pour éviter la confusion entre toutes ces approches différentes les analystes du discours préfèrent utiliser un terme plus générique pour parler de « Critical Discourse Analysis », à savoir « Critical Discourse Studies » (Van Dijk, 2018, p.466).

Néanmoins, au fil de ce mémoire la traduction littérale de « Critical Discourse Analysis (CDA) », c’est à dire « Analyse Critique du Discours (ACD) » sera utilisée, car une multitude d’études sur l’analyse critique utilisent encore ce terme (Van Dijk, 2018, p. 466).

« Critique »

Comme mentionné ci-dessus, les méthodologies de l’ACD ne sont pas neutres, car elles ne se limitent pas à décrire la réalité comme dans les méthodologies traditionnelles (Van Dijk, p. 252, 1993 ; Wodak

& Meyer, p.7, 2016).

Fairclough (2010, p. 93) explique que l’analyste critique repère, examine et explicite les idéologies opaques et souvent invisibles dans les discours. Ces discours donnent souvent une fausse

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représentation de certains phénomènes sociaux et ne tiennent pas compte du contexte social dans sa totalité (Wodak & Meyer, p. 7, 2016).

En outre, l’ACD a un aspect normatif et est donc subjective, puisqu’elle lutte contre l’inégalité et elle milite pour une société plus justicière. (Montessori, p.46, 2012 ; Fairclough, p.7, 2010).

« Discours »

Montessori et al. (2012, p. 36) expliquent que le terme discours dans l’ACD a un sens abstrait. En effet, l’ACD considère le discours comme un ensemble d’éléments sémiotiques qui sont utilisés comme une forme de « pratique sociale » et qui s’élaborent dans un contexte sociopolitique et historique (Montessori, 2012, p. 21 ; Fairclough, 2011, p. 11).

Plus précisément, le terme « sémiotique » implique « chaque forme de communication, à savoir la langue écrite ou orale, les images, la langue des signes et des sons » (Montessori, 2012, p. 36).

Locke (2004, p.14) explique que « la pratique sociale » est considérée comme une action sociale « qui est enveloppée » dans un discours.

Se référant à Fairclough & Wodak, Montessori (2012, p. 36) souligne qu’il n’est pas possible de séparer un discours de son contexte, car l’un incline l’autre et vice versa (Fairclough & Wodak, 1997).

Fairclough et al. (2001, 357) et Montessori (2012, p.36) précisent que le contexte a une influence sur le choix du discours et que le discours de son côté détermine l’encadrement (par exemple : des situations, des institutions ou de structures sociales précises) dans lequel il est élaboré.

2.2 Le « framing »

2.2.1 Introduction

L’analyse des « frames » est l’une des manières de faire l’analyse critique ; donc de rechercher des liens entre un texte et son contexte (Montessori, p. 71, 2012).

Il faut tout d’abord noter qu’en étudiant la théorie du « framing » (= l’élaboration des « frames »), il n’est pas facile de trouver une définition uniforme ou universelle. De fait, toutes les définitions formulent une autre méthodologie et diffèrent selon le domaine de recherche (Lemarier-Saulnier, p.

65, 2016). En effet, Lemarier-Saulnier (2016, p. 66) constate qu’il y a deux courants principaux dans la

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recherche concernant le « framing », dont l’un trouve ses sources dans la sociologie et l’autre dans la psychologie. Cette étude-ci trouve plutôt ses fondements dans les théories sociologiques et

médiatiques et sera expliquée de ce point de vue.

En outre, dans la plupart des sources les concepts utilisés dans l’approche du « framing » sont des termes dérivés de l’anglais, ce qui nous amène à faire le choix suivant :

En effet, il n’y a pas vraiment un équivalent français pour les termes

anglais « framing », « frame » ou « to frame ». Dans quelques articles français l’on peut voir que les auteurs, proposent une traduction littérale comme « cadrage », « cadre » ou « encadrer » (Lemarier- Saulnier, 2016 ; Charon, 2003) .

Bien que ces termes français n’apparaissent pas encore souvent dans la littérature et que beaucoup d’auteurs continuent à utiliser les termes anglais, il semble pas mal d’utiliser les termes français proposés. La raison pour cela est que les Français ont plutôt une tradition puriste en ce qui concerne l’utilisation de mots étrangers.

Au fil de ce mémoire, nous allons également continuer à utiliser les termes anglais entre guillemets, car la théorie portant sur le « framing » est déjà assez vague. Cela permettra d’éviter toute

confusion, particulièrement dans la partie théorique. Cependant, nous allons aussi utiliser les termes français là où nous estimons que cela contribuera à une meilleure lecture du texte.

2.2.2 Définition et terminologie

Dans son œuvre intitulé « Frame Analysis : An Essay on the Organization of Experience », Goffman (1974) a introduit pour la première fois le concept de « framing » (Lemarier-Saulnier, p. 68, 2016).

D’après lui les « frames » sont des structures éclaircissantes qui permettent de repérer, de reconnaître, d’indiquer, de situer et de donner un sens aux phénomènes qui émergent dans un certain contexte (Lemarier-Saulnier, p. 68, 2016). Wester (2017) souligne que la notion dans l’essai de Goffman a un sens plus général que le terme « framing » (médiatique) utilisé dans la plupart des études contemporaines et également dans ce travail-ci.

Dans le domaine des sciences de la communication, l’une des définitions les plus citées dans la littérature est celle d’Entman (Decker et al., p. 17, 2015):

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« To frame is to select some aspects of a perceived reality and make them more salient in a communicative text, in such a way as to promote a particular problem definition, causal interpretation, moral evaluation, and/or treatment recommendation. » (Entman, p.52, 1993)

« Pour établir un frame, certains aspects d’une réalité subjective sont sélectionnés. Par conséquent ces aspects sont rendus plus visibles dans un texte de communication, de telle façon qu’ils proposent une certaine problématique, une interprétation causale, une

évaluation morale et certaines actions qui en sont issues.» (Notre traduction d’Entman, p. 52, 1993)

Dans cette définition, Entman déclare que pour constituer un « frame », le journaliste capte

l’attention du lecteur dans son discours médiatique en mettant quelques aspects ou faits concernant une occurrence ou un événement en évidence. Pour ce faire, le « frame » doit incorporer quatre éléments principaux : « le positionnement/la définition du problème, la déclaration causale,

l’évaluation morale et une proposition pour résoudre la problématique » (Decker et al., p.17, 2015).

Decker et al. (2015, p. 17) appellent ces quatre éléments les « reasoning devices » et y ajoutent encore un cinquième, à savoir le « public cible » ou les « impliqués ».

Decker et al. (2015, p. 17) ajoutent que les « reasoning devices » ne sont pas toujours explicités dans un discours. En revanche, les « frames » sont souvent mieux repérables à l’aide de « framing

devices » (Gamson & Modigliani, p.3, 1987 ; 1989). Van Gorp (2005, p.486 ; 2006, p. 52) explique que les « framing devices » sont des directives métacommunicatives, qui sont explicitées dans un texte à l’aide « de métaphores, de slogans, d’images visuelles, de choix lexicaux, d’une sélection de sources, de graphiques, de stéréotypes, de personnages dramatiques, etc. »

Enfin, pour Van Gorp (2016, p.46) un « frame » fait référence à la structure interne des nouvelles.

Puisque le journaliste ne peut pas rapporter tout, il sélectionne quelques aspects de la réalité et les rend plus manifestes au public, de telle manière que le lecteur porte plus d’attention à certains aspects d’un sujet que d’autres. Par conséquent, le « framing » a une influence remarquable sur l’opinion publique (Decker et al., p. 17, 2015).

En guise de conclusion, l’analyse des « frames » veut examiner et exposer ces structures latentes afin de repérer les raisons qui ont mené le journaliste à faire ces choix spécifiques.

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2.2.3 Méthodes de recherche inductives et déductives

Il y a deux méthodes de recherche pour analyser des « frames » dans un discours médiatique, à savoir la « méthode inductive » et la « méthode déductive » (Van Gorp, pp. 98-99, 2006 ; Semetko et Valkenburg, pp. 94-95, 2000).

La « méthode déductive » est la méthode la plus utilisée. En effet, l’analyste critique examine les discours médiatiques à l’aide de « frames » élaborés à l’avance, afin de pouvoir déterminer à l’aide d’un système d’encodage quels sont les « frames » les plus récurrents (Van Gorp, p. 99, 2006).

Semetko et Valkenburg (2000, p. 94) expliquent que si un chercheur a recours à la « méthode inductive », il ou elle étudie son corpus avec « un esprit ouvert ». Cela veut dire que lors de la lecture de son corpus, l’analyste va à la recherche des « frames » qu’il ou elle estime pouvoir rencontrer dans son corpus, sans l’intermédiaire de schémas de repère préconçus. Le chercheur essaye de repérer des termes, des phrases ou des expressions qui sont, selon lui ou elle, à lier/mettre en rapport avec un certain « frame ». Selon les résultats trouvés, il essaye de démontrer la mesure dans laquelle les « frames » repérés réapparaissent dans son corpus.

2.2.4 Le « framing » et la crise migratoire

Ce mémoire vise à dévoiler les « frames » les plus souvent utilisés dans la couverture médiatique de la crise migratoire à Calais, dans les articles des journaux français « La Voix du Nord » et « Le

Monde ».

Avant de pouvoir expliquer la méthodologie utilisée dans ce travail, il est avant

tout primordial d’évoquer quelques auteurs qui ont élaboré un système pour reconnaître des

« frames » sous-jacents. Il est également intéressant d’aborder quelques recherches qui ont déjà été réalisées concernant le « framing » de la crise migratoire.

S’appuyant sur les études de Neuman et alii. (1992) et Iyengar (1991), Semetko et Valkenburg (2000, pp. 95-109) ont élaboré un questionnaire générique de 20 questions qui nécessitent une réponse affirmative ou négative. Leur but est de pouvoir repérer les cinq « frames » qu’elles estiment les plus récurrents dans les articles étudiés. De fait, elles ont appliqué ces questions de manière déductive sur le discours concernant la réunion du sommet de l’Union Européenne en 1997 dans la presse nationale aux Pays-Bas. De plus, ce questionnaire est constitué de telle manière qu’il est

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applicable à plusieurs sujets différents ; ce qui le rend d’autant plus intéressant comme outil pour analyser l'objet de notre étude.

D’après Semetko et Valkenburg (2000), les cinq « frames » qui apparaissent le plus souvent sont les suivants :

 Le cadre de responsabilité : Un problème est décrit du point de vue d’un certain

individu, d'un groupe ou d'un gouvernement qui a la responsabilité de le résoudre ou qui est tenu responsable de l’avoir provoqué (Semetko et Valkenburg, p. 96, 2000). Ce « frame » a été mentionné pour la première fois par Iyengar et al. (1987).

Le cadre de conflit : ce cadre met en évidence les conflits sociaux et politiques qui se manifestent entre des individus, des groupes ou des institutions (Radu, p. 26, 2016). Ces difficultés complexes sont souvent représentées d’une manière simplifiée. D’Haenens et De Lange (2001, p. 850) ajoutent que le cadre de conflit apparaît le plus souvent dans les discours politiques, particulièrement à propos d’élections. Des termes ou des métaphores référant à un champ sémantique de stratégie concernant une guerre, une compétition ou un jeu sont souvent utilisés (Valkenburg et alii., p. 555, 1999).

Le cadre économique : ce cadre décrit un événement, un sujet ou un problème en

présentant les conséquences économiques qui se posent pour un individu, un groupe, une institution, une région, ou un pays (Semetko et Valkenburg, p. 96, 2000).

Le cadre d’intérêt humain : ce cadre révèle un événement, un sujet ou un problème en étalant les expériences personnelles des individus (Semetko et Valkenburg, p. 95, 2000). En dramatisant et en mettant en évidence cet aspect émotionnel, le journaliste

veut capter l’attention du public et augmenter le nombre de lecteurs (Radu, p. 26, 2016).

Le cadre de moralité : ce cadre explique un événement, un sujet ou un problème dans l’optique/ par la perspective de la conscience morale ou des traditions religieuses (Semetko et Valkenburg, p. 96, 2000). Cependant, Neuman et al. (1992, p.75) soulignent que le cadre de moralité est plutôt un « frame » d’audience qu’un «frame » médiatique (Semetko et Valkenburg, p.96, 2000). Ils expliquent qu’il s’agit d’idées ou de structures mentales déjà présentes auprès du lecteur (Semetko et Valkenburg, p. 96, 2000).

Des recherches de Semetko et Valkenburg (2000, p. 103), il s’avère que le cadre de responsabilité est le plus récurrent. En effet, ce cadre apparaît plus souvent dans les nouvelles sérieuses et de qualité, que dans les nouvelles à sensation (Semetko et Valkenburg, p. 103, 2000). Plus les nouvelles sont

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sérieuses, plus ce cadre est mis en évidence (Semetko et Valkenburg, p. 103, 2000). Des

résultats pareils apparaissent dans le cadre de conflit et le cadre économique, qui sont les cadres les plus présents après le cadre de responsabilité (Semetko et Valkenburg, p. 104, 2000). Le cadre d’intérêt humain par contre, se manifeste le plus souvent dans les nouvelles à sensation (Semetko et Valkenburg, p. 104, 2000).

Decker et Scholten (2015), qui ont établi un questionnaire ressemblant à celui de Semetko et Valkenburg (2000), sont allées à la recherche de cadres dans le contexte de l’immigration. Leur recherche est intéressante, car elles ont non seulement consacré de l'importance/de l'attention au

« reasoning devices » (rappel : outils qui construisent un raisonnement), mais elles ont également incorporé différents « framing devices » dans leur matrice servant à repérer des

« frames », tels que les métaphores, les slogans, les exemples et les images. Semetko et Valkenburg (2000), par contre, n’ont pas tenu compte des « framing devices », mais elles ont uniquement intégré les « reasoning devices ».

Pour élaborer leur matrice de repère, Decker et Scholten (2015, p.18) ont défini quatre « master- frames », s’inspirant de recherches antérieures qui se sont préoccupées de déterminer les cadres les plus courants dans le domaine de l’immigration. En résumant ces études, Decker et Scholten (2015, p.18) distinguent les cadres simplifiés suivants : le cadre administratif, le cadre d’intérêt humain, le cadre économique et le cadre de conflit, dont les trois premiers sont analogues aux « frames » de Semetko et Valkenburg (2000). De fait, le cadre administratif est équivalent au cadre de

responsabilité des derniers auteurs.

La matrice de Decker et Scholten (2015) rajoute donc le cadre de menace, mais n’incorpore pas les cadres de conflit et de moralité mentionnés dans l’étude de Semetko et Valkenburg (2000).

Les résultats des recherches de Decker et Scholten (2015, p. 172) révèlent que le cadre d’intérêt humain est le cadre le plus dominant dans le discours migratoire, contrairement aux études de El Refaie (2011) et de Horsti (2003) qui constatent que le cadre dominant dans leurs études est le cadre de menace (Decker et Scholten, p. 172, 2015). De l’étude de Decker et Scholten (2015) il résulte, en outre, que le cadre de responsabilité est un deuxième cadre dominant dans le discours

migratoire. Ces derniers chercheurs soulignent que le cadre de responsabilité paraît souvent opposé au cadre d’intérêt humain afin de créer l’image de David et Goliath, qui est en quelque sorte une métaphore du fort contre le faible. Pour finir, il s’avère que le cadre économique est le moins présent

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dans le discours migratoire, cependant il est fréquemment utilisé pour renforcer les « frames » de responsabilité et de menace (Decker et Scholten, p. 172, 2015).

La recherche de D’haenens et De Lange (2001) a également révélé que le cadre d’intérêt humain était utilisé le plus souvent dans le discours médiatique concernant la crise migratoire. Pour leur étude, ils ont eu recours au questionnaire de 20 questions de Semetko et Valkenburg (2000). En outre, D’haenens et De Lange (2001) ont combiné la méthode déductive de Semetko et Valkenburg avec la méthode inductive. Cela signifie qu’ils ont été à la recherche de thèmes, de mots clés et de métaphores avec « un esprit ouvert » et les ont rajoutés au questionnaire de Semetko et Valkenburg (2000), puisque ce sont des outils importants pour identifier un « frame ».

Van Gorp (2006, pp. 158-163) mentionne également deux « frames » avec des caractéristiques d’intérêt humain, à savoir le cadre de la victime innocente et le cadre de l’envahisseur.

Le cadre de la victime innocente présente les réfugiés explicitement ou implicitement comme des personnes faibles et innocentes. Avoir subi des malheurs implique qu'ils méritent aide et

protection. Ce cadre est souvent appliqué aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées et fait appel à la conscience morale pour inciter à leur offrir de l’aide. Ce cadre pourrait être

considéré comme l’équivalent du cadre d’intérêt humain de Semetko et Valkenburg (2000) ou de Decker et Scholten (2015).

Le cadre de l’envahisseur dépeint les demandeurs d’asile explicitement ou implicitement comme des criminels et des profiteurs, qui abusent du droit de l’asile. Ils essayent d’entrer dans un pays sous le prétexte d’être des réfugiés fuyant des pays en guerre ou des situations dangereuses dans leurs pays, mais en réalité ils viennent pour des raisons économiques. Voilà pourquoi les demandeurs d’asile ne sont pas jugés dignes de compassion ou de sympathie. Dans ce « frame » le sujet est souvent la

« politique de retour » (Decker et Scholten, p. 20, 2015). Le cadre de l’envahisseur a de fortes ressemblances avec le cadre de menace de Semetko et Valkenburg (2000) ou de Decker et Scholten (2015).

Horsti (2003), l’auteur détermine dans son étude que le cadre de menace est le plus souvent mis en évidence dans la couverture médiatique concernant les demandeurs d’asile. Elle ajoute que ce cadre présente souvent les migrants comme des « réfugiés économiques » et que cette allégation est souvent impliquée par des « frames » construits autour de cinq thèmes principaux :

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le thème de la réputation : ce thème fait référence à l’influence néfaste que les demandeurs d’asile ont/auront sur la réputation du pays.

le thème de l’illégitimité : ce thème fait allusion aux intentions illégitimes et trompeuses des demandeurs d’asile.

le thème de l'inondation : ce thème évoque une arrivée incontrôlable et continue de demandeurs d'asile. Souvent la métaphore de l’eau est utilisée.

le thème de la forteresse : ce thème renvoie aux mesures plus strictes nécessaires pour empêcher les demandeurs d’asile d’entrer trop facilement dans un pays. La métaphore de l’eau apparaît également dans ce thème.

le thème de la politique laxiste : ce thème réprouve une politique laxiste et le fait qu'il est trop facile d'obtenir le statut de réfugié.

2.2.5 Les métaphores et la migration

Cette thèse portera principalement sur l’analyse des « frames ». Cependant, avant de passer au chapitre méthodologique, il est nécessaire de consacrer de l'attention aux métaphores qui

apparaissent dans la couverture médiatique de la crise migratoire à Calais. En effet, les métaphores sont des « framing devices » (voir: 2.3.2) et donc des outils d’aide permettant de dévoiler les

« frames » sous-jacents.

Van Gorp (2006, p. 68) insiste sur le fait que les métaphores n’occupent pas une place principale dans les « frames », mais qu’elles peuvent avoir une grande importance pour signaler la présence d’un « frame ». En effet, les métaphores en elles-mêmes ont un sens implicite qui contribue à la construction des « frames » (Montessori et al., p.75, 2012), mais elles ne sont pas idéales pour déterminer la mesure dans laquelle un « frame » est présent dans un discours (Van Gorp, p. 167, 2006) . La « métaphore de l’eau », en revanche, pourrait être considérée comme une exception. De fait, Horsti (2003, p. 47) et Van Gorp (2006, p. 167) notent qu’elle se manifeste souvent dans le discours migratoire. De plus, Van Gorp (2006, p. 167) ajoute que la métaphore évoque souvent une perception négative des demandeurs d’asile.

Montessori et al. (2012, p. 74) et Anbeek (2016) précisent que les métaphores représentent une image simplifiée d’une réalité bien plus complexe et qu’elles permettent de concrétiser les idées abstraites. En effet, elles comparent et lient ces idées à des concepts plus familiers aux lecteurs (Lakoff & Johnson, 1980). Donc en utilisant les métaphores, les deux champs sémantiques des idées et des concepts plus familiers sont rassemblés (Montessori et al, p. 73-74, 2012). Ainsi, les

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métaphores sont des outils efficaces pour induire des informations complexes, d’une manière rapide et accessible. En effet, les lecteurs n’ont pas toujours la compétence ou la patience de rassembler les preuves nécessaires concernant une problématique (Anbeek, 2016).

Cependant, il est important d’être conscient de la présence des métaphores dans un discours, car elles ont souvent une forte influence sur l’opinion publique en raison de connotations manipulatoires cachées (Van Gorp, p.168, 2006). Les métaphores sont souvent employées pour justifier des

injustices ou des actes irraisonnés (Lancaster, 2016). C’est justement ces structures d’inégalités que nous voulons démasquer dans cette étude.

Van Gorp (2006, pp. 166-169) détermine huit métaphores dans son étude concernant les migrants, qu’il décrit par les expressions métaphoriques ci-dessous.

 La métaphore de l’eau : les migrants et la migration sont comparés à des marées et à toute terminologie liée au champ sémantique de l’eau. Par exemple : les termes « une vague »,

« un flux » et « un afflux ». En effet, la métaphore de l’eau est la métaphore prédominante dans la couverture migratoire (Van Gorp, 2006). Elle apparaît souvent dans le « frame » de menace quand les thèmes de la forteresse ou de l’inondation, déterminés par Van Gorp (2006) et Horsti (2003), sont évoqués.

Quoique les métaphores suivantes se manifestent moins souvent, elles sont également importantes à discerner dans un discours migratoire (Van Gorp, 2006) :

 La métaphore de la mise à l’abri : le pays d’accueil s’engage à offrir l’hospitalité et à héberger les migrants.

La métaphore de la porte qui s’ouvre et qui se ferme : le pays d’accueil est représenté comme une maison, un établissement, une institution (dans le sens concret) et une culture ou une société (dans le sens abstrait), qui ouvre ou qui ferme ses portes aux migrants.

La métaphore de la forteresse avec des murs imposants : le pays de destination des migrants est représenté comme une institution ou un endroit qui est renforcé pour faire face aux intrusions de migrants.

La métaphore mettant le demandeur d’asile en parallèle avec des déchets : les migrants ou les demandeurs d’asile sont dépeints en termes issus du champ sémantique des détritus.

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La métaphore représentant le demandeur d’asile en termes d’abondance ou en termes de

« record battu »: les migrants sont décrits avec des mots référant à un champ sémantique de l’abondance, illustré par des statistiques impressionnantes.

La métaphore comparant le migrant à du gibier qu’il faut chasser: les demandeurs d’asile ou les migrants sont dépeints comme des animaux qu’il faut prendre au piège, chasser ou éliminer.

La métaphore référant à de la marchandise: pour parler de migrants, le champ sémantique du commerce est utilisé. Le migrant est dépeint comme une chose ou comme un objet commercial. Les mots clés sont par exemple : « livrer », « mettre à bord », « faire du profit », etc.

Enfin, il y a encore la métaphore ambiguë de la « jungle », qui est la plus répandue dans le discours concernant l’évacuation des campements de Calais.

Rosello (2016) explique qu’à l’origine ce sont les migrants eux-mêmes qui ont introduit le terme

« jungle » pour renvoyer de manière ironique au « bidonville » de Calais. C’était un acte politique se réclamant de l’ethnocentrisme de l’Europe, une institution qui considère ses propres valeurs et normes comme étant celles du monde (Rosello, 2016). Une Europe qui se voit comme militante des libertés et des droits fondamentaux de l’homme, mais en même temps qui laisse vivre des êtres humains dans des conditions déplorables, honteuses (Rossello, 2016). Dès lors, les migrants eux- mêmes se sont dépeints ironiquement comme « des sauvages », « des indignes » ou « des bêtes, incapables de comprendre les normes européennes » (Rosello, 2016). Les migrants utilisent

également cette ironie pour faire face à leur réalité pénible, en gardant le sens de l’humour dans leur désespoir.

Rosello (2016) ajoute que les migrants étaient en quelque sorte « lost in translation » quand ils ont utilisé le terme « jungle ». C’est une expression anglaise qui veut dire que le traducteur perd le sens ou la subtilité de la langue d’origine en traduisant un mot ou une phrase vers la langue cible (Farlex, 30.07.2018). En effet, le terme « jungle » que les migrants ont utilisé était une traduction inadéquate du mot persan, pashto ou sanskrit « jangal », qui signifie plutôt « forêt ». Le but était d’avancer la connotation de « gens qui vivent comme des animaux dans une forêt » (Rosello, 2016).

Malheureusement, le terme « jungle » a été adopté par les médias sans connaître les connotations que ce terme mal traduit voulait impliquer. En effet, le mot « jungle » a une nuance plus péjorative que le sens de départ, celui renvoyant à « une forêt » (Rosello, 2016). Le terme « jungle » ne fait pas

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seulement allusion aux « gens qui vivent comme des animaux dans la forêt », mais il ajoute également la nuance dépréciative de « prédateurs dangereux qui vivent dans un habitat naturel cruel, chaotique et anarchique » (Rosello, 2016).

La métaphore de « la jungle » est désormais si normalisée et imprégnée dans le vocabulaire des médias, des politiques et de la société, qu’on ne pourra pas l’utiliser dans notre méthodologie pour pouvoir repérer les « frames » les plus récurrents.

Cependant, il est quand même important de lui consacrer quelques réflexions, puisque le mot est potentiellement dangereux. De fait, les clichés qui surgissent des métaphores à connotations péjoratives risquent d’être adoptés comme des termes acceptables pour la crise migratoire (Rosello, 2016 ; Matar, 2015).

De plus, il existe déjà de nombreux exemples historiques qui ont abouti à des catastrophes après l'utilisation de métaphores animales (Lancaster, 2016). Pensez à Hitler qui à maintes reprises a décrit les Juifs comme étant « des serpents » (Lancaster, 2016). Beaucoup d’Allemands étaient au courant de ce qui se passait dans les camps de concentration (Lancaster, 2016). Cependant, Hitler a tellement déshumanisé les Juifs, que beaucoup d’Allemands ne se sont pas souciés ni sentis responsables de cette situation désastreuse (Lancaster 2016).

Pour éviter qu’une telle catastrophe se reproduise, il faut systématiquement s’opposer à l’usage de métaphores animales et donc aussi à l’usage de la métaphore de la « jungle » (Rosello, 2016).

Bernard Cazeneuve, le ministre de l’Intérieur, propose une appellation plus neutre que « la jungle », à savoir « le campement de la lande » (Molinié, 2016).

2.2.6 Choix lexical pour référer aux « migrants »

Dans la couverture migratoire, plusieurs termes sont utilisés pour référer aux migrants. Les termes les plus récurrents sont les suivants :

Le migrant ou l’immigrant : un terme neutre pour désigner quelqu’un qui quitte son pays pour un autre.

Le réfugié : le terme officiel utilisé par la Convention de Genève pour désigner une personne qui a dû fuir son pays en raison de son origine, de sa nationalité, de ses convictions

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politiques, de sa/ses préférence(s) sexuelle(s), de sa religion ou parce qu’il ou elle fait partie d’un certain groupe social. Également utilisé pour l'individu fuyant une guerre dans son pays d’origine. Les pays qui ont signé la Convention de Genève s’engagent donc à protéger toutes ces personnes. (Vluchtelingenwerk Vlaanderen, 31.07.2018). Dans les discours médiatiques, ce terme a souvent la connotation d’ « une personne innocente qui doit être sauvée du danger et qui mérite la protection de la Constitution européenne».

Le demandeur d’asile : ce terme renvoie au statut d’un migrant avant que lui soit accordé(e) ou refusé(e) le droit d’asile et donc le statut de « réfugié ». Le « demandeur d’asile » doit encore prouver qu’il est réellement en danger s'il retourne dans son pays d’origine. Il doit démontrer qu’il ne vient pas en Europe sous de faux prétextes (Vluchtelingenwerk Vlaanderen, 31.07.2018). Dans le discours migratoire, le terme de « demandeur d’asile » reçoit souvent la connotation de « profiteur » ou même de « criminel potentiel ». En outre, le terme de « migrant économique » est utilisé comme synonyme de « demandeur d’asile ».

L’on pourrait donc croire que le journaliste emploie le terme de « réfugié » quand il/elle veut rapporter sur un sujet dans un contexte positif et le terme de « demandeur d’asile » quand il/elle veut l'aborder sous un jour négatif (Van Gorp, p. 166, 2006). Cela impliquerait que le journaliste réfléchit à ses choix lexicaux et en est donc conscient (Van Gorp, p. 166, 2006). Cependant, c'est tout le contraire.

En effet, le journaliste est en premier lieu un auteur qui veut écrire un texte idiomatique. Voilà pourquoi il/elle essaye de varier son vocabulaire (Van Gorp, p. 167, 2006). Par conséquent, les termes de « demandeur d’asile » et de « réfugié » apparaissent souvent ensemble, comme des synonymes, ce qui rend difficile de cerner le point de vue réel de l’auteur par rapport à la migration.

Van Gorp (2006, p.167) souligne qu’il faut donc tenir compte des choix aléatoires de la part des journalistes.

Néanmoins, que le choix de l’auteur soit arbitraire ou non, l’on ne peut pas nier que la fréquence avec laquelle ces termes connotés sont utilisés dans un article a une influence importante sur l’opinion publique.

Enfin, les migrants sont souvent représentés comme « les illégaux », « les clandestins », « les sans- papiers » (Anbeek, 2016). Il faut noter que ces termes réfèrent à un champ sémantique de « migrants qui vivent en dehors de la loi » et que ces termes sont en fait des métonymies pour référer aux

« demandeurs d’asile » (Anbeek, 2016). Ainsi on se focalise uniquement sur un aspect des

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« demandeurs d’asile », c’est-à-dire l’aspect illicite (Anbeek, 2011) en ignorant la pluralité des expériences et du contexte qui les ont amenés à fuir leur lieu de vie (Matar, p. 324, 2017).

3. Méthodologie

L’objectif de ce mémoire est d’analyser les articles des journaux français « Le Monde » et « La Voix du Nord » afin de repérer les « frames » utilisés pour encadrer les événements concernant

l’évacuation de la lande de Calais. A cette fin, la théorie étalée dans le chapitre précédent servira comme point d’appui.

3.1 Question de recherche

Puisqu’il ne peut plus y avoir aucune confusion concernant la terminologie utilisée, nous pouvons maintenant nous focaliser sur la mise en pratique de la théorie du deuxième chapitre.

Cependant, avant de pouvoir entamer notre recherche, nous devons déterminer un système adéquat auquel l’on peut avoir recours pour révéler des « frames » dans un discours médiatique. Cette étape est essentielle afin de pouvoir répondre de manière précise à la question principale de ce mémoire, à savoir :

« Quels sont les « frames » les plus récurrents dans la couverture de l’évacuation de la lande de Calais dans les journaux français «La Voix du Nord» et «Le Monde»? Y a-t-il également une différence entre ces deux journaux? »

Dans les paragraphes suivants, nous expliquerons les démarches effectuées pour élaborer un système efficace permettant de répondre à la question précédente.

3.2 Sources

Pour élaborer notre corpus, nous avons choisi d’examiner les journaux « La Voix du Nord » et « Le Monde » afin de comparer comment les médias rapportent la crise migratoire de Calais.

Le journal « La Voix du Nord » a été choisi en raison de sa proximité de Calais, au sens littéral et au sens figuré. En effet, « La Voix du Nord » est un quotidien régional diffusé dans le Nord de la France, qui a bon nombre de lecteurs dans le Nord-Pas-de-Calais. De plus, les Calaisiens sont très concernés

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par la polémique, car elle a un impact considérable sur leur vie quotidienne. Cette étude veut donc analyser quelle influence cette proximité géographique et émotionnelle a sur la façon dont la couverture de l’évacuation des camps à Calais est interprétée.

En outre, il est intéressant d’opposer ce quotidien régional à un journal national pour rechercher si la différence de proximité affecte la manière dont les deux journaux vont représenter les faits. A cette fin, le quotidien « Le Monde » a été sélectionné comme deuxième source d’étude. Le journal

« Le Monde » est un quotidien d’orientation gauche, qui est considéré comme étant l’un des

journaux les plus réputés de France. A cet égard, il est intéressant de voir à quel point les journalistes ont donné une représentation objective des événements à Calais.

3.3 Composition du corpus

Les travaux de l’évacuation de la Lande de Calais ont débuté le 24 octobre 2016, après qu’un juge du Tribunal Administratif de Lille a ordonné d’effectuer son évacuation complète.

Pour constituer notre corpus, nous avons d’abord déterminé la période dans laquelle le plus d’encre a coulé à propos de la décision d’évacuation et de sa mise en œuvre. Par une recherche dans la banque de données « LexisNexis » en utilisant le mot clé « Calais », nous avons constaté que la plupart des articles concernant ce moment critique sont apparus entre le 1er août 2016 et le 1er décembre 2016. Après avoir rassemblé tous les articles trouvés, nous avons éliminé tous ceux qui n’étaient pas pertinents. Plus précisément, parce qu’ils ne traitaient pas de l’évacuation de la lande de Calais.

Enfin, notre recherche a abouti à 82 articles pour le quotidien régional « La Voix du Nord » et à 81 articles pour le quotidien national « Le Monde ».

3.4. Détermination de la matrice de repère

Dans ce mémoire, nous avons constitué une matrice pour repérer des « frames » sous-jacents dans le discours migratoire des journaux « La Voix du Nord » et « Le Monde ». A cette fin, une combinaison de la méthode déductive et de la méthode inductive a été utilisée, ayant recours aux théories décrites dans le deuxième chapitre.

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Pour exécuter notre recherche, nous avons étudié le corpus à l’aide du questionnaire générique de Semetko et Valkenburg (2000). Cette méthode déductive est un bon point de repère pour avoir une idée générale des « frames » cachés dans le corpus. Cependant, lors de l’analyse du corpus nous avons remarqué la présence d’autres « frames », de métaphores et de choix de lexiques spécifiques pour certains « frames ».

Dans le chapitre théorique, l’on a déjà mentionné que le questionnaire de Semetko et Valkenburg (2000) tient uniquement compte des « reasoning devices » et non pas des « framing devices ». Voilà pourquoi, nous avons décidé de garder le questionnaire avec les cinq « frames » de Semetko et Valkenburg (2000), mais nous avons choisi de le compléter de manière inductive à l’aide d’autres études estimées pertinentes. A cette fin, nous avons eu recours aux recherches des auteurs Decker et Scholten (2015), Horsti (2003), Van Gorp (2006) et Valkenburg et alii. (1999).

En guise de rappel, Decker et Scholten (2015) ont établi une matrice ressemblante au questionnaire de Semetko et Valkenburg (2000). En effet, elles ont défini quatre « frames » dont le cadre

administratif, le cadre d’intérêt humain, le cadre économique et le cadre de conflit. Les trois premiers cadres sont analogues aux « frames » de Semetko et Valkenburg (2000). De fait, le cadre administratif est équivalent au cadre de responsabilité des derniers auteurs. La matrice de Decker et Scholten (2015) rajoute donc le cadre de menace, mais n’incorpore pas les cadres de conflit et de moralité mentionnés dans l’étude de Semetko et Valkenburg (2000).

Après avoir assimilé les études de Semetko et Valkenburg (2000) et de Decker et Scholten (2015), nous avons fini par déterminer une matrice de contrôle comprenant six « frames ». Il s’agit du cadre de conflit, du cadre d’intérêt humain, du cadre de responsabilité, du cadre économique, du cadre de moralité et du cadre de menace. En outre, les questions et les thèses ressemblantes desdits auteurs ont été regroupées par trois à six thèses pour chacun des six cadres.

Il faut noter que le cadre d’intérêt humain dans le questionnaire de Semetko et Valkenburg (2000) comprend une question qui vise à repérer des images incarnant des émotions de compassion, d’empathie, d’indignation ou de pitié. Néanmoins, nous n’avons pas incorporé cette question dans notre matrice, car ce mémoire se focalise uniquement sur le discours de l’écrit et non pas sur le discours visuel.

En outre, nous savons déjà que dans sa recherche, Horsti (2003) se concentre principalement sur le cadre de menace qu’elle estime prédominant dans le discours migratoire. Pour ce cadre elle propose

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cinq thèmes principaux autour desquels un champ sémantique particulier est utilisé. Sa recherche est intéressante, car elle éclaircit explicitement le lien entre le cadre de menace et un certain choix lexique. C’est la raison pour laquelle nous avons inclus ces thèmes dans notre matrice sous le cadre de menace.

Nous avons également intégré la métaphore de l’eau au cadre de menace de notre matrice, puisque Van Gorp (2006, p. 167) et Horsti (2003) constatent qu’elle est la métaphore prédominante dans le discours migratoire. Van Gorp (2006, p. 167) souligne que la métaphore de l’eau est un indicateur puissant des perceptions négatives envers les demandeurs d’asile.

Lors d’une première analyse de notre corpus, nous avons constaté la récurrence d’autres

métaphores et lexiques, que nous avons par conséquence ajoutées à notre matrice. Valkenburg et alii. (1999) confirment que le cadre de conflit peut comprendre des expressions et de métaphores de guerre, de compétition ou de jeu. Voilà pourquoi, nous avons ajouté cette thèse au cadre de conflit de notre matrice. Ensuite, nous avons lié les termes récurrents pour désigner « les migrants » aux cadres concernés. Il s’agit, par exemple, des métonymies « les clandestins, les criminels, les illégaux, les sans-papiers», qui se focalisent uniquement sur les actions illicites que certains demandeurs d’asile entreprennent pour pouvoir demander l’asile en Europe en ignorant la pluralité des expériences et du contexte qui les ont amené à fuir leur patrie.

Lors de notre analyse des métaphores, nous avons remarqué par après que la métaphore des déchets apparaissait souvent à l’intérieur du cadre de menace tout en référant à un champ

sémantique spécifique « d’avoir perdu le contrôle sur les nombre de migrants ». Voilà pourquoi nous l’avons ajoutée à la thèse « On parle d'une arrivée incontrôlable et continue de demandeurs d'asile » du cadre de menace.

Après avoir entrepris toutes les étapes précédentes, nous avons fini par mettre au point la matrice de repère suivante :

Le « frame » Les indices pour repérer les « frames »

Le cadre de conflit 1. Dans l'article, il y a un désaccord entre des partis /des personnes / des groupes/ des pays. (Semetko et Valkenburg, 2000)

2. L'article mentionne des partis politiques /des individus/ des groupes qui s'accusent entre eux du problème. (Semetko et Valkenburg,

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2000)

3. L'article parle de deux ou de plusieurs perspectives concernant un seul problème / sujet (Semetko et Valkenburg, 2000).

4. L'article décrit des gagnants et des perdants. (Semetko et Valkenburg, 2000)

5. Dans l'article, il y a des expressions ou des métaphores de guerre, de compétition ou de jeu (Valkenburg et alii., 1999).

Le cadre d'intérêt humain 1. L'article décrit la façon dont des individus ou des groupes sont affectés par le problème (Semetko et Valkenburg, 2000).

2. L'article humanise le sujet. On se penche sur la vie privée ou les circonstances personnelles des acteurs (Semetko et Valkenburg, 2000).

3. Dans l'article, des adjectifs ou des caractéristiques personnelles sont utilisés, qui évoquent de l'indignation, de l'empathie, de la

sympathie ou de la pitié (Semetko et Valkenburg, 2000).

4. L'article suggère qu'il faut faire une exception pour certains cas ou certains groupes ou une proposition est donnée pour changer la politique en général (Decker et Scholten, 2015).

5. On décrit l'archétype de la victime (Deckter & Scholten, 2015).

Mot clé : les vulnérables Le cadre de

responsabilité

1. L'article mentionne un défi gouvernemental qui doit être résolu de la manière la plus adéquate (Decker et Scholten, 2015).

2. L'article suggère que le gouvernement ou une partie du

gouvernement peut adoucir le problème (Semetko et Valkenburg, 2000).

3. L'article suggère que le gouvernement ou une partie du gouvernement, un individu ou un groupe est responsable du problème (Semetko et Valkenburg, 2000).

4. L'article propose des solutions pour une nouvelle situation (Decker et Scholten, 2015).

5. L'article suggère que le gouvernement doit résoudre le problème d'urgence (Decker et Scholten, 2015).

Le cadre économique 1. L'article fait référence à des groupes ou à des individus qui

bénéficient ou qui subissent des pertes financières suite à l'asile et à

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38

l'immigration (Semetko et Valkenburg, 2000).

2. L'article présente les frais / les pertes ou les investissements qui ont déjà été faits dus à l'asile et à l'immigration (par exemple: le gain de cerveaux ou le chômage) (Decker et Scholten, 2015).

3. L'article analyse les conséquences économiques après que le gouvernement ait décidé de prendre ou de ne pas prendre une certaine mesure (Semetko et Valkenburg, 2000).

4. L'article propose une solution pour augmenter les gains économiques ou pour adoucir les pertes économiques (par exemple: abriter les demandeurs d'asile ailleurs) (Decker et Scholten, 2015).

Le cadre de moralité 1. L'article comprend des règles sociales et des règles de bonne conduite (Semetko et Valkenburg, 2000).

2. L'article contient un message moral (= une représentation du bien ou du mal) (Semetko et Valkenburg, 2000)

3. L'article fait référence à la moralité, à Dieu ou à un autre principe religieux/une autre doctrine religieuse. (Semetko et Valkenburg, 2000)

Le cadre de menace 1. L'article fait référence à l'influence néfaste que les demandeurs d'asile ont/ auront sur la réputation du pays (thème de réputation, Horsti, 2003).

2. Les motifs/intentions des demandeurs d'asile sont illégitimes.

(thème d’illégitimité, Horsti, 2003). Les demandeurs d'asile sont représentés comme des tricheurs, des profiteurs ou des criminels (Decker et Scholten, 2015).

Mots clés : les clandestins, les criminels, les illégaux, les sans-papiers 3. On parle d'une politique laxiste et/ou du fait qu'il est trop facile

d'obtenir le statut de réfugié (thème de politique laxiste, Horsti, 2003).

4. On parle d'une arrivée incontrôlable et continue de demandeurs d'asile. (thème d’inondation + métaphore de l’eau (Horsti, 2003) + métaphore des déchets et des records (Van Gorp, 2006)).

Exemples de mots clés : flux, afflux, le flou, se tarir, la ruée, déborder, vague, pression, absorber

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5. Un certain groupe ou une certaine politique forment un danger pour la société. (Decker et Scholten, 2015)

6. On fait référence aux mesures plus strictes et nécessaires pour empêcher les demandeurs d'asile d’entrer trop facilement dans le pays. (thème d’inondation (Horsti, 2003))

Exemples de mots clés : goutte-à-goutte, au compte-gouttes

Pour mesurer le degré de présence des « frames », notre méthode d’analyse utilisée propose d’encoder chaque « frame », d’après les réponses données à un groupe de thèses. Trois distinctions ont été faites, à savoir entre « absent » (0) « présent » (1) et « clairement présent » (2). La condition pour pouvoir dire qu'un « frame » est "présent" (1) est de pouvoir affirmer au moins une des thèses du groupe, mais pas toutes. En revanche, si un « frame » est « clairement présent » (2) toutes les thèses sont affirmées. Ensuite nous avons compté pour chaque article le nombre de « frames », qui ont été assignés par les encodages (0), (1) ou (2). Les numéros entre parenthèses n’ont donc pas d’autre fonction que d’affirmer « oui » ou « non » si un certain « frame » est présent ou pas dans un article. Par la suite, nous avons calculé le nombre total des différents « frames » présents dans notre corpus, cela pour chacun des deux journaux « La Voix du Nord » et « Le Monde. Pour finir, nous avons converti les résultats en pourcentages, afin de simplifier la présentation des résultats et afin de faciliter la comparaison entre les deux dits journaux.

Nous avons également mesuré le nombre de fois où l’on a pu répondre « oui » séparément à chacune des trois à six thèses, élaborées pour déterminer les six cadres différents de cette étude.

Cela permettra de calculer quelles sont les thèses indicatrices qui ont le plus d’influence sur l’activation d’un certain « frame ». On va par exemple examiner combien de fois la première thèse du cadre de menace, à savoir « L'article fait référence à l'influence néfaste que les demandeurs d'asile ont/ auront sur la réputation du pays », apparaît par rapport au nombre de fois que le cadre de menace est activé dans les articles du journal « La Voix du Nord ».

Si la première thèse du cadre de menace a été affirmée une fois sur les 47 fois que le cadre de menace apparaît dans les articles du journal « La Voix du Nord », l’on divise 1 par 47, ensuite on le multiplie par 100 pour convertir le montant en pourcentage. Cela revient à 2,13%. On peut donc dire que la première thèse du cadre de menace apparaît dans 2,13 % des cas où le cadre de menace est activé dans les articles du quotidien « La Voix du Nord ».

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