Région
VENDREDI 20 AVRIL 2012 36
DEF
MARDI 3 JANVIER 2012 32
Cinq panneaux électoraux avec les dix candidats dans le village de Hagenbach, dans le Sundgau : l’Alsace votera-t-elle de nouveau massivement à droite dimanche ? Photo Darek Szuster
L’Alsace a toujours voté plus à droite que le reste de la France.
Qu’en sera-t-il dimanche ?
En 1995 et en 2002, à la surprise générale, Jean-Marie Le Pen était arrivé en tête au premier tour de l’élection présidentielle en Alsa- ce. En s’imposant, dès le premier tour, en 2007, dans le Bas-Rhin comme dans le Haut-Rhin, Nico- las Sarkozy, avait presque fait oublier ce fort vote FN qui a mar- qué l’histoire électorale alsacien- ne, et que Jacques Chirac n’avait jamais réussi à contrecarrer. Au second tour, une majorité d’Alsa- ciens, en phase alors avec le dis- cours sarkozyste sur l’ordre et le travail, lui avait offert son plus beau score, renouant avec ceux de Valéry Giscard d’Estaing et du général de Gaulle dans la région.
Qu’en sera-t-il dimanche soir dans la seule région de France,
conservée par la droite après les régionales de 2010 ? Nicolas Sarkozy dispose ici de puissants relais, à commencer par le prési- dent et ministre Philippe Richert, les deux présidents de conseils généraux, les grands maires – à l’exception de ceux de Strasbourg et de Schiltigheim – et une large majorité des parlementaires.
Leurs destins sont liés
Presque tous, sachant leurs des- tins liés, font campagne pour lui, jusqu’à Jean-Marie Bockel, un des ministres d’ouverture, remer- cié après la volte-face du prési- dent, mais qui a pris position très tôt en faveur de Nicolas Sarkozy.
On saura après le dépouillement si, malgré la crise qui a eu des effets négatifs en Alsace, les élec- teurs de la région lui restent fidè- les. Quelle sera la part des déçus du sarkozysme ? Et des anciens électeurs de l’extrême-droite qui seront retournés vers le FN, op- tant pour Marine Le Pen – même
si la base militante apparaît moins forte que dans les années 90… ?
L’autre interrogation concerne François Bayrou, arrivé 2e en 2007 en Alsace, alors que la plu- part des grands élus avaient sou- t e n u N i c o l a s S a r k o z y . Aujourd’hui, le président du Mo- Dem – qui n’a jamais été un parti de militants – ne dispose plus d’aucun soutien parmi les parle- mentaires et lui-même donne l’impression d’avoir levé le pied dans notre région. Récemment encore, il a annulé une visite dans le Haut-Rhin. Pourtant, il est sans doute le candidat qui connaît le mieux les problématiques liées au droit local alsacien-mosellan, qu’il a d’ailleurs évoqué dans sa campagne, proposant d’en éten- dre certaines dispositions au res- te de la France.
Et quid de François Hollande, donné victorieux par les sonda- ges ? Si le vote du premier tour confirme ces estimations, l’an-
cien premier secrétaire du PS de- v r a i t , e n b o n n e l o g i q u e , améliorer le score de la gauche dans la région. Il y bénéficie de soutiens forts, à commencer par le sénateur-maire de Strasbourg, Roland Ries, donné pour minis- trable. Or la gauche n’en finit pas de gagner les cantons strasbour- geois… En 2007, Ségolène Royal – qui avait fait mieux que les 11 % de Lionel Jospin en 2002 – était troisième. Elle avait marginalisé l’extrême-gauche, plus divisée qu’aujourd’hui, et les écologistes.
Il était déjà surprenant, à l’épo- que, que l’écologie politique – im- plantée historiquement en Alsace et largement présente dans le débat régional – apparais- se comme ultra-minoritaire, lors de la présidentielle.
Jusqu’à cette élection, la question ne se posait pas pour l’extrême- gauche. L’irruption de Jean-Luc Mélenchon, dans le débat politi- que, incite à s’interroger sur son audience dans la région. Le lea- der du Front de gauche, qui a
trouvé un fort écho lors des mee- tings, ira-t-il jusqu’à récupérer une partie du vote protestataire ?
Fessenheim et le régime local des cultes
On a beaucoup parlé de l’Alsace dans cette campagne électorale et, pour une part, de manière inattendue. C’est François Hol- lande qui a lancé le débat, à tra- vers deux propositions-phares de son programme, qui ont cepen- dant valeur de symbole. L’une vi- se la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim – la plus vieille encore en service – qui avait été inscrite dans l’accord entre le PS et les Verts, et qui a été reprise par le candidat. Soutenu par Éva Joly, au nom des écologis- tes, ce projet a été contesté par Nicolas Sarkozy qui est venu visi- ter Fessenheim. Dans quelle me- sure, motivera-t-il les électeurs, dans un sens ou dans l’autre ? L’autre sujet concerne l’introduc-
tion de l’article 1erde la loi de 1905 sur la laïcité dans la Constitution.
Par cette proposition, qui aurait des répercussions non seule- ment en Alsace-Moselle, mais dans le reste de la France, Fran- çois Hollande n’imaginait dans doute pas ouvrir un débat sur le régime local des cultes. Pour cou- per court aux critiques de la majo- rité et de nombreux juristes, et rassurer les ministres des cultes, il a proposé d’inscrire dans la Constitution que l’Alsace et la Moselle ne seraient pas concer- nés par la loi de 1905. Ce thème, alors que la pratique est en baisse, influera-t-il sur le vote des Alsa- ciens ? Confortera-t-il le clivage entre un vote urbain, autour des grandes agglomérations, et un vote rural, observé lors des der- niers scrutins ?
Reste un dernier paramètre.
Quelle sera la mobilisation des Alsaciens ? Il y a cinq ans, la parti- cipation était de 83 % contre près de 74 % en 2002.
Yolande Baldeweck
Élection présidentielle Faut-il s’attendre,
de nouveau, à un vote spécifique en Alsace ?
que les électeurs alsaciens l’avaient placé 2e, loin derrière Nicolas Sarkozy.
Selon l’économiste, le scrutin uninominal attise un « dilem- me frustrant pour l’électeur entre vote de cœur et vote utile ». Ce vote alternatif est l’occasion de faire se rencontrer« les attentes des citoyens et la pratique ». Sans effets sur le vote officiel, les résultats de l’expérimentation seront connus après le second tour des législatives, afin de ne pas influencer le vote réel.
Pauline Hofmann Le Béta organise une expé-
rience dans deux bureaux de vote strasbourgeois. Les électeurs pourront tester deux autres façons de voter.
Double passage à l’isoloir, salle de la Bourse à Strasbourg. Les chercheurs du Béta (Bureau d’économie théorique et appli- quée), après leur vote officiel, vont appeler les citoyens à don- ner leur avis sur les candidats de manière inhabituelle. Les votants testeront deux bulletins de vote alternatifs. Le premier consiste à noter tous les candi- dats de 0 à 20. Sur le second, ils pourront apporter leur soutien à un, plusieurs ou aucun candi- dat. Un moyen de nuancer leur choix.
Lors de la première expérience en 2002, conduite à Orsay, les électeurs avaient accueilli de manière« très enthousiaste cette possibilité d’expression accrue », rappelle Herrade Igersheim, chercheuse au CNRS et à l’Uni- versité de Strasbourg. Lors du deuxième test en 2007, mené également à Strasbourg, Fran- çois Bayrou était arrivé en tête du premier tour alternatif, alors
Déjà en 2007, des électeurs avaient nuancé leur vote. DR
Certains électeurs strasbourgeois testeront deux modes de scrutin
Gérard SCHIVARDI
(CNRSP)
0,25 %
2522 voix
PRÉSIDENTIELLE 2002. Inscrits : 1 153 257. Votants : 852 050. Exprimés : 821 509. Jean-Marie Le Pen (FN) 192 583 voix (23,44 %) ; Jacques Chirac (RPR) 150 816 (18,36 %) ; Lionel Jospin (PS) 90 502 (11,02 %) ; François Bayrou (UDF) 88 528 (10,78 %) ; Noël Mamère (Les Verts) 49 411 (6,01 %) ; Jean-Pierre Chevènement (MDC) 43 179 (5,26 %) ; Arlette Laguiller (LO) 40 170 (4,89 %) ; Alain Madelin (DL) 36 264 (4,41 %) ; Bruno Mégret (MNR) 35 643 (4,34 %) ; Olivier Besancenot (LCR) 28 442 (3,46 %) ; Corinne Lepage (Cap21) 17 815 (2,17 %) ; Christiane Taubira (PRG) 14 500 (1,77 %) ; Christine Boutin (FRS) 13 486 (1,64 %) ; Jean Saint-Josse (CPNT) 8403 (1,02 %) ; Robert Hue (PCF) 8029 (0,98 %) ; Daniel Gluckstein (PT) 3738 (0,46 %).
François BAYROU
(UDF)
21,41 %
214 339 voix
Olivier BESANCENOT
(LCR)
3,33 %
33 310 voix
Jean-Marie LE PEN
(FN)
13,56 %
135 732 voix
Ségolène ROYAL
(PS)
17,11 %
171 283 voix
Nicolas SARKOZY (UMP)
36,19 %
362 384 voix
Philippe DE VILLIERS
(MPF)
2,25 %
22 492 voix
Dominique VOYNET (Les Verts)
2,04 %
20 382 voix
Arlette LAGUILLER
(LO)
1,38 %
13 821 voix
José BOVÉ(Ind.)
1,37 %
13 758 voix
Marie-George BUFFET
(PC)
0,61 %
6100 voix
Frédéric NIHOUS (CPNT)
0,51 %
5142 voix
Les résultats du 1
ertour des dernières élections présidentielles en Alsace
Inscrits : 1 224 214 Votants : 1 015 931 Exprimés : 1 001 265
Taux de participation : 82,99 %
PRÉSIDENTIELLE 2007
Infographie : PLM
L'Alsace - 20/04/12