Variabilité intraspécifique de l’épicéa :
stabilité
ethomogénéité des provenances et régions
de provenances allemandes
Catherine CHRISTOPHE
Station d’Amélioration des Arbres forestiers,
Centre de Recherches forestières d’Orléans, LN.R.A., Ardon, 45160 Olivet
Résumé
L’exploration de la variabilité intraspécifique de l’épicéa (Picea abies) dans son aire naturelle à
partir de deux dispositifs installés en France est confrontée avec des résultats établis en Allemagne
sur des dispositifs équivalents.
Au niveau de grandes régions géographiques, la supériorité des Beskides (Pologne, Tchécoslova-
quie), de la Roumanie et du Nord-Est polonais pour des critères de vigueur et de tardiveté du débour- rement se retrouve dans les deux pays.
Au niveau des provenances, de fortes interactions provenance Xstation sont parfois signalées
pour les critères de vigueur.
En vue d’une utilisation commerciale pour les reboisements en France, une attention particulière
est portée aux provenances et régions de provenances allemandes ; l’accent est mis sur l’hétérogénéité
de quelques provenances d’une part et de la majorité des régions représentées d’autre part. La notion
de « région », déjà critiquée par les forestiers allemands, est donc remise en question dans la mesure
où la trop grande superficie de certaines et le mélange de peuplements naturels et artificiels dans d’autres ne permettent pas d’assurer l’homogénéité d’un matériel issu de ces régions.
Introduction
Toute
stratégie
d’amélioration d’uneespèce
forestière commence parl’explora-
tion de la variabilité naturelle de cette
espèce.
Dans le cas del’épicéa (Picea abies)
cette variabilité
intraspécifique
estdéjà
relativement bien connue des sélectionneurs forestiers.Cette
espèce
étantlargement
utilisée en reboisement hors de son airenaturelle,
ilparaît
nécessaire de connaîtreégalement
la stabilité ducomportement
des prove-nances installées dans divers pays.
L’intérêt d’étudier une
plantation comparative
de provenancesd’épicéa
en Franceest actuellement double :
- d’une
part
comparerglobalement
lecomportement
de ces provenances avec celui observé enAllemagne,
- d’autre
part
étudierl’homogénéité
desrégions
de provenances allemandes dont les limites actuelles sont remises en cause par les améliorateurs allemands eux- mêmes.Ces sources de
graines peuvent
en effetjouer
un rôle nonnégligeable
dansl’ap- provisionnement
des reboisementsfrançais compte
tenu des liens commerciaux entre pays d’unepart
et desobligations
découlant de laréglementation
C.E.E. d’autrepart.
1.
- Description
del’expérience
1.1. - Matériel
La
présente
étudeporte
sur cent provenances récoltées pour laplupart
dansl’aire naturelle de
l’épicéa regroupant quarante
provenances de la zônealpine (Autriche, Suisse, France), vingt-huit
provenancesallemandes,
six provenances nor-diques (Suède, Finlande), quinze
provenances de larégion
des Beskides(Moravie, Sudètes), sept
provenances du Nord-Est et CentrePolonais,
une provenance rou- maine, deux provenances russes et enfin une provenance non identifiée.La
description
et la localisation de ces provenances sontprésentées
en annexe.Les semis
2-0,
élevés dans lapépinière
de l’Institut d’Amélioration des arbres forestiers de Hann Münden dans le Hesse(Allemagne Fédérale)
sont arrivés en Franceen très mauvais état, suite à des conditions de
transport
très difficiles.Repiqués
enpépinière
d’Amance auprintemps 1964,
ils n’ont pu être installés sur le terrainqu’à
l’automne
1966, après
avoir subi une crise aurepiquage
considérable : lesplants
avaient donc
déjà
5 ans(2-3) lorsqu’ils
furentplantés
en forêt domaniale d’Amance(altitude
240 m,pluviométrie annuelle 700 mm),
selon undispositif
en blocscomplets
à
parcelles
monoarbres(30 blocs).
Les cent provenances
représentées
ici ne sontqu’un
échantillon de l’ensemble descinq
cent trente provenances internationales étudiées enAllemagne
même dansquatre
stations différentes(Weisgerber
et al.,1976).
1 .2. - Caractères mesurés
- Avant la
plantation (1966),
des mesures de diamètre au collet et de hauteur totale ont été effectuées sur tous lesplants.
-
Compte
tenu du mauvais état initial desplants
rendant encoreplus probable
la crise de
transplantation fréquente
chezl’épicéa,
aucune mesure n’a été effectuéesur le terrain
jusqu’en
1970. Apartir
de1971,
soit 10 ansdepuis
lagraine (5
ansaprès
la
plantation)
etjusqu’en 1978,
soit à 17 ans, tous lesplants
ont été mesurés pour leur hauteur totale : ondispose
doncégalement
des mesures de pousses annuelles et de pousses cumulées surplusieurs
années.- En
1978,
une mesure de la circonférence à1,30
m a été réalisée sur tous lesplants.
- A côté de ces critères de
vigueur,
une notation du débourrementvégétatif
a été établie en trois passages les 17 mai, 25 mai et 4
juin
1973. Achaque
passage une note de 0 à 5 était attribuée aubourgeon
terminal dechaque plant,
selon un code 0-5 :0 :
bourgeon
dormant1 :
bourgeon
en rosette entière(écailles
nondéchirées)
2 :
apparition
desaiguilles (déchirement
oudisparition
totale desécailles,
pasd’allongement
desaiguilles)
3 :
allongement
desaiguilles,
pousse encoregonflée
4 : stade
pinceau : allongement aiguilles
serrées5 :
allongement
maximum,aiguilles
écartées.A
partir
de cette notationindividuelle,
deuxpourcentages
ont étéégalement pris
en
compte : pourcentage
deplants ayant
une notesupérieure
à 1 lors dupremier
passage,
pourcentage
deplants ayant
une note au moinségale
à 4 lors du dernier passage.1 .3. — Les conditions
climatologiques
II
paraît
intéressant de relever lespluviométries
durant lapériode étudiée,
dansla mesure où elle inclut deux années
(1975
et1976) remarquables
par leur sécheresse : i les données nous sont fournies par la station deBioclimatologie
forestière,poste
d’Amance(«
Hiver » inclut les mois d’octobre àavril).
Il faut
relever,
à côté de larégularité
des années 1971 à1974,
les deux hivers 1974-75 et 1977-78particulièrement humides,
tandis que lapériode
mai 1975 à sep-tembre 1976 se
singularise
par uneexceptionnelle
sécheresse : ceci serépercute
auniveau des pousses annuelles
puisque
1975 et 1978 traduisent une forte croissance(69
et 88cm)
alors que les pousses des années 1976 et 1977(51
et 53cm) répercutent
la sécheresse des deux années
précédentes.
1 .4. - Traitement des données
Au niveau de la
comparaison
des provenances, un modèle linéaireclassique
àeffets
fixés, prenant
encompte
le facteur bloc et le facteur provenance, a étéappliqué
à chacun des caractères afin d’étudier la
signification
des facteurs.Le tableau 1 résume
l’analyse
de variance utilisée danschaque
cas.L’analyse précédente permettant
de tester lasignification
de l’effet provenance pour un caractèredonné,
nous avons eu ensuite recours àl’analyse
multivariableclassique
pourpermettre
unereprésentation graphique simplifiée
des provenances :une
première analyse portera uniquement
sur tous les critères devigueur (hauteurs totales,
pousses,circonférence),
une seconde sur les critères de débourrement et unetroisième enfin
reprendra
l’ensemble de tous les critères(vigueur
etdébourrement).
Tous les traitements utilisant des programmes de la Station de Biométrie de
Nancy
ont été effectués sur l’ordinateur
(IRIS 80)
du Centre Interuniversitaire de Calcul d’Orléans-La Source.2. - Résultats
généraux
2.1. - Etude des critères de
vigueur
Pour tous les caractères de hauteurs totales, pousses annuelles et pousses cumu-
lées,
circonférence, les effets blocs comme les effets provenances sont hautementsignificatifs.
Les valeurs des tests F calculéesd’après
le tableau 1 sontreportées
dansle tableau 2.
Les fortes valeurs des F et leur évolution méritent que l’on
regarde
deprès
l’actiondes années sur l’effet bloc avant de s’intéresser au classement des provenances.
2.11. Etude du milieu.
Les valeurs du tableau 2
indiquent
que l’effet bloc sur les hauteurs totales, bien que restant trèssignificatif,
a tendance à diminuerrégulièrement
de 1971 à 1978. Onretrouve
également
cette tendance au niveau des pousses annuellesjusqu’en 1975, perturbée
en 1976 et 1977 par la sécheresse des années 1975 et 1976. L’effet bloc dimi-nue à nouveau sur la pousse de l’année 1978.
Si l’on compare les classements des blocs obtenus sur les pousses annuelles successives, on constate de très fortes interactions blocs-année.
Cependant
leschange-
ments de classement observés semblent
s’opérer progressivement
et concernent des groupes de blocs voisins sur le terrain : ainsi les blocs 1 à 7, trèsvigoureux
audépart,
restent les
plus vigoureux
au niveau des hauteurs totales 1978 : situés dans lapartie
haute du
dispositif,
ilsprofitent
enplus
d’un effet lisièreprotecteur.
Par contre, trèsvigoureux
au niveau des pousses 1972 et1973,
ilsatteignent
la moyennegénérale
en
1975,
etaprès
une faible remontée en 1976, tombent nettement en-dessous de la moyenne en 1977et1978,
l’effet lisièrepouvant
désormais leur être néfaste. Le compor- tement des blocs 20 à 25(dans
lapartie
basse dudispositif)
est totalement inverse : peuvigoureux jusqu’en 1974,
ils semblent se sortirprogressivement
d’une concurrencearbustive intense, et très
vigoureux depuis 1975,
ils viennent en tête du classement en1978.
Cette variation du bloc avec le
temps
estimportante
àsignaler :
elle remet encause la notion de fertilité du bloc, considérée habituellement comme définitive. La fertilité du bloc est au contraire évolutive : ainsi le bloc
15,
situéégalement
dans la par- tie basse et fortement concurrencé par lavégétation adventice, qui n’atteignait qu’en
1978 la hauteur moyenne
(4,6 m) qu’avait
obtenuedéjà
en 1975 le bloc 6, révèle en1978 une forte pousse annuelle
(95 cm)
alors que le bloc 6 pousse peu(79 cm).
Cette évolution se traduit aussi au niveau des corrélations entre moyennes de blocs
sur les caractères de
vigueur :
d’une année à l’autre, les corrélations entre hauteurs totales restent très élevées mais diminuentrégulièrement (entre
1971 et 1972, la corré-lation entre blocs est de
0,99,
entre 1971 et les différentes années successives elledécroît
doucement pour atteindre0,87
entre 1971et 1978).
Au niveau des pousses
annuelles,
les corrélations sont très variables, dues auxchangements
de classement de fertilité des blocs(voir
tabl.3).
Mise à
part
la pousse de l’année 1976qui conjugue
les effets de la sécheresse 1975 et de la sécheresse de 1976elle-même,
on retrouve sur le tableau 3 la diminutionrégu-
lière du coefficient de corrélation du haut en bas du
tableau, jusqu’à
une corrélation- de 0,78 sur les moyennes de blocs entre les pousses 1972 et 1978. II sera intéressant de
poursuivre
cette étude du milieu afin de suivre cette évolution de la fertilité desblocs.
2.12. Etude des provenances.
Remarques préliminaires.
Le classement des provenances en 1978 est très
proche
de celuiqui
avait été établi à la sortie de lapépinière
en 1966(la
corrélation entre les 2 années est de0,87).
Ceci montrequ’après
3 ans derepiquage,
lesplants
étaient sortis de la crisequ’ils
avaient subie lors de leurtransport
entrel’Allemagne
et la France. Il n’est donc pas aberrant d’inclure les données depépinière (hauteur
et diamètre aucollet)
dans l’ensemble des critères de
vigueur
au niveau provenance tout au moins.En
reprenant
les résultats obtenus enAllemagne,
on constatequ’à âge égal
lavigueur générale
desplants
sembleplus grande
à Amancequ’en Allemagne.
L’étudeallemande concernant un
plus grand
échantillon que celui étudié ici, les différences devigueur pourraient s’expliquer
par ces différencesd’échantillonnage. Cependant Weisgerber
et al.(1977)
donnent les hauteurs totales de six provenances allemandes dans lesquatre
stationsexpérimentales
allemandes et nous pouvons les compareravec leurs
performances
obtenues la même année(1974)
à Amance :..! ! ! !... ! ..!. !! . ! . -!! .!. !...
Les six provenances
expriment
donc bien les différences de fertilité entre lesquatre
stations et confirment laplus
fortevigueur
observée actuellement à Amance.De
plus,
il faut noter que la croissance a étébeaucoup plus
fortedepuis
laplantation
à Amance
puisqu’à
la sortie depépinière (1966)
lesperformances
allemandes étaient alorsplus
élevées : les hauteurs moyennes allaient de 37 cm à45,6
cm suivant lespépinières allemandes,
elles n’étaient que de 36 cm enpépinière
d’Amance.Comportement
des provenances.La stabilité dans le classement pour les critères de
vigueur
des cent provenancesreprésentées
ici estremarquable :
les corrélations entre hauteurs totales sont très éle- vées, on a vuplus
haut que dès lapépinière
le classement sur les hauteurs totales était fixé. Deplus,
la hauteur enpépinière (5
ansdepuis
lagraine)
est un bonprédicteur
de la circonférence à
1,30
m à 17 ansdepuis
lagraine (la
corrélation entre les deux caractères est de0,87).
Même au niveau des pousses annuelles, les corrélations restent élevéesmalgré
unelégère
baissequand
ellesimpliquent
l’année 1977(conséquence
de la sécheresse
1976).
- ---.... -z !-- --!----.. -!...!!.-! .- -
Quelle
que soit leurvigueur
moyenne, toutes les provenances autrichiennes sauf une, ontréagi
à la sécheresse enproduisant
une faible pousse en 1977.L’exception
est la seule provenance autrichienne de basse altitude
(400 m),
elle a au contraire bienpoussé
en 1977. Néanmoins dès 1978, le classement est rétablipuisqu’avec
1975 lacorrélation entre provenances est remontée à 0,81.
Les valeurs de
Fp
lues dans le tableau 2indiquent l’importance
de l’effet prove-nance et il semble intéressant
d’indiquer
un classement des provenancesregroupées
en
grandes régions géographiques,
comme l’ont faitWeisgerber
etal.,
1977. Nousne détaillerons
cependant
pas les provenances allemandespuisqu’elles
seront étudiéesplus
loin.Le tableau 4
présente
donc les valeurs des hauteurs totales et circonférences à1,30
m à 17 ans(la
corrélation entre les deux caractères est de0,95)
selon les diversesrégions.
La hauteur moyennegénérale
est alors de5,80
m, la circonférence à1,30
mest de
21,24
cm. On retrouveclassiquement
lasupériorité
des Beskides(Moravie, Pologne),
du Nord-Est de laPologne,
de la Roumanie et du Harz. Tout aussiclassique-
ment les
régions alpines (France,
Suisse,Autriche)
etnordiques (URSS, Finlande)
serévèlent peu
vigoureuses
tandis queAllemagne
Fédérale et Suède se situent au niveaude la moyenne
générale.
Au niveau provenance, la variabilité est encoreplus grande :
la provenance la moins
vigoureuse (Suisse)
mesure4,22
m tandis que laplus vigou-
reuse
(Autriche)
atteint6,82
m, soit unesupériorité
relative de 62p. 100.
Ce mêmegain
étant
également
obtenu sur la circonférence à1,30
m, il est évident que les retombéessur le volume sont considérables.
Il a paru utile de
pouvoir disposer
d’unereprésentation
des provenances résumant l’histoire de leur croissancedepuis
1966jusqu’à
1978 : lafigure
1présente
le résultat d’uneanalyse
encomposantes principales prenant
encompte
au niveau moyennes de provenances tous les critères devigueur.
Le
premier
axe(Y 1 ) ’ vertical,
absorbe 93p. 100
de la variabilitéglobale
du nuage depoints,
il est corrélépositivement
et fortement avec toutes les variablesinitiales,
elles-mêmes très liées entre elles comme on l’a vuplus
haut. Les provenances se ran-gent
donc suivant cet axe selon unecomposante
résumant leur«vigueur globale».
Le deuxième axe
(Y 2 ),
neprend plus
encompte
que 5p. 100
de la variationtotale,
il est corrélé
négativement
avec le diamètre 1966 : ilsépare
les provenancesqui,
à«
vigueur globale » équivalente (incluant déjà
le diamètre66),
se différenciaitpar leur
diamètre moyen initial
(rappelons
que les deuxcomposantes
sontindépendantes
parconstruction) :
sur lapartie gauche
dugraphique
se situent donc les provenancesqui,
pour un niveau devigueur donné,
ont un diamètre initialplus
élevé. On trouvedans ce groupe les provenances
alpines (Suisses surtout) qui,
de par leur formeplus trapue s’opposent
ainsi aux provenancesnordiques
de mêmevigueur globale
peu élevée maisayant
une forme initialeplus
élancée. On notera l’étalement des prove-nances autrichiennes selon la
première composante
surtout(forte
variabilité de lavigueur globale),
des provenances allemandes selon les deuxcomposantes,
des pro-venances des Beskides
(Pologne
etMoravie)
enfinqui
sedistinguent
par un haut niveau devigueur globale
avec unelégère
variation dans les diamètres initiaux.2.13.
Comportement
individuel.Dès 1971
(soit
5 ansaprès
laplantation),
lesplants
semblent sortis de leur éven-tuelle crise de
transplantation puisque
les corrélations entre hauteurs totales indivi- duelles sont très élevées(0,81
entre hauteur 1971 et hauteur1978).
Par contre, lesmesures individuelles en
pépinière prédisent
moins bien lesperformances
individuellesen
plantation :
aussi bien entre hauteursqu’entre circonférences,
les corrélationspépinière-plantation
ne sont que de0,45.
La crise due aurepiquage, masquée
auniveau provenance comme on l’a vu
plus haut,
reste néanmoins sensible au niveau individuel. La hauteurtotale,
17 ansaprès plantation,
est un très bon estimateur du volume individuelpuisque
la corrélation avec la circonférence à1,30
m est très élevée(0,87).
L’importance
des conditionsclimatologiques
très variablespendant
lapériode
étudiée d’une
part,
des effets de fertilité des blocs dont l’évolution a été mise en évi- denceplus
haut d’autrepart,
contribuent sans doute àexpliquer
le manque de stabilité dans les croissances annuelles individuelles.On retrouve là encore une baisse très nette des corrélations entre deux années successives dès que l’année 1977 intervient.
Indépendamment
de cette année, les autrescorrélations ne sont pas très élevées
(0,5
enmoyenne).
Peut-être le niveau individuel inclut-il des interactions bloc-individuparticulièrement importantes
ici de par la gran- deur de l’effet bloc lui-même.2.2. — Les critères de débourrement
En
1973,
19jours séparent
la dernière notation de lapremière :
lors dupremier
passage, la note moyenne est de 1(bourgeon gonflé).
Au second passage, elle est de1,8 (apparition
desaiguilles)
et atteint3,8 (stade pinceau)
au dernier passage.2.21. Etude du milieu.
L’effet bloc est ici encore très
important,
et deplus,
au niveau des hauteurstotales,
les blocs lesplus vigoureux
sont aussi lesplus précoces.
Cette liaisons’explique
aisé-ment par l’effet de lisière
évoqué plus
haut : si la lisièrejoue
un rôle favorable sur la croissance, elletamponne
aussi lestempératures
etaugmente
donc laprécocité
desblocs voisins.
Par contre la liaison entre
précocité
d’un bloc etlongueur
de la pousse annuelle estbeaucoup plus fluctuante,
ceci étant dû essentiellement à l’inversion des classe- ments de fertilité des blocs de 1974 à 1978 :jusqu’en
1974 la corrélationprécocité- longueur
de la pousse estpositive (0,6),
les blocs de lapartie
basse, dans une zoneplus
froide et subissant une forte concurrence sont tardifs et peu
vigoureux
alors que les blocs duhaut, protégés
par lalisière,
sontvigoureux
etprécoces.
En
1975,
cette corrélation s’annule et diminueprogressivement
pour atteindre0,79
en1978,
la fertilité des blocs s’étant inversée alors que les zones basses sont tou-jours plus
froides doncplus
tardives.2.22. Etude des provenances.
La
première
note apermis
de déceler les provenancesparticulièrement précoces puisqu’en
moyenne 12 p. 100 desplants
seulement ontdépassé
le stade 2(apparition
des
aiguilles),
cepourcentage
variant d’une provenance à l’autre entre 0p. 100
et44 p. 100
(provenance
3 -autrichienne).
Au dernier passage
(deux
semainesplus tard),
69 p. 100 desplants
ont une noteégale
à 4 ou 5(allongement
maximum desaiguilles),
mais pour certaines provenancesce
pourcentage
atteint 99 p. 100 alors que pourd’autres, particulièrement tardives,
il n’est que de 25 p. 100
(provenance
60 -française
- ou 99 -finlandaise).
Afin de
prendre
encompte
l’ensemble des trois notations à lafois,
on a voulureprésenter globalement
les provenances au moyen d’uneanalyse
encomposantes principales :
les variables initiales sont les trois notes(au
niveau moyennes de prove-nances)
et lespourcentages
définisplus
haut.La
première composante (axe
verticalY,
sur lafig. 2)
absorbe 85 p. 100 de la variationtotale,
la deuxièmecomposante
en absorbe encore10 p.
100.La
première composante,
fortement corrélée avec toutes les variablesinitiales,
est donc liée à la
précocité générale
des provenances : en haut dugraphique
ontrouve les provenances autrichiennes
particulièrement précoces,
au milieu le groupe des provenancesallemandes,
tandis que les provenances du Nord-Est de laPologne, quelques
provenancesalpines
et des provenances des Beskides sedistinguent
par leur tardiveté.La deuxième
composante
est corréléenégativement
avec lepremier pourcentage
et
positivement
avec le dernier :elle peut
être associée à larapidité
du débourrement.Pour un niveau de débourrement
donné,
on trouve à droite des provenancesqui,
relativement tardives au
premier
passage, ont débourré très vite entre lepremier
etle dernier passage
(donc
faible variabilitéintraprovenance).
Agauche
au contraire,les provenances sont
plus
variables car,ayant
commencé à débourrerplus
tôt, elles serévèlent
plus
tardives lors du dernier passage.Cette
représentation permet
de savoir comments’exprime
la tardiveté d’une provenance : cepeut
être par unlong
étalement de lapériode
de débourrement(provenances tchèques
15 et 18 : 14 p. 100 desplants ayant
commencé à débourrer lors dupremier
passage, 49 p. 100 seulement sontcomplètement
débourrés - notesupérieure
à 4 - lors dudernier)
ou cepeut
être encore par un début tardif de cettepériode (provenances alpines 57,
48 et 53 :premier pourcentage
0 p.100,
dernierpourcentage :
80 p.100).
On retrouve ici les observations faites par
Weisgerber
et al. 1976 : les prove-nances suisses, une
partie
des provenancesfrançaises
et allemandes(provenances
d’altitude en
général)
sont assezhomogènes
dansl’expression
individuelle du débour- rement(à
droite sur lafig. 2).
Par contre, le Nord-Est Polonais, laplupart
des prove-nances des
Beskides, plusieurs
provenancesfrançaises
et allemandes se révèlent à la fois tardives et variables cequi
est très favorable à une amélioration de ce critère par sélection individuelle. Larapidité
du débourrementpourrait
être, à côté de la tardi- veté, un nouveau critère desélection,
dans la mesure où elle raccourcit lapériode
cri-tique
de sensibilité auxgelées
tardives.2.3. - Liaisons
vigueur-débourrement
Dans l’échantillon des cent provenances
représenté
ici, aucune liaisonsignificative
entre les critères de débourrement et les critères de
vigueur
ne semble sedégager :
une faible corrélation
(0,25)
existe entre laprécocité
moyenne d’une provenance etla longueur de
la pousse annuelle des années1973,1974,1976
et 1978. Avec lapousse de
l’année1975, la
corrélation est nulle. Lecomportement
des provenances autrichiennesen 1977
déjà signalé plus haut,
à savoir, une faiblevigueur
cette année-là alors queglobalement
les provenances sontprécoces, explique
sans doute la diminutionbrusque
du coefficient de corrélation
précocité-pousse
en 1977(0,3).
Là encore, uneanalyse
en
composantes principales permettra
unereprésentation synthétique
des provenances,leur
proximité
sur leplan
des deuxpremières composantes (fig. 3)
traduisant]eur
ressemblance
génotypique
sur l’ensemble des critères devigueur
et deprécocité :
l’axe
vertical, qui prend
encompte
76 p. 100 de la variabilité totale est fortement corrélé(0,9)
avec toutes les mesures de hauteurstotales,
de pousses annuelles et de circonférence.Du haut en bas de la
figure
3, les provenances serangent
donc parvigueur glo-
bale décroissante. Le deuxième axe
qui
absorbe encore 14 p. 100 de lavariabilité,
est fortement lié aux critères de
précocité
du débourrement(0,9),
mais révèleégale-
ment une liaison
négative
avec la pousse 1977(0,4) :
eneffet,
à droite sur legraphique
se
regroupent
les provenances autrichiennesqui, quelle
que soit leurvigueur globale,
sont d’une
part, précoces,
et d’autrepart,
peuvigoureuses
en 1977.Dans la
partie
en haut àgauche
de lafigure
3, les provenances à la fois tardives etvigoureuses,
sont d’ungrand
intérêt pour les reboisements en France : ils’agit,
de la provenance Roumaine
(91),
des provenances desBeskides,
trèsvigoureuses
etmoyennement
tardives(en
Moravie : Vizovice, numéros 16 et 17 - enPologne : Istebna-Wilsa,
numéros12, 35
et37)
ou des provenances du Nord et Nord-EstPolonais,
moins
vigoureuses
maisplus
tardives(Olstyn :
41 ou Bialowieza :94)
ainsi que des provenancestchèques (Cikhaj : 87,
Sorcina Hrabusice :90).
Notons lagrande
varia-bilité de la provenance Kizovice
(Moravie) qui,
enplus
des numéros 16 et17,
estégale-
ment
représentée
par les numéros14, 15
et 18, tous les troisbeaucoup
moinsvigou-
reux : cette provenance est donc assez mal définie de par sa forte instabilité. Une pro-
venance artificielle allemande
(81 : Ulzen)
estparticulièrement
intéressante, elle sedistingue
de toutes les provenances allemandes par soncomportement
à la foisvigou-
reux et tardif. Bien que moins
vigoureuse,
la provenanceAnzig (66)
estégalement
àsignaler
pour sa tardiveté. Le reste des provenances allemandes s’étale du haut en bas dugraphique, toujours plus
tardives que les autrichiennes de mêmevigueur,
maisplus précoces
que des provenances des Beskides. Parmi les provenances peuvigou-
reuses, leur
précocité
moyenne les situe au milieu des provenancesalpines qui peuvent être,
ou très tardives(60 : Magland, Haute-Savoie)
ou trèsprécoces (47 : Casis, Suisse)
à des altitudes
pourtant comparables.
Trois provenances suédoises(44, 45, 46)
sontproches
des meilleures provenancesallemandes,
les deux autres(43, 36)
étant aucontraire très peu
vigoureuses
etlégèrement précoces.
Au niveau des
grandes régions géographiques,
ces résultats confirment les clas- sementsgénéralement adoptés
pourl’épicéa,
que ce soitau niveaupépinière(Krutzsch, 1968)
ou au niveauplantation (Giertych, 1978 ; Krutzsch, 1974 ; Weisgerber
etai., 1977).
Ils mettent l’accent sur certainesrégions dont l’intérêt, pour le
reboisement d’unepart
et pour une sélection individuelle d’autrepart,
est incontestable.La
réglementation
établie dans le cadre de laC.E.E.,
rendparticulièrement
inté-ressant, l’étude du
comportement
en France des provenances allemandes.3. - Les
régions
de provenances allemandes 3.1. - Lalégislation
allemandeD’après
la loi allemande sur lesplants
et matériels dereproduction
forestiersdu
31 .7.1972,
le territoire de laRépublique
Fédérale Allemande est divisé enrégions
de provenances
plus
ou moinsgrandes,
entièrement délimitées dansl’espace (voir fig. 4).
Des semences récoltées à l’intérieur d’unerégion
sontregroupées
et commer-cialisées sous le numéro de cette
région. L’application
de cette loi rendimpossible
l’accès à des provenances
individualisées,
bien que, comme chezbeaucoup d’espèces forestières,
de nombreuxpeuplements d’épicéa génétiquement supérieurs jouissent
dans lapratique
d’un intérêtparticulier.
Pour tenircompte
de cefait,
on a eu lapossi-
bilité de choisir des provenancesayant
révélé de bonnesperformances,
de les récolterséparément
et de les commercialiser sous ladésignation
de la provenanceaprès
des contrôles
d’homogénéité génétique
dumatériel. Ce type
depeuplements
sélection-nés est
désigné
sous le terme de « Sonderherkunft » ou « provenancespéciale ».
Sides tests
appropriés
établissent leursupériorité,
ilspourraient
être commercialisésau sein de la C.E.E. comme matériel certifié. L’introduction en France de matériel forestier allemand est actuellement limité au
système
desrégions
de provenances.Le but de ce
chapitre
estd’étudier,
àpartir
des provenances allemandesrepré-
sentées dans cette
expérience (indiquées
par des numéros sur lacarte)
et dans uneexpérience plus
ancienne(indiquées
par deslettres, Christophe, 1973),
la stabilité des provenances parcomparaison
avec leurcomportement
enAllemagne
d’unepart,
etl’homogénéité
derégions
de provenances introduites en France d’autrepart.
3.2. - Le classement des provenances et
régions
de provenanceEn
s’appuyant uniquement
sur des mesures de hauteurs totales obtenues dansplusieurs dispositifs
à desâges différents, Schmidt-Vogt (1976
et1977)
propose un classementglobal
desrégions
de provenance, lesperformances
dechaque
provenance(dans chaque dispositif)
étantexprimées
en écart à la moyenne dudispositif
ramenéeà 100. La moyenne
générale,
sur tous lesdispositifs,
estégalement
ramenée à100,
et c’est par
rapport
à cette moyenne que sont calculées les valeursprésentées
dansle tableau 5. Les résultats des deux
expériences françaises
ont étéreportés
selon lemême
principe :
dans cequi
suit, ces valeurs serontindiquées
entreparenthèses après
le nom des provenances.
En tête du
classement,
larégion Westerhof
domine nettement dans le classementallemand,
elle est d’ailleurs reconnue comme le meilleurpeuplement
allemand(Weisgerber, 1977). Cependant
les deux provenancesreprésentées
en France sontpeu
comparables puisque
l’une atteint la valeur laplus grande (120)
alors que l’autre n’estqu’à
100(moyenne générale).
Viennent ensuite dans le classement
allemand,
lesrégions
du Harz(84004)
etde Frankenwald
(84011)
de bassealtitude, également vigoureuses
en France et dansles
dispositifs
deWeisgerber.
La provenance Rothenkirchen(84011)
est intéressante àsignaler
de par sa stabilité decomportement (105
enFrance, 106
et 116 enAllemagne).
Cependant
en France, unerégion
asurpassé
lesprécédentes :
ils’agit
du bas paysau Nord
(84001 : 109),
dont une provenance Ulzen(114) également remarquée
parWeisgerber,
adéjà
étésignalée plus
haut. Cetterégion représentée
par deux autresprovenances
moinsvigoureuses
chezSchmidt-Vogt,
est moins bien classée en Alle- magne(103).
La
région 84002,
très étendue sur le terrain, a uncomportement
moyen aussivigoureux
enAllemagne qu’en
France(108
et106).
Il faut écarter la provenanceStryck, qui
est très bien classée enAllemagne (110)
etsignalée
comme trèsvigoureuse
parWeisgerber :
elle est par ailleurs une« Sonderherkunft ». Pourtant en France,repré-
sentée dans les deux
expériences,
elle a une croissance inférieure à la moyenne : 96 et94,
son introduction est donc à déconseiller. Dans cetterégion, quelques
prove-nances se révèlent en France très
vigoureuses : Rôtgen (107),
Chausseehaus(116)
etDie6urg (117),
ces deux dernières étantremarquées également
parWeisgerber.
La« Sonderherkunft »
Burgjoss,
atteint 102 en France et 115 enAllemagne.
La
région
84016(Forêt bavaroise,
bassealtitude)
a un boncomportement
moyen(111
et107) :
elle estreprésentée
en France par une provenanceSpiegelau
assezstable
puisqu’elle
atteint 111 en France et 109 chezWeisgerber.
La
région
84013 s’est révélée moinsperformante
en Francequ’en Allemagne,
ceci étant dû à la différence
d’échantillonnage :
lapartie
Nord de cetterégion
appar- tient à l’aire naturelle del’épicéa
et est trèsvigoureuse
engénéral (110
à120).
Laprovenance
Schernfeld, représentée
ici, ajustement
laplus
faible valeur(110)
chezSchmidt-Vogt.
La seconde provenance est située dans lapartie
Sud de cetterégion,
reconnue comme moins
vigoureuse.
La
région
84008(Forêt Noire,
altitude inférieure à 1 000m),
ne se révèle pas aussivigoureuse
en France(94) qu’en Allemagne (103).
Elleenglobe
ici trois provenancesNagold
assezinégales (107,
95 et93),
et des provenances Lenzkirch etHôhenfichten
des Schworzwoldes
(89
et93),
classées comme « Sonderherkünfte » à une altitudesupérieure
à 1 000 m(région 84009).
Au contraire, deux
régions d’altitude,
84020 et 84022(Alpen), représentées
par Reit-im-Winkel(900-1
000m)
et Partenkirchen(1
600-1 700m),
ont uneperformance
moyenne en France
(100
et102)
alors que cesrégions
sontgénéralement
considéréescomme très peu
vigoureuses
enAllemagne.
La
région
84019 a uncomportement
moyen dans les deux pays(102
et99) :
18 stations de la provenance
Sachsenried, représentées
enAllemagne,
sont très variables et certaines peuvigoureuses (81, 79
et68). Cette
provenance atteint 93 en France. Les autres sontplus vigoureuses : Mühldorf (110),
Mindelheim(103
à côté de 112 en Alle-magne)
etAnzig (103).
Signalons
la bonne stabilité de larégion
84005,représentée
dans les deux pays par deux provenances Oderhaus, classée comme « Sonderherkunft» AutochtoneHarzfichte :
elles réalisent 95 et 98 enAllemagne
et 91 et 97 en France.La
région
84017 estreprésentée
par deux provenances en France : Zwiesel(98)
et
Spiegelau (102).
La provenance Zwiesel,représentée quatre
fois enAllemagne
n’at-teint que 88 en moyenne
(83
à94).
Deux
régions
d’altitude se situent en fin declassement,
mais leurcomportement
diffère d’une
expérience
à l’nutre : larégion
84018(Forêt bavaroise,
altitudesupé-
rieure à 1 000
m)
est considérée parSchmidt-Vogt
commebeaucoup
moinsvigoureuse
que la
région
84009(Forêt Noire,
mêmealtitude) :
78 pour lapremière,
91 pour la seconde. En France, lecomportement
moyen des provenances de la Forêt bavaroisese
rapproche
des observations deWeisgerber : Spiegelau (99
et109), Bischofsreuih (97
et 93 d’un côté, 92 et 105 del’autre),
enfin Neureichenhaus(86
et87).
Par contre,Spiegelau
ne faitplus
que 69 chezSchmidt-Vogt,
il en va de même pour Zwiesel-Ost V1,2 (86
d’un côté, 69 del’autre).
La seule provenance de la Fôrêt Noire
représentée
en France, Schluchsee a unecroissance aussi faible dans les deux
dispositifs (81
et83).
Mais enAllemagne,
d’autresprovenances