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Embryon humain, président républicain

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548 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 7 mars 2012

actualité, info

La prévention des fractures ostéo­

porotiques est justifiée chez la femme ménopausée en cas de dimi nution significative de la den­

sité osseuse (T­score l ­ 2,50), et la pratique d’une densitométrie osseu se est ainsi recommandée après 65 ans. A quelle fréquence faut­il contrôler l’évolution de ce paramètre en l’absence d’indication initiale au traitement préventif ? A ce jour, la littérature ne permet pas de répondre. Les auteurs de cette étude ont donc utilisé les données de la cohorte prospec­

tive SOF (près de 5000 femmes américaines recrutées entre 1986

et 1988 et présentant à l’inclusion soit une densitométrie osseuse normale, soit une ostéopénie avec un T­score l ­ 2,50), afin d’évaluer l’intervalle nécessaire pour que 10% des participantes aient pro­

gressé vers une ostéoporose avé­

rée. En divisant la cohorte en quatre groupes selon la densité initiale et par une analyse statis­

tique ajustée en fonction des autres risques, dits compétitifs, les auteurs montrent que l’âge et la densité osseuse initiale sont les facteurs les plus importants pour prédire le risque de développe­

ment d’une ostéoporose. Ainsi,

plus de seize ans sont néces­

saires pour qu’une ostéoporose se développe chez une femme sur dix présentant une densité nor­

male ou légèrement diminuée ; ce délai passe à environ cinq ans en cas d’ostéopénie modérée, et à un an pour les ostéopénies avancées.

Commentaire : Dans de nom­

breuses situations cliniques, nous cherchons à guider notre prise en charge par la mesure d’un «mar­

queur» objectif et une utilisation exagérée de ces paramètres pour­

rait nous conduire à centrer nos objectifs plus sur la maladie que sur le malade. Peu d’études se sont intéressées à déterminer l’in­

tervalle raisonnable permettant de distinguer le vrai signal d’évolution d’un «bruit de fond». Cette analyse originale fait partie de ces appro­

ches indispensables, et donne

des indications précieuses pour la prise en charge de l’ostéoporose.

Elle permet de conforter l’attitude généralement recommandée d’es­

pacer les mesures densitomé­

triques, en tenant compte de l’âge et de la densité osseuse initiale, les autres facteurs ayant une utilité réduite. Ainsi, une femme de 70 ans avec un score densitométrique su­

périeur à ­ 1,5 ne devrait pas avoir de contrôle d’évolution avant quinze ans. Il reste à traduire ces résultats dans des recommanda­

tions simples et utilisables dans la pratique clinique quotidienne !

Dr Thierry Fumeaux Hôpital de Nyon Gourlay ML, Fine JP, Preisser JS, et al.

Bone­density testing interval and tran­

sition to osteoporosis in older women.

N Engl J Med 2012;366:225­33.

Embryon humain, président républicain

Il n’y a pas que l’époque que nous vivons qui soit formidable. Certains pays le sont aussi. Et la France en fait partie. Son jaco­

binisme associé à un régime politique de­

venu ultra­présidentiel fournit, à qui sait re­

garder, un assez remarquable balcon alpin doté d’une longue­vue. C’est le cas, comme souvent, avec les questions relatives à la bio­

éthique, continent moral généralement à la dérive. Le pays avait commencé, on s’en sou­

vient peut­être, la transcription dans la loi du fruit de réflexions généralement consen­

suelles nées de l’avancée de quelques tech­

niques médicales. La chose se passait à la fin des années 80 et au début de la décennie suivante.

Pour pimenter le tout le législateur trico­

lore se fouetta : les lois de 1994 allaient être relues et réécrites tous les cinq ans. C’était pécher là par ambition ou gourmandise. On rata 1999 pour se retrouver en 2004. Puis on patienta à nouveau jusqu’en 2011. La machi­

nerie républicaine était fourbue. Dans leur infinie sagesse, les élus de la Nation jugèrent que le temps de la révision périodi que avait, précisément, fait son temps. On légiférerait encore dans le champ de la bio éthique, cer­

tes. Mais le moment venu et en cas de force majeure. Quand les avancées des scien ces du vivant heurteraient vraiment la cons cience

humaniste du plus grand nom bre.

Voilà qui était sage. Mais c’était sans comp­

ter avec le grand rendez­vous – printemps 2012 – des élections présidentielles. Et voici que la bioéthique est à nouveau présente dans le paysage tricolore. Cette fois, elle est sur la scène électorale, bien visible. Et loin devant les questions financières, économi­

ques, de sécurité, de justice sociale et d’iden­

tité nationale. Il y a la question de l’euthana­

sie et de la fin de vie, bien sûr. Avec une question phare : celle de la dépénalisation/

légalisation de la pratique du suicide médi­

calement assisté. Le prin cipal candidat de droite (par ailleurs président sortant) s’y op­

pose quand celui de la gauche (du moins la socialiste) tourne encore la langue dans sa bouche pour expliquer qu’il y serait bien a

priori favorable s’il n’y avait pas des argu­

ments contraires qui, malgré tout, né cessi­

tent réflexion. Attendons.

Et l’affaire ne serait pas complète sans les questionnements por tant sur l’autre extré­

mité de l’existence humaine. Questionne­

ments, là aussi, aisément réductibles à une question : celle d’autoriser ou pas la recher che sur l’embryon humain ? Il n’est pas inutile de rappeler qu’en France cette recherche est interdite ; sauf à disposer d’une dérogation.

Et que pour obtenir ce sésame, il faut que ceux qui entendent la mener puissent démontrer (à ceux habilités à donner le feu vert) qu’elle est a priori utile et qu’elle ne pourrait être menée par d’autres voies. Ajou tons encore qu’en toute hypothèse, il s’agira d’embryons surnuméraires conçus par fécon dation in vi­

tro et ne s’inscrivant plus dans un projet pa­

rental pas plus que dans le cadre d’un projet de don. Et ajoutons pour finir qu’en prati que, il s’agit souvent pour l’heure d’embryons porteurs d’une anomalie génétique ayant con­

duit à les exclure – après diag nostic préim­

plantatoire – d’un éventuel projet parental.

point de vue

CC BY Neeta Lind

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Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 7 mars 2012 549 Ceci posé, qu’apprend­on ? Que le candi­

dat régulièrement donné (par les sondages) pour futur président de la République fran­

çaise (le candidat du Parti socialiste) vient d’annoncer qu’élu, il proposerait au Parle­

ment de modifier des articles de la loi con cer­

nant cette recherche. Il a fait cette annonce à l’occasion d’une visite effectuée au Géno­

pôle d’Evry (banlieue parisienne). Et il a sans surprise invoqué la nécessité absolue pour la France de rester dans la nouvelle compé­

tition (industrielle, économi­

que et à visée thérapeutique) à laquelle donnent lieu les cellules souches embryonnai­

res. Attention : cette recherche «devra être encadrée (…) de manière à éviter toute mar­

chandisation du corps humain».

Réactions immédiates des candidats ou porte­parole des différentes pièces de l’échi­

quier politique français. Pour François Bay­

rou, candidat centriste, il ne faut pas être

«léger» avec ce «qui touche au début de la vie humaine». Pour Christine Boutin (droite catholique), le candidat de gauche «fait le choix d’une société dans laquelle la valeur de l’homme est relative». Médecins et scien­

tifiques impliqués dans ces recherches (Phi­

lippe Menasché, chirurgien à l’Hôpital euro­

péen Georges­Pompidou ; Marc Peschanski, directeur du laboratoire I­Stem d’Evry) sa­

luent sans surprendre la proposition du can­

didat socialiste. C’est pour eux l’espoir d’une forme d’hypocrisie, une situation incompré­

hensible à l’étranger et qui retarde la recher­

che française. Reste, bien sûr, à savoir si la nécessaire destruction des embryons portera un jour ses fruits.

Autre camp, autres propos ; là encore sans surprise. «Il est inacceptable de faire de l’embryon un matériau de recherche, s’in­

surge Jean­Marie Le Mené – cité par La Croix – président de la Fondation Jérôme­Lejeune.

Autant les dérogations peuvent être conçues comme transitoires, en attendant de faire des progrès avec d’autres types de cellules sou­

ches (cellules souches adultes), autant l’au­

torisation transgresse un principe éthique majeur.» Quant à Jean Leonetti, qui fut le rapporteur de l’actuelle loi de bioéthique (aujourd’hui ministre des Affaires euro­

péennes), cité par Le Parisien, il estime que l’autorisation encadrée équivaut à l’interdic­

tion avec dérogations, l’éthique en moins.

Serait­ce dire que l’éthique n’est qu’appa­

rence ?

Autre temps, autres mœurs. Celui qui fut membre du Comité national français d’éthi­

que et président de l’Université Paris­Des­

cartes est aujourd’hui en campagne pour devenir député (socialiste) de Paris. Il s’ex­

prime sur le tout jeune site français du Huf- fington Post à propos de l’annonce du candi­

dat socialiste, annonce qui – sans surprise – doit selon lui «être approuvée sans réserve».

Ecoutons Axel Kahn puisque c’est de lui, médecin et généticien, qu’il s’agit.

«La position (…) d’une interdiction défi­

nitive de la recherche sur l’embryon du fait de sa nature humaine, était très difficile à défendre en raison, écrit­il. Non seulement parce que l’Eglise elle­même a beaucoup

évo lué quant à sa vision de l’embryon : c’est seulement en 1869 que, dans sa lettre (in Apostolicae Sedis), Pie IX retînt la notion d’une animation immédiate de l’embryon, dès sa conception (…). Cela dit, même si l’on voit l’embryon, issu de la fécondation d’un ovule par un spermatozoïde, comme une personne à part entière, cela ne justifie pas en soi une interdiction de la recherche. C’est parce que cette dernière peut être menée à tous les âges de la vie humaine que la médecine pro­

gresse et il serait singulier d’en exclure le seul âge embryonnaire.»

Serait­ce si simple ? Non, bien évidem­

ment. «On peut bien sûr objecter que la re­

cherche médicale s’efforce de ne pas entraî­

ner la mort des sujets alors qu’à l’inverse les embryons seront détruits, reconnaît Axel Kahn. En réalité, la norme de la fécondité humaine veut que le destin normal de la majorité des embryons conçus soit de ne se développer jamais en nouveau­nés, qu’il s’agisse des procédés naturels, c’est­à­dire l’étreinte amoureuse, ou bien de l’assistance médicale à la procréation (AMP) (…). Il est difficile, voire impossible, de soutenir que détruire ces embryons surnuméraires sans autre forme de procès, ce qui est tôt ou tard leur destin inéluctable, respecterait mieux leur humanité que de les impliquer sous un con trôle strict dans des recherches dont on attend une amélioration des techniques d’AMP ou la mise au point de traitements contre des maladies dégénératives.»

Trois questions, pour nourrir un débat trop souvent famélique. Existerait­il des destins qui ne soient pas inéluctables ? Est­il vraiment difficile de soutenir une telle thèse ? Et impos- sible serait­il, ici et maintenant, devenu fran­

çais ?

Jean-Yves Nau jeanyves.nau@gmail.com

… Et voici que la bioéthique est à nouveau présente dans le paysage tricolore …

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