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“Chut !” Le signe d’Harpocrate et l’invitation au silence

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“Chut !” Le signe d'Harpocrate et l'invitation au silence

MATTHEY, Philippe

MATTHEY, Philippe. “Chut !” Le signe d'Harpocrate et l'invitation au silence. In: Prescendi, F. &

Volokhine, Y. Dans le laboratoire de l'historien des religions. Mélanges offerts à Philippe Borgeaud. Genève : Labor et Fides, 2011. p. 541-573

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:24036

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RELIGIONS EN PERSPECTIVE No24

Clifford ANDO, Daniel BARBU, Nicole BELAYCHE, Corinne BONNET, David BOUVIER, Maya BURGER, Claude CALAME, Valentina CALZOLARI, Antoine CAVIGNEAUX, Philippe COLLOMBERT, Nicole DURISCHGAUTHIER, Doralice FABIANO, David FRANKFURTER, Fritz GRAF, Christian GROSSE, Dominique JAILLARD, Margaret JAQUES, Sarah Iles JOHNSTON, Antje KOLDE, Bruce LINCOLN, Mélanie LOZAT, Alessandra LUKINOVICH, Philippe MATTHEY, Silvia NAEF, Agnes A. NAGY, Maurice OLENDER, Delphine PANISSODEGGEL, Svetlana PETKOVA, Vincianne PIRENNE-DELFORGE, Olivier POT, Francesca PRESCENDI, James M. REDFIELD, Anne-Caroline RENDULOISEL, André-Louis REY, Thomas RÖMER, François RUEGG, Jörg RÜPKE, John SCHEID, Renate SCHLESIER, Paul SCHUBERT, Aurore SCHWAB, Guy G. STROUMSA, Youri VOLOKHINE, Froma I. ZEITLIN

Dans le laboratoire de l historien des religions

Mélanges offerts à Philippe Borgeaud

Edités par Francesca PRESCENDIet Youri VOLOKHINE

Avec la collaboration de Daniel BARBUet Philippe MATTHEY

LABOR ET FIDES

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Cet ouvrage est publié avec les soutiens de la Faculté des Lettres de l'Université de Genève, de

la Maison de l'Histoire, Genève,

de M. et Mme Matthey, de la fondation Patek Philippe et de la République et canton de Genève

Avec le soutien de la Ville de Genève

ISBN 978-2-8309-1428-3

© 2011 by Editions Labor et Fides 1, rue Beauregard, CH1204 Genève

Tél. + 41 (0)22 311 32 69 Fax + 41 (0)22 781 30 51 E-mail : contact@laboretfides.com Site Internet : www.laboretfides.com

Diffusion en Suisse : OLF, Fribourg

Diffusion en France et en Belgique : Editions du Cerf, Paris Diffusion au Canada : FIDES, Montréal

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Gravure de Eisen, illustrant l’Emilede Jean-Jacques Rousseau, édition de La Haye, Néaulme, Paris, Duchesne, 1762.

En-tête du livre second (Tome I, p. 140), avec la légende :

« Chiron exerçant le petit Achille à la course ».

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« Chut ! » Le signe d ’ Harpocrate et l ’ invitation au silence

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Philippe MATTHEY(Université de Genève)

«Les gestes sont le langage commun de tous les hommes»2. Ce postulat de Quintilien, orateur et professeur de rhétorique dans la Rome du

Iersiècle apr. J.-C., a pendant longtemps échappé à toute remise en cause3 avant d’être formellement démenti par l’étude fondatrice de Marcel Mauss publiée en 19364. Le sociologue y démontrait que les gestes et attitudes ne constituent pas un langage universel, mais sont bel et bien le produit de conventions sociales et culturelles5. On prendra pour exemple d’une telle convention un geste largement compris dans la culture occidentale contemporaine comme une incitation à se taire : l’index posé verticalement sur les lèvres, comme pour les clore. Pour reconstruire l’histoire de ce véritable signe selon l’acception linguistique du terme – c’est-à-dire un signifiant reconnu par convention comme renvoyant à un signifié précis, dans ce cas l’invitation au silence –, le présent article se propose de revenir sur l’origine de ce geste en reconstituant son histoire de l’époque moderne jusqu’à l’Antiquité. Il faut préciser que l’index posé sur les lèvres a la particularité, aussi loin que l’on puisse en remonter la piste tant

1. Cette recherche est tirée d’un mémoire de licence soutenu en juin 2002 sous la direction de Philippe Borgeaud, qui mavait offert de travailler sur le très beau sujet du petit dieu Harpocrate. J’ai depuis eu l’occasion d’approfondir le dossier notamment grâce à deux invitations de Véronique Dasen, que je remercie pour son intérêt et pour ses conseils. Je suis également reconnaissant à Annik Wüthrich pour sa relecture attentive et ses remarques, et à Camille Aquillon pour son talent artistique. Enfin, je voudrais offrir cette étude en hom- mage à Philippe Borgeaud qui a toujours été, par sa gentillesse et son érudition, un véritable mentor pour moi.

2. QUINTILIEN,Institution oratoire, XI, 3, 87. Cf. également CICÉRON,De lorateurIII, 59 (222).

3. Cf. p. ex. létude classique de Carl SITTL,Die Gebärden der Griechen und Römer (1890), HildesheimNew York, G. Olms, 1970, p. 212.

4. Marcel MAUSS, « Les techniques du corps », Journal de psychologie normale et pathologique32, 3-4, 1936, pp. 271-293 (repris dansSociologie et anthropologie, Paris, PUF, 1950, pp. 363-386).

5. Keith THOMAS, « Introduction », in :A Cultural History of Gesture(Jan BREMMERet Herman ROODENBURGéd.), IthacaNew York, Cornell University Press, 1992, p. 3.

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chez les auteurs antiques qu’auprès des érudits modernes, de voir son origine attribuée à une divinité égyptienne, plus précisément au dieu enfant Harpocrate, interprété dans le monde classique comme un dieu du silence, gardien des secrets mystiques. Cet Harpocrate est en fait la ver- sion hellénisée du dieu égyptien Her-pa-chered (H. r-p3-h-rd), littéralement

« Horus l’Enfant », autrement dit l’interpretatio graeca du dieu égyptien Horus quand il est pensé et représenté sous son apparence de petit gar- çon6.

Lesignum harpocraticumde la Renaissance à l’époque contemporaine

Signum harpocraticum: tel est le nom attribué à ce geste par les histo- riens de l’art7 à la suite des artistes et savants de la Renaissance et des Lumières qui, impressionnés par le jeune dieu, ont abondamment utilisé son image et contribué au succès de sa réputation de dieu du silence et gardien de toutes sortes de secrets, des plus triviales histoires d’amours aux mystères divins les plus sacrés. L’érudit bénédictin Antoine-Joseph Pernety lui consacre ainsi en 1787 une rubrique dans son Dictionnaire mytho-hermétique:

Harpocrate : figure ou statue d’un homme tenant deux doigts sur sa bouche fermée (…). Cette statue se trouvait dans tous les temples Egyptiens, qui l’appelaient le Dieu du Silence. On le mettait ainsi dans tous les temples pour faire souvenir les Prêtres qu’ils devaient garder le silence sur les secrets cachés sous leurs figures hiéroglyphiques8.

Ces secrets étaient selon Dom Pernety ceux de la « vraie Chymie », autrement dit du « Grand Œuvre ou de la Pierre Philosophale ». Mais Harpocrate connut un grand succès au-delà du cercle des seuls philo- sophes hermétiques : le motif harpocratique du silence fut également uti- lisé par les savants des XVIIIe et XIXe siècles comme symbole de retraite intellectuelle ou de sagacité politique9. C’est ainsi qu’Harpocrate, sur-

6. Cf. à ce propos la récente étude d’Annie FORGEAU,Horus-fils-d’Isis. La jeunesse d’un dieu(Bibliothèque détude 150), Le Caire, IFAO, 2010.

7. Cf. André CHASTEL, « Signum Harpocraticum », in :Studi in onore di Giulio Carlo Argan, Roma, Multigrafica editrice, 1985, vol. I, pp. 147-153.

8. Dom Antoine-Joseph PERNETY,Dictionnaire mytho-hermétique(1787), Paris, Denoël (Bibliotheca Hermetica), 1972,s.v.« Harpocrate », p. 152.

9. Martin MULSOW, « Harpocratism : Gestures of Retreat in Early Modern Germany », Common Knowledge16, 1, 2010, pp. 110-127, ici p. 116. Pour une histoire de ce geste dans

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monté de l’onomatopée «St !» (« chut ! »), est choisi par Hermann von der Hardt pour figurer en frontispice de ses Aenigmata prisci orbis, un traité de 1723 évoquant sous couvert d’énigmes la richesse des connais- sances antiques (fig. 1)10. Le geste du jeune dieu était donc posé en véritable emblème qui signifiait, aux initiés et à ceux qui comme lui sont dépositaires de secrets, qu’il vaut parfois mieux garder le silence de peur de divulguer des savoirs interdits ou de troubler les esprits moins éclairés.

Le geste en question peut à vrai dire prendre plusieurs formes : on a vu qu’il s’agit chez Dom Pernety de deux doigts appliqués sur les lèvres fermées mais le véritablesignum harpocraticumest le plus souvent repré- senté comme le geste de l’index tendu en direction de la bouche. On peut l’observer dans quelques exemples d’illustrations des vertus du silence philosophique tels qu’un des Emblèmes d’André Alciat en 1551 (fig. 2) ou une gravure de Jan Müller en 1593 (fig. 3), tous deux associant expli- citement ce geste à celui d’Harpocrate, dieu du silence11. Dans ces deux représentations comme dans celle de von der Hardt, l’index n’est pas réellement posé sur les lèvres pour les clore, mais tendu en direction de la bouche pour indiquer le silence. Dans un chapitre de laChirologia com- posée par John Bulwer en 1644, le mouvement est légèrement différent et ressemble plus à notre geste occidental contemporain, celui de l’index posé en travers des lèvres (fig. 4)12. Bulwer attribue en réalité à ce signe plusieurs significations, toutes rassemblées sous la rubrique «silentium indico», et fait lui aussi référence à l’origine harpocratique du signe13. Il

le monde académique des débuts de lépoque moderne, cf. également Claudia BENTHIEN, Barockes Schweigen : Rhetorik und Performativität des Sprachlosen im 17. Jahrhundert, München, W. Fink, 2006.

10. Hermann VON DER HARDT, Aenigmata prisci orbis, Schnorr, 1723 (cf. Martin MULSOW, art. cit., pp. 120-122).

11. Références indiquées par André CHASTEL, art. cit., p. 147. André ALCIAT, Les Emblèmes. Fac-simile de l’édition lyonnaise Macé-Bonhomme, 1551, Paris, Klincksieck, 1997, p. 17, emblème intitulé « In silentium », dont la légende précise (2e partie) «Ergo premat labiae : digitoque, silentia signet : Et sese Pharium vertat in Harpocratem» ; gravure de Jan MÜLLER(1593) avec pour légende «Harpocrates philosophus, deus silentii ; Digito compesce labellum. Loqui ignorabit qui tacere nesciet».

12. John BULWER, Chirologia (1644), New York, AMS Press, 1975, p. 189, fig. H.

Relevons que Bulwer mentionne également un autre geste dans la même rubrique «silen- tium indico» : la main recouvrant la bouche.

13. John BULWER,op. cit., pp. 168-169 : «The laying of the fore-finger upon the mouth, is their habit who would expresse their silence, conviction, shame, ignorance, reverence, servile feare, modesty, a revolving meditation, admiration and amazement. (…) This gesture of the Index is likewise important in craving silence. For after this fort was the effigies of Harpocrates, framed among the Aegyptians, as a monument of silence. (…) The Aegyptians Priests, Indians Brachmans, the Persian Magi and the French Druids, and all the old Philosophers and wise men, very politeckly caused to mould and pourtrait their gods with

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ne semble cependant percevoir aucune distinction sémantique entre les différentes positions de l’index (posé sur, ou seulement tendu vers les lèvres), puisqu’il fait également référence pour ce signe à l’emblème d’Alciat mentionné ci-dessus14. Enfin, Andrea de Jorio consacre lui aussi une rubrique aux attitudes indiquant le silence dans son étude de 1832 sur les gestes napolitains et mimiques de l’Antiquité : l’un de ces signes est comme chez Bulwer la « main couvrant la bouche », mais le plus courant est l’« index approché verticalement du milieu de la bouche close » (fig.

5), un geste que de Jorio considère comme universellement répandu et dont il fait également remonter l’ancienneté à Harpocrate. De Jorio précise toutefois que ce signe n’est pas toujours accompli jusqu’au bout et qu’il suffit, pour être compris, que « l’index soit dirigé vers, ou soit proche de la bouche ». Là encore, ces différents gestes ne semblent pour lui présenter aucune différence sémantique15. Il existe de nombreux autres exemples littéraires16et iconographiques17attestant du lien permanent entre le signe du silence et le dieu Harpocrate, mais on se contentera de conclure ce bref

their Fingers upon their lips, to teach men (their adorers) not to be too curious enquirers after their nature(). »

14. Ibid. :«HenceAlciattook his Embleme».

15. AndreaDEJORIO,La mimica degli antichi investigata nel gestire napoletano, Napoli, 1832, p. 293 et pl. XXI, 1 : «Silenzio. 1. Indice verticalmente approssimato nel mezzo della bocca chiusa. Questo gesto è uno de’ pochi così universalmente conosciuti che basta semplicemente indicarlo. () La sua antichità poi è tanto rimota, quanto Arpocrato stesso.

(…)Bisogna però avvertire che anche questo gesto spesso si usa non completo, e basta per farsi intendere che lindice sia diretto, o anche prossimo alla bocca.»

16. P. ex. Cesare RIPA,Iconologia, Padova, 1625 (réédité par Piero BUSCAROLI, Torino, Fògola, 1991),s.v.« Silentio », p. 608 : « (…)selon l’usage des Anciens qui représentaient Harpocrate juvénile avec des ailes (). Enfant avec le doigt à la bouche et les ailes aux épaules de couleur noire (…) car le silence est ami de la nuit, comme le disent les poètes».

Cf. aussi Giovanni Battista BOUDARD, Iconologie (1759), New York, Garland, 1976, vol. III, p. 133,s.v.« Silence » : «Le Silence est un jeune homme qui tient un doigt sur sa bouche, et de lautre main fait un signe de se taire. Son attribut est une branche du pêcher.

Les Anciens consacraient cet arbre à Harpocrate, dieu du silence, parce que sa feuille est de la forme de la langue humaine» (Boudard s’inspire ici d’un passage de Plutarque,Isis et Osiris, chap. 68, où il confond le perséa, larbre dOsiris, avec le pêcher).

17. Cf. John Gwyn GRIFFITHS, Plutarch’s De Iside et Osiride, Cardiff, University of Wales Press, 1970, p. 354, n. 2 pour la mention dune gravure du jeune dieu dans laSummer Room de l’Oxford College au XVIe siècle. Cf. également Philippe MOREL, « Secret, hermétisme et pouvoir dEtat dans lart médicéen de la fin duXVIesiècle », in :Le Secret (Philippe DUJARDINéd.), Lyon, CNRS Centre régional de publication, 1987, pp. 31-62, ici fig. 1, p. 50 pour un Harpocrate dans le Palais Farnèse à Captatola. Cf. enfin, Waldemar DEONNA, « Le silence, gardien du secret » (1repartie : « Lesilenceà lHôtel de Ville de Lausanne »), Zeitschrift für Schweizerische Archäologie und Kunstgeschichte 12, 1951, pp. 28-34 pour une peinture murale à Lausanne datée de 1684, figurant un « Génie ailé » incarnant le Silence, reconnaissable à son index gauche posé sur les lèvres.

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aperçu en résumant que, dans le domaine de l’histoire de l’art, lesignum harpocraticum désigne aussi bien le geste de l’index pointé en direction de la bouche que celui du même doigt posé en travers des lèvres, expri- mant soit le silence qu’on observe soi-même (valeur sémantique passive), soit le silence qu’on invite le spectateur à respecter (valeur sémantique active)18.

Harpocrate et son signe dans la littérature gréco-romaine

Cette petite introduction à propos de l’histoire moderne du signum har- pocraticum montre que le geste est bien compris depuis longtemps et bénéficie d’une large diffusion dans la culture occidentale. Comme on l’a vu, les humanistes et érudits qui en traitent font tous remonter son origine au jeune dieu égyptien et se réfèrent en cela à l’autorité des sources antiques. Le premier auteur classique chez qui on peut lire une mention explicite du signe d’Harpocrate est Varron, au Ier s. av. J.-C.19, suivi peu après par Ovide qui décrit dans sesMétamorphoses un cortège isiaque au sein duquel on peut reconnaître le jeune dieu, présenté comme « le dieu qui réprime la voix et qui du doigt invite au silence » (quique premit uocem digitoque silentia suadet)20. Ovide, dans ce passage se contente de désigner Harpocrate par son geste et sa fonction, vraisemblablement assez connus des lecteurs pour que toute précision supplémentaire soit super- flue. Un poème licencieux de Catulle atteste également de cette familiarité du monde classique avec le thème de l’Harpocrate silencieux :

Gellius avait entendu dire que son oncle ne cessait pas de gronder contre ceux qui parlaient de lamour ou le faisaient. Pour éviter davoir à subir le même sort, il a pétri à fond la propre femme de son oncle et il a transformé son oncle en Harpocrate (patruum reddidit Harpocratem). Il est arrivé à ses fins ; car aujourd’hui, quoiqu’il se donne à sucer à son oncle lui-même, son oncle ne soufflera mot21.

Il semble que l’expression « transformer quelqu’un en Harpocrate » (i.e.

le rendre muet) faisait partie du langage courant et que le public auquel

18. André CHASTEL, art. cit., p. 147.

19. VARRON,La langue latine, V, 57 (trad. de Jean COLLART, Paris, CUF, 1954) : « Les dieux fondamentaux sont le Ciel et la Terre. Ces dieux sont à identifier avec les dieux égyptiens Sérapis et Isis, bien quHarpocrate, avec son doigt, me fasse signe de me taire (etsi Harpocrates digito significat, ut taceam)».

20. OVIDE,Métamorphoses, IX, 692 (trad. de Georges LAFAYE, Paris, CUF, 1995).

21. CATULLE,Poésies, 74 (trad. de Georges LAFAYE, Paris, CUF, 1996).

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s’adresse Catulle est censé comprendre l’allusion22. Une variante de cette expression semble en outre avoir existé dans laquelle Harpocrate prenait le nom de « Sigalion23» (d’après le grecσιγή, « silence »), attestée par une lettre du poète Ausone à son fils Paulinus (IVes. apr. J.-C.)24.

Le geste d’Harpocrate et son interprétation comme invitation au silence était effectivement un thème répandu auprès des lettrés romains et de leur assistance, au moins dès la fin de la République. Mais quels secrets le jeune dieu était-il censé protéger ? Les auteurs classiques sont pour la plupart unanimes à ce sujet, Harpocrate met en garde les hommes contre les dangers de révéler au plus grand nombre la véritable nature des dieux.

Selon Plutarque, il est notamment :

Celui qui surveille et dirige le discours théologique parmi les hommes, discours enfantin, incomplet et confus (λόγου νεαροῦ καὶ ἀτελοῦς καὶ ἀδιαρθρώτου). Voilà pourquoi Harpocrate tient un doigt appliqué sur sa bouche : c’est un symbole de discrétion et de silence (διὸ τῷ στόματι τὸν δάκτυλονἔχει προσκείμενονἐχεμυθίας καὶσιωπῆς σύμβολον)25.

Le jeune dieu rappellerait ici qu’il vaut mieux rester discret et se taire à propos des choses divines plutôt qu’élaborer des discours boiteux et des hypothèses maladroites. Saint Augustin réinterprète au IVe s. apr. J.-C. un passage de Varron et voit quant à lui Harpocrate en gardien du secret de la supercherie païenne26. On retrouve enfin au Ve-VIe s. apr. J.-C. le thème du silence mystique lié à la naissance d’Héraïscos, l’un des derniers philo- sophes néoplatoniciens :

A peine né, il (Héraïscos) parut à la lumière avec, posé sur les lèvres, le doigt qui enjoint le silence (ἐπὶτοῖς χείλεσινἔχων τὸν κατασιγάζοντα δάκτυλον) ; 22. Le poète utilise la même expression dansPoésies, 102, 4 alors quil rassure un ami :

« Tu verras que j’ai été initié à cette loi sacrée (la discrétion), Cornélius ; crois bien que je suis devenu Harpocrate ».

23. Le jeune dieu apparaît beaucoup plus tard sous ce nom comme protagoniste dun ballet dansé à Paris en 1689,Sigalion ou le secret ;cf. « Annexe I : programmes français de Polymestor puis de Sigalion »,Dix-septième siècle238, 1, 2008, pp. 109-117.

24. AUSONE,Œuvres complètes, vol. II,LettresXXV (trad. de Etienne-François CORPET, Paris, C. L. F. Panckoucke, 1843) : « Toi (..), comme si lEgyptien Sigalion avait scellé tes lèvres (tua Sigalion Aegyptus oscula signet), Paulinus, tu t’obstines à te taire ».

25. PLUTARQUE, Isis et Osiris, 68 (=378 B-C ; trad. adaptée de Claude FROIDEFOND, Paris, CUF, 1988).

26. AUGUSTIN,La Cité de Dieu, XVIII, V (trad. de Gustave COMBÈS, Bruges, Desclée de Brouwer, 1960) : « Aussi, dans presque tous les temples où lon adorait Isis et Sérapis, se trouvait une statue qui, le doigt posé sur les lèvres, semblait inviter au silence(erat etiam simulacrum, quod digito labiis inpresso admonere uideretur, ut silentium fieret): ce geste, d’après Varron, interdisait de dire qu’ils avaient été des hommes. »

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c’est ainsi que les légendes égyptiennes racontent la naissance de Horus et, avant celle de Horus, celle du Soleil. Et comme son doigt en se développant s’était soudé aux lèvres, il fallut pratiquer une incision et sa lèvre resta toujours fendue, attestant le signe mystérieux qui avait marqué sa nais- sance27.

Ce récit explique donc comment un bec-de-lièvre peut devenir la marque d’un caractère divin par analogie avec les légendes égyptiennes relatives à la naissance d’Horus, en qui on reconnaît évidemment notre Harpocrate.

Dans un registre peut-être lié, les traités astrologiques de Claude Ptolémée (IIes. apr. J.-C.) et Héphaïstos de Thèbes (début du Ves. apr. J.-C.) men- tionnent qu’une personne née pendant l’intervalle entre les signes zodia- caux du Lion et de la Vierge sera « harpocratique et proche des dieux, et certains mourront sans avoir été mariés »28. Plus loin, au chapitre traitant des « monstres »29, il est en outre indiqué que dans le cas d’une naissance ayant lieu sous une configuration zodiacale bien particulière, liée notam- ment à la position de Jupiter et de Vénus, « le caractère spécifique du monstre sera estimé et honorable, comme c’est habituellement le cas avec les hermaphrodites, les harpocratiques et autres êtres similaires »30. Il est difficile de comprendre exactement ce que l’adjectif « harpocratique » désigne dans ce contexte astrologique31, mais s’il fait référence à une anomalie physique qualifiante pour la naissance d’un monstre – c’est- à-dire d’un signe envoyé par les dieux, comme c’est le cas pour l’herma- phrodisme32 –, il n’est pas impossible qu’aient été appelées « harpocra- tiques » les personnes nées, comme Héraïscos, avec un bec-de-lièvre.

27. DAMASCIUS,Vie d’Isidore, compilé par PHOTIUS DEBYZANCEau IXes. apr. J.-C., Bibliothèque, vol. 4, 242, 107 (trad. de René HENRY, Paris, CUF, 1971).

28. HÉPHAÏSTOS DE THÈBES, Apotelesmatica, I, 1, 99 (éd. David PINGREE, Leipzig, Teubner, 1973) :ἁρποκρατικὸς καὶ ἐγγὺς θεῶν,τινὲς δὲκαὶ ἄγαμοι τελευτῶσιν.

29. Περὶτεράτων, un terme à comprendre dans le sens d’« êtres difformes » mais aussi de « prodiges ».

30. CLAUDEPTOLÉMÉE,Tétrabible, III, 9, 4, 4 ; HÉPHAÏSTOS DETHÈBES,op. cit, II, 9, 30 : τὸτοῦτέρατοςἴδιονὁποῖον περὶτοὺςἑρμαφροδίτους καὶ ἁρποκρατικοὺς καὶτοὺς τοιούτους εἴωθε συμβαίνειν.

31. Dans son commentaire, Pascal Charvet comprend que ce terme désigne des enfants muets. Mais la suite du texte précise justement que les enfants hermaphrodites ou harpocratiques ne sont muets que dans un cas bien précis : « Si l’astre de Mercure est également en configuration avec eux, il leur donnera le pouvoir de rendre des oracles et den tirer du profit. Quand, en revanche, lastre de Mercure est seul, il les fera édentés et muets, mais aussi ingénieux et adroits. » Cf. Pascal CHARVET, Ptolémée. Le livre unique de lastrologie, Paris, NiL éditions, 2000, p. 147.

32. Cf. la naissance d’un hermaphrodite censée avoir eu lieu à la fin du IVes. av. J.-C., racontée au IIe s. apr. J.-C. par PHLÉGON DETRALLES, Livre des merveilles, 2, 118-134.

L’enfant est qualifié de « monstre » (l. 175,τέραςau sens strict), et sa naissance constitue

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Du silence magique au silence monacal : un symbole apotropaïque ?

Quelques sortilèges de consultations oraculaires du corpus des Papyri Magicae Graecaefont appel à la figure d’Harpocrate33, mais le geste lui- même ne fait qu’une seule apparition, fort intrigante, dans le rituel connu sous le nom deMithrasliturgie(PGMIV, 475-820)34. Il s’agit d’un longue formule d’initiation à opérer soi-même– uneOffenbarungszauber – dont l’une des partie est censée permettre au magicien de devenir un dieu et de pouvoir contempler l’ensemble de l’univers. Le déroulement du rituel précise qu’une fois atteint l’état de « transe », au moment où le magicien aperçoit les dieux sous leur forme de planètes, il doit avoir recours au signe harpocratique pour se prémunir de leur colère :

Et tu verras les dieux les yeux fixés sur toi et se précipitant vers toi. Toi, pose donc aussitôt le doigt droit sur la bouche et dis (Σὺδὲεὐθέωςἐπίθες δεξιὸνἐπὶτὸ στόμα καὶλέγε) : « Silence ! Silence ! Silence ! Symbole du dieu vivant, incor- ruptible. Protège-moi, silence, NEICHTHEIRTHANMELOU! » (‘σιγή,σιγή,σιγή, σύμβολον θεοῦζῶντος αφθάρτου· φύλαξον με,σιγήνειχθειρ θανμελου’)35. La suite du rituel indique que si le magicien suit ces instructions, il verra que les dieux ne le regardent plus avec colère et ne se précipitent plus dans sa direction. Manifestement, le motif littéraire du signe d’Har- pocrate était bien connu des prêtres de tradition égyptienne qui ont mis par écrit cette formule dans le courant du IVe s. apr. J.-C. : le sorcier semble en effet devoir s’identifier au jeune dieu lui-même en imitant son geste36afin de gagner ses pouvoirs ou plus simplement pour tromper les

donc un « prodige » (τέραςau sens large) qui nécessite l’intervention de devins spécialisés (τερατόσκοποι) pour interpréter le présage. PLINE LANCIEN, Histoire naturelle VII, 34, raconte en revanche quà son époque les hermaphrodites ne sont plus considérés comme des prodiges, mais comme des instruments de plaisir. Cf. Luc BRISSON, Le sexe incertain : androgynie et hermaphrodisme dans lAntiquité gréco-romaine(1997), Paris, Les Belles Lettres, 2008, pp. 13-39.

33. Cf.PGMIII, 633-731 (dessin protecteur dHarpocrate),PGMIV, 930-1114 (invoca- tion d’Harpocrate) etPGMIV, 1073-1080 (confection d’un phylactère à l’aide d’un tissu pris sur une statue dHarpocrate).

34. Cf. Hans Dieter BETZ,The « Mithras Liturgy » : Text, Translation, and Commentary, Tübingen, Mohr Siebeck, 2003.

35. PGMIV, 556-561, cf. Papyri Graecae Magicae. Die Griechischen Zauberpapyri (Karl PREISENDANZAlbert HENRICHéd.), Stuttgart, Teubner, 1973, vol. I, pp. 92-93.

36. Cf. Rheinold MERKELBACH,Isis Regina - Zeus Sarapis : die griechisch-ägyptische Religion nach den Quellen dargestellt, Stuttgart, B.G. Teubner, 1995, p. 179, § 344 ;

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dieux et se faire passer pour un des leurs37. Dans son analyse du rituel, Hans Dieter Betz propose une explication légèrement différente selon laquelle le geste peut aussi suggérer l’adoption38. On reviendra ci-dessous sur le bien-fondé de cette dernière interprétation, mais il semble en tout cas que la prière qui accompagne le signe ne laisse aucun doute : le geste utilisé dans ce contexte est bien celui de l’invitation au silence, ou peut- être de l’invocation du Silence hypostasié sous sa forme d’Harpocrate, et paraît être porteur d’un pouvoir apotropaïque censé protéger le bénéfi- ciaire de divinités potentiellement dangereuses.

Pour mieux comprendre cette notion de symbole apotropaïque, il faut considérer, en suivant une étude d’André Grabar39, le cas de la réutilisa- tion du signe d’Harpocrate dans quelques traditions chrétiennes. Une fresque du monastère copte de Baouît représente ainsi trois moines qui posent horizontalement le doigt en travers de leur bouche en une variante du signe harpocratique (fig. 6)40. Dans la ligne directe de la tradition égyptienne pharaonique41, l’observation du silence revêtait en effet une importance particulière pour les Pères du désert, qui s’efforçaient de fuir toute interaction basée sur la parole42. Mais au premier signe des moines de la fresque de Baouît s’en ajoute un deuxième : leur main droite levée en un signe de prière. On retrouve le même double geste dans certaines représentations chrétiennes, comme par exemple une fresque des douze Apôtres dans l’église Sant Miquel à Terrassa, en Catalogne (IXe-Xes. apr.

Reinhold MERKELBACH Maria TOTTI, Abrasax : ausgewählte Papyri religiösen und magischen Inhalts. Bd. 3 : Zwei griechisch-ägyptische Weihezeremonien, Opladen, Westdeutscher Verl., 1992, p. 165 et pp. 238-239.

37. Effectivement, le magicien doit ensuite dire (l. 574-575) : « Silence ! Silence ! (…) Je suis une étoile qui erre avec vous. »

38. Hans Dieter BETZ,The « Mithras Liturgy », 2003, p. 147.

39. André GRABAR, « Une fresque visigothique et liconographie du silence »,Cahiers archéologiques. Fin de l’Antiquité et Moyen AgeI, 1945, pp. 124-128 ; cf. André CHASTEL,

« Signum harpocraticum », p. 149.

40. Monastère de Baouît, chapelle XXVIII, paroi ouest ; Jean CLÉDAT,Le monastère et la nécropole de Baouît(MIFAO XII), Le Caire, IFAO, 1906, p. 158 et pl. CIII : « les moines portent la main gauche devant leur bouche, dans le signe du silence ».

41. Cf. Emma BRUNNER-TRAUT, « Weiterleben der ägyptischen Lebenslehren in den Koptischen Apophthegmata am Beispiel des Schweigens » in :Studien zu altägyptischen Lebenslehren (Erik HORNUNG Othmar KEEL éd.), Freiburg, Universitätsverlag (Orbis Biblicus et Orientalis 28), 1979, pp. 173-216.

42. Cf.Apophtegmes des pères du désert, IV, 30 : « Abba Macaire le Grand disait aux frères à Scété lorsqu’il congédiait l’assemblée :“Fuyez, frères.”Et l’un des pères lui dit :

Où avons-nous à fuir au-delà de ce désert ?Il posait son doigt en direction de sa bouche en disant (Καὶ ἐτίθει τὸν δάκτυλον αὐτοῦεἰς τὸστόμα λέγων) :“Fuyez cela”; puis il entrait dans sa propre cellule, fermait la porte et sasseyait » (trad. Jean-Claude GUY,Apophtegmes des pères du désert, Paris, Cerf [Sources Chrétiennes], 1993).

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J.-C.)43, ainsi que dans de nombreux psautiers archaïques grecs et latins, chaque fois pour indiquer que les personnages en question récitent des psaumes44. De fait, les inscriptions qui accompagnent la fresque de Baouît permettent bel et bien d’identifier les moines comme des lecteurs de psaumes (ψάλτης). Mais pourquoi donc attribuer un signe du silence à des personnages qui sont censés chanter des prières à haute voix ? Un élément de solution nous est donné par la lecture de quelques commentaires à propos d’une secte d’hérétiques appelés par dérision Passalorynchitae, dont les membres avaient la particularité d’être tellement obsédés par le silence qu’ils avaient presque toujours le doigt posé sur les lèvres jusqu’à en être enfoncé dans leurs narines45. Philastre, évêque de Brescia (fin du IVe s. apr. J.-C.) consacre un chapitre de son traité sur les hérésies à ces étranges fanatiques :

D’autres sont appelés Passalorinchites, qui, mettant le doigt dans leurs narines et sur leur bouche et lèvres, observent pour ainsi dire en permanence le silence(qui digitum imponentes in nares et ora sua et labia quasi silentium semper exercent), n’appliquant en quelque sorte leur zèle à rien d’autre qu’au mutisme. Et ils désirent en cela imiter la condition des saints prophètes, parce que saint David a dit : « Ô Seigneur, mets une garde sur ma bouche et veille sur la porte de mes lèvres ! (pone, domine, custodiam ori meo, et ostium circumstantiae labiis meis)»46

La citation du psaume attribuée à David permet de comprendre que le geste en question n’était pas toujours utilisé par les Passalorynchites, et vraisemblablement par d’autre chrétiens, comme un signe de silence absolu, mais fonctionnait aussi – surtout dans les contextes de récitation

43. Cf. une belle photographie d’un détail de cette fresque par Jésus Cano Sánchez, http://www.flickr.com/photos/cinglesdeberti/4400760577/ (consulté le 30 novembre 2010).

44. André GRABAR, art. cit., fig. 1 et p. 126.

45. AUGUSTIN,Sur les hérésies, I, 63 : « Les Passalorynchites se préoccupent tellement du silence, que, pour ne pas le rompre, quand ils jugent à propos de le garder, ils placent le doigt dans leurs narines et sur leurs lèvres(Passalorynchitae in tantum silentio student ut naribus et labiis suis digitum apponant, ne uel ipsam taciturnitatem uoce praecipiant, quando tacendum sibi esse arbitrantur), ce d’après quoi leur nom est établi ; en grec le mot πάτταλοςveut direpieu, etῥύγχοςnez. Mais pourquoi ces gens ont-ils remplacé le mot doigt par le mot pieu, dont leur nom est composé ? Je n’en sais rien. Le mot doigt se traduisant en grec par δάκτυλος, ils auraient pu, avec plus dà propos, sappeler Dactylorynchites » (Aurelii Augustini Opera, pars XIII, 2 [Corpus Christianorum, Series Latina XLVI], Turnhout, Brepols, 1969).

46. PHILASTRE,Diversarum hereseon, 48 (Friedrich MARXéd.,Sancti Filastrii Episcopi Brixiensis [Corpus Scriptorum Ecclesiasticorum Latinorum 38], Prague Vienne, F.

TempskyG. Freytag, 1898). La citation attribuée à David est un extrait duPsaume140, verset 3 (141, 3 selon la numérotation moderne).

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de psaumes– comme signe d’euphémisme destiné à prévenir toute parole impure, voire comme symbole apotropaïque ayant pour fonction de proté- ger la bouche contre toute intrusion du démon. C’est ce qui ressort d’un commentaire de saint Jérôme sur le même psaume :

« Ô Seigneur, mets une garde sur ma bouche » (…) Le prophète demande donc que tous parlent de choses qui ne soient pas frivoles, mais saintes et dignes de Dieu. « Et veille sur la porte de mes lèvres ». Il demande qu’une porte soit placée à nos lèvres, pour ainsi dire un mur qui fasse le tour de toute la demeure, afin de nêtre vaincu en rien(ostium circumstantiae quasi murum in circuitu totius domus postulat, ut in nullo uincatur). Jérémie dit en effet :

« la mort est entrée par vos fenêtres ». Or nous avons cinq fenêtres : il s’agit de la vue, de l’ouïe, du goût, de l’odorat et du toucher. (…) Le prophète prie donc pour une porte à nos lèvres, c’est-à-dire pour que toute notre demeure soit défendue, afin que l’adversaire n’ait nulle part par où entrer et dominer les hommes(ergo hoc deprecatur propheta, ostium circumstantiae, hoc est, ut muniatur tota eius domus, ut non habeat aduersarius unde ingrediatur et dominetur hominibus)47.

Si la meilleure méthode pour se prémunir du démon est de ne pas desserrer les dents pendant la récitation de la prière silencieuse48, le doigt posé sur les lèvres semble avoir été perçu comme une autre solution efficace quand il était nécessaire de psalmodier à haute voix. Une véritable mythologie s’était en tout cas développée chez les premiers chrétiens autour du danger posé par l’ouverture de la bouche, perçue comme une possible brèche dans l’enceinte du corps par laquelle des démons pour- raient tenter de s’infiltrer49. D’où–c’est l’hypothèse–un signe du silence

47. JÉRÔME,Tractatus de psalmo CXL, 3 (S. Hieronymi Presbyteri Opera, pars II, Opera homiletica [Corpus Christianorum, Series Latina LXXVIII], D. Germain MORIN éd., Turnhout, Brepols, 1958).

48. Cf. JEANCASSIEN,Conférences, IX, 35 : « Nous prions la bouche close, lorsque nous supplions sans ouvrir les lèvres et dans un parfait silence. Nous prions en secret () si bien que les puissances adverses elles-mêmes nen puissent deviner la nature. » (trad. adaptée d’Eugène PICHERY,Jean Cassien, Conférences VIII-XVII[Sources chrétiennes 54], Paris, Cerf, 1958).

49. Cf.Apopthegmes des pères du désert, IV, 65 : « Un frère, excité à la colère contre quelquun, se leva pour prier, demandant dêtre patient envers le frère et que la tentation passe sans lui nuire. Aussitôt il vit une fumée qui sortait de sa bouche, et alors sa colère s’apaisa » (trad. Jean-Claude GUY,op. cit., IV, 30, Paris, Cerf [Sources Chrétiennes], 1993, IV, 65).

Ailleurs, un moine tenté par un démon accepte de renier Dieu et son baptême pour forniquer avec la fille d’un prêtre égyptien (Apophtegmes, V, 43, 12-13) : « (Il) acquiesça et vit aussitôt comme une colombe qui sortait de sa bouche et senvolait en lair » (trad. Jean- Claude GUY,op. cit., Paris, Cerf [Sources Chrétiennes], 1993).

Un autre moine assiste à une tentative de possession de deux jeunes disciples par des démons (Apophtegmes, XX, 3) : « Et je vis les démons venir comme des mouches sur le

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compris au IVe s. apr. J.-C. comme un geste à valeur magique, un sceau à appliquer sur les lèvres pour clore la bouche et repousser les mauvais esprits.

Adoption, alimentation et immortalité

On a dit que Betz voyait dans le signe d’Harpocrate de la Mithrasliturgie un geste qui indique l’adoption du sorcier par les dieux.

Or un argument en faveur de cette interprétation se retrouve dans un passage du traité sur Isis et Osiris de Plutarque. Il s’agit de l’épisode

« giblite » qui voit Isis arriver à Byblos alors qu’elle est à la recherche du corps d’Osiris. Dans ce récit, très influencé par le grandHymne homérique à Déméter– où la déesse est engagée à Eleusis comme nourrice du petit Démophon, fils du roi Célée et de la reine Métaneira50–Isis est accueillie à Byblos, où elle devient la nourrice du prince, le fils du roi Melkandre et de la reine Astarté :

Isis nourrissait lenfant en lui donnant, au lieu du sein, son doigt à téter (Τρέφειν δὲτὴνἺσινἀντὶμαστοῦ τὸν δάκτουλον εἰς τὸ στόμα τοῦ παιδίου διδοῦσαν). La nuit, elle plongeait dans le feu les parties de son corps promises à la mort51.

Le texte grec ne permet à vrai dire pas de déterminer le sens exact de ce passage : Isis met-elle le doigt du nourrisson dans sa bouche pour le nourrir–auquel cas on pourrait voir dans ce passage une référence expli- cite au geste harpocratique52 – ou lui donne-t-elle son doigt à elle ?53 Quoi qu’il en soit, la scène a la plupart du temps été expliquée comme l’écho d’un rite d’adoption par succion du doigt dont on connaît des exemples dans certaines traditions nord-africaines54. Mais cet épisode doit

cadet, les uns sur sa bouche, les autres sur ses yeux » (trad. Jean-Claude GUY,op. cit., Paris, Cerf [Sources Chrétiennes], 2005).

50. Hymne homérique à Déméter, 225-255 ; cf. Siegfried HERRMANN, « Isis in Byblos », Zeitschrift für ägyptische Sprache und Altertumskunde82, 1958, pp. 48-55.

51. PLUTARQUE,Isis et Osiris, 16 (357 C) ; trad. et commentaire de Claude FROIDEFOND, Paris, CUF, 1988.

52. Cest lavis de Paul PERDRIZET,Les terres cuites grecques dEgypte de la collection Fouquet, Nancy-Paris-Strasbourg, Berger-Levrault, 1921, p. 27.

53. Cf. Karl GROSS, « Finger », Reallexikon der Antike und Christentum7, 1968, col.

926.54. D’après un parallèle relevé en Abyssinie par Mansfield PARKYNS,Life in Abyssinia : Three YearsResidence and Travels in that Country, London, John Murray, 1853, p. 198 :

«If a man wishes to be adopted as the son of one of superior station or influence, he takes

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également être compris comme une variation à partir de l’iconographie égyptienne de la déesse en train de donner le sein à un jeune dieu, voire au pharaon, pour signifier son intégration dans le monde des dieux. Il s’agit d’un thème classique qui connaîtra un très grand succès à l’époque gréco-romaine avec les représentations d’Isis lactans tenant le petit Har- pocrate sur ses genoux55. Cette iconographie isiaque a été ici adaptée au contexte « éleusinien » du récit de Plutarque et transformée en un élément du rituel effectué par Isis pour rendre le jeune prince immortel, en écho à l’Hymne homérique à Déméter. Selon la logique des hymnes homériques, un dieu doit en effet se garder d’absorber toute forme de nourriture humaine s’il veut accéder à un statut divin. Il en va ainsi du jeune Hermès qui résiste à la tentation de manger les viandes grillées offertes aux Olym- piens dans sa grotte du Cyllène56. Déméter procède d’une manière similaire puisque son hymne précise qu’elle ne donne pas le sein – ni aucune autre nourriture– au jeune Démophon, mais frotte son corps avec de l’ambroisie et l’enterre pendant la nuit dans les flammes du foyer57. Le geste du doigt porté à la bouche de l’enfant, dans ce contexte, semble donc être lié à la fois à son adoption par les dieux et à son immortalisa- tion, deux processus qui mènent d’ailleurs au même résultat.

Un parallèle intéressant au geste d’Harpocrate comme signe d’immorta- lité se retrouve notamment dans une légende juive selon laquelle Dieu envoya l’archange Gabriel prendre soin du petit Abraham, né dans une caverne sous le règne de Nemrod : pour le nourrir, Gabriel lui aurait donné son petit doigt droit pour que le bébé en tète du lait58. D’après Erwin Goodenough, la signification originelle du geste harpocratique se serait développée à partir d’un thème similaire, d’origine juive ou égyp- tienne. Porter à la bouche son propre doigt démontrerait, selon cette inter- prétation, l’autosuffisance du jeune dieu et Goodenough voit dans la

his hand, and sucking one of his fingers declares himself to be his“child of adoption”». Cf.

Gaston MASPÉRO, « Notes au jour le jour.V », Proceedings of the Society of Biblical Archaeology 14, 1892, pp. 311-312 ; ID., Histoire ancienne des peuples de lOrient classique, Paris, Hachette, 1897, vol. II, 487-488 et p. 571 ; Alfred WIEDEMANN, « Die Milchverwandschaft im alten Ägypten », Am Ur-quell. Monatsschrift für Volkskunde 3, 1892, pp. 259 sq. (non uidi).

55. Cf. Vincent TRAN TAMTINH, Isis lactans : Corpus des monuments gréco-romains d’Isis allaitant Harpocrate, Leiden, E.J. Brill, 1973 ; Lucia LANGENER,Isis lactans, Maria lactans : Untersuchungen zur koptischen Ikonographie, Altenberge, Oros Verlag, 1996.

56. Hymne homérique à Hermès, 130-136.

57. Hymne homérique à Déméter, 235-240.

58. Erwin R. GOODENOUGH,Jewish Symbols in the Graeco-Roman Period, New York, Pantheon Books, 1953, vol. II, p. 272 ; d’après Adolph JELLINEK, Bet ha-midrash (Sammlung kleiner midraschim und vermischter abhandlungen aus der ältern jüdischen literatur), Yerushalayim, BambergerVahrman, 1938, vol. I, pp. 25-34 (non uidi).

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double signification du doigt porté à la bouche – signe de silence et d’autosuffisance – une des raisons du succès de l’image d’Harpocrate pendant l’époque gréco-romaine auprès des Juifs, qui l’auraient assimilé à leur dieu Iao, le « dieu ultime né de lui-même, nourri par lui-même, la lumière primordiale et le silence final, mystique »59. Notons enfin qu’on retrouve encore un motif similaire dans l’un des Apophtegmes des Pères du désert racontant la sauvegarde miraculeuse d’un moine perdu dans le désert alors qu’il avait décidé de l’explorer pour voir s’il « trouverait quelqu’un servant le Christ » ; alors qu’il se meure de faim et perd connaissance, voici qu’un homme mystérieux (un ange ?) lui apparaît et le sauve par deux fois en apposant son doigt sur ses lèvres60.

La question de cette interprétation particulière du geste d’Harpocrate reste ouverte, mais on rappellera que, parmi les terres cuite fabriquées à l’image du jeune dieu, l’un des types iconographiques qui connut le plus de succès est celui de l’« Harpocrate au pot »61, un genre de figurine du jeune dieu tenant un récipient et portant parfois la main à la bouche comme pour absorber un aliment. Il s’agit d’un type de représentation très probablement lié à la fonction d’approvisionnement en nourriture exercée en Egypte par les divinités enfantines et notamment par Her-pa-chered62, ce qui conduira d’ailleurs ce dieu à parfois recevoir en grec le nom de Karpocrate, le « Maître des céréales »63. La convergence de ces différentes

59. Erwin R. GOODENOUGH,op. cit., p. 272.

60. « Alors vint quelqu’un qui de son doigt me toucha les lèvres à la manière d’un médecin qui, avec un instrument tranchant, effleure les yeux (Ἐλθὼν δέτις τῷδακτύλῳ αὐτοῦ ἥψατο τῶν χειλέων μου καθάπερ ἰατρὸς τῇ μήλῃ τῶν όφθαλμῶν παρατρέχων).

Aussitôt, je fus rempli de force au point de croire que je n’avais ni marché ni eu faim. (…) Quatre jours passèrent et je perdis force à nouveau. Alors je tendis les mains vers le ciel, et voici que l’homme qui une première fois m’avait fortifié, à nouveau m’oignit les lèvres de son doigt et me raffermit (καὶ ἰδοὺ ὁ ἀνὴρπρότερονἐνδυναμώσας με πάλιν τῷδακτύλῳ αὐτοῦ χρίσας τὰχείλη μουἐστερέωσέ με) » (trad. Jean-Claude GUY,op. cit., Paris, Cerf [Sources Chrétiennes], 2005, XX, 16).

61. Cf. Michel MALAISE, « Harpocrate au pot », in :Religion und Philosophie im alten Ägypten : Festgabe für Philippe Derchain zu seinem 65. Geburtstag am 24. Juli 1991 (Ursula VERHOEVEN et Erhart GRAEFE éd.), Leuven, Peeters (Orientalia Lovanensia Analecta 39), 1991, pp. 219-232 ; Michel MALAISE, « Questions d’iconographie harpocra- tique », in :Hommages à Jean Leclant(Catherine BERGER, Gisèle CLERC, Nicolas GRIMAL

éd.), Le Caire, IFAO (Bibliothèque d’Etude 106/3), 1993, pp. 373-383.

62. Dagmar BUDDE, « Harpare-pa-chered. Ein ägyptisches Götterkind im Theben der Spätzeit und griechisch-römischen Epoche », in :Kindgötter im Ägypten der griechisch- römischen Zeit : Zeugnisse aus Stadt und Tempel als Spiegel des interkulturellen Kontakts (Dagmar BUDDE, Sandra SANDRI, Ursula VERHOEVENéd.), Leuven, Peeters, 2003, p. 56, n.

164.

63. Cf. Philippe MATTHEY, « Retour sur lhymne arétalogique de Karpocrate à Chalcis »,Archiv für Religionsgeschichte9, 2007, pp. 191-222, ici pp. 201-206.

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pistes tend en tout cas à montrer que le signe harpocratique pouvait aussi avoir–à la jonction des univers égyptien, juif, gréco-romain et chrétien– un sens lié à l’adoption, à l’alimentation et à l’immortalité plutôt qu’au silence.

Du geste de l’enfance au signe du silence

Le sens donné au signe du jeune dieu Harpocrate dans le monde clas- sique représente à vrai dire une forme particulière d’« iconatrophie »64, autrement dit de confusion dans l’interprétation d’une image née d’un manque de connaissances iconographiques entre deux cultures. Les égyp- tologues se rendirent d’ailleurs très tôt compte qu’il y avait eu malentendu entre la perception des auteurs classiques et la réalité égyptienne, comme le faisait déjà remarquer Sir J. Gardner Wilkinson en 184165. De fait, ni Her-pa-chered ni Harpocrate ne sont conçus dans les pratiques cultuelles de l’Egypte pharaonique et gréco-romaine comme exerçant un rôle lié au silence ; les seules fonctions qui leur soient connues dans les sources épigraphiques et papyrologiques sont celles de dieu incarnant la succes- sion royale, symbolisant le renouveau solaire ou responsable de la germi- nation de la nouvelle récolte, ou encore de dieu sauveur et guérisseur, notamment dans les représentations des stèles dites d’« Horus sur les cro- codiles »66. La conception de dieu du silence est attribuée à Harpocrate

64. Catherine M. KEESLING, « Misunderstood Gestures : Iconatrophy and the Reception of Greek Sculpture in the Roman Imperial Period »,Classical Antiquity24, 1, 2005, pp. 41- 79.

65. J. Gardner WILKINSON, The Manners and Customs of the Ancient Egyptians, London, 1878 (1854), vol. II, pp. 109-110 (version abrégée :A Popular Account of the Ancient Egyptians, New York, Bracken Books, 1988, vol. II, pp. 182-183) : «The Egyptian mode of indicating silence is evidently shown, from these scenes [l’auteur parle ici des scènes de chasse aux oiseaux, cf.infra],to have been by placingthe hand on their mouth, (as in Job xxix. 9), not as generally supposed, by approaching the forefinger to the lips ; and the Greeks erroneously concluded that the youthful Harpocrates was the deity of silence, from his appearing in this attitude ; which, however humiliating to the character of a deity, was only illustrative of his extreme youth, and of a habit common to children in every country, whether of ancient or modern time.»

66. Sur Her-pa-chered et Harpocrate en général, cf. l’étude très complète de Sandra SANDRI, Har-Pa-Chered (Harpokrates) : die Genese eines ägyptischen Götterkindes, Leuven, Peeters, 2006 ; cf. également Dimitri MEEKS,Lexikon der Ägyptologie, Wiesbaden, Harrassowitz, 1977, vol. II,s.v.« Harpokrates », col. 1003-1011 ; Michel MALAISE, « Har- pocrate. Problèmes posés par létude dun dieu égyptien à lépoque gréco-romaine », Bulletin de la Classe des Lettres et des Sciences Morales et Politiques. Académie Royale de Belgique7-12, 2000, pp. 401-431 ; Annie FORGEAU, « Horus enfant, quel nom, quel champ d’action ? »,Bulletin de la Société Française d’Egyptologie153, 2002, pp. 6-23.

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uniquement dans la littérature classique à partir de Varron, et trouve bien son origine dans une confusion liée à un attribut caractéristique de l’ico- nographie du dieu67.

Selon les conventions adoptées dans l’art figuratif égyptien, un enfant est en effet le plus souvent représenté nu, le crâne rasé à l’exception de la tresse de l’enfance (une mèche de cheveux retombant sur la tempe) et portant son doigt à la bouche68. Le hiéroglyphe représentant un enfant assis, la main à la bouche (Gardiner A 17), est d’ailleurs employé comme déterminatif dans de nombreux mots liés à l’enfance, tels que nmh.w (« orphelin ») ou rnpj (« être jeune »)69. Dès les premières attestations où le dieu Horus est décrit comme un jeune enfant sous son identité d’Har- siésis « Horus fils d’Isis » – à la fin du chapitre 378 desTextes des Pyra- mides(environ 2300 av. J.-C.)–il est dit être « Horus le jeune enfant, son doigt est dans sa bouche (H. r h- rd nh˘n, d-bc=f m r3=f) »70. La divinité connue sous le nom deHer-pa-cheredproprement dit (« Horus l’Enfant ») n’apparaît quant à elle qu’aux alentours du XIes. av. J.-C. ; à cette époque, Her-pa-chered revêt une identité qui lui est propre et devient le dieu- enfant dont les principales fonctions sont celles qu’on a mentionnées plus haut et dont l’attribut caractéristique est le doigt tendu vers ou posé dans la bouche. C’est donc ce geste, à l’origine simple détail permettant d’ajou- ter de l’authenticité aux images de petits enfants, que les auteurs clas- siques ont identifié par un glissement sémantique comme l’indication d’un silence à respecter. Il faut toutefois relever que cette confusion entre signe de l’enfance et signe du silence n’est pas dénuée de logique d’un point de vue romain, puisque en latin l’enfant71 est par définition « celui qui ne parle pas ».

67. Pour la très riche iconographie dHarpocrate, cf. Lexicon Iconographicum Mythologiae Classicae (Vincent TRAN TAM TINH, Bertrand JAEGER, Serge POULIN éd.), Zürich, Artemis-Verlag, 1988, vol. IV, 1,s.v.« Harpokrates », pp. 415-445, ainsi que Dimitri MEEKS, « Harpocrates », dans l’Iconography of Deities and Demons in the Ancient Near East(en préparation, prépublication disponible sur le site de lUniversité de Zürich).

68. Cf. Erika FEUCHT,Das Kind im alten Ägypten : die Stellung des Kindes in Familie und Gesellschaft nach altägyptischen Texten und Darstellungen, Frankfurt, Campus Verlag, 1995, pp. 497-500.

69. Wörterbuch der ägyptischen Sprache (Adolf ERMAN Hermann GRAPOW éd.), Berlin, Akademie Verlag, 1971, vol. II, pp. 268-269 et pp. 432-433.

70. Textes des Pyramides663c-664a (chapitre 378) ; cf. Kurt SETHE,Die Altaegyptischen Pyramidentexte, Leipzig, J. C. Hinrichssche, 1908, pp. 364-365.

71. Infans, defor,fari,fatus, « parler, dire ».

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