R EVUE DE STATISTIQUE APPLIQUÉE
R AMBACH
Place du contrôle statistique dans l’industrie
Revue de statistique appliquée, tome 1, n
o1 (1953), p. 27-29
<
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27
PLACE DU CONTROLE STATISTIQUE DANS L’INDUSTRIE
par
M. RAMBACH
Ancien Elève de rEcale Polytechnique, Ingénieur aux ~a6/~semen~ Hutchinson.
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de fense111ble desquestio1ls d’organisation.
Il aefiectlll,
en 1951, un arabe d’eetrcdes de fi mois auxE/ats-C"nis,
au coursduquel
il a étéfraPPé par
l’extension des
applications
du contrôlestatz’stigue
dans l’industrie all1éricaine.Il il
(i
l’ITnizaersitfe deJlichil!.a1t,
lin cours defornzation
au contrôle sta-listiyrre.
I)ès son retour, il s’est attaché ill’application
de ces méthodes dans SOI1entreprise:
-, on trutsz~era dans lesPat,,es
Slti’(’llll/es Ii"exemple frappant
desrésultats obtenus.
Les études
qui
ont abouti enAmérique
à l’établissement du « StatisticalQuality
Control »ont été
entreprises
très peuaprès
la fin de lapremière
guerre mondiale. Ce n’estcependant qu’à
. l’occasion de la seconde guerre
qu’elles
ont commencé à serépandre largement
dans l’industrieavec
l’appui
du Gouvernement. Ce n’estqu’après
celle-ciqu’a
été vue l’immense étendue duchamp
de ses
applications.
L’idée
d’appliquer
les méthodesstatistiques
à diversproblèmes
industriels n’est pas neuve et l’onpourrait
citer desexemples
bien antérieurs aux études de M.Shewart,
leprotagoniste
du con-trôle
statistique.
Mais il faut éviter,
lorsque
l’on cherche à définir le contrôlestatistique,
d’accorderplus
d’im-portance
àl’adjectif qu’au
substantif et concevoir clairement que ContrôleStatistique
dequalité signifie
non pasapplication
des méthodesstatistiques
àn’importe quel aspect
de l’activitéindustrielle,
mais bien utilisation des lois de la
statistique
dans le Contrôle de laQualité
dans l’industrie.Il est naturel que les connaissances en science
statistique
duspécialiste
de contrôle statis-tique
d’uneentreprise
soient occasionnellement utilisées par celle-ci pour l’étude de tel ou telproblème statistique
distinct du contrôlestatistique.
Nous croyons utile de marquer néanmoins la limitequi sépare
de telles études du contrôlestatistique.
Ayant
nettementposé
que le but des méthodes du contrôlestatistique
dequalité
est essentielle- ment d’améliorer les méthodes de contrôle dequalité
parl’emploi
desrègles
de lastatistique,
nous allonsdistinguer
dans le contrôle dequalité
deuxgrands
groupes de fonctions :a)
Le contrôle deproduits
terminés,qu’il s’agisse
d’un service deréception qui
contrôle laqualité
des livraisons des fournisseurs ou d’un service deproduits
finisqui
contrôle laqualité
de sesproduits
avant de les livrer à Ici clientèle ;b)
Le contrôle desproduits
en cours de fabrication aux divers stades de celle-ci.Les méthodes
statistiques
de leur côté, si variéesqu’elles
soient,peuvent,
elles aussi, se subdi-viser en deux
grandes catégories :
a)
Les méthodess’appliquant
au contrôle sur attribut, c’est-à-direcomptant
des nombres de défauts dans un groupe depièces
échantillons, les lots depièces
étant considérés comme bons oumauvais selon le nombre de défauts ou de
pièces défectueuses ;
(I)
« Le Contrôle de la fabrication des courroiestrapèzoïdales »
page28
b)
Les méthodess’appliquant
au contrôle degrandeurs
mesurablesqui
estiment la valeur d’un ensemble depièces
à l’aide d’un calcul effectué sur les valeurs trouvées en mesurant un certain nombre depièces
constituant l’échantillon.Le contrôle sur attribut
part
de l’idée que, pour avoir un nombre de chances déterminéd’accepter
ou de refuser un lot d’unequalité déterminée,
cequi
est presquetoujours
le but del’opéra-
tion de
contrôle,
le nombre depièces
àprélever
et lesrègles d’acceptation
varienténormément,
selonl’importance
du lot soumis.Des tables
numériques
ont été calculées etéditées, qui indiquent
auréceptionnaire,
en fonctiondu nombre de
pièces
se trouvant dans le lot à contrôler et de laqualité
souhaitée pour leproduit, quel
est le nombre depièces qu’il
devra examiner et àpartir
de combien depièces
mauvaises ou dedéfauts trouvés dans ces
échantillonnages
il devra refuser le lot ou le faireinspecter
à 100%.
Ces
règles
sont utilisées non seulement à l’intérieur desentreprises,
ou entre firmesprivées,
mais aussi et surtout dans les contrats avec le Gouvernement et l’Armée.
Le contrôle des
grandeurs
mesurables a pour base le fait que la mesure d’unepièce,
mêmerenouvelée
fréquemment,
donne une mauvaise idée de la valeur del’ensemble,
du fait que toutes lespièces produites
au même moment ne sont pasrigoureusement identiques
entreelles,
que leurs mesuresprésentent
une certainedispersion
et que le résultat d’une seule mesurepeut
aussi bien se trouverêtre celui de la
plus petite
ou de laplus grande pièce
dulot,
que celui d’unepièce
moyenne.Le contrôle
statistique
examinera un ensemble dequelques pièces
etprendra
enconsidération,
non pas la valeur de
chacune,
mais la moyenne de cesvaleurs,
d’unepart,
et l’intervallequi sépare
la
plus grande
de laplus petite,
d’autrepart.
On aura ainsi une idée assez
précise,
et de la valeur moyenne, et de ladispersion
de l’ensembledes
pièces,
pour savoir ce que vaut ce que l’onproduit,
pour être alerté à coup sûr dès que l’un deces éléments varie et pour être alors orienté dans la recherche de la cause. Si la
dispersion
variesans que la moyenne varie, il
s’agira
engénéral
d’un vice defonctionnement,
alors que si la moyennevarie sans
changement
de ladispersion,
ils’agira plutôt
d’undéréglage.
Il se trouve dans la
pratique
que le contrôle sur attributss’applique
leplus
souvent aupremier
des deuxtypes
de contrôle que nous avonsdécrits,
lesproduits
finisétant,
engénéral,
en définitivebons ou mauvais, tandis que la méthode de contrôle sur
grandeur
mesurables’applique
leplus
sou-vent en cours de fabrication. Il faut bien noter toutefois que cette distinction n’a rien d’absolu et
qu’on
trouve l’occasion
parfois d’appliquer
le contrôle sur attribut en cours de fabrication et le contrôlesur
grandeur
mesurable au stade de l’article terminé.Mais le
point
commun entre toutes cestechniques,
et c’est là à notre sens l’essentiel del’affaire,
c’est que si toutes ces méthodes ont été fondées sur l’étude d’une science
difficile,
elles ont été ensuitecodifiées en
règles
extrêmementsimples
àappliquer.
De même
qu’il
est heureusementpossible
de faire des additions ou desmultiplications
sansconnaître par le détail la démonstration des théorèmes
d’arithmétique qui justifient
lesrègles
de cesopérations,
de même il a été établi des tableaux de coefficientsqui permettent d’appliquer
très facile- ment lesrègles statistiques
au Contrôle deQualité
et d’en accroître l’efficacité dans desproportions
le
plus
souventinsoupçonnées.
Mais de même que l’addition ou lamultiplication
sont fort utiles pour résoudre lesproblèmes,
mais ne constituent pas une fin en soi, de même les méthodes de ContrôleStatistique
ne doivent pas être considérées comme unbut,
mais seulement comme un outil infinimentprécieux
pour le contrôle.Si le Contrôle
Statistique
apris
ces dernières années etprend
encorechaque jour plus
d’exten-sion aux
Etats-Unis,
c’estqu’en
réalité seule l’idéed’y appliquer
les normesstatistiques
estnouvelle,
mais que l’industrie américaine a vu
depuis
de nombreuses annéesl’importance
du Contrôle auxdivers stades de la fabrication.
Le contrôle à
chaque
stade de la fabrication a évidemment pour but d’éviter dedépenser
de la main-d’oeuvre aux
étapes
suivantes de la fabricationlorsqu’un objet
s’avère à un certain stadebon pour le
rebut ;
il aégalement
pourbut,
dansbeaucoup
de cas, derécupérer
de Ici matière à unstade où elle serait encore utilisable alors
qu’en
find’opération
elle ne seraitplus
bonnequ’au
rebut.Mais il
présente
bien d’autresavantages
aussi,quelquefois plus importants
que ceux que nous venonsd’énoncer. ,
Le Contrôle de
Qualité
estindispensable chaque
fois que l’on veut assurer un contrôle de ren-dement
quantitatif
dupersonnel, qu’il s’agisse
de l’établissement de salaires auxpièces
ou de touteautre
méthode,
afin d’éviter uneaugmentation
de laquantité
depièces fabriquées
au détriment de laqualité.
29
Il est aussi la base nécessaire de tout
planning
ou ordonnancement du travailpuisqu’il
estnécessaire,
pour connaître letemps d’occupation
d’un ouvrier, de savoir combien depièces
bonnesil recevra du stade immédiatement antérieur.
Enfin,
il est un auxiliaireprécieux
de tous servicesdedéveloppement,
études de méthodesou
recherches,
à la fois parcequ’il renseigne
ceux-ci d’une manière chiffrée sur les résultatsplus
oumoins bons des
procédés qu’ils
ont instaurés et parcequ’il oblige
ces services à fixer des normes par- faitementprécises
sanslesquelles
évidemment le contrôle nepourrait fonctionner,
mais dont l’utilitédépasse
de loin la fonction contrôle.Si nous venons d’insister autant sur l’intérêt du Contrôle dans l’industrie que sur l’intérêt de
l’application
des normesstatistiques
aucontrôle,
nous tenons àrépéter néanmoins.que
nil’appli-
cation de la
statistique
auContrôle,
nil’application
du Contrôle lui-même auxprocédés
industrielsne constituent des fins en soi, mais des moyens et par là même sont soumis à certaines limitations.
La limitation du contrôle en soi est évidemment
qu’il
doit payer, c’est-à-dire que pourchaque opération
deContrôle,
on doit peser lesavantages
decelle-ci,
enessayant
de n’en pas omettre, les comparer auxprix
de revient du travail de contrôlelui-même,
et décider sil’opération
de contrôleest rentable. Les méthodes
statistiques, lorsqu’elles peuvent s’appliquer,
diminuent engénéral
leprix
de revient del’opération
de Contrôle et enaugmentent
souvent lesavantages ;
elles reculent alors les limites enquestion,
mais ne lessuppriment jamais.
Mais si les méthodes
statistiques peuvent
très souvent aider à résoudre lesproblèmes
de con-trôle,
il n’en est pastoujours
ainsi. Onpeut
leurassigner principalement
deuxtypes
delimitation :.
- D’une
part,
le ContrôleStatistique
donne desprobabilités qui peuvent
êtregrandes
etont
l’avantage
d’être connues, mais non descertitudes,
alors que le contrôle 1000;0
donnethéorique-
ment des certitudes.
Lorsqu’il s’agit
de contrôle degrandes quantités,
cette différence estplus
théori-que que
réelle,
car, sur un contrôle d’assezlongue durée,
le contrôleurfait uncertain nombre d’erreurs,
dont lepourcentage peut
être aussiimportant
que celui laissé au hasard par les méthodesstatistiques.
Certains auteurs américains l’estiment de 10 à 15
%.
- D’autre
part,
les diverses tables et méthodes de ContrôleStatistique
ont été établies àpartir
derègles scientifiques s’appliquant
engénéral
à des ensembleshomogènes
ou à desréparti-
tions suivant les lois connues, le
plus
souvent la loi deLaplace-Gauss. Or,
il est très rare que les condi-tions industrielles donnent la
certitude,
ou même degrandes chances,
que ces conditions soient par- faitement réalisées.Fort
heureusement,
lesprincipales règles
établies pour le ContrôleStatistique
conservent leur valeurpratique,
sinonthéorique,
dans l’énormemajorité
desproblèmes
industriels. Desrègles simples
et
souples
ont étéétablies, non
pour voir si l’on était dans un casparfait d’application
des lois de lastatistique,
mais biensimplement
pour examiner danschaque
casparticulier
si lesrègles
de ContrôleStatistique peuvent s’appliquer
avec uneapproximation
suffisante pour être utiles.C’est aussi cette notion
d’approximation qui
apermis d’appliquer
le ContrôleStatistique,
non seulement aux fabrications en très
grandes
séries pourlesquelles
il avait été conçuinitialement,
mais aussi dans bien d’autres cas, en
appliquant
les mêmes limites de contrôle à despièces
différentes fournies par une mêmemachine,
parexemple,
ou bien encore dans d’autres cas à despièces
sem-blables mais non
identiques.
Nous nous sommes efforcés dans les
lignes qui précèdent d’évoquer l’importance
du rôle duContrôle dans l’industrie et de montrer les
avantages
del’application
à celui-ci des méthodes statis-tiques,
l’étendue duchamp d’application
de celles-ci et leur facilitéd’emploi.
Nous voulons néanmoins, avant de
conclure,
attirer l’attention du lecteur sur lesdangers
quepeut présenter l’application
de l’outilstatistique
mal manié. L’anecdote du médecingarantissant
lasurvie à son client parce
qu’il
adéjà
tué 99malades,
alors que lesstatistiques
donnent un cas sur cent deguérison,
esttrop
connue pour êtrerépétée.
Si l’ensemble desrègles
de ContrôleStatistique
peu- vent être aisémentappliquées
dansl’entreprise
par dupersonnel
de niveau de culturescientifique
tout à fait
ordinaire,
il est néanmoins extrêmement souhaitable de voir leplan
de contrôlestatistique supervisé
par un technicien de culturescientifique suffisante,
technicienqui peut,
selonl’importance
de
l’entreprise,
lui être entièrement attaché ou être un conseil extérieur.C’est l’un des buts du CENTRE DE FORMATION DES