Etude de la sectorisation des souches de châtaignier (Castanea sativa Mill.) à l’aide d’eau tritiée
G. CARLIER G. CARLIER
n
technique
de ChristiarChristianeDubois-Paganon
édicale de Gsenoble,que, R. P. 68, Université
scientifique
et médicale de Grenoble,Laboratoire de
Botanique,
B.P. 68,F 38402 Saint-Martin-d’Hères Cedex
Résumé
La sectorisation de quatre souches de
châtaignier,
portant 5 à 7rejets
decinq
ans, a été étudiée parinjection
d’eau tritiée dans une racine et mesure de la radioactivitéspécifique
de l’eautranspirée
par les différentsrejets. L’expérience
a été effectuée trois fois avec des racines différentes. Quelle que soit la racinequi
a reçul’injection,
tous lesrejets
reçoivent de la radioactivité, mais lesrejets
lesplus proches
sont trèssignificativement
favorisés. On conclut que la sectorisation est seulement relative et que les secteurs de la souche alimentéspréférentiellement
par les différentes racines peuvent se chevaucher. Par contre il n’a pas été mis en évidence de
préférence significative
en faveur desrejets
lesplus vigoureux.
1. Introduction
Les forêts de
châtaigniers
sont leplus
souvent traitées en taillisgrâce
à lapropriété
de cette essence de donner des
rejets après
coupe rase dupied-mère.
Le nombre derejets
vivants décroît au cours de la rotation(B ERTHIER , 1984).
Certainsexploitants pratiquent
des éclaircies afind’avantager
lesrejets
lesplus
forts.L’avantage peut
consister en une meilleureexposition
à la lumière et en une alimentation accrue ensève brute. Ce deuxième
avantage
nepeut jouer
que si la sève transitant parchaque
racine est
susceptible
d’alimenterplusieurs rejets
ou même tous. C’est làqu’on peut
considérer. l’éveatualité. d7=e <4sectorisati©n » des souches.On dit
qu’une
souche estdécoupée
en secteurs si la sève brute issue d’une racine alimente depréférence
un ouplusieurs rejets
à l’exclusion des autres. L’existence de secteursindépendants
a été décrite pour les souches dechêne-liège (D ESTREMEAU
&R ODERBOURG
, 1968). D’après
RIEDACKER(1973),
dans la souchejeune d’eucalyptus,
lasève d’une racine passe à 90 p. 100 dans les
rejets implantés
dans lequadrant
centrésur cette
racine ;
dans les souchesâgées, chaque
racine alimente encorepréférentielle-
ment un secteur, mais la
position
de celui-ci n’estplus
fixée aussirigoureusement.
Chezle
bouleau,
BEDENEAU & PAGES(1984)
montrent l’existence de relationsprivilégiées
entre certaines racines et certains « boutons
» (ensembles
dejeunes rejets groupés)
mais ces relations ne
peuvent
pas êtreprédites d’après
laproximité.
Chez le châtai-gnier, d’après
AYMARD & FREDON(1986),
« une racine alimente enpriorité
lesrejets qui
lui sontproches ;
mais lors del’application
de fortes doses de marqueur, la distribution s’étend à la sous-unité ou même à t’ensembie de lacépée
».Les marqueurs utilisés par les auteurs cités sont des substances
transportées
par la sève brute :phytocides
dont on observe les effets nocifs sur lesrejets,
ouphosphates
radioactifs que l’on dose dans des échantillons
après
untemps
choisi. La détection directe desphosphates
radioactifs par descapteurs
externesdéplacés
à la surface de l’écorce a étépratiquée
sur des arbres de futaie1 OwsTOrr
etal. , 1970, 1972)
mais n’apas été utilisée pour les souches de taillis. Les doses nécessaires seraient très élevées.
Dans le travail
présenté ici,
on utilise l’eau tritiée3 H 2 0, qui
est évidemment le meilleur marqueur du mouvement del’eau, principal
constituant de la sève.L’objectif
du travail est de
rechercher,
en fournissant de l’eau tritiée successivement àplusieurs
racines d’une
souche,
s’il existe des relationsprivilégiées
entre racines etrejets
etquels
sont les
rejets avantagés, compte
tenu de leurposition
et de leurvigueur.
2.
Techniques expérimentales
et matériel utilisé2.1. Matériel
L’étude
porte
sur 4 souches d’un taillis de 5 ans(en 1984)
à Notre-Dame de l’Osier(Isère).
Ondésigne
ici par « souche » un ensemble biendistinct,
de 60 à 90 cmde diamètre au niveau du
sol, comportant
5 à 8 « chicots» (bases
derejets
de larotation
précédente)
et 5 à 7rejets
vivants. Trois de ces souches sont encore reliées à des souchesvoisines,
distantes deplusieurs
décimètres oumètres,
par des isthmesligneux
endécomposition. L’origine
du taillis estancienne ;
lerecépage
y estpratiqué
tous les 20-25 ans.
La base des souches a été
dégagée
de la souchesuperficielle
de sol afin d’atteindre les racinespériphériques
et, dans la mesure dupossible,
les racinessous-jacentes.
Lessouches ont alors été dessinées
(fig. 2).
Les chicotsappartenant
à la rotationprécédente
sont aisément
identifiables ;
ceux des rotations antérieures le sontplus
difficilement. La hauteur totale desrejets
et leur circonférence à1,_90
m ont été mesurées le 26juin
et le27
septembre
1984(tabl. 1).
2.2.
Injections
d’eau tritiéeA
chaque expérience,
l’eau tritiée estinjectée
dans une seuleracine,
d’au moins 25 mm de diamètre. Troisinjections
dans des racines différentes ont étépratiquées
surchaque souche, respectivement
finjuin,
fin août et finseptembre
1984. Le choix s’estporté
sur des racines aussi bienréparties
quepossible
autour dechaque souche,
àl’exception
de cellesqui
sont nettement à l’écart de l’ensemble desrejets (fig. 2).
Un trou
(diamètre : 3,5
mm ;profondeur :
7mm)
estpercé
à lachignolle.
Le fûtd’une
seringue
de 1 ml y est enfoncé à force et aussitôtrempli
d’eau distillée afin devérifier que celle-ci
pénètre spontanément ;
sinon lapénétration
est amorcée enappliquant
de brèvessurpressions.
Ondépose
alors dans laseringue,
enplusieurs
fois sic’est
nécessaire,
le volumeprévu
d’eau tritiéc(en général
1 ou 2ml),
de radioactivitéspécifique 10 9 dpm ml-’. Après pénétration
on effectue encore troisrinçages
par 1 ml d’eau distillée. Laseringue
est laissée enplace
et bouchée par sonpiston.
Pour lesgrosses
racines,
l’eau tritiée estrépartie
entre deux ou trois trous.2.3. Echantillons d’eau
transpirée
La collecte d’eau
transpirée
estinspirée
du LUVALL & MURPHY(1982).
Dèsl’injection
un rameau feuillé dechaque rejet
est <:oiffé d’un sac depolyéthylène ligaturé
à la
base,
danslequel
l’eautranspirée
se condense. Les sacs sontchangés
à intervalles de 2-4jours
etplacés
àchaque
fois sur un rameau différent(cependant lorque
lefeuillage
est mouillé depluie,
le même rameau sert deux fois de suite afin d’éviter de diluer l’eau radioactivetranspirée).
Lesperturbations
que cetteprocédure peut apporter
à latranspiration
sont discutéesplus
loin.Suivant
l’exposition
du rameau, le volume recueilli àchaque
récolte va d’unefraction de ml à une centaine de ml. La collecte est
poursuivie
tant que la radioactivitéspécifique
de l’eautranspirée
par lesrejets
leaplus
favorisés estsupérieure
àquelques
milliers de
dpm ml-’ ;
à ce moment celle des autresrejets
est devenuenégligeable.
Ladurée totale de collecte
peut
atteindre 3 semaines si latranspiration
est peu intense.2.4. Mesure de la radioactivité
spécifique (dpm mr 1 )
La radioactivité de
parties aliquotes (par exemple 0,5 ml)
est mesurée à l’aide d’unspectromètre
à scintillation Tricarb(marque Packard),
dans unmélange
d’éthanolabsolu
(4,7 ml)
et de solution scintillante(10 ml).
La solution scintillante contient 4 g de2,5-diphényloxazole (PPO)
et0,1
g de1,4-bis- ! ] 2-(4-méthyl-5-phényloxazolyl) ]
-benzène
(diméthyl-POPOP)
par litre de toluène.2.5. Calcul de la
répartition
de l’eau tritiée entre lesrejets
Soit n le nombre de
rejets
de la souche et p le nombre depériodes
de collected’eau
transpirée.
Pendant lapériode j,
de duréet i ,
lerejet
i a une intensitétranspira-
toire moyenne
Tr ¡j
et l’eautranspirée
a une radioactivitéspécifique
rsi,. Laquantité
deradioactivité ri,
(en dpm) qui
a atteint cerejet
durant lapériode j est :
rij = rsq X
Itj
XTr ij (1)
On ne connaît pas la valeur de
Tr ii .
Il faut donc l’estimer indirectement. Latranspiration
d’unrejet
doitdépendre
à la fois de sescaractéristiques biométriques
etdes conditions
météorologiques.
En admettant que latranspiration
estproportionnelle
àl’aire de la section conductrice
(mesurée
à1,30 m) Si
et àl’évapotranspiration poten-
tiellejournalière
moyenne durant lapériode j, ETP J ,
onpeut remplacer Tr ij
par kS ; ETP i .
L’ETP est calculée par la méthode de BROCHET & GERBIER
(1972) qui
donne desrésultats moyens par
rapport
à d’autres méthodesclassiques.
La détermination deSi
estdécrite au
paragraphe
6 ci-dessous.Il vient alors :
r
ij
= rsijtj
kSi ETP j (2)
La
quantité
totale de radioactivité Ri reçue par lerejet
i est la somme desradioactivités reçues durant les
périodes
1 à p :. &dquo;
p
R. - 4 C. 1 Ire t J:;’1&dquo;1)B 1 !Z1
La somme des
quantités
de radioactivité reçues par lesrejets
1 à n est laradioactivité totale
transportée
àpartir
de la racineinjectée, R ror :
n p
R.. = 1W’ iQi S’ t-.! t. VTP 11 (AB
et la
part
P reçue par lerejet i,
enpourcentage
dutotal,
est :P = 100
R¡!R tot (5)
expression qui
élimine k. On admet que k est bien une constante, cequi
sera discutéplus loin.
On considère que la
répartition
de la radioactivitéreprésente
celle du fluxd’eau,
etdonc de la sève
brute, passant
par la racineinjectée.
2.6. Estimation de l’aire de la section conductrice
Si
Comme les
rejets
doivent êtrepréservés
en vued’expériences ultérieures,
cette aire doit être calculée à l’aide d’un tarifqui
la relie à la circonférence.Vingt rejets
de 5 ans, de circonférencecomprise
entre 44 et 169 mm ont étérécoltés dans le même taillis que les souches
expérimentales.
Des tranchesprélevées
à1,30
m ont été traitées aujaune
dediméthyle qui
colore le bois de coeur en rouge, ouau
Lugol qui permet
de localiser le boisfonctionnel,
dont leparenchyme
accumule de l’amidon. Les deux colorationsindiquent
que le bois d’aubier est constitué par lescernes des trois dernières années.
L’aire de l’ensemble de ces 3 cernes a été calculée à
partir
d’au moins 9 mesuresdes diamètres interne et externe, et le tarif fournissant la meilleure corrélation entre l’aire S et une ou
plusieurs
fonctions de la circonférence c a été recherché. Le tarif retenu est :S = a +
b, c l . 5
+b 2 (log c)2!3 (6)
où S est en
mm 2 et
c en mm, avec : a= 177,041
b, = 0,967 b
2
= -120,000
Le coefficient de corrélation double est r =
0,9950.
Grâce à cetarif,
l’aireSi
estcalculée pour
chaque rejet
le 26juin (valeur applicable
à lapremière expérience)
et le27
septembre (valeur applicable
aux deux autresexpériences).
2.7. Classement
hiérarchique
desrejets (tabl. 1)
Dans
l’hypothèse
où larépartition
de la sève serait influencée par lavigueur
desrejets,
il était nécessaire de caractériser celle-ci. L’observationpermet
dedistinguer
lesrejets
« dominés(entièrement
sous le couvert desautres)
et les « dominants» (les
plus
forts dechaque souche),
les autres pouvant êtrequalifiés
de « moyens ». Maiscette distinction n’est pas sans
subjectivité.
Le classementadopté
ici repose sur le fait que lesrejets
lesplus vigoureux
ont la croissance en hauteur et circonférence laplus
forte et la
plus prolongée
dans la saison :d’après
l’accroissement duproduit C 2 h
entrele 26
juin
et le 27septembre,
lesrejets
sont classés en troiscatégories :
-
catégorie
a : accroissement de 10 p. 100 etplus,
-
catégorie b :
accroissement de 1 à 9p. 100,
-
catégorie
c : accroissement nul.L’effectif total des
rejets (24)
serépartit
en 7 decatégorie
a, 9 decatégorie
b et 8de
catégorie
c. Le classement n’est pas modifié si onprend
pour critère l’accroissement absoluplutôt
que l’accroissement relatif(tabl. 1).
3. Résultats
3.1. Evolution de la radioactivité
spécifique
de l’eautranspirée
A titre
d’exemple,
lafigure
1 montre l’évolution de la radioactivitéspécifique
del’eau collectée à
partir
des troisrejets
lesplus
fortementmarqués
de la soucheB,
à lasuite de
l’injection
dejuin.
La radioactivitéspécifique
de l’eautranspirée
par les autresrejets,
sans êtrenulle,
esttrop
faible pour êtrereprésentée
sur lafigure.
Les barres horizontalesindiquent
les durées descollectes t¡¡
et l’ordonnée despoints représente
rs¡¡(termes
intervenant dans leséquations
1 à4).
Dans le casreprésenté,
la collecte a été arrêtée 360 heures(15 jours) après l’injection.
La radioactivitéspécifique
de la dernière collecte était tombée à 4 350dpm ml-’
pour lerejet
leplus
fortementmarqué ;
lapoursuite
des collectes n’aurait évidemment pas modifié le résultat des calculs. Par contre, il faut éviter l’interférence d’uneexpérience
sur lasuivante,
car unrejet
trèsmarqué
lors de lapremière peut
l’être très peu à la seconde. Il est donc nécessaire de laisser l’élimination de l’eau tritiée dansl’atmosphère
sepoursuivre
durant un intervallede sécurité d’au moins encore 100 heures. Les durées de collecte et de sécurité doivent être
allongées
si l’ETP est réduite.3.2.
Répartition
duflux
de sève àpartir
des racinesinjectées (tabl.
2 etfig. 2)
Les racines
injectées
àchaque expérience
sontdésignées
sur lafigure
2. Le tableau 2 montre que la radioactivité est décelée dans l’eautranspirée
par tous lesrejets, quelle
que soit la racine
injectée.
Mais larépartition
esttoujours
trèsinégale, puisque
sur les12
expériences (4
souches x 3injections) :
- dans 12 cas, au moins 50 p. 100 de la radioactivité est reçue par 1
rejet,
- dans 8 cas, au moins 75 p. 100 de la radioactivité est reçue par 1
rejet,
- dans 5 cas, au moins 90 p. 100 de la radioactivité est reçue par 1
rejet.
Dans tous les cas, trois
rejets
au maximum se partagent 90 p. 100 du flux. Enconséquence
sur les 72 individus(24 rejets
x 3injections)
32reçoivent
chacun moins de 1 p. 100 du flux. Dans la suite onappellera
«rejet
leplus
favorisé » celuiqui reçoit
la
plus grande part
du flux et «rejets
favorisés » ceuxqui reçoivent
au moins 10 p. 100 du flux issu d’une racine.La
figure
2 faitapparaître
les relationsprivilégiées.
Troisrejets (2 rejets
a et unrejet b)
ont été favorisés àpartir
de différentes racines mais un seul a été leplus
favorisé à
partir
de deux racines.3.3.
Effet
de laproximité
La
figure
3 faitapparaître
la relation entre lapart
de flux reçue par unrejet
et sadistance par
rapport
à la racineinjectée.
Cette distance est mesurée horizontalement entrel’aplomb
du raccord de la racine sur la souche et l’axe durejet.
Au-delà de 30 cm lapart
esttoujours
inférieure à 10 p. 100. Mais endeçà
de cettedistance,
ladispersion
est considérable.De toute
façon
la valeur absolue de la distance nepeut
pas êtreprise
commecritère d’un traitement
statistique,
car les souches sont de dimensions différentes et la distance d’une racine aurejet
leplus proche (par exemple)
varieconsidérablement,
deLa démonstration
statistique
de l’effet de laproximité peut
être faite enrépartis-
sant les 72 individus
(24 rejets
x 3expériences)
en classes deproximité :
lesrejets
derang 1 forment la classe I
(effectif : 12),
ceux de rang 2 la classe II(effectif : 12)
etceux de rangs 3 et au delà de la classe III
(effectif : 48).
Des essais derépartition
enun
plus grand
nombre de classes se sontavérés, après
traitementstatistique, dépourvus
d’intérêt.
Le tableau 3 fait
apparaître
lespourcentages
de flux moyens reçus par les individus des trois classes deproximité,
le classement étant fait soit dans l’ensemble de tous lesrejets,
soitséparément
pour les troiscatégories
derejets.
Dans tous les cas, lepourcentage
de flux moyen décroîtquand
on considère les classes deproximité
décroissante
(I
àIII)
mais comme danschaque
classe ladispersion
est considérable il faut rechercher si cet effet estsignificatif.
Orl’analyse
de variance estillicite,
car au moins l’une des conditions de validité n’est pasremplie :
les variances ne sont pashomogènes,
saufexception.
On a donc utilisé un test nonparamétrique,
celui deKruskall-Wallis
(S OKAL
&R OHLF , 1981).
Les résultats du test
figurent
au tableau 4. L’effet de laproximité
est hautementsignificatif
si l’on effectue le test sur l’ensemble des 72individus,
ou sur l’ensemble des individus decatégorie
a(les plus vigoureux)
ou decatégorie
b. Par contre l’effet n’est passignificatif
si on ne considère que l’ensemble des individus decatégorie
c(les
moinsvigoureux) ;
mais celaparaît
dû à ce que, dans cettecatégorie,
seulement deux individus se sont trouvés dans la classe deproximité
I.Il faut
souligner
que l’effet deproximité
n’est pas absolu. Il arrive que lerejet
leplus proche
de la racineinjectée
ne soit pas le;plus favorisé,
mais ilpeut toujours
êtrequalifié
de « favorisé », c’est-à-direqu’il reçoit
au moins 10 p. 100 du flux(tableau
2 :souche
B, expériences
dejuin
etd’août ;
soucheD, expérience d’août).
L’effet de
proximité
se fait encore sentir si l’on compare desrejets
« frères » c’est- à-direportés
par un même chicot(tableau 2).
Dans 14 cas sur18,
c’est le « frère » leplus proche
de la racineinjectée qui reçoit
lapart
laplus importante
desdeux ;
l’inverse n’est réalisé que dans 4 cas sur 18. Cette distribution diffère
significativement
de celle
qui correspondrait théoriquement
à l’absence d’effet(c’est-à-dire
9 et9),
comme le montre par
exemple
un test G(SonnL
&R OHLF , 1981).
Ceciindique qu’en
transitant par un
chicot,
la sève ne serépartit
pas uniformément autour decelui-ci,
cequi
aurait pour effet d’alimenterégalement
lesrejets
« frères ».3.4. Division des souches en secteurs
Le tableau 2 montre
qu’au rejet
leplus
favorisé onpeut toujours adjoindre
unrejet voisin,
ou bien deuxrejets
voisins(qui
sont alors situés depart
et d’autre durejet
le
plus favorisé).
Cet ensemblereçoit
au moins 87 p. 100 du flux(et
en faitplus
de90 p. 100 dans 11 cas sur
12) :
onpeut
le considérer comme le « secteur » de la racineinjectée.
Lesrejets
rattachés au secteur d’une racine sontsignalés
dans le tableau 2 et les secteurs sont localisés sur lafigure
2. Pourchaque
souche on observe le chevauche- ment d’au moins deux secteurs. Pour la soucheB,
dont lesrejets
sont nettementplus groupés
que ceux des autressouches,
les trois secteurs identifiés se chevauchent.3.5. Recherche d’un
effet
de lavigueur
desrejets
Les
rejets ayant
étérépartis
encatégories (a, b, c) d’après
leurvigueur,
onpeut
comparer les
pourcentages
de flux reçus parchaque catégorie, soit
sans tenir compte de laproximité,
soitséparément
à l’intérieur dechaque
classe deproximité.
Le tableau 3 montre que lespourcentages
de flux moyens vont en décroissantquand
on passe desrejets
lesplus vigoureux (a)
aux moinsvigoureux (c),
sauf dans la classe deproximi-
té II. Mais en aucun cas cet effet n’est
significatif (tabl. 4).
On remarque en outre que le
rejet
leplus
favoriséappartient
4 fois sur 12 à lacatégorie
a, 6 fois sur 12 à lacatégorie
b et 2 fois à lacatégorie
c. Onpeut
rechercher si cette distribution diffèresignificativement
de celle desrejets
dans les troiscatégories,
c’est-à-dire
7,
9 et 8 sur 24 soit3,5, 4,5
et 4 sur 12. Un test de conformité montre que les deux distributions ne diffèrent passignificativement.
Donc on nepeut
pas direqu’une catégorie
derejets
soitsystématiquement plus favorisée,
ou moins favorisée que les autres.3.6. Recherche d’un
effet
de la taille des racinesinjectées
Le diamètre des racines
injectées
va de2,7
à 10 cm(au
niveau du raccord à lasouche).
Deuxhypothèses
ont étééprouvées : a)
lesplus
grosses racines alimenteraientpréférentiellement
lesrejets
lesplus vigoureu: K ,
etb)
lesplus
grosses racines alimente- raient leplus grand
nombre derejets,
cequi
!e traduirait par unefréquence
élevée derejets
recevant unpourcentage
de flux au moinségal
à une valeur choisie comme seuil.Pour
éprouver l’hypothèse
a on a recherché s’il existe une corrélationsignificative
entre le diamètre des racines et la valeur de c
’h
desrejets
lesplus
favorisés, ou entre le diamètre des racines et l’accroissement dec ’h
desrejets
lesplus
favorisés. Pouréprouver l’hypothèse
b on a cherché s’il y a une corrélationsignificative
entre lediamètre de la racine et la
fréquence
desrejets
recevant au moins1 p.
100 ou 5 p. 100ou 10 p. 100 du flux.
Dans aucun cas il n’a été trouvé de corrélation
significative.
4. Discussion
4.1. Validité de la méthode
La
transpiration Tr i}
est un termeindispensable
au calcul de la radioactivitéatteignant
unrejet
i. Or il étaitimpossible
de la déterminerexpérimentalement.
Laméthode du transfert d’eau tritiée
(K LINE
et al.,1970)
est évidemmentapplicable
auxrejets ;
mais il est exclu que l’oninjecte
de l’eau tritiée à lafois
dans uneracine,
pouren rechercher la
répartition
entre lesrejets,
et dans lesrejets,
pour mesurer leurtranspiration.
La méthode du transfert de chaleur(G RANIER , 1985)
est d’undéveloppe-
ment
trop
récent pourqu’il
ait étéenvisageable
del’appliquer
en 1984.Il fallait donc
remplacer Tr i ,
par uneexpression équivalente.
Le fait que latranspiration
soitproportionnelle
à l’aire de la section conductrice a été démontré par KLINE et al.
(1976)
pour leDouglas,
et par JORDAN & KmNE(1977)
pour un ensembled’espèces tropicales.
Cetteproportionalité
sert souvent de base au calcul de latranspi-
ration
(I BRAHIM et
al.,1980 ; G RANIER , 1985 ; B OBAY , 1985).
Quant à lacorrespondance
entre
transpiration
etETP,
elle a été montrée pour unpeuplement
de Pinuspinea
àl’échelle du mois
(I BRAHIM et al. , 1980)
et pour des individus deDouglas,
à l’échelle de lajournée (G RANIER , 1985).
Il faut noterqu’il
n’est pasrequis,
pour la validité de laprésente méthode,
que le coefficient deproportionnalité
entretranspiration
et ETP soitle même pour toutes les souches ni pour toutes les
expériences.
Il suffitqu’il
soitconstant pour les différents
rejets
d’une souche et pour uneexpérience
donnée. Il estpossible
que lesrejets
dont lefeuillage
est entièrement sous le couvert des autres(A3, B5,
C4 etC5)
ne satisfassent pas à cette condition. Mais comme leurpart
de flux estfaible,
cette cause d’erreur nepeut
invalider les conclusionspositives
concernant l’effet de laproximité.
Onpeut cependant
suspecter que si lapart
de flux reçue par cesrejets, qui appartiennent
à lacatégorie
c(celle
des moinsvigoureux),
a étésurestimée,
cela a puempêcher
de mettre en évidence defaçon significative
un éventuel effet de lavigueur
desrejets.
Un autre
point
essentiel à la validité de la méthode est que laprésence
des sacsplastiques
ne doit pas modifier la radioactivitéspécifique
de l’eau collectée. Cepoint
aété discuté par LUVALL & MURPHY
(1982).
Ceux-ci considèrent la collecte d’eau dans unsac comme un
simple procédé
d’extraction d’échantillons d’eau de l’arbre(ici :
durejet).
Ainsi le flux effectivementtranspiré
par le rameau dans le sac n’a pas d’influence sur la radioactivitéspécifique
del’eau,
mêmesi,
comme il estprobable,
lesac modifie la
transpiration
du rameau.Cependant
le rameau ne doitreprésenter qu’une petite
fraction dufeuillage
durejet,
souspeine
de modifier latranspiration
totale de celui-ci. Cette condition
peut
ne pas avoir étésatisfaite,
enseptembre 1984,
pour les
rejets
C4 et C5qui
avaientperdu
une forteproportion
de leurfeuillage.
4.2.
Avantages
et contraintes de la méthodeCompte
tenu des limitations énoncéesci-dessus,
la méthodepeut
être créditée desavantages
suivants :a)
ellen’est
pasdestructive,
ni parprélèvements,
ni partoxicité ; b)
la totalité du flux de marqueur estprise
encompte ;
on nerisque
pas de manquer lepic
de radioactivitéspécifique (fig. 1),
comme lesoulignent
LUVALL & MURPHY(1982) ; c) grâce
à lalongue période
du tritium(12,
26ans)
iln’y
a pas de contraintes liées à la décroissance de laradioactivité ; d)
le marqueur étant éliminé par latranspiration, plusieurs injections peuvent
être faites au cours d’une même saison defaçon
àexplorer
les secteurs de
plusieurs
racines.Par contre l’utilisation d’un
radioisotope
dans le milieu naturel est soumise à des conditionslégales ( 1 ). Compte
tenu de la duréed’élimination,
de la vitesse moyenne du vent sur le site et de la section duhouppier,
il faut calculer laquantité
de radioactivitéinjectée
pour que la dose maximale réalisée dansl’atmosphère
soit inférieure à la dose admissible(200
nCim- ; ) ( 2 ).
4.3. Relations
préférentielles
L’existence de telles relations a été mise en évidence dans tous les cas. Elles sont fondées
significativement
sur laproximité ;
lestrajets privilégiés
sontgénéralement
lesplus
courts, mais pas defaçon
absolue. Ces conclusions sontidentiques
à cellesqui
ontété obtenues par d’autres méthodes par BEDENEAU & PAGES
(1984)
pour le bouleau et par AYMARD & FREDON(1986)
pour lechâtaignier.
Une
répartition
desrejets
en secteurs a été tentée. S’il est assez aisé dedésigner
les
rejets qui
fontpartie
du secteur d’une racine(le rejet
leplus
favorisé et son ou sesdeux voisins
immédiats),
il estplus
difficile et, enfait,
arbitraire dedésigner
ceuxqui
n’en font pas
partie, puisque
tous lesrejets reçoivent
au moins unepetite part
du flux de radioactivité. Or même avec une délimitation restrictive des secteurs, on constatequ’il
existe des chevauchements.Donc,
s’ilsexistent,
les secteurs ne sont pasindépen- dants ; chaque
racine alimenteplusieurs rejets
etchaque rejet
est alimenté parplusieurs
racines. Il
n’y
a pas de strictdécoupage
fonctionnel de la souche. C’est ainsiqu’AY-
MARD & FREDON
(1986)
constatent que si l’on fournit une dose suffisante dephytocide,
tous les
rejets
d’une souche sont atteints. Chezl’Eucalyptus
aucontraire,
RIEDACKER(1) En France, l’autorisation est donnée par la Commission Interministérielle des Radioéléments, B.P. 8, 91190 Gif-sur-Yvette.
(2) Décret 66-450 du 20 juin 1966, annexe IV, tableau 1.
(1973)
a conclu àl’indépendance
des secteurs, non pas sur la based’injections pratiquées
dans différentes racines d’une mêmesouche,
mais du fait que l’ablation desrejets
d’un secteur n’entraîne pas la redistribution du marqueur vers d’autres secteurs.Chez le
châtaignier,
undépressage
devrait entraîner une redistribution du flux d’eautritiée,
cequi
devra être vérifié.Il est
surprenant
que lesrejets
lesplus vigoureux n’apparaissent
passignificative-
ment
privilégiés.
En raison de leurs dimensions et de l’extension de leurfeuillage,
ilssont le
siège
d’un fort flux de sève. On s’attendrait à cequ’ils reçoivent
les pourcen-tages
de flux lesplus élevés,
ou à cequ’ils
soient lesplus
favorisés àpartir
duplus grand
nombre deracines,
ou encore à cequ’ils
soient alimentés par lesplus
grosses racines. Or aucun de ces effetsn’apparaît
defaçon significative.
Celapeut
être dû au nombre insuffisantd’expériences ;
ou bien le calcul despourcentages
de flux a pu être faussé àl’avantage
desrejets
les moinsvigoureux,
comme cela a été discutéplus
haut.Toutefois,
il faut noter que la méthode utiliséepermet
de connaître larépartition,
enpourcentage,
du fluxpassant
par uneracine,
mais non la valeur absolue de ce flux. Il n’est donc pas exclu que les racinesqui
alimententpréférentiellement
lesrejets
lesplus vigoureux
soientsimplement
lesiège
d’un flux de sèveparticulièrement
élevé.5. Conclusions
Les 4 souches de
châtaignier
étudiées ici.portant
desrejets
de 5 ans, nepeuvent
pas êtredécoupées
en secteursindépendants,
mais il existe des relationspréférentielles, généralement
trèsmarquées,
entre racines etrejets.
Ces relations sont fondées essen-tiellement sur la
proximité.
Le caractère relatif de la sectorisationsuggère qu’en
casd’éclaircie les relations sont
susceptibles
d’être modifiées au bénéfice desrejets
laisséssur
pied.
Reçu
le 19juin
1985.Accepté
le3 juin
1986.Summary
A
study of
sectorization in Sweet-C’hestnut(Castanea
sativaMill.)
stumpsusing
radioactive waterSectorization in four Sweet-Chestnut stumps, each
bearing
5 to 7 five year old sprouts, was studiedby
theinjection
of radioactive water into a root and the consequent measurement of thespecific activity
of the watertranspired
from each sprout. Eachexperiment
wasperformed
3 timesusing
different roots.Regardless
of which root wasinjected
all the sprouts received someradioactivity, though
thenearest were
significantly
favoured. It appears that sectorization isonly
relative and that the sectors of the stump which are fedpreferentially by
different roots mayoverlap.
On the other hand, nosignificant
evidence of anyfavouring
of the mostvigorous
sprouts was discovered.Références
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