Facteurs limitants et aspects dynamiques
de la mycorhization contrôlée de Fagus silvatica Lin.
par Hebeloma crustuliniforme (Bull. ex Saint-Amans)
Quél,
surtourbe fertilisée
J. GARBAYE
tion de Recherche
M.E. WILHELM
les Sols forestiers et
1.,N’.R.A., Station de Recherche stir le,s Sol.c forestiers et la Fertilisation Centre ile Recherches forestières (le Nancy, CI/(fll1penol/x, F 542SO Sâchal11ps
Résumé
Les conditions de la mycorhization du hêtre f1’agus silva!ica Lin.) par lfebelO1l1a crllstulil1iforme
(Buill.
ex Saint-Amans)Quél.
sur tourbe fertilisée ont été étudiées enpépinière,
en phytotron et in vitro. Deux phases peuvent être
distinguées après
le semis etl’incorporation
de l’inoculum (mycélium inclus dans de la vermiculite) à la tourbc : une
première
phase de survie puis de disparition du mycélium autour des particules de vermiculite, et une deuxièmephase
de colonisation de larhizosphère
par le champignon, accompagnée simultanément d’infections primairespuis
secondaires. La survie duchampignon,
pendant lapremière
phase, ne dépend pas de la fertilisation de latourbe,
alors que ce facteur (dose globaleet équilibre
azote/phosphore)
est déterminantpendant
la deuxième phase. Ces résultats permettent de concevoir une technique efficace d’inoculation enpépinière
sur tourbefertilisée.
1. Introduction
Parmi les
champignons ectomycorhiziens susceptibles
d’améliorer la croissance desjeunes plantations
de hêtre(Fagtcs silvatica)
dans le nord-est de laFrance,
Hebelomacrustuliiiiforine
s’est avéré intéressant par son efficacité et sacompétitivité (G ARB A YE , 1983). Cependant,
la maîtrise de son inoculation dans lespépinières
sur tourbe ferti-lisée,
deplus
enplus
utilisée pour laproduction
deplants
dehêtre,
est apparue difficile dès lespremières
tentatives(LmNez, 1981 ; WtLHSt.M,
1983). Nous avons donc cherché àapprofondir
notre connaissance du processus d’infectionmycorhizienne
dansce cas
particulier
et recherché les facteurs limitants essentiels dupoint
de vuepratique.
L’expérimentation
a été menée enpépinière,
enphytotron
et in vitro sur lechampignon seul,
enprivilégiant
l’étudedynamique
duphénomène.
Tous les essais ontporté
surla tourbe neuve non désinfectée. LAINEZ
(1981)
a en effet montré que la désinfection était nécessairelorsque
la tourbe avaitdéjà porté
une culture dehêtre,
à la fois pour favoriser lamycorhization
par lechampignon
introduit et pour éliminer lespathogènes
du hêtre
(surtout Pythiuin
sp. : DELRAN etal., 1982).
2. Matériel et méthodes 2.1.
Cxpérience
enpépinière
Les
graines
de hêtre de provenance roumaine ont étéprégermées
4 semaines à 4 &dquo;C dans de la tourbe humidepuis
semées auprintemps
à raison de 5 parpot
de 9 dmBcontenant les substrats étudiés : tourbe blonde de Hollande à différents niveaux de fertilisation.
Le tablcau 1 donne le détail des 14 traitcments réalisés en ne 1-aisant varier
qu’un
seul facteur à la fois à
partir
d’un traitement de base commun.La dose 1 de fertilisation (DELRAN ei
al., 1975) consistait, pour
1 1n&dquo;1 detourbe,
en
75 g de
N (sous formed’ammonitrate).
75 g deP&dquo;O&dquo; (sous
forme desuperphosphate triple),
75 g deK_O
(sous forme de sulfate depotassium),
unkg
de calcairemagnésien
(20 p. 100 de
MgO)
et 40 g d’unmélange
de microéléments contenant 20 g de sulfateferrique,
]0 g de sulfate decuivre,
5 g deniolybdate d’ammonium,
0,5 g de sulfate dezinc,
3,5 g de sulfate demanganèse
et1 g d’acide borique.
Les variantes1/2
et 1n’ont fait varier que la
quantité globale
de macroéléments(N, P, K),
lesquantités
de calcaire et de iiiici-oélémeiits restant constantes. Le
pH
des substrats a étéajusté
à
4,
5, 6 ou 7 parapport
de craiebroyée.
L’inoculum était une culture
mycélienne
d’Hebeloiiiacrustulini/orme
surmélange-
vermiculite-tourbc
(9/10
de vermicunte pour1/10
detourbe,
envolume) imprégné
demilieu nutritif. La souche utilisée a été isolée à
partir
d’uncarpophorc
récolté dans uneplantation d’épicéas
sur sol brun lessivé à mullmésotrophe
sur limon. Dans la va-riante
L,
l’inoculum était lavé sur un tamis à l’eau du robinet.Les tunnels recouvrant les traitements TO et TF avaient une
largeur
de 1 m etune hauteur de 1 m, et étaient constitués de film
polyéthylène. L’arrosage
y était assuré par brumisation. Dans le traitementTF,
le tunnel est resté clospendant
toute lapériode
de culture(avril
àseptembre).
Dans le traitementTO,
le tunnel a étépartielle-
ment ouvert les
jours
degrande chaleur, puis
enlevé début août.Chaque
traitement étaitrépété
5 fois(5 pots,
25plants).
En fin
d’expérience (septembre),
la hauteur totale de tous lesplants
a été mesurée et lessystèmes
racinaires ont été observés à laloupe
à main pourquantifier
le déve-loppement
de lamycorhization
par Hebelomacrustuliiiiforine, qui
a été noté de 0(pas
demycorhization visible)
à 3(mycorhizes
abondantes sur toutes lesracines).
2.2.
Expérience
enphytotron
Les
graines
de hêtre(provenance plateaux
calcaires du nord-est de laFrance)
ont étéprégermées
commeprécédemment
et semées à raison d’une faine par cavité dans descagettes
contenant 32godets
ouvrants (« rootrainers» Spencer-Lemaire). Chaque
cavité contient 150 cm;¡ de substrat étudié : tourbe blonde de Hollande avec différentes formules de fertilisation et différentes doses d’inoculum
mélangé
à la tourbe.Chaque
traitement est
représenté
par unecagette (32 plants).
Neuf traitements de fertilisation
(tableau 2)
ont été combinés avec 3 doses d’inoculation : 1 p.100,
2 p. 100 et 5 p. 100 du volume de tourbe. L’inoculum.lavé,
était du mêmetype
que pourl’expérience
enpépinière.
Il a étémélangé
à latourbe avant le
remplissage
desgodets.
Les traitements112-111
aux trois doses d’ino- culation étaient doublés avec l’inoculum non lavé.T...,....nr 1
Les
cagettes
ont été maintenuespendant
120jours
(4mois)
dans une chambre decroissance clïmatisée :
jours longs
de 16 h(éclairement
au niveau du sommet desplants :
16 000lux),
12 &dquo;C la nuit et 20 &dquo;C lejour,
humiditéatmosphérique
oscillantentre 90 et 100 p. 100.
Les
godets
ont été ouverts àl’âge
de 10, 20, 28,38, 53, 65,
79, 92, 108 et 120jours
pour l’observation à la
loupe
à main de la tourbe et desracines, toujours
sur la mêmeface de la motte. Ont été notées la
présence
ou l’absence demycélium
d’Hebelomacrustuliniforme
et l’intensité de lamycorhization (même
échelle de 0 à 3 queprécé- dcmment).
La hauteur dechaque plant
au-dessus descotylédons
a été mesurée à 79 et à 120jours (fin
del’expérience).
2.3.
Expérience
in x.il;.mLes 9 substrats de
l’expérience
cnphytotron
et un substratsupplémentaire
constitué de tourbe pure, humidifiés à la
capacité
auchamp,
ont été étalés sur uneépaisseur
d’environ 5 mm dans les boîtes de Pétri de 90 mm de diamètre (5 boîtes parsubstrat).
Ces boîtes ont été ensemencées par la même souche d’Hebelofzzacrustulif2ifornne
(2implants
de 6 mm de diamètre parboîte)
ou par un amas central de 2 ml d’inoculum vermiculite-tourbe lavé ou non lavé. Elles ont étéplacées pendant
30
jours
à l’obscurité à 25 &dquo;C.Deux
expériences
successives ont été effectuées avec lesimplants gélosés.
Dans lapremière,
les boîtes n’étaicnt pas scellées et l’humidité de la tourbe étaitajustée chaque
semaine par
pesée
et apport d’eau distillée. Dans ladeuxième,
les boîtes étaient scellées à l’aide d’un ruban adhésif pourempêcher l’évaporation.
Le
développement
dumycélium
a été observépériodiquement
sous laloupe binoculaire,
sans ouvrir les boîtes. Dans le cas desexpériences
avecimplants gélosés,
il a été
comparé
à celui obtenu sur sablequartzeux
purstérile, imprégné
d’eau stérile et maintenu stérile dans des boîtes scellées.3. Résultats
3.1.
Expérience
enpépinière (fig. 1)
.La
mycorhization
est faible dans le traitement de base(note 0,3),
mais elle est considérablementaugmentée
(note 1,5environ)
par une réduction de la dose de fertilisation ou paraugmentation
de la dose d’inoculum(fig.
1 b etd).
Pour la dose moyenne de fertilisation(1),
la hauteur desplants
n’est pas influencée par ]intensité de litmycorhization (fig.
1b).
Par contre, celle-ci compense(figure
1d)
la réductionde croissance nortroalcment entraînée par une dose de fertilisation inférieure à 2
(D
ELRAN
etu l ., 1975).
Par
rapport
au traitement debase,
l’élévation dupH empêche
l’infectionmycorhizienne,
en mêmetemps qu’elle
réduit fortement la croissance desplants (fig.
1f).
Cetoptimum
de croissance du hêtre sur tourbe àpH
4 avaitdéjà
été mis enévidence par DELRAN et
al.,
1975.Les colonncs correspondant au traitement de base sont en
grisé.
Pour les hauteurs, les traitements portant la même lettre (a, b...j ne diffèrent passignificativement
aurisque
de 5 p. 100. Voir tableau 1 pour les définitions des traitements.
T h
e col1l111ns correshonding to the basic treatment are grey. Fnr the hei,!hts, the
treat111ents with the saiiie letter (a, b...) are not
.significantly
!;//tvc/!f at the 5 p. 100 level.Sel
’
tcrble 1 for the defiaitiorra of treatment.1&dquo;.
Le
mélange
de l’inoculum au substrat provoque une meilleuremycorhization
quesa localisation sous les
graines (fig.
1c),
et lelavage
de l’inoculum exerce un effet trèspositif (fig. 1 a).
La
mycorhization
ne s’est installée que dans deux climats : tunnel ouvert et serre, avec une note moyenne un peusupérieure
dans ce dernier cas(fig.
1 e).3.2.
Ex l? ériciice
enphytotron
-
Dévdoppcment
desplants.
La levée desgraines
est terminée dès le !0&dquo;jour,
avec les
cotylédons
étalés. Lespremières
racines courtes d’ordre 2 et 3apparaissent
dès le 28&dquo;
jour.
Le 38&dquo;jour,
les deuxpremières
feuilles sont étalées sur tous lesplants.
Apartir
du 53’jour,
la pousses’allonge
et de nouvelles feuillesapparaissent
et le nombredes racines courtes
augmente rapidement
avec ledéveloppement
dusystème
racinaire.Les
cotylédons
sèchent et tombcnt àpartir
du 92&dquo;jour.
Pourcentage
de godetsprésentant
dumycélium (tirets),
pourcentage de plants mycorhizés (traitcontinu)
et note moyenne de mycorhization des plants mycorhizés (pointillés) en fonction du temps et de la dose d’inocuium (0 : 1 p. 100 v/v ; O : 2 p. 700 ; · : 5 p. 100).Percent nJ containers witll ntyceliurtt (broken line), percent of ntocorrhized pl{/nts (solirl line) artd mean mycorrhizalion index of the lIlycorrhized plallls (dottecl line) re/aled
to time and iaoculutu dose
!0 :
1 p. 100 V/ 1, ; H : 2 p. 100; · : 5 p: 700).- Installation de la
mycorhization (fig.
2). Lespremières mycorhizcs apparaissent
entre le 58° et le 53&dquo;
jour, puis
lepourcentage
de semismycorhizés augmente, rapidement
au début
puis
de moins en moins vitc. Il continued’augmenter
en find’expérience
(120jours),
mais la forme des courbessuggère qu’il
n’atteindra pas 100 p. 100. Para]-lèleiiieiit,
la note moyenne demycorhization
des semismycorhizés augmente régulièrement
àpartir
du 78&dquo;jour.
Elle n’estappréciable
que 20jours après l’apparition
des
premières mycorhizcs.
Wt!soN et HAIZLEY(1983)
observent lit même succession d’événements sur des semis de hêtre cultivés en serre sur un sol forestier.-
Développement
dumycélium (fig. 2).
Dès le 10&dquo;jour,
dumycélium
est visiblesur lit
plupart
des mottes. Dans tous les cas, il sort desfragments
de vermiculite del’inoculum,
avec une extension maximale de 1 à 2 mm. Lafréquence
dumycélium
dansles
godets
décroît ensuitejusqu’au
53&dquo;jour, qui
marque le début de lamycorhization.
puis augmente jusqu’à
la fin desobservations,
restanttoujours supérieure
au pourcen-tage
deplants mycoihizés.
Lemycélium
observé est alors enmajeure partic
autourdes
mycorhizes
ou des racines courtes nonmycorhizées.
sans lien apparent avec la vcrmiculite.- Effet de la dose d’inoculum
(fig.
2). Les troisparamètres précédents
varientdans le même sens que la dose d’inoculuiii initialement
mélangée
à latourbe,
avec, en find’expérience,
moins de différence entre les doses2 p.
100 et 5 p. 100,qu’entre
lesdoses 1 p. 100 et 2 p.
100,
saufcependant
pour la note moyenne demycorhization.
- Effet du
lavage
de l’inoculum.Lorsque
la dose d’inoculum est faible(1 p. lU0),
lelavage
diminue la survie dumycélium (fig. 3),
mais n’a pas d’influence sur lamycorhization. Lorsque
la dose d’inoculum est forte(5
p.100),
lelavage
n’a aucuneffet sur les 3
paramètres
mesurés.- Effet de la fertilisation
(fig. 4,
5, 6 et 7). Les résultatsprésentés
ne concernentque la
plus
faible dose d’inoculum(1
p. 100v/v),
pourlaquelle
l’effet de la fertilisationest le
plus marqué.
Pour une doseglobale
faible(1/4, fig.
4 et5), l’équilibre N-I’.!Or-K!O
a un effet trèsmarqué
sur les troisparamètres étudiés, toujours
dans lemême sens
(par
ordre de valeur décroissante desparamètres : 121,
211,111 ).
l’ourune dose
globale
forte(1, fig.
6 et7),
l’effet est encore trèsmarqué,
mais en sensinverse :
l’équilibre
de base 111 donne les meilleurs résultats. Pour la doseglobale
intermédiaire
(1/2),
aucun cfîctn’apparaît
nettement. Parmi les 9 formules defertilisation,
la meilleuremycorhization
en find’expérience (tableau 3)
est obtenue indifféremment avec1/4-121
ou1-111,
aussi bien enpourcentage
deplants mycorhizés qu’en
intensité de lamycorhization.
On remarque parailleurs,
que pour les doses extrêmes(1/4
et surtout1)
les différences defréquence
dumycélium n’apparaissent
quetardivement, suggérant
que lacomposition
minérale du substrat est moins la causepremière
des différences observées que,indirectement,
l’étatphysiologique
de laplante
et la
composition
de larhizosphère,
du fait de différences de nutrition minérale.- Croissance des
plants.
Le fait de ne pas laver l’inoculum réduit lacroissance,
surtout pour la dose la
plus
forte(5
p. 100v/v) : 10,9
cm contre15,5
cm de hauteurau-dessus des
cotylédons
à 120jours,
et entraîne la mort de 25 p. 100 deplants,
alorsque la mortalité n’excède
jamais
5 p. 100 dans les traitements avec inoculumlavé,
quelle
que soit la dose. La fertilisation a un effet trèsmarqué
sur la croissance(ta-
bleau4).
Une dose de base élevée a un effetpositif auquel s’ajoute
l’effetpositif
durenforcement en azote
(équilibre 211).
Lacomparaison
avec le tableau 3 montrel’absence de relation entre le niveau d’infection
mycorhizienne
et la croissance.3.3.
Expérience
in vitroDans les
expériences
avecimplants gélosés,
lemycélium
des témoins surquartz
se
développe jusqu’à
atteindre une extension radiale de 5 à 10 mm en 10jours,
àpartir
des réserves nutritives del’implant.
Sur latourbe,
lemycélium
ne sedéveloppe
pas ou n’atteint
qu’une
extension radiale de 1 à 2 mm. Lepourcentage d’implants ayant
ainsi émis dumycélium après
30jours
d’incubation est très variable et nepermet
aucune
conclusion,
sinon que la tourbe inhibe fortement la croissance d’Hebelomacrustuliiiifornie,
L’expérience
avec inoculum vermiculite-tourbe montreégalement
une très faible croissance dumycélium
sur la tourbe (1 à 2 mm), mais une meilleure surviequ’avec
les
implants gélosés.
Le taux de survie estcependant généralement
aussi bon oumeilleur avec l’inoculum lavé
plutôt
que non lavé. Iln’apparaît
aucune relationsimple
entre le
type
de fertilisation et ledéveloppement
ou la survie dumycélium.
On re-marque seulement que la croissance est totalement inhibée sur la tourbe pure non
fertilisée,
que l’inoculumsoit lavé
ou non. Un apport d’éléments minéraux est donc favorable.4. Discussion
L’expérience
enphytotron
nous montre ladynamique
de lamycorhization
dansdes conditions
climatiques régulières
etproches
del’optimum.
Dès lespremiers jours,
le
mycélium
croît faiblement àpartir
desfragments
de vermiculite à l’intérieurdesquels
il avait été
protégé
lors dumélange
de l’inoculum à la tourbe. L’abondance dumycélium
dans le substratdépend
alors étroitement de la concentration initiale eninoculum : un
fragment
devermiculite,
s’il abrite dumycélium viable,
nepeut
donnerqu’un
volume dequelques
mmB contenant lechampignon.
Lemycélium
cesse ensuitede croître et commence à
disparaître
dès le 20&dquo;jour.
Cettepremière phase dépend
peu du
type
de fertilisation (ce que corroborent lesexpériences
invitro ;
il semblecependant qu’un
apport minimum d’éléments minéraux soit favorable à la survie dumycélium).
Lelavage
del’inoculum,
enl’appauvrissant
en milieu nutritifrésiduel,
ne réduit le
développement
et la survie dumycélium
que pour les faibles doses d’inoculation (1 p. 100v/v).
Le facteur limitantl’expansion
dumycélium
dans lesubstrat et sa survie est donc
plus
lié à la tourbe elle-même(facteurs physico-chimiques
ou
microbiologiques
défavorables comme le montrel’expérience
in vitro avec lesimplants gélosés) qu’aux
réserves nutritives de l’inoculum. L’interaction entre l’effet dulavage
et la dose d’inoculum estprobablement
due à un autre facteur non contrôlé :effet de la microflore
saprophytique
utilisant les réserves nutritives de l’inoculum (MARX .
1980).
Cette
phase
de décroissance de laprésence mycélienne
iraitprobablement jusqu’à
la
disparition complète
en l’absence deplante-hôte.
Mais enprésence
del’hôte,
lespremières
racines courtesapparaissent
vers le 30&dquo;jour,
suivies environ 10jours après
par les
premières mycorhizes.
Le nombre de
plants mycorhizés augmente
alorsrapidement,
mais l’intensité de lamycorhization
de cesplants
ne commence à croître que 20 à 30jours plus
tard.Ces deux
étapes correspondent respectivement
àl’apparition
despoints
d’infectionprimaire
de racines courtes isolées àpartir
dumycélium
issu del’inoculum, puis
à lamultiplication
despoints
d’infection secondaire àpartir
desmycorhizes déjà formées,
de leur
mycélium frangeant
et dumycélium rhizosphérique.
CHILVERS & GusT(1982)
ont
déjà
décrit cephénomène
sur les semisd’eucalyptus.
Dès le début de la
mycorhization,
lafréquence
dumycélium
dans lesgodets, qui
avait diminué
jusqu’alors, augmente
brutalement et continue à croîtrejusqu’à
la fin des observations. Il nes’agit plus
demycélium
issu de lavermiculite,
mais demycélium
lié aux
mycorhizes
ou situé auvoisinage
immédiat de racines courtes non infectées.Le
pourcentage
degodets présentant
dumycélium
restesupérieur
aupourcentage
deplants mycorhizes
( 10 p. 100environ),
l’écart restant constant àpartir
du 90‘’jour.
Comme la
proportion
deplants mycorhizés augmente,
cela prouve que de nouveauxplants
continuent en permanence àcapter
dumycélium
dans leurrhizosphère
àpartir
de l’inoculum déclinant et à assurer sa survie et sa croissance par l’intermédiaire de leurs exsudats
racinaires,
avant de contracter à leur tour l’associationsymbiotique.
Lafigure
8 schématise les différentesphases
de l’infectionmycorhizienne
telle que nousvenons de la décrire.
Les infections
primaires
ne peuvent avoir lieu que si le relais est assuré àtemps
entre la
phase
1 et laphase
2. Enpratique,
il faut donc que la durée de recouvrementde ces 2
phases
soit laplus longue possible,
soit enprolongeant
la survie de l’inoculum(phase 1),
soit en hâtantl’apparition
de racines courtesréceptives
à l’infectionmycorhi-
zienne ou
capables
d’assurer la croissancerhizosphérique
duchampignon (phase 2).
Une autre solution consiste à inoculer
après
lesemis, lorsque
lespremières
racinescourtes
apparaissent (LAPEYR!E, 1983).
Cettetechnique complique cependant
lesopérations
enpépinière.
Nos résultats montrent que la
phase 1 dépend davantage
de l’inoculum lui-même que de la fertilisation de la tourbe. Les améliorations sont donc à rechercher d’unepart
dans laprotection
et l’inclusion dumycélium
dans un substrat autre que lavermiculite,
parexemple
dans ungel (LE
TACON et al., 1983,) et d’autre part dansl’optimisation
dustade de
développement
et de l’infectivité dumycélium
au moment de l’inoculation(L
APEYRIE
, 1983 ;
LITTKE etal., 1980).
Laphase
2, par contre,dépend
étroitement de lafertilisation,
par l’intermédiaire de la nutrition minérale de laplante qui
modifiesa
composition rhizosphérique
et saréceptivité
à lasymbiose.
A cetégard,
l’intéraction entre la dose totale de fertilisation etl’équilibre azote-phosphore
estparticulièrement marquée.
On remarque
également qu’à
tous les stades du processus les résultatsdépendent
de la densité initiale de l’inoculum dans le substrat.
Chaque
élément d’inoculum(particule
devermiculite) ayant
un faible rayond’action,
le nombre et larépartition homogène
de ces élémentsaugmentent
en effet laprobabilité
de rencontre dumycélium
avec des racines courtes : ce sont les racines
qui
vont à l’inoculum et non pas le contraire. Tout facteur accélérant ledéveloppement
racinaire ou le concentrant dans le volumeoccupé
par l’iiioctiltim(conteneurs)
sera doncfavorable,
à conditionqu’il
neréduise pas simultanément la
réceptivité
individuelle des racines courtes.Face à ces nombreuses interactions et à la
complexité
duphénomène, l’expérimen-
tation en vraie
grandeur
reste nécessaire pourl’optimisation
des conditions d’inocula- tion.L’expérience
enpépinière
a confirmél’importance
de la dosed’inoculum,
deson
mélange homogène
ausubstrat,
du niveau de fertilisation. Par contre, elle révèleun effet très
positif
dulavage
de l’inoculum sur l’établissement de lamycorhization,
contredisant en
partie l’expérience
enphytotron.
En
pratique
etcompte
tenu de cesrésultats,
il semble que de bonnes conditions d’obtention deplants
de hêtremycorhizés
par HebelomacrustuliniJorme
sur tourbefertilisée soient les suivantes :
-
pH 4;
- niveau de fertilisation faible
(dose 1 /4)
avec un renforcement enphos- phore (121)
ou moyenne(dose 1)
avecl’équilibre
de base(111) ;
- inoculum
mélangé
à latourbe, lavé ;
- forte dose d’inoculum du
type
vermiculite(au
moins 10 p. 100 du volume de latourbe)
ou doseplus
faible d’un inoculum mieuxprotégé (gel) ;
- concentration du
système
racinaire dans un volume restreint(conteneurs
ou forte densité de semis sur un lit de tourbed’épaisseur
inférieure à 20cm).
Remerciements
Nous remercions l’Office National des
Forêts, grâce
au financement duquel ces recherches ont pu être effectuées.Summary
Litniting fuctors
anddynumics of
controlleclmycorrhizcttion of Fagus
silvatica Liti.by
Nebeloma crustuliniforme(Bull.
exSt-Amans)
Oti!-1. onfertilizecl peat
The conditions of mycorrhization of beech (Fagus silvatica Lin.) by lit,bt,loiii(i crastu-
tinitornte (Bull. ex
St-Amans)
QL)61. on fertilized peat have been studied in the nurscry, in agrowth
chamber and in vitro. Two phases can bedistinguished
after seeding andmixing
theinoculum
(mycelium
in vermiculite) with the peat : the first phase is a period of survivalthen decay of mycelium around venniculite particles. The second phase is a colonization of the
rhizosphere
by the fungus ;simultaneously, primary
and secondary infections occur.Fungal survival during the first phase is independant of peat fertilization (total dose of fertilizer and
nitrogen/phosphorus
ratio), which is very important during the second phase.These results have led to the conception of an efficient technic for controlled
mycorrhization
in fertilized peat nurscrics.
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