• Aucun résultat trouvé

La pensée de l'art chez Quignard

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "La pensée de l'art chez Quignard"

Copied!
11
0
0

Texte intégral

(1)

1 La référence au domaine de l’art est une constante de l’œuvre de Pascal Quignard.

Ce n’est peut-être pas surprenant de la part d’un écrivain qui est lui-même un artiste et qui collabore avec de nombreux peintres, musiciens, chorégraphes, etc.

Parallèlement à des fictions où les personnages sont issus du monde de l’art (Charles Chenogne, Ann Hidden, Marin Marais, Meaume le graveur, etc.), Quignard développe, à travers ses différents traités, une réflexion sur l’art qui fait appel à des savoirs spécialisés, mais qui tient compte de considérations plus subjectives et se caractérise par une certaine portée spéculative où érudition et imagination sont en interaction constante.

Comment comprendre une telle articulation entre savoir et fiction ? Quel en est l’enjeu ? Quel éclairage cette approche littéraire apporte-t-elle à la pensée de l’art ? Notre propos interrogera l’approche quignardienne de la peinture et se focalisera principalement sur la peinture antique. Nous essayerons de montrer que le décryptage de l’image peinte ne s’astreint pas à respecter les normes du système figuratif actualisé et donne plutôt lieu à une lecture-interprétation tendue vers l’investigation de l’invisible et impliquant l’articulation de l’imaginaire au symboli- que. Nous tenterons cependant de souligner la dimension érudite de cette réflexion sur la peinture où Quignard discute des notions de poétique et d’esthétique et réactive des débats anciens dans une perspective essentiellement anthropologique.

Nous interrogerons enfin le rapport particulier que l’œuvre quignardienne entretient avec les différents savoirs et qu’illustre le dialogue constant entre le critique et le fictif, afin de mieux cerner la spécificité de cette aventure de la pensée qui vise moins le savoir que la connaissance, dans la mesure où elle ne prétend ni à la maîtrise ni à la certitude, mais privilégie l’expérience et la recherche.

Une approche spéculative de l’image peinte : interroger l’empreinte

2 L’approche quignardienne de la peinture est d’abord descriptive et herméneutique.

Elle tient compte de l’ensemble des propriétés morphologiques de l’image peinte : composition d’ensemble, disposition des figures sur l’espace de la toile (de la fresque), couleurs, contour du dessin, etc. Elle se fait ensuite interprétative en se polarisant sur les attitudes, les postures, les regards et en interrogeant les “articu- lations signifiantes” de la représentation, déduisant ainsi des rapports logiques ou

“syntaxiques” entre ses différents éléments. Mais cette lecture-interprétation “ne respecte pas, selon B. Vouilloux, les conventions propres au système figuratif qu’elle actualise”1. Il ne s’agit pas, selon lui, d’un “décodage archéologiquement correct”. En effet, la lecture du fait iconographique se caractérise, chez Quignard, par une large portée spéculative, dans la mesure où il considère l’image peinte comme une empreinte à interroger en entreprenant une “montée du visible vers l’invisible”.

3 Parler d’un décodage de l’image peinte signifie que celle-ci fonctionne comme un langage codifié dont le déchiffrement permet d’accéder à une signification, en tenant compte de ses propriétés formelles et syntaxiques. Or, dans le cas des peintures pariétales préhistoriques, la syntaxe même qui organise l’ensemble de la représentation nous échappe : signification de la disposition spatiale des figures,

(2)

symbolique des formes et des couleurs, etc. Nous avons affaire à une structure de signifiants qui interagissent entre eux et qui constituent le niveau “symbolique” de la fresque ; de même dans la fresque composite qui orne la tombe dite des Taureaux de Tarquinia2. Mais nous ne pouvons saisir le sens de la scène figurée

“faute de connaître cette langue et le dit qui s’y exprime”3. Deux choses sont à retenir de ce propos. La première est qu’il faut, non seulement connaître les conventions du système figuratif, mais aussi comprendre la langue propre à une peinture donnée. La deuxième est que derrière une peinture, il y a un “dit”, une histoire, un “mythe”, “du moins un rêve décomposable en segments de langage”

(Sol 193). En effet, si Quignard affirme qu’une peinture antique est la condensation d’un récit, il parle, aussi, au sujet de la scène du fond du puits, à Lascaux, d’une

“narration graphique” (Sol 193). Il considère, par ailleurs, que la tendance à la narration est naturelle chez l’homme, qu’elle est même un besoin4. Aussi sa lecture des images peintes fait-elle souvent appel aux mythes, comme dans le cas de la fresque de la villa des Mystères. La représentation ne permet pas à elle seule de saisir le sens de ce “dit”. Mais Quignard invoque les droits de l’intuition et de l’imagination pour reconstituer le muthos qui se profile derrière la scène peinte, pour l’inventer.

4 Si la lecture quignardienne ne s’arrête pas au niveau symbolique de la représen- tation, c’est que, pour lui, la peinture laisse entrevoir l’invisible derrière la représentation visible. Dans Le sexe et l’effroi, il cite le dialogue entre Socrate et Parrhasios, extrait des Mémorables de Xénophon, qu’il résume ainsi : “Trois étapes jalonnent la montée du visible vers l’invisible. D’abord la peinture représente ce qu’on voit. Ensuite la peinture représente la beauté. Enfin la peinture représente to tès psychès èthos (l’éthos de la psychè, l’expression morale de l’âme, la disposition psychique à l’instant crucial)” (SE 53). Le peintre doit “faire coïncider le muthos que raconte la fresque et l’éthos du personnage central au moment du télos ou juste avant le télos” (SE 58-59). La fin de la peinture est donc “l’expression éthique (les grandes émotions divines ou surhumaines)” (SE 57). Dans le monde antique, ce sont les stoïciens qui, reprenant et déformant la théorie aristotélicienne de la phantasia, ont introduit l’invisible dans le domaine de l’art figuratif. La qualité d’ingenium était attribuée à l’artiste capable de “créer une image de l’invisible”5. Pour les stoïciens, l’invisible, c’est le divin. Tout en s’inspirant de leur théorie de l’art, Quignard en évacue la dimension religieuse et morale. L’invisible ne renvoie, chez lui, à aucune entité transcendante. Quant aux “émotions divines et surhumaines”, elles naissent de l’assomption de l’élan de la nature. C’est plutôt le chemin de l’épicurisme que Quignard emprunte pour penser l’invisible. Pour les épicuriens, c’est le tissu atomique du monde qui est invisible ; il y a un mouve- ment imperceptible derrière l’apparente immobilité des choses et il y a un “objet incertus” (invisible) qui “habite le cœur du locus certus”. Chez Quignard, c’est le réel qui est invisible : “Immontrable, invisible est le réel” (SE 65) ; c’est le tissu libidinal et pathique, le fonds archaïque sauvage qui nourrit les rêves et les fantasmes, comme il nourrit l’art et la pensée.

5 L’interprétation d’une œuvre picturale consiste donc en une “montée du visible vers l’invisible”. Celle-ci emprunte ses outils aussi bien à l’épicurisme de Lucrèce qu’à la psychanalyse freudienne et lacanienne. Si la peinture représente d’abord “ce qu’on voit”, elle ne représente que les différentes formes qui naissent du choc “brusque”

et “muet” des atomes. Le visible n’est pour Lucrèce qu’un tissu de simulacres. C’est

(3)

à partir de cette théorie que Quignard interprète l’illusionnisme de la peinture pariétale de Pompéi inspirée du décor théâtral grec. Ce qu’on voit sur l’espace de la fresque, ce sont des figures marquées par le tour complet de la “ligne extrême” et dont “l’insularité” s’explique, pour l’auteur, par l’atomisme épicurien. Elles sont réparties sur un fond dont le “relief feint” est obtenu par un jeu de couleurs non mélangées, “tachygraphiques”, et de “fausses perspectives”. L’illusionnisme de la peinture romaine est en quelque sorte une illustration de la “fiction de la réalité”6. Le monde visible n’est qu’une quasi-peinture, car nous ne pouvons le percevoir sans langage. Il n’y a que l’infans qui peut voir les choses dans leur nudité. Le langage est, en effet, pour Quignard, un masque trompeur. Dans son commentaire du dialogue entre Socrate et Parrhasios, il souligne le fait que “prôsopon” désigne à la fois “le visage vu de face”, “le masque de théâtre” et “les personnes grammati- cales” (SE 53). Si l’auteur ne s’astreint pas à respecter les conventions propres au système figuratif, c’est parce qu’il s’agit d’un langage comme un autre. Or ce qui caractérise son investigation de littéraire, c’est de prendre à rebours la convention afin de libérer les litterae.

6 La notion de “simulacre” s’appuie alors sur cette “barrière résistante à la significa- tion”7 qui sépare les deux ordres du signifiant et du signifié. Elle renvoie aussi à la

“matrice symbolique où le je se précipite”8, selon Lacan, dès le stade du miroir.

Mais les simulacres eux-mêmes peuvent être un “étai” pour l’imagination : “pour les fantasmes (pour les images lumineuses)” (SE 167). La lecture de l’image peinte implique donc l’articulation de l’imaginaire au symbolique. La notion de simulacre met sur le devant de la scène celle de l’image dans ses différentes acceptions : image artéfactuelle, image rhétorique, image mentale, fantasme, vision onirique.

L’imago articule surtout pensée, mémoire et imagination. “On ne peut penser (noein) sans image mentale (aneu phantasmatos)” (SE 168), affirme Aristote qui dit encore que “la mémoire aussi […] ne peut exister sans image mentale”9. Chez Quignard, “phantasmatos” est traduit d’abord par “image mentale”, ensuite par

“fantasmes”. “Simulacra” devient alors synonyme de “phantasmata”. Ce rapproche- ment clairement établi par Quignard entre image mentale et fantasme souligne le rôle des représentations mentales inconscientes dans la formation des imagines, et dans le rapport du sujet au monde. Dans la rhétorique quignardienne, la pensée est un effort assidu d’extraction d’images stimulé par la véhémence de l’émotion dans l’âme. La lecture de l’image peinte s’appuie sur ce même principe. Elle s’apparente à l’interprétation des rêves et s’inspire de l’art de la mémoire artificielle. La scène figurée constitue le rébus d’un rêve que l’écrivain fait sien et dont il s’attache à révéler la signifiance c'est-à-dire le potentiel signifiant, non le sens, en y conjuguant ses propres fantasmes. L’interprétation de ce rêve procède par déplacement et par condensation, afin de configurer “l’image qui dans l’espace de la peinture est absente”10. Il faut souligner, ici, le rôle de l’étymologie et de la métaphore qui font progresser la méditation en donnant lieu à une contamination des images (image peinte, souvenirs de lectures, images qui naissent du jeu du langage). En outre, cette lecture-interprétation excède la représentation elle-même et cherche des éléments d’interprétation dans les légendes, les mythes, les récits bibliques, etc. La description de la fresque de la maison des Dioscuri commence par une méditation étymologique sur le nom de Médée. De la racine “med” dérivent “midi”, “médecine”

et “méditer”, trois mots qui sont présentés comme désignant les attributs mêmes de Médée : la fille du soleil, la magicienne, celle qui “pré-médite, c'est-à-dire qui

(4)

voit à l’avance, qui voit en songe” (CFP, 18). “Midi Médée médite” est un leitmotiv qui ponctue le texte de Quignard et sonne comme une incantation magique absorbant le lecteur lui-même dans la méditation de Médée11. En faisant intervenir l’étymologie grecque, Quignard associe la figure de Médée à celle de la Grande Mère, Cybèle, pour laquelle les hommes sacrifient leurs medea, leurs testicules. Un parallèle est alors établi entre Aphrodite, fille du Ciel, “née de l’écume du père dans la mer” et Médée, “fille du Temps”, celle qui “est le temps arrêté en elle” (ibid). Ces différentes images de Médée, se détachant sur un arrière-plan psychanalytique, non seulement multiplient les possibilités de lecture de la fresque, d’autant plus que celle-ci ne montre pas l’anecdote, mais elles illustrent, encore une fois, la complexité du rapport à la figure maternelle dans l’imaginaire quignardien.

L’image peinte devient un point de départ pour une rêverie à chaque fois renou- velée avec la même passion12, et qui donne lieu à des variantes de lecture13.

7 Les images peintes fonctionnent aussi comme des lieux de mémoire où sont placées des imagines agentes condensant un discours (un récit) qu’on cherche à se remémorer. S’agissant des peintures antiques, Quignard précise qu’elles ne se contentent pas de condenser un récit antérieur, mais “étaient aussi des supports de mémoire pour d’autres livres” (SE 157). Quignard interroge ces loci et il y loge son propre discours. Ce dont il s’agit de se souvenir, ce qu’on cherche à entrevoir derrière la représentation visible a trait à l’invisible originaire, à la scène princeps dont nous sommes issus mais que nous ne pouvons voir parce qu’elle est “im- présentable” à celui qui en est le fruit. “L’homme est un regard désirant qui cherche une autre image derrière tout ce qu’il voit” (SE 10). C’est l’Origine qui force à se retourner et à “se passionner” pour la trace. Accusant le “manque” de cette image primordiale, la description quignardienne des œuvres picturales s’apparente aux ekphraseis de la Seconde Sophistique où il s’agissait de mettre en œuvre “une parole capable de représenter non seulement des œuvres d’art déjà existantes, mais la vie elle-même, le mouvement, la nature”14. L’ekphrasis, d’abord exercice rhétorique, est fondé sur le concept aristotélicien d’enargeia (évidence, visibilité) désignant la fonction première de tout discours Ce sont donc les liens que la description entretient avec la rhétorique qui déterminent les enjeux de l’ekphrasis.

Dans ce contexte “où la rhétorique est souveraine, note Agnès Rouveret, c’est à propos d’un objet entièrement créé par l’artifice du verbe que le langage se célèbre lui-même, en sanctionnant la disparition de l’œuvre d’art”15. La description vivante n’est ainsi qu’un prétexte pour déployer la créativité poétique, les auteurs d’ekphraseis n’entendaient pas seulement imiter la peinture mais la surpasser par

“l’artifice du verbe”. Pour Quignard, il ne s’agit pas seulement d’une prouesse rhétorique, même si son texte défie, par la force de ses images et la puissance évocatrice de ses mots, la capacité de représentation visuelle de la peinture, et la surpasse en adoptant ce “flux d’implication” (RS 142) emprunté aux rêves qui donne au “songe” créé par le texte littéraire l’animation de la nature elle-même.

C’est surtout d’une expérience, existentielle et esthétique, qu’il s’agit. L’épreuve à laquelle Quignard se livre dans ses descriptions-interprétations d’images peintes est une épreuve de “dévoilement”. Alètheia est “le dévoilement d’un voile”. Elle articule la “vérité” au “non-oublié” (a-lètheia). “La vérité ôte le voile sur le passé”

(SE 132). Le dévoilement du fascinus dans la fresque des Mystères déclenche la bacchatio, cérémonie où la sexualité et la mort entretiennent des liens très étroits.

Les Mystères de Bacchus illustrent, dans l’imaginaire quignardien, l’élan érotique

(5)

et prédateur de la scène originaire qui fonde la part maudite de l’humain. Le discours quignardien, toujours tendu vers l’image de l’origine perdue, inscrit l’ekphrasis dans le mouvement d’une quête ontologique où la recherche de la

“vérité” de l’être relève du “dévoilement” d’un passé immémorial. Ce dévoilement implique une initiation au mystère originaire où se conjuguent sensibilité et imagination, sensation et réflexion. L’œuvre quignardienne tente, non pas de représenter le réel, l’invisible, mais d’en approcher le mystère, d’en capter les imagines dans leur transport, de s’y mesurer par la “puissance du dire” (RS 28) et la “violence de la pensée” (RS 60).

Une érudition à l’œuvre

8 Cette approche de l’image, qui fait droit à l’imagination et à l’émotion, ne relève pas seulement de la spéculation rhétorique. Elle mobilise une grande érudition et témoigne d’une connaissance approfondie du monde de l’art, de son histoire et de ses théories. La méditation quignardienne sur l’image, dans sa dimension rhétorique, nous invite à considérer le lien spécifique qui s’établit entre littérature et peinture. Nous retrouvons ainsi un débat ancien que Quignard reprend en remontant, non pas à la Renaissance, mais à l’Antiquité: celui de l’ut pictura poesis.

C’est justement en réfléchissant sur la peinture romaine qu’il s’exprime sur ce point. “[…] derrière une peinture ancienne, affirme-t-il, il y a toujours un livre – ou du moins un récit condensé en instant éthique” (SE 54). Cette peinture est dite

“éthique” parce qu’elle a pour fin l’expression des grandes émotions de l’âme au moment crucial du muthos que la fresque condense. Ainsi, si la parole est, comme l’affirme Simonide, “l’image des actions”, “l’instant éthique est la parole muette de l’image” (SE 60). Est-ce à dire que Quignard souscrit à l’ut pictura poesis ? La réponse n’est pas aussi évidente. Quignard établit, en effet, une distinction entre

“un véritable sens” antique de l’ut pictura poesis d’Horace et le sens “dévoyé” que cette notion a pris à la Renaissance. Pour lui, la peinture (zôgraphia) est une

“écriture du vivant” ; elle est “de l’intrigue qui s’est tue en se concentrant dans l’image” ; et c’est ainsi qu’elle “parle […] en se taisant (siôpôsan)” (SE 60). Ce qui ne signifie pas, selon Quignard, que le peintre soit un poète “taciturne”, ou que le poète soit un “peintre verbal”. Sur ce point, la position de Quignard peut être rapprochée, dans une certaine mesure, de celle de Lessing qui, dans son Laocoon, réfute ouvertement la tradition de l’ut pictura poesis issue de la Renaissance16. Pour Quignard, les “images-actions” que la peinture ancienne nous présente condensent le “vivant” en “éthos”. L’instant éthique se présente ainsi comme un potentiel signifiant, et non comme un récit en image. “Les peintures ne font pas un récit : elles font silence en demeurant à son affût”17. Ainsi, la “parole muette” de l’image (SE, 60) “se déploie, selon Vouilloux, essentiellement dans la signifiance silencieuse du langage non verbal ; comme telle elle est moins la version muette des récits verbaux que la matérialisation du geste obscur par lequel l’esprit enchaîne des images, des ombres, des rêves, des fantasmes” (NSI 45). En insistant sur la distinction entre le verbal et le non verbal, le critique centre son propos sur cette

“délégation de parole” de la poésie à la peinture fondée sur le trope de Simonide, et il finit par la décliner. En précisant que le propre de l’image, chez Quignard, n’est pas le “mutisme” mais le “silence” (NSI, 47), il laisse entendre que l’auteur récuse complètement l’ut pictura poesis. Or, ce faisant, il ne tient pas compte de la

(6)

distinction faite par Quignard (SE, 60), mais discute plutôt la lecture traditionnelle sur laquelle se fonde ce paradigme rhétorique.

9 Plutôt que d’ “en finir avec l’Ut pictura poesis”18, Quignard nous en présente une lecture qui s’écarte de celle des modernes, et des postmodernes, en replaçant ce principe dans son contexte antique afin de renouer avec son sens premier, avec sa source. Il est reconsidéré en rapport avec l’esprit, la mentalité, les représentations propres à cette époque et à cette société. Excédant le cadre rhétorique auquel ce concept est réduit, il le replace dans celui de “la mantique romaine” (CFP 29), tenant compte de “la conception que les Romains avaient de la peinture, de la danse, du théâtre, du mime, du rêve. Il s’agit d’une monstration qui doit montrer l’instant d’avant” (Sol 192) ; tenant compte aussi de leurs croyances, de leurs rites superstitieux, de leur souci du jour qui précède la mort, de l’instant qu’on cueille19. Il explique comment “la peinture romaine sort du texte latin selon une modalité très particulière : en préfigurant la scène qu’elle lit […] mais qu’elle ne montre pas sur la paroi” (CFP 29). Elle “ne s’intéresse pas à l’anecdote”, “ne montre pas la scène visible”, mais peint le dernier moment “juste avant l’instant où la scène va s’extério- riser dans le réel” (CFP 31). La peinture ancienne met en place des “éléments [qui]

sont le plus souvent laissés épars, comme des pièces de puzzle déversées en vrac sur l’espace de la table” (CFP 20). Cette isolation “volontaire” des éléments, Quignard la retrouve aussi dans la peinture de Zurbarán, dont “les contemporains disaient […] qu’il était incapable de raconter une histoire” (CFP 33)20. Il n’y a pas de syntaxe qui organise les éléments dans cette œuvre dont le principe rhétorique est la parataxe, il n’y a pas de narration.

10 Ce principe paratactique de l’image peinte n’autorise pas une lecture univoque de celle-ci. Ainsi, “ce qui est montré sur les fresques antiques, ce n’est pas du tout ce que les modernes y perçoivent : ce n’est pas Médée méditant ses meurtres. Il est possible qu’au contraire, aux yeux du peintre fresquiste, Médée cherche de toutes ses forces à émousser son désir de vengeance et prépare sa pitié, son pardon, son apatheia” (CFP 21). Il n’autorise surtout pas à inscrire l’image dans une temporalité, parce qu’elle est “en amont du temps”, elle est “le temps suspendu avant l’orage”

(CFP 21). L’image reste suspendue avant l’instant d’après. L’auteur se démarque ainsi de l’analyse que Lessing fait de l’ “instant prégnant”, défini comme “instant de l’action le plus fécond, celui qui fera le mieux comprendre l’instant qui précède et celui qui suit”21. L’accent se déplace de la succession chronologique vers le suspense et le guet. Du muthos vers l’éthos. Quignard insiste, en effet, sur l’intention qui anime le personnage (Achille, par exemple). Il s’agit pour le peintre de rendre sensible “à l’intérieur du personnage figuré la lutte entre le caractère et l’émotion”

(SE 58). L’instant éthique, c’est “le moment indécis, aporétique, entéléchique, gérondif” (CFP 31). Ainsi, l’espace de la peinture est “l’espace même de la méditation”, de la “contemplation”, du “recueillement”. L’instant éthique, c’est le

“portrait de la pensée”.

11 Cette “contemplation”, qui a à voir avec le “guet prédatif”, se comprend à partir de la conception quignardienne de la mimèsis comme “prédation”22 : “en amont de la contemplation esthétique : le guet” (CFP 23). La mimèsis est doublement enracinée dans l’origine animale de l’homme. D’un côté, avant d’être le seul à pouvoir tirer du plaisir (esthétique) des représentations qu’il fabrique, comme l’affirme Aristote dans sa Poétique, l’homme, contemplant l’image, est d’abord un prédateur qui

(7)

guette. De l’autre côté, “il partage avec d’autres animaux la tendance à l’imitation”

(NSI 153). Par là, l’imitation rejoint le mimétisme animal23, comportement qui permet, en suspendant son mouvement ou en changeant d’apparence pour se fondre dans le milieu ambiant, de leurrer sa proie, ou d’assurer sa survie. L’image peinte rejoint aussi celle du rêve, dont l’homme n’a pas l’exclusivité24. Le rêve lui- même est “une prédation imaginaire”25. L’image peinte est un guet, une prédation sur le point de se déchaîner. Elle est liée à la fascination de l’invisible. Sa contemplation est un guet : “celui qui contemple la peinture est comme un chasseur qui guette” (CFP 29). Le regard joue ici un rôle primordial. D’un côté, la fascination naît de la “corrélation entre l’apparition de la fixité du regard et la disparition du mouvement dans le visible” (CFP 36). De l’autre, chez Quignard, le regard articule, selon un mode particulier, la fascination au désir. Le regard du prédateur fascine la proie ; comme celui de Méduse, il est lié à l’engloutissement dans la mort. Pour échapper à la fascination de l’image, pour s’arracher “au face-à- face médusé”, il faut “une réflexion” (Sol 197) qui actualise la ruse de Persée, il faut un regard latéral, oblique, comme celui des matrones romaines. Ce regard oblique, dé-sidérant, est désirant, parce que tout désir est désir d’autre chose. Le regard désirant “voit ce qui n’est pas dans le vu”26. Derrière l’image peinte, le contempla- teur guette l’image qui manque, qui est le lieu de la première figuration27. En adoptant ce regard actif, il se dégage de la mort passive. Il oppose au guet de l’image “le guet de la pensée”, elle-même prédatrice : “Tout penseur, soudain, revient au moment de l’embuscade animale” (CFP 35).

12 Par cette dimension prédatrice de l’imitation, l’art s’inscrit pleinement dans le mouvement de la nature. “C’est la grande nature, le fond de l’art” (RS 67). Art et nature, c’est la même virtus qui annonce le retour du printemps. La même virulence se tient au cœur de la croissance végétale, de l’assaut prédateur, de l’acte créateur. L’art n’imite pas la nature, dans le sens de la copier. Il n’a pas non plus pour but de la sublimer par la lumière de l’esprit. Il s’agit plutôt d’un rapport d’émulation puisque l’artiste veut créer comme la nature. Le but de la peinture est d’augmenter le désir, de lutter contre la détumescence. L’art ajoute de l’élan à l’élan de la nature.

Du savoir à la connaissance

13 L’œuvre de Quignard développe une pensée de l’art qui est certainement savante, mais qui entretient un rapport particulier avec les différents savoirs qu’elle traverse et déconstruit. Pour interroger cette aventure de la pensée, il faut tenir compte de l’articulation qui s’y établit entre lecture et écriture. La lecture est une analysis, elle déconstruit les textes lus et décontextualise la pensée qui s’y développe. En-deçà du sens, elle libère l’énergie signifiante dont tout texte est porteur. L’écriture investit ce potentiel signifiant, travaillé par l’imagination, dans de nouvelles liaisons, dans des contextes différents, dans une nouvelle metaphora. Ainsi, lecture et écriture illustrent le fonctionnement métonymique et métaphorique de la pensée quignar- dienne. En effet, cette pensée tient compte de l’ancrage de la lettre dans l’incon- scient, dans le donné biologique et pathique. C’est une pensée dont la “démarche [est] pré-cartésienne”28 et pour laquelle les litterae s’articulent selon des mécanismes signifiants dont le modèle est “la signifiance du rêve”, telle que Lacan l’explique après Freud. La “signifiance du rêve” fonde la structure du langage. Elle

(8)

consiste en l’articulation du signifiant avec le signifiant, de sorte que “c’est dans la chaîne du signifiant que le sens insiste, mais aucun des éléments de la chaîne ne consiste dans la signification dont il est capable au moment même”29. Cette structure de la chaîne signifiante offre la possibilité au sujet de se servir d’une langue donnée pour signifier “tout autre chose” que ce qu’elle dit30. D’abord, à travers le rapport de contiguïté sur lequel repose la métonymie ; ensuite, à travers la substitution de signifiant à signifiant qu’opère la métaphore. La pensée quignardienne déconstruit ainsi les discours avec lesquels elle dialogue, y compris le discours psychanalytique lui-même31.

14 Quignard, procède, en effet, à une “désymbolisation du langage”32 qui vise la

“concrétude de l’idée”, l’incarnation de la pensée et du propos. Son recours à l’image, y compris à celle peinte, témoigne d’un souci d’ancrer la pensée et le langage dans leur origine oubliée dans “la contingence de la source”33. L’image picturale est elle-même considérée comme une chaîne de signifiants s’articulant entre eux. C’est ce qu’illustre d’une manière saisissante un texte comme “Comment figurer la pensée ?”, où se développe une anthropologie de la pensée et de l’image, qui souligne leur lien consubstantiel et les ancre dans les deux pulsions primaires de l’animal humain : la pulsion sexuelle et la pulsion prédatrice. Cette quête qui a pour point de départ des œuvres picturales emprunte aussi ses outils d’investiga- tion aux différentes sciences humaines. La méditation se nourrit, en l’occurrence, essentiellement de l’anthropologie.

15 Elle témoigne surtout de la singulière articulation, qui se vérifie, dans l’ensemble de l’œuvre quignardienne, entre l’acuité de la pensée critique et le déploiement de l’imagination. Réflexion érudite et fiction sont, en effet, en interaction constante dans le mouvement de cette pensée qui cherche, toujours tendue vers ce qui lui est inconnu et mobilisant dans sa quête l’ensemble des savoirs sans accepter de se plier à aucune exigence, sinon à son propre élan. L’enjeu de ce dialogue entre le critique et le fictif est double. Il est d’abord de nature épistémologique, comme le souligne D. Viart, et s’inscrit pleinement dans un contexte contemporain où sont “mises en question, dans la crise même qu’elles traversent, les conditions de possibilité de tout savoir, de toute saisie cognitive du sujet certes mais aussi de l’histoire, de l’être et du lien social, du devenir individuel ou collectif, de l’acte créateur, etc.”34. Le discours quignardien ne se présente d’ailleurs pas comme celui d’un spécialiste de l’art. Son énonciation singulière mobilise non seulement la cognition, mais surtout le pathos et l’éthos. L’art n’est pas seulement un objet de savoir, il s’adresse à la sensibilité et stimule l’imagination. L’espace de l’art n’est autre que “l’espace du secret” ouvert par l’“extase infante” en amont du langage et de la rationalité (BS 65).

16 En outre, face à la fragmentation excessive des savoirs et aux catégorisations de la pensée et de l’écriture, Quignard se présente comme un “spécialiste de rien” qui est curieux de tout. Il “conçoit la littérature comme ce lieu où s’interroge l’entièreté du divers, son origine et son mouvement”35. Si la littérature “pense plus que toute pensée” (RS 59-60), c’est aussi parce que le littéraire est un libre penseur dont l’investigation se tient “en amont de tout chemin frayé”36. Aussi s’arroge-t-il le droit de tout reprendre “de première main” et de tout fondre dans une même “recher- che” sans chemin (LDR 15).

(9)

17 En amont des systèmes, “la litteratura pense à la lettre” (RS 59), et vise moins le savoir que la connaissance. Il s’agit d’une expérience du monde qui refuse la distance (objective) et la maîtrise et engage la totalité de la personne dans une épreuve de connaissance qui suppose une immersion dans le non-savoir et où l’auteur nourrit “l’espoir de faire naître bien autre chose que ce qu’[il] conna[ît]”

(LDR 15). L’expérience a en effet un enjeu plus intime, vital. Elle est une “ré- épreuve” de l’ “extase abyssale” (BS 65) qui marque le début des jours. Dans cette expérience intérieure, la connaissance nécessite la reconnaissance de la fascination du réel, du “rien” qui fait le fond du réel (PT I 249). La pensée est ainsi liée au perdu, à l’absence, à ce “rien moteur” (248) sur lequel on ne peut fonder aucun savoir, mais où elle puise sa force de destruction tout autant que sa créativité.

Penser en lisant, en écrivant, est une sortie hors de soi où on cherche à s’y prendre avec le symptôme de la perte, non à s’y abandonner. En sacrifiant le “faux self” (BS 90), celui du cogito ergo sum, la pensée devient “possibilité de contact direct avec la vérité (avec la dénudation, avec la désidération) […]” (Sol 152). Renouveler cette épreuve avec chaque livre écrit assouvit la faim de la pensée et intensifie la vie.

Connaître, c’est aussi co-naître, renaître dans l’essor de la pensée “se retrouv[ant]

dans l’élément de l’élan qui la précède” (RS 60). Il s’agit bien d’une manière de vivre où lire, écrire, méditer, errer se fondent dans la même “extase”.

Conclusion

18 L’image peinte est donc considérée d’abord comme une empreinte renvoyant à un passé immémorial et comme un potentiel signifiant sur lequel s’exerce la pensée du littéraire soucieuse avant tout de la littera. Son déchiffrement est une extraction d’images qui s’apparente à l’interprétation des rêves et à l’ekphrasis antique. La méditation quignardienne sur l’art se révèle ainsi éminemment spéculative et s’inscrit dans le mouvement de la quête de l’origine. Elle s’appuie, cependant, sur une grande érudition et témoigne d’une maîtrise des savoirs théoriques et critiques sur l’art. L’auteur reprend, en effet, des débats qui ont marqué l’histoire de l’art et de la littérature, depuis leur source antique, tout en les considérant dans une perspective anthropologique différente de celle sur laquelle s’appuie la tradition aristotélicienne. Quignard ancre la mimèsis dans le fonds animal de l’espèce. La relation esthétique se fonde ainsi sur une conception prédatrice de l’imitation. L’art a pour fondement la nature, il s’inscrit pleinement dans son mouvement et rivalise avec elle. Tout en se référant donc à des savoirs différents, la pensée quignardienne les déconstruit et les fait dialoguer. Elle libère ainsi la signifiance du langage en visant le concret derrière le concept et en faisant appel à l’image dans son sens le plus large. Mettant en question la certitude des savoirs, elle mêle érudition et fiction dans une recherche où la connaissance exige le retour à la source. Une telle pensée a pour mérite de franchir les barrières qui délimitent conventionnellement les différents domaines, genres ou époques. L’art est considéré non tant comme un acte culturel, mais comme unemanifestation de l’élan vital. En tant que tel, il est à approcher dans une perspective multiple et dynamique qui dépasse le clivage entre le naturel et le culturel, entre l’émotion et la cognition.

Saïda Arfaoui Université de Gafsa

(10)

NOTES

1 Bernard Vouilloux, La nuit et le silence des images. Penser l’image avec Pascal Quignard, Paris, Hermann, 2010, p. 15. (Dorénavant NSI.)

2 Pascal Quignard, Le sexe et l’effroi, Paris, Gallimard, 1994, p. 220. (Dorénavant SE.)

3 Pascal Quignard, Pascal Quignard le solitaire. Rencontre avec Chantal Lapeyre-Desmaison, Paris, Les Flohic, 2001, p. 193. (Dorénavant Sol.)

4 “[…] notre espèce semble être scrupuleusement tenue en laisse par le besoin d’une régurgitation linguistique de son expérience”. Pascal Quignard, “La déprogrammation de la littérature”, Écrits de l’Éphémère, Paris, Galilée, 2005, p. 236.

5 Agnès Rouveret, Histoire et imaginaire de la peinture ancienne (Ve siècle av. J.-C. – Ier siècle ap. J.-C.), École française de Rome, 1989, p. 405.

6 Pascal Quignard, Petits Traités II, Paris, Gallimard, 1997, <folio>, p 81.

7 Jacques Lacan, “L’instance de la lettre dans l’inconscient, ou la raison depuis Freud”, Ecrits 1, Paris, Éditions du Seuil, 2006, p. 254.

8 Jacques Lacan, “Le stade du miroir”, Ecrits 1, op. cit., p. 90.

9 Cité par Agnès Rouveret, op. cit., p. 387.

10 Pascal Quignard, “Comment figurer la pensée ?”, Portraits de la pensée, sous la direction d’Alain Tapié et Régis Cotentin, Catalogue d’exposition, Palais des Beaux Arts de Lille, Éditions Nicolas Chaudun, 2011, p.

20. (Dorénavant CFP.)

11 La même rêverie étymologique se développe, plus loin, à partir des noms de Merméros et de Tragos (CFP, 24).

12 C’est notamment le cas pour la fresque de la maison des Dioscures. Quignard médite sur cette fresque essentiellement dans Le sexe et l’effroi et dans “Comment figurer la pensée ?”. Il a aussi écrit un livret d’opéra intitulé Medea (Éditions Ritournelles, 2011).

13 Dans Le sexe et l’effroi, Quignard présente “deux interprétations possibes de l’attitude et du regard de Médée”, en optant pour celle selon laquelle c’est “l’irrésistible acte, l’irrésistible instant de mort” qui

“monte en elle (190). Dans “Comment figurer la pensée ?”, il insiste, au contraire, sur l’hésitation de Médée, sur les pulsions contraires qui luttent et “divergent en elle” ; il précise que Médée “n’a pas encore d’intention”, elle est “partagée”, “déchirée” (18). Si dans le premier cas la fresque est lue à la lumière du texte qu’elle “condense”, celui d’Euripide, dans le second cas l’accent est mis sur la figuration de la pensée, sur la méditation “dans l’instant d’avant de la décision” (21).

14 « Ekphrasis » (http://arts.ens-lyon.fr/peintureancienne/antho/menu2/partie5/antho_m2_p5_04.htm)

15 Encyclopaedia Universalis , article “Critique d’art, antiquité gréco-romaine”.

16 Sa réfutation vise, d’abord, certains “critiques vicieux” de son époque qui s’évertuaient à comparer systématiquement, sur le même sujet, des ouvrages poétiques et picturaux, en tenant les différences pour des “fautes”. Elle vise aussi les peintres allégoriques de la seconde moitié du XVIIIe siècle qui “veulent faire de la peinture un poème muet avant d’avoir examiné dans quelle mesure elle peut exprimer les idées générales sans s’éloigner de sa destination naturelle et sans devenir une écriture arbitraire”. Elle vise enfin les poètes “descriptifs” qui “ont voulu faire de la poésie une peinture parlante sans savoir précisément ce qu’elle peut et doit peindre”. Elisabeth Décultot, “Le Laocoon de Gotthold Ephraim Lessing. De l’imagination comme fondement d’une nouvelle méthode critique”, Les études philosophiques, 2003/2-n°65, p. 197-212.

17 Pascal Quignard, La nuit et le silence. Georges de La Tour, Paris, Flohic Éditions, 1995, p. 53.

18 Nicolas Wanlin, “Pour en finir avec l’Ut pictura poesis”, Acta fabula, vol. 5, n° 3, Été 2004 [en ligne].

URL : http://www.fabula.org/revue/document518.php, page consultée le 27 mars 2014.

19 Quignard cite dans Le sexe et l’effroi une discussion rapportée par Sénèque le Père, qui porte sur l’instant qui précède la mort et que chacun doit assumer personnellement (SE 251).

20 Ibid., p. 33. Pour confirmer ses propos sur cette isolation des éléments dans l’œuvre de Zurbarán, Quignard cite deux historiens de l’art, César Péman et Jullian Gallego.

21 Gotthold Ephraim Lessing, Laocoon, Paris, Hermann, 1990, p. 120-121.

22 “La mimèsis ou l’admiration, qui consistent l’une comme l’autre à se laisser posséder par le comportement de l’autre, de la bête, de la montagne, de la cime de la montagne, du vautour, est une prédation plus ancienne que la représentation elle-même à laquelle elle donne naissance.” Pascal Quignard, Rhétorique spéculative, Paris, Calmann-Lévy, 1995, p. 58. (Dorénavant RS.)

23 Les réflexions de Roger Caillois sur le mimétisme animal, dans Méduse et Cie, constituent une référence majeure pour Pascal Quignard. Cf. Bernard Vouilloux, op. cit., p. 154.

24 Pascal Quignard, Rhétorique spéculative, op. cit., p. 140.

25 Pascal Quignard, Les Paradisiaques, Paris, Grasset et Fasquelle, 2005, p. 38.

26 Pascal Quignard, Vie secrète, Paris, Gallimard, 1998, p 170.

(11)

27 “La figuration est l’étreinte qui reproduit le même dans le portrait craché où les ascendants croient se reconnaître et se refigurer”. Pascal Quignard, Pascal Quignard le solitaire, op. cit., p. 198-199.

28 Dominique Viart, “Les fictions critiques de Pascal Quignard”, Études Françaises, vol. 40, n°2, 2004, p.

25-37. URL : http://id.erudit.org/iderudit/008807ar

29 Jacques Lacan, “L’instance de la lettre dans l’inconscient, ou la raison depuis Freud”, art. cit., p. 260.

30 Ibid.

31 En témoignent son interprétation du stade du miroir, sa déconstruction du complexe d’Œdipe dans Le sexe et l’effroi et celle du mythe de la horde primitive dans Rhétorique spéculative.

32 Dominique Viart, art. cit.

33 Pascal Quignard, La Barque silencieuse, Paris, Seuil, 2009, p 61. (Dorénavant BS)

34 Dominique Viart, art. cit.

35 Ibid.

36 Pascal Quignard, “Lettre à Dominique Rabaté”, Europe, n°976-977, août-sept. 2010, p. 15. (Abrégé en LDR)

Références

Documents relatifs

La gouvernance envisagée pour l’eurozone la place sur une trajectoire de collision frontale avec le modèle social. En fait sans véritable solidarité financière, budgétaire, sociale

Meyerson précise qu’il ne vise pas le pan-algébrisme de l’école de Marburg, pourtant présenté comme la « forme la plus définie » d’idéalisme

The spectra for each target were analyzed with a model consisting of an optically-thin, thermal plasma model (the astrophysical plasma emission code 33 or ‘APEC’, version v3.0.9

Chez nous, et quelles que soient ses ventes, l’auteur est invité à se voir comme à l’origine du livre, alors même que la majorité des ouvrages publiés sont en fait des ouvrages

: Alors, on pourrait résumer la question de la création artistique de la manière suivante : dans l’art, l’artiste lui-même n’est pas tellement

Récapitulant la « vie de Saint Alexis » racontée dans Les Paradisiaques, le texte montre l’identité de deux figures établies individuellement à des moments

Ils soutiennent que pour qu'une traduction soit considérée comme étant un acte réussi, elle doit principalement chercher des équivalences dans la culture cible afin de

A l’heure actuelle, combien d’entre nous sont au travail sur des savoirs qui auraient les caractéristiques décrites : des savoirs qui portent sur des objets qui