868
SYNTH ÈSE
médecine/sciences
1 994 ; J O : 863-73Arnaud Ferry Michel Rieu
ADRESSE
A.
Ferry: professeur des universités
àl 'UFR sciences et techniques des activités ph y siques et sportives.
M. Rieu: professeur de physio1ogie
à{a faculté de médecine Cochin-Port-Royal.
Laboratoire de physiologie des adaptations, université Paris V, 24, rue du Faubourg
Saint:Jacques, 75014 Paris, France.
Adaptation des systèmes physiologiques
à l'activité physique
La course de type
«endurance
»sur tapis roulant motorisé chez le rat, principal modèle animal d'exercice musculaire, induit les mêmes adaptations du transport d� l'oxygène et du système musculaire que celles observées chez le sportif humain. Ce modèle animal d'activité physique devrait per
mettre l'étude des processus cellulaires et moléculaires adaptatifs impliqués dans la plasticité musculaire (régula
tion de l'expression des gènes de la myosine, des enzymes mitochondriales ... ). Les résultats de ces études devraient permettre, en outre, de proposer les mesures appropriées pour lutter contre la désadaptation physiologique qui apparaît lors d'une sédentarité forcée (sujet hospitalisé, greffé, spationaute ... ) ou au cours du vieillissement.
N ous focal i serons n o tre attention sur un type par
ticulier d ' activité p hy
sique défini par le terme d'endurance et dont le prototype est le marathon ( 42,3 km) . Les réponses p hysiologiques du marathonien ont été récem m e n t décrites [ 1 ] . Cet exercice musculaire est réalisé à une intensité modérée (la consommation maximale d'oxy
gène n ' est pas atteinte) pendant plus de deux heures. Plusieurs mil
liers de Français pratiquent, plus ou m o i n s régu l i è r e m e n t , ce type d'effort dans le cadre de la compéti
tion sportive, des loisirs ou encore dans celui de la santé publique [2] . C'est d'ailleurs un adjuvant théra
peutique de plus en plus prisé de certaines maladies m é taboliques (principalement le diabète) ou car
diovasculaires [3, 4 ] . Toutefois, afin
d'explorer les mécanismes cellulaires et moléculaires impl iqués dans la réponse de l'organisme à l'exercice musculaire, les physiologistes ont dû développer des modèles animaux mimant l'activité physique humaine, principalement du fait de la nature
<<
invasive" de certaines techniques
utilisées.
1 Pertinence
des modèles animaux Dans la littérature internationale, plusieurs modèles animaux d'exerci
ce musculaire ont été décrits. Que ce soit pour déterminer l'effet isolé ou aigu (induit par une seule séance d'effort) ou l'effet chronique (induit de façon durable par l'entraînement physique) de l'exercice musculaire, ces modèles animaux ont été déve
loppés principalement chez le ron-
m/s n• 8/9 vol. JO, août-septembre 94
geur et plus particulièrement chez le rat. Le plus utilisé est la course sur tapis roulant motorisé. La vitesse de la course de l'animal ainsi que sa durée sont rigoureusement réglées en fonction de l'âge, des capacités physiques des animaux et des objec
tifs expérimentaux (effort d'endu
rance modéré, intense, voire même conduisant à l ' épuisem e n t p hy
sique), de telle sorte que ce modèle induit des effets parfaitement repro
ductibles. Mais ce modèle animal d'exercice musculaire est-il pertinent : la course sur tapis roulant chez le rat reproduit-elle les effets de la course chez l'humain
?Répondre à cette question nécessite de comparer leurs effets respectifs sur les grands sys
tèmes physiologiques : neuroendo
crinien (Tableau !) [ 5] , cardiovascu
laire (Tableau II) [6-10] , locomoteur (muscles des membres inférieurs) (Tableau III) [8, 9, 1 1-13] et immuni
taire (Tableau IV) [ 1 4, 1 5 ] . Dans
1'
état actuel des connaissances, on peut conclure que la course sur tapis roulant chez le rat est un modèle globalement satisfaisant de la course chez l'humain, car l'effet chronique de la course sur tapis roulant chez le rat reproduit les mêmes adaptations que celles observées chez l'humain entraîné à la course d'endurance.
Ces dernières conduisent, principa
lement, d'une part, à l'augmentation du transport maximal de l'oxygène via celle du volume maximal d'éjec
tion systolique [7] et, d'autre part, à l'accroissement des capacités oxyda
rives des fibres musculaires squelet
tiques recrutées lors de l'effort [8, 9, 1 1 ] . Cette augmentation du métabo
lisme oxydatif musculaire résulte du nombre plus élevé de mitochondries et de fibres musculaires squelet
tiques de type lia (fibres à contrac
tion lente et au métabolisme princi
palement oxydatif) et d'une capilla
risation musculaire plus importante.
La même conclusion peut être réali
sée à propos de l'effet isolé (aigu) de la course puisqu'une seule séance d ' exercice chez le rat induit les mêmes réponses de la part des sys
tèmes physiologiques que celles observées chez l'humain, en par_ticu
lier : augmentation des concentra
tions sanguines des catécholamines et des glucocorticoïdes, et accroisse
ment du transport de l'oxygène et du métabolisme énergétique muscu-
m/s n • 8/9 vol. 10, août-septembre 94
laire (Tableaux I,
IIet III). On peut également noter que l'exercice mus
culaire n'affecte pas seulement les systèmes physiologiques directement responsables, a priori, de l'activité motrice (neuroendocrinien, cardia
vasculaire et musculaire) , mais égale
ment d'autres systèmes, tel le systè
me immunitaire (Tableau IV). Par exemple, l ' exercice isolé mobilise dans le sang certaines sous-popula
tions de cellules T (CDs+) ou les cel
lules tueuses naturelles (NK) depuis des compartiments de l'organisme non encore identifiés avec certitude.
De plus, cette modulation des effec
tifs des cellules immunocompétentes induite par l'exercice est également associée à des modifications des fonctions in vitro de ces cellules ( ré ponse proliférative aux m i ta
gènes, production de cytokines, acti
vité cytotoxique . . . ) [ 1 4- 1 6 ] . Les mécanismes à l'origine des modula
tions immunologiques associées à l' exercice sont vraisemblablement neuroendocriniens (catécholamines, glucocorticoïdes ... ) [ 1 5, 16] .
En dehors de la course sur tapis rou
lant, on peut également forcer le rat à nager dans un bassin. Mais ce type de stress - conduisant à des réponses hormonales globalement similaires à celles de la course sur tapis roulant (bien que parfois plus accentuées) - peut-il être, également, considéré comme un modèle d'exercice mus
culaire
?En comparant les effets chroniques de la nage et de la cour
se sur tapis roulant, on constate que ces deux modèles animaux induisent des réponses physiologiques qui dif
fèrent de façon notable. En effet, contrairement à la course sur tapis roulant, la nage induit d'importantes modifications du myocarde : hyper
trophie, augmentation du pourcen
tage de l'isoforme V1 de la myosine dans le ventricule (isoforme portant l'activité ATPasique la plus élevée) , e t accroissement de l a densité mito
chondriale et de certaines activités enzymatiques du cycle de Krebs et de la chaîne respiratoire [6, 1 0] . On ignore actuellement si de telles modifications pourraient être obser
vées chez l'homme. De plus, la nage chez le rat n 'induit aucun change
ment notable au niveau des muscles des membres inférieurs, contraire
ment à la course sur tapis roulant [8, 1 0 ] . A la lumière de ces résultats
divergents et compte tenu du fait que la nage c h ez le rat est u n e forme d e stress physique dont o n p e u t diffi c i l e m e n t faire varier l'intensité (contrairement à la cour
se sur tapis roulant) , et qui compor
te de fréquentes phases d'apnée, il ne semble pas toujours justifié de l'utiliser comme modèle d'exercice musculaire d'endurance, du moins dans le cadre de 1' étude des proces
sus adaptatifs au niveau du système locomoteur.
Par ailleurs, compte tenu du nombre croissant de publications internatio
nales utilisan t ce procédé, il faut s'interroger sur la pertinence de l ' électrostim ulation de basse fré
quence ( 1 0 Hz) du muscle squelet
tique. Ce modèle, appliqué au rat, conduisant vraisemblablement à la contraction de toutes les fibres mus
culaires de type
1(lentes et oxyda
rives) , reproduit-il les mêmes effets que le fonctionnement musculaire in vivo lors de la course
?Bien que la forme de cette contraction muscu
laire ne soit que de nature concen
trique (contraction avec raccourcis
sement du muscle) , contrairement à la course sur tapis roulant, il ressort que l' électrostimulation induit glo
balement les mêmes adaptations musculaires que la course sur tapis roulant [ 1 7, 1 8] . Toutefois, ce modè
le d'hyperactivité musculaire n'affec
te probablement que le muscle sti
mulé et non les autres muscles ni les systèmes neuroendocrinien et car
diovasculaire. De plus, on peut noter que les séances d'activité musculaire induite par stimulation électrique de basse fréquence sont d'une durée très nettement supérieure ( 10h/24h) à celle imposée dans la course sur tapis roulant ( 1-2h/24h ) . Il faut bien distinguer, enfin, ces modèles d'acti
vité motrice soutenue (course sur tapis roulant, nage, électrostimula
tion de basse fréquence) , du modèle d'hypertrophie compensatoire résul
tant de l'ablation des muscles syner
gistes, car ce dernier provoque une hypertro p h i e très marquée du muscle squelettique [ 1 9] .
1 Perspectives
A l a l u m iè re d e q u e l q u e s très récentes publications, le modèle ani
mal de la course sur tapis roulant chez le rongeur promet d'être un
869
870
RÉFÉRENCES
l . Rieu M. La biologie du sportif.
La
recherche 1992 ; 245 : 878-87.
2.
Rieu M. Santé, sédentarité et activité physique.Santé publique 1 990 ; 4 : 26-35.
3.
Galbo H , von Li nstow M , Dela F, Kjaer M. Exercise and diabetes. In : Sato Y, PoortmansJ,
HashimotoI,
Oshida Y, eds.Integration of medical and sports sciences.
Base1: Karger,
1 992 : 227-36.
4.
Haskell WL, Leon AS, Caspersen CJ, Wilson PWF. Cardiovascular benefits and assessment of physical activity and physical fitness in adults.Med Sei Sport Exerc 1 992 ; 24
(suppl): S201 -20.
5.
Pesquies PC, Guezennec CY. Commande hormonale du métabolisme énergétique lors de l'exercice musculaire. In : Rieu M, ed.Bioénergétique de l'exercice musculaire et de
1'entraînement physique.
Paris : Presses Universitaires de France,1 988 : 271-87.
6.
BaldwinKM
. Effects of chronic exercise on biochimical and functional properties of the heart.Med Sei Sports Exerc 1 985 ; 1 7 : 522-8.
7.
ScheuerJ,
Tipton CM. Cardiovascular adaptations to physical training.Annu Rev Physio/ 1 977 ; 3g : 221-5 1 .
8 .
BaldwinKM
, Cooke DA, Cheadle WG.Time course adaptations in cardiac and skeletal muscle to different running programs. f
Appl Physio/ 1 977 ; 42 : 267-72.
9.
Booth FW, Thomason DB. Molecular and cellular adaptation of muscle in response to exercise : perspectives of various models.Physiol Rev 1 991 ; 71 : 541- 74.
1 0 .
Pagani E D , Solaro R]. Swimming exercise, thyroid state, and tl1e distribution of myosin 1soenzymes in rat heart.Am
fPhysio/ 1 983 ; 245 : H71 3-H20.
1 1 .
Holloszy]0 ,
Coyle EF. Adaptations of skeletal musc1e to endurance exercise and their metabolic consequences.J Appl Physio/ 1 984 ; 56 : 831-8.
1 2.
Fitzimons DP, Diffee GM, Herrick RE, BaldwinKM
. Effects of endurance exercise on isomyosin patterns in fast- and slowtwitch skeletal muscles. ]
Appl Physiol 1 990 ; 68 : 1 950-5.
Ta bleau 1
EFFET DE LA COU RSE D ' E N D U RANCE SUR LE SYSTÈ M E N E U ROENDOCRI N I E N
Rat Effet de l'exercice chronique
CRF-ACTH-gl ucocorticoïdes
=LH, FSH-a ndrogè nes sexuels - TSH-hormones t hyroïdiennes
= ,+, - Effet de l'exercice isolé
Catécholamines +
Insuline -
Hormone de croissance +
CRF-ACTH-g l ucocorticoïdes + LH, FSH-a ndrogènes sexuels - TSH-hormones thyroïd ien nes
?..
.
'= . pas de vanat10n , + : sttmulatJOn ; - tnhtbttJOn ; ? non determme . D'après [1, 5, 9]
Tableau I l
=,
+
EFFET DE LA COURSE D ' E N D U RANCE SUR LE SYSTÈ M E CAR DIOVASCULAIRE
Rat Effet de l'exercice musculaire chronique F réquence cardiaque
Vol u me éjection systolique
vo2max (à l a bouche) M asse cardiaque M yosine1
Enzymes oxydatives (V
ma.l Effet de l'exercice isolé F réquence cardiaque
Vol u me d'éjection systolique
vo2(à la bouche)
1 : isoformes du ventricule (V1-V3).
D'après [6-10].
- + + + (femelle)
=
=
+ + +
• : augmentation ; -: diminution ; = : sans changement ; ? : non déterminé.
Ta bleau I l l
EFFET DE L A COURSE D ' E N D U RANCE SUR LE SYSTÈM E LOCOM OTE U R ( M U SCLES DES M E M BRES I N FÉ R I E U RS)
Rat Effet de l'exercice musculaire chronique
M asse
=Fibres m usculaires1 -lib, + l l ( a ) (+1)
ATPase2
-Ca pilla risation (densité) +
M itochond ries (densité) +
Enzymes oxydatives3 (V
ma.l +
Util isation su bstrats4 +li p ides
Homme
idem idem idem
idem idem
-
- idem
Homme
idem idem idem idem
?
?
idem idem idem
Homme
idem idem idem idem idem idem idem
1 : pourcentage de fibres /lb (rapides et glycolytiques), 1 (lentes et oxydatives) et /la (tntermédiaire), selon la classification histo-colorimétrique (myosine A TPase acido- ou alcalino- résistante).
2 : activité A TPase de la myosine portée par les chaînes lourdes de la myosine.
3 : enzymes du cycle de Krebs et de la chaine respiratoire.
' : davantage d'acides gras sont oxydés au détriment du pyruvate.
• : augmentation ; - : diminution ; = : sans changement. D'après [8, 9, 1 1-13].
m/s n• 8/9 vol. JO, août-septembre 94
Tableau IV
E FFET DE LA COURSE D ' E N D U RANCE SUR LE SYSTÈ M E I M M U N ITAI RE
Rat Homme
Effet de l'exercice musculaire chronique Effectifs des cel l u les i m m u n itaires
Circula ntes1 = idem
Thym us2 =, - ?
Fonctions in vitro des cel l u les i m m u n itai res3
C i rcula ntes1 ? =
Rate4 + ?
Effet de l'exercice isolé
Effectifs des cel l u les i m m u n ita i res circulantes1
+ idem
Fonctions in vitro des cel l ules i m m u n itaires
Circula ntes2 ? -
Rate4 +, =, - ?
1 : principalement lymphocytes T et cellules natural ki lier.
2 : organe lymphoide primaire où se fait la maturation/différenciation des lymphocytes T.
3 : activité cytotoxique des cellules T ou des cellules natural ki lier, réponse pro/itérative des
lymphocytes T ...
• : l'un des principaux organes lymphoides secondaires.
• : augmentation ; - : diminution ; = : sans changement ; ? : non-déterminé. D'après : [14- 16}.
Tableau V
E FFET DE LA COU RSE D ' E N DU RANCE SUR LE SYSTÈ M E RESPI RATO I R E
( D IAPHRAG M E )
Rat Homme
Effet de l'exercice musculaire chronique
F i b res musculaires (%)
crura l = ?
costal + l i b -lia ?
Ca pillarité (costa l ) =, + l i b ?
E nzymes oxydatives1 (V ma.l + ?
crura l = ?
costal + ?
1 : enzymes du cycle de Krebs et de la chaine respiratoire.
• : augmentation ; - : diminution ; = : sans changement ; ? : non-déterminé. D 'après [29, 31, 32}.
modèle physiologique de premier ordre pour l'étude des processus cellulaires et moléculaires adapta
tifs i m pl i qués dans l a plastic i té musculaire. A titre d ' exemple, il a été m o n tré que l ' effe t c h ro
nique de la course sur tapis rou
lant chez le rat induit la synthèse de la cytochrome oxydase ( enzy
me de l a c h aî n e r e s p i ra to i r e ) dans l e muscle squelettique, sans modification de la quan tité des AR messagers de ses sous-unités [ 2 0 ] . De t e l s c h a n g e m e n ts
m/s n • 8/9 vol. 10, août-septembr-e 94
concernant l ' expression de cette h é t é r o p r o té i n e s u g g è r e n t d e s régu l a t i o n s p o s t-tran s c r i p t i o n nelles d o n t l e s déterminan ts i n s i t u so n t e n c ore i n c o n n u s . D e même, o n peut s'interroger sur la n a t u r e de la r é g u l a t i o n d e
1
' e x p r e s s i o n c o o r d o n n é e d e s gènes des con stituants submolé
c u l a i r e s d e l a m yo s i n e ( d e u x chaînes lourdes, MHC ; e t quatre chaînes légères, MLC) qui inter
viennent après un en traînement physique chez le rat. En effet, les
régulations induites par l'exerci
ce musculai re c h r o n i q u e - q u i so n t s p é c i fi q u e s d e s m u s c l e s ( l e n t/ r a p i d e , l o c o m o t e u r / d i a p h rag m e ) - c o n d u i s e n t à d e s modifications d e l a quantité des différentes isoformes des chaînes l o u r d e s ( M H C , my o s i n heavy chains) et légères ( MLC, myosin light chains) de la myosine dans les m u s c l e s l o c o m o te u rs : c e r
taines isoformes c aractéristiques des fibres musculaires rapides de type lib ( MH C l i b, LC 1 s, LC2f et LC3f) s o n t remplacées par des i s o fo r m e s c a r a c té r i s t i q u e s d e s fibres musculaires lentes d e type
1e t i n te r m é d i a i r e s d e t y p e I l a (MHCIIx, MHC lia, et LC2s) . Ces dern ières e x p l i q u e n t les transi
tions, du même ordre, des iso
fo r m e s d e l a m yo s i n e n a t i v e ( d i m i n u t i o n d e l ' i s o fo r m e d e myosine F M 3 et augmen tation d e l ' isoforme l M ) [ 1 2 , 1 3] . C e s tran
sitions d ' isofo r m e s d e s c h aî n e s lourdes de myosi ne sont évidem
ment suivies de modifications du mode de contraction de la fibre musculaire ( l e n t , i n termédiaire ou rapide) dans la mesure où ce sont ces chaînes lourdes qui por
te n t l ' a c t i v i té A T P a s i q u e . O n constate égale ment, chez l e rat entraîné en endurance, une aug
mentation quanti tative du princi
pal tran sporteur du glucose du muscle strié squelettique, GLUT-4 [ 2 1 ] . De plus, une seule séance d'exercice conduit à la transloca
tion du GLUT-4 du compartiment microsom al à la membrane plas
mique [ 2 2 ] . L' étape limitante de l ' u t i l i sa t i o n du g l u c ose c o m m e substrat é n e rgé t i q u e paraissant être son transport, o n comprend 1' intérêt que représen te l ' en traî
n e m e n t physique p o u r le suj e t diabétique. I l reste m algré tout à déterm i n e r les fact e u rs con trô
lan t
1'expression de cette protéi
ne. Mais ce modèle d 'exercice muscu
laire (course sur tapi s roulant) p e u t égal e m e n t avo i r q u e l q u e s effets néfastes. I l p e u t activer la mort par apoptose des thymocytes [ 23] ou, encore, induire la mort par nécrose de ce rtai n e s fi bres m u s c u l a i r e s r e c r u t é e s l o r s d e l ' effort [ 24 ] . Dans l e cas de l a
nécrose des fibres musculaires -
----•87 1
872
RÉFÉRENCES
1 3.
Guezennec CY, Gilson E, Serrurier B.Comparative effects of hindlimb suspension and exercise on skeletal muscle myosin isoenzymes in rats.
Eur
JAppl Physiol 1990 ; 60 : 430-5.
1 4.
Shephard RT, Verde TJ, Thoams SG, hek P. Physicaf activity and the immune system.Canj Spt Sei 1991 ; 1 6 : 1 63-85.
1 5 .
Ferry A. Immunomodulations liées à l'exercice musculaire : les modulations des effectifs des cellules immunocompétentes.Sei Motr 199 1 ; 13 : 48-56.
1 6.
Ferry A. Immunomodulations liéesà
l'exercice musculaire : les modulations des activités des cellules immunocompétentes.Sci Motr 1 99 1 ; 1 4 : 46-53.
1 7 .
Pette D , Staron R. Cellular and molecular diversities of mammalian skeletal muscle fiber . RevPhysiol Biochem Pharmacol 1990 ; 1 1 6 : 2-47.
1 8 .
Bar A, Simoneau JA, Pette D. Altered ex pres ion of myosin light-chain isoforms in chronically stimulated fast-twitch muscle of the rat.Eur J Biochem 1 989 ; 1 78 : 591-4.
19.
Tsika RW, Baldwin KM. Time course adaptations in rat skeletal muscle isomyosins durin_g compensatory growth and regression.j Appl Physiol 1 98 7 ; 63 : 2 1 1 1-2 1 .
20.
Town GP, Essig DA. Cytochrome oxydase in muscle of endurance-trained rats : ubunit mRNA contents and herne synthesis.j Appl Physiol l993 ; 74 : 1 92-6.
2 1 .
Slentz CA, Gulve EA, Rodnick KJ , Henriksen EJ, Youn J H , Hol loszy J O . Glucose transporters and maximal transport are increased in endurancetrained rat sol eus.
j Appl Physiol 1992 ; 73 : 486-92.
22.
Goodyear LJ, Hirshman MF, Horton ES.Exercise-mduced translocation of skeletal musc�e gl�cose transporters.
A
rnj Physiol 1 99 1 , 261 . E795-9.
23.
Concorder JP, Ferry A. Physiological programmed cell death in thymocytes is mduced by physical stress (exercise).Am ] Physio/ 1993 ; 265 : C626-9.
24.
Olgivie RW, Armstrong RB, Baird KE, Bottoms CL. Lesions in the rat oleus muscle following eccen trically biasedexercise.
Am] Anal 1988 ; 1 82 : 335-46.
25.
Darr KC, Schultz E. Exercise-induced satellite cell activation in growing and mature skeletal muscle.j Appr Ph ysio/ 1 987 ; 63 : 1 8 1 6-2 1 .
26. McCormick KM
,Thomas DP. Exercise
induced satellite cell activation in senescent sol eus muscle. j Appl Physio/ 1 992 ; 72 : 888- 93.
27.
Booth FW, Linderman JK, Kirby CR.Molecular mechanisms of muscle disuse atrophy (and strategies of prevention) . In : Sato Y, Poortmansj, Hashimoto I, Oshida Y, eds.
Integration of medical and sports sciences.
Base! : Karger,
1 992 : 142-9.
28. Stebbins CL, Shultz E , Smith RT, Smith EL. Effects of ch ronic exercise during ageing and muscle and endplate morpnology in rats. j Appl Physio/ 1985 ; 58 : 45-51 .
29.
Powers SK, Lawler J, Criswell D , Lieu FK, Martin D . Aging and respiratory muscle metabolicJ
fasucity : effects of endurance training.Appl Physio/ 1992 ; 72 : 1 068-72.
30.
Advani SV, Geenen D, Malhotra A, Factor SM, Scheuer J. Swimming causes mysosin adaptations in the rat cardiac isograft.Circ Re s 1990 ; 67 : 780-3.
3 1 .
Suguira T, Morimoto A, Murakami N.Effects of endurance training on myosin heavy-chain isoforms and enzyme activity in the rat diaphragm.
Pjlugers Arch 1 992 ; 421 : 77-8 1 .
32.
Tamaki N . Effect of endurance training on muscle fiber type composition and capillary supply in rat diaphragm.Eur j Appl Physiol l987 ; 56 : 1 27-31 .
33.
Baracos E. Exercise inhibits progressive growth of the Morris hepatoma7777
in male and female rats.Gan
JPhysiol Pharmaco/ 1988 ; 67 : 864-70.
34. Ferry A, Le Page C, Rieu M. Sex as determining factor in the effect of exercise on in vivo autoimmune response, adjuvant arthritis. J Appl Physio/ 1994 ; 76 : 1 1 72-5.
35.
Le Page C, Ferry A, Rieu M. Effect of muscular exercise on chronic releasing experimen tal autoimmune encephalomyelitis, as
in vivo
marker of immuned ' a u t a n t p l u s m a r q u é e q u e l a c o u rse e s t i n te n s e ( v i tesse de c o u rse é l evé e ) e t que l ' e ffo rt comporte une composante excen
trique i m p ortante ( c o n traction musculaire lors de l ' é tirement du m uscle ) -, elle est suivie par la régénération des tissus musculaires lésés. Il a été démontré que la libé
ration de p rotéines m usculaires (créatine kinase, myosine ... ) dans le sang - due à la perte d'intégrité au niveau cellulaire et au niveau de l'ultrastructure de certaines fibres musculaires de type lent [23] - est associée à l'activation des cellules satellites [25, 26] , cellules mononu
cléées situées à la périphérie des fibres musculaires. La prolifération de ces cellules satellites, puis leur fusion, entre elles ou avec les fibres musculaires existantes, participent alors à la régénération du muscle.
L'étude de ce cycle de dégénéres
c e n c e / régénération m u scul aire induit par l'exercice isolé, en parti
culier celle des facte urs mitogé
niques et de différenciation impli
qués dans ce cycle, devrait contri
buer à la compréhension de cer
taines myopathies impliquant ces mêmes phénomènes.
En d e h o rs de ces i l l u s trations d'approches fondamentales concer
nant en premier lieu la plasticité m us c u l a i r e , l ' u ti l i s a t i o n de c e modèle d'exercice musculaire chez le rongeur permet de vérifier dans quelle mesure l'entraînement phy
sique régulier chez le sujet vieillis
sant, convalescent à la suite d'une h ospitalisation prolongée, greffé (cardiaque, rénal. . . ) , voi re même chez le spationaute, est une mesure appropriée pour lutter contre la désadaptation physiologique qui apparaît chez ces sujets. Celle-ci est caractérisée par une atrophie mus
culaire, induite par l'altération des d i ffé r e n t e s fo n c t i o n s p hysiolo
giques, par l a d i m i n ution de l a densité osseuse e t d e l a consomma
tion maximale d'oxygène, et pose de graves p r o b l è m e s de santé p u b l i q u e , c o m p te te n u du très importan t handicap physique de tels sujets. Un nombre grandis ant d'études expérimentales indiquent que l ' exercice musculaire ch ro
nique régulier diminue les effets délétères de ces périodes de réduc
tion marquée de l'activité physique
m/s n' 8/9 vol. 10, août-septembre 94
chez les populations animales cor
respondantes [27-30] . Par ailleurs, à la lumière de certai ns travaux récents, il semble que le diaphrag
me - principal muscle du système respiratoire et seul muscle strié vital - s'adapte de façon étonnante à l'exercice musculaire chronique puisque l'une de ses deux régions (costale) adopte une composition ce Il u l a i re pl us rie he en fi bres rapides de type I lb (contrairement aux muscles locomoteurs) (Tableau
V) [29, 3 1 , 32] . Ces résultats concer
nant le diaphragme. S'ils sont trans
posables à l'homme, peuvent-ils être à l'origine d'une amélioration de la fo n c t i o n respi rato ire chez des patients présentant des déficits dans ce domaine ? Enfin , indépendam
ment d'une amélioration de l'hygiè
ne de vie, l'entraînement physique régulier chez le rongeur est associé à un accroissement de l'immunité an titumorale [33] ainsi qu'à une diminution du développement de certaines maladies auto-i mmunes expéri m e n tales t e l l e s que les modèles animaux de l'arthrite rhu
matoïde et de la sclérose en plaques [34, 35] .
En conclusion, ce modèle animal d'exercice musculaire chez le ron
geur - bien que peu étudié e n France, contrairement aux autres nations de niveau socio-économique équivalent au nôtre - représente un modèle pertinent de l'activité phy
sique humaine. Il est aussi promet
teur car il permet d ' explorer les mécanismes responsables des adap
tations cellulaires et moléculaires induites par les modifications du m i l i e u i n térieur, associées à l'exercice musculaire. Enfin, il peut permettre de déterminer dans quel
le mesure l'entraînement physique est un instrument de réadaptation et de prévention de certains désordres provoqués par la sédentarité
•Remerciements
Les auteurs remercient l 'Association française contre les myopathies (AFM) de les avoir invités à réaliser cette synthè
se qui a été, en partie, présentée au Colloque national sur les maladies neu
romusculaires Uuin
1993,
Strasbourg) .Summary
Endurance training and physio
logical adaptation
The running of rats on a motor
driven treadmill is the major ani
mal model of endurance muscu
lar exercise. It induces the same adaptations of oxygen transport and muscular system as those observed in athletes. This model should help to determine the molecular and cellular processes involved in m uscular plastici ty (regulation of the expression of myosin and mitochondrial enzy
me genes ... ) . Moreover, it could be helpful in designing protocols to fight consequences of involun
tary sedentariness ( chronic bed rest, tran splan tation , space flights ... ) or aging.
TIRÉS A PART
---A. Ferry.