• Aucun résultat trouvé

DU MEME AUTEUR Chez le même éditeur : Cœur pour Cœur. Le Tendre Ennemi. Quand ses yeux me regardent. La Haine aux yeux tendres. Défense d'aimer.

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "DU MEME AUTEUR Chez le même éditeur : Cœur pour Cœur. Le Tendre Ennemi. Quand ses yeux me regardent. La Haine aux yeux tendres. Défense d'aimer."

Copied!
25
0
0

Texte intégral

(1)
(2)

SURSIS POUR UN AMOUR

(3)

DU MEME AUTEUR Chez le même éditeur : Cœur pour Cœur.

Le Tendre Ennemi.

Quand ses yeux me regardent.

La Haine aux yeux tendres.

Défense d'aimer.

La Vallée des Cœurs Perdus.

Secrète Rencontre.

La Juvénile Vagabonde.

L'Ile de Lumière.

Offrande à la Nuit.

La Grillonne.

Le Désaccord Passionné.

A la Belle Hélène : La Belle aux Gerfauts.

Le Prince des Nuages.

Un amour insoupçonné.

La Belle et le Capitaine.

Librairie l'allandier : Le Sourire Enchanté.

Collection Delphine : Mon Cœur est à moi.

L'Espoir tout seul.

Profil perdu.

La Belle Obstinée.

Noces roussies.

S.O.S. Belle Captive.

Isabelle et le Goéland.

En préparation : La Nuit qui chante, (réimpression).

La bague de miss Blandish.

Les feux du printemps.

Cendres chaudes.

LM mains désunies.

(4)

MAGDA CONTINO

S U R S I S

POUR

UN AMOUR

Roman /

ÉDITIONS DU DAUPHIN 43, rue de la Tombe-Issoire

PARIS (XIV")

(5)

Tous droits de reproduction, de traduction et d'adaptation réservés pour tous pays.

vCj by Editions du Dauphin, 1960.

(6)

CHAPITRE I

— Nous devons jouer fair-play. dit sans préambule Olivier de Têt.

Cette phrase ne s'appliquait pas à la partie de tennis qu'il venait de disputer victorieuse- ment à Loup Neuville, car ils avaient joué tous deux assez mollement jusqu'à ce qu'Olivier, désireux d'en finir, liquidât l'affaire en quel- ques volées que son médiocre partenaire ne put parer. Or Olivier n'avait éprouvé le besoin de régler le sort de la partie que quand les deux joueurs se trouvèrent à peu près seuls, le court voisin ayant été vidé par l'apparition d'une jeune fille qui avait lancé, tout courant : « On fait un concours de danses sur la pelouse ! » Mais ce n'était pas non plus cette compétition qui avait provoqué la phrase d'Olivier de Têt :

« Nous devons jouer fair-play. »

Olivier était un mince jeune homme au visage fermé, un peu dur. Il affectait d'être toujours plongé dans de profondes cogitations. Son par- tenaire, Loup Neuville, était sa réplique, mais en brun, ce qui lui donnait un aspect plus sûr, plus viril ; mais ce n'était qu'une apparence.

(7)

En fait, tous deux ne songeaient guère qu'à leurs précieuses personnes, à leurs situations à asseoir, à l'argent nécessaire pour tenir un rang, mais qu'ils auraient souhaité obtenir sans travailler. Evidemment, de telles préoccupa- tions suffisaient pour meubler leurs intelli- gences.

— Fair play ? répéta Loup Neuville consi- dérant Olivier qui venait de le rejoindre.

Ils échangèrent distraitement la poignée de main du vainqueur au vaincu et, après avoir allumé une cigarette, ils prirent le chemin le plus long pour gagner la pelouse où des groupes en effervescence organisaient le fameux con- cours.

— Mon cher, dit Olivier, j'ai des yeux pour voir !

Quand il parlait de choses sérieuses, il affec- tait d'employer un ton et des tours de phrase qui n'ont plus cours parmi la jeunesse actuelle même la plus distinguée. Il allait jusqu'à vous- soyer son partenaire bien que, normalement, il le tutoyât.

— Pour voir quoi ? fit Loup Neuville, qui adoptait volontiers le genre benêt pour forcer l'interlocuteur à s'expliquer.

— Je vous en prie, ne jouez pas au plus sub- til ! Entre nous, ce serait déplacé. Je résume : Votre double objectif c'est Janelle et sa dot. Le mien c'est l'argent du papa Dartaud et sa ravis- sante fille. Un de nous deux peut et doit gagner.

— Mais pas les deux, évidemment, rétorqua Loup Neuville avec un sourire de coin qui accentuait l'humour de sa réplique.

(8)

— Certes ! Cependant, envisagez nos diffi- cultés : si nous nous combattons stupidement, nous risquons d'être éliminés tous les deux.

C'est votre avis, n'est-ce pas ?

— Oui. Nous connaissons le capricieux carac- tère de Janelle ! Peut-être suffira-t-il à l'un de nous d'être présent au bon moment, je veux dire à l'instant précis où elle décidera : « Je vais me marier ! »

— Alors, elle promènera son regard alentour et... bienheureux celui sur qui se posera l'éclair bleu de l'amour et de la fortune.

Ils rirent avec juste assez de cynisme pour accompagner l'énormité d'une telle appréciation et excuser leur manœuvre respective.

— Cessons donc de nous combattre, reprit Olivier. Cette joute nous perdra tous deux.

— J'accède d'autant plus à votre suggestion que nous sommes à égalité.

— Oui, à égalité, car Janelle maintient la ba- lance entre nous.

— A mon avis, nous avons à craindre le troisième homme, ce fameux troisième larron qui brouille le jeu dès son apparition et contre qui nous ne serons pas trop de deux.

Comme ils approchaient de la pelouse, Oli- vier baissa la voix pour demander :

— Vous songez à quelqu'un, semble-t-il ?

— Peut-être... mais nous en reparlerons. A mon avis, il faudrait éviter de montrer notre changement d'attitude : Janelle est très subtile...

— C'est juste... Je vous téléphonerai demain matin. Pour le moment voyons quel jeu elle a inventé...

(9)

La réputation de subtilité de Janelle Dartaud n'était pas surfaite, car elle avait déjà remarqué la conversation des deux garçons. Elle les in- terpella, révélant qu'elle savait à quoi s'en tenir sur les raisons des assiduités d'Olivier de Têt et de Loup Neuville.

— Alors ! Vous êtes si passionnés de tennis, subitement ! Vous en oubliez d'accourir à mon appel !

Le ton de sa voix, agressif, ne s'alliait pas à sa gracieuse personne. Vêtue de vert et blanc, elle était la seule, parmi les jeunes invitées à avoir conservé ses cheveux longs. Ces vagues blondes qui s'agitaient perpétuellement autour de son visage semblaient avoir une vie pro- pre, car, lorsque Janelle était immobile, ses cheveux palpitaient encore et changeaient de reflets. Pour l'instant, ils la suivaient dans sa course. Elle apportait un tourne-disque qu'elle déposa sur le socle d'une statue qui prétendait représenter la Jeunesse. Ce n'était qu'un bloc informe agrémenté de cinq cônes qui simulaient tête, bras et jambes. Sans respect pour ce chef- d'œuvre, Janelle cala son tourne-disques entre les deux cônes inférieurs. Ses yeux, d'un bleu lavande, brillèrent d'excitation quand elle jeta vers les deux arrivants :

— On fait un concours d'endurance, pieds nus, sur la pelouse !

Elle déclencha la musique et les couples se formèrent instantanément par sympathie, par goût de la danse ou pour d'autres raisons.

Dans le tumulte, Janelle donna des instructions:

— Défense absolue de marcher sous peine

(10)

d'être éliminé ! Si vous voulez vous rafraîchir, il faudra gagner les tables de la terrasse en dansant ! Compris ?

Un rugissement fait d'une douzaine de : Oui ! lui répondit.

Olivier portait des chaussures à élastiques.

Il les enleva prestement, alors que Loup perdit quelques secondes à délacer les siennes. Ce fut donc avec Olivier que Janelle se jeta dans la danse. Loup chercha des yeux la cavalière manquante, car il en était sûr, Janelle convo- quait toujours ses invités en nombre pair. L'ab- sente arriva, dévalant l'escalier de la terrasse.

Loup l'empoigna par le bras sans écouter ses explications où il était question d'un appel téléphonique inopportun. Ils s'élancèrent aussi dans le mouvement.

Vus d'un peu loin, on eût dit les adèptes d'un culte barbare, s'agitant sur le rond-point de la pelouse comme à l'intérieur d'un cercle magi- que. Toutes les danses sont des évocations, par- ticulièrement les danses modernes qui gagnent à être pratiquées au grand air en communion avec la nature et non dans un sous-sol enfumé à la promiscuité douteuse. Une vie intense se dégage de ce rythme frénétique dans un envol de jupes larges, de cheveux légers, de mollets minces et de bras fins.

Un petit cri d'oiseau blessé annonça le pre- mier abandon. Une écharde avait égratigné le talon d'une fille. En sautant à cloche-pied elle gagna le bord de la pelouse, s'assit sur la bor- dure de ciment et examina sa blessure avec attention alors que son danseur continuait seul.

(11)

Presque aussitôt une dispute sépara un des cou- ples. Le garçon prit un air excédé et s'élimina en allant paisiblement se servir un rafraîchis- sement sur la terrasse. Sa partenaire alla tenir compagnie à la blessée. Elle prit place elle aussi sur le rebord, révélant une moue de dépit.

C'était une ravissante fille blonde, nommée Bri- gitte Bertrand, qui cherchait à ressembler à une vedette de cinéma très connue. Bien en- tendu, elle suivait un cours d'art dramatique ! Depuis le début de la danse, Brigitte Ber- trand n'avait cessé de s'occuper, de loin, du comportement d'Olivier, beaucoup trop empres- sé, à son gré, autour de Janelle. Ne le quittant guère des yeux, elle dansa fort mal et, de ce fait, gêna son partenaire, d'où dispute et sépa- ration hargneuse.

Sombrement, tout en écoutant les explications puériles de la « blessée », Brigitte Bertrand con- tinua à surveiller Olivier et Janelle.

— Cette chipie, avec tout son sale argent !.

siffla-t-elle entre ses dents.

— Que dis-tu ?

— Rien !... Tu devrais désinfecter ton talon...

A ce moment, un formidable coup de klaxon immobilisa chacun. Janelle courut arrêter le tourne-disques et, dans le silence consterné, elle dit :

— Mon père et ma mère rentrent plus tôt j qu'ils n'avaient promis. Quand mon père kla- xonne ainsi, c'est signe d'orage !... Rechaussez- vous et... prenons des airs de chatte-mite...

Une voix lança : I

— On n'a pas eu le temps de se défouler !

(12)

Il y eut des rires vite réprimés. Olivier et Loup s'élancèrent simultanément pour ouvrir les portières de la puissante voiture qui venait de stopper à proximité de la pelouse. Les deux prétendants ne faisaient pas leur cour seulement à Janelle, mais aussi à ses père et mère. Olivier ouvrit la portière de droite et tendit son avant- bras pour aider Mme Dartaud dans sa sortie, qui ressemblait fort à une entrée en scène. La mère de Janelle était une dynamique personne d'une quarantaine d'années, à l'élégance raffi- née. Elle prétendait être toujours à la dernière mode pour ses toilettes comme pour l'agence- ment de sa maison et, de bonne foi, elle se croyait plus moderne, plus jeune que sa fille et ses amis.

La stuatue aux cinq cônes avait été comman- dée par elle ainsi que les deux défenses d'élé- phant grandeur nature qui déversaient de l'eau bleutée dans un bassin aux bords en forme de grecques. C'était elle aussi qui avait forcé

« l'imagination moderne » de l'ensemblier-déco- rateur, ce qui avait produit, entre autres bizar- reries, des tables de terrasse disparates de for- mes et de couleurs : un ovale jaune, un haricot rouge, un losange noir et un rond vert adornés de sièges anguleux de mêmes tons aux pattes noires et grêles.

L'habitation, qui portait le nom ravissant de La Bagatelle, était une ancienne « folie ». Les trois portes d'entrée avaient été privées de leurs carautins et remplacées par des baies. On avait peint les vieilles pierres d'une couche crémeuse de sorbet à la vanille. L'ensemble

(13)

produisait l'effet extravagant de la maison sur- réaliste du film Mon Oncle. Quand Mme Dar- taud faisait un geste vif, et elle s'agitait beau- coup, on s'attendait à voir baisser le débit des jets d'eau ou à percevoir le déclenchement auto- matique de la porte du garage. Cependant, mal- gré ses excentricités, Mme Dartaud possédait de grandes qualités et surtout un amour pro- fond pour sa fille et pour son mari. Comme elle s'imaginait volontiers que cette tendresse faisait « bourgeois démodé » elle s'en défendait, mais elle était capable de protéger sa famille des coups du sort avec... un courage tout bour- geois, lui aussi, et qui n'est jamais démodé.

Elle gloussa de joie devant les danseurs pieds nus sur la pelouse, car « elle comprenait très bien la jeunesse », mais elle fronça les sourcils quand elle s'avisa qu'on avait traité avec irré- vérence sa chère statue !

Loup avait ouvert la portière de gauche : un taureau furieux en jaillit. C'était M. Dartaud.

Il écumait. Sa colère était si puissante que ses premiers mots furent inaudibles. Enfin, il clama :

— Une demi-journée d'absence et je retrouve mon domaine saccagé !

— Mais, père...

— Sois indulgent, mon ami !

— Je suis indulgent, ridiculement indulgent ! J'admets toutes les distractions, je suis un père compréhensif ! Je l'ai prouvé cent fois ! Mille fois ! Mais je suis hors de moi quand je vois dans quel état vous avez mis ma pelouse !

— Ah ! c'est donc ça ! fit Janelle. Tu en

(14)

feras refaire une plus belle... plus touffue...

mieux tondue.

Il y eut des gloussements. Mme Dartaud, toujours approbatrice quand il s'agissait de dépense, dit :

— Cette pelouse avait besoin d'être rénovée.

— C'est le procédé qui m'écœure ! On ne détruit pas parce qu'on est riche !

— Sois grand seigneur, voyons !

C'était lui rappeler ses modestes origines.

Loup Neuville intervint d'un ton compréhensif et papelard :

— Pourquoi détruire, en effet ! Ma mère me prêche toujours l'économie. Je sais combien elle a raison !

— N'est-ce pas ? fit M. Dartaud, enchanté d'être approuvé ; mais personne n'était dupe de l'étalage des bons sentiments de Loup, pas plus que de la colère forcée de M. Dartaud.

D'ailleurs, celui-ci se calma] sur-le-champ.

Son visage rouge prit une teinte plus normale et sa stature de colosse adopta des contours débonnaires. Il était content de son petit effet.

Il aimait à jouer les scrongneugneux, mais il lâchait pied dès qu'on abondait dans son sens.

En commençant chichement, il avait réussi à édifier une énorme fortune. Près de La Baga- telle, les bâtiments de la minoterie Dartaud en portaient témoignage et il en était fier, à juste titre.

Depuis son ascension le minotier avait beau- coup d'amis. Janelle, sa fille unique, en âge de mariage, n'était pas le moindre attrait : les prétendants affluaient. Cela déplaisait à ce lut-

(15)

teur au repos qu'était M. Dartaud. Certes, sa fille était ravissante, mais il connaissait aussi l'attrait de sa dot. Cependant jusqu'à ce jour, Janelle ne semblait pas facile à circonvenir.

Le père disait parfois : « Janelle a hérité mon obstination et mes yeux bleus... Le réalisme de la vie et un peu de rêve au-dessus. »

Après son arrivée bruyante et son éclat, M.

Dartaud se fit paternel :

— Allons, les jeunes, remettez vos chaussures et dansez sur la terrasse, tout simplement !

Janelle prétendit aussitôt montrer à ses amis qu'elle pouvait tenir tête à son père :

— Nous n'avons plus envie de danser !

— Eh bien ! ne dansez plus ! Quelle impor- tance ! Vous ne pensez pas que je vais vous prier de reprendre vos distractions ?... Anselme!

Une tête, coiffée d'une casquette, parut au- dessus d'une haie taillée elle aussi en forme de grecques.

— Viens arroser cette pelouse !

— Faudra un coup de râteau, avant... *

— Tâche de la sauver. J'aime cette verdure devant la terrasse...

Olivier s'était approché de Janelle, indécise.

Il proposa à mi-voix :

— Si on prenait les autos pour filer danser ailleurs ?

— Non ! fit-elle, têtue et boudeuse. Je vous ai tous invités, je dois trouver des distractions, ici, chez moi !

M. et Mme Dartaud avaient gagné la terrasse puis l'intérieur de l'habitation. M. Dartaud re- vint presque aussitôt ayant troqué sa veste

(16)

sombre contre une autre gris clair. Il en parut plus massif. Tout en surveillant d'un œil un peu goguenard les conciliabules des jeunes au- tour de Janelle, il se versa une boisson, puis s'intéressa au travail du jardinier qui apportait ses outils : brouette, râteau, tuyau d'arrosage jaune vif. M. Dartaud se serait cru descendu de son piédestal de « patron » s'il n'avait pas fourni à son employé des directives parfai- tement inutiles, car le jardinier connaissait son métier.

Pendant que les deux hommes discutaient du meilleur moyen de sauver la pelouse, Loup Neuville eut une idée :

— Si on dansait en se tenant en équilibre sur les grecques du bassin ?

La difficulté fit sourire tout le groupe. Aus- sitôt, Brigitte Bernard cria un titre de disque, sans trop réfléchir, uniquement pour se faire remarquer par Olivier qui aimait ce disque ; mais le jeune homme rétorqua avec condes- cendance :

— Non ! C'est dépassé !

Le bord du bassin se révéla tout de suite trop petit pour contenir tous les danseurs. Janelle resta hors du jeu. Ostensiblement, Olivier et Loup, désireux de lui plaire, se retirèrent aussi de la compétition ; mais tous trois excitèrent les autres de la voix et scandèrent le rythme en frappant dans leurs mains. L'attraction se corsa rapidement — d'ailleurs, chacun l'avait sournoisement espéré — Le rebord en forme de grecques offrait de telles difficultés, bien que les partenaires dansassent encore pieds

(17)

nus, que l'inévitable se produisit : une des danseuses, Brigitte Bertrand, tomba à l'eau, ce qui fit s'esclaffer chacun. Elle aurait préféré se faire remarquer autrement ! Sa chute refroi- dit considérablement les autres filles. Elles abandonnèrent le jeu pour se précipiter avec un bel ensemble au secours de Brigitte. Celle-ci sortit du bassin dégoulinante d'eau. Elle ressem- blait à un barbet qui a reçu une forte averse.

Les garçons, très amusés par l'intermède, conti- nuèrent leur danse acrobatique, encouragés par ceux qui avaient choisi la prudence.

Janelle guida Brigitte jusqu'à la salle de bain pour qu'elle pût se changer, se sécher, se recoiffer. Au retour elle passa près de son père qui semblait s'amuser beaucoup.

— Eh bien ! fit-il, tes amis sont des athlètes ! Cette danse est l'équivalent d'un sport violent...

sans parler des baignades ! Rien de tel pour refouler les humeurs... peccantes, comme di- rait Molière.

Mais Janelle boudait encore le retour inoppor- tun de ses parents.

— Tu ne comprends rien aux jeunes ! M. Dartaud éclata d'un beau rire, nullement ému par une telle appréciation. Il leva son verre et s'exclama :

— Je nomme tes amis les Dédé !

— Dédé ? Pourquoi ?

— Les « défoulés-dépassés ». Tout ce qu'ils font dans la vie c'est pour se défouler : la vi- tesse, la musique, le bris des fauteuils de l'Olympia et même la cour aux filles ! Bien entendu, ils doivent obligatoirement se dépasser

(18)

en musique, ou sur la route, ou dans le déchaî- nement de leur jeunesse. C'est une véritable course ! D'ailleurs la vie est toujours une cour- se ! Cependant, je me demande quel sera leur avenir ?

— Moi, je le sais !

M. Dartaud considéra sa fille avec sympathie : il connaissait son équilibre, il lui faisait con- fiance. Elle dit :

— La vie actuelle les mènera... à dire ce que tu dis, dans vingt ans, après avoir acquis une situation, élevé une famille et... engraissé de quelques kilos !

Le père et la fille rirent tous deux silencieu- sement, comme des complices. Voyant Olivier et Loup qui se rapprochaient insensiblement M. Dartaud chuchota :

— Voici ceux qui voudraient bien acquérir une situation sans effort !

— Ce qui me vexe, c'est qu'ils croient être capables, l'un ou l'autre, de me décider. Ils me connaissent mal !

— Renvoie-les !

— Ce sont des danseurs possibles et puis je voudrais savoir jusqu'où ils iront pour faire le beau devant ta fortune ! Les deux garçons, le blond et le brun, s'ap- prochaient, frétillants d'obséquiosité. M. Dar- taud, qui les estimait à leur valeur, évita de leur parler en s'approchant de la balustrade de la terrasse et en interpellant le jardinier :

— Anselme ! Il faut enlever la voiture avant d'arroser !

(19)

Il se retourna vers l'intérieur de la maison et appela : « Damien ! »

Un homme écrivait, assis à un bureau, que l'on entrevoyait à travers une des baies.

— Damien ! Voulez-vous venir, s'il vous plaît?

L'auto serait mieux au garage !

M. Dartaud n'était pas un « patron » capable de déranger un employé pour si peu. La petite flamme amusée qui dansait dans ses yeux bleus révélait qu'il jouait, lui aussi. Instantanément, au nom de Damien, tous les visages se transfor- mèrent. Celui de Janelle se ferma et prit une expression douloureuse et tendue ; puis celui d'Olivier et celui de Loup se crispèrent. Un 1 éclat métallique traversa leur regard tel un éclair fulgurant. Chacun semblait étrangement sur ses gardes, sauf les danseurs qui conti- nuaient à se défouler pieds nus sur les grecques du bassin.

L'homme qui écrivait se leva, fit le tour du bureau, ouvrit la porte-fenêtre et parut. Deux détails se remarquaient immédiatement : sa haute taille et ses traits figés. Il était très brun, le visage mince et allongé. Ses vêtements étaient de bonne coupe, mais sans recherche excessive.

Les regards de ses yeux très noirs ne se posè- rent pas sur une personne particulièrement. Il traversa la terrasse d'un long pas égal, descendit les marches, gagna la voiture, y monta, la fit reculer pour la placer face à l'allée qui con- duisait au garage où il l'enferma. Au retour, il s'arrêta pour parler à mi-voix au jardinier.

Pendant tout ce temps, les quatre personnes restées sur la terrasse n'échangèrent pas une

(20)

parole, affectant de s'intéresser comme avant au groupe de danseurs. Pourtant, M. Dartaud ob- servait sa fille avec intérêt. Celle-ci, le visage buté, les yeux étincelants, pétrissait la ceinture de sa robe comme si elle souhaitait en faire de la charpie. Imperturbables en apparence, Oli- vier et Loup échangèrent de rapides coups d'œil. Les sourcils d'Olivier remontèrent en accent circonflexe et les lèvres de Loup se pin- cèrent au point de ne plus être qu'une mince raie. Tous deux avaient eu la même pensée : « Ce Damien avait-il une chance d'être le troi- sième homme ? »

La voix de Janelle claqua soudain et fit tres- sauter chacun :

— On va finir l'après-midi chez Olivier, ce sera plus drôle !

Ses désirs étant des ordres, chacun fut prêt en un temps record. La 4 CV d'Olivier, celle de Loup et deux scooters emportèrent les jeunes amis de Janelle qui avait pris place d'autorité près d'Olivier. Brigitte Bertrand, pâle de rage, dut se contenter du siège arrière.

La pétarade des moteurs décrut sur la route en direction de Paris.

— Ouf ! quel silence ! fit M. Dartaud s'adres- sant à Damien qui abordait la terrasse. Dites- moi, mon cher... vous êtes-vous disputé avec ma fille ?

— Non, monsieur.

M. Dartaud vint se planter devant son jeune collaborateur lui interdisant ainsi le passage vers la pièce où il travaillait précédemment :

— Vous savez 1 que je vous estime grandement?

(21)

— Merci, monsieur.

— Vous êtes intelligent, cultivé, sérieux et têtu. J'aime les hommes obstinés, c'est une qua- lité virile. Vous arriverez... et dans tous' les domaines.

Surpris par ces louanges, le jeune homme examina son interlocuteur. Il vit danser, dans les yeux bleus si semblables à ceux de Janelle, une petite flamme pétillante. Alors, Damien sourit. Un sourire discret et réticent qui creusait des fossettes inattendues sur son visage grave.

— Vous n'avez que quatre ou cinq ans de plus que nos jeunes Dédé ! Vous les dépassez de beaucoup. Evidemment ils ne peuvent être cons- cients de ce dépassement-là !... Mais, moi, je suis très satisfait de votre collaboration.

Damien prit l'air confus :

— Monsieur, je suis touché de votre amabilité.

— Trêve de compliments ! Allons travailler ensemble ! Ce sera le meilleur moyen de nous...

défouler, nous en avons grand besoin ! M. Dartaud éclata d'un rire puissant. Les deux hommes pénétrèrent dans le cabinet de travail et s'installèrent au bureau devant des piles de dossiers.

(22)

CHAPITRE II

A l'aube, Damien Bellegarde quitta La Baga- telle pour se rendre à un kilomètre de là, en pleine campagne, afin d'estimer un bois qui appartenait à M. Dartaud et que celui-ci vou- lait faire élaguer. Cette estimation ne s'imposait pas si tôt le matin ; mais le jeune homme avait médiocrement dormi, trop de pensées l'agitaient.

Et puis, il n'avait pas dansé, lui, tard dans la soirée, pour sombrer dans le bon sommeil répa- rateur qui suit la fatigue musculaire ! Discrète- ment, il avait attendu le retour de Janelle.

Celle-ci avait été reconduite par Olivier et Loup.

Tous trois s'étaient cru obligés de réveiller les habitants de La Bagatelle par des exclamations, des appels, des claquements de portières. Or, au grand dépit du trio turbulent, personne ne re- mua dans la demeure des Dartaud. Le père et la mère espéraient que le temps ou le mariage de leur fille supprimerait radicalement tous ces excès de vitalité.

Damien, derrière les volets clos de sa cham- bre, avait vu l'arrivée de Janelle escortée d'Oli- vier et de Loup. Ils échangèrent d'intermina- ble rappels de rendez-vous pour la semaine suivante et de commissions pour la discothèque.

Chaque phrase était ponctuée d'un : Bye ! ou

(23)

d'un : Ciao ! 1 qui semblait clore la conversation.

Mais c'était un jeu de la rallumer et Janelle y excellait. Damien, derrière ses volets, avait eu la sensation qu'elle le faisait exprès. Il se de- manda même, avec une bizarre angoisse, si elle avait deviné sa présence. Mais il se rassura très vite : Jamais dans son attitude ni même dans sa voix il n'avait laissé percer son secret : Il aimait Janelle à en devenir fou !

Quand Damien croisait Olivier de Têt et Loup Neuville transformés en ombre double derrière la jeune héritière, il avait envie de se ruer sur ces deux méprisables prétendants, si empressés, si plats devant la fortune du mi- notier !

Dès le début de sa promenade matinale, Da- mien se mit à regretter une époque révolue :

« Au temps des cavernes, le problème n'aurait pas existé : deux coups de poing et ces deux minables ne seraient plus sur mon chemin. » Il respira profondément ayant beaucoup de peine à ligoter des sentiments tumultueux. Com- me quelqu'un d'exagérément silencieux, il se mit à penser à mi-voix :

— Je suis bien malade et le pire c'est qu'il ne faut rien montrer, surtout à Janelle ! Com- ment tout cela finira-t-il ? La fuite serait assu- rément la meilleure solution, car si quelqu'un peut passer pour un coureur de dot, c'est moi ! Et je n'en suis pas un... Je n'en suis plus un !...

Si quelqu'un peut être blessé inconsidérément 1. Prononcez : tchiao. C'est une contraction de schiavo (votre esclave).

(24)

A LA MEME LIBRAIRIE : DELLY

La Maison dans la Forêt.

Le Roi aux Yeux de Rive.

Cité des Anges. L'Héritier des Dues de Sailles.

La Porte Scellée.

Rue des Trois Grâces.

Les Solitaires de Myols.

Le Violon du Tzigane.

Le Chant de la Misère.

ALEXIANE L'Ange du Remords.

AnnIe ACHARD Isabellita.

Le Prince Mystère.

Terre de Mirages.

Marianne ANDRAU L'Homme aux deux fiancées.

L'Etranger du Yacht Blanc.

Le Secret des Roches Bleues.

Le Gentilhomme Noir.

Le Gouffre qui chante.

Emil ANTON Un Cri sur la Lande.

Je t'attendrai.

Le Sortilège Mexicain.

Les Ailes du Bonheur.

Vous, ma Bien-Aimée.

Suzanne CLAUSSE Par un très long chemin.

Celui qu'elle épousa. Pour un tel amour.

L'Ouragan d'Avril.

La Perle et le Granit.

L'Anneau de Solitude.

La Barcarolle aux Jonquilles.

Amours de Castille.

La Passagère de l'Aube.

L'Ange du Silence.

Le Chemin sans Soleil.

Mayola.

La Rose de Bohême.

Princesse Magyare.

Jeanne DULONG Peines d'Amour.

DETY Tu n'en aimeras qu'un.

Eric de CYS Second Rendez-vous.

FLORA SAINT GIL L'Invisible Présence.

Lise de CERE L'Ile du Désespoir.

L'Impossible Retour.

Le Voyageur Inattendu.

La Valse tourne.

La Croix des Regrets.

Jacques CH^p^TOPHE Le Printemps Solitaire.

Une Jeune Fille en Blanc.

La Captive et l'Oiseau.

La Belle aux Cheveux d'Or.

Le Grand Paon de Nuit.

Magda CONTINO Cœur pour Cœur.

Le Tendre Ennemi.

Quand ses yeux me regardent.

La Haine aux Yeux tendres.

Défense d'aimer.

La Vallée des Cœurs perdus.

Secrète Rencontre.

L'Ile de Lumière.

La Juvénile Vagabonde.

Offrande à la Nuit.

La Grillonne.

Le Désaccord Passionné.

R.J. de KERLECQ Les Derniers Feux.

LORENA Le Seigneur Sauvage.

Te reverrai-je, Felicidad ? Vous êtes ma prisonnière.

FRANCE MAURICE L'Arche de Noé.

Clarence MAY La route sans lumière Solveig à l'âme ardente.

Cœurs sans détours.

Les Rives du Guadalquivir.

Le Seigneur des Montagnes.

Le Chant des Exilés.

Le Vent des Cimes.

Georgette PAUL Toi, mon espoir.

L'Invitée du Destin.

Je te donne ma vie...

Le Repaire.

SAINT-BRAY Fon tain e-damour.

La Préférée. » u âTiraiil E DE FRANCE . ï

(25)

Participant d’une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles d’accès par le temps, cette édition numérique redonne vie à une œuvre existant jusqu’alors uniquement

sur un support imprimé, conformément à la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012 relative à l’exploitation des Livres Indisponibles du XXe siècle.

Cette édition numérique a été réalisée à partir d’un support physique parfois ancien conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.

Elle peut donc reproduire, au-delà du texte lui-même, des éléments propres à l’exemplaire qui a servi à la numérisation.

Cette édition numérique a été fabriquée par la société FeniXX au format PDF.

La couverture reproduit celle du livre original conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.

*

La société FeniXX diffuse cette édition numérique en vertu d’une licence confiée par la Sofia

‒ Société Française des Intérêts des Auteurs de l’Écrit ‒ dans le cadre de la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012.

Références

Documents relatifs

La relation entre les Premières Nations et le gouverne- ment fédéral n’a pas donné lieu à des stratégies pouvant améliorer les déterminants fondamentaux de santé dans

Pour pouvoir créer un utilisateur, vous devez posséder le privilège CREATE USER ou INSERT sur la base système mysql (car c’est la table mysql.user qui stockera l’existence

Et le cœur, potin régulier des cercles professionnels, une querelle sur la propagation de la lumière (ondes ou particules) le bruit d’une jambe de bois il l’entend toujours la

- La joie éclaire mes yeux - Mon visage s'épanouit comme une rose /La joie éclate dans ses yeux - Je pleure / saute / bondit de joie... Je suis si heureux

Nous offrons également une gamme complète de services, qui vous protège contre tout imprévu : assurez votre capital en cas de destruction totale ou de vol de votre véhicule Fiat

Ubuntu nous enseigne le contraire, et affirme que tout le monde sur cette planète a la même valeur, parce que notre humanité est ce qui compte le plus. Au lieu de nous comparer

Nous offrons également une gamme complète de services, qui vous protège contre tout imprévu : assurez votre capital en cas de destruction totale ou de vol de votre véhicule Fiat

Le profane dans l'eau est comme le mauvais élève.. Le mauvais élève n'écoute