R EVUE DE STATISTIQUE APPLIQUÉE
J. D ESABIE J. M. R EMPP
Exemples d’une analyse méthodologique des résultats d’une enquête auprès des ménages
Revue de statistique appliquée, tome 16, n
o4 (1968), p. 5-34
<
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5
EXEMPLES D’UNE ANALYSE MÉTHODOLOGIQUE
DES RÉSULTATS D’UNE ENQUÊTE AUPRÉS DES MÉNAGES
J. DESABIE
etJ. M. REMPP (*)
I - INTRODUCTION
En
1963,
une étudegénérale
sur lesdépenses
desménages
a étéentreprise
par l’ensemble des pays du Marché Commun à l’initiative de l’OfficeStatistique
des CommunautésEuropéennes.
Danschaque
pays,l’enquête
était confiée à l’Office National deStatistique ;
c’est ainsiqu’en France, l’enquête
a été réalisée par l’Institut National de laStatistique
et des Etudes
Economiques.
Cette
enquête est,
pour notre pays, leplus
vaste travail de cetype qui
ait été conduit à cejour ;
elle. fait suite àl’enquête
réalisée en 1956-1957 en
collaboration,
par l’I.N.S.E.E. et leC.R.E.D.O.C.,
mais bé- néficiait des moyensplus importants
et del’expérience
accumuléedepuis
lors.Les résultats de
l’enquête
Communautaire de 1963 - 1964 ont étépubliés séparément
pour chacun des six pays par l’OfficeStatistique
desCommunautés
Européennes ;
unseptième
volumeréunit,
sous une formerelativement
concentrée,
les résultats relatifs aux six pays fournissant ainsi deprécieuses
donnéescomparatives
sur leurs conditions de vie.Chacun des six volumes consacrés aux résultats d’un des pays est
précédé
d’uneintroduction,
écrite par les statisticiensnationaux, organi-
sateurs de
l’enquête.
Pour la France : volume 6(Statistiques
Sociales -série
spéciale - Budgets
Familiaux 1963 -1964) (**).
Cette introduction
comporte
unexposé
trèscomplet
sur lesenquêtes
réalisées en ce pays, sur les conditions de vie et les consommations des
ménages :
- sur leur
développement, lent, pendant
desdécades, rapide depuis quelques
années.- sur les
enseignements
de cettehistoire,
somme toute trèsbrève, quant
auxpossibilités
et aux limites de ces travaux.Les méthodes mises en oeuvre dans
l’enquête
de 1963 - 1964 sontexposées
en trèsgrand
détail et constituent ladescription
laplus
com-plète
destechniques
habituellement utilisées par l’I.N.S.E.E. en cesdomaines,
lesproblèmes
soulevés parl’emploi
d’un calculateur électro-nique
y sont,notamment,
trèslargement exposés.
(*) Assistés de Mme Allaire, chargé de mission à l’I. N. S. E. E.
(**) La publication de cette enquête sera également assurée par l’I. N. S. E. E. sous forme d’un volume spécial.
Revue de Statistique Appliquée, 1968 - vol. XVI - N° 4
L’Office
Statistique
des CommunautésEuropéennes
avaitimposé
pour ce travail un
cadre,
et surtout desobjectifs
communs ; la compa- rabilité internationalel’exigeait ; cependànt,
et fortheureusement,
unegrande
liberté avait été accordée aux Offices Nationauxquant
au choix des moyens. Il a donc étépossible
à l’I. N. S. E. E. de viser un certainnombre
d’objectifs qui
lui étaientparticuliers ;
c’est ainsi que les be- soins des économètres et descomptables nationaux,
ainsi que des sta- tisticiens desprix
ont pu êtrelargement
satisfaits.Par ailleurs de très
grandes précautions
ont étéprises par l’I.N.S.E.E.
pour que soit recueilli tout
l’enseignement
de cette vasteexpérience
ence
qui
concerne les méthodesd’enquête.
Ceteffort,
malheureusementexceptionnel
enFrance, permet d’aborder,
dans de bonnesconditions,
l’étude
critique
des résultats obtenus. Lesenseignements
ainsi rassem-blés ont été
largement
utilisés dans lapréparation
del’enquête
perma- nente sur lesdépenses
et conditions de vie desménages,
lancée parl’I.N.S.E.E.
en 1965(*)
etpoursuivie jusqu’à maintenant,
suivant des méthodesinvariables,
en vue d’assurerl’homogénéité
de la série. C’estde cette étude
critique
del’enquête communautaire,
dontl’enseignement
nous
paraît
deportée
assezgénérale,
que nous donnons ici certains ré- sultats relatifs au trèsimportant problème
de l’influence de lalongueur
de la
"période
deréférence"
sur laqualité
desréponses
individuelles(**).
Les données relatives aux consommations
étaient,
comme dans laplupart
desenquêtes similaires, enregistrées
en 1963 - 1964 pour par- tie sur un carnet decomptes rempli
par laménagère,
pourpartie
parune interview.
Les consommations courantes :
produits alimentaires, produits
d’entretien... étaient étudiées àpartir
du carnet decomptes ;
lesdépenses
contractuelles :loyer,
gaz, électricité... ou moinsfréquentes :
vacances, achats de biensdurables,
decombustibles,
devêtements, ...
étaient étu- diées àpartir
de l’interview.Dans l’une et l’autre méthode
d’enregistrement
desdonnées,
l’al-longement
de lapériode
de référence diminue l’erreur aléatoire et aug- mente lasignification
des données individuelles(ainsi
la recherche d’unetypologie
descomportements exige
quechaque ménage
soit observé sur unepériode
suffisammentlongue); cependant
cetallongement tend,
sinontoujours,
du moins leplus
souvent, àaugmenter
les erreurs de décla- ration ; deplus, exiger
d’uneménagère
la tenue d’un carnet decomptes pendant
unelongue période,
provoque ungrand
nombre derefus,
d’aban- donsqui
détériorent l’échantillon.Ces
avantages opposés
conduisent àadopter
des solutions de com-promis.
Voiciquelles
étaient lespériodes
de référenceadoptées
par l’I.N.S.E.E. :- Carnet de
comptes :
deux semaines(***)
- Interview : - dernière
quittance : loyer,
gaz, électricité- trois mois
: combustibles,
vêtements- un an : vacances, grosses dé- penses liées au
loge- ment,
mobilier et autres--- biens durables...
(*) Les résultats relatifs à l’année 1965 ont été publiés dans Etudes et Conjoncture n° 11
de novembre 1967.
(**) )
(***)
) Voir page suivante.7
L’I.N.S.E.E.
ayant pris
laprécaution de "dater"
avecprécision
les achats déclarés dans le carnet de
comptes
et dans certaines par- ties del’interview,
il est ainsipossible d’analyser,
endétail,
leprofil
des
"achats
déclarés au cours du temps, mettant en évidence de très sé- rieuses déformations de ceprofil,
et parconséquent d’importantes
erreurs de relevé et de
déclaration".
Notre étude
portera
successivement sur lesinscriptions
du carnetde
comptes
et sur les déclarations d’achats de biens durables.Précisons au
préalable,
lesprincipales caractéristiques techniques
de
l’enquête.
L’échantillon utilisé était strictement aléatoire et
représentatif
del’ensemble des
ménages
ordinaires résidant en France(*). L’enquête
aeu lieu de mars 1963 à février 1964 ;
chaque
mois un échantillonrepré-
sentatif de 2 150
logements
environ était visité. Ces 12 échantillons étaient de même structure maisrigoureusement indépendants ;
le nombretotal de
logements
échantillon s’élévait ainsi à 26026.On remarquera que la
répartition
del’enquête
entre ces différentespériodes
de l’année est très satisfaisante(seul
subsiste le très difficileproblème
desgrandes vacances) ;
en revanche larépartition
desenquêtes
à l’intérieur du mois était très
imparfaite - cf graphique
I.(**).
L’enquête
était lourde etdélicate,
le nombre de refus et d’aban- dons en coursd’enquête
adonc été relativement élevé. Plusprécisément,
voici
quels
furent les résultats des démarches desenquêteurs :
Notes de la page prec edente
(* *) L’influence de la longueur de la période de référence sur l’erreur aléatoire a fait
l’objet d’une autre étude de lI. N. S. E. E. utilisant comme matière première, les données d’une autre enquête communautaire (Etudes et Conjoncture n° 7 de juillet 1967).
(***) Le Marché Commun avait demandé une période de relevé de quatre semaines,
ce qui a été accepté par les autres pays mais non par la France ; l’ 1. :0J. S.E. L .
se défiant, avec juste raison, on va le voir, d’une période de relevé supérieure
à la semaine.
(*) L’enquête communautaire était limitée aux salariés et agriculteurs, isolés exclus, mais la France avait étendu l’étude à l’ensemble de la population.
(**) Il y a là un défaut non négligeable de l’enquête en ce qui concerne les dépenses enregistrées sur deux semaines (carnet de comptes), le volume des dépenses étant
soumis à des variations au cours du mois (fin de mois..) L’examen de ce gra- phique à conduit à contrôler avec beaucoup plus de soin la répartition dans le temps des enquêtes en ce qui concerne l’enquête permanente sur les budgets familiaux
lancée en 1965.
Revue de Statistique Appliquée, 1968 - vol. XVI - N° 4
Graphique 1
Evaluation jour par jour du nombre de carnets de comptes en cours de
remplissage.
9
Le nombre total de
ménages
pourlesquels l’enquête
a pu être ainsi terminée est de 16 089(*).
Les
enquêteurs,
au nombre d’environ450, ayant
pour laplupart
une certaine
expérience,
avaient reçu une instruction écrite de 72 pages(avec
enplus
des exercicestraités)
et avaient tousparticipé
à une sé-ance de formation de deux
jours
ausiège
de la DirectionRégionale
de 1’1. N. S. E. E. dont ilsdépendaient.
Cette séance d’instructioncomportait
de nombreux exercices
pratiques
en salle ;chaque enquêteur
devaitensuite exécuter deux interviews à blanc
auprès
deménages désignés
par le sort ; les
questionnaires correspondants
étaientcritiqués
en leurprésence.
Bienentendu, chaque enquêteur
savait que son travailpouvait,
à tout
moment,
être contrôlé.Les
enquêteurs
devaient rendrequatre
visites auxménages
dési-gnés
par le sort : au cours de lapremière,
étaitrempli
leprincipal questionnaire
del’interview,
etl’enquêteur
devait remettre auxenquê-
tés le carnet de
comptes
et les relevés individuels dedépenses
de lapremière semaine ;
au cours de la deuxièmevisite, facultative, l’enquê-
teur devait
s’assurer,
deux ou troisjours après
ledépôt
du carnet decomptes,
que la tenue de ce dernier neprésentait
pas de difficultés pour leménage interrogé ;
au cours de la troisièmevisite, qui
avaitlieu à la fin de la
première semaine, l’enquêteur
devait ramasser lepremier
carnet de relevés duménage
et laisser à celui-ci un deuxième carnet decomptes
et les relevés individuels dedépenses correspondants ;
ces relevés étaient ramassés lors de la dernière
visite, qui
étaitéga-
lement destinée à la deuxième interview du
ménage.
L’expérience
amontré,
nous le verrons, l’utilité de la visite del’enquêteur
à la fin de la lère semaine de relevé.II - ETUDE DU PROFIL DES ENREGISTREMENTS SUR LE CARNET DE
COMPTES.
Examinons maintenant dans
quelles
conditions étaitrempli
le car-net de
comptes
etquel
estl’enseignement
de l’examen desenregistrements quotidiens.
On a vu
qu’il
y avait un carnet decomptes
différent pour chacune des deux semaines de relevé.Le carnet de
comptes comportait
pourchaque jour
une double page et trois cadres :- le
premier,
réservé aux achats- le second et le troisième aux
produits
non achetés :légumes
et fruits du
jardin
ou del’exploitation
ouprélèvement
sur le stock ducommerce familial
(sans
cetteprécaution,
l’autoconsommation serait for- tement sousestimée).
Il était demandé au
ménage
denoter,
dans l’ordrechronologique
tous ses achats
(ou acquisitions gratuites)
réaliséspendant
lapériode
de relevé.(*) De l’échantillon initial de logements, en effet, il y a lieu de retrancher également
les logements qui à la date de l’enquête étaient vacants, ou servaient de résidence secondaire ainsi qu’un petit nombre de logements qui ne purent être retrouvés sur le terrain.
Revue de Statistique Appliquée, 1968 - vol. XVI - N° 4
En ce
qui
concerne lesachats,
ceux-ci devaient être notés lejour
de l’entrée du
produit
dans leménage,
non lejour
dupaiement,
ou bienentendu,
lejour
de la consommation.Le
champ
des consommations n’était en aucunefaçon
limité àpriori.
Ceci
permettait
desimplifier
au maximum lesexplications
données auménage, explications qui
étaient d’ailleursportées
sur le carnet decomptes lui-même.
Lesinscriptions
relatives aux postes étudiés par interview étaient facilementrejetées
par la suite.La
ménagère
devait noter pourchaque
article sadésignation
aussiexacte et
précise
quepossible,
ladépense
et laquantité ;
la nomenclaturene
figurait
pas sur le carnet decomptes,
cequi
auraitaggravé l’aspect
rébarbatif de
celui-ci,
exercé éventuellement un effet d’aide mémoire etprovoqué d’irréparables
erreurs de classement.Le carnet de
comptes
laissé à laménagère
étaitcomplété
par des relevés individuels dedépenses
remis aux autres membres adultes duménage.
Lors des deux séances de ramassage du carnet de
comptes
l’en-quêteur
vérifiait à l’aide d’un formulairespécial
que lesinscriptions
du’carnet de
comptes
étaient suffisammentprécises
pourpermettre l’emploi
de la nomenclature
projetée
etcomportaient
toutes les indications néces- saires :dépenses, quantité...
Ilpouvait
à cette occasionégalement
dé-celer certains oublis.
Ajoutons qu’une partie importante
des carnets decompte
ont, enfait,
étéremplis
par lesenquêteurs
à l’aide de la documentation réunie par laménagère (notes
remises par lescommerçants).
Analyse, jour
parjour,
desinscriptions
du carnet decomptes
L’emploi
d’un calculateurélectronique
apermis,
pour lapremière
fois en
France,
dans uneenquête nationale,
d’individualiser lors du dé-pouillement,
chacune desinscriptions
du carnet decomptes.
Pour
chaque inscription
onenregistrait :
- le numéro du
poste
de nomenclature- la
catégorie
de consommation :achat,
autoconsommation- la
dépense
- la
quantité
- la semaine de relevé
- le rang du
jour
de relevé(de
1 à14)
- le
jour
de la semaine(lundi, mardi, .... ) (*)
-
l’origine
du relevé : carnet decomptes,
relevé individuel dedépenses.
Cet ensemble d’informations est très riche. Il
permet
notamment de réaliser desétudes,
assez nouvelles enFrance,
sur les variations corrélatives desprix
et desquantités
en cequi
concerne lesproduits
(*) Plus précisément étaient enregistrés : le rang du jour de relevé ; le jour de la se-
maine ou avait lieu l’interview du ménage considéré - les relevés sur le carnet de comptes devant être entrepris le jour même de l’interview (les ménages n’ayant
pas respecté cette consigne ont été éliminé de l’analyse qui suit) ; le rang du jour de relevé détermine le jour de la semame correspondante
11
saisonniers ;
deprocéder
à des études decomportement
relatives auxdépenses
et auxquantités
consommées. Ilpermettait également
l’étudede l’évolution des
inscriptions
au cours de lapériode
derelevé,
dontnous allons donner ici les résultats.
Le tableaux I
et,
mieux encore, lesgraphiques
2 à 4 montrent que le nombred’inscriptions
e st nettement descendant.Tableau I
L’influence stimulante du passage de
l’enquêteur
à la fin de la lère semaine de relevéapparait cependant
trèsremarquable.
On noteraéga-
lement que la chute semble un peu
plus
lente au cours de la 2ème semai- ne de relevéqu’au
cours de la lère semaine ;peut-être
ceci montre-t-ilqu’une asymptote
serait assezrapidement atteinte,
le comportement d’ache - teuse et de"scribe"
de laménagère-échantillon étant,
au moinsprovi- soirement,
stabilisé.Le caractère
quelque
peu aberrant du dernierjour
estégalement certain,
nous trouverons facilementl’explication
de ce fait.Les causes de ces anomalies
sont,
àpriori,
etl’analyse
des don-nées le
confirmera,
les suivantes :- en tout
premier
lieu lalassitude, croissante,
de la ména-gère provoquant
un nombre croissant d’omissions.- on
pourrait
penserégalement, l’analyse
étant effectuée enfonction du nombre de
relevés,
que la lassitude de laménagère
se tra-duit aussi par des
inscriptions groupées,
de moins en moins détaillées...une
rapide analyse,
envaleur,
montre que cette cause d’erreur est né-gligeable
devant lapremière.
- nous rencontrons ensuite les
conséquences
des erreurs d’in-terprétation
desconsignes
del’enquête.
Certainesménagères enregistrent
Revue de Statistique Appliquée, 1968 - vol. XVI - N° 4
13
Revue de Statistique Appliquée, 1968 - vol. XVI - N° 4
15
à
tort,
en début depériode,
comme s’ils’agissait d’achats,
lesprélè-
vements effectués sur le stock familial. L’effet
"aide-mémoire"
du car- net decomptes joue
dans le même sens.- nous avons
déjà
cité l’influence des interventions del’enquê-
teur.
L’analyse produit
parproduit
fera mieuxappara3tre
laplace
deces différentes causes
d’erreurs.
-
(cf.
tableau II etgraphiques :
3 et4).
1. La lassitude croissante de la
ménagère
La
pente
desgraphiques
parproduits
varie avec lapériodicité
desachats
correspondants.
Le
pain,
lelait,
leslégumes frais,..
sont achetés presquequoti- diennement ; l’enregistrement
de ces achats en estfacilité,
et les oublis sont peu nombreux - il en est de même des repaspris
au restaurant,gardés
aisément en mémoire.Les omissions
augmentent plus rapidement
pour les achats moinsfréquents,
moinsmarquants
etégalement susceptibles
d’être moins bien contrôlés par laménagère : pharmacie,
coiffeur....Les
consignes
enfin semblentplus
aisément suivies en cequi
con-cerne les achats
qu’en
cequi
concerne l’autoconsommation.2. Le s erreurs
d’interprétation
et l’ influence"aide -mémoire"
du carnet decomptes
Le nombre anormal
d’enregistrements
relatifs auxpremiers jours s’explique
engrande partie
par des erreursd’interprétation
des consi- gnes.Il
apparaît
en effet que les achats deproduits
stockables sont for- tement surestimés en début depériode,
d’où la surestimation évidente desdépenses d’huile,
de sucre dansl’enquête.
Il semble que les
ménagères enregistrent
comme s’ils’agissait
d’achats le
prélèvement
effectué sur leurs stocks. Peut - êtreégalement,
leur attention étant éveillée par la
présence
du carnet decomptes,
mo- difient-ellesplus
ou moins inconsciemment lagestion
de leursstocks , anticipant
certains achats.L’emploi
d’un carnet decomptes vierge
n’a pas suffi à éliminer cet effet"aide-mémoire".
L’influence de l’observateur sur lecomporte-
ment observé
apparaît,
ici encore, comme une difficulté fondamentale des sciences humaines.3. Les interventions de
l’enquêteur
Le
premier jour
de lapériode
derelevé, l’enquêteur
aide la mé-nagère
à reconstituer sesdépenses ;
il sepeut
alors que des achats antérieurs soientparfois enregistrés
à tort, accentuant ainsi l’effet sur lespremiers jours
derelevés,
des erreursd’interprétation
mentionnéesplus
haut.De
plus,
legonflement
desenregistrements
relatifs auxpremiers jours
est un desaspects
de la tendance éventuelle de laménagère
à sur-estimer ses achats afin de faire une bonne
impression
surl’enquêteur . L’enquêteur
effectue une deuxième visiteobligatoire
à j.a fin de lapremière
semaine de relevé en vue de ramasser lepremier
carnet deRevue de Statistique Appliquée, 1968 - vol. XVI - N’ 4
17
Revue de Statistique Appliquée, 1968 - vol. XVI - N° 4
comptes.
Le nombre desenregistrements
relatifs au huitièmejour
de lapériode
de relevéaugmente, particulièrement
pour lesproduits
dont lafréquence
d’achats est trèsgrande,
comme lepain,
le lait. La visite del’enquêteur perturbe
en effet lapériodicité
desinscriptions
effectuéespar la
ménagère.
Cetteaugmentation
est alors due à la fois à un re-gain
d’assiduité de laménagère
et à larécapitulation
des achats oubliés parcelle-ci, qui
ontparfois
pu être notés parl’enquêteur parmi
lesinscriptions
du huitièmejour
seulement(ou parfois
duseptième).
Enfinle
quatorzième jour, qui précède
de peu lejour
de ramassage du second carnet decomptes
parl’enquêteur,
le nombre moyen desinscriptions
aug- mente pour deux raisons non exclusives :- Il s’écoule
parfois
deux ou troisjours
entre le dernierjour
de la
période
de relevé et lejour
de ramassage du carnet decomptes
parl’enquêteur.
Il sepeut
alors que lequatorzième jour
de relevé com-prenne la notation d’achats
postérieurs.
-
L’enquêteur,
constatant des oublis regroupe les achats cor-respondants parmi
lesinscriptions
du dernierjour
de lapériode
de re- levé. De toutesfaçons
lerattrapage
des oublis se faitplus
facilementpour les articles achetés peu de
temps
avant le passage del’enquêteur.
Analyse
parcatégorie
de consommateurLe
profil
desinscriptions
du carnet decomptes,
semblepouvoir
caractériser le soin
apporté
par lesménagères
àremplir
la tâchequi
leur était confiée - d’où l’idée toute naturelle d’étudier ces
profils
pour diversescatégories
deménages -
cequi
a été fait au tableauIII, lequel
ne fait d’ailleurs pas
apparaître
de différences biensignificatives.
Tout au
plus, peut-on
noter quel’importance plus grande
de l’auto- consommation chez lesagriculteurs
semble accentuerlégèrement
chezceux-ci la croissance du taux d’omissions.
Cette absence de
disparité
estréconfortante ;
il estsouhaitable ,
en effet que la
qualité
des observations soit aussihomogène
quepossible ,
en vue de
permettre
lescomparaisons
entre milieuxsociaux, lesquelles
constituent un des
objectifs
fondamentaux desenquêtes.
En
conclusion,
onpeut
noter,1/
Une nette tendance à la surestimation des achats deproduits
stockablespendant
les troispremiers jours
de lapériode
de relevé.2/
Des omissionsimportantes
pour de nombreuxproduits,
la fré- quence de ces omissionsaugmentant,
deplus
enplus
lentementd’ailleurs ,
avec le
temps.
Les
comparaisons
avec les données extérieures montrent que, dans l’ensemble les omissionsl’emportent.
Il semble donc
préférable
enFrance,
de s’en tenir à une semaine derelevé ;
c’est cequi
a été fait notamment dans l’étudepermanente
lancée en 1965 en France parl’I. N. S. E. E. ;
ou encore d’effectuer le relevé sur 9 ou 10jours
en abandonnant les deux ou troispremiers jours
en vue de réduire l’erreur relative auxproduits
stockables.Nous donnons en annexe, par
produit,
lerapport
des estimations annuelles dedépenses.
obtenuesd’après
la semaine de relevé etd’après
les deux semaines réunies.
19
Revue de Statistique Appliquée, 1968 - vol. XVI - N° 4
21
Ces données sont
précieuses
pour comparer les résultatsd’enquêtes
réalisées avec des
périodes
de relevé de unesemaine ; enquêtes
1956 -1957 ; enquête permanente (1965
et annéessuivantes)
avec ceux de l’en-quête
de 1963 - 1964.La méthode de Calcul
Le calcul des indices quu nous avons utilisés présentait
quelques
difficultés ;en effet, le nombre d’inscriptions varie, bien entendu, fortement avec le jour de la semaine (cf. tableau
IV).
Or larépartition
des dates d’interview à l’inté- rieur de la semaine était très imparfaite. Ainsi lejour
de l’interview(qui
est le jour de rang1)
est rarement un dimanche (cf. tableauV).
Les ménages, trèspeu nombreux,
qui
ont été interrogés ce jour là, ont un comportement, semble- t-il, assez aberrant, ce qui n’a d’ailleurs rien de surprenant ; il en résulte que l’indice le plus simple du nombre d’achats en fonction du rang du jour de relevése révèle assez instable, ce
qui
nous conduit à utiliser un indice un peu pluscomplexe.
Dans son
principe
l’indice relatif à un jour de relevé de rang donné est une moyenne arithmétique simple d’indices élémentaires correspondant à chacun des sept jours de la semaine.Tableau IV
Nombre moyen
d’inscriptions
journalières en fonction dujour
de la semaineChamp : ménages ayant commencé à remplir le carnet de comptes le jour de l’interview
Tableau V
Répartition des interviews selon le jour de la semaine Champ : ménages ayant commencé à remplir le carnet de
comptes le jour de l’interview
Revue de Statistique Appliquée. 1968 - vol. XVI - N 4
Chaque indice élémentaire est, à un facteur constant près, égal à la part relative du nombre
d’inscription nij
portée le jour de rang i par les ménages in- terrogés le jour j, par rapport au total du nombre d’inscriptions portées par cesménages.
La méthode est correcte si chacun des indices
Iij
n’est pas trop aléatoireet surtout si l’influence sur les
Iij
du rang du jour au cours de la période de relevé n’est pas marquée par celle d’autres facteurs que le jour de la semaine oùl’inscription
a été reportée : par exemple le jour de la semaine correspondant à la date de l’interview.Or le nombre des ménages
interrogés
le dimanche est tellement faible que même la moyenne d’indices devient aléatoire. De plus, il semble que le profilau cours du temps des indices
17
traduise l’influence de facteurs autres que le jour de la semaine et le rang du jour au cours de la période de relevé. Lesquelques ménages
qu’il
a fallu interroger le dimanche - ceux-ci n’étant vraisem- blablement pas souvent à leur domicile en semaine - semblent avoir effectué un assez grand nombre d’achats le dimanche.Le graphique 5 permet de comparer les profils des indices élémentaires correspondant à un jour d’observation donné en fonction du rang du jour au cours de la période de relevé.
Les points particulièrement aberrants ont été entourés sur ce graphique ; ils correspondent tous aux ménages interrogés le dimanche. Il était donc souhai- table d’éliminer les indices élémentaires
1 correspondant
à ces ménages.Mais l’élimination de ces indices
Il7
du calcul de la moyenne d’indices re- latifs au jour de rang i, crée undéséquilibre
dans l’importance accordée à cha-cun des jours de la semaine.
Afin de
supprimer
ce déséquilibre, chacun des indicesIij
a été rapportéaux inscriptions de 12 jours d’observation au lieu de 14 de
façon
à éliminer du dénominateur de chacun de ces indices élémentaires le jour de la semaine cor- respondant à l’indiceIi7.
Ainsi, par exemple, l’indice du 3ème jour
d’observation 4
est la moyenne de 6 indices élémentaires correspondant à chacun des jours de la semaine sauf le mardi : l’indice élémentaire correspondant au mardi est éliminé car le troi- sième jour d’observation pour les personnesinterrogées
le dimanche est un mar-di.
L’indice élémentaire, pour ce troisième jour d’observation, des personnes
interrogées
par exemple le lundi, estégal,
au facteur 1 200 près, au rapport du nombre d’inscriptions reportées le troisième jour d’observation par ces personnesau nombre total de leurs inscriptions, à l’exception de celles du 2ème et du 9ème jour d’observation . Les observations des 2ème et 9ème jours ont été éliminées du to-tal car elles correspondent à un mardi.
On a éliminé de la même manière les mardis des dénominateurs des 5 autres indices élémentaires relatifs au 3ème jour d’observation retenus dans notre calcul de moyenne d’indices.
Le tableau ci-après illustre la méthode de calcul (tableau VI).
Si l’on
désigne
par 03B1ijet 03B2ij
les rangs des jours ainsi éliminés du dénomi- nateur de l’indice élémentaire relatif au ième jour d’observation des personnes interviewées le j° jour de la semaine, le calcul des indicesIl
est effectué d’aprèsla formule (2) :
23
LO
0
Revue de Statistique Appliquée, 1968 - vol. XVI - N° 4
o U
On remarquera que contrairement à la formule (1) les indices élémentaires des différentes journées d’observation pour les ménages
interrogés
le jour j nese rapportent pas au même dénominateur. On voit ainsi comment ont pu être fa- cilement éliminés des dénominateurs de chacun des indices élémentaires certains jours de la période de relevé de
façon
à obtenir des indices qui ne soient pas trop aléatoires.Tableau VI
~ indice élémentaire dont on n’a pas tenu compte pour le 3ème jour d’observation
----diagonales permettant de repérer pour chaque ligne ceux des jours qu’il convient d’éliminer du déno- minateur des indices élémentaires du 3ème jour d’observation.
Ces indices sont cohérents. On voit en effet qu’ils sont
systématiquement
égaux à 100,quelque
soit le rang du jour de relevé, si l’on suppose que le nombre d’inscriptions reportées un jour donné n’est fonction que dujour
de la semaine etdu nombre total d’inscriptions des ménages
interrogés
un jour donné. Ils per- mettent par conséquent de mesurer les variations du nombred’inscriptions
enfonction du rang du jour de relevé - toutes choses étant
égales
par ailleurs -.Le tableau VII permet de comparer les valeurs des indices définis par les formules (1) et (2) pour chacun des 14 jours de relevé. Nous verrons qu’on observe
une relative stabilité des indices calculés par la formule
(2), quelle
que soit la catégorie de populationinterrogée ;
ceci permet de penser qu’une partie impor- tante de l’erreur aléatoire a été éliminée ; néanmoins, pour certains sous-ensembles, ces indices restent très aléatoires, c’est notamment le cas des pro- duits achetés peu fréquemment ou ceux dont la répartition des achats entre les jours de la semaine est très variable (le poisson par
exemple).
25
Enfin nous remarquons que les indices peuvent être légèrement affectés de quelques erreurs sur la date exacte des dépenses, en particulier dans les rele- vés individuels de dépenses.
Tableau VII
Comparaison des indices définis par les formules
(1)
et (2) pour les quatorze jours de relevéIII - PROFIL DES ACHATS DE BIENS
D’EQUIPEMENT
DECLARES DANS L’INTERVIEWL’examen du
questionnaire, reproduit
icipartiellement,
montrecomment étaient
enregistrés
les achats de biensd’équipement (pages
9et 10 du
questionnaire),
pour un certain nombre de biensimportants ,
dont la
liste, limitative, figurait
sur une carte montrée à la personneinterrogée ;
on demandait d’abord(page
9 duquestionnaire)
pour chacun de ceséquipements,
si leménage,
ou l’un de ses membres lepossé- dait,
et sioui,
en combiend’exemplaires.
Dans une deuxième
étape,
onnotait,
pour chacun desappareils
ouvéhicules ainsi
dénombrés,
l’année et le moded’acquisition.
Dans un troi-sième
temps,
les achats effectués au cours des 12 moisprécédents
étaient étudiés - leprix
total et le moisd’acquisition
notamment étaientenregistrés.
En ce
qui
concerne un second ensemble de biensdurables,
de moindre valeurunitaire,
on notait immédiatement les achats effectuésau cours des 12 derniers
mois,
une liste étantégalement
montrée à lapersonne
intérrogée (cf.
page 10 duquestionnaire), puis
ces achatsétaient
analysés
suivant les mêmes modalités queplus
haut(cette
der-nière
étape
étant commune aux deux ensembles de biensd’équipement) .
On notera le caractère très
analytique
de la démarchesuivie,
lesefforts réalisés pour aider les mémoires des personnes
interrogées
pourséparer
nettement les différentesétapes,
et queenfin, chaque
fois queRevue de Statistique Appliquée, 1968 - vol. XVI - N° 4
cela avait paru
possible,
on étaitparti
despossessions,
faciles à enre-gistrer
pour arriver aux achats de l’année. Nous allons voir que, mal-gré
cesprécautions,
les défaillances de la mémoireapparaissent
très notables.III - LES AUTRES DEPENSES IMPORTANTES
38. Equipement du ménage - lère liste de biens durables
Voici une liste de biens durables et de véhicules - Indiquer quels sont ceux que possède le ménage ou l’un de ses membres - Compter tous les articles appartenant à l’une quelconque des personnes composant votre foyer : ne
pas oublier le cas échéant, les biens d’équipement qui se trouvent dans une résidence secondaire.
Ne pas compter les article loués ou prêtés, ni les appareils définitivement hors d’usage, ni les appareils ou véhicules à usage exclusivement professionnel - TENDRE LA CARTE n° 1 et la lire lentement.
27
39. Autres biens durables importants - 2ème liste
a) Voici une deuxième liste d’articles - Indiquer quels sont ceux,. achetés l’un quelconque des membres de votre foyer au
cours des 12 derniers mois ; c’est-à-dire la période allant a, au on n’oubliera pas de mentionner les achats d’occasion ou à tempérament.
TENDRE LA CARTE N° 2 et la lire lentement
40. Au cours des 12 derniers mois, un des membres de votre foyer a-t-il acheté un ou plusieurs des biens de ces listes (n° 1 ou n° 2) comme CADEAU, à des personnes n’appartenant pas à votre foyer
Si oui, préciser lesquels (par ex, : réfrigérateur...)
41. Aux ménages disposant d’une résidence secondaire
Au cours des 12 derniers mois, avez-vous acheté un ou plusieurs biens de ces listes pour équiper votre rési- dence secondaire ?
Si oui, préciser lesquels (par ex. : cuisinière à charbon) :-
Revue de Statistique Appliquée, 1968 - vol. XVI - N° 4
Il
importe
ici dedistinguer :
a)
l’oubli d’un achat réalisépendant
lapériode
de référenceb)
l’erreur sur la date d’unachat ;
si l’erreur consiste à rappro- cher cet évenement(effet télescopique),
le nombre d’achats sera sures-timé
(certains
achats antérieurs à lapériode
de référence étant considé- rés àtort,
commeayant
été effectuéspendant
cettepériode),
l’erreur desens contraire
conduisant,
bienentendu,
à une sous-estimation.c)
l’inexactsouvenir
d’une descaractéristiques (prix
parexemple)
d’un achat déterminé.
La
précision
demandée sur le mois d’achat va nouspermettre
d’abor- derl’analyse
de ces erreurs de dénombrement(erreur
detype
a etb)
sans
qu’il
nous soit d’ailleurspossible
de les isolerrigoureusement.
L’enquête était,
on lerappelle,
réalisée par vaguesmensuelles,
demars 1963 à février
1964 ;
chacun des 12 échantillonsétant, après
re-dressement, représentatif
de l’ensemble desménages français.
Les achatsde biens durables étant
enregistrés
mois par mois sur 12mois,
on dis-posait
pour chacun des mois du calendrier d’autant d’estimations du nombre d’achats effectuéspendant
ce moisqu’il
y avait de vagues d’en-quête
au cours des 11 mois suivants. Parexemple,
les vaguescomprises
entre mars 1963 et
janvier
1964 fournissent 11 estimations différentes du nombre d’achats effectués en février 1963. Nous utilisons seulement les résultats relatifs aux"mois d’achat"
allant deseptembre
1962 à août1963,
pour chacundesquels
ondispose
de six estimations au moins.Les achats de biens durables étant peu
fréquents
il ne nous a pas étépossible
d’étudierséparément chaque
bien- aussi nous nous contente- rons dedistinguer
un trèspetit
nombre de groupes.Les résultats obtenus sont
dignes
d’êtreremarqués -
Le-s souve- nirs desménages
semblent en effet obéir à une loiclassique
d’oubli ene-t
(où
t est letemps
écoulé entre l’achat etl’interview).
Plus
précisément,
pour chacun des groupes de biensétudiés,
lesrésultats relatifs aux nombres mensuels d’achats
s’ajustent
convenable- ment sur la"loi" :
ou i
repère
le mois d’achat(i = 1, 2
...12)
j repère
le mois d’interview(j =
mars 63 ... février1964) nij est
le nombre d’achat du mois i estimé àpartir
de la vagued’enquête j
(nij
estobservé).
nii donnée
calculée, désigne
le nombre d’achats du moisi,
déclarésdans une
enquête
réalisée ce mêmemois,
etsupposés
necomporter
au-cune erreur de mémoire
j- i est
le nombre moyen de mois écoulé entre l’achat et l’interview euij est un facteurpurement
aléatoire(d’espérance mathématique égale
à