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Le lichen unguéal : aspects cliniques et prise en charge

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Légendes

Figures 1 et 2. Hyperstriations longitu- dinales avec fi ssures distales et amincisse- ment des tablettes unguéales.

Figure 3. Trachyonychie de l’enfant.

Figure 4. Lunule marbrée au cours d’un lichen unguéal.

Le lichen unguéal : aspects cliniques et prise en charge

Nail lichen: clinical aspects and management

I. Zaraa

1

, S. Goettmann

2

, R. Baran

2

(

1

Service de dermatologie, hôpital Bichat - Claude-Bernard, Paris ;

2

Nail Disease Centre, Cannes)

L e lichen est une dermatose infl ammatoire de la peau, des muqueuses et des phanères. Son étiopathogénie est complexe et incomplètement élucidée.

L’atteinte unguéale est rapportée chez 2 à 16 % des patients présentant un lichen plan. Elle peut être isolée, ne représentant toutefois que 2 % des lichens  (1) .

Toutes les structures de l’appareil unguéal peuvent être concernées, ce qui explique les différentes variétés cliniques. D’autres maladies de l’appareil unguéal partagent des caractéristiques cliniques avec le lichen unguéal, rendant le diagnostic de lichen diffi cile devant une atteinte isolée de l’ongle.

L’évolution est imprévisible, elle peut être cicatricielle, d’où l’importance d’un diagnostic précoce.

Parmi les patients présentant un lichen unguéal, 25 % ont eu ou auront une atteinte extra-unguéale. Celle-ci peut précéder l’atteinte cutanée, en être concomitante, ou la suivre.

Une analyse fi ne de ses différentes manifestations permet de faire un bilan lésionnel.

Seule la biopsie permettra d’affi rmer la nature lichénienne de l’onychodystrophie et de soumettre le malade au traitement.

Le traitement est guidé par la nature et l’étendue des lésions. Il est habituellement fondé sur une corticothérapie.

Clinique

Le lichen est habituellement observé chez l’adulte (âgé de 50 à 60 ans), mais la pathologie a aussi été constastée chez l’enfant (1-5). Il peut toucher 1 seul ongle, les 20 ongles, ou seulement quelques ongles. Les doigts sont plus souvent affectés que les orteils (1-4). L’atteinte lichénienne peut apparaître soit simultanément sur tous les ongles, soit de façon progressive. Un événement stressant précède habituel- lement l’apparition de la poussée de lichen .

La sémiologie de l’atteinte unguéale dépend du site de l’infl ammation et de son intensité. La présentation clinique est polymorphe (1-5). L’hyperstriation longitudinale de la tablette unguéale est le signe le plus fréquent et le ptérygion le plus spécifi que.

D’autres symptômes sont souvent observés.

L’atteinte de la matrice est commune, conditionnant les modifi cations de la tablette ; elle se traduit par une onychorrhexie, une hyperstriation longitudinale avec fragilité de la tablette unguéale, des fi ssurations distales ou longitudinales, un amincissement partiel ou total de la lame unguéale (fi gures 1 et 2) . Des dépressions ponctuées sont rarement observées. La fragilité des ongles est caractéristique. Elle s’explique avant tout par l’amincissement global de la tablette.

L’atteinte de la matrice proximale est à l’origine de trachyonychie et des sillons de Beau. La trachyonychie lichénienne, habituellement observée chez l’enfant, est le plus souvent de pronostic favorable, sans évolution cicatricielle (fi gure 3) .

Lichen • Hyperstriation • Ptérygion .

Lichen • Striations • Pterygium.

Cas clinique

(2)

4 2 1

3

Cas clinique

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Légendes

Figures 5 et 6. Atteinte cicatricielle à type de ptérygion au cours d’un lichen unguéal.

Figure 7. Forme érosive au cours d’un lichen unguéal.

Figure 8. Stade cicatriciel au cours d’un lichen unguéal avec une anonychie.

Figure 9. Onycholyse au cours d’un lichen unguéal.

Figure 10. Aspect hyperkératosique, strié, du lit au cours d’un lichen unguéal.

Figure 11. Dégantage lichénien.

L’aspect marbré de la lunule, associé ou non à une leuconychie, est consécutif à l’atteinte de la matrice distale (figure 4, p. 45).

La présence d’une mélanonychie longitudinale témoigne de l’activité des mélanocytes de la matrice.

Au stade cicatriciel, il est classique d’observer un ptérygion consécutif à une fusion postinflammatoire entre la matrice unguéale et le repli sus-unguéal. Il se traduit cliniquement par un “defect longitudinal”, bordé latéralement de 2 ailerons latéraux, parfois koïlonychiques. Il est très évocateur du lichen, mais non pathognomonique (figures 5 et 6).

Les formes érosives évoluent volontiers vers des atteintes cicatricielles (figure 7).

Une anonychie partielle ou totale peut être observée au stade cicatriciel (figure 8).

Elle a habituellement un retentissement important sur la qualité de vie des patients à cause de la gêne fonctionnelle (prise défectueuse des petits objets, absence de plan de contre-pression) qu’elle occasionne et à cause de son caractère inesthétique.

L’atteinte du lit se traduit par une onycholyse blanche ou jaunâtre avec ou sans hyperkératose sous-unguéale, majeure dans certains cas, soulevant alors la tablette unguéale (figure 9). Le lit peut prendre un aspect épaissi, strié, parfois atrophique ou cicatriciel (figure 10).

Au niveau du repli sus-unguéal des papules lichéniennes, une coloration érythéma- teuse ou violine, par atteinte de la face ventrale, peut être observée.

Bien qu’elles soient rares, il est important de reconnaître certaines formes cliniques, tels le lichen plan xanthonychique, le lichen striatus onychodystrophique, le dégan- tage lichénien (6, 7).

Nous rapportons ci-dessous une observation exceptionnelle de dégantage lichénien (figure 11) : elle concerne un haut fonctionnaire sénégalais de 50 ans qui a consulté pour une dystrophie des 10 ongles des mains. Certains montraient des restes de kératine unguéale, d’autres étaient caractérisés par une onychomadèse avec l’ap- parition d’un nouvel ongle. Toutefois, 2 signes étaient partagés par les 10 ongles : d’une part, la production blanchâtre à la base des tablettes, d’autre part l’œdème du repli sus-unguéal, curieusement indolore, mais sensible à la pression. À mesure que s’effectuait notre pression progressive et insistante du repli sus-unguéal, le matériel blanchâtre est en effet devenu plus important tandis que nous assistions à l’extrusion distale de tout l’appareil unguéal, suffisamment rigide pour évoquer un poisson-lune largement ouvert à l’arrière.

Le patient était par ailleurs en excellente santé. Ses examens biologiques étaient normaux et il n’avait pas d’antécédents médicaux particuliers.

L’étude histologique de l’appareil unguéal a permis de porter le diagnostic de lichen plan unguéal hyperkératosique et pseudobulleux avec une mise en évidence spec- taculaire des structures épithéliales détachées (zone ventrale du repli sus-unguéal, matrice, lit et hyponychium) et libérées de leur base dermique.

Le patient a décliné l’offre thérapeutique que nous lui avons proposée : une cortico- thérapie systémique, injectable. Puis nous l’avons perdu de vue.

Les différentes manifestations du lichen unguéal sont souvent associées entre elles.

Certains patients rapportent l’augmentation de la sensibilité à la pression, avec un retentissement fonctionnel important (encadré 1, p. 48).

Discussion

Le diagnostic différentiel ne se pose pas en présence d’un lichen cutané et/ou muqueux typique. En cas d’atteinte isolée, la variabilité des manifestations cliniques fait discuter de multiples diagnostics différentiels (tableau, p. 48).

Cas clinique

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5 6 7

8 9 10

11

Cas clinique

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Encadré 1 Encadré 1

En cas de suspicion de lichen unguéal isolé, une confirmation diagnostique par biopsie de l’appareil unguéal est recommandée avant la mise en route du traitement. À l’histo- logie, on retrouve un infiltrat inflammatoire en bande à la jonction dermo-épidermique, avec présence de corps ronds, altérant la membrane basale, avec hypergranulose, acanthose et spongiose.

L’évolutivité du lichen unguéal est imprévisible (1-4). Certains patients présentent rapi- dement une atteinte destructrice aboutissant à des séquelles permanentes, d’autres ont une évolution plus lente. Des rémissions spontanées sont même possibles.

Le pronostic est variable. Des séquelles définitives cicatricielles avec destruction de l’appareil unguéal sont l’apanage des formes sévères, d’où la nécessité d’un diagnostic et d’une prise en charge précoces (1-4) [encadré 2].

Le lichen atteint la peau, les muqueuses et les phanères ; les ongles en font partie. La maladie peut être limitée à l’appareil unguéal. Ces changements observés dans l’appareil unguéal dépendent surtout du siège de l’inflammation. Les principales manifestations unguéales du lichen sont :

une hyperstriation longitudinale ;

une onychorrhexie ;

un amincissement de la tablette unguéale ;

un érythème lunulaire ;

une onychoschizie proximale ;

des fissurations et des fentes ;

un ptérygion ;

une anonychie.

Tableau. Résumé des principaux diagnostics différentiels du lichen unguéal (liste non exhaustive).

Type d’atteinte psoriasique Diagnostics différentiels

Hyperstriations Psoriasis, pelade, amylose, sarcoïdose, stries physiologiques Dépressions ponctuées Pelade, eczéma, syndrome de Fiessinger-Leroy, psoriasis

Leuconychie Onychomycose, ongle équisegmenté hyperazotémique, ongle cirrhotique, double bande blanche hypo-albuminémique Trachyonychie Psoriasis, pelade

Leuconychie Onychomycose, ongle équisegmenté hyperazotémique, ongle cirrhotique, double bande blanche hypo-albuminémique Ptérygion Congénital, brûlures, traumatisme, radiodermite, maladie du greffon contre l’hôte, pemphigoïde cicatricielle,

nécrolyse épidermique toxique, troubles circulatoires

Hyperkératose sous-unguéale Onychomycose, pityriasis rubra pilaire, acrokératose paranéoplasique, pachyonychie congénitale, pelade, maladie de Darier, psoriasis

Onycholyse Onychomycose, dermite de contact, microtraumatismes répétés, carcinome épidermoïde, psoriasis, pelade Mélanonychie longitudinale Mélanonychie fonctionnelle, mélanonychie ethnique, nævus matriciel, lentigo, mélanome

Encadré 2 Encadré 2

Un examen clinique minutieux, souvent associé à un examen histologique permet de poser le diagnostic positif et d’instaurer le plus rapidement possible un traitement adapté permettant d’éviter une évolution cicatricielle.

Le traitement est long, avec des résultats inconstants. Son choix dépend du type de l’atteinte et de la sévérité de cette dernière.

Cas clinique

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Traitement

Le traitement du lichen unguéal n’est pas standardisé. Le traitement est difficile, avec une efficacité souvent incomplète. Il varie selon la topographie et la sévérité de l’atteinte lésionnelle, d’où l’importance d’une bonne connaissance des corrélations anatomocliniques détaillées dans la partie clinique.

Aucun essai clinique n’est rapporté. Les études disponibles manquent de puissance suffisante pour extrapoler un schéma thérapeutique standardisé. La revue de la litté- rature retrouve 5 séries rétrospectives concernant le lichen unguéal, dont une seule pédiatrique (1-5). Dans toutes ces séries, la corticothérapie (locale, intralésionnelle, systémique) est le traitement le plus souvent utilisé (1-5).

Une corticothérapie locale avec un dermocorticoïde de classe 1, éventuellement associé à du tazarotène 0,1 % sous occlusion, peut être prescrite, principalement sur les atteintes isolées du lit unguéal. Le tacrolimus a été également utilisé, mais avec une efficacité discutable (8). Ces différents traitements peuvent être associés entre eux. La pénétration de ces traitements locaux est réduite dans les différentes structures de l’appareil unguéal. Ils n’ont pas d’efficacité sur l’atteinte matricielle (encadré 3), qui constitue la manifestation la plus fréquente.

Devant une atteinte mono- ou paucidactylique, la corticothérapie intralésion- nelle seule (matrice et/ou lit de l’ongle) est indiquée (une injection d’acétonide de triamcinolone dilué par mois, pendant 3 à 6 mois). L’efficacité des injections intra- lésionnelles de corticostéroïde a été largement documentée (1). La douleur pendant l’injection reste le principal effet indésirable. Elle peut être atténuée par une réfri- gération ou à l’aide d’un appareil à vibration. Une hémorragie sous-unguéale, une atrophie réversible sur les sites d’injection, une hypopigmentation péri-unguéale, des paresthésies passagères ont également été notées.

Le traitement des formes graves polydactyliques repose sur la corticothérapie géné- rale dite de blocage : une injection intramusculaire d’acétonide de triamcinolone pendant 6 mois (1 mg/kg chaque mois pendant 1 ou 2 mois, puis 0,5 à 0,6 mg/kg par mois) semble plus efficace que la corticothérapie per os (1).

L’association à une corticothérapie intralésionnelle est parfois nécessaire, dans les formes graves et/ou pour certains ongles où l’atteinte est récalcitrante.

L’amélioration survient après 2 à 3 mois de traitement. Des récidives sont fréquentes, même après plusieurs années , ce qui nécessite alors la reprise du traitement.

Parmi les rétinoïdes per os, l’alitrétinoïne constitue une alternative thérapeutique, en cas de contre-indication à la corticothérapie générale ou d’échec de celle-ci (9).

D’autres traitements sont rapportés dans la littérature avec une efficacité variable ; on citera le méthotrexate et la ciclosporine (10). Leur utilisation à long terme n’est pas dénuée d’effets indésirables. Un cas de lichen unguéal traité par étanercept a été

rapporté (11).

II

Références bibliographiques

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3. Piraccini BM, Saccani E, Starace M et al. Nail

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Nail lichen planus in children: clinical features, response to treatment, and long-term follow-up.

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Florian B, Angelika J, Ernst SR. Successful treat- ment of palmoplantar nail lichen planus with cyclo- sporine. J Dtsch Dermatol Ges 2014;12(8):724-5.

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Case Rep Dermatol 2010;2(3):173-6.

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

Cas clinique

Encadré 3 Encadré 3

Les localisations matricielles qui constituent l’atteinte la plus fréquente au cours du lichen nécessitent :

devant une atteinte mono- ou paucidactylique, des injections intramatricielles de corticoïdes ;

devant une atteinte polydactylique, une corticothérapie systémique de blocage intramusculaire.

Les atteintes du lit de l’ongle, plus rares, sont améliorées par l’application de dermocorticoïdes directement sur le lit.

Références

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