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Rail et colonialisme français : le cas du Dakar-Niger, 1878-1923

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Academic year: 2021

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AIL 'E T ~ 0 LON l ALI S M E ~ {R, A N CAlS

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Le cas du Dakar-Niger.

1878-1923

.... c

A thesis submitted to the Fa cult y of Graduate 5tudies and Research, McGill Univer~ity, in partial fulfilment of the requirements for the degree of Master of Arts

Mi chêle Mondoux Department,of History

April

1975

,.

(3)

-•

RAIL ET COLONIALI~E FRANCAIS:

Le cas du Dakar-Niger, 4.pe _ _ _ _ _ 1878-1922 _asa.. _

Michèle Mondoux

~aster of Arts History

RESLME

L'autopsie de l'installation française en Afrique occidentale révèle qu'un fait majeur allait ohanger, dans la deuxiàne moitié du XIXe sil!cle, les termes des relations franco-africaines jusqu&-là. ba~ées sur des ententes de principe. Il s'agit de la construction d'~ rail, le Dakar-Niger, dont le cheminement allait légit~er la

conquête française du Sénégal et haut-Niger. L'entreprise, d'une durée globale de quarante-cinq années, revêt le caractère d'un

vas-"./"

te projet destiné à réaliser ce que le gouverneur Faidherbe a ap-pelé ~e "Afrique compacte", c' est-A-dire, encadrer de façon

sys-tématique le! divers points où l'influence française se faisait

1 é •

sentir depuis le début de la pr sence europeenne en continent afri-cain. Le Dakar-Niger fournit ai~i trois étapes selon lesquelles s'établiront à la fois le style

~

la. conquête française et les modes de refus, d'adaptation et de contestation du rail. Il s'a-• git de l'étape Dakar-Saint-Louis, Kédine-Niger et Thiès-Kay~s.

Notre propos sera donc de tenter d'évaluer, du point de vue his-torique, la place réelle tenue par un ~il utilisé et idéal!!té par

G

une structure coloniale servie par des impératifs à court terme

.., .'

ou hypothétiques, a~nsi que de mesurer, via ce rail, la gradation active des répons~s africaines qui se sont manifestées le long de son parcours.

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(4)

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RAIL ET COLONJ:ALISHE FRANCAIS: Le cas du Dakar-Niger, 1878-1923 Michèle Mondoux Kaster of Arts History w ABSTRACT

J

French colonialism in West Africa revea1s that by the second half of the

ninetee~th cent~ry,

a major

f~ture

ws going to change the tenna of French\historical involvem~nt

in Africa. A ra ilway , the Dakar-Nig~r, was in fact put forward as a pretext for conquest before the international alignment for the great partition of Africa. The Fren'rh had decided then that their share in the partition would gi ve them an empire stretchin~ trom the mouth of the Sene-gal River ta the furthest possible land in the interior of the African continent. That great project lasted fort

y-;

rive years giring France much less than what she had

expect-ed. Built along three main lines, the Dakar-Niger revealed the full extent of Governor Faidherbe 1 s illusionary dream

and the real objectives of that railway entirely devoted ta political conquest and rule in West Africa. Our purpose will then be ta analyze these three different parts of an

impe~ialistic and conquering railway and to identify the

, ü

ways ta African responses to it.

-< f

(5)

..

.

, !»

TABLE DES MAT IERES

INTRODUCTION •••••.•..••.•••• ~... i

(,'

Chapitres 1. UN

R.é.rL

CONQUERANT: II. lS78-c.l9OQ

..•...•.•.•.•...

Antécédents Historiques d'une

Présence Européenne ••••••••••••••••••••••••••••••••••

Prélude d'une Conquête •••• ~ ••.•••••••• : ••••••••••••••••

...

Le Rail Conquérant

Le Dakar-Saint~louis

...

Deux Réponses Africaines au

Rail Conqu~rant

...

Conclusion

...

Notes et Références

...

RAIL ET COWNIALISME FRAUCAIS EN A.O.F.:

1900-1923 .~ ... ...•....•....•.•... Dakar-Niger et Encadrement Ecànomique

de l,'A.O.F.

.

... .

La. Tranche Finale du_IJIlka.~N1,ger:

le .frhiès-Kayes

...

Dakar-Niger et Bilan Colonial

...

Rail et "Association"

...

L'Echec Colonial du Dakar-Niger •••••

Dakar-Niger et Réactiotffl Africaines

.. ..

.. ..

..

..

..

..

..

..

..

..

.. .. ..

..

..

.. ..

...•.

au XXe Siècle Notes et Références

...

f CONCLUSION

...

APPENDICES

...

BIBLIOORAPHIE

...

, Of ('.: l l 9 16 23 30 38 40 44 45 50 54 59 63

69

74 78

al

92

..

..

(6)

Iv ILLUSTRATIONS Cartes. 0 1. L'Empire Toucouleur, c.1880 •••••••••••••••••••••••••••••

35

2. Rail Sénégalais et Tracés du Dakar-Niger,

~1911 •••••••••••••• ,... 52

3. Cartoeraphie du Rail Ouest-Alricain, W'c .1923 •.•••••••••••• 57

Table~

1. Taux de Mortalité du Chemin de Fer de la

Côte d t Ivoire ... e, • • • • • • • • • ~ • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •

2. Kilométrage du Rail en A.O.F., c.19J6

.

...•...

63

64

-1

-1 !

(7)

INTRODUCTION

~

~ 15 septembre r8JO, la ligne de chemin de fer Li verpool-Manchester inaugurait l'entrée officielle de la Grande-Bretagne dans ce qu'~ est con-venu d'appeler la deuxième phase de la Révolutiol1 Industrielle, l'indus-trialisation. Dès lors, tou~ le monde occidental allait se façonner au nou-veau rythme et à la nouvelle dynamique instaurée par le "cheval de fer" dont

la contribution à une Civilisation allait €tre plus révolutionnaire que l'ap-port de la mécanisation à la production du coton. L'ère modeme s'ouvrait, définitivement dévolue à conquérir l'espace physique.

~ corollaire historique de cette démarche fut la formation, tout au lohg du XIXe siècle, des composantes générales de l'Occident, synthétisées par l'avènement d'un monde capitaliste complexe et générateur d'un puissant

\,

dynamisme social, politique et économique. L'im~ct f~na.1_de(_ces- traRS-r~-mations devait-çonduire à

des

confrontations qui débordèrent du continent européen et qui, dans une continuité historique, allait ouvrir l'ère de l'impérialisme mondial vers ces parties de la planète qui évoluaient en de-hors du. circuit occidental.

,Inévitable, l'Impérialisme occidental l'était pour une raison majeure: la Grande-Bretagne devait €tre rattrapée, sinon agalée. Pour ce faire, nulle autre façon que de tenter de minimiser ou de diversifier la concurrence qui établissait graduellement le style des relations internationales de l'époque. De fait, cette schématisation laisse supposer qu'au-ctelà du fait historique comme tel, existe une collusion d'éléments qui ont conduit les nations euro-péennes as' emboîter mutuellement le pas dans le partage

d~

monde

non-occi-~ ,

dental et, en dernier ressort, à servir de couverture à ces éléments qui traduisaient les nouvelles orientations véhiculées par le monde industriel. Par conséquent, retracer les origines de l'Impérialisme reviendrait à dissé-quer l'impact global d'un fait historique, l'industrialisation, lui~ême rattaché à la continuité historique, sur un mode de pensée et d'action.

C'est ainsi que nous nous trouvons face au "partage" de l'Afrique. La

présence européenne sur les côtes africaines remonte au tout premier moment .du mercantilisme médiéval, prélude du déplacement commercial de la

(8)

, "

\

ii

les Amériques, l'Asie et l'Afrique, pour faire tr~ompher l'économie de

plan-tations

~~

de traite basée

~~le

monopole de COmpagnies â' charte royale.

Le commerce triangulaire s'installe au profit des besoins nouveaux qui

ali-mentent une présence croissante des flottes européennes dans les eaux

loin-taines. Sur le continent afric~in, le commerce transsaharien et atlantique

s'adaptent aux variations du commerce international dont la direction est

passée de l'Afrique ~ Nord vers la c6te occidentale qui pouvait desservir

â la fois l'Europe et le Nouveau~onde. L'or était l'élément-clé des

nou-vea~ circuits, accompagné par l'ivoire, le bois, la gomme, la cire

d'a-beille, l~ cuir, les épices et le poivre. Au milieu du XVIIe siècle, un

nouvel élément accentue l'apport africain au cormnerce interttational_: ___ ~a----

---

-traite des esclaves qui devait_ ~~~er_la-pFOSpér1té-Qes Cara!bes et

entre-tenir-pour-deux--slècles la plus grande transplantation humaine.

Mais, peu à peu, le commerce Iflégiti.œ.elf déracine le camnerce des

es-t

claves et s'installe sur les côtes africaines, donnant ainsi le ton à une activité d'importation-exportation basée sur l'exploitati&n d'une denrée

,

-spécialisée, notamment l'huile de palme et ·l'arachide. Graduellement, cette économie côtière amène le colonisateur vers l'intérieur, question de

rechercher une possible di~ersification à un commerce, en définitive,

flo-rissant. Un instrument se présente comme élément de pointe dans cette dé-marche qui tente d'intégrer le plus grand secteur géographique possible: le rail.

L'~pact du rail sur l'évolution du Capitalisme occidental facilitait

en fait sa venue sur la scène africaine dès que les premiers symptômes de

la grande Ifpartitionlf firent leur apparition.. De par sa nature de voie de

communication, le rail devint, pour les colonisateurs, _voie d'accès vers l'intérieur, implications politiques et économiques se suivant de très près.

Tel est le point de départ d'une aventure, le Dakar-Niger, dont le ~ite sera

l'Afrique de l'ouest, et l'instigateur, la France colonialiste du XIXe siècle. L'entreprise revêt le caractère d'une vaste opération destinée à res-serrer les bribes de territoires côtiers ouest-africains qui, depuis le

(9)

----•

iii

en Afrique occidentale. Ce laps de temps, apparemment statique en fonction

d~un XIXe siècle où se réveille l'insti~ct colonial européen, prélude de façon assez ~ignificative la suite des événements qui, logiquement, entraf-neront la France colonialiste à vouloir cadrer ces éléments épars dans un vaste ensemble.

1

Le propos de la présente synthèse sera donc d'analyser le Dakar-Niger en tant qu'agent concret de l'installation française en Afrique occiden-tale à la fin du XIXe ~t au début du XXe siècle. Deux périodes distinctes m;rqueront l' év~llJ.tion de cette li-gne ferrovta1~re ~ corresponaant chacune -

~--~-

-deux époques différentes de l'engagement colonial français. Sur ces -deux

""

sections se grefferont les réponses africaines au Dakar-Niger, réponses qui varieront suivant le temps et la nature de l'impact causé par la venue d'un

"-rail~ Il s'agira ainsi d'établir les frontières entre le refus, l'adapta-tion et la contestal'adapta-tion du rail, frontières qui définiront l'impact réel du-Dakar-Niger.

Av~c le Dakar-Niger, la France de la fin du XIXe siècle s'engage tout d'abord dans une longue série de contradictions expansionnistes qui adoptent, selon les instincts du marnent, le style des plus enthousiaste ou des plus, "laisser faire". Une seule direction semble avoir conservé un dynamisme co-hérent et constant à ce projet ferroviaire: celle d'une expansion pour une expansion. ,Il nous suffira de retracer les fondements les plus lointains et les plus concrets de cette démarche historique p;~ déceler, au fur des an-nées, l'absence de toute rationalisation de la conquête, sauf celle d'acqué-rir gloire et lauriers à l'échelon individuel. Il s'agit d'une volonté bien spécifique, celle des coloniaux décidés à braver l'inertie de la population et du gouvernement français face à tout engage~ent colonial. Entre eux et la métropole n'existe qu'un lien organique qu~ n'a rien â voir avec une sur- ' vie nationale ou un destin outre-mer intégré à la vie nationale. Le premier temps du Dakar-Niger, l878-c.1900, s~ra celui de la conquête.

Le deuxième temps, c.l900-c.l923, s'ouvre sur l'époque de l'implantation de structures coloniales à la recherche de' justifications théoriques et pra-tiques post-facto, qui tentent de corriger le manque de coordination et de vue d'ensemble de l'ère conquérante. Le Dakar-Niger deviendra le témoin et

(10)

..

"

/ -iv

l'agent perpétuel d'une installation coloniale a!nai que le pivot central

-autour duquel on essaiera de rendre fo~nnel le vaste empire

ouest-

----africain. Cette section aura-à -déterminer l'aspect utilitaire de ce rail colonial, compte-tenu de la primauté économique qui lui sera dévolu. Nous trave!serons donc l'ère post-conquête jusqu'à la fin des travaux du Dakar-~-Nfger, en accentuant les grandes lignes éconamiquès qui ont favorisé l'éla-- boration du système ferroviaire en A.O.F. Ceci devra par conséquent nous

fournir une vue globale sur le potentiel économique colonial de l'A.O.F., ses limites, et l'impact humain à court terme d'une voie de communication devenue voie de péné~ration et agent colonial.

En dernier lieu, l'auteur tient à préciser que la présente contribution

! l'histoire africaine est offerte sans aucune prétention et'qJ'elle est très consciente des limites que l'étude de ce rail n'a pu franchir. Ces limites

--proviennent principalement du fait que l'analyse qui suit est exclusivement basée sur des données projetées par des sources secondaires, ayant pour con~

séquence que le Dakar-Niger sera présenté en terme d'une structure opérant en contexte colonial. C'est ainsi que le lecteur devra tenir compte d'une

,

certaine prudence ou réserve apportées quant à l'interprétation de tout ce qui touche les statistiques, budgets, pourcentages, kilométrages:et main d'oeuvre. Quoi que d'un intérêt certain, ces différents aspects confirment néanmoins les orientations du matériel littéraire légué à l'Histoire colo-niale française en Afrique de l'ouest et infirment les options colocolo-niales de leurs tenants.

L'auteu~ tient également à remercier M. Myron J. Echenberg, professeUr au Département d'Histoire de l'Univer8it~ McGill de Montréal, dont le support, la supervision et l~s encouragements pour:ce travail furent d'un apport pré-cieux. Des remerciements sont aussi adressés au personnel de la bibliothèque universitaire McLennan de l'Université McGill ainsi qu'aux responsables de la bibliothèque du Collège universitaire de l'Etat de New York à New Paltz, qui ont accueilli l'auteur et lui ont permis d'utiliser le matériel d'une collec-tion non cataloguée surUl'Histoire colo~ale française.

Finalement, cette thèse est dédiée aux parents et amis qui ont totljours soutenu la démarche de l'auteur.

,1

(11)

o o '1 CHAPIT RE .PftEHlliR . UN RAIL CONQUERANT: l87B-c .1900 c u

A.-' Antécédents historiques d'une présence européenne

~, - -

-Jusqu'~ la deuxièmé moitié du XIXe siècle, l'histoire de la présence

~'-Î

française en Af~ique occidentale offre dans son en~emble un caractère épisodique marqué par l'attrait du mythe et les incessantes volte-face métropolitalnes. L'

a~enture

coloniale n'intéresse que

d~s

groupes d'

in-• térêt reAtre~nts, guère préo~cupés ou impliqués au-delà des position! établies sur la côte ouest-africaine. Le tableau'africain offre à la

-o

France la colonie du Sénégal et les "points d'appui", ou postes forti-•

fiés de la côte du golfe de Guinée, servant de bases à la'~1arine françai-se. Le rayon d'action demeure toujours côtier, et rien ne semble inciter la France à pousser son influence au-delà des points reconnus.

Un événement change l'allure de cette situatio~: la conquête de c l'Algérie ~ommençant en 18JO. Dès lors, une idéologie coloniale africai-ne prend naissance ct anime en l'espace de trois décades un idéal

'impé-/

rialiste qui ne trouvera sa force motrice que sous le ~ids d'Wh orgueil national frustré par la défa~te française a 1871.

~/

Entre ces deux moments de l' Hi~toire, l'idée "com-pact e" suit son cours. Toute la décade 1840 est Jnarquée par l'avance

mi-litaire française en Algérie, dessinant une progre~sion très nette vers . le t>oudan. Explorateurs et eommerçants se font l'avant-garde de missions de reconnaissance dont, le but véritable est d' ;i.nfo:rmer ~es autori\és sur le potentiel des itinéraire~ transsahàri~ns. Officiellement, aucune po-litique d'envergure n'est amorcée pour réaliser une unité territoriale,

,

mais il semble que Paris est décidé, à l'époque, d'établir son hégém09ie sur le haut~Sénégal.

Quoi qu'il en soit, l'empire français en Afrique offre alors

un)pro-, '

fil étriqué, rép9ndant beaucoup plus à des intérêts locaux et commerciaux

G

qutà une-raionalisation coloniale art~culée par une politique d'ensemble. ,,> La grande préoccupation demeure D l'Algér~e tandis que l~influence françai~e

'.

,

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1

(12)

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)

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sub-saharienne s'étire de

l'embquCh~re

du fleuve Sénégal jusqu'â

~breville~~

via les comptoirs de la

Côiê

d'Ivoire, avec Bakel BU~le haut~Sénêgal comme'

limite extrême. Un certain succès commercial s'~ffi e à Gor~~, alimenté

. !

par les vallées productrices d'arachides, Sénégal, ~ne, Saloum, Casamance,

-tandis que les "rivières du sud", terminus ties caravanes, drainertt. les

res-h ' _

sourc~s du Fouta Djall~n et du haut-Sénégal. la faiblesse militaire f;:an-:;--~--'_.

"çaise dans ces régions annule toute prétention de contrôle ou de conquêt'e.

En fait" la France n' e>..-erce de contrôle politique s.ur ces régions qu t en _

fonction des ~mmerçants qui se sont taillés leurs petits circuits d'échan-

..

ges: Saint-Louis

(1659),

les forts Saint-Joseph de Makhana en amont de Bakel,

Saint-Pierre de Sénoudébou au Bondou, et Podor

(1743)

situé au coe~r du pays

toucouleur. L'autorité coloniale s'exerce par la co-existence d'un

gouverne-, ...

ment territorial et d'un commandement maritime.

~ Les Français"se sont donc graduellement instal1és le long du fleuve

Sénégal par l'entremise de comptoirs qui drainent le commerce de la gomme àvec les Maures ou "petite traite", et celUi du Galam etùBambouk ou "grande traite", qui fou:rnit or, plumes d'autruche, ivoire et esclaves. Pour garan-tir et faciliter la continuité de ces échanges, l'usage s'était répandu

'.

, d' éehanger des cadeaux, les "coutumes", qui devinrent la garantie tangible

" de la circulation commerciale.

C'est la venue du capitaine de corvette Bouet-viillatunez conune gouverneur

du Sénégal qui marqu~ les d~buts d'une administration

(1843-44)

'plus présente

en sol afri~ain. Malgr~ le peu d'effectifs et de moyens mis à sa disposition,

i l met e~ branle un dispositif à caractère offensif qui effectue une brèche

dans )e système jusque-là imposé à la colonie. Il organise une démonstratio~

militaire à travers le ~ayor et le Oualo, dirige une opération contre les

Toucouleurs à càscas, et renforce Merinaghen et Lampsar. Une mission

d'ex-ploration est mise sur pied afin d'évaluer les possibilités de mise en valeur de l~ riv~ gauche du Sénégal, Bondou, basse Falémé et Bambouk, par un système de concessions protégées par des postes militaires. Si le budget colonial ne peut absorber une continuité dans la politique de Bouet-Willaumez, une phase

(13)

3

La mission d'exploration de la rive gauche du Sénégal met entre les mains

de Bouet-Willaumez les conclusions du rapport de l'explorateur Raffenel qui

, t r ,

estime\flue , 'r

l "

si l'6n conçoit un large et vaste plan d'occupation, le seul (~ •• )

'qui puisse être fait dans le haut-8énégal, il faut sortir entière ... '~·

ment de l'ornière habituelle des demi~esures et du tâtonneme~t/r,.

( ••• ) L'Afrique de l'Occident et l'Afrique du Nord, où flottent '

les drapeaux de la France, doivent un jour se lier l'une'à l'autre et se donner mutueL appui pour répandre à travers ces mêmes

con-trées les bienfaits d'une Civilisation plus douce. l .

:1.,Il n'en faut pas plus pour confirmer le gouverneur dans ses am~itions

territo-riales. Il crée un Bureau des Affaires Extérieures, renforce les escadrons militaires sénégalais par l'apport de saphis algériens, et élabore la

poli-tique à suivre au Sénégal. Ce sera celle dont Faidherbe se fera l'artisan un

peu plus t'ard: abolir le sy~tème des "coutumes", placer le Dualo et le Fouta

Toro sous l'égide française, échanger Portendick contre Albréda. ~wlgré tout

ce~a~ le corrmerce sénégalais végète et la colonie semble perdre son dynamisme. Certaines tentatives de c'olonisation échouent, le maintien des postes et sta-tions est remis en question, et finalement, l'arachide sénégalaise connart un début incertain.

En 1850, une Commission interdépartementale dont Bouet-\üllaumez fera

partie, réunit à Paris des reprAsentants des M1nist~res de la Marine et du

Commerce pour

examiner les intérêts du commerce français sur les côtes orienta-les et océidentaorienta-les d'Afrique, et par suite, la situation des pos-sessions françaises dans ces mers" le degré d'importance et

d'in-térêt qu'elle~ présentent et le développement dont elles sont

susceptibles. '

La Commission suggère la création d'un fort à Fodor dans le Fauta Toro,

ques-tion d'offrir aux commerçants sén~galais une protection dans la basse vallée

du Sénégal. On doublerait ainsi la protection du poste de Sénoudébou établi

en 1845 sur la Falémé, et drainant le commerce de la gomme vers le bsti

Séné-gal. Un Bureau des Affaires Extérieures est créé à Saint-Louis, instituant

ainsi un lien organique entre l'Etat français et les intérêts que le

Dépar-tement naval soutfent en Afrique occidentale. On décide également dè

con-server Albréda et de renforcer les postes déjà établis. C'est le gouverneur

.1'

(14)

4.

~

(

Auguste Protet qui reçoit mandat de mettre en application les conclusions de

la Commission. Mais, sur la scène africaine, il se retrouve seul et la p~-'

litique/sénégalaise res~ur.~s positi~ns. , ~

~ Avec

1;

de~xième Empire~ l'~sprit de .conquête et de grandeur

s'affir-ment, faisant renaître un vif sentiment pour les gloires nopoléoniennes

déjà révolues. L'afflùx de l'or californien et australien favorise le

nou-veau régime qui'inspir~ confiance aux détenteurs de capitaux. C'est l'ère ...

de la France "nouvelle" ~ :Se met 'au pas de l'industrialisation, de

l'ur-banisation, et des communications modernes. Le rail appaTaît et avec lui

, t:> ' . '

naissent les granàes_sociétés/bancaires et les agglomératio~s, urbaines: le

commerce prospère et ~a, richesse s'accurnulè. Forte de cette nouyellè

vita-lité, la France reprend s~n e~aos~outre~er: en A~érie, ~n,Italie et

en Esp~gne, elle construit des chemins de fer; elle pr€te ses capitaux à la'

Turqui~

et à la Tunisie

~

taiJl~'

un empire en

~xtrême-Orient.

Sur la

scène coloniale, la politique à suivre se durcit: l'emploi' de la force est

,

.

pr~conisé, l'imposition de l'autorité franç?ise'doit se subst1tuer au

s~-... 1 f ' (" .. '

tème, des traités et "aoutwnes", et l!3ttérieur des pays doit être l'objec-tif des conquêtes.

En Afrique occidentale, Protet et Faidherbe reçoivent mis~ion de

forti-fier Podor, du 27 mars au l~r mai 185~, pre~er maillon d'un épisode

mèttra les Français aux prises avec le leader toucouleur

L'événement n'a aucune po~tée immédiate puisqué, malgré les remous'

par Napoléon III en politique cbloniale, l'intérêt métropolitain

.

.

core très superficiel et diffus. Le 3 ma{.1854, un

clame que les colonies seront dorénavant régies par décrets impériaux, et consacre la division du Commandement du Sénégal et du golfe de Guinée •

Le 1er novembre d'~ la même année, Napoléon III, norrune Louis Faidherbe,

gou-verneur du Sénégal. Deux mandats, 1854-61 et '1863-65, feront de Faidherbe

l'artisan d'~e politique intensive au Sén~gal et Soudan, cette fqis

pleine-ment consentie et endossée par l'autorit~ métropolitaine.

Les instructitms du Ministre 'de la Harine à Faidherbe ne pouvaient €tre

(15)

..

Le champ d'action dans lequel surtout paraît devoir se trouver la

moisson de l'avenir, c'est le haut pays ( ••• ). De là, on peut par

la pensée représenter ce commerce se frayant ensuite la route à

travers le Kaarta, organisant par des caravanes la jonction du

Sénégal et du Dioliba et touchant enfin Tombouctou ( ••• ).

L'im-pression très arrêtpe que j'exprime1 c'est que les cataractes du

Félou ne peuvent être les colonnes d'Hercule du Sénégal; le pre-mier but que je vous assigne c'est de les faire franchir par les

trai,tants du Sénégal.3

5

1'idée motrice est lancée: pénétrer le SoudAn 'par la va'llée du Sénégal et

atteindre le Niger. Le fait que ces deux fleuves ne soient pas tributaires

l'un de l'autre n'avait été découvert que vers 1830, et Faidherbe était con-vaincu que la clé de la richesse soudanaise était la haute vallée du Niger.

Il fallait donc y parvenir. La politique à adopter cette fois était

nette-ment la conquête et l'en,jeu, la construction de postes' fortifiés devant

ser-vir de relais le long du fleuve Sénégal dont la navigation n'est possible

que quatre mois par année, et ce, jusqu'aux rapides de Kayes.

Conséquem-ment, la diplomatie faidherbienne sera offensive dans la mesure où elle

s'ap-prête à heurter des intôrêts africains totalement indépendants.

On assistp donc graduellement au démantèlement des autorités du Cayor,

à une'dét~rioration du commerce Maure, à la défaite des Trarzas, ~

l'aboli-tion du tribut sur la gomme, remplac~ par une taxe d'exportation de

3%4,

au

contrôle direct du Oualo et son annexion au Sénégal, à la soumission des

S~rères du Sine, Saloum et Baol, à la construction des forts de Joal et

Kao-lack dans l'arrière-pays sénégalàis, et â des actions de p1u~ ,en plus

direc-tes dans les "rivières du sud".

Cette systématisation. de contrô~e et de conquêtes tire égale~ent son

origine d'une nouvelle orientation commerciale destinée à l'Afrique

occiden-tale. Il s'agissait en ~ffeb d'orienter vers le Sénégal ~ arrière-pays

dont les potentialités quant à la production des arachides s'étaient

avé-r~es être un succès total, entrant en compétition très avantageuse avec le

commerce britannique de la côte. Peu à peu, le commerce français, seul ~

acheteur des arachides, domine le commerce anglais, même dans les posses-sions de Gambie.5 Ce commerce florissant devait par ailleurs favoriser dans

(16)

,..' '"' d 6 ' " l ,~ ,

sa logique inteTne; une dynamique dans le e;ystème des cor:ununications qui sera capitale pour les futures orientations coloniales_franGsises en Afrique occidentale.

-La nomination du capitaine Pinet-Laprade comme chef du Génie à Gorée

fut, à cet effet, particulièrement stimulante. C'est de son plan d'utiliser

la presqu'fIe du Cap-Vert comme relais pour les marines marchandes, que naît l'idée du port de Dakar, devant compenser les handicaps naturels de

Saint-Louis. Les deux points-pourraient être reliés directement par un ciTcuit de

routes, re'lais, caravansérails et lignes télégraphiques pouvant répondre aux

1

exigences du commerce entretenu jusqu'i~i par les pistes de courriers logées

beaucoup plus à l'intérieur. Pinet-Lapr~de élabore~insi les premiers pas

devant faire ~aloir la nécessité d'un chemin de fer, le Dakar-Saint-Louis,

traversant le Cayor. l ,

Le projet reçoit l'enthousiasme du Ministre de la Marine, l'amiral

Hamelin, qui, bien que d'accorà pour l'occupation du Cap-Vert, se limite à

approuver cette action, limais il ne saurait être question en ce moment

d'en-treprendre SUr ce point aucune construction importante. ,,6 L'idée se limite

donc à la prise àe possession du futur site de Dakar, engendrant le réveil

de Rufisque et Goré.e comme centres d'activités corrrnerciales, et préparant la

voie d'une pén~tration intérieure dont les postes de Kaolack et Thiès seront

les plaques tournantes.

Au Cayor cependant, les prétentions de Pinet-Laprade créent un

précé-dent qui met en éveil le fragile équilibre des relations franco-africaines.

En 1859, le damel Birahima

7

accepte les clauses d'un traité qui permet la

création de postes entre Dakar et Saint-Louis, et c' e

large de lO kilomètres sur l'itin~raire choisi.

finitivemen~ de l'avance dans la course

tement, tandis qu'au Soudan oriental s'ouvre un

à l'emprise française.

la France une bande

prenait ainsi

dé-ui se prépa re

len-front d'opposition

OBns le haut-S~négal, les Français se heurtent ~ Al-Hajj 'Umar, leader

toucouleur dont le jihad contre les royau~es b9mbaras du Kaarta et de Ségou

(17)

J

?

"

/

• . / 7

prélude la formation d'une influence

~litiqUe

dans le

haut-Sénégal-Niger~

Faidherbe décide donc d'établir une l[gne de communication entre les fleu-\ ves Sénégal et Niger pour canaliser l'activité commerciale transsaharienne

~ers

le Sénégal

Pl~6t

que vers le'_,Ha'roc. La publication

~es

Récits de

l'explorateur Barth n'est sans dout~ pas étrang~re à l'attrait qU'exerce

le haut-fleuve sur Faidherbe. En laSa, i l pense A la construction d'un

pos~\

te dans le delta du Niger de faifon à se garantir un appui face à une éven-tuelle avance britannique, et signe en

1863,

à Saint-Louis, un t~aité cam- \

. 8 \

mercial avec un parent du sheik El Bejkai de Tombouctou. \ Cette démarche ne donne aucun résultat concret, mais les perspectives \ qU'elle lègue à Faidherbe auront un impact tout

A

fait tangible sur le des-tin colonial du Soudan français.

Il y aura toujours un affreux désert de 400 à 500 lieues entre le Tell et le Soudan. Qu'au lieu de compter sur l'avenir des cara-vanes du Sahara, on ouvre une ligne commerciale entre le haut-Niger,.de Bakel à Bamako, cela sera beaucoup plus rationnel ( ••• ) le Sahara s'est peuplé pour trois causes: 1;0 profit énonn,e de la

traite des nègres; 20 révolutions continuelles au Tell;

3

0 absence d'autres voies pour le commerce du Soudan. Ces trois causes

n'existeront plus et cesseront d'exister tout à fait dans un temps assez rapproché.

9

Tel est le testament colonial légué par Faidherbe • ..,.

é'

est

égaJ.eme~t

de son "poque que datent Jes premiers jalons, des relations franco-toucouleures,

relations particuli~rement significatives tout au long du XIXe siècle. ,.. Tandis que s' élabore~ graduellement les plans de la présence fran- '. çais"e en Afrique occidentale, un dynamisme iifr'icain se manifeste dans le haut-Sénégal-Niger pour se répandre jusqu'au Sénégal occidental et central:

1

issu du réveil islamique ouest-africain, l'~pire toucouleur se construit. Sédentaires et musulmans, les Toucouleurs s'étaient défaits du joug peul à

.

,

,

la fin du XVIIIe siècle, et,leur prosélytis~e religieux fa~onna dès le

dé-i

., fiantes qU'ils devaient entre-but du XIXe siècle, le styl, de relations

ent Bakel en 18la, Dagana en

,

tenir avec les Français •. Ceux-ci fort~fiè

, ;l'

te prudence face à une autorité le haut et moyen-Sénégal • 1854, répondant ainsi à un réflexe ~e stri

politjq~qui s'af~rmait

d; plus en plus

(18)

'.

t

.

,

~

8

~

Français et Toucouleurs en viennent à ctlftiver un complexe "d'ennemis

hérédi-t a res • i ".10

,.

Cette situation s'étendra tout au long du XIXe siècle, coupée de périodes calmes ou tumultueuses) selon le rythme de l'implication française et celle du jihad déclenché par Al-Hajj 'Umar en 1854, et ne se tenD.;inan1('qu'avec l'exode, final d'Ahmadou, fils et successeur d'Al-Hajj 'Umar, en

1893.

Le point de vue toucouleur se situait à deux niveaux: celui de la guerre sainte et celui d'une opposition à toute installation définitive des Français.c

Les Blancs ne sont que des marchands; qu'ils apportent des marchan-dises dans leurs bateaux, qu'ils me paient un fort tribut, iorsque je s~ai martre des Noirs,

et

je vivrai en paix av~c eux. Mais je

ne veux pas qu'ils fonnent des établissements à terre, ni qu'ils

t

envoient des bâtiments de guerre dans le fleuve. ll

La position d'Al-Hajj 'Umar ne pouvait lais~er de doute: la révolution tou-coule ure se pour5u,ivr~it malgré la présence française et celle-ci devrait tenir compte de l'existence toucouleure dans ses calculs.

Profitant du départ du prophète pour la conquête du Kaarta, les Fran-çais étendirent ainsi leur chafne fortifiée en construisant Médine en

1855

et

-Matarn en 1857, exploitant la résistance bambara contre les Toucouleurs par une série de traités qui leur aécordaient un quasi protectorat de la rive gauche du Sénégal. L'échec du siège de Médine par les Toucouleurs en

1857

et l'agitation qu'ils entretenaient au Fouta Toro donnèrent lieu à la séparation de ces deux provinces en 1859, et à un premier traité franco-toucouleur en

1860. L'accord délimitai.t tout d'abord les frontières entre Toucouleurs et

Français: la rive gauche du Sénégal et du Bafing, de Bafoulabé à Médine, aux Français, la rive droite aux Toucouleurs. La liberté de commerce était reconnue de part et d'autre, et les Français reconnaissaient le pouvoir

ter-ritori~l

et politique des Toucouleurs.12

Peu après, Faidherbe charge la

ffii~si~n

Mage et Quintin de se rendre à

.

Ségou et de négocier la possibilité d'une route commerciale Sénégal-Niger pouvant éventuellement remplacer la route traditionnelle Mogador-Niger, pro-tégée par le drapeau français. Ainsi, la France pourrait se garantir une série de postes commerciaux fortifiés le long du fleuve Sénégal, et qui sait, pousser vers le Niger. Retenus trois ans à Ségou, de 1863 à 1866, Mage et Quintin n'obtinrent pas la permission d'une installation française dans haut-Niger, qui, dans l'esprit de Faidherbe, signifiait, atteindre Tombouctou.

\

(19)

9

Al-Hajj 'Umar était mort dans la guerre dLP 1cina en 1864, et son

fils et successeur Ahmadou ne céda a.~une concession tèrritoriale dan~

le traité que la mission rapporta à Fa:' dherbe. Le traité de Ségou,

1866, codifia toutefois les termes de 'immigration des musulmans

séné-galais vers le Kaarta et Ségou, et ceux de la circulation des

marchan-dises entre les zones d'influence française et toucouleure.

Le départ de Faidherbe de la sdme africaine met un terme à la

pé-riode du décloisonnement français en Afrique occidentale, et effectue

~n retour à une politique coloni~e du "statu quo". Le retour de Ma.ge,

détenu trois ans à Ségou, ne suscite aucun regain d'activité. L'emp~re

toucouleur fait face aux intrigues, à une crise de succession, à la

ré-sistance bambara, et rien pour le moment ne laisse présager d'autres contacts franco-toucouleurs avec Ahmadou. Les gouverneurs Pinet-Laprade

1

et Vali~re s'en tiennent à une coe4stence très souple avec un

~nter-land déjà agité par ses propres forces de changement, tandis qu'à Paris,

les ministériels du deuxième Empire corrmencent à questionner les

possi-bilités d'acquérir gloire et lauriers en Afrique occidentale.

Aux successeurs immédiats de Faidherbe sera donc demandé de conso-lider les positions déjà acquises sans pour cela accroître le contrôle

direct. Les Etats africains profitent ainsi d'un retour "à la nonnale"

pour poursuivre un développement nett~ent parallèle et reconquérir

ll~nfluence et le prestige minés par les interventions françaises. Lat Dior est restauré damel du Cayor et toute idée de nouvelles

négo-,-'

ciations avec Ahmadou est évincée pour le moment. Une décade, 1865-76,

devait s'écouler avant que le testament colonial élaboré et légué par

Faidherbe ne reprenne act~ité.

B.- Prélude d'une conquête

Il nous faut maintenant effectuer un bref retour sur la sc~ne

euro-péenne où se trame et se déc~de vraiment l'impulsion coloniale de cette

fin de XIXe siècle. L'Europe s'industrialise et se cherche des sources 'de matières premières et des débouchés: le monde non-occidental devient

(20)

o 10

,

Dans ce vaste mouvement, c'est la Fra.nce de la Troisième République qui donne le ton .9 l'orientation de l'impérialisme français: militaire .. il est le sous-produit de la défaite de Sedan, et se cherch.l'de nouvelles gloires nationales.

Héritière d'une Afrique occi~ntale inarticulée depuis le départ de Faidherbe, la doctrine coloniale française se rationalise pour le grand public et Bes militaires déchus sur la Meuse: la France se donne une "mission civilisa-trice" pour le continent africain.

Concrètement, la quèstion coloniale pour la France se pose de façon beaucoup moins élégante. Sedan traumatise la Troisième République dans sa fierté nationale et l'isole du concert. des nations européennes par le jeu diplomatique de Bismarck. En politique intArieure, c'est l'imbroglio minis-tériel, l'instabilité gouvernementale et l'affrontement penpétuel entre les forces progressistes et traditionnelles. Malgré tout, la prospérité règne et, même coupée de l'Alsace et la Lorraine, la France retrouve son essor sans trop subir les contrecoups de la dépression mondiale de 1873. Quant aux colo-nies, elles pèsent très peu dans la vie politique et économique française qui tente de redorer son blason en Europe et se replie dans une phase de "recueil-lement" qu' elle conditio~ à être national.

la direction coloniale est toujours bicéphale et les méthodes d' adminis-tration sur place ne répondent à aucun plan d'ensemble. la' politique s~néga­ laise reste confinée â l'activité commerciale des postes jusqu'à Médine.

L'arachide gagne progressivement du terrain aux dépens du commerce de la gomme,

,,'

et cette nouvelle orientation marque un temps d'arrêt dans la politique d'ex-pansion française vers l'intérieur. Paris songe même à abandonner Médine,

, ,

Bou1ig~ant ainsi un retour vers les intérêts c5tiers, concrétisé par l'insti-tution d'une Chambre de Comnerce à Saint-louis, le 29 décembre 1869.13 La

guerre franco-prussienne allait accélérer la d~tente de l'ère post-faidher-bienne. Alors qu'au Sénégal l'~ncipati9n politique suit son coura, les postes de l'intérieur et de la c6te se vident de leur garnison, réduisant de façon significative la présence française, déjà très précaire en Afrique

occi-.,.

.

dentale. ,- ~.

W 14 juin

IB76

la scène africaine reçoit un deuxième souffle français avec la nomination du colonel Alexandre Brière de l t Isle, de la Marine

(21)

)

---~---française d'infanterie, comme gouverneur du Sénégal. Les plans de ~net­ Lap~ade et de Faidherbe sont repris, mais cette fois, la diplomatie

mili-taire ouvre une épopée de conquêtes orchestrée par unè poussée nationaliste et chauviniste émanant principalement des milieux militaires. Si l'année française a subi l'humiliation sur Bon territoire, l'année coloniale par contre offre l'Algéri~ comme succès. Au début de 1860, l'année contrôle en effet un axe nord-sud ~'~tendant d'Alge1- aux montagnes de Kabylie et aux "oasis du sud",

~

affirmant conme seule force de domination.14 I.e Soudan au contraire n'offre pas l'image d'un bloc unifié. Brière de l'Isle prend donc en main l'ouest africain au point où Faidherbe l'avait laissé. La

condition des relations franco-africaines est ~ peu près la même pour les deux gouverneurs: établir le contrôle français et atteindre le Niger.

~re,

elles ont subi des modifications dues à une

évolut~on

histori-que qui opère à trois niveaux différents: nationalisme, révolution tech-nique, et début de l'engagement international en Afrique.

Au Sé;égal, Brière de l'Isle remue les querelles traditionnelles chez les chefs africains et réanime la vie politico-économique de Dakar, Saint-Louis et Rufisque. Dans le haut-Sénégal, un événement d'importance à long terme est à signaler: la prise d'une première forteresse toucouleure,

'Sabouciré, le 22 septembre 1878. Alors~ue cette poli~~que Ideale s'ébranle, Brière de l'Isle prend contact avec un échiquier à caractè~e officiellement a-politique, la Société de Géographie de Paris. Vers la fin de 1871, cet~e dernière annonce qu'elle clôture son ère de spéculation scientifique pour passer à l'action exploratrice concrète.15 Les objectifs de la Société de-meure~t plus ou moins convaincants mais captent tout de même l'attention de ministériels, députés ou coloniaux impliqués dans les affaires africaines. Un mythe se crée: Tombouctou et la richesse intérieure du Soudan. Une politique prend forme: relier l'Algérie au Sénégal et consacrer l'influence française dl ouest

en

et

vers Djibouti via le lac Tchad.

Si en France un nationalisme chauvin est fortement exploité, à l'échelle occidentale on traverse une ère de progrès technique, notamment dans le do-maine des communications. Le règne du rail s'installe et favorise

(22)

~-- - -~ - -~-~---- -~ ----:' ~---II

12

europ~ens, triomphe des Alpe3 et affirme son caractère international à la fin du XIXe siècle. Les Etats-Unis comptent alors cinq transcontinentaux; le Canada,

entreprend le IBnube à

deux; un transandin relie le Chili et l'Argentine; la Russie

le transsibérien et deux lignes ~n Asie centrale; le rail unit

""-Saloniqùe'et Constantinople; on 'parle d'un transaustralien. En Afrique, on rêve d'un transsaharien et d'un Dakar-Niger pour les

Fran

-çais, d'un Cap au Caire\pour les Anglais, et d'un transcongolais d'ouest

,

en est pour les BelgeS'. Le capitalisme mondial s'affirme, fort des

nou-velles perspectivë$ que lui offre la locomotive, et le colonialisme

cô-tier est.révolutionné: l'~re des missions d'exploration s'ouvre, suivie

de pres par les drapeaux européens.

Tel est le contexte global dans lequel la France, à l'instar des

autres nations occidentales, évolue au moment où s'affinnent les

préten-a

tions du colonel Brière de l'Isle. En 1873, la Chambre de Commerce d'Alger

commandite l'expédition du voyageur commercial E~ul Soleillet, en vue

d'ef-fectuer une mission

m~téorologique

à travers le Sahara, vers Tombouctou.16

L'exp~dition s'arrête à In-Salah mais, durant deux ans, Soleillet entre-prendra une série de conférences 'en France, faisant valoir la nécessité

d'établir un contact plus concret entre l'Algérie et le Soudan.l

?

Il

s'ap,issait d:

construir~\un

chemin de

fe~ tTansdé~e~ique.

Le projet ,

<.

"-trouve un allié enthousiaste en Alphonse ~~ponchel, ingénieur des Ponts et

Chaussées: l'empire soudanais serait une nouvelle vall~e du Nil,

un~ou-vel Eldorado, une nouun~ou-velle Inde.

Les prédictions vont bon train. Eugène ~arnier, déput~ d'Alger et

patron d~ Soleillet, préVOit un commerce annuel de 100 millions de francs

1

entre l'Algérie et Touat,

18

triple pour le Soudan.

tandis que Gasconi, député du Sénégal, prévoit le Ce style de projections est fortement exploit.!; en

france par la multiplication de publications, de conférences et de congrès ,'J

, , 1 , ,

de G40graphie. Des résolutions sont adoptées à l'effet de stimuler l'apport"

français à l'action coloniale, et cette fois, on pique la fierté nationale

en brAndissant le sceptre de la "menace" brita~que en continent africain.

~~elle ou virtuelle, cette menace semble avoir joué sur les motivations

agressives de Brière de l'Tsle au Soudan, surtout dans 58 détermination à

f

.

vouloir r~duire ou détruire l'autorité toucouleure. Il craint les

(23)

13

commerçants britanniques qui auraient fait des avances à Ahmadou. C'est

ainsi qu'il patronne, R même le fonds des Affaires politiques de la colonie,

la deuxième expédition de Soleillet (1878) dont l'objectif est d'atteindre

Tombouctou via S~gou où il devra obtenir d'Ahmadou un traité d'exclusivité

commerciale et l'entretenir sur les projets français d'un chemin de fer,.19

Soleillet sera retenu trois mois en résidence surveillée à Ségou: le

cli--

~0~ mat semblait favorable aux Français J mais on lui refusera l r exclusivité

commerciale, le~ Toucouleurs voulant également traiter avec les Anglais.

Pendant que se d~roulent ces pourparlers, Brière de l'Isle attaqu~ le

Logo, petite enclave'toucouleure du Khasso sur la rive gauche du Sénégal, entraînant la chute de Sabouciré et la prise de Bafoulabé sur la rive droite. Installée sur les deux rives, les Français ont ainsi entrepris un premier pas vers la future ligne de forts qu'ils bâtiront dans le

haut-Sénégal. Agissant ihùépendamment des consignes ministérielles et des

inté-r€ts commerciaux dortt le volume diminuait au Soudan,20 Brière de l'Isle se' servit de la conjoncture intérieure métropolitaine pour alimenter ses

offen-sives: en 1879, un grand pla~ de travaux publics est mis de l'avant pour

soutenir la prospérité française.

Il s'agit du pl~n Freycinet, du nom du Ministre des Travaux Publics,

d~ns lequel sont incorporées des clauses relatives à la construction d'un

"

transsaharien et d'un réseau Dakar-Niger. Celui-ci, fortement soutenu par le Ministre de la Marine, l'amiral Jean Jauréguiberry, devait s'effectuer

en trois opérations. Il fallait tout d'abord relier Dakar"et Saint-Louis,

op~rer une liaison avec Médine ou Kayes, et finalement, prévoir une

jonc-tion vers le Niger, possiblement vers Bamako. Le projet était ambitieux

mais reçut, en 1879, l'enthousiasme et l'approbation des ministériels qui

d~tenaient des postes-clé dans les affaires coloniales. Le 20 août 1880,

une "Commission sup~rieure pour l'étude des questions relatives à la mise

en communication par voie ferrée de l'Algprie et du Sénégal avec

l'inté-rieur du Soudan" est nomm~e, et un premier crédi,t de 1,300 ,000 francs est

vot~

pour effectuer des études préliminaires dans le haut-Sénégal.21

'Le projet était définitivement lancé et officiellement~ndoss~. La

France acceptait d'ores et déjà de s'aventurer sur un terrain mal connu

quoi que d'avance hypothéqué par le drapeau français. La réalité était

(24)

o

"

-- -- -(-

-tout autre: la France ne poss~dait aucun contr~le politique effectif sur

o

les régions que devaient traverser les ligne;, projetées. Tout était à faire. Puisqu'un certain caraC,tère officiel accompagnait les missions

d'é~ude ou d'investigation, le projet devint une affaire pour les

colo-niaux en place, vé~itables détenteurs du pouvoi~ français en Afrique

occidentale. C'est donc dans un décor colonial artificiel que s'entre-prend le périple Dakar-Niger, périple qui déterminera vraiment la nature de l'engagement français dans la partition africaine.

1879

marque donc uri point tournant dans l'histoire de la présence

française en Afrique occidentale. Les dés sont jetés de "façon

irréversi-•

ble, et la suite des événements ~e'précipite de façon telle, que

l'accé-l~ration de la décade qui s'ouvreosemble vouloir racheter au passé toute

l'inertie qui l'a caractérisé. Brière de l'Isle passe à l'action ~é­

dlate, sitôt le projet Dakar-Niger accepté, et ouvre une ère de conquête

systématique d'un axe africain s'é~irant de la côte sénégalaise jusqu'à

la boucle du Niger.

Le Sénégal et le Soudan avaient jusqu'ici freiné ou contenu l'avance

française pa~ la légitimité de traités ou par une coexistence ~olérée.

L'organisation interne du Sénégal et du Soudan pouvaierit

s'acco~oder

de

cette présence qui, depuis le départ de Faidherbe, ne manifestait aucune

prétention particulière. ~~is une ligne de chemin de fer implique

beau-coup plus qu'une série de postes éparst plus ou moins sécurisés, même si

-~

..

fortifiés ou légitimés par des traités qui datent de vingt ans ou plus.

La machine aussi possède sa logique: la nécessité de la conquête.

En 1879, cette politique est complètement endossée par Jauréguiberry qui se sert du projet Dakar-Niger comme tremplin d'expansion et

d'opéra-tions mil~taires. La clé de voûte du système est triple: le Sénégal,

Q

arrière-garde de toute pénétration vers le haut-fleuve, le haut-Sénégal-Niger où se dresse l'empire Toucouleur et où l'on appréhende unt9 avance

b~itannique. Cette dernière variable boucle la cumulation de

c9njonc-tures qui ont ouvert l'épopée du DakAr-Niger. En 1879, la Grande-Bretagne,

forte de ses victoires en pays Ashanti, est installée sur le cours moyen et I}

inférieur du Niger. La fusion de trois compagnies commerciales pour for-

.

mer la "United African Compa'ny" n'est P.,s sans incidence sur l~'s positions

-,

.

(25)

\ ,1 .' , , J '"

,",

,/

o

~5 .'

...

que les Français veulent défendre dans le haut-Ni~ et en Afriqu~

équa-toriale où 'l'on cons,tàte une nette reprise des activités françaises. En

plus de tout l'a cti visme qui a limente les projets de chemin de fer? il

s ',agit de ne pas se laisser coincer au Sénégal par W1 complexe

triangu-~laire incluant, 18" Gambie, le haut-Niger et Lagos.

'\ Cet impératif provient, principalement de la nature de la présence

~rançaise sur la côte ouest-af~icaine. Officielle ou commerciale, cette

,pr~sence s' était rnanife.st~e par une série de pressions infonne'1les op~­

rant à contre-courant dans la politique coloniale française" Au début de

il

1870, ces pressions s'accroissent de façon~1 significative face aux

p<3urpar-lers franco-britanniques en vue d'échanges territoriaux dont l'enjeu

con-Cerne le transfert de la Gambie à la France contre les postes de la Côte

. d'Ivoire et les "rivières du sud". Cet échange aurait consacré l' hanogé-'

néité et l'extension des zones d'influence française ou britannique. La

Gambie était particulièrement intéressante pour les Fran~is parce qu'elle

drainaJt les trois-quarts des exportations d'arachides vers la France, et

que sa situation g~ographique permettrait un contrôle plus direct des

en-22

vois d'a rmes vers le Fouta Djallon et le Cayol'. Quant à l' Artgleterre,

elle pourrait bénéficier d'une standardisation des tarifs commerciaux dans

le golfe de Guinée ~t possiblement, étendre son influence jusqu'au Gabon.

L'idée avait ét~ lancée par Faidherbe ,en 1861 et agréablement accueillie

par son homologue ~e Gambie, le gouverneur d'Arcy.

Mais les pourparlers traînèrent suivant les aléas de la diplomatie

de l'époque qui devait compter sur, les intérêts fran~ais et anglais déjà

installés dans les zones visées par les perspectives d'échange. En 1876,

on en était toujours au même point et, comme il fallait s'y attendre, la

question d' extènsion des (frontières devint le princ:kpal tableau des rela-tions franco-britanniques, en regard des zones d'influence respectives sur la "côte ouest--africaine. Tlmt et aussi longtemps que le "statu quo"

~~ait maintenu le long de la côte, aucune tension particulière n'était à signaler. Mais vint un moment où les intérêts commerciaux s'accommodè

-rent m~l des restrictions tarifaires imposées par la périodicité de deux

J

(26)

"

C.-•

( .

16

pas vers l'annexion territoriale devenait par conséquent une affaire

de temps. Il suffisait d'attendre la jonction d'éléments favorables

à son développement. Elle vint de deux pôles apparemment indépen-dants l'un de l'autre, les "rivières du sud" et le haut-Niger.

En lA79, ces deux éléments pèsent beaucoup dans les pol~tique;

locales africaines. A~lais et Français s'y livrent une lutte

d'in-fluence pour l'accàs de la Sénégambie et du Fouta Djallon, via la

Gam-• t

bie et la Sierra Leone,_ tandis que le haukNiger est wvement

convoi-té par la "United African Company" et une nouvelle venue, la

"Com-pagnie Française de l'Afrique Equatoriale". Deux gouverneurs, Brière

de l'Isle e~ Rowe s'agitent dans ce scénario dont le but ultime est

de se barrer mutuellement le chemin vers les zones Il choc" de

l'épo-que. Cependant, Londres et Paris demeurent assez circonspects fac'e

~ux conflits qui se dessinent sur la c6te et dans le golfe de Guinée.

LI émergence de l t Allemagne "con&t.e ,grande puissance européenne

~t le traumatisme de l'isolation cimentent les relations

diploma-tiques franco-britanniques et alimentent le,,/"modus vivendi" 9-dopté

face_ à leurs ZOM~Ld~ influence--.-Oue.5t~africaine. 1&, aci.,,:,Jiisant "par-_

tage" de l'Afrique n'a pas encore commencé et à vrai dire, pendant

cette période,

l'Afr~e

de l'ouest ne

f~it

pas l'objet de haute

politique. Ce sont IJs acteurs locaux qui s'occupent de canaliser

les affaires ouest-africaines sur la scène diplomatique. Brière de

l'Isle, non satisfait de l'attitude modérée de Paris vis-à-vis des "rivières du sud", entreprend de son propre chef d'hypothéquer

da-vantage les zones où l'influence française subit de plus en plus la

concurrence serrée des britanniques. Il s'agit donc d'ouvrir la

. à t Al l i ' t t ' 23

vo~e un con ru e forme des zones convo tees e con roversees.

Le rail conguérant ':

.,

'-Avec les chemins de fer préconisés, il devenait évident que Brière de l'Isle ne s'accommoderait pas d'une politique opportu-niste à court terme. Pour entreprendre ce g1Pre de projet, il fal-lait nécessairement être appuyé dans les motifs, les perspectives

(

,.,

(27)

17

et les faits. Les deux premiers étaient d'ores et déjà bien exploités et

admis avec l'hypothétique richess~ soudanaise et la hantise d'une menace

toucouleure ou britannique qui pourrait, selon les bâtisseurs d'empire, ralentir l'avance française,vers,ole haut-Niger. Restaient les faits. Compte-tenu de la situation générale qui prévalait en Afrique occidentale

à l'époque, Brière de l'Isle devait jouer la seule carte gagnante que

pouvait lui offrir la Troisième République, la carte

militaro-nationa-liste. Il était évident que Paris ne se compromettrait pas outre mesure pour défendre les intérêts commerciaux français qui d'ailleurs s'accommo-deraient de leur situation traditionnelle, ne recherchant d'appuis offi-ciels qu'en temps de crise. Dans les faits, il fallait donc provoquer un

recul des frontières déjà existantes, éviter de he~~~~_~ __ fr-a~ile balan~~ ______ _

d'entente franco-britannique, et surtout, s'aventurer en terrain encore non ~evendiqué. Il était donc normal de se retrancher derrière l'axe A Igérie-Soudan'-Sénégal , chasse ga;rdée depuis longt,emps par le drapeau français.

Avec le massacre de la deuxième mission Flatters, le 16 février 1881, le projet transsaharien est mis provisoirement de côté, laissant

n u - -

---onèreae--rrsIeet

J~ÜrregUJ.berry seiiTs

c

deuxième phase au projet de 1878, la ligne Sénégal-Niger. Aucune pres-sion commerciale ne s'exerce sur eux pour la ligne du haut-fléuve: Saint-Louis appréhende au contraire la perte de son monopole dans le

haut-Sén~gal

et conspire contre cette ligne.24 La conquête de l'arrfère-pays

devenait donc une donnée à caractère purement colonial, c'est-à-dire,

li-mit~e dans son champ d'action politique, aux seules àmbitions

impérialis-1; .•

tes du duo Jauréguiberry-Brière de l'Isle. Le

5

février 1880,

Jaurégui-berry dépose le projet de loi "organisant la jonction de Dakar au Niger",

et projette d'atteindre le Nig~r en six ans par les voies

Dakar-Saint-Louis et Médine-Niger, au coût tbtal de 120,000,000 de francs, dont 54,000

accord~s par l'Etat. 25 0

Fn comparant ce ~dget avec le demi-mil1ion de francs difficilement

rJunis pour la formation de la "Compagnie FrAnçaise de l'Afrique

Equato-".

(28)

v

..

18

était totalement disposé à endosser une op~ration d'envergure en Afrique occidentale, et ce, probablement au mépris de la réticence'parlementaire.

26

Quant aux crédits complémentaires, ils proviendraient des budgets coloniaux.

Bien avant le vote de la loi du 5 février, la mission Galliéni, la

mission du haut-Nige-rj avait été-mise sur piecLavec-pour- obJecti:fs d'at-teindre Bamako, d'y instaurer un protectorat, d'y installer un résident, et ensuite, obtenir d'Ahmadou un traité de pro~ectorat et l'exclusivité commerciale française en territoire tOucouleur.

Pour atteindre ces objectifs, la tactique proposée par Galliéni était d'utiliser les divisions internes de l'empire toucouleur, c'est-à-dire,

explo~ter toutes les faiblesses et les hostilités 'au pouvoir de Ségou.

_ I~ y _é! tgut AI1J,_~~êt l'our _ nous à soutenir, sinon ostensiblement, du moins secrètement, ces popUlations, beaucoup morriSreoelLles -que les Toucouleurs à toute idée de civilisation et de progrès

( ••• ) pour favoriser les sentiments hostiles des peuples con-qùis par le prophète ( ••• ) ~rendre entre les deux camps une position vague et indécise.

7

Semant l'intrigue sur son passage, la mission du haut-Niger fut un échec pour les Français. Les Bambaras soupçonnaient leur double jeu et leur re-fusèrent alliance; Galliéni n'obtint ni asile ni le protectorat de Banuùco,

---~---dû au piètre état de la mission qui parvint finalement à Nango, ~ce :forte toucouleure, le 1er juin 1880. Un traité fu,t signé en février 1881, garan-tissant de part et d'autre la protection 'des sujets toucouleurs et français en Sénégambie et dans tout l'empire toucoule~r. Lés Toucouleurs encourage-raient le counnerce français sans toutefois leur accorder l'exclusivité com-merciale et en leur interdisant catégoriquement la construction de postes le long du Niger ou ailleurs dans l'empire. En retour, les Français

.fOUI-niraient armes et munitions, tout en payant une taxe royale\sur les articles , 28

commercés à l'intérieur de l'empire.

1

Ce traité ne sera pas ratifié par le Parlement français qui, le 2-aoat 1880, avait accordé 1,300,000 francs au Hinistère de la Marl.ne et des Colonies pour la construction de postes et pour effectuer des recherches dans le

.

1

haut-Sénégal-Niger en vue d'analyser"les possibilités d'établir une ligne de che~~n de fer entre Bafoulabé et le Niger, section non navigable du Ifleuve Sénégal. 29 Dans cette perspective, le décret du 6 septembre 1880

Figure

TABLE  DES  MAT IERES
TABLEAU  1:  t'  Année  1923  1924  1925  J f\
TABlEAU  2:  kilométrage  du  rail  en  A.O.F _,  c.1936  Colonies  Sénégal  A.O.F.  Rail  Dakar-Saint-Louis Dakar-Niger:  Kayes-Niger  Thiès-Kayes  Louga-Linguère  Diourbel-Touba  Guinguinéo-Kaolack

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