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Identification des stratégies déployées par les infirmières pour offrir des soins palliatifs en fin de vie dans des unités de soins aigus

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Academic year: 2021

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Identification des stratégies déployées par les

infirmières pour offrir des soins palliatifs en fin de vie

dans des unités de soins aigus

Mémoire

Lise Martin

Maîtrise en sciences infirmières

Maître ès sciences (M. Sc.)

Québec, Canada

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Identification des stratégies déployées par les

infirmières pour offrir des soins palliatifs en fin de vie

dans des unités de soins aigus

Mémoire

Lise Martin

Sous la direction de :

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RÉSUMÉ DU MÉMOIRE

La réalité veut que beaucoup de personnes en fin de vie meurent dans des unités de soins aigus. Aussi, les infirmières qui travaillent dans ce milieu ont à prodiguer des soins infirmiers à une clientèle à la fois de soins aigus et de soins palliatifs. Par contre, celles-ci ont à faire face, entre autres, à des contraintes et obstacles organisationnels et environnementaux qui viennent compliquer la prestation de soins infirmiers palliatifs au travers d’une clientèle majoritairement de soins aigus. Il importe donc de savoir comment elles y parviennent. Cette étude exploratoire descriptive a pour but d’explorer et de décrire les stratégies que les infirmières de milieux de soins aigus déploient pour favoriser une pratique optimale de soins palliatifs de fin de vie. Le cadre de référence utilisé est le profil des compétences générales et spécifiques en soins palliatifs attribué aux infirmières du MSSS (2008). Huit participantes (infirmières) travaillant dans des unités de médecine et de cardiologie dans les établissements du CHU de Québec ont été rencontrées. Beaucoup de stratégies ont été identifiées, dont une plus propice à ce milieu soit, « Optimiser le temps passé auprès du patient et sa famille ». La stratégie « Faire de l’enseignement et donner aux proches de l’information » est celle qui revient le plus souvent dans le discours de ces infirmières. Également, on note des divergences quant aux obstacles et aux facteurs favorables mentionnés dans la littérature générale en soins palliatifs.

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ DU MÉMOIRE ... iii 

TABLE DES MATIERES ... iv 

LISTE DES TABLEAUX ... vii 

LISTE DES FIGURES ... viii 

REMERCIEMENTS ... ix 

INTRODUCTION ... 1 

CHAPITRE 1 : LA PROBLÉMATIQUE ... 3 

1.1  L’organisation des soins palliatifs ... 3 

1.1.1 Historique ... 3 

1.1.2 Définition... 4 

1.1.3 La situation au Canada et au Québec ... 6 

1.2 La prestation des soins infirmiers palliatifs ... 8 

1.2.1 Modèle de guide des soins palliatifs: Fondé sur les principes et les normes de pratiques nationaux (ACSP) ... 8 

1.2.2 Normes de pratique Canadienne en soins infirmiers palliatifs de l’ACSP (2009) ... 9 

1.2.3 Plan directeur de développement des compétences des intervenants en soins palliatifs (MSSS). .. 9 

1.2.4 Plan directeur de l’examen et compétence de la spécialité- Plan de l’examen de certification infirmière en soins palliatifs (CNA-AIIC) ... 10 

1.2.5 Les compétences selon l’Association Canadienne des Écoles en Sciences infirmières [ACÉSI] .. 11 

1.2.6 Perception des infirmières sur leurs rôles et attributs professionnels en tant qu’intervenantes en soins palliatifs ... 12 

1.3 Le contexte de la pratique infirmière en milieux aigus ... 14 

1.4 But de l’étude ... 15 

CHAPITRE 2 : RECENSION DES ÉCRITS ... 17 

2.1 Les soins infirmiers palliatifs de fin de vie en milieux de soins aigus ... 17 

2.1.1 Facteurs défavorables ... 18 

2.1.2 Facteur favorable ... 24 

2.2 L’expérience vécue des infirmières lors de prestations de soins palliatifs dans un contexte de soins aigus…… ... 25 

2.3 Processus liés à la prestation de soins infirmiers palliatifs dans un contexte de soins aigus ... 27 

2.4 L’objectif de l’étude ... 29 

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v

3.1 Cartographie des principaux domaines de compétences en soins palliatifs et profil du MSSS ... 31 

3.2 Obstacles reliés au contexte de soins aigus lors de la prestation de soins palliatifs. ... 35 

CHAPITRE 4 : LA MÉTHODOLOGIE ... 36 

4.1 Le devis de la recherche ... 36 

4.2 Le milieu de recherche ... 37 

4.3 La population cible et l’échantillon ... 37 

4.3.1 La sélection des participants ... 38 

4.3.2 L'échantillonnage et le recrutement ... 39 

4.4 Les critères de rigueur scientifique ... 40 

4.4.1 Crédibilité, fiabilité, confirmation et transférabilité ... 40 

4.5 La méthode de collecte et d’analyse de données ... 42 

4.5.1 La méthode de collectes de données ... 42 

4.5.2 La méthode d’analyse thématique ... 42 

4.6 Les considérations d'ordre éthique ... 43 

CHAPITRE 5 : PRÉSENTATION DES RÉSUTATS ... 45 

5.1 Problèmes reliés au recrutement ... 45 

5.2 Les caractéristiques sociodémographiques et professionnelles des infirmières ... 45 

5.3 Le contexte de l’étude ... 46 

5.4 L’expérience de prodiguer des SPFV en soins aigus ... 47 

5.5 Les stratégies déployées par les infirmières pour prodiguer des SPFV dans une unité de soins aigus . 49  5.5.1 ORGANISATION DU TRAVAIL ... 51 

5.5.2 PRESTATION DES SOINS ... 64 

5.5.3 RESPECT DE LA PERSONNE ... 79 

5.5.4 DÉVELOPPEMENT PERSONNEL ET PROFESSIONNEL ... 84 

5.6 Les facteurs facilitants et les obstacles ... 89 

CHAPITRE 6 : DISCUSSION ... 94 

6.1 Une stratégie qui se distingue en contexte de soins aigus lors de la prestation de SPFV ... 95 

6.2 Une stratégie prédominante en contexte de soins aigus lors de prestation de soins palliatifs. ... 97 

6.3 Des stratégies en réponse aux obstacles identifiés dans la littérature ... 97 

6.4 Moyens souvent utilisés dans l’application de différentes stratégies ... 102 

6.5 Les rôles retrouvés au travers des stratégies ... 103 

6.6 Forces et limites de l'étude ... 105 

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vi

CONCLUSION ... 109 

BIBLIOGRAPHIE ... 111 

Annexe A : Normes de pratique canadiennes en soins infirmiers palliatifs (définitions) ... 119 

Annexe B : Compétences et indicateurs pour l’admissibilité à la pratique en soins palliatifs et ... 120 

de fin de vie pour les infirmières ... 120 

Annexe C : Affiche pour l’invitation à participer à l’étude ... 121 

Annexe D : Questionnaire d’entrevue ... 123 

Annexe E : Feuillet d’information et formulaire de consentement ... 128 

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Tableau synthèse des domaines et compétences MSSS (2008) ... 33  Tableau 2. Contexte de l’étude ... 46 

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LISTE DES FIGURES

Figure 1 : Concept traditionnel (gauche) et nouveau (droite) des soins palliatifs selon l’INSPQ ... 6  Figure 2: Les stratégies déployées par les infirmières pour prodiguer des soins palliatifs en fin de vie dans une unité de soins aigus ... 50 

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REMERCIEMENTS

Lorsqu’on entame une maîtrise avec mémoire on est loin de se douter qu’il nous faudra autant de persévérances, d’effort et de temps à investir pour parvenir jusqu’au bout soit la diplomation. Toutefois lorsque l’on voit le produit final on se dit que le jeu en vaut la chandelle. Une chose est certaine, c’est que ça ne se fait pas tout seul. La contribution d’autres personnes qu’elle soit plus ou moins grande est nécessaire pour la réalisation de ce projet. Celles-ci sont en partie tributaires de notre réussite. On se doit d’avoir des personnes qui gravitent autour de nous.

Malgré les obstacles qui ont pu survenir tout au long de ce « périple », lesquels soit dit en passant ont été surmontés, à la lumière de ce jour, je constate que ce travail a été formateur. C’est pourquoi j’aimerais avant tout remercier ma directrice de projet soit la docteure Mireille Lavoie pour sa générosité, sa patience, sa bonne expertise, ses conseils et commentaires avisés.

J’aimerais aussi remercier mon contact au CHU de Québec, soit Mme Maggie Plourde, infirmière et conseillère en soins spécialisés qui a généreusement donné de son temps en préparant le terrain et en facilitant la communication avec les chefs des unités de soins aigus (médecine et cardiologie) dans les établissements du CHU de Québec. Je désire également remercier ces derniers, les chefs d’unité, pour avoir collaboré avec enthousiasme au processus de recrutement des participantes. Il ne faut surtout pas oublier les infirmières qui ont bien voulu participer à l’étude. Je les remercie pour avoir montré autant d’intérêt lors de l’entrevue et pour avoir bien voulu partager avec moi leurs expériences et perspectives. J’aimerais enfin remercier Mme Caroline Maltais, responsable de formation pratique à l’Université Laval pour m’avoir éclairée sur une question d’ordre éthique.

Bien entendu, il me reste à remercier mes enfants, William, Simon, Samuel et Angelina, pour leur patience et encouragement.

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INTRODUCTION

Les soins palliatifs sont depuis quelques années en constant développement, notamment en regard de la qualité des soins offerts. Plusieurs organismes (gouvernementaux, provinciaux, ou autres) mettent l’accent sur ce point. Par exemple, la Coalition pour des soins de fin de vie de qualité du Canada [CSFVQ] a établi un plan d’action de 2010 à 2020 où il est mentionné que les soins palliatifs de fin de vie (SPFV) ont évolué de façon importante, mais qu’il reste à la fois encore beaucoup à faire. On y déplore le fait qu’un grand nombre de personnes meurent sans avoir eu des soins de fin de vie de qualité :

Malgré le fait que la plupart des Canadiens préféreraient mourir à la maison, entourés de leurs proches, la plupart décèdent à l’hôpital ou dans des foyers de soins de longue durée. Et la disponibilité des soins de bonne qualité destinés aux gens en fin de vie varie grandement d’une région à l’autre au pays, et d’un milieu de soins à l’autre. (CSFVQ, 2010, p. 2)

Cette préoccupation s’accompagne du fait que la population est vieillissante et que le taux de décès est grandissant d’année en année. Selon une infographie de Statistique Canada (2015, 29 septembre), le pourcentage de la population canadienne âgée de 65 ans et plus (16,1 %) a dépassé le groupe de 0-14 ans (16 %) pour la première fois au 1erjuillet 2015. Aussi, le nombre de mortalités tout âge confondu s’élève à 268 056 (estimation) en 2014-2015 (65 350 au Québec) comparativement à 244 968 en 2010-2011 (60 125 au Québec) (Statistique Canada, 2015, 29 septembre). Les projections démographiques révèlent un taux exponentiel pour le futur (Statistiques Canada, 2001). Donc, la tendance fait en sorte que plus de gens auront besoin de soins palliatifs, d’où l’importance portée à la qualité de ces soins. De plus, alors que la majorité des soins de fin de vie se donne dans des établissements hospitaliers, le Ministère de la santé et des services sociaux [MSSS] du Québec (2010) révèle qu’il y a un manque d’uniformité quant à l’accessibilité, l’intensité et le type de programme offert d’un établissement à l’autre. De plus, il est mentionné que dans ces milieux, les gens vont fréquemment décéder dans des lits de soins aigus. Ceux-ci auront reçu les soins du médecin traitant et du personnel assigné au chevet de l’usager, lesquels n’aurait en général aucune approche palliative et ni considération pour l’intensité que demandent les services de fin de vie (MSSS du Québec, 2010, p. 27).

C’est donc dire que beaucoup de gens meurent dans les centres hospitaliers, plus précisément dans des lits de soins aigus, et beaucoup d’infirmières dispensent des SPFV dans ces lieux. La grande majorité de la prestation des soins de fin de vie repose ainsi sur les infirmières travaillant dans les unités de soins aigus où

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on peut penser qu’il soit difficile d’adopter une approche palliative. Pourtant la prestation de soins palliatifs fait partie de la pratique infirmière, quel que soit le cadre de travail. Ne serait-il donc pas plus juste de se poser la question à savoir comment est-ce qu’elles parviennent à prodiguer des soins infirmiers palliatifs de qualité dans des unités de soins aigus? Qu’est-ce qui peut faire obstacle à ces soins et quels seraient les facteurs favorables?

Aussi, le but de ce mémoire est d’explorer et de décrire les stratégies que les infirmiers et infirmières utilisent pour arriver à prodiguer des SPFV de qualité dans une unité de soins aigus. Plus précisément, il s’agit de préciser comment celles-ci s’y prennent pour mettre en pratique les diverses dimensions (compétences) attendues en soins infirmiers palliatifs de fin de vie et les stratégies qu’elles utilisent pour surmonter les différents obstacles inhérents au contexte de soins aigus.

Ce manuscrit comprend six chapitres. Dans le premier chapitre, on retrouve la problématique. Une description des composantes de l’organisation des soins palliatifs y sera présentée. De plus, on fera état de la prestation des soins infirmiers palliatifs (document, perceptions, etc.) et plus précisément, du contexte des soins de la pratique infirmière en milieux aigus. Au chapitre 2, on présente la recension des écrits, tandis que le chapitre 3 fait mention du cadre de références qui sera utilisé soit le profil des compétences générales et spécifiques en soins palliatifs attribué aux infirmières du MSSS (2008). La partie méthodologique de l’étude sera ensuite exposée dans le chapitre 4 et le chapitre 5 exposera les résultats obtenus. Enfin le chapitre 6, présentera la discussion des éléments retrouvés dans les précédents chapitres.

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CHAPITRE 1 : LA PROBLÉMATIQUE

1.1 L’organisation des soins palliatifs

1.1.1 Historique

Autrefois en occident, les soins aux mourants étaient bien différents d’aujourd’hui alors que la plupart des gens décédaient dans leur demeure. Au milieu du XIXe siècle, en raison notamment de l’évolution de la médecine, les personnes moururent de moins en moins à la maison et plus souvent à l’hôpital, la plupart du temps dans des unités dites aujourd’hui de soins aigus. L’entourage du mourant et les soignants se comportaient et communiquaient généralement avec celui-ci comme si la mort n’était pas là de peur d’entraîner désespoir, cris et pleurs chez la personne agonisante (Ariès, 1975). Or, au cours du XXe siècle,

trois personnes vont particulièrement contribuer à changer la façon de donner et de considérer les soins aux mourants dans les hôpitaux et les hospices, surtout pour le personnel médical (médecins, infirmières1).

Cicely Saunders, en Grande-Bretagne (1919-2005), a été infirmière, travailleuse sociale puis médecin. En 1958, lors de ses études de médecine, elle fait une recherche sur la douleur auprès des patients de l’hospice St-Joseph (Clark, 1999). Elle donne alors une autre dimension à la douleur laquelle inclura les dimensions psychologique, sociale et spirituelle. Or, cette découverte modifiera par exemple la prestation des soins infirmiers qui, dorénavant, prendront en charge le soulagement de la douleur dans toutes ses facettes (Benoliel, 1995). Par la suite, Dre Saunders fonde en 1967 le premier hospice moderne, soit l’hospice St-Christopher, lequel devient un modèle dans le monde entier en raison notamment de ses nouvelles méthodes de soins pour les mourants et les proches (Fédération Wallonne des Soins Palliatifs [FWSP], 2008). Son approche a contribué à remettre le patient au centre de la pratique soignante en favorisant le dialogue et l’écoute, et faire ainsi de lui un sujet actif (Clark, 1999).

Quant à Élisabeth Kübler-Ross, psychiatre et professeure américaine (1926-2004), elle a contribué à l’accompagnement des mourants en développant une théorie sur les étapes du deuil (Clark, 1999). Son ouvrage, intitulé « Les derniers instants de la vie », donne des repères aux soignants travaillant dans les hôpitaux, alors que ceux-ci étaient plutôt formés pour donner des soins curatifs et qu’il n’existait encore aucune formation sur les soins des malades en fin de vie. Cette contribution a permis d’améliorer la

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communication avec les mourants, de comprendre ce que ces derniers vivaient, de mieux les accompagner et les réconforter (Mignot, 2008).

Au Canada, Balfour Mount est un chirurgien qui, dans les années 70, a été inspiré par Élisabeth Kübler-Ross et ses écrits sur la fin de vie. Dès lors, il décide de réorienter sa carrière dans le domaine de la fin de vie (FWSP, 2008). Suite à une étude conduite à l’hôpital Royal Victoria de Montréal sur les soins prodigués aux personnes en phase terminale et leur famille, il conclut que les soins sont inappropriés et qu’ils entraînent négligence et solitude chez les patients. Il joint donc pendant quelque temps l’équipe de la Dre Saunders au St-Christopher à titre de professeur invité (Centre de Santé Universitaire de McGills [CUSM], 2009) et, à son retour en 1974, il met sur pied la première unité francophone de soins palliatifs à l’hôpital Royal Victoria. Celle-ci disposera d’une équipe pluridisCelle-ciplinaire, d’accompagnement au deuil et de soutien pour les suivis à domicile (FWSP, 2008). Les soins infirmiers palliatifs en milieu hospitalier se trouveront conséquemment améliorés par cette vision de travail en équipe puisque Dr Mount y propose dorénavant une prise en charge globale des soins de santé en intégrant les aspects psychosociaux, spirituels et existentiels dans un esprit d’équipe de partage des compétences de chacun au profit du malade.

Par la suite, des mouvements pour les soins palliatifs ont été créés afin d’implanter les soins palliatifs au Canada et à l’échelle internationale (Ferris et al., 2002). La mise en place d’organisations et d'associations vient concrétiser ce mouvement. Parmi ceux-ci, on retrouve par exemple l’Association Canadienne des Soins Palliatifs [ACSP] qui a notamment contribué à définir et conceptualiser les soins infirmiers palliatifs (ACSP, 2013). Cette dernière et beaucoup d’autres travaillent en vue de l’amélioration de la prestation des soins palliatifs. Par exemple, voulant faire avancer la cause de l’accès à des soins palliatifs de qualité pour tous les Canadiens, des organisations nationales se sont regroupées en décembre 2000 pour former la « Coalition pour des soins de fin de vie de qualité du Canada ». Celle-ci a notamment contribué à la rédaction de documents de référence tels le Programme d’action national (2000), le rapport de progrès Mourir entouré de

soins publié en septembre 2004 (CSFVQ, 2007), le Plan d'action 2010-2020 en janvier 2010 et enfin, l’initiative Allez de l’avant : des soins qui intègre les soins palliatifs qui est géré par l’ACSP en 2012 (CSFVQ,

2016).

1.1.2 Définition

Il existe plusieurs définitions du terme « soins palliatifs », mais on peut constater que deux d’entre elles sont plus souvent citées; soit celle de l’Organisation Mondiale de la Santé [OMS] en 2002 (Société Française

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d’Accompagnement et de Soins Palliatifs [SFAP], 2013) et celle de l’ACSP (ACSP, 2013). On peut d’ailleurs constater des similitudes concernant ces définitions. Elles font référence au soulagement de la souffrance, à l’amélioration de la qualité de vie des patients et des proches, à l’aide apportée pour faire face aux problèmes physiques, psychologiques et spirituels ainsi qu’à l’approche d’équipe. Également, il est ajouté que les soins palliatifs sont fournis conjointement à d’autres traitements curatifs.

L’OMS inclut des valeurs et éléments particuliers dans sa définition portant sur la prévention de la souffrance, le soutien fourni au patient afin qu’il puisse vivre activement le plus longtemps possible, ainsi que le soutien de la famille pendant la maladie de leur proche et le deuil. On suggère enfin que les soins palliatifs soient prodigués le plus tôt possible dans le cours de la maladie et que cela peut comprendre des investigations pour une meilleure compréhension des complications cliniques.

De son côté, l’ACSP précise que les soins palliatifs ont comme but l’accompagnement vers le décès. Ils visent à fournir de l’aide au patient et aux proches pour affronter les problèmes sociaux et pratiques associés à la maladie (soit en plus des problèmes physiques, psychologiques et spirituels) ainsi qu’aux attentes, besoins, espoirs et craintes qui y sont reliés; pour la préparation des tâches en fin de vie, telle qu’établie par le patient; pour faire face à l’étape de la mort; et pour surmonter les pertes et les peines subies durant la maladie et le deuil.

Plus souvent qu’autrement, on retrouve la définition des soins palliatifs et plus rarement celle des SPFV dans les documents se rapportant à ce sujet. Si on observe la figure 1, on peut constater que les soins palliatifs sont maintenant prodigués dès l’apparition de symptômes complexes et jusqu’au deuil (après la mort), ce qui n’était pas le cas auparavant puisque l’expression « soins palliatifs » était réservée pour les soins prodigués en fin de vie (Shang et Jancarik, 2013). Or, il convient maintenant de préciser que les soins palliatifs « de fin de vie » sont ceux offerts aux personnes qui sont à l’étape pré-terminale ou terminale de leur maladie (MSSS, 2010). En ce qui concerne l’étape pré-terminale, dans la majorité des cas, les soins curatifs ont presque tous été arrêtés et la maladie progresse lentement, tandis qu’à la phase terminale, la condition clinique de la personne est instable amenant ainsi une perte accentuée de son autonomie (MSSS, 2010). Les SPFV correspondent donc aux soins de la personne qui n’a plus de possibilité de guérison et où il est incontestable que la mort est imminente. (Fondation contre le cancer, 2016). Ils ont notamment pour objectifs « l’amélioration de la qualité de vie », « l’amélioration de la qualité de mort », la gestion de la douleur et des symptômes, et le soutien psychologique, social, émotionnel et spirituel durant la fin de vie et pendant le deuil (Santé Canada, 2007).

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Figure 1 : Concept traditionnel (gauche) et nouveau (droite) des soins palliatifs

selon l’INSPQ

(INSPQ, 2006)

1.1.3 La situation au Canada et au Québec

Pour mieux comprendre l’importance de la prestation des soins palliatifs et de fin de vie par les infirmières dans les unités de soins aigus en centre hospitalier, on peut se référer aux statistiques et aux données que certains organismes mettent à notre disposition.

En 2008, 238 617 Canadiens sont décédés principalement du cancer (30 %), des maladies du cœur (21 %) et de maladies cérébrovasculaires (6 %) (Statistique Canada, 2013). Or, il semblerait qu’en 2008, seulement 16 % à 30 % de ces personnes ont pu profiter des soins palliatifs de qualité offerts dans les divers milieux de soins (incluant le domicile, la collectivité, le centre de soins palliatifs et l’hôpital) alors que 90 % des personnes mourantes auraient pu en recevoir (10 % étant des mortalités subites) (Carstairs, 2010). De plus, bien que la plupart des gens disent vouloir mourir à leur domicile et accompagné de leurs proches (Institut canadien d’information sur la santé [ICIS], 2007), 158 665 (66 %) des gens sont décédés en milieu hospitalier en 2008 (au Québec, cela inclut les centres d’hébergement de soins de longue durée) (Statistique Canada, 2015, 09 décembre). En 2012, ce tableau n’a pas réellement changé puisque le classement de ces trois principales causes de décès se maintient et leurs pourcentages sont pratiquement les mêmes soit 30%, 20% et 5%. (Statistique Canada, 2015,10 décembre). De plus, les gens décèdent encore principalement en milieu hospitalier alors que sur 246 596 décès au Canada, 156 464 personnes sont décédées en milieu hospitalier (Statistique Canada, 2015, 09 décembre).

Plus précisément au Québec, le rapport de l’Institut de santé publique du Québec [INSPQ] de 2006 indique que durant la période de 1997 à 2001, 264 389 personnes de 20 ans et plus sont décédées, dont 180 436 d’entre elles de maladies chroniques (soit environ 36 000 par année), donc considérées susceptibles de recevoir des soins palliatifs. De celles-ci, 8,3 % sont décédés à la maison, 18,6 % dans des établissements

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de soins de longue durée (résidences privées conventionnées pour personnes âgées et CHSLD) et plus de 69 % de ces décès dans des établissements généraux ou spécialisés. Également, on précise qu’à l’intérieur de ces derniers établissements, 47,6 % des décès sont survenus lors d’une hospitalisation en soins de courte durée, 8,1 % dans des services de soins palliatifs, 6 % à l’urgence et 8,1 % dans des lits de soins de longue durée (INSPQ, 2006).

Enfin, en 2005, on dénombrait un total de 357 lits réservés et réunis dans des unités de soins palliatifs dans les établissements du Québec, ce qui correspondait à un ratio de 23,8 lits pour 500,000 de population (INSPQ, 2006). Néanmoins, ce ratio a changé de manière positive pour la plupart des régions sociosanitaires de la région du Québec. En effet, alors que le MSSS du Québec (2016) recommande un ratio de 1 lit en soins palliatifs pour 10 000 habitants (ou 50 lits /500 000), 11 régions sur 18 atteignaient ou dépassaient ce ratio en 2014-2015 – la région de la Montérégie accusant le plus grand manque de lits requis tandis que la Capitale-Nationale, le plus grand excédant.

Par ces données, on constate que le Canada et le Québec possèdent un haut pourcentage de décès reliés aux maladies chroniques et que ceux-ci surviennent encore principalement en centre hospitalier, plus précisément dans des unités de soins de courte durée. Aussi, cela implique que les infirmières de ces milieux de soins sont toujours en grande majorité celles qui devraient fournir des soins aux personnes mourantes en fin de vie. Pourtant, selon le rapport de l’honorable Sharon Carstairs (2010), peu de gens auraient reçu des soins palliatifs de qualité en centre hospitalier, incluant les milieux de soins aigus. Or, cela a de quoi surprendre. En effet, tel que le stipule la loi 90, « l’exercice infirmier consiste à évaluer l’état de santé d’une personne, à déterminer et à assurer la réalisation du plan de soins et de traitements infirmiers, à prodiguer les soins et les traitements infirmiers et médicaux dans le but de maintenir la santé, de la rétablir et de prévenir la maladie ainsi qu’à fournir les soins palliatifs. » (art.12 – je souligne –)2. Il est donc clair que les soins palliatifs

devraient faire partie de la pratique de toute infirmière et qu’elle ne devrait pas, dès lors, être réservée aux seules unités ou maisons de soins palliatifs. Voyons donc comment cette pratique prend forme, et plus spécifiquement dans les milieux de soins aigus.

2 Assemblée nationale. Projet de loi no 90. Loi modifiant le Code des professions et d’autres

dispositions législatives dans le domaine de la santé.[adopté et sanctionné le 14 juin 2002] Québec,

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1.2 La prestation des soins infirmiers palliatifs

Les soins infirmiers palliatifs ont beaucoup progressé depuis les dix dernières années. L’Association des Infirmiers et Infirmières du Canada [AIIC] a d’ailleurs fait établir les soins palliatifs à titre de spécialité en 2003. Le premier examen de certification en soins infirmiers palliatifs basé sur les compétences générales et spécifiques a été mis en application en 2004 (Comité des normes en soins infirmiers de l’ACSP, 2009). Or, outre la reconnaissance de cette spécialité qui s’adresse à des infirmières détenant au moins déjà deux années d’expérience, il existe plusieurs modèles et cadres de référence de soins palliatifs destinés à supporter la pratique de toute infirmière auprès des personnes mourantes. En voici un bref tour d’horizon de façon à apprécier les principales composantes et compétences attendues de la pratique infirmière en soins palliatifs.

1.2.1 Modèle de guide des soins palliatifs: Fondé sur les principes et les normes

de pratiques nationaux (ACSP)

En 2002, Ferris et al. ont élaboré le modèle de guide des soins palliatifs de l’ACSP à partir d’expériences acquises, de connaissances d’intervenants et d’organisations, afin de produire une conception uniforme et une approche normalisée des soins palliatifs prodigués aux patients et à leurs familles pour tout type d’intervenant généraliste. Il y est énuméré des valeurs, des principes directeurs et des concepts fondamentaux reliés aux soins palliatifs. Et notamment, on retrouve dans ce modèle un outil appelé « le carré des soins ». Il s’agit d’une grille qui permet de préciser les modalités de soins prévues selon les problèmes vécus par le patient et les proches dans les domaines les plus courants, problèmes qui sont identifiés lors de la rencontre thérapeutique. La grille se présente ainsi : à l’horizontale on retrouve les 6 étapes de la relation thérapeutique (évaluation, transmission de l’information, prise de décisions, planification des soins, prestations des soins et confirmation). Tandis qu’à la verticale se situent les différents problèmes (gestion de la maladie et de la mort, soins de fin de vie ainsi que les pertes et deuils) et domaines (physique, psychologique, social, spirituel et pratique). En 2013, un comité établi par l’ACSP a revu et révisé le modèle pour qu’il représente davantage la situation et la pratique d’aujourd’hui des soins palliatifs (ACSP, 2016). Celui-ci est plus condensé et bien que quelque peu formulé différemment, le contenu reste sensiblement le même.

Ce guide représente un bon outil, notamment pour toutes les infirmières des milieux de soins aigus, permettant d’assurer le suivi des problèmes et la prestation des soins requis. Pouvant être considéré comme un supplément au plan de soins, il pourrait également être employé pour faciliter la communication et l’échange d’informations entre les équipes des différents quarts de travail. C’est ce modèle qui en fait a servi

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par la suite de cadre de référence pour l’élaboration des Normes de pratiques canadienne en soins infirmiers palliatifs en 2009

1.2.2 Normes de pratique Canadienne en soins infirmiers palliatifs de l’ACSP

(2009)

Les Normes de pratique canadienne en soins infirmiers palliatifs sont l’œuvre du travail d’un groupe d’infirmières canadiennes visant à améliorer les soins infirmiers dans ce domaine. Se basant sur le modèle de soins de l’ACSP (2002) (Comité des normes en soins infirmiers de l’ACSP, 2009, p. 21), ce document vise à guider les infirmières dans la prestation de leurs soins auprès des personnes en soins palliatifs et en de fin de vie et de leurs proches, et ce tout au long de la maladie et durant le deuil. Les normes canadiennes émises ici, au nombre de six, portent sur les thèmes suivant : la qualité de vie-mort, le confort, le soutien lors des transitions, la qualité et la sécurité des soins, l’exercice du leadership, et la croissance professionnelle et personnelle. On retrouve leurs définitions à l’annexe A.

Bien que ce document fasse la plupart du temps mention des infirmières en soins palliatifs, il est entendu qu’il s’adresse aux infirmières des différents milieux, incluant donc les unités de soins aigus. Les normes qui y sont énoncées servent également de base à l’élaboration des mises à jour des compétences, des examens de certification et des programmes de perfectionnement en soins infirmiers palliatifs (Comité des normes en soins infirmiers de l’ACSP, 2009).

1.2.3 Plan directeur de développement des compétences des intervenants en

soins palliatifs (MSSS).

Parallèlement, le Ministère de la Santé et des Services sociaux mandatait en 2008 le Réseau de soins palliatifs du Québec afin d’évaluer les besoins au niveau du développement des compétences en soins palliatifs des différentes catégories d’intervenants qui ont à fournir des soins dans ce domaine, d’établir des profils pour chacune d’elles, de comptabiliser les ressources en formation disponibles et de suggérer des méthodes d’apprentissage (MSSS du Québec, 2008). Toutes les données recueillies ont contribué à l’élaboration d’un plan directeur de développement des compétences des intervenants en soins palliatifs dans une perspective interdisciplinaire et qui comportent aujourd’hui deux volumes (MSSS du Québec, 2011). Ces documents, destinés à de multiples intervenants, sont une référence permettant d’établir les compétences

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minimales que devrait posséder toute personne qui prodigue des soins palliatifs afin de fournir un service de

qualité aux malades et à leur famille.

Ce document précise par exemple les compétences générales et spécifiques attendues des infirmières en lien avec dix domaines soit les mêmes qui se retrouvent dans « le carré des soins » de Ferris et al. (2002). Ainsi, cinq de ces domaines font appel à des habiletés génériques, soit relatives aux problèmes courants vécus par le patient et les proches (douleur et symptômes, besoins psychosociaux et spirituels, organisation de la vie quotidienne, agonie et décès, ainsi que deuil). Les cinq autres font davantage référence à des « modalités des soins » (communication, collaboration, questions éthiques et légales, développement personnel et professionnel, soins palliatifs et organisations des services de santé). Il vient donc préciser les compétences attendues de toutes infirmières, incluant celles prodiguant des soins palliatifs et de fin de vie (SPFV) en milieux de soins aigus.

1.2.4 Plan directeur de l’examen et compétence de la spécialité- Plan de l’examen

de certification infirmière en soins palliatifs (CNA-AIIC)

Le plan directeur de l’examen et compétences de la spécialité en soins palliatifs (AIIC, 2009) représente quant à lui un guide pour l’élaboration de l’examen de certification infirmière. Celui-ci est l’œuvre de l’association de plusieurs organismes, dont l’AIIC, la Société spécialiste des examens au Canada [SÉI], l’ACSP, ainsi que des infirmières spécialisées en soins palliatifs de tout le Canada.

Ce plan directeur vise à soutenir l’évaluation de l’aptitude de l’infirmière expérimentée (deux ans d’expérience) à prodiguer des soins infirmiers en soins palliatifs. L’évaluation des nombreuses compétences se situe dans 9 catégories soient les soins de la personne et des proches, l’évaluation et la gestion de la douleur et des symptômes, les soins dans les derniers moments, l’accompagnement, la pratique interprofessionnelle et la collaboration, l’enseignement, les questions juridiques et d’éthique, le perfectionnement professionnel et la défense des intérêts (ou advocacy). La certification obtenue procure un titre reconnu qui démontre une compétence formelle en soins infirmiers palliatifs et qui se doit d’être renouvelé aux cinq ans.

Les infirmières en soins aigus prodiguant régulièrement des (SPFV) et qui veulent détenir une certification infirmière dans cette discipline peuvent y accéder. Toutefois, bien que cela puisse être à la portée de toutes, on ne peut s’attendre et exiger que chacune d’entre elles possède intégralement les compétences qui y sont décrites.

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1.2.5 Les compétences selon l’Association Canadienne des Écoles en Sciences

infirmières [ACÉSI]

Par ailleurs l’Association Canadienne des Écoles en Sciences infirmières [ACÉSI] a quant à elle élaboré un document comprenant des compétences en SPFV ainsi que des indicateurs nationaux s’y rapportant. Le but est d’améliorer l’intégration des compétences en soins infirmiers palliatifs dans les programmes de premier cycle universitaire au Canada (ACÉSI, 2011).

Pour élaborer ce travail, le comité en charge a pris appui sur le concept de « soins palliatifs et de fin de vie » tel que défini par la « Stratégie canadienne sur les soins palliatifs et de fin de vie » de Santé Canada (2007). Or, on y comprend que les soins prodigués en fin de vie s’adressent aux personnes souffrant d’une maladie terminale.

La notion de compétence fait ici appel aux savoir-faire qui permettent de mettre en application les connaissances, les habiletés, les attitudes et les ressources externes devant des situations de soins palliatifs spécifiques. On retrouve des indicateurs qui précisent quant à eux les comportements devant être observés afin de confirmer l’application et l’intégration d’une compétence définie. De façon globale, ces compétences portent sur les habiletés relationnelles, la connaissance de la perte et du deuil, la connaissance et les habiletés dans la prestation de soins infirmiers holistiques, la reconnaissance et la réponse des besoins en fin de vie propre à différents groupes populationnels, la mise en application des connaissances éthiques, la reconnaissance des problèmes psychosociaux et pratiques, l’identification des services et ressources de soins palliatifs et de fin de vie, la sensibilisation, le conseil et l’identification des divers besoins de soins et la capacité de collaboration. Les compétences peuvent servir de référence pour guider le développement de programmes d’études dans les milieux d’enseignement en sciences infirmières tandis que les indicateurs peuvent être utiles aux infirmières professeures et aux étudiants afin d’évaluer le développement et l’intégration des compétences.

Bien que ce document semble davantage à l’attention des milieux académiques, il peut tout de même s’avérer un excellent guide de pratique pour les infirmières en soins aigus qui ont à fournir des SPFV. On y retrouve les neuf (9) compétences à l’annexe B.

Comme on peut le constater, et outre les innombrables écrits dans la littérature sur la description des soins infirmiers palliatifs, il existe de nombreux documents directeurs permettant de préciser les compétences que doit détenir toute infirmière qui prodigue des soins infirmiers palliatifs. Dans l’ensemble, on retient que la

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pratique infirmière en soins palliatifs doit se centrer sur des thèmes tels que la gestion de la douleur et des symptômes; les besoins psychosociaux et spirituels; l’accompagnement; le deuil, la communication, la collaboration; les questions éthiques et légales; le développement personnel et professionnel; etc. Aussi, on pourrait s’attendre à ce que toute infirmière en milieu de soins aigus soit en mesure d’offrir des SPFV sur la base de ces aspects.

1.2.6 Perception des infirmières sur leurs rôles et attributs professionnels en tant

qu’intervenantes en soins palliatifs

Quoique des normes, des modèles et l’établissement de compétences aient été largement élaborés et diffusés, la littérature démontre jusqu’à quel point la perception des infirmières sur leurs rôles en soins palliatifs dans un contexte de soins aigus rejoint ou non ceux définis par ces organismes. En fait, « la façon dont les infirmières perçoivent les situations cliniques détermine partiellement les pratiques de soins cliniques qu’elles choisissent d’appliquer » (traduction libre ; Pavlish et Ceronsky, 2009, p.404-405). En ce sens, c’est dire que tout dépendant des rôles que celles-ci perçoivent et s’attribuent à titre d’infirmières en soins palliatifs, cela aura un impact sur les soins qu’elles fourniront aux patients et de ce fait les compétences qu’elles mettront de l’avant.

L’étude qualitative conduite par Pavlish et Ceronsky (2009) a mis en lumière la perception des infirmières de différents milieux quant aux rôles et attributs professionnels qu’elles doivent détenir en soins palliatifs. 33 infirmières en oncologie de 3 centres médicaux urbains aux États-Unis ont été invitées à participer à des groupes de discussion sur l’exploration de leurs expériences en soins palliatifs. À la suite de l’analyse, 5 rôles infirmiers reliés aux soins palliatifs sont ressortis soit :

 L’enseignement : la prise de décision éclairée et l’autosoin sécuritaire incluant la gestion des symptômes;

 Le caring : l’aspect humain de l’expérience de la maladie, le confort et le soutien physique, émotionnel ainsi que spirituel;

 La coordination : la canalisation des multiples services et la mise en place d’un plan de traitement transparent et cohésif;

 L’advocacy : l’évaluation et la représentation des besoins des patients et de leurs familles;  La mobilisation : Répondre aux besoins dynamiques des patients et familles dans l’attention,

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Les participants ont également décrit leurs pratiques en soins palliatifs auprès des patients à travers sept attributs professionnels lesquels se retrouvent dans les rôles infirmiers en général : l’expertise clinique, l’honnêteté, l’orientation de la famille, l’attention perceptive, la présence, la collaboration et la délibération. Davies et Oberle (1990) ont quant à elles réalisé une étude descriptive afin d’identifier et de catégoriser les interventions en soins infirmiers lors de prestations de soins de soutien en soin palliatif, et éventuellement d’identifier les stratégies d’adaptation qui sont utilisées pour remédier aux stress qui peut être vécu dans ce domaine. Suite aux entrevues réalisées avec une infirmière prodiguant des soins de soutien à domicile, travaillant dans une clinique de contrôle de la douleur et des symptômes ainsi que dans un centre de traitement du cancer actif, les auteurs ont identifié 6 dimensions interreliées. Celles-ci consistent à valoriser, créer une relation, habiliter, trouver un sens, faire pour et préserver l’intégrité. En fait, ces dimensions ont servi de référence à l’élaboration de la première édition des normes de pratique canadiennes en soins infirmiers palliatifs de l’ACSP en 2002.

Stratford (2003) a par ailleurs décrit le rôle de l’infirmière en utilisant le cadre de référence de Davies et Oberle (1990), un modèle également largement reconnu pour les soins infirmiers palliatifs dans le Royaume-Uni. L’auteur reprend les six aspects du modèle de soins de soutien en les accompagnant cette fois d’exemples tirés de la pratique des infirmières. Par exemple, sous la dimension « Créer une relation », les infirmières doivent prendre du temps, partager des secrets et donner d’elles-mêmes. La dimension intitulée « Faire pour » fait référence à des situations où les patients et les familles ne sont plus capables de réaliser les soins requis, et où les infirmières doivent alors mettre à profit toutes leurs connaissances et habiletés professionnelles pour favoriser le confort et augmenter la qualité de vie des patients et leur famille.

En somme, il existe diverses compétences et modèles de soins qui ont été établis au fil des dernières années. Par ailleurs, certaines infirmières attribuent des rôles qui peuvent être similaires ou non d’une infirmière à une autre, tout dépendant de facteurs propre à chacune (expériences, milieu, etc.). Elles ont des outils de travail et une idée des rôles qu’elles doivent tenir, mais il semblerait que le contexte de pratique de certains milieux de soins peut parfois avoir une incidence sur la réalisation de ces compétences. Aussi, malgré le professionnalisme des infirmières, il pourrait en ce cas arriver qu’elles ne parviennent pas toujours à exécuter leur rôle et mettre en pratique les compétences comme elle le voudrait. Nous verrons en effet en ce sens que les milieux de soins aigus peuvent parfois représenter un obstacle à une pratique infirmière en SPFV répondant à ces compétences.

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1.3 Le contexte de la pratique infirmière en milieux aigus

Les milieux de soins aigus correspondent à un niveau de soins de santé où sont prodigués des soins permettant de traiter des blessures ou des maladies soudaines, inexpliquées ou non (ou des épisodes exacerbés de la maladie existante), de courte durée et qui peuvent conduire à la mort ou à l’invalidité si aucune intervention n’est prodiguée rapidement. (World Health Organization [WHO], 2013) Les soins aigus se retrouvent dans diverses fonctions cliniques, par exemple la médecine d'urgence, les soins de traumatologie, soins pré-hospitaliers d'urgence, la chirurgie de soins aigus, les soins intensifs, les soins d'urgence, etc. (WHO, 2013). Le terme « unités de soins de courte durée » [USCD], également employé, signifie qu’on y prodigue des soins médicaux et chirurgicaux pour des patients demandant une hospitalisation de plus de 24 heures, qui sont souvent regroupés, par exemple dans le cas de la médecine, en unités de médecine interne, de cardiologie, d’hématologie, de pneumologie, etc. (MSSS du Québec, 2014).

Il est reconnu et même attendu que le modèle de soins qui prédomine dans le cadre de milieux de soins aigus est principalement axé sur le curatif (Thompson, McClement et Daeninck, 2006 ; Pincombe, Brown et McCutcheon, 2003). Ceci contribue à créer un environnement qui ne concoure pas de manière optimale à la prestation de soins palliatifs. On retrouve dans ces milieux, une routine hospitalière constituée d’activités de soins journaliers répétitifs, mais surtout l’emploi de traitements et de technologies (perfusions IV, cathéters, etc.) axés sur la guérison. De fait, la notion d’efficience des ressources y est largement promue en fonction de la prestation de soins pour des patients dont l’objectif est la guérison (Pincombe et al.).

Dans le même sens, Fillion et Saint-Laurent (2003) associent les centres hospitaliers à des « usines de curatifs », dont la culture organisationnelle favorise la logique techno-scientificité. Les infirmières qui participent à cette étude témoignent de la difficulté d’effectuer des soins curatifs et palliatifs simultanément. Elles y voient un système à deux vitesses où les tâches techniques et la disponibilité émotionnelle doivent se côtoyer mutuellement. Des infirmières de soins aigus estiment notamment que de fournir des soins à des patients en SPFV demande beaucoup de temps (Norgren et Olsson, 2004, Roche-Fahy et Dowling, 2009). Or, cela peut effectivement être problématique dans un milieu où le rythme des activités est accéléré (Dunne et Sullivan 2000, Roche-Fahy et Dowling) et où on retrouve un grand afflux de patients admis pour des soins aigus ou sur leur départ (Nordgren et Olsson). On fait allusion aux aspects turbulent et chaotique de ce milieu (Nordgren et Olsson ; Thompson, McClement et Daeninck, 2006). Ce climat s’avère de plus contradictoire avec le calme et l’intimité qui sont considérés par celles-ci comme étant souhaitables pour les patients en soins palliatifs et leurs familles. De plus, les infirmières travaillant dans un cadre de soins aigus peuvent être amenées à de la confusion dans leur rôle étant donné que celles-ci doivent composer avec deux philosophies

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de soins fort différentes. Elles doivent effectuer des aller-retours, passant de l’une qui s’appuie sur les techniques, le côté scientifique et les traitements curatifs auprès des patients en soins aigus, à l’autre où elles doivent appliquer des soins imprégnés de la philosophie holistique qui vise l’accompagnement des patients pendant l’étape de la fin de vie (Roche-Fahy et Dowling).

Il apparaît dans l’étude de Borbasi, Wotton, Redden et Chapman (2005) un état de mécontentement de la part des infirmières qui prodiguent des soins palliatifs dans un milieu aigu. Elles ont témoigné que la mort se voulait trop médicalisée dans les milieux hospitaliers. Celle de Thompson et al. (2006) souligne quant à elle que les infirmières déplorent que la décision d’entamer les soins de fin de vie soit souvent prise tardivement dans la trajectoire de la maladie des patients. Plusieurs études font également mention de problématiques de tout ordre reliées à ce contexte de soins (organisationnelle, environnementale, communication, formation et autres), qui sont largement abordées dans le prochain chapitre (revue de littérature). Celles-ci sont vues comme des agents stresseurs qui rendent le travail des infirmières difficile et qui contrecarre la bonne mise en place des soins palliatifs (Fillion et Saint-Laurent, 2003).

1.4 But de l’étude

Comme nous avons pu le constater, les besoins en soins palliatifs et les soins prodigués ont largement changé depuis les dernières décennies. Dans une volonté de connaître la situation au niveau de la dispensation des soins palliatifs, plusieurs organismes ont effectué des rapports au niveau provincial et national. Or, ceux-ci ont révélé que beaucoup de décès ont lieu dans des établissements généraux ou spécialisés plutôt qu’à domicile, donc majoritairement dans des unités de soins de courte durée, voire de soins aigus.

Dans un souci de donner des soins palliatifs de qualité, prodigués par des professionnels ayant des compétences adéquates, différents organismes ont établi des normes de pratiques, des guides de soins palliatifs, des plans directeurs, des cadres de référence, des compétences générales et spécifiques ainsi que des indicateurs de compétences nécessaires à la dispensation de ces soins. Par conséquent, fort du travail de leaders en SPFV de qualité, les soins infirmiers ont pris forme et se révèlent aujourd’hui attendus de toute infirmière travaillant dans divers milieux, et donc également dans les unités de soins aigus.

Malgré tous les outils pouvant contribuer à améliorer la pratique infirmière en soins palliatifs, le contexte de la pratique infirmière en milieu de soins aigus semble parfois contrecarrer les efforts de prestation

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de soins palliatifs optimaux et même devenir un obstacle. Dans les études sur la perception des infirmières sur les soins palliatifs en milieux aigus, le cadre environnemental et organisationnel apparaît par exemple comme étant problématique. Le modèle de soins et la philosophie que prône ce milieu peuvent s’imposer et ne pas laisser de place à la philosophie des soins palliatifs, qui se veut une approche différente pour les patients et leurs familles, notamment parce que celle-ci est plutôt orientée vers la fin de la vie.

Donc, devant tous ces faits, on peut se demander comment les infirmières en milieux de soins aigus s’y prennent pour prodiguer des SPFV de qualité aux personnes mourantes ainsi qu’à leur famille, comment elles mettent en pratique les normes, les directives, et les compétences requises dans un climat parfois exigeant et dans un milieu qui impose son propre rythme. Aussi, le but de cette étude est d’explorer les stratégies que les infirmières de milieux de soins aigus déploient pour favoriser la pratique optimale de SPFV.

La notion de « stratégie » est définie comment étant: « A method or plan chosen to bring about a desired future, such as achievement of a goal or solution to a problem » (www.businessdictionary.com/definition/strategy.html, 2016) ou encore « l’art de coordonner des actions, de manœuvrer habilement pour atteindre un but » (Dictionnaires de français Larousse, 2016). Dans le cadre de ce mémoire, cette notion fera donc référence aux moyens, aux méthodes et les techniques (soins, relation d’aide, communication, etc.) employés pour en arriver au résultat ici attendu, soit la pratique optimale de SPFV.

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CHAPITRE 2 : RECENSION DES ÉCRITS

La recension des écrits sur le sujet de la pratique des infirmières prodiguant des SPFV dans un contexte de soins aigus s’est faite à partir de la littérature que l’on retrouve dans les banques de données CINHAL, PubMed, Psycinfo et Repère. Ainsi, les critères pour la recherche documentaire étaient que les articles devaient dater de l’an 2000 et plus, sauf s’ils constituaient un incontournable dans l’avancement des connaissances de la pratique infirmière palliative. Ce qui a motivé cette décision est que les premiers grands guides des soins palliatifs datent au début des années 2000. Les mots utilisés pour répertorier la documentation ont été: palliative care nursing3, palliative nursing3, hospice, experiences, nursing skills, nursing

knowledge, perceptions, learning, acute care, strateg*.

D’autres méthodes ont été utilisées pour identifier davantage d’articles, notamment en sélectionnant l’option « find similar results » que l’on retrouve entre autres dans CINHAL, ainsi que par la consultation de la table des références des articles déjà retenus et qui semblaient pertinents pour l’étude. Tout ce processus a permis de retenir douze articles.

2.1 Les soins infirmiers palliatifs de fin de vie en milieux de soins

aigus

Au sein de la littérature, les auteurs se sont surtout concentrés sur l’attitude et l’expérience vécue des infirmières lors de prestation de SPFV dans les milieux de soins critiques (Bone et Elderkin, 2010; Kirchhoff et Beckstrand, 2000; Yang et McIlfatrick, 2001). Leur intérêt pour les éléments qui influencent la qualité de SPFV dans un milieu de soins aigus (ou de courte durée) commence à surgir, mais il semblerait que les concepts de ce phénomène ne soient pas tout à fait bien compris et développés (Thompson et al., 2006). Certains auteurs se sont tout de même intéressés à la prestation de soins infirmiers palliatifs dans un milieu de soins aigus en centre hospitalier. Les résultats de leurs études démontrent que bien que les professionnels de la santé veulent prodiguer les meilleurs soins aux personnes mourantes et à leur famille, le contexte interfère parfois avec la prestation de SPFV optimaux. On note principalement un nombre important de facteurs défavorables sur lesquels nous reviendrons dans la section qui suit. Aussi, il est surprenant de constater qu’il y a peu de

3 Nous avons retenus le terme « soins palliatifs » plutôt que celui de « soins palliatifs de fin de vie » afin de ne pas limiter

notre recherche et puisque les soins de fin de vie sont encore souvent inclus dans la notion plus large de « soins palliatifs ». Les articles ont cependant été sélectionnés en considérant que ceux-ci traitaient spécifiquement des soins en fin de vie.

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facteurs favorables mentionnés. Cela soulève donc un doute à savoir si le cadre des milieux de soins aigus est idéal ou même acceptable pour prodiguer des SPFV que l’on veut optimaux pour les personnes mourantes. Pour mieux en prendre conscience, voici les facteurs qui ont été le plus souvent soulevés dans les études.

2.1.1 Facteurs défavorables

Une grande partie des facteurs défavorables à la prestation de SPFV dans un contexte de soins aigus sont en lien directement avec le cadre environnemental et organisationnel. On y retrouve également d’autres aspects nuisibles tels que la persistance des soins curatifs ainsi que le manque d’expérience et de formation en soins palliatifs.

2.1.1.1 Les difficultés liées au cadre environnemental et organisationnel

On note que le contexte des soins aigus représente en soi un cadre environnemental et organisationnel peu favorable à la prestation de SPFV. Plusieurs problèmes y sont reliés comme le rythme des activités, le manque de temps, d’effectifs, d’intimité, et la routine hospitalière.

L’état problématique du rythme des activités effréné dans ce type de milieu, qui complique la tâche des infirmières devant prodiguer des soins palliatifs à travers les soins aigus est abordé dans l’étude de Nordgren et Olsson (2004) portant sur la perception de médecins et d’infirmières concernant leurs relations de travail et sur les soins palliatifs qui sont prodigués dans une unité de soins coronariens d’un hôpital en Suède. Les auteurs font allusion à un endroit chaotique et turbulent (plusieurs patients sous moniteurs, alarmes, sonnerie de téléphone, etc.) représentant une source de stress pour les patients et leurs proches, mais également pour les soignants. L’achalandage important de patients dans ces unités fait aussi en sorte que lorsqu’il y avait pénurie de lits, les intervenants devaient procéder aux transferts des patients en soins palliatifs au bénéfice de ceux nécessitant des soins aigus. En conséquence, des témoignages de sentiments de détresse et de frustration ressortent de la part des infirmières puisqu’elles ont conscience de l’augmentation de la souffrance et du stress que cela occasionne aux patients mourants.

Dans une autre étude menée par Dunne et Sullivan (2000), les 8 membres des familles de patients hospitalisées pour des soins palliatifs dans un cadre de soins aigus d’un hôpital au Royaume-Uni corroborent ces faits. Tous ces participants estiment que ce n’est pas l’endroit approprié pour mourir. Ils décrivent les activités de cet environnement comme étant précipitées et l’équipe de soins comme étant occupée. De même,

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ils mentionnent les déplacements fréquents de leurs proches et comment cela s’avère aussi difficile pour eux. Les auteurs de l’étude évaluent ainsi que tous ces facteurs organisationnels, observés dans cet environnement hospitalier, sont à l’opposé de la philosophie des soins palliatifs où un endroit calme et paisible est entre autres souhaité.

Le manque de temps pour effectuer les soins, surtout identifié par les infirmières, est un autre thème qui revient assez souvent dans les études en contexte de soins aigus. Dans l’étude de Nordgren et Olsson (2004), les infirmières indiquent qu’un patient mourant demanderait plus de temps pour les soins comparativement à un autre en soins aigus, ce qu’elles n’ont pas nécessairement. Par conséquent, cela peut avoir des conséquences négatives pour l’équipe de soins ainsi que pour les patients eux-mêmes. Le manque de temps ainsi que le principe de priorisation qui subsiste dans ce milieu peuvent parfois être une source de frustration pour celles-ci. L’étude menée par Thompson et al. (2006) explique bien la problématique de priorisation. L’objectif de celle-ci étant de développer une théorie selon la perception des infirmières de la réalité des soins de fin de vie dans un cadre de soins aigus d’hôpitaux au centre du Canada. Elles rapportent que dans une unité de soins aigus médicale, elles ont de nombreuses responsabilités concernant les soins aux patients et se doivent d’établir des priorités afin de bien utiliser leur temps et leur énergie. Lorsque l’unité est dans un état d’équilibre, tous les patients reçoivent du temps et de l’énergie de façon égale. Sa répartition est cependant déstabilisée par de multiples crises (détérioration de l’état d’un patient, exacerbation de symptômes ou besoin de monitorage continu) qui exigent des infirmières qu’elles y répondent souvent immédiatement et donc qu’elles les priorisent.

D’autres études témoignent de difficultés ou de contraintes vécues par les infirmières en lien avec le

temps restreint dans un cadre de soins aigus. Dans Pavlish et Ceronsly (2009), celles-ci estiment que la

bonne collaboration et la coordination des soins avec l’équipe de soins de santé sont primordiales pour optimiser les soins palliatifs aux patients et à leurs familles. Toutefois, il n’y a pas assez de temps disponible pour effectuer autant de rencontres interdisciplinaires qu’il serait nécessaire, affectant ainsi ces deux aspects de soins. Également, bien que les participantes mentionnent l’importance de connaître les patients, plusieurs infirmières estiment que l’énergie mise sur les soins technologiques dans le cadre de soins aigus réduit conséquemment quelque peu les moments dont elles ont besoin pour établir des liens significatifs avec ceux-ci. Tout comme Pincombe et al. (2003) lesquelles indiquent que les infirmières sont incapables de « passer beaucoup de temps » avec les patients mourants étant donné la quantité de soins routiniers et technologiques qui leur sont prodigués. Il existe d’autres répercussions à cette réalité. Comme en témoignent les infirmières dans l’étude de Wotton et al. (2005) concernant les facteurs influençant les soins palliatifs aux patients atteints d’insuffisance cardiaque en stade terminal, le manque de disponibilité temporelle et la motivation des

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infirmières à fournir des soins palliatifs dans des unités médicales et cardiaques auraient une incidence sur leurs difficultés à répondre aux besoins complexes de ces patients. Désirant donner des soins holistiques, elles sont contraintes à se limiter aux soins physiques par « manque de temps ». Cette problématique est également exprimée par les infirmières lorsqu’elles ont à fournir du confort aux patients dans ce milieu (Roche-Fahy et Dowling, 2009). Pour y parvenir elles essaient de modifier l’environnement afin de donner l’impression d’un espace spacieux, calme, privé et confortable aux patients et à leurs familles dans ces cadres surpeuplés et ces aménagements peu conciliants, ce qui leur « prend beaucoup de leur temps ».

Le prochain thème, relié ici au manque d’effectifs, serait en partie responsable du temps restreint pour accorder tous les soins aux patients mourants et les familles. Selon Wotton et al. (2005), il y aurait une inégalité entre les ressources de personnels soignants auprès des mourants dans un cadre de soins palliatifs comparativement à un cadre de soins général ou cardiaque. Les participantes de l’étude de Wotton et al. estiment que des raisons économiques telles que la pénurie d’infirmières et des compressions budgétaires seraient ce qui justifie le ratio infirmières-patients dans un milieu de soins aigus, plutôt que l’expérience de l’infirmière, la continuité des soins ou la condition du patient. Ainsi, chaque infirmière doit prendre soin de plusieurs patients, ce qui rend plus difficile l’établissement d’une relation infirmière-patient et peut affecter la qualité des soins. De même, Pincombe et al. (2003) soulignent de façon importante que le cadre physique et organisationnel des soins aigus serait nuisible à la prestation de soins palliatifs. Leur étude, menée en Australie, permet de mettre en évidence que le niveaudes effectifs n’est pas établi selon les besoins propres de chaque patient aux différentes heures de la journée, mais qu’il est plutôt établi afin de favoriser l’exécution des tâches hospitalières respectant une routine traditionnelle et les temps appropriés définis par l’hôpital.

Le manque d’intimité relié spécifiquement à l’environnement physique constitue une autre préoccupation pour les infirmières. Ces dernières observent que ce problème augmente la détresse des patients en soins palliatifs, leurs proches, ainsi que les autres patients qui se trouvent à proximité (Roche-Fahy et Dowling, 2009). Des familles viennent confirmer ces dires en témoignant que les lieux n’aident pas à obtenir de l’intimité avec la personne aimée qui se meurt, sans avoir peur d’être dérangées (Dunne et Sullivan, 2000). Néanmoins, alors que l’étude de Pincombe et al. (2003) révèle que les membres d’une équipe prennent parfois des moyens pour contrecarrer cet obstacle, comme en transférant le patient mourant dans une autre chambre pour lui permettre de vivre des moments privés avec sa famille, des observations révèlent un côté négatif à cette action. En effet, pour le patient, être seul peut parfois provoquer de l’isolement, une perte d’identité et des situations pouvant compromettre sa dignité (en ayant par exemple le sentiment qu’il a été oublié, la peur de mourir sans que personne s’en aperçoive). En étant déplacé dans une pièce privée, il pourra plus difficilement communiquer ou appeler à l’aide et, en l’absence de la famille, il risque d’être laissé sans

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surveillance pendant de longues périodes de temps. De plus, l’emplacement des chambres individuelles pose parfois en soi un certain problème d’intimité puisqu’elles sont souvent plus exposées aux bruits (ex. : proximité des toilettes, pièces d’écluses et aires de services). Les auteurs en concluent qu’il y a un besoin de reconsidérer l’endroit qui serait approprié pour donner des soins à ces patients vulnérables dans les derniers moments de leur vie.

La routine hospitalière est un autre élément qui vient potentiellement modifier la prestation des soins palliatifs dans un cadre de soins aigus. Pincombe et al., (2003) font le point sur ce sujet. Ils définissent l’expression routinehospitalière comme étant les habitudes de soins qui s’appuient sur les règlements et les politiques de l’hôpital. Toutefois, celles-ci peuvent ne pas correspondre aux nécessités du patient mourant et de sa famille et, par conséquent, cela peut amener une certaine tension sous-jacente parmi les professionnels qui ont à répondre à des demandes organisationnelles lesquelles font concurrence avec les besoins de ceux-ci. Aussi, ils évaluent que les attitudes, les comportements, les systèmes et les routines sont établis et sollicités afin d’obtenir des ressources humaines les plus efficientes possible, aptes à gérer une clientèle généralement orientée vers la guérison. Aussi le modèle curatif de soins de santé mis en place dans les hôpitaux publics ne laisse aucune place à une culture de soins pour les personnes mourantes. Finalement, ils en concluent que les soins palliatifs ne sont pas priorisés dans les activités hospitalières.

2.1.1.2 La persistance d’interventions curatives

Des auteurs tels que Middlewood et al. (2001), Nordgren et Olsson (2004) et Davidson et al. (2002) ont par ailleurs évoqué que la poursuite de soins curatifs lorsque les patients sont en fin de vie constitue aussi un facteur défavorable à la prestation de soins palliatifs de qualité. Pour certains, cela leur apparaît être même en contradiction avec les soins palliatifs. Ils estiment que ces soins ne sont plus d’aucune efficacité pour les patients et que cela provoque plus de tort que de bien à cette étape de la maladie. On peut toutefois y apercevoir une certaine confusion dans les termes utilisés puisque certains vont parler de traitements actifs en faisant allusion aux traitements curatifs dans un but de guérir alors que d’autres font référence aux traitements qui maintiennent la vie. Il semblerait que les opinions divergent et que la pratique varie d’un milieu à l’autre.

L’étude de Middlewood, et al. (2001) visait à explorer les soins médicaux et infirmiers prodigués à 100 patients mourants atteints de tumeurs malignes hospitalisés dans des unités de soins aigus en Australie. Leurs données quantitatives démontrent que des traitements actifs (tels fluides IV, nutrition artificielle, antibiotique IV, intubation et tests diagnostiques) sont toujours fournis à 60 % des sujets jusqu’au moment de leur mort ou peu de temps avant (48 heures pour les tests diagnostiques). Selon ceux-ci, ces procédures

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augmentent la souffrance plutôt que la soulager et elles sont souvent très traumatisantes pour ces patients en phase terminale. Également, des études démontrent que la continuité d’interventions curatives peut avoir des incidences éthiques. Dans Nordgren et Olsson (2004), des participants reconnaissent qu’ils ont à effectuer des tests, des traitements et des examens qu’ils trouvent extrêmement douloureux et inutiles sur des patients en fin de vie puisque cela n’améliore pas leur condition, ce qui est selon eux éthiquement inadmissible. L’INSPQ (2006) évalue qu’au Québec, il y a eu au moins un acte interventionniste (ventilation, réanimation, salle d’opération, soins intensifs) dans les derniers mois de vie pour près de 26 % des patients qui pouvaient bénéficier des soins palliatifs, ce qui ne devrait pas arriver dans le cas d’une bonne transition vers une approche palliative. Middlewood, et al. (2001) estiment que les données récoltées démontrent par ailleurs un manque de clarté dans les décisions puisque même si les directives de fin de vie sont établies (ne pas réanimer, reconnaissance de l’état de mourant et élaboration des buts de soins palliatifs), les traitements qui maintiennent la vie et les tests invasifs continuent d’être appliqués sur plusieurs patients. Ainsi, cet accent sur les soins aigus n’est pas sans conséquence sur les patients et leurs familles lesquels peuvent avoir une fausse idée de la réelle nature terminale de la maladie. Ils en concluent donc que la transition des soins curatifs vers l’approche des soins palliatifs dans le cadre des soins aigus est fort problématique. Et l’explication apportée par ceux-ci est qu’en milieu aigu, le modèle de soin de santé est basé sur l’impératif thérapeutique et donc orienté vers les interventions curatives.

Toutefois dans Davidson et al. (2002), on émet des propos quelque peu différents de ceux qui viennent d’être exposés et qui permettent d’apporter des nuances importantes. Les auteurs ont effectué une revue de littérature sur les questions entourant les soins de fin de vie pour des patients atteints de maladies chroniques cardiorespiratoires dans des environnements de soins aigus et critiques. Ils estiment que les soins palliatifs ne signifient pas nécessairement le retrait absolu des traitements actifs. Il peut y avoir des interventions de base ou dans quelques cas des thérapies (inotrope IV, respirateur utilisant la pression positive continue, etc.) qui peuvent être fournies et qui sont bénéfiques pour les patients. Ces interventions peuvent servir à améliorer leur qualité de vie, à avoir un meilleur contrôle des symptômes. Néanmoins, les traitements curatifs qui sont fournis aux patients incurables dans un but de guérison ou de rétablissement ne devraient pas être fournis. Selon les auteurs, cela peut contribuer à donner de faux espoirs sur la possibilité de guérison pour les patients et les familles et les professionnels peuvent se voir confrontés à de la résistance lors d’approches sur les soins de fin de vie de la part de ceux-ci (Davidson et al., 2002).

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