Amélioration de la qualité nutritionnelle des bouillies
d’igname et leur efficacité
chez les rats de souche
wistar.
Elenga M. 1,2,3, Tchimbakala M. S.2, Nkokolo Sahou A.2
1Equipe Pluridisciplinaire de Recherche en Alimentation et Nutrition (Eprancongo)
2Laboratoire de Nutrition et d’Alimentation Humaines BP 69, Faculté des Sciences et Techniques, Université Marien
Ngouabi, Brazzaville, Congo.
3Auteur correspondant : E-mail : elengamichel@yahoo.fr Tel : (00242)06 654 38 56
Original submitted in on 11th April 2016. Published online at www.m.elewa.org on 31st July 2016
http://dx.doi.org/10.4314/jab.v103i1.4
RESUME
Objectif : Le présent travail a pour objectif d’améliorer la qualité nutritionnelle des bouillies d’igname par l’ajout de la farine de courge, de soja, des feuilles de Urera trinervis (légume sauvage) et d’augmenter la densité énergétique de ces bouillies par l’incorporation de malt et de carbonate et d’évaluer l’efficacité nutritionnelle des bouillies améliorées chez les rats de souche wistar.
Méthodologie et résultats: La méthode consiste à étudier l’effet de l’ajout, aux tubercules d’ignames préalablement épluchés, ayant subi une précuisson et réduits en farine, des graines de courge préalablement séchées, torréfiés et écrasées, de la farine de soja et des feuillies séchées et réduites en poudre de Urera trinervis. Les paramètres déterminés sont la teneur en protéines, en lipides, en cendres, en fibres, en glucides, la matière sèche totale ingérée et le gain de poids. La méthode consiste également à étudier l’effet de l’incorporation de malt et de carbonate de calcium sur les bouillies en fonction de leur teneur en matière sèche. Les paramètres déterminés sont la vitesse d’écoulement et la densité énergétique. Les résultats obtenus montrent que la teneur en protéines est passée de 7,01 ± 1,03 g/100g de MS pour la bouillie traditionnelle d’igname à 15,57 ± 0,96g/100g de MS pour la bouillie améliorée issue du procédé modifié , celle des lipides est passée de 3,76 ± 1,15 g/100g de MS dans la bouillie traditionnelle à 9,64 ± 1,04g/100g de MS dans la bouillie améliorée et celle des cendres (sels minéraux totaux) est passée de 1,44 ± 1,12g/100g de MS dans la bouillie traditionnelle à 3,64 ± 1,06g/100g de MS dans la bouillie améliorée Les résultats sur la consistance des bouillies montrent l’incorporation de malt au taux de 1% en présence de carbonate de calcium a permis de préparer des bouillies ayant une consistance souhaitable (120mm/30s pour une teneur en matière sèche d’environ 24 g de MS/100g de bouillie). Les résultats montrent également que les rats nourris au régime de bouillie améliorée connaissent un gain de poids de 2,06 ± 1,14 g/j. alors que les rats soumis au régime de bouillie traditionnelle simple ont un gain de poids de - 0,16 ± 1,09 g/j.
Conclusion et application des résultats: La formulation des bouillies améliorées à base d’igname, associée aux traitements technologiques de l’amidon permet de préparer des bouillies conformes aux normes recommandées et qui ont entraîné un gain de poids chez les rats.
Journal of Applied Biosciences 103:9819 – 9828
Ces résultats paraissent adaptés dans le cadre de la lutte contre la malnutrition infantile dans le contexte des ressources locales disponibles.
Mots clés : formulation, aliment de complément, consistance, qualité nutritionnelle, densité énergétique. Improvement of the nutritional quality of the gruel of yam and their effectiveness in the wistar rats ABSTRACT
Objective: The objective of this present study is to improve nutritional quality of the gruel of yam by the addition of the marrow flour, the soybean flour, the leaves of Urera trinervis (wild vegetable) and to increase the energy density of these gruelsby the incorporation of malt and carbonate and to evaluate the nutritional effectiveness of improved gruel in the wistar rats.
Methodology and results: The method studied the effect of the addition of tubers of yams peeled beforehand, having undergone a precooking and reduced to flour, crushed dried marrow seeds , the soybean flour and the leaves of dried and powdered Urera trinervis . The determined parameters were the content of proteins, lipids, ashes, fibers, of carbohydrates, the intake dry matter total and the weight gain. The method also consists in studying the effect of the incorporation of malt and calcium carbonate on the gruels according to their solids content. The given parameters are the consistency (rate of flow) and the energy density. The results obtained show that the content of proteins is of 7.01 ± 1.03 g/100g of dry matter for the traditional gruels of yam and of 15.57 ± 0.96g/100g of dry matter for the improved gruels resulting from the modified process, that of the lipids passed from 3.76 ± 1.15 g/100g of dry matter for the traditional gruels at 9.64 ± 1.04g/100g of dry matter in the improved gruels and that of ashes (total rock salt) passed from 1.44 ± 1.12g/100g of dry matter in the traditional gruels to 3,64 ± 1.06g/100g of dry matter in the gruels improved the results on consistency of the gruels show the incorporation of malt at the rate of 1% in the presence of calcium carbonate made it possible to prepare gruels having a desirable consistency (120mm/30s for a content of matter dries of approximately 24 g/100g of gruel). The results also show that rats fed boiled improved diet experience a weight gain of 2.06 ± 1.14 g / d. while rats with simple traditional porridge diet have a weight gain - 0.16 ± 1.09 g / d. Conclusion and application of results: The formulation of the gruels improved based on yam, associated the technological treatments of the starch makes it possible to prepare gruels in conformity with the standards recommended and which involved a profit of weight in the rats.
These results appear adapted within the framework of the fight against infantile malnutrition in the context of the local resources available.
Key words: formulation, complemented food, consistency, nutritional quality, energy density, INTRODUCTION
La malnutrition est un problème de santé publique, qui sévit dans les pays en développement (Bobby et al. 2002). En République du Congo, près de 4470 enfants sont malnutris dont 26% souffrent de la malnutrition chronique, 6,6% sont émaciés et 14,5% ont une insuffisance pondérale (EDS Congo, 2006). Toutes ces formes de malnutritions entraînent l’accroissement de la mortalité, l’élévation de la sensibilité aux maladies, la diminution des performances intellectuelles, la réduction des capacités physiques. En conséquence, le jeune enfant devenu adulte, est incapable de participer au développement socio-économique du pays. Ces problèmes nutritionnels apparaissent, dans les pays
en voie de développement, pendant la période d’alimentation de complément (Cornu et al., 1993; Trèche, 1995; Delpeuch et al., 1996; WHO, 1998). Alimentation complémentaire est toute alimentation donnée en complément du lait maternel lorsque celui-ci ne suffit plus à couvrir les besoins nutritionnels à partir de 6 mois. L’aliment de complément semble être le facteur étiologique de l’apparition de la malnutrition. En effet, dans les pays en développement, ces aliments de complément sont, dans la plupart des cas, préparés à partir des denrées locales, notamment les produits amylacés qui, ne subissent aucun traitement enzymatique préalable et entrent seuls dans la confection des
bouillies locales. La structure de l’amidon lui confère des propriétés particulières qui se traduisent par un taux de gonflement considérable pendant la cuisson. Ainsi, les bouillies à base d’aliments amylacés n’ayant pas subi un traitement enzymatique (amylasique) préalable, ont tendance à contenir très peu de matière sèche et à présenter ainsi une faible densité énergétique. Pour résoudre ce problème, l’amidon des bouillies doit subir des traitements enzymatiques (amylasiques) conduisant à la rupture des liaisons afin d’en réduire le taux de gonflement. La viscosité des bouillies se trouve par conséquent diminuée et la densité énergétique accrue, ce qui permet à l’enfant de consommer davantage de matière sèche. Il s’ensuit que de telles bouillies ont des faibles teneurs en protéines et en lipides, et leur densité énergétique est faible (Cornu et al., 1993, Elenga et al., 2009) ; elles sont donc incapables de couvrir les besoins nutritionnels et énergétiques en complément du lait maternel. Des traitements technologiques susceptibles d’améliorer la qualité nutritionnelle et de modifier les propriétés de gonflement de l’amidon sont souvent utilisés pour améliorer la densité énergétique des bouillies, il
s’agit notamment les amylases industrielles (Tchibindat et Trèche, 1995), les amylases de céréales germées (Elenga et al., 2009 ; Zannou-Tchoko et al., 2011), la cuisson-extrusion (Mouquet et al, 2001, Mouquet et al, 2003) . L’étude consiste à enrichir en nutriments les bouillies d’ignames par la formulation des bouillies à base de farine d’igname, de farine de courge, de farine de soja, et de poudre de feuilles de Urera trinervis; d’améliorer la densité énergétique par l’incorporation de malt et de carbonate en présence de l’amidon d’igname ayant subi la précuisson et, de vérifier l’effet de cette formulation par la croissance et le gain de poids des rats. Ainsi, le présent travail vise les objectifs spécifiques suivants :
• améliorer les teneurs en protéines, en lipides et en sels minéraux totaux des bouillies par la formulation de la farine d’igname par les farines de courge, de soja et de Urera
• améliorer la densité énergétique des bouillies par l’incorporation du malt d’orge.
• évaluer l’impact nutritionnel des bouillies améliorées par rapport aux bouillies traditionnelles.
MATERIEL ET METHODES
Matériel alimentaire : Le matériel alimentaire utilisé est constitué par les grains de courge, les tubercules d’igname, les graines de soja et les feuilles de Urera trivervis.
Matériel animal : Le matériel animal est constitué par des rats de souche wistar.
Méthodes
Approvisionnement de la matière première alimentaire : Le matériel alimentaire végétal utilisé a été acheté au niveau des marchés, des gares routières et des dépôts de Brazzaville. Les ignames provenaient du département des Plateaux notamment du district de Gamboma. Ce matériel végétal a servi à la production et à la formulation de la farine d’igname, de courge, de soja et de feuilles de Urera trinervis. Cette production et cette formulation sont faites par nous même au laboratoire de façon à maîtriser toutes les étapes de la transformation. Production de la farine : Après avoir été épluchés et coupés en morceau, les ignames ont subi une précuisson de 10mn après qu’elle ait atteint 85°C afin de faciliter la
dispersion de l’amidon, ce qui facilitera son hydrolyse par l’amylase. Ces ignames ont été séchées et broyées afin d’obtenir une farine d’igname ayant subi la précuisson. Les graines de courge préalablement séchées ont été torréfiés et écrasées afin d’obtenir une farine de courge. Les graines de soja ont été broyées et réduites en farine. Les feuilles de Urera trinervis ont été séchées, écrasées et réduites en poudre. Ces ingrédients ont été mélangés dans les proportions respectives de 67,5%, 12,5%, 15% et 5%. Sur la base de la matière sèche, 1% de malt et 0,5% de carbonate de calcium ont été ajoutés à une quantité de farine formulée ; le tout est versé dans l’eau froide. Le mélange a été chauffé progressivement pour permettre à l’enzyme d’agir lors de la montée de la température et à 65°C, la marmite a été retirée du feu pendant 5mn et replacée ensuite sur une source de chaleur. La durée de cuisson a été de 10 min après que le mélange ait atteint 85°C. Le schéma de cette formulation est présenté dans la figure 1.
Graines de courge Tubercules d’igname Grillage Lavage Ecrasage Épluchage Précuisson Séchage Ecrasage Broyage
Farine de courge Farine d’igname Séchage
Farine d’igname, courge, soja et feuilles de Urera trinervis
Ajout du malt d’orge et de carbonate Cuisson (10mn)
Bouillie
Figure 1 : Schéma de fabrication de la farine d’igname, de courge, de soja, de feuilles de Urera trinervis et le point d’incorporation de malt et du carbonate
Mesure du pH : Le pH des échantillons de farine et de bouillie a été mesuré à l’aide d’un pH-mètre portable à sonde de type HI9214 Bioblock scientific.
Mesure de la consistance : La consistance des bouillies a été déterminée à l’aide du consistomètre de Bostwick. Ainsi, le compartiment délimité par un système de type guillotine est rempli avec un volume déterminé (100 ml) de bouillie. A t = 0, la bouillie est libérée et le paramètre de consistance retenu correspond à la distance parcourue par le front de bouillie après 30 secondes d’écoulement. La mesure a été faite à la température 45°C de la bouillie, température proche de celle de la consommation des bouillies par les enfants dans les ménages.
Mesure de la teneur en matière sèche : La teneur en matière sèche a été déterminée par séchage à l’étuve à 105°C jusqu’à poids constant.
Détermination de la teneur en sels minéraux totaux (cendres) : Les sels minéraux totaux ont été déterminés par incinération au four à 530°C.
Détermination des lipides : Les lipides totaux ont été dosés par la méthode de Soxhlet (AOAC, 1980) en utilisant l’hexane comme solvant d’extraction.
Détermination des fibres : Les fibres ont été déterminées par la méthode de Van Soest (1963). Détermination des glucides : Les glucides ont été déterminés par différence.
Calcul de la densité énergétique : La densité énergétique est déterminée par une méthode précise en Graines de soja
Farine de soja
Feuilles fraîches de Urera trinervis
Poudre de feuilles de Urera trinervis
associant tous les ingrédients apportant de l’énergie et en utilisant les coefficients de Merril et Watt, 1955. DE = (Gx4) + (Px4) + (Lx9)
G = masse de glucides P = masse de protéines L = masse de lipides
Constitution des lots d’animaux et conduite de l’expérimentation : Des jeunes rats en croissance, de souche wistar, âgés de 40 à 60 jours et pesant en moyenne 60g, ont été utilisés pour l’expérimentation animale. Ils ont été repartis sur la base de leur poids dans des cages à métabolisme à fonds grillagés. Quinze rats ont été utilisés en raison de cinq rats par régime. L’expérimentation animale s’est faite selon le modèle de Afass, 2002 et a duré 16 jours et a comporté deux phases : une phase d’adaptation qui a duré 2 jours et une phase de croissance qui a duré quatorze jours.
Conduite de l’expérimentation et mesures
effectuées : Les mets ont été distribués une fois par jour, plus précisément la matinée et à l’heure fixe, sous la forme de galettes. Ces mets ont été constitués par le régime à la caséine (régime de référence), le régime à la bouillie d’igname simple (aliment traditionnel ou régime témoin), le régime à la bouillie améliorée de farine d’igname-courge-soja-Urera (aliment amélioré ou régime testé). L’eau a été servie ad libitum et renouvelée à
intervalle de deux jours. Les animaux ont été pesés le premier jour de l’expérience et par la suite tous les deux jours jusqu’au dernier jour de l’expérience.
Expression des paramètres d’études de la valeur nutritionnelle des mets servis aux rats
Courbe de croissance : La courbe de croissance par régime a été réalisée grâce aux pesées réalisées. Matière sèche totale ingérée (MSTI) : La matière sèche totale ingérée (g/j) est le rapport de la somme des quantités de matière sèche d’aliment ingérée pendant la période de l’expérimentation par le nombre de jour. Gain de poids : Le gain de poids exprimé en g/j a été déterminé en faisant la différence entre le poids final et le poids initial rapportée au nombre de jour de l’expérience. Analyse statistique des résultats : Le calcul de la moyenne de chaque série de résultats de la qualité nutritionnelle de la farine d’igname simple et de la farine d’igname-courge ainsi que l’analyse statistique ont été réalisées à l’aide du logiciel Groph Pad InStat version 3.0. Les données de chaque expérimentation ont été analysées tout d’abord par le test d’analyse des variances (ANOVA). Le post test de Tukey était appliqué afin de déterminer si les différentes séries de valeurs étaient significativement différentes entre elles, au cas où le test ANOVA était significatif au moins au seuil p<0,05.
RESULTATS
Qualité nutritionnelle de la bouillie d’igname-courge : La qualité nutritionnelle de la bouillie d’igname-courge est présentée dans le tableau 1. Ce tableau montre une
augmentation de la teneur des nutriments dans la bouillie améliorée par rapport à la bouillie traditionnelle.
Tableau 1 : Qualité nutritionnelle de la bouillie d’igname-courge-soja-Urera
Composition en nutriments Bouillie d’igname (Témoin) Bouillie d’igname-courge (Améliorée)
Protéines (g/100g de MS) 7,01 ± 1,03 15,57 ± 0,96***
Lipides (g/100g de MS) 3,76 ± 1,15 9,64 ± 1,04 ***
Fibres (g/100g de MS) 2,79 ± 1,06 1,98 ± 1,15 ***
Cendres (g/100g de MS) 1,44 ± 1,12 3,64 ± 1,06***
Glucides (g/100g de MS) 85,00 ± 1,11 69,17 ± 1,23 ***
Valeur énergétique (Kcal/100g) 401,88 ± 0,95 429,72 ± 1,88 ***
Les valeurs sont les moyennes ± écart-type pour n = 3 ; *** p<0,001 ; ns p>0,05 ; p = probabilité En effet, la teneur en protéines est passée de 7,01 ± 1,03
g/100g de MS dans la bouillie traditionnelle à 15,57 ± 0,96g/100g de MS dans la bouillie améliorée ; celle des lipides est passée de 3,76 ± 1,15 g/100g de MS dans la bouillie traditionnelle à 9,64 ± 1,04g/100g de MS dans la bouillie améliorée et celle des cendres (sels minéraux totaux) est passée de 1,44 ± 1,12g/100g de MS dans la bouillie traditionnelle à 3,64 ± 1,06g/100g de MS dans la bouillie améliorée. Dans tous les cas la différence est
significative (p<0,001). Cependant, il y a une diminution de la teneur en fibres, en glucides et de la valeur énergétique de la bouillie améliorée par rapport à la bouillie traditionnelle.
Densité énergétique et consistance des bouillies : La teneur en matière sèche, la densité énergétique ainsi que la vitesse d’écoulement des bouillies sont présentées dans le tableau 2.
Tableau 2 : Teneur en matière sèche, densité énergétique et vitesse d’écoulement des bouillies Bouillie traditionnelle
simple
Bouillie améliorée Niveau de
significativité Matière sèche (g/100g de bouillie) 16,13 ± 1,14 24,79 ± 1,08 P<0,01 Vitesse d’écoulement (mm/30s) 67,38 ± 2,46 126,62 ± 2,18 P<0,01 Densité énergétique (Kcal/100ml) 64,52 ± 1,93 99,16 ± 1,56 P<0,01
Les valeurs sont les moyennes ± écart-type pour n = 3 Le tableau montre que l’augmentation de la vitesse d’écoulement des bouillies améliorées par rapport aux bouillies traditionnelles simples.. Les bouillies améliorées sont, à teneur en matière sèche égale, sont apparues plus fluides que les bouillies traditionnelles. Leur densité
énergétique est plus élevée que les bouillies traditionnelles.
Croissance pondérale des rats : Les courbes d’évolution des rats en fonction du temps de l’expérimentation sont présentées dans la figure 2.
Figure 2 : Évolution des poids corporels des rats nourris aux trois régimes en fonction du temps Les résultats montrent que les rats nourris au régime à la
caséine ont connu une croissance plus importante que les rats soumis au régime de bouillie améliorée qui à leur tour ont connu une croissance plus que les rats soumis au régime de bouillie traditionnelle simple. Les poids en fin de l’expérimentation sont significativement différents (p<0,005) dans les trois régimes. En effet, les poids corporels en fin de l’expérimentation sont respectivement
de 116,86± 8,14g pour régime de caséine, 89,1± 11,58g pour le régime de bouillie améliorée et 58,18 ± 17,68 g pour le régime de bouillie traditionnel simple.
Matière sèche totale ingérée (MSTI) et gain de poids : Les résultats sur la matière sèche totale ingérée (g/j) et le gain de poids par les animaux soumis aux différents régimes alimentaires sont consignés dans le tableau 3.
Tableau 3 : Matière sèche totale ingérée (MSTI) et gain de poids (GP) des différents régimes alimentaires.
Régimes alimentaires Matière sèche totale ingérée (g/j) Gain de poids (g/j)
Caséine (référence) 8,86 ±2,37 4,03 ± 1,12
Bouillie améliorée (testée) 7,56 ± 1,97 2,06 ± 1,14
Bouillie traditionnelle simple (témoin) 2,23 ± 1,64 - 0,16 ± 1,09
Les valeurs sont les moyennes ± écart-type pour n = 3 Concernant la matière sèche totale ingérée, le tableau montre que les rats nourris avec le régime témoin (Bouillie traditionnelle simple) ont un niveau de consommation plus faible (2,23 ± 1,64 g/j) que ceux nourris au régime testé (7,56 ± 1,97 g/j), lesquels ont à leur tour un niveau de consommation plus faible que ceux soumis au régime de référence (8,86 ±2,37 g/j).
S’agissant du gain de poids, les résultats montrent que les rats nourris avec le régime à la caséine ont un gain de poids plus élevé (4,03 ± 1,12g/j) que les rats nourris au régime testé (2,06 ± 1,14g/j), lesquels ont un gain de poids plus élevé que ceux nourris au régime témoin (- 0,16 ± 1,09 g/j).
DISCUSSION
L’ajout des courges, de soja et des feuilles de Urera trinervis aux ignames, associé à des traitements technologiques d’amidon par ajout de malt constitue une voie d’amélioration de la situation alimentaire et nutritionnelle des nourrissons et des jeunes enfants. Beaucoup d’auteurs ont eu à ajouter des légumineuses ou des protéo-oléagineux dans la fabrication des aliments de complément à base de céréales ou tubercules ( Elenga et al., 2012 ; Elenga et al., 2009; Tou et al., 2007; Abiodun et al., 1999; Mouquet et al., 2008; Yomadji-Outangar O., 1995: Phuka et al., 2009; Oyareku et al., 2008). La composition chimique des tubercules est voisine de celle des pommes de terre. La partie comestible d’un tubercule d’igname est d’environ 85%. Cette partie est composée principalement d’eau (65 à 75 %), de matières amylacées, principalement l’amidon (15 à 25%), de protéines (1 à 7%, quatre fois plus que le manioc), de fibres (0,5 à 1,5 %), de cendres (0,7 à 2 %) et de lipides (0,05 à 0,2 %). L’igname contient en outre 4 à 12 mg/100 g de MS d’acide ascorbique (Vitamine C). En ce qui concerne les acides aminés, l’igname est déficiente à l’égard du tryptophane et des acides aminés soufrés. Par contre, elle a une teneur élevée pour les autres acides aminés (Romain, 2001, Memento de l’Agronome, 2002). Cette déficience peut être surmontée en ajoutant à la farine d’igname de la farine de légumineuses ou de protéo-oléagineux notamment les courges qui possèdent ces nutriments déficitaires de l’igname. De plus, L’igname est avec le manioc et la patate douce, la culture la plus indiquée pour produire des matières amylacées dans les pays tropicaux. Quelques travaux de recherche ont mis en exergue les potentialités nutritionnelles de quelques ignames ainsi que leur mode de transformation (Ayenor, 1974 ; Trèche et Guion, 1979; Bell et Favier, 1982; Trèche, 1989;
Mosso et al., 1996; Vernier et al., 2000). La structure de l’amidon lui confère des propriétés particulières qui se traduisent par un taux de gonflement considérable. Il s’ensuit que les bouillies à base d’aliments amylacés n’ayant pas subi un traitement technologique préalable, ont tendance à contenir très peu de matière sèche et à présenter ainsi une faible densité énergétique. Nos résultats montrent que les bouillies fabriquées avec la farine d’igname ont des teneurs en matière sèche de 16,13 ± 1,14g/100g de bouillie et une densité énergétique de 64,52 ± 1,93Kcal/100g de bouillie. Plusieurs auteurs ont montré que la densité énergétique des bouillies traditionnelles est généralement faible et se situe autour d’une moyenne de 50-60 Kcal/100g de bouillie (Trèche, 1995, Elenga et al., 2009, Zannou-Tchoko et al., 2011). De telles bouillies, compte tenu d’une part du faible volume de l’estomac de l’ordre de 30g (ml)/kg de poids corporel (Sanchez-Grinan et al., 1992 et d’autre part de la faible fréquence de consommation journalière estimée, à 2 fois/jour, ne sont pas en mesure de couvrir de manière efficace les besoins nutritionnels du nourrisson et du jeune enfant en complément du lait maternel. L’incorporation de malt associée à des traitements technologiques de l’amidon a permis de préparer des bouillies ayant une vitesse d’écoulement de 120mm/30s pour une teneur en matière sèche supérieure à 24g de MS/100g de bouillie. Ce taux de malt semble plus faible que celui obtenu par Trèche, 1995 ayant travaillé sur un autre substrat qui est le manioc et auquel le taux de maïs germé est environ 18%. Cette augmentation de la fluidité caractérisée par l’augmentation des vitesses d’écoulement est due à l’action de l’α-amylase qui hydrolyse les grosses molécules d’amidon en molécules plus petites (maltodextrines) lesquelles ont une capacité de rétention d’eau faible. Les rats nourris avec le régime
testé (Bouillie améliorée) ont un niveau de consommation plus élevé (7,56 ± 1,97 g/j) que ceux nourris au régime témoin (2,23 ± 1,64 g/j). Ce résultat sur la matière sèche totale ingérée de la bouillie améliorée est supérieure à celle du régime "FsgC" Centre (7,05±1,64g/j) trouvée par Dally et al., 2010 sur l’efficacité nutritionnelle de trois mets ivoiriens . Par contre cette valeur est inférieure à celle du régime "CsdN" Nord (8,09±1,07g/j) et à celle du régime "RsgO" Ouest (9,22±0,88g/j) trouvées par les mêmes auteurs. Les rats nourris avec le régime de bouillie améliorée présente un poids corporel plus élevé
(2,06 ± 1,14 g/j) par rapport à ceux nourris avec le régime d’igname simple (- 0,16 ± 1,09 g/j). Zannou, 2005 et Elenga et al, 2012 ont aussi fait les mêmes observations avec respectivement des régimes a base de manioc et de soja et à base et de maïs et d’arachide. La différence entre le régime amélioré et le régime traditionnel simple de notre étude pourrait s’expliquer par la teneur élevée en protéines dans la farine d’igname-courge par rapport à la farine d’igname simple. En effet, Rahman, 2005 a montré que les nutriments nécessaires à la croissance des organes sont les protéines et les sels minéraux. CONCLUSION
La formulation des bouillies d’igname, de courge, de soja et de feuilles de Urera trinervis a entraîné une augmentation significative des teneurs en protéines, en lipides et en sels minéraux par rapport aux bouillies préparées avec les ignames seulement. L’incorporation du malt et de carbonate de calcium à la farine ayant subi la précuisson a permis de préparer des bouillies ayant une consistance recommandée (120mm/30s pour une
teneur en matière sèche de 24g de MS/100g de bouillie). Les bouillies d’igname-courge-soja-Urera présentent une meilleure valeur nutritionnelle et provoquent une prise pondérale pour les rats par rapport aux bouillies traditionnelles simples.. Ces résultats paraissent adaptés dans le cadre de la lutte contre la malnutrition infantile dans le contexte des ressources locales disponibles.
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