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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Les techniques Freinet dans l'Enseignement technique et les Centres d'apprentissage.

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Academic year: 2021

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I. - T R I B U N E

L I B R E

Les Techniques Freinet

dans l'Enseignement- technique

et les Centres d'Apprentissage

Parmi les élèves de l'Enseignement technique et des Centres d'apprentissage figurent des enfants qui, pour des raisons multiples et profondes, ne sont pas attirés p a r les disciplines intellectuelles. On a souvent tort de les considérer comme infé-rieurs aux forts en thème qui ont réussi à l'école et qui ont suivi la filière classique. Ils abordent seulement la vie par un biais différent, celui où l'intelligence se traduit par l'aptitude à surmonter techniquement et pratiquement les difficultés de la vie.

Il n'en reste pas moins que, justement à cause de leur inaptitude à l'intellectualisme, ces enfants n'ont pas réussi à l'école traditionnelle et qu'ils sont excédés de tout ce qui la rappelle : excédés des leçons et des devoirs, excédés des manuels, excédés de cette forme de culture, et d'autant plus excédés qu'ils voient la possibilité de « se réaliser » manuellement, techniquement, prati-quement.

Mais il tend de ce fait à y avoir divorce total entre la culture intellectualiste de l'école habi-tuelle et la préparation technique et pratique des Ecoles professionnelles et des Centres d'appren-tissage. Ce divorce, les professeurs de diverses disciplines, et notamment ceux d'enseignement général, ont charge de l'atténuer et même de le faire disparaître afin d'éviter que leurs élèves se contentent d'une formation mécanicienne qui a ses évidents dangers et ne se hausse jamais à une culture plus élevée.

C'est ce même problème qui se pose en perma-nence aux maîtres de l'école primaire, où une mi-norité plus particulièrement prédisposée profite dans une certaine mesure de l'enseignement tra-ditionnel et poursuit vers le classique, mais où la

masse des élèves, fils d'ouvriers et de paysans, se sent naturellement attirée par d'autres formes de connaissances et de progrès, à base d'efforts ma-nuels et de réalisations pratiques.

C'est parce que, comme vous, nous sentions intensément le rendement défectueux de nos efforts que nous avons cherché dans d'autres voies et que nous avons reconsidéré tout notre seignement. Nous avons reconsidéré notre en-seignement verbal, qui ne s'adressait qu'à une forme d'intelligence, nous avons mesuré l'insuffi-sance de nos leçons verbales, le peu de rendement des leçons qu'on apprend par cœur et qu'on oublie, es dangers enfin pour la formation de nos enfants de cette atmosphère de passivité qui contraste tellement avec la nature même, si enthousiaste et si audacieuse de nos enfants.

Et nous avons procédé comme l'industriel et l'homme de science. Nous nous sommes dit : « Cette machine ne tourne pas rond. Que faut-il faire ? » Nous avons osé poser les problèmes tels qu'ils sont, dans leur brutalité, et nous nous sommes appliqués à les résoudre pratiquement. Nos enfants — et les vôtres aussi — sont fati-gués de nos leçons verbeuses et nous en sommes fatigués plus qu'eux puisque cette façon verbale l'aborder la classe nous épuise physiologiquement et nerveusement. Nous supprimerons les leçons. Ils sont excédés par la nécessité où ils sont de faire des devoirs sans intérêts profonds et qui ne sont vraiment pour eux que des devoirs. Nous supprimerons les devoirs.

Enfants et maîtres sont las de l'école parce qu'elle tourne à vide, sans but tangible, si ce n'est la vague promesse de poursuivre une formation dont on met en doute l'utilité. Nous donnerons 1

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un but à notre activité qui deviendra du travail. Nous avons remarqué à l'expérience que l'en-fant s'intéresse tout particulièrement à sa vie et à son milieu et que, de bonne heure, il veut agir sur ce milieu pour le transformer, qu'il veut « travailler » parce que travailler, c'est vraiment agir sur le milieu pour mieux en triompher.

Et alors, pratiquement, nous avons fait la grande découverte qui sera désormais au centre de toute notre pédagogie : l'enfant est essentiel-lement travailleur et notre Ecole doit être une école du travail.

Seulement, l'organisation de cette éducation du travail suppose l'établissement des normes in-dispensables du travail. Pour travailler, il faut un but qui sera satisfaction des besoins fonction-nels, des outils à la mesure des ouvriers, qui permettent de bons résultats sans un excès de fatigue, l'intégration des résultats obtenus dans un processus normal de vie.

C'est ce que nous nous sommes appliqués à réaliser par :

L'imprimerie à l'école qui permet aux enfants

d'exprimer, par l'imprimé et le journal, tout ce qu'ils sentent le besoin d'extérioriser.

L'Ecole a, malheureusement, fait disparaître ce besoin que nous avons revivifié. Si l'enfant n'éprouve plus le besoin de manger, il mourra d'inanition. S'il n'éprouve plus le besoin de par-ler, il n ' a p p r e n d r a plus à parler. S'il n'éprouve plus le besoin d'écrire, il n ' a p p r e n d r a point à s'exprimer par la rédaction.

Ce besoin, nous le stimulons encore par : Le journal scolaire et la correspondance inter-scolaire.

Si, muni d'un matériel d'imprimerie, vous faites imprimer des textes d'adultes ou d'enfants, sans autre préoccupation, vous retournez tout simplement à la scolastique avec des outils nou-veaux; vous ne parviendrez pas à l'enthousiasme et à la vie. Mais si vos enfants rédigent et im-priment un journal scolaire, servi à leurs parents et si, surtout, ils ont des correspondants, alors ils écriront, ils imprimeront, ils illustreront pour leurs correspondants. Leur travail aura désor-mais un but et tout sera transformé.

Si ce besoin de créer et de construire est re-trouvé, il vous suffira de le satisfaire. Vous

dépasserez alors l'atmosphère du travail forcé pour atteindre à une forme plus élevée de votre action.

Nous avons voulu, dans ce préambule, donner une idée de la reconsidération profonde que nous avons entreprise dans notre enseignement, mon-trer les raisons essentielles des activités nou-velles et des outils et techniques de travail que nous recommandons. Les éducateurs que la ques-tion intéresse pourront se renseigner plus com-plètement en lisant nos livres : L'Ecole moderne française, l'Education du Travail. Essais de psy-chologie sensible appliquée à l'éducation, en lisant également notre collection de brochures

d'éducation nouvelle populaire dont voici quel-ques titres : Techniquel-ques Freinet, Plus de leçons, Le Texte libre, Le Milieu local, Echanges d'élè-ves, etc.

Et enfin, c'est surtout en voyant nos tech-niques en action dans des classes modernisées qu'on en comprend mieux les fondements et les possibilités. Nous avons, dans chaque départe-ment, des adhérents et un responsable avec qui nous pourrons vous mettre en relations. 11 vous indiquera des classes qui travaillent selon nos techniques. Allez les visiter, vous pourrez alors juger en toute connaissance de cause.

Je sais bien que vous direz pourtant : « Ces méthodes sont peut-être excellentes à l'école pri-maire, mais les choses ne se présentent pas de la même façon chez nous... » Cela est certain; aussi ne prétendons-nous pas que vous puissiez ou que vous deviez employer tels quels nos outils et nos techniques. Nous non plus nous ne tra-vaillons pas avec nos enfants de treize ans comme nous travaillons avec les petits de l'école mater-nelle. Il y a partout une adaptation à faire. Et cette adaptation, vous seuls pourrez la faire.

Votre premier souci sera de contrebattre les méfaits de l'atmosphère scolastique. Pour cela, un moyen pratique qui vous réussira, c'est la réali-sation soit dans chaque classe, soit dans un groupe de classes, d'un journal scolaire et l'or-ganisation de correspondances.

Il ne s'agit pas de créer un journal de l'Ecole qui resterait entre les mains des éducateurs. Le journal est la propriété et l'œuvre des enfants sur la base des textes libres qui sont aujourd'hui pratiqués dans la majorité des écoles françaises. Mais pour réussir, il vous faut avoir la possi-bilité technique de sortir un journal. Nous recom-mandons dans nos classes l'imprimerie qui est essentiellement éducative. A votre degré, je crains que la composition, toujours assez longue, soit parfois un peu lassante pour les enfants, aussi recommandons-nous pour le Technique : — Soit le journal totalement tiré au limo-graphe C.E.L., format 1 3 , 5 x 21 ou même 2 1 x 2 7 , avec dessins graphiques, etc.

— Soit, ce qui est presque l'idéal, un journal mixte dans lequel quelques pages, les plus belles, sont imprimées, les textes moins majestueux étant limographiés, le tout étant encore embelli par la linogravure.

Sur ces bases, vous pourrez alors, sans peine excessive, réaliser un beau journal scolaire dont vous serez fiers. Ce journal, vous le diffuserez autour de vous. Vous pourrez le servir par abon-nements aux parents des élèves. Vous le vendrez peut-être même sur place aux amis de l'Ecole, ce qui est déjà une motivation appréciable et qui permet parfois de réunir les fonds indispen-sables.

Le journal vous permet également, dans les pé-riodes de préparation de fêtes par exemple, de faire une utile propagande et de recueillir les 2

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fonds. Mais surtout, ce journal est conçu coopéra-tivement, p o u r son utilisation optimum, p o u r les échanges interscolaires qui sont le complément naturel de l ' i m p r i m e r i e à l'école. Ces échanges interscolaires sont la f o r m e à venir de l'Ecole, qu'elle soit p r i m a i r e , t e c h n i q u e ou m ê m e secon-daire.

De plus en plus en effet, le monde s'élargit au-tour des enfants. Le cinéma, la radio portent leurs intérêts bien loin au delà du milieu réduit de leur famille ou de leur village. Ils ont besoin d ' e n t r er en relations avec des camarades éloignés et si vous voyiez avec, quelle joie et quel enthousiasme ils reçoivent leurs correspondances, avec quel en-thousiasme aussi ils écrivent alors leurs lettres, vous comprendriez que l'école puisse ainsi béné-ficier de cet élan, pour améliorer le tonus des acquisitions et de l'éducation.

L'échange des feuillles imprimées et des jour-naux scolaires se double d'ailleurs de l'échange de lettres, de photographies, de documents divers pour le fichier, de j o u r n a u x illustrés, de colis, de pro-duits régionaux, etc.

L'idéal est, certes, de pouvoir réaliser ensuite, en fin d'année, ce qui se réalise déjà dans nombre d'écoles travaillant selon nos techniques : l'échange d'élèves avec les c o r r e s p o n d a n t s. Les classes qui, en cours d'année, ont ainsi fait connaissance d'une façon p r o f o n d e et intime, se retrouvent après un voyage de plusieurs centaines de kilomètres. Les enfants sont reçus chez les p a r e n t s de leurs cor-respondants. Ils font sur place l'enquête la plus p r o f o n d e qui soit et ils reviennent pleins d'en-thousiasme p o u r un nouveau travail effectif.

Lorsque vous posséderez un journal, que vous pratiquerez ces échanges, lorsque vos enfants au-ront soif de connaissance et de travail, alors ii faudra satisfaire cette soif, mais la satisfaire selon une forme qui ne les décourage pas comme l'ont fait les leçons et les devoirs. Nous vous recom-mandons alors une f o r m e nouvelle de travail p a r exploitation des centres d'intérêt essentiels grâce aux enquêtes et au F i c h i e r scolaire coopératif dont nous r e c o m m a n d o n s la constitution dans toutes les écoles, et p a r l'emploi des fichiers correctifs. Nous avons, certes, nos fichiers auto-correctifs qui conviennen t p o u r nos classes primaires. 11 f a u d r a it que des fichiers

auto-cor-rectifs soient réalisés de même p a r les éducateurs du T e c h n i q u e ou des Centres d'apprentissage pour les élèves de leur degré. C'est ce travail qui reste à faire encore mais cela serait facile si nous pouvions grouper seulement quelques équipes de cinq à dix éducateurs.

Notre école œuvrant selon de telles techniques à base de travail devra le plus vite possible s'orien-ter vers la production pratique et effective qui a p p o r te la meilleure des motivations à l'effort scolaire. Encore une fois, nous vous offrons là notre expérience avec la gravure du lino ou du bois qui vous permettra de déceler certainement parmi vos élèves de véritables artistes dont les œuvres p o u r r o n t être mises en valeur et éven-tuellement même participer à des expositions ou à des ventes, la peinture à grande échelle et le découpage.

Toutes ces diverses activités ne doivent pas être conçues comme des travaux séparés, comme de simples activités susceptibles d'intéresser plus ou moins l'enfant à des formes pédagogiques dif-férentes des formes traditionnelles. Elles doivent être intégrées à la vie de l'Ecole et cette vie de l'Ecole elle-même doit donc s'orienter vers la vie communautaire, n o t a m m e n t p a r l'organisation des coopératives scolaires.

Ces coopératives se sont développées plus par-ticulièrement dans l'enseignement primaire. Nous sommes persuadés qu'elles pourraient r e n d r e grand service également dans votre enseignement. Notre expérience est a u j o u r d ' h u i concluante. Notre matériel est au point. Nous vous l'offrons. Il vous restera naturellement bien souvent à le mettre au point.

Nous souhaitons qu'un certain nombre d'édu-cateurs de l'Enseignement t e c h n i q u e et des Cen-tres d'apprentissage sachent s'y dévouer avec har-diesse et compréhension. Nous resterons à côté d'eux pour les aider dans toute la mesure du pos-sible. Il leur suffira de s'intégrer à notre grande famille C.E.L. dont ils sentiront tout de suite la fraternité (1).

C. FREINET.

(1) Pour tous renseignements complémentaires sur les techniques et le matériel Freinet, écrire à l'adresse suivante : M. Freinet, C.E.L., place Bergia, Cannes.

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