ENSEIGNEMENT DE L'ENERGIE:
QUELLE RECHERCHE ET QUELLE FORMATION DES ENSEIGNANTS
Michela MAYER
Centra Europeo Dell'Educazione - CEDE Villa Falconieri, Frascati - Italie
Résumé:
On présente des différentes approches à l'enseignement du concept d'énergie et du problème énergétique dans J'école secondaire italienne, et l'utilisation de cette recherche pour la formation des enseignants.
, - INTRODUCTION
-Ç)uann on veut enseiGner ,ln ncc-:p-c élussi complexe '-lue
l ténerai~1 i l faut tout rj'aborn a f f r o n t e r le prohl?:me de pas séparer le concept purement physiq11A dps autres
"énergie" est habituellene::t employé.
En e f f e t , parmi les diffic\.:lté,'3 que lIon rencont.:ce lors '302 la p!"ésentation de ce cGncept aux é-c.uài.ant.,S, i l y i::1 celle des di.fférents usages du vocable "~neyq c" à l'êcole et dans llexp&rience quotidienn~. Cet,te séparation entre l ' é c o l e et le contexte so.:::i,::;.l (~t fa!~\illal est 11
0rigine de deux genres de confusions.
La première est reliée surtout à l'usaGe équ.ivoque que lion r a i t àans l e I a n gag e commun, des mots "force" ~t "énerqie". 0n parle de "force de la mer" ou HOU vent", de "la force d'un moteur'!1 tandis 'lu~ l ' o n peut recevoir "une pouss§e ~nerqique" ou "secouer ~nerqiquement un
3.:rbre" .
Dans ce cas, comme plusieurs recherches l'ont montré, c ' e s t le con-cept de "force", pourtant plus i!"!tuitif, qJi ~este le moins clai.r et le plus confus.
Une deuxième ambiguité est. due à l ' u t i l i s a t i ü n dalls le C'l)r~texte social et technologique du mot "~nergie". Les journaux par'ent de crise énergétique, de consommations d'énergie, !je ses sources et de son u t i -l i s a t i o n tandis qu'à l'école on parle de conservation, avant tout èe l ' é n e r g i e mécanique, concept a b s t r a i t , totalement étranger à la réalité de la vie.
Ces deux "ambiguitês" doivent donc @tre identifi~es et affrontées, afin qu'un concept fondament.al t e l que celui de l'énergie àevienne en quelque sorte patrimoine commun.
En ce qui concerne la première, à Rome et à Bologne on conduit des recherches sur des schémas êle raisonnement spontané qui entraînent la confusion entre "forcel l et "énergie"
1 en cherchant donc son origine dans les explications intuitives du mouvement chez les éleves des éco-les primaires et moyennes.
En ce qui concerne le second problème, i l faut avouer q u ' i l ne s ' a g i t pas d'une confusion v é r i t a b l e . Le concept d'énergie est u t i l i s é correctement dans les deux contextes, qu' i l soit scolaire ou social dans les media, m.ais le second est plus etepdu que le premier. L' ambi-guité dérive justement de cette restriction que l'école s'impose à elle-même, et le problème ne peut être résolu qu'en dépassant ces limi-t e s .
Par exemple on ne parle jamais concrètement de hilan énergétique, du deuxième principe, dlentropie, et par conséquent on ne peut pas palAler de
étudiants
"qualité" dF l ' é n e r q i e . De cette façon, on n'offre pas aux les instruments scientifiques nécessaires pour comprendre et "aluer les grands ["::-0'r 1èmes qui sont en discussion d2 nos jours.
Plusieurs groupes de recherche i t a l i e n s ont abordé ce problème et cherché à "réconcilier" cette dicotomie par des itinér,-=.tires didactiques, tenant compte des diff0rents aspects et du contextE dans lesquels le mot énergie doit être employé correctement. Pourtant, on a proposé une approche historique, une approche socioloaique, une approche économique
f~t, enfin, une dernière approche "par projetsl l
• Par la s u i t e , j lex-roserai synthétiquement les différents i t i n é r a i r e s didactiques en sou-~ignant les aspects d'innovation par rapport à l ' é c o l e i t a l i e n n e .
2 - APPROCHE HISTORIQUE
-Par cette approche on parcourt1 avec les étudiants, les principa-les étapes historiques qui ont connuit soit à la formulation du concept physique soit à la situation énerqétiqlle actuelle. Ainsi, on retrouve l'évolution du problème énergétique depuis l ' a n t i q u i t é jusqu'au Moyen Age et à la Révolution I n d u s t r i e l l e ; on présente le concept de t r a v a i l , ou l ' a b s t r a i t "théorÈme" de Sadi Carnot, à travers 11éclairage du cor-respondant procès historique de formation et du lien é t r o i t , toujours existant, entre le développement du concept dl éneraie et la technolo-Gie. Ainsi, les ingénieurs Smeaton et Lazare Carnot contribuent à la ,'1ffinition du concept d'énergie autant que Lagrange et Hamilton. De plus les machines
septième siècle,
à mouvement perpétuel, proposées pendant tout le dix-j e t t e n t les bases du principe de conservation èe 11 énergie autant que les premières étuf!es techniques sur les machines à vapeur ou les exp~rimentations du génial "dilettante" Joule.
Sui vant des it i nérai r e s cli da c t i que s ài ffé r e n t s , qu i sou ven t pré-voient la collaboration des professeurs de physique et d' histoire nos étudiants arrivent, en passant par la Révolution I n d u s t r i e l l e , jusqu'à nos jours, en considèrant la thermodynamique comme la science théorique '1ui accompagne les recherches technologiques en vue d'obtenir, à cette époque-là, des machines de puissance e t , aujourd'hui, des transforma-tians énergétiques
concept d'énergie
à haut rendement. De cette façon on éclaire mieux le et son u t i l i s a t i o n dans les differents contextes. Dans le même temps, on présente la science comme une a c t i v i t é humaine
Hnon-neutre", dont le néveloppement est l i é à 11évolution ne toute la. societé.
Dans cette approche, l ' a c t i v i t é expérimentale est très réduite e t , par conséquent, e l l e S I a"l.-csse surtout aux étudiants des classes t e r -Minales, lesquels ont rj~:jà f a i t du laboratoire et montrent un i n t é r ê t r~el pour le point de vue historique et philosophique.
3 - APPROCHE ECONOMIQUE
-Dans ce cas, nous examinons tout d'abord les données quj r e l i e n t le bien-être d'une nation à sa consommation .jléneroie. Par la suite
nous déterminons le bilan énergétique dans 'Hl cas assez simple, celui d'une maison d'habitation, pour montrer apr~s que la m~me analyse s'ap-plique au bilan énergétique national. Partant de ces données, on peut introàuire l'hypothèse ,l~ la conservation de l ' é n e r q i e , sans Ja quellp on ne pourrait pas propcser èes 1>ilans, en l i i l l u s t r a n t par rrloyen de travaux pratiques ~e laboratoire oG on peut d~terminer J.e rendement des transformations.
Le bilan énera0t:.l , ' l e p,st discuté en tenar.t COIT'ptc de nais, et partant èle la né(~pc;s:té d'une u t i l i s a t i o n cor,--'C'ct
IJSaC2S f i -de 2.1 éner-aie. Enf in1 on anaJ,Ys'''' ~od~le ~e d§veloppeMent ~nerq.~t U·:';, en iden-t i f i a n iden-t les facteurs qui peuvent être considérés ou cOen!":'E: oes CO!lstan-t e s , ou comme des val:""le..bles, selon les hypothèses choisies. La classe discutera sur cette base le Plan Energ~tique National l~li m&me·
c e t t e approche onl~_ colla:boré des enseignants de physique, de
math~~atiqu~et de branches techniques et ~conomiques,
4 - APPROCHE SOCIOLOGIQUE
-Jusqu'à quel point et commer.t les Sens resser.tent-ils le problème énergé,t.:.ique? Jusqu'à quel point se senter.t- i l s imp~iqués dans des p r o j e t s politiques d'économie énergétique? Dans une école àe 'l'urin, une enqu@te a ét~ prfparée sur l ' u t i l i s a t i o n fi~ale de l ' é n e r q i e ~ans le secteur domestique.
Les étudiants ont collabore à la formulation des questions1 ont mené 11 enqu@te e'1 questionnant des m i l l i e r s de familles, ont. part Lcipé au traitement des informations r e c u e i l l i e s et ont comparé leurs
~·(.sql-t a ~·(.sql-t s avec les do' f fi 1.e Ile s. L.'l E:. G" t ~,]5 Si pa.l" l é des l iti l i s a t ion rationnelles et:-. ,-,,-0 "ol~,:iées è!'~ lléneJ:gic, eL L~en ,:iûr dE:
conservatin'-et déqrad~tiondE. et':ldiants ':- .lf:-'fi ';;' '"2 la col
labo-r.ation et de l'a..;;s.i cance ;.:.eci't'l Lque des Or'l'anisat,~,,"[8 et des Sociétp.3 qui, e" I t a l i e , encontrE: "TIt été
particu-"ctU"'llSCS: cl'un côtÔ ':c,ï..les Oll, pE.C"lis aux étu-ôiants de discuter Qlrcctement avec 2~ ~xpe~ts, de l ' a u t r e ont cre~ un intèrêt pour la recherche en 0idactiaue de l'énergie aussi bien au sein d10rqanismes priv~s que d'Institutions dlEtat.
5 - APPROCHE "PAR PROJETS·
-Sous la poussée des étudiants, qui voulaient passer à une action concrète à propos de 11énergie1 beaucoup d' écoles et de groupes de recherche ont suivi un autrp i t i n é r a i r e : la construction dans la classe de prototypes pour l'étude des énergies renouvelables, dans le but de voir comme on pouvait, par exemple, capter l'énergie du vent ou du s o l e i l . Cette approche nous semble inté'ressante parce qu'elle favorise le développement àes i n i t i a t i v e s autonGmes des étudiants. Ce sont eux qui dans ce cas doivent i d e n t i f i e r le problème, projeter le modèle ou l'instrument qu'ils veulent construirel résoudre, à l'aide (les experts et des enseignants / les diffèrents problèmes techniques et économiques qui se présentent. Suivant cette mét.hodologie de travai l , dans deux écoles de Rome avec l'aide de l'Université, des groupes d'étudiants ont construit beaucoup dl instruments pour analyser l ' "exploitation des éner-gies renouvelables, et surtout de l'énergie solaire. Pendant deux ans, en u t i l i s a n t des matériels bon marché et les simples équipements sco-lairesl i l s ont construit:
un solarimètre, en recueillant les données sur l'insolation moyenne d'une journée et sur l'énergie utilisable dans les diverses situa-tions (inclinaison, conditions atmosphériques . . . );
plusieurs types de chauffe-eau solaires, en mesurant le rendement de quelques-uns d'entre,eux;
des panneaux à a i r , répliques des parois Trombe-Michel, avec ou sans des bottes noircies pour augmenter la surface efficace de captation;
(le.s ca pteurs C j"
on a comparé le
S io':lS 00'1
tc.],::e c,l.'-:,lnp;
un rnod~le de d i s t i l . l a t e u r ;
une plante expér.i.r:lent."il'~ pou'( obte~1ir àu b.i.Cl-ge,'Z a D"t~:j.r ~1es :'!.6·-chets alimentaires;
un mod~le ~e mais
saillit:' du t o i tr l <orient,.;'
faça<1E: avec murs Trc'r-:::',,:;->' LP,S ir.t6-rLeurs "'1- .~;.: i.-2l parois ont é,té fJr () (:tt?s ~'.(~:' r~",
r
0ur réd u ire l e :~rôs';' 1i Ci 02 '~1.::. PCiDru t i l i s e r au maximum l'6ner~ ~ s~:ajre.
I l faut mettre en évi(-'leEc~' qu1i2. ne s ' a g i t pas 0e bric(,,'::3:oe: t,cu,'; s projets ont été
E::~'f e ctu ées et sur 1_es clSp,:';:.~t= 1:-e ch:r'. i,('[u e,C; c:i!:?:'ltifiq'.1~?tO
djants ont dG. aussi ét'.1.d ("::- des Cl"te "
c:h1.mie, de thermolc::jici i l s ,-;.t.l.l:~:,:·:3é Ir:- pr'_".'cl;8e ére "r+-- du PCl!'l
(12 vue dE: la conservaticJn 1é,-"'nomie a',:;ss-; , 1c
,
y.-.,CJ.'e't~?mEr.les limites imposées par le ,:'J"::;;;;-(i.È-.T,l· .pr-incire ,.,'- ;''?c:4.1.ff6 li,t&s" de l'~nergie.
' t (.s "cru,3
Ce type d'approche, é1.e plus! 1a différencE des 3',Jtr'?s, a pcrm.i...s de stimuler et d'utili.ser l'habiljt~ manuelle et les qu~lit~3 ~rêative'; des étudiants, aptitudes trop SOl'vent oubliées à l' Reole I t a l . i e . Enfin, l'cJ1.seignant a dû assumer un ré,le différent: celuj Ge coordi:rla-teur ou de collaborateur à une vra.ie recl1ercr-:e et non ::-eulement celu-' è' "expertll
•
6 - DIFFUSION DE CE TRAVAIL
-Ces diff~rentes appro:::::hes ont été pratiquées un peu partout en
1 t a l i e , le plus souvent spontanément, sous la poussée des étudiants et ~es enseignants, parfais à la demande des groupes de recherche rlidacti-qu e, appar tenant à l'Universit~ ou â des associations professionnelles.
L'initiative était cependant restreinte à un petit nombre d'écoles et de chercheurs en contact entre eux, mais n'avait pas pu s'étendre à à'autres écoles avant l'année dernière.
Le :JJinlstère Ôe l'Education ct ::cris alors en charge ce problème et a constitué un té E'cole-Er:ergic dans le ut d1introduire à l ' é c o l e secondaire le t -;(? t'Snpr.~~ie
~e Comité, qui
mÊ.me dans '3(:~, ::-tspects économiques et son début n é t a i t formé que de fonction~airesdl Min ~t~re et des industries, a dG en suite considêrer aussi 1 8 5 initi.'l .:'Jncrètes dont 110US v::nc"s Da)'1er. F'n se basant sur la recherche dE.'Jà effectuée, c _, projeré des cours auxquels ont. participé 150 enseignants. Ceux-ci ont reçu une information non seule-ment sur les différents aspects du probl~me énergetiq\le, mais aussi sur les différentes approches didactiques et sur les recherches en cours.
I l faut souli gner aue dans ce cas on a
dG
aborder un double pro-blème:d'un coté, compléter la formation des enseignants du point de vue technique, en leur donnant des informations fondamentales ou d'~co-namie, ou de technologie, ou bien de physique, necessalres
,
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pour construire un langage commun et discuter le problème énergé"tique dans toute sa complexité, d~passant la formation universitaire strictement monodisciplinaire;de l ' a u t r e1 fournir des éléments de pédagogie, dontl;~s ;-:rofesseurs i t a l i e n s sont complètement dépourvus, necessaJ.res? . pour roduire r'les unités didactiques! fondées sur m~thodologies et techniques commu-nes.
L'intir@t suscit§ par le probl~me nous à permis de surmonter beau-,-:oup Cl1obstacles, et les enseignants! en groupes coordonnés par un
ani-~ateur-rechercheur, ont j~vclonn§ 10 unités didactiques qui seront expérimentées dans les classes pendant cette année.
C'est ainsi que pour la première fois on a vu t r a v a i l l e r ensemble, sur un problème didactique, des chercheurs, des enseignants et des techniciens du secteur de la production de l'énergie.
L'enqagement et l'enthousiasme montrés par presque tous les p a r t i -cipants i!1diquent que quand la recherche curriscolaire r~pond à un pro-blème réel cl1enseignement, i l est possible diffuser dans l'école ces
r é s u l t a t s et combler peu a peu les lacunes caractêristiques de la for-mation des enseignants.