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La sexualité dans l'oeuvre d'Yves Thériault /

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

"

..

(

,

.

LA SEXUALITE DANS L'OEUV~

D'YVES

THERIAULT y

"~

par " Har)c . Ben,son III Thèse SOUmISe â la

P .. cultê des Etudes supérIeures et de la .~echerche Un~verslté , MCG11l " En vue .d~ '1 • obtention du Ph. D • 06part.ment de langue et l~tt'rature français •• , c

@

Ma rk Ben son

..

,

,]

(2)

/ o~ /;1 '

.

..

..

"

~ RESUME

La sexuali té, l'un des éléments les ,plus déterminants dqns l'oéuvre.d'YveslThériault, a très souvent été perçue par .

plus~eurs critiques comme motif- irradiant. Or, dans notre

.

,

pe~spective, nous nous proposons d'étudier la sexualité comme thème primaire, ab~olument central chez notre aute~r, afin â'efi

f~

cerner l'impoitance sur le plan structural. Nous visons plus ~

particulièrement à mettre ~ relief non seulement tout ce qui peut ~oncerner la pulsion sexu~lle du~ersonnage thériausien,

mais aussi le cadre de la genèse et de l'évolution de cette~

pulsion. De ce fait, la nature se révèle êhéz lui un lieu hau-tement érotisé qui sert de ~odè~~ , à l'homme dans sa quête per~

pétuelle pour trouver le partage harmonieux et équilibré avec la jemme. i Notre àémarche consiste à procéder d'une saisie globale du monde érot1q~e créé par Thériault pour ensuite étu-dier plus en ptofond~u~ la spécificité du geste sexu~ chez' son personnage, avant de formuler une conception plus précise

, 0

du noyau sexuel de son oeuVre, qui nous' ramène infailliblement,

o

tout au début de notre {travail: l'apport ~ssentiel de la nature érotisée dans le partage sexuel et affectif du coupJe. Le sens

" y

général de notre démarche refl~te en quelque sorte la quête cycliqhe, éternelleme~t·reprise, de' l'écrivain qui ne cesse" de

,

.

.

/

.

.

.

1

che~cher le salut à travers son art.

i i

~ . '

(3)

,

.

-

"

ABSTRA~T 'f

-A deflnlng element cf Yves Thérlault's work, sexuality has frequently been perce~ved~by varlOUS çrltlcs a~ a motlf WhlCh serves to relnforce ot,her, o,ften extrall.terary l;'eadlngs. _ It lS

my lntentlon on the other hand ta study thlS phe~omenon from

<

the vle~F0l.nt of lts fundament~l lmportance as th~ prlmary

l,

thame ln arder to del+mlt l.ts s~gnlflcance on the structural

! ~ ~ ,.

level. 1 m~an ~6,accentuate ~ot only the prlnclpal parameters

.

,

o~ the sexual ldentity of Thé~lault's characters but, aiso the enVlronment WhlCh over$ee: and influences the orlgins and the devé,lopment of thelr !;exua11.ty. 'lt fo110, ... s .from this that nature in .hl.S ~ovels and short storles ,shows itself to be a

,

lr

. , highly eroticlsed presence WhlCh' serves as a' model- for man in

,

,

.

~l~

berpetual

str~ggle

for the key to a harmonirius

relatl.Onsh~~

wlth woman. l beg1n by glvlng an overvl.ew of Thériault's 1 1 .,. t •

erotlc unlverse before' gOlng on to study ln ~reater depth the

, ,

,speclf.l-city of Jthe sexual'exchange between man and woman .. Thls . leaos us to t:e

fo,mulat>on~

more

pre~>se

>de. of the

-

,

sexual centre of hl.s work. My c.6nclusl.on 'takes us lnexorably ...

,..,

.

back to the outset of the study, for it underll.nes the essenqial ,contributlon of an erotl.cl.sed ~ature to the development of a

heaithy sexuai and emotlonai relatl.onshlp wlthl.n the couple. '1' "

\

The general d1rectlon of thl.s procedure reflects to no smaii

,

degree the cyçlic'al, never-endlng quest of a wri ter who ls

(4)

, " " " ---,--~---.,...:...:..-_--~---'­

.'

, . ~

.Aar

011 '~gaguk Agoak

'.f:

Amôur Anna

.

'. Antol.ne Appelânt,e Ash,inî: Bo~e C. C.' Contes Cul D. H. Dompteur

F:.L.

Grand H.

P.

Herbe Ile Kesten . Mahigqn' MoJ:'t' N'Tsuk OeUvre Pa:rtage pajSse

P./.H.

Quête Rose Ru -Tayaout Temps Valère Valérie tJ V.E.

V.T.

l' '.' Aaron A'gaguk, \ . . . ' • 1

Agoals, l'hérittage"G' Agaguk Amour au goat Ide mer

La ·Femme Anna et autres contes:

.

, Antoine et sa ,montagne

1.. ' Appelan te Ash;ini \

, l '

Si~la bçmbe m'était contée, no~velles

De~Commettants,de Caridad , '

Contes pour un.homme se~l Cul-de-sac .

Le Dernier Havre Le Dompteur ~d'ours­

La Fille laide

Le Grand Roman d'un p~tit.'homme

Le Haut Pays .•

L'Herbe de tendresse, récits L'fIe introuvable'onouvelles Ke~n Mahl.gan La Mor,t d'eau. N'Tsuk

.

Oeuvre de chair~'récits Le Partage de minuit La

?as~e-au-s~ch~

MOl., Pl.erre Huneau

La Quête de l'ourse

érotiques

"

La Rose de pierre, histoires d'amour' Le lRu d' Ikoué

Tayaout, fils d'Agaguk Les Temps du carcajou

Valèr~ et le grand canot, récits Valérie

Le Vendeurtld' étoile~et autres contes Les Vendeurs du tem~Le

iv " , '

'/

/' '

..

,

,,.

'.

(5)

---.:"o--....

s::~----· . \ "

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TABL~ES,MATIE~ES.

.

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j'

1

.

\ ]

If

,1 ), INTRODUCTION

·

· ·

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·

·

1

j

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.

!.

.

\ Chapitre premier: L'EROTISATION DÈ LA NATU

·

·

22

1

1

"

Cl;1apitre II ." LE -CORPS E~OTISE •

·

.

94,

'\

,

,

Chapitre III EUEIL ET, lNITIATION

· .. · .. ·

.,

.

190

)

-Cliapitre IV LE SEXE VIOLENT

. ·

·

·

·

·

·

260

.""

1

1

...

Chapitre' V FAIM SEXUELLE 1 DEVORATRICE.

4 ) FEMME

·

327

1

1"

]

,

1

CONCLUSION

..

· ·

·

· ·

·

·

398 j \

1

1 1 BIBLI OGRAP!iI E. 422 j

. .

.

. · · · · · · ·

1

, ,

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1

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1

1 ~ , ,

1

, 0/ V

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,

1 "

.

(6)

-1) ,

.

.

o '\ '

..

,.

INTRODUCTION 1 r

La mort d'un écrivain connu suscite généralement dans les mili,eux li ttéra ires réflexions, s-6{ven'irs

.e~ h~mmageFl,

avec, immanquablement, une ruée du pub~ic dans les librairies.

R

: J ~ f 1

Tel a été le cas en ë4utomne 1983 au moment dé la 'dispar~tion

, ~ .

de Gabrielle Roy, de Gatien,Lapointe" de ~ené Garneau ct

f\

"

1

~ .~I • •

/, d'Yves Th'ériault. L'iron,ie du sort a voulu que ce dernier, meu're au moment pré~is'

.il effectU'~it un retour en force dans la vie littéraire après un sil~nce inhabituel.

\

Or, situer cet auteur prol~fique dans la production lit-, téraire québécoise exigerai,t une étude à part entière.l Nous

.

ne faisons qu'effleurer la question ~n dis~nt que, d'une part, nous avons affaire à un écrivain dont l'oeuvre a été analysée

selon plusJeurs typ~s à'approches: thématique (le primiti-visme); mythologique (la parole, lreau); bachelardienne et

.... ,"

psychanalytique, pour' ne ci

~:er

que' les plus

,.impôz:'tant~.'

D·I

au·tr~

~

.

.

, ,

part, et non sans par.aàotce, il existe relativemènt peu d·'étu- ., àes sur l'ensemble de l'oeuvre àe Thériault eu égard'à son

,

impo'rtance, su'rtout depuis les àix dernières .années. Or, il

"

est co~munément admis que Thériault est l'un de$ plus granàs <

]

"

(7)

, '

'

...

\ 1

.

.

"6crlvalns qu'ait prodUIts le ~uêbe2. ~e s~Jal~-çe ~~e car

\ 1 -1 .

oeuvre lmmense 0t par _'ln~ uence ae ccl:e-:::: S' .. u~

.

..

"

p~res de la Ilttér~tur6 qu6b~cc~se

nagace ct critl~ue ~u: ~otre SOC1~~~". o '

tr i ces sur le plan rCr;'\anesque." Cepe!îda r. ':. .

.1ittéra~rc de .TItér'lault J été ~en,:e à ':en!.r:

esr:-:::c;lseçr(1'::':):'. (

::e :; tes!: C~~! 1 ez'":

qu'on formule â 9p mérn~lre des louanges ~u':! ~'a pas :=e3 souvent entendues de son vivant:

,On. n'a JamaiS su '.rralmer.t classer T'l",ér.lau':'t-pc-.:.r la

s~mple raIson que c'est un aut~ur Inclassab:e.

années 1950, son oeuvre ,ne recevra pas la .1égl~!.rnIsa~lo~ de

1

l'lntell~gentsla lIttéraIre ~uébécolse: composée C!î ~rande

partIe d'lntellectuels et d'unlversltalres. elle s'est ~on~rée

soupçonneuse ~ t'égard d'un autodIdacte ~Ul. Jva~t de

àe·Je:~.!.·::-,',

.

écr.lv;31n 1 aWl.lt exercé des mét.lers aUSSI dl'/ers ~!~e .tr3ppeu!:".

vendeur, bo~e~r, chauffeur ct an~onceur ràdlophoDlque.

plus,' on s'est indl.gné contre ur. écrlV81i ~iUl csa.lt pr:6tendre V.lvre de, sa plume. et publler plus d 'un ou deux ':"l'JrCs dans "Ôl

(8)

)

'Ile. ~Iest là en effe~ le reproche qu'on lui a adressé

pen-clar: :cngte~ps: sa faCll1té d'écrlt~re qUl lui permettait de ?rGd~lre e~ ~cyenne ùn Ilvre par année (sans parler de~ses

ècr~~s peur e~fa~ts).

.

?:~S ~ard. 1~~ague dC3 oeuvres nablonallstes d'~pr~s

__ ~e~~:ut~Gn tr3~q~11:e le =lendra un peu â l'écart du

cou-pendant les annéei 1970, aprês

l 'emp&:he d'écrlr~ pendant

pres-un ~uasi-oubll pou~ ne reparattre

, "

,

,

.

,

Et après les ~c~~a~~~ habl 't'..lels au lendemain de

sa roc!" ':, ç ' est !.e' slle:-:.:::è· :"'e plu s complet. Alor s que la

mé-~Olre d~ Gabrle:le Roy es': ~élébrée dans des collQques. des'

'séances orqa~lsées aux salons

dG

:lvre et dans les numéros

spéc .. au;~ de re'.'l:e;;; ('lclr 1 par exemple, Etudes llttéralres,

,

1

-J.. ( 1 celle de ~hérla~l': semble dé)àperdue.

2 'est. en 'pa"rt1e peur alàer à tuer T'nerlault de l 'oubll'

dar,s .J..!e~lJel 11 se:nbl.e dé'Jà tc:nbé q ... e cette étude a été

entre-3 '. '

prIse. Le":" recul des der:'..:.ères a:-:-,ées a l:'.31 ~~e sa mor t aU!:.'OI1,t

,

.'

tou:e=~ls ~~ ava~tase: .:.ls ~ous p~rmetten: de Jeter sur scn

oeu ·,re t!n regard j,' ,en se:nble ..

,

-.::.. 'Idée lnl~!.a1e de .tral.terl du thèf:1e de la, sexuallté dans·

(9)

"

..

'.

,.

, ' . l ' "" ... .ta' ..

..

aborder un th~me aussi vaste dans uh corpus au~sl étendu.

Avec ta mort de'Thériault, ia voie, m'est apparu'e

.

soudain~ment

\ .

-.'

éclairée. voici un auteur dont les oeùvres~débordent de

sexualit~ et qui avoue lui-m~me 9u~ c'est la sexualité qui 1

est le moteur principal de son écriture. Pour lui, "un homme

et une femme viyent en fonctlon d'une relation humaine qui

4

est d'abord ·et avant toll t basée sur

.

.

, la sexllali té. " D'?lU tre part,' i l serait difficile de ne ~as s'apercevoir que la re-'

o

présentation 'littéraire clu sexe dans la fiè.tion québécoise a

~-' ,

4

- 'conr,u 'un essor, remarquable au cour s des années 1950' eUt 1960 .. ,

-/.-.:...;...' Robert CharbonneaLt' en par le ainsi: "un élément fait. son ,

J

~pparition, une force qui jusque-là n'avait joué que

discrè-1 )

.

tement, mafs toujours et partout continue et sous-jàcente ,et

r " 5

qui va envahlr tou,te la scène: la sexuall té. " Or èelui qUl

youdrait, en fa'ire une étude aurait tort de ne pas commencer

par'l'écrivain qUl en est en quelque' sorte le premier' ~lt:US-' t .

, "

trateur: Yve~ Thériault. La sEtxualité est

par~out

prei3Jnte

f

da~s son oéuvre, c'est, la ,force dominante. Pour Donald S~ith"

elle con stitue "le t;hème l~' plus' importan t et le plus.

mysté-, "

6

rieu~ che:: ,Thériault."

"~ >

.... , ' } ' ; t _ '

Il apparaît certes évident'~ue l'~mpo;tance ~e, la sexua-l'lté n'a pas échappé'aux crltlqu-eS qui ont·étud·ié Thér.la'u,if.

c~ qU.l peut étonner nédntnoins,' c" est. que' ce thêmè

n

,'a 1. t '

._ 1 ,. " .... , ft ", ( \ , ,

.

..

1 . i • .

.

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'1 ,

(10)

"

,.

.

\ ,

,

, '. ,

...

t,. " , .0 5

~ jamais encore été analysé dans sa spécificité. Au cours des

.

'

.

\

1

années 1960 à 1975 environ, les études foisonnent sur notre.

auteur. ~Et la plupaf~ ne négligent pa& d~ ~entionner la

.

,

plaee prépondérante du sexe dans son Oeuvre. Mars à

l'excep-~ , , ' ...

4-~~n de qu~lques-ûnes,

r,

ëes études ne f,ont qu'effleurer le' )

J

f

sujet. On se con

te~te

de répéter les Irtêmes formules: "l' homme primitif", "la natu~e sauvage"" "l'is,?lement" ... , pour les re-, lier au sexe,~ et sans 'discuter de l'a significatidh profonde

,J

d'un tel rapport ~ur le plan ?tructurai.

H._

.

, ~ 1

'En revaI?-che, les cr itiqu:es qui eXqminen t c~tte ques~ion

;>

"

,

.

,

ave~,' pl~s d'acuité-A. Brochl.:l, G. Be;ssette, R. "Bérubé et

quel-~ ,

ques fautres:'-l~ fOrtt dà'ns une, perspectivè· le plus sbuven~ .

,"

.psychanalyt~que ou,m~thocritiq~e,' ce qui éclaire sa~s'dout~

"

le sens'd~s symboles obsédants (l'eau, la bête, la demeure ••• )

. ,

mais ave'é

.

, i'in~onvénient de n'utJ.liser ~a sexualité que comme

auxiliai~e'à Uti~ vision pius larg~,.quasi mythologique, d~ l'univer.s dé l'auteur.'

.

-

,

.

,

l"

On ~e'parle pas du sexe comme d'une

,

"

v.alëu~ '~ntr~nsèque, ali~nt de soi, ou domme l'apanage d'un

, ,

. , ,

\ ,

monde closqul. existe' ,po,ur lui-m'émet mais plut~t comme un

'. '

.

"

moyen

d~ 'd~?ou'Vr

Û ',1

',~onur~·

typique, chez Thériaul t.:

Le premier cr >t1que

à'

par~er

d'une façon- préci1" aè la sexuall té chez lui a :été \ndré Brochu. Dans un articl'e

per-, "

tirle'n t " i l cherche à établir la signif ica tl.on la plus profonde

.

,

(11)

-1

\.

.'i

7

de la sexualité en situant ce thème par rapport aux autres. '"

Il est le premier à pratiquer une approche psychanalytique

de l'oeuvre de Thériault. S'appuyant sur Sandor Ferenczi

(Thalas-s~-: 'psychanalyse des origines de- la vie sexuelle).,. ' ~.

A. Brochu- voit une correspondance entre le sexe et l~ retour au sein maternel: une régression de la part du héros vers

6

ul'\ .lieu primordial de bQnheur. Etudiant en profondeur un seul. des romans 1 Les Commettants de Caridad, A. Brochu lal.sse le

champ ouvert!. 'C'est un terrain qui s'avérera très fertile car,

,-pendant la décennie qui suit la parution de cet article, ceux

\

et celles qui prennent la relève auront souvent recours à la psycho cr i tiÇIue, au point où ce 'type d'approche deviendra vite rabattu s'agissant de Thériault.

L'étude féconde de Gérard Bessette témoigne de cet

in-'" 8

térêt pour l'interprétation psychanalyt~que. Il élargit l'exploration en examinant la plupart des grands romansr~e

rhériault, s'arrêtant, surtout aux plus importânts: Agaguk, La Fille laide, Cul-de-sac .•. Son analyse, freudienne s'il en est (complexe d'Oedipe, mythe de Prométhée, symbole~ sexuels

t

latents, régression à l'enfance, impuissance, rivalité entre fils et. père), lui permet d'articuler l'intrigue et le conflit de tout roman de Thériault selon la formule suivante:

(12)

".

(

..

, , , .

,

, .. ,

-> .• -~ • • _

-Parent (du mime sexe) par lequel, il se sent lé.é (pr i vé de son, arol

t

a

l'amour).

2) Èn rètouI, l'Enfant sùbit une épreuve (un ch3tlment) mutl1atolre. 9

AinSl Edlth, dans La FIlle laide, qUl voit son',amour 7

pour Fablen menacé par Bernadette, la ~ère symbolique. Celle-ci sera tuée pa~ l'Enfant (geste dont Edlth est complice) qui sublra par la sulte une mutilatlon symbolique (elle se coupe

les cheveux) et un ch3tlment 'concret (son fils l1a!t sourd et

aveugle) •. Ou encore, c'est, Agaguk qUl affirme sa virilité et

son affranchIssement en tuant deux symboles paternels: Brown

le trafIquant et le loup blanc. La défiguration infligée par

; le loup lui permet à' échapper à la justice et à l'emprise des

siens, le faisant par conséquent accéder à un nouvel éta't de

partage équil~bré avec sa femme.

.

Cependant les conclusions de 3essette, bien 'que

signifi-ca-.tives, semblent réduire l 'oeuvre de Thér.iault aux termes

d'une'équation trop commode, qui mini~ise l'lmportance de la

sexuallté comme phénomène autonome et i~t~iriSèque au profit d'une InterprétatIon très personnelle et pa:t: le fait même

aléa-.

,

taire, car il n~étudie que les complexes d'un ou deux person- ' nages.

Tel n'est pas tout à fait le cas de Maurice Emond dans

, 10

son livre Yves Thériault et ie combat de l'homme,' quoique

1

)

1

~

(13)

---- -

---.-"

8

l'auteur se serve du séxuel pour étayer ses conclusions. M.

Emond vise à aécouvrir l'univers romanesque personn-el de

..

Thér~aul t en exam~nant les str~tures' s~gn1fica t1ves, les

thèmes et les l1gnes de force qui agissen t sur celu~-là. Il

analyse d'abord les per sonnages pour arr ~ ver au "per sonnage

premier" (p. 14), ,l'homme typ1que de Thériault. Ensuite i l

part à la recherche du milieu qU1 correspond à la V1e

psychi-que, des personnages. Milieu et personnages considérés

ensem-ble révéleront un monde fict10nnel orig~nal et unifié. Le

"

sexe y paraît pour souli~ner le conflit pr1rno~dial qui régit

,

l'univers que crée Thériault: tout en éprouvant unoesoin

ir-résistible de dominatIon qui l'amène à s'affirmer en détruisant

,.

tout sur son passage 1 le héros éprouve en même temps un besoin

,1

1

égal de tendresse et d'amour (p. 14). Que ces deux forces se

concilient dépend de la femme, car pour retrouver l'équilibre originel contre les puissances aveugles, le 'héros se tourne

invariablement vers elle. Leurs rapports sur les plans

affec-tif et sexuel aboutiront soit.à l'échec' (sexe violent, brutal,

-

, "

refus de la femme), soit à la réussite (tendresse, partage'

"

égal) . Il n'est pa s besoin de rappeler que la réussi

1:&

'du

couple est a ssez. rare dans l'oeuvre de 'l'hér iaul t ...

. \

André Brochu décèle plus ou moins la m~me dichotomie

lorsq~e, dans une étude sur l'individualité et la collectivité

(14)

dans trois rOmans de Thér iau 1 t, ~l soul~gne la luse en valeur

d u mon e d f ém~n~n ' c ez h 1 "-'~cr~va~n. ' " 11 Pour lui, l'apport du

,sexe est loin 'd 'être ~c~ négligeable; c'est "une dimension

, 12

essent~el1e de l"univers rom<3nesque de Thér~ault."

Les "puissances aveugiés" dont parle M. Emond avaient

13

.déjà été étudlées par Renald Bérubé. .ce gernier l.nS'lste

tOutefOlS moins sur le conflit intérieur domination/partage o

décrit par M. Emond que sur la 'lutte ~ue dort m~ner le héros

de 'Thériault pour se libérer"'d:une société âp're, _cruelleèe,t

oppressive: L'être primaire chez Thériault épr~uve un désir

9 .

pro~ond de se découvrir, d'accéder à un niveau de vie vraiment

humain et humanisant. Mais pour créer une nouvelle hu~anité,

il faut d'abor"d nous débarrasser de notre déguisement de

.

"ci-vilisés", remonter aux sources et retrouver l'état primitif.

'La route est longue et pénible, et l'homme n'a pour toute aide

,

que sa propre force, d'oü la violence de ses gestes ~ans sa

t~ntative de libération. Selon Bérubé, i l y a dope deux cou-rants principaux chez Thériault, l'un découlant de l'autre:

la volonté de s' humaniser davantage qui

.provo~e

paradoxalement

mais nécessairement l'expression de soi par 'la vioJ;,ence incon-'

trô1ée des pulsions premières., Pour R. Bérubé, comme pour ~M. ,

Emand, la sexualité est partie il\tégl:~nte d~ cet

te

lu ttei

c'est à travers elle que l'homme tente delr~trouver son moi

..

/

(

!

(15)

_....:..._---

\--- -

-•

• ,

.

'J .10 \:

primit~f

et

de satisfaire son beso~n viscéral de tendresse. Le visage que revêt la sex~al~té sera tracé en '~onction de

-,

l'1ssue de la lutte. Or. verra d'une par-t; par exemple, une , "

s~xualité d~v6tant~, brutale et sad~que: dénuée de tout~

ten--dres;::;e dans Le s Temps du carca jou ou dans Kesten .. " En ,con

tre-partIe, l'émancipa tion sexuelle d'Ir iook dans Agaguk témoigne'

,de l'avènement d'un nouve'l o'rdi~ humain. >,A partir _de l'en-, tente sexuelle, on a~s~ste à une réellè évolution du couple.

Voilà donc les pr , inc~paux 'cr i tiques qui on t aborÇlé la ~

question de la sexualité chez Thériault., ' I l existe ~n outre

• 6

pluSIeurs a~ticles et quelques thèses qui ~ont dans le même

... "' ,. ,

, '

14'<

. 1 . 5 " - ' "16-,

sens . . 'Patxicia Smart, 'Robert Larin et ~ves Lacroix,

'sui-, ,

vent le tracé proposé par Gérard Besset.te en ~al:_san~ appel à la psych,oari

t~que.

pour

exp!-iq~er

un

te~te 'pa'rticul~ei:

'de Thériault. Mme Smart, entre autres, s'intéresse r , à la

sexua-~

l~té des femmes 'dans Le Dompteur 'd'ouis, toujours à la lumière

du fame~x r~tour du ,héros'au ~ein maternel: Pour leur pa~t,

. ~

.

...

R. Larln Et y. Lacro~x ajoITter.t-au~ recherc~es de Bessette en

tA " , . . •

, "

aIialysan t Aga guk comme un rt?man oèqipien.' Dari~ sen mémoire de

, ' ,

ma-!trise, oR. Lar'in prend' lè même J:'oman, qu,'à étudié P. Smart,

ma is

~l

l'aborde sou,s l'

~ngle rn~hogr~ph±q~c~'

a f,in de

complé-- "

1.7 ' ' .

ter l'analyse de B~ssette~. ' I I Y parle d~u vi~lage comme d' Cin' l ~eu phallocentrique , • .du' complexè'

.

c;J' Ëlect:.re chez les fenunes du

' ,

roman et des symboles sex:uè'l,s obsédan'ts:

'.;

..

..

. , , \ i i ' 1

:

1 , î ,

,

î

1 ,

,

~ 1

,

,

(16)

---....,...- - - f -,

---~----.

, " 1: - ' 18 . . ~ 19 ~

Michel Lefebvre et Lorette Po~rler nous livrent;." dans leur mémoire de maîtrise des études de type

bachelar

-I l

dien. M. Lefebvre réfléchit sur la q~stion du primitivisme

--chez Thériault, mais le r(~le qu'y ~oue la' sexualité est

',limité à son aspect symbol.l,que par rapport aux quatre

élé-• ~ ~ J. 1

D

ç _. mehts. Dans une étude plus circonscrite, 'L. ,Poirier se borne

"

à considérer la fonction mythique d~ l'eau 'da!ls Le Ru d' Ikoué

.

et dans Amour au goat de mer et, par conséquent, les,'symbole,s

sexuels qui

y

sont rattachés (l'image virginale de l'ea~ lim-pide, l ' excita tion sexuelle symbolisée par ,l' açi tation des eaux" et'c.).

Il existe'en outre pl~sieurs études thématiques 'sur

1

l'oeuvre de Thériault,20

rnais~

la sexualité n'y.,compte qU,e pour,

< ' ,

assez peu. Elle est tr,aitE%e le .plus souvent comme fonction

secondaire du thème retenu. Il ne se trouve à' proprement

parler aucune' analyse qui traite ~niquement du thème de la~

sexualité dans'l'ensemble de l'oéuvre de Thériault. On

r~-pète depuis longtemps. que la sexua1ité est ici l'as~ect le .

,

plus important i la force motrice de 19 f,iction., mai.s les

lec-tures ent-reprises j-Ilsqu'à présent semblent se borner aux "

complexe~,

sexuels des

pet

sonnag'e's. ' Il' est .indéniable .qu' une

, ,

. . . ~ ( J.

telle approche est importante,' voire. ,e~se?tielle' PC?~r,

la'f.com-préhension,de l'univers intérieur daps le mbnge romanesque de

/

1

(17)

1 t " , ' , " , " 12 ,-. ,

.

l'auteur. Mais il y a l,me tout autre facette d.e· la' .sexualit~ chez Thériau1t'qu{n"a pas été mise en valeur: son

impor-( ,

.

tance au niveau ·structural. "

'En dépassant la question de la sexualité comme

expres-sion du "combat intérleur de l'homme, je

me

propbse de

l'gbor-"

St • "" " , :

der da~~ la perspectlve de la structure, en ga~dant à l'esprit la questi<:m suivante:' en quoi l'a sexe est.-il vu comme agént

dè formalisation de ~'oeuvre .romanesque chez Thériault? Il

,

..

existe dàns. sès écrit,s des motlfs sexuèl:s qui reviennçnt fré ...

, ,

,

quemment,qui's'entrelacent etqu~, en fait, soutiennent son

, Il

oeuvre 'entière. Ces. éléments t~xtuel::;, pris dans leûr ensem-ble, i~~orm,e;n~' le t)'lème'.dè -lq s'exûalité" thème qui cçmp9,rte

o ' ,

sa Propre ~ohé~ence struct~rale~ Mon objectif est de

regro~-, ' ,

, \ '

'per. ces motifs et de. é!iscuter de leur fonction dans le tissage,

du t~ème qu'~ls infoim~nt~ L'étude des trames et des ,motlfs

ï

i ' ' , '"

nous permettra de.dé~9uv~ir le centre s~xuel de l'oeuvre de

(

, ,

Thérial;llt ou, comme le dit Jean Rousset, "le foyer d'où rayoh-~

, . f t ~,

l , l " f' . ,,21

~ent ~<?~tes es structures et,toutes es Algn~ lcatl0ns.

Lê thème"Qbsédant'de la sexualité pourrait en effet être

o

env~sagé comme' u,~moyeu d'où s'étendent les rayons divers des motifs sexùelSi alors que, pour des critiques antérieurs, la)

, ' .

.., sexu,alité n'est qu'un rayon.pa:r::mi ,d'autres dont: i,ls se se:z:vent 9ans un mouvement centtifuge

~n

fonction de conslqérations

- ---~ \.---- ~-- -

-'1

i

1

1

.-1

J

i

1

! " ' l j J ! i

(18)

r 1 .:.,. .... , ,

..

13 ·r

extralittéraires •. Dans notre optique cepend.ant, c'est la

" ,direction contraire qu.i est valori,sé'e: un mpuvement centr;i,-; pète qui se sert d'éléments organisateurs 'du t.hime de la

~)

sexualité pour arriver à une, description de sa spécificité.>

" r

,

Je me permets toutefois une .lég~re modification de l'image de "\

la roue. P9ur, moi, la spécifie! té sexuelle t'éside toujours

-" ' , ' • ~1'

au centre, mais j'envisage les motifs sex~els non comme des

rayons menantoau centre, mais comme des Cercles concentriques "

.

.

"

q~i ~nferment ce centre. Par le biais de la distanciation,

,

"

'

je procède de l'extérieur, du plus généra~, ,vers'des cèrcles

(

'.

de plus en plus contra;ignants et spécifiques, jusqu'à ce que,

le centre "même soit

attein\:-.~n~

sorte de Cortimedia divin a à l'envers .. , Ici se ·précise et se tévèle, la significatiè~

·strüc-J

tUrale profonde du sexuel chez Thériault: Ces motif's, tout·

en contribuant à l'unité thématique de la sexualité, 'compo'r",:

/

tent leur pro~re si~nification, car ce sont'des porteurs / '

symbolt?~e~ q~i tr~duisent

les préoccupations profondes de

"'-l'écrivain. Str~cture et pensée sont à J.a base de toùt.e oeu-,

v~e d'art t et·c' èst en étudian't la. première que j' espère

par-ven~r à éclairer la seconde.

Le sèxuel sera donc ici t.raité comme principe d'orga-nisation structurale, principe qui, à l'aide de motifs sexuels,

sous-tend et informe toutel:?euvre de Thériault. , Les motifs

,

(19)

, ,

, ,

'~

14

, sont ilombreux et j'ai c.;t'u bon ne "retenir- que'les pius

impor-, ~

• tarits et les plus iécurrents. Le mouvem~nt, répétotls-le, ira dU' général' au particul ier, de l'imagé au concret, afin de

connaître :les caracté~istiques 'les plus' marquantes de

l'uni-vers sexu~l thér i~usien.

J'étudierai ainsi'dans un premker chapi tre l'érotisa tion

du paysage chez ,Thériault. La nature èst dans son oeuvre qn

lieu vivant e\t 'hautement sensuel, tout'en étaht lieu

dlisole-ment et de solitude. Quel,s' sont alors les symboles qui

con-tribuent à créer cette atmosphère? Comment sont-ils. maintenus

.'

et entrelacés d'oeuvre en oeuvre? Quelle est

le~r significa~~

tion et surtout quelle est leur f9nctiOn?" /

{

.

/

Le cercle se resserre dans,l~ûxième chapitre

je traite' de l'érotisation du corps humain chez Thériault. Ses'

personnages ne' sont pas des êtres sexués uniquement à caUse

de leurs gestes:- ce sont des êtres dont tout le corps exhale

, 0 une sensualité farouche grâce au symbolisme sexuel de ses di-" ,

"

,

"

(

, " , versas parties.

A la source même de ~e corps. érotisé,' il y a I ' éveil de

la sexualité. ,Quelle forme pre~d 11 ini tip tion sexue~le ch~z

_

cés per , ~orrnages? Comment arr i veryt- ils à la découver te de lep.r

'

.

propre nature sexuelle?

:U

est fréquent chez Thériault d'as':"

socier la

pe~t~jde

la virginité à une prise de conscience de

"

/

..

-i

I-i

1

, j 1 1 j

y

1 1 ! 1

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\

! , J , - 1

1

1

i

1

.i J '1 ~

1

A

J

) î -' i t

j

(20)

, ' " . ,\, ' , " , 15

soi et du monde. Dans le

t'~oisi~me

chapitre nous, en verrons v

la sig~ification et les conséquences.

_ Ensu'i te,' j'aborde Ül spécificité du geste sexuel: dans l'oeuvre

rom~nesque

de l'écrivain, et plus

p~écisément

l'im-/

.

.

portance du sexuel dans la quête éternelle, cyclique, d~

u

partage entre l'homme et la femme. On a noté à plusieurs

,

reprises que le sex~ chez Thériault est parti~ulièremen~ vio-lent. ,DJ3ns ce chapitre, je tenterai d;'anfllyser les raisons

.

~e la_~rut~le ~o~ina~ion ~exuelle é~ercée.par

le

~ale

qui n'a

,

pas su s'élever au niveau de la femme pou~ Brofiter de ses

.,va~eurs d'émancipation et qui, par conséquent, est condamné

·à reprendre to~jours la ·tentative. On évoquera ici pa'r ex-tensiop l'impor~ance de la perp~tuation ~e la li~hée pour ~e

,

,héxos'~hei Thérlault: la Iùtte ~tant' toujours 1 à recçmmencer,

• 1

"

il jaut assurer la relève.

Cependant, la remIl)e ne saurait to,ujours représe~t~r le

,sa~ut.

;.:

~ra~~rs

-la

di~~ect~q~e

de la noùrriture et

d~

la

" r '

faim, nous découvrons qu'elle peut ~tre insatiable dan~ 50n-.. appétit sexuel, voir.e dévora.trice, réduisant aihsi l·'homme à

- j

l'impuissance. Le partage sexuel. envisagé à travers

le'per-,

soÏma<:!e"salvateur de la femme peut donc's'~vé~~r illusoire'. La 'décépti6n est davantage ~enforcée par: l"'attitude, de

Thériault'devant les m~eurs s~xuelles: la pudeur:ex~e~sive,

~

(21)

.

,,,

"

16

la prostitut1on et l'homosexualité~ pUlsqu'elles débouchent "

sur la stér~lité, nient .d'emblée toute posslbl~lté de partage. Or l'ensembled'e cette démarche-progress.lon continue

, !' ' ,

vE?rs ,le centre, vers -la, spéciflclté du sexuel-tiendra certes compte des études antérieures pour en taire le pO.lnt, malS je " vise surtbut' à cerner une ~s,tructure et une pensée centrales

rf

du thème 1 nory comme notion ,pér i,phér lque 1 ma. ~s comme élém~nt

structuralisant fondamental de l'oeuvre entlère de Thériault: le sexe comme phénomèn'e ria turel ~

\. ...

.

,

Avant d'e,ntrer dans l'analyse du sexe flctïonnel chez Thériault, quelques précislons s'imposent. Il' ,faut signaler en premier lleu que cette étude se limite aux romans, et aux

1 contes', ce qui constit/déJà u,n, corpus considérable ~e près

de,quarante titres. Je laisse donc de côté san

oeuvre,drama-~ique ainsi que'son .oeuvre pour enfants, s~s écrits

radlqpho-..

'niques'et ses romans "à dlX'SOUS".

1 En deuxième lie~; il ne ~eralt pas inutile de aéfinir quelques termes-clés auxquels j'aurai souvent l'occaslon de

,

revenir. re nos jours 11 ~emble'de plus en plus difflclle de s'entendre sur une définitlon précise de termes

tellement'su-.

"

jets à controverse comme "sexualité", "érotisme", ."sensualité,", '''pornographie'' l "ob,scénité", etc. Ce ql,li a é,té considéré

comme ob.scène hier rie l'est plus aujourd'hui;" IJérotisme

\ ., .,. '. ,1 t 1 ,f 1

1

i '1

,

(22)

\

17

\ des uns est la pornograph~e des autr(s;, se;;1sùal~té _se

con-~

:olJd'

sou vent avec é.roti,sme; pour le Peti t. Rober t , 1: ér~ti.sme

s~gnlf~e le "goat marqué, excess~f ou pàthologlque pot;r l~s

choses -sexuelles", alors qué ~our d' autres, 11 englobe

lndlf-férernment tout ce qill touche at; sexe. En somme, les crltères

, • 1

sont très flous et l~s' déflnlt.:..ons sont souveht CO:1traèlC-,

.

,

Or, dans r'optiqu~ de.cette étude, érotlsme ~'es~ pas·

/

synonyme de sexuallté, ma~s seulement facette de celle-cl,

J

J

terme plus nèutre qu~ englobe l'ensemble des comportements

\

-rela tlfs au domain'e du 'sexe. L' érotlsme, 'pour moi, V~ se à

éve~ller chez le ~ecteur.Gn~ pr~se de consc~ence de ses p~o-~.

pres pulsions sexuelles, et mêm~ à éve~ller son propre désir

\ sexuel, sans qu'il y a~t d'ominatl.on ou contralnte d'une pa1;t

~

ou· de l'autre. _On constatera alors que; dans cette

perspec-tive, le coït chez 'Thérla~lt est rarement érotique, quolcp'il

soit évidemment sexuel. En revanche, 11érot~sme s'y ma:nfeste

, '

par d'autres moyens, le plus s0l:lven~t par le bl?is de la

sen-sualité. ,En d'autres mots, la stimulation de la pulsion

sexuelle ... le désir-s'acco~pl.i.t souvent à travers la

stirnu-lati?n d~recte QU indirecte des sens. Le sensuel agit sur le'·

plan du possible, suggérant la sexual~té; l'éroti~ue l~

tra-, -,

duit ~ur-le plan -du réel, stJ.mulant le désir. 'Quant-à la

.' J

.-" . , , 1 1

(23)

-, \ , ,

,

(

( ~,.,--...,...,---,..., r_ ~i ~,

'"

, 18 "

-pbrnographie, J.e n,'en t-iens aucun cOI?pt~; w ce n'e~t ~ue la

dé-__ • ~ 1 1 , " " "

-gradatlon gratulte de l'êtr~ humain à tr~vers la seu~e_'~1m~n-

,-Slon

p~,yslque.

Elle-

n~ sâùr~'lt,

éVldernm'ent_

'~/a~pJ.,ique~ ,~

.

,

, "

l'oeuvre de 'l'hérlault.

,

La quête ultl~e de Thérlault est peut-être précIsément·

,

...

J 1 ~ • ~~ ... .,

celle d·:..m au-delà érotIque, d 'nn ,monde mystl:q~e' caractér.lsé

• • 1 ~ - • .. ..

. ,

par une sexualIté saine

êt

rlche. S1. cé!le-c~ ~e"-c~mplaît l~·'·

-':

pl u s'sou '.Ten t 1

l'homme :;'a pas,encore atteInt le centre de,'son mOI.:sexl,l:el;·, : '.

11 rt ,1 est pas encore devenu un être 'lIbéré de' tous ses 'com':"

plexes 1 :.m être. <;1~.1 V.l. tune sexuall té franche' et l;.béra.tr Içe ". ~ .. '.

Dans un monde hO"S·tlle 1 dénu,é de, sens 1 fa 1re l ' amour p'arait

,

la ,seule ':açon de trouver une stabIlité, qe fIxer des' repères~ ..

,;,;,

de 'fIxer un centre. Comme Henry MIller, Yves Thérl2lult prÔne

un ~etour à'u~e Inno~ence anhIstorlque oŒ r~gnera.l.t une

sexualité naturell~: partagée en tout~ égalj~é. Pour trouver

l' éqillllb~'e de l'unI ve.rs ,.' 'i!1 . ~21-U t, respecter" J,. 'ordre nàtu~el

,

.

du- monde; or, quoi _ de plù s na.tu"re+,' de' pi.u,soU p,r.imor~d.l.al~ dans

, , .

,.l'~~~·stence

humaIne'

que.l~

. sexe'?

C'e'~t

.la"

'tentat.l.ve': chez

.

.

.

, .

déC;;-l:t Thét'iault, non seule~e~t pou,r.assurer sa c·ont';Lnul.t~,

,

.

j C> ; / .

mais aUSSI et su~to.ut 'pour con?aîcr'e 'l'a béau'té' du ,geste.

.'.

, ~ -'

(24)

'-'0

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... '>, "

,

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.

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• 0

.

" ... ,,-,," '\

{

"

.

,

.'

D'où 1 \érot,iSIt!~, <, '

car c'est essentiellement cela qui sépare

,1"

. , ,

l'homme d'e la b~té. Les descriptions de l'acte sexuel

v~o-lent ne

r~présentent

sans doute

~ ce~

égard qu'un exorçi\me ppur retrouver la jo.;Le et la beauté 'trop souvent absentes de la vie affective. C'est une véritable quête de l'éro-~

~

,

tisme que mène Thér iaul t. .,0!l verra dans quelle mesure la

./J

structure de la fiction permettra de cerner ce thèm~ pri-maire. , IJ ", , • "'l'~

\

, ' , , '.

.

"

)

,-,~ , ".

,

.

• <1, , 19

..,

s 1

(25)

F---~---

__

---~---

________________

~

,-,

.

NOTES - INTRODUCTION

~ l

Etude déj,à entreprise par Hélène Lafrance dàns ~

,Thériault et l'institution littéraire québécoise (Québec: Institut québécois de recherche sur la culture, 1984). ~

-2 Ga ston Miron,

~i

té par J. Benoit, La Presse [Mon tréa1] ,

~2 octo~re 1983, p. AlI, col. 5.

,- 3ÀÎ1dré Brochu, cité par J. Benoit, ibid., p. AlI, col. 5.

4Yves Thériau1t, entrevue -.avec G. Dorion et M. Emond) dans Romanciers du Québec (Québec: Editions Québec fr.ançals,

1980), p. 204.

SRobert.Charbonneau, Romanéiers canadiens (Québec: Les Presses de l',UnLversité Laval, 1972), p. -126.

, '

'- 6Donal1d Smith, L'Ecrivain devant son oeuvre (Montréal:

- - - --Québec/'Amériqu'ê;19f?3), p. 63'. . _ o '

<l, :

\

.

l

7André Bi'o'chu, "Yves 'Thériault et la sexualité,"'Parti pris, l, 'Nos. 9-U (été 1964), 141-155; reproduit par G. Marcotte da'i-ts Présence de

la.~ c~

i tigue (Montréal:

~urtubise

HMH, 1966), pp. 228-,245.'

.

.

8Gér9rd Bessette, :"Le Primitivisme dans les +,omans' d'Yves Thériau1t," dans Une Littératllre en ébullition

(Montréa 1: Le s Editions du Jour

r'

1968), pp. 111-216.

-t>

9Ibid., p. 124. ~

, 'r

0_

10Maurïc

y

'Émond, Yves Thériault et le combat de } 'homme,

(Montréa 1: ~Hurtubise HMH, 1973). . i. . ,

1'1André Brochu, "Individualité et èollectivité dans'

"

Agaguk, Ashini et Les Commettants de Caridad," dans i

L'Instance critique (Montréal: oEdi~ions Leméac, 1974), pp.

156-205. ' ,"

....

.

'

(26)

".

... _-', ... _---<. ,,-_.

."._--21

12-' .

-ubi-d., p. 187.

13Renalâ Bérubé,i "Yves Thér'iaul t ou la lutte de l ' homme contre. les puissances obscures," dans Livres et auteurs cana~iens 1968) Montréal: Editions Jumonville,' 1969), pp.

l~-25.

14pat~icia Sma r, t', "Une Analyse psychocritique du

Domp-teur, d'ours d'Yves Thériault," La Revue de l'Université

d' Ottawa, 40; No. 1 (janvier-mar s 1970),

.

.

5-24.

lSRobert Larin,

"É~sai

de psychocrit,ique d.'Agaquk d'Yves Thériault," VO,ix et ~mages du Pays, 7 (1973) 1 13-49.

'. 16 ( .

~

. . .

Yves Lacroix, "L,ècture d' Agaguk', ': Voix et Images; 5,'

. No. 2 (hiver '1980), 245-269. y

17 Robert Lar in, . "Un Mythe, une structure: Le Dompteur d'ours d'Yves Thériau1t," M.A., Université de Montréal, 1974.

.

.

1

,lBMichel Lefebvre, "Le Primitivisme d 'Yves Théria~lt, Il

M.A., t!niversité de Montréa!~, ,1962.,

19Lorette Poir,ier, "La Fonction mythique de l'eau daps' Le Ru""'d' Ikoué et Amour' au gont de mer d '~~es Thériau1t,"

M .A.,I Uni versi té de' Montréa l, 1967'.

·20Citons à titre .d'exemples les thè~es suivantes: Gérald Charbonneau,

"~e

Regard'dans l'oeuvre d'Yves 'l'hériau1t," ph.D. ~ Universit~ d'Ottawa, 1979; ~ouise

Fournier l "La Femme, dans les romans ~ ''Yves Th~r iaul t," M.I\.,

Dalhousie, 1976; Pierre L'Hérault, "La Violence dans l'oeu-vre d:Yves Thér;iau1t," M.A.! McGi11, 1970; Claude Martineau, ;. "La Nature chez Yves Thériault," M.A., Université de Montréal,

1964.

21Jean Rousset, Forme et signification (Paris: Librair1e José Corti, 1962),

p':.<Xv.

1 . / " . "

..

,\ .:

,

,-4. < '

'.

, " ~

.

(27)

, ' " 1 . '..,. '" , l ' ,---~--, , 1 • CHA:PI'TRE, PREMIER.' , , L' EROTISA'TIO~ DE LA NA'rURE, }

-•

, '"

'Comme tout éC,l:'ivain,'Yv'es Théd'al,llt s'eff0r~e dans son

oeuvre de peindre l'homme, les passions qui le gouve~nent, sa

"

.

,

place et son sens dans le ~onde. Pour lui 1 une" telle saisie'

ne saurait s'effectuer hors 'du contexte dÇ! ra natlire. La",

psyc'hé humaine 1 p~>ur être mise '.au jour, a be'Soin d'un cadre

pr.imi tif, pour ainsi dire vierge. La na ture, lie,u où -~e

dé-ploien't sans entrave l'es p\..11sions a'tavig;u~s, constitue 'ce

,c,adre essentie;L. Mais"",c'est un 'lie'u qh1i, devîent lui-mêm~

,

hautement érotisé, et par les descriptions évocat~ices q~'en fait Thériault, et par les ,liens qui le rattachent à l..-'être

',-fondamenta lemen t sexuel de l ' homme" Ce dernier s'avère être

pour ~hériault une créature mue par des tendances

élémentai-"

,res dont la plus pl:ofondémen t ancrée e'st la sexuar~ té.

"Thériault ne cherche pas à d~ssimuler,lël puissance de la: chair

ou ,l~s ~l~ipns ,sexue~les ç1errière les attitudes et les gestes

reçUs. Qu'il mette en scène des autochtonés ou des pêcheurs,

. il ne, c~sse d'explprer 'la dimension sexu.~ll~ de la psyché.

, \ ' ~.

!

, : ",'J , ~, \ " ,i .~

, 'j

(28)

---,---.

23

~'

\,'

Et lorsqu'il le fait dans un cadre naturel et primitif, celui~

ci

acquiert une dimension érotique nouvelle qui reflète au-trement la sexualité de l'homme.

C'est ce,tte dimensiOn érotique, ,vue à travers un prisme

. Q

de sensualité foncière, qui sera. ~tudiée dan,$ ce premier

cha-pitre. On parlera d'abord de la nature Gomme d'un lieu vivant

~ et'palpable, perçu à travers la personnification comme une

./'

. " ,

expérience sensorielle objectiv~. Mais ce n'est que tempo-'

raire:' l'expérience sensorielle cnez Thériault se transforme

vite ~n une expérience sensuelle. bn'procédera alors à' un ~

découpage des divers élém~nts de la nature chargés de valeurs

sensnelles: la mQntagne, la ~erre, l'eau, le sole~l, la lu~e,

, le. vent, \a flore et les saisons. Le paysage en général ,finit t '

'pa'r s'érotiser, gr.ace i"lUX' desèr iption~, sensue'lles qu'en fa i t ,

, "

Théri"ault et, par association' avec 'leê' ébats amoureux qu.i $."y

c'

déroulen t. On ,vèrra e'n ~êmè temps ,la, qua'li.t-é sexu~l'le qu'

in-carnent ces leitmotive' ainsi que:. leur si'gn,~ficàtion sur le 'plan huma in.

L?

personnification de la nature est depuis longte~ps l'.Ùne des ~èc,hniques' descriptives- les plus répandues en

litté-,

, ,'.

rature: i,l n' ':l'a qu' à 'p~nser. au romantisme pour ~esurer

,

.

, , l '

, l'.lmportancÇ! d'une concep'tion d~ la na ture où l'appel aux sens , <1

-est omniprésent. C 'e,st d~abor:d par le contact sensoriel que

(29)

(

/

(

" {, --.

.

1

.

" < •

.-~

.

24

l'·homme connaît le m,on,de l ' et c ',est par les sens qu'il le

dé-cr ~ra. Il voit dans la na ture une âme-soeur et'tente de 'la définir pans cetté optique, d~où le "babilJ,ement" du. ruisseau,

f

,

les "p]:eurs" du saule, le :'susurrement" du vent. 'C'est ce que

Gérard Bessette apP,elle le tr~~-sit).v~sme, , "phénorn~ne 'en vertu, duql)el un sujet qui éprouve

un'~

sensàtion ou un sentIment les

.' ... 1

l

tr'ansfère sur un 'obj et ,extérieur."

Chez :rhér {aul t,

~e~'

sen s ,]OUeFl t un

rÔl'~ pr,épondéi~ht,

" J •

. '\ ~

-dans la perception de la nà'ture qù:i renvoie avant tout aux

, ,

-

'

grands espa~es v~erges, aux ,paysages sauvages et majestueux.

~ .. 1 __ _

\.,

Rejetant la ville, i l chois~t' la toundra déserte, la forê~

,

mystérieuse ou l~ mer.farouçhe:pour don'rler assi~e à la

plu-par t de ses ré~l. ts, car' ce n'est qu'en ces' l,iéUX, Fr i~iJ,ég1.és'

... ~ j, ' . , .. , \ . , ..

que,

l~s,

sens. peuvent

percev~;Lr ~ans e~trave.

'La natur'e est pour Thériault .un être yivant qui se découvre 'à travers to~s les. sens. Combièn de foIs trouve-t-o'n' chez' lui des passages

,

où-le vent hurle, la forêt tremble ou le sole'il boit l'eau? H

Ce caract~ri humain de la" nature se déVQil~ souvent à traver~

l'ouie:

,

• 1

Et, dan"s l'air clair et 1~ matin "serti de bleD.,' d'or et de vert,"ils chant~rent·(.,,!) et'le

• - j ,

ruisseau de, la Gueus~' chan~a aVéc ~ux, et les

1

sapins,bru~ssants chantèrent avec eux, et tout le'beau Jour

c~anta ave~ ~ux.2

" \ l,

....

---f

J

:1

1

, , <7

!

j

!

'! ,

'

l

.,

.

,

(30)

,

-25

, '

Ailleurs, c'est la .dynamique des images vïsuelles qui est,'pri-',

vilegiée:

Le soleil cherchait â sauter la~longu~

bar-.... Q "--: '

rie~e là-bas, a l'est. Il y avait de~ r~yons qui voulaient surgir. La lumière'étâit'plus précise, et la brume dansait'maintenant s~r l~ rivière ("Le Cha . . 1; ' \

-

V':

E:, p'p. '105-106) .

.

... f

Il est rare que les s~nsatib~~ de la ~atur~.évoquées par ThériaL'!it n'aient pas qn'e ·significatüm 'sensuelle;

même,la-tente. 'Comme i l l'-'affi~me 'l'ui-même: "cè n'est pas av~c mes

sens que 'j' éèr is ma i,s avec' ma 'sensualité et c'est' infiniment ~ .

. ' ,3

. plus ~r;nportant. " Pre~ons' par exemple ce passage, du Dompteur

d'ours: lès noces de Roch Lerbel ont eu lieu par un matin qui

.

"cou1ait:sur la ni?ture comme un parfum de prix, gui étreignait

. ~es' fl,euis~

.

,qui valsa~~ sur les fat1;:es de, ffionta'gnes , qui ·était

~

.

.

,douX. et c9quet et, plein ,de ',chansons ,et. d'app~ls" (p. 139). On

~ t!,.

, .

voit bien, ,'oa!1s cette prOfusion de' sensation's, comment la,

'natu~e:reproduit les conditîons mepant à l'union charnelle: ,

,

. ,

lé 'pat~urn enyo6tarit de, ,la fia,ncée, l'é·t;.reinte des amoureux,

\

..

, ,

le;; dans'es et ·les, ~hans<?ns de' la f~te et "l" appel" qui clOt la soirée, appel de la chair et des s~ns~

, ' . ' ,

. ',Tou'Jours' ,est.:. i l ,que la 'plupqrt d~s sensations chez

. ' . ' ...

'l'héri.aul t sorit ,inva.ric3'blement:

a;~oéiées

,à 'diyers éléments,'

'do~

t· l·e

r,~tollt è'~nsti

tue

cle~

leîtmotnre' cl)argés. de significa-j:iQn .sen~'uellè. Il Y a 'ici entre

aut~es '~o'tifs'

la montagne,

(31)

. ,,\ ' , , , " 26 , , .,. ,

la terre, l,'eau et le' soleil. Chacun' de ces motifs revêt un

b

caractère spécifique et'continu à travers l'oeuvre de

l'écri--, , -,

vai.n, caractère qui reflète les 'rOles tradi ~~q,nJ;1els adoptés" par l~i~ Ainsi,on.verra la force et la brutalité masc~lines

-,

dans certaines symbolisation~ et_la_d9uc~ùr 'et la soumission

fém~nines dans.dJautre~. Thériault entre naturellement dans

le,s .. c~tégori~s 7'eçues' et le~ imag,es et les, fonctions habituel ...

san s détour s .

:

- -'L~ ~ontagne porte le plus souVIent chez Thériault les, valeurs de la femi:ne, ,et. plu~ précisément les vale.ur~.

mater--

, ,

nelles. ' Qu ',il, s'agisse d' un pic abru'pt. ou d" une, c61line, la

, '

'forme de la montagne est sa!1s" cesse rapprochée 'de celles .. de la

femm~ par l ' l'mage du sein qu.' elle" évoque. La Filié laide, coni-.

po'r't~ des pas~ages particulièrement révélateurs' à cet égard: .

, "

songeons

au

rêve d' Eq~ th, dans lequ'el Bernadet,te, fÈmtme 'll,lbr,i': que aux rondeurs suggestives, appa'ralt comme une géant,e Î'aux '

., ,

..

seins gros comme des pics de montagne", (p." 24) .' La montagne est plénitude" fém~~±ne'., Comme on le verra, dans le cha pi tre suivant,' la ,f"émme idéale ç:he.z Thériau~t possède .toujours·

2l:o-.

'

pulentes rondeurs; ses charmès

v~ennent

, • f 1 , ' de

'l'abondanc~

'dé

s~

.

.. chair. Dans. La Fille laide; le paysage, reflète cette idée:'

, ,

- Edith, fille de la plaine à la chair ma~gre, laide_~t f~asque,

"

ot '-.

J

, f 1 , l j 1 1 l 1

!

i

1

,

, }

l

i , , , \ .\ "(

l'

. ~ 1 1 • 1

1

1 • '1 l ' ,

(32)

\ l,

'.

" '

..

" 'in " 27 ,

'",'constate. ,que 'lès femmes de' la montagne sont grasses,

, ' .

"et, do~u-e's~: '(P.'·~"l') •.

'" , ; ~ .

" Mais si la monta'gne annonce les 'valeurs _féminines, eile

~ ~ .. 1 y

a~ssi "~ne

'dure maîtresse" (p. 108) 1

e/ige~nt

un labet:t'r

.- "

e-st

\ '

-ér~infant et une fi~élit€ absolue tout en donnant peu aux gens du hameau. J La plénitude nI est p~s da~~ la 'ri,chesse, des

l ,. .".

.. ,tI'" ~ , '.

te~res, -m~is dans ~es femmes el~es-mêmes. te hameau ne vït

,que' 'grâce à"

elle'~':

"tl nè reste 'd'orc

q~'e

,nos

·~emme!3,

'les femmes dù ·hameau.. Donc' lê hameau tl ,(p .. 1,08). POUI Fabien,

4 " \ . .

la montagne ëst la' femrr.ê,-~,ère·, . c~le qui donne vie. et qui npurxit.,'

rI

voit 'I.e. déva~eme~t des 'ea~x' printanières,

comme une sueùr qui, desCend le flànc de la grande femme-montagné / .• IIl~ la voi-[t]" comme U,ne femme,

~ont~g'n-e'.,_ ventr~

et s.ei!ls,', grandes cuis'ses et ja!tlbes. ( : .• ). temmé en son genre ( .... ) qui: S'ue après' le labeur du printemps, à'lors.-,qu 'elle .~ ,accouché

'oe

nouvelles' plantes .

,( •. ~) (p.'-'187),. . ' ,

" .. ~ ~""

'/ On cons~ate qu~. c,haque é'+ément de cette desdrlpt~on évoque

une'.~mag~ mate~hell'e:. la femme est définie par rapport

à

sa

"-

..

'" .

.

t ,. • ~

f,o~ctiôn de mè~e: ", ye!}tre el .sei~s 1 labeur, '. accou,cheme!l.t.

':Potir Fabi~t:l" ~a fécondité et la p~rpétuat'io~ -de la lignée sont

.

,

' , ' A,

. '. 'trouve lui au'ssi sis sur une montagne qui, quoique plus.

(33)

'\

-~~--

---

-

---o

-'

28

-modeste, 'est d'emblée chargée- d' qne image mammaire et sen-suelle.: "Trente maisons ,couvrant le sein rond que faisait

\ '

cett~ ~ontagne, un jeune et énorme sein pointé "vers Dieu en

!'

charn~l hommage" (po 12). ThériauÙ~ se permet i'ei une· pointe'

d'~lonie:\ le village

.refoulée 1 \non _vécue 0

\ ~ :

lusion à la divinité

1

.'

n'a rien de charnel, la sexualité y étant

La na ture se moque des villageois 0 L'

~ü'--s'encadre bien dans la conception générale dé la femme-nature' chez Thériault, tout au long de son oeuvre. bans Les Commettants de Caridad, la fille d'Alvarez, fatig~ée, se repose sur un monticule, ce

qqi

évoque l'image d'une es-trade ou, mieux, d'cin ~utel sur ~equel la fille s'offre.

L'image est repr~se 9a'ns "La L~u~re" (Rose) quand François fait , ,

.

asseoir la jeune,Indienne sur"un tert~e. Fille de la na~ure;

--,

Rita est compa~ée à la loutre, animal lisse et sensuel qui l , ~

,

mange en flottant - sur l'eau, le ventre exposé au soleil (Po; 34).

J

Assise sur le tertre, elle s'expose également aux forces mascu-lines du soleil.

La notion <le sustentat~on mammaire

se

're"trouve 'dans le même conte. Les collines y ressemblent à des mamelons, à

.

"deux miches de pain Il qui donnent au peup:\.e "la vie d'été"

, .

hautes montagnes , . ~ro'ndes, de hautes dollJ.n,es rondes aus~i, de '

mamelons' pelés,où se cultivent l"'avoine et le blé" (p, 25) 0 , \

..

(34)

" , , ,'f ) "

.

.

~"---~-29

Même au coeur de la viile, la colline continue de

repré-.

senter la mère nourricière. Dans Aaron, 'le Mont-Royal est'

décrit comme un

symbole de la sauvage grandeur du Canada. , Symbo~e des forêts immenses: des montagnes

du Nord, de cette mamelle féconde, nourri-cière des villes de béton, de p~astique et d'acier qui gîtent aux rives des lacs, au'

,coeur des plaines et le l,on'g des fJ.euves

(p. 62).

La ville est ra,chètée seulement grace à la présenèe

salva-tr ice de cette élévation.' Elfe 'encourage l'isolement et la'

solitude néces,~aires 'à 1, 'épanouissement d'·~~ron.

,

-Il Y

en-tretient de grands rêyes, se pose de vastes questions sur son

avenir et sur sa .condi tion de Juif., Elle est aussi le lieu

, de l' appreritissag~,' car' Aaron va sur le Mont-Ro~al pour lire,.

Cependant, la montagne est avant tout 1,e lieu de 'son 'éveil

sexuel avec la jeune fille ,qu'il y rencontre,' Viedna. ,

.

Elle le mène dans"un p~tif vallon où"il fait plus chaud et où l'on est plus tranquille. 'L:image ~aternelle ~~ renforce, ca~ ils y sont à l' abri ~es brui ts de la ville, pro,tégés du danger. Pour Aar6n, la montagn~ est "une oasls" (~. 79), ~ cause: de la

prés~nce:rafra!chis$ante de Viedna. 'L'image du retour au sein,

maternel protecteur, dont parle Bessett~, se précise à

l~'lu-,

m~ère de la scène suivante: "Dans un repli, "dans, un vallon: creux et discret, ils s'étendaient dans l'herbe. C'était tout

(35)

30

chauffé de solé!l, un did prêt à 'les abriter" (p. 80). Gr~ce

à ces valeurs d~ protection féminine·, la montagne, signifie non

, '

seulement le refuge, mais aussi l~ lieu de la ~éflexion ~t de

la découverte de soi et de la sexualité.

L'image maternelle de la montagne ~st reprise dans

Agaguk, quoique de façon moins év~dente: sur la toundra, la

montagne. est ré-duite à un mon'ticulei parvenu à l'âge d'homme,

Agag~k y constiuit son pr~mier, abri: Au milieu d'un paysage·

, ,

désolé, 'a~ide et rocailleux, il choisit ce poïnt élevé qui lui

permettra de domine~ le te~r~toire, et lnvestit par le fait

même un symbole nourr iüler. C'est grace aux va~eur s de la

,

.

--,femme qu'il ,maîtrisera, la tound~a et qu'il en tirera sa

sub-sistarice. ,Ce n'est pa s. par ha sard qu'Ir iook aper'çoi t un car

i-'bou derrière un mam~lori de' neige" (p. 212). Bien' que ce soit

, • • 1 l'homme qui chasse, la survie e'st plu's d'une foi$' assurée par

la "femme. Ce symbole sera concrétisé plus tard lor squ 'Ir iook

app~end à Agaguk l'importancè d'un partage égal entre la femme et l ' homme,.

Cepend.ant, tout n'est pas que dimenslon sensuelle et

,maternelle'dans le motif de la' montagne~ Il y es't parfois

~attaché une connotation sexuelle franche et directe. Dans "La gille' Eva" (Valère), la sexualité latente de la vieille

fille .de'sséchée est comparée à "de sombres volcans aux laves

. \.

.'

I _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ ---'-_ _ _ _ ~ ---~~~---~~~--" \ \

1

f

1

(36)

31

toujours prêtes _à, déborder du' cr'a-tère~' ~p. 257);' Ceux qui conquièrent la montagne ont également droit· à la conqu.ête

l'

sexuelle: Il,Les escal'adeuis,d'Himalaya, dit, le vieux Teodoro de ~otre village, et les tombeurs de chastes veuves se-res-semblent fort" (C:C., p __ 14) _ Dans Le Haut- Pa'ys, les trois initiés' auront une épreuve ultime à affronter avant de pou- ' voir accéder non seulement à la connaissance suprême du monde

o '

parallèle, mais aussi à la révélation sexuelle au se~s litté-• raI. ~ette épreuve prend la forme d'une pénible escalade.

Une fois au sommet, ils sont accueillis pa+ trois chèvres blondes "aux 'grands yeux caressants" (p. 108), récompense hautement symbolique, comme nous le verrons plus bas.

Bien que la montagne porte SOuvent symbole de"la

fémi--,1

ni té chez ,Thér iaù~,t (de la femme et de la mère)" elle ,n f est

pas le se71l élément de' la na ture dal'rS" ce cas. La terre, quoique moins sensqelle qué la montagne aux rondeurs mam-maîres et aux flancs humidès, signifie ,également le pouvoir nourricier. Tout comme la montagne "allaite" l'homme; la tefre le no~rr~t af~n d'assurer sa survie. L'expression la plus frappante du rôle de ~a terre maternelle se trouve dans la première oeuvre de Tnériault, Contes pour un homme seul. Dans ",Simon-la-main-gourde", la terre "accouche de, beau blé"

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