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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Démarches et outils pour traiter une question d'actualité scientifique au lycée : le réchauffement climatique

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Academic year: 2021

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DÉMARCHES ET OUTILS POUR TRAITER UNE QUESTION

D’ACTUALITÉ AU LYCÉE : LE RÉCHAUFFEMENT

CLIMATIQUE

Jacques BARRÈRE(1) – Michèle PRIEUR(1) – Éric SANCHEZ(2)

(1) Équipe ACCES, (2) Équipe EducTice, INRP, Lyon.

Mots-clefs : RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE – IMPACTS ANTHROPIQUES – CYCLE

DU CARBONE – MODÉLISATION – SIMULATION

RÉSUMÉ : Considéré comme un enjeu majeur qui interpelle les pratiques sociales et très

largement médiatisé, le réchauffement climatique fait partie des questions qualifiées de « socialement vives ». Notre étude vise à examiner comment un travail d’investigation fondé sur la modélisation et la simulation numérique peut permettre à des lycéens de comprendre les démarches et les arguments qui fondent les prévisions climatiques mais aussi l’origine des incertitudes et des interrogations qui subsistent.

ABSTRACT : The climate change is a socio-scientific issue which is widely highlighted by media.

Our study aims at studying how a work based on scientific inquiry, modelling and simulating can help secondary school students to understand the procedures and the arguments of the climate predictions and why doubts and questions remain.

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1. INTRODUCTION

L’évolution probable du climat et les modèles climatiques sont largement débattus au sein de la communauté scientifique. Dès lors, comment l’enseignant de sciences peut-il aborder cette question avec ses élèves ? Comment peut-il éviter les pièges du dogmatisme et du relativisme ? Comment peut-il faire comprendre la nature du débat qui se noue dans la communauté scientifique ? Nous présentons ici une ingénierie didactique qui constitue un ensemble de propositions pour la classe.

2. LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE : ENJEUX ET DÉMARCHES

2.1 Le réchauffement climatique, une question socialement vive

Le réchauffement climatique fait partie des questions qualifiées de « socialement vives » (Legardez 2003). C’est une question vive dans la société car, considérée comme globalement importante, elle interpelle les pratiques sociales et subit un large traitement médiatique. Elle est également vive dans les savoirs de référence du fait des débats qui subsistent entre spécialistes. Depuis 2000, cette question est intégrée dans les programmes de sciences de la vie et de la Terre : l’évolution de la composition de l’atmosphère et la stabilité des enveloppes de la Terre en classe de seconde (BO 12 août 1999), les climats passés et futurs en classe de terminale S spécialité (BO 30 août 2001). En 2007, en collège, le socle commun des connaissances (BO 19 avril 2007) inscrit plus globalement cette question dans une problématique de développement durable pour la planète.

2.2 Modéliser, simuler pour comprendre

Les démarches qui fondent les prévisions climatiques sont basées sur la modélisation et la simulation. Les modèles sont des instruments pour penser et comprendre un monde trop complexe pour être appréhendé directement (voir par exemple Bunge 1998). Lorsque ce modèle peut-être traduit dans un formalisme mathématique, l’élaboration d’un environnement de simulation permet de confronter le modèle au réel pour l’éprouver, déterminer ses limites ou établir des prévisions. D’un point de vue épistémologique, la modélisation et la simulation s’inscrivent dans le cadre d’une démarche d’investigation scientifique (Halloun 2007).

La place de la simulation dans l’enseignement est un domaine relativement peu exploré par la recherche. Certains travaux montrent que les enseignants de sciences considèrent les modèles comme des représentations simplifiées de la réalité et mentionnent rarement leur caractère prédictif (Van Driel 1999). D’autres travaux soulignent que cette fonction des modèles est peu exploitée dans

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explicite et la simulation a pour fonction de représenter des faits, elle permet alors de visualiser certains phénomènes et la nature du modèle sous-jacent n’est pas explicite (Beaufils 2001).

Nos travaux ont pour objectif de déterminer les conditions à mettre en place dans la classe pour que les élèves s’engagent dans des activités de modélisation et de simulation de manière autonome. Nos propositions portent d’une part sur l'explicitation du modèle en jeu et du formalisme utilisé pour le représenter et d’autre part sur l’instrumentation du travail d’investigation à l’aide d’un logiciel de modélisation et de simulation. Nos travaux visent à proposer des situations de classe qui permettent aux élèves de comprendre les démarches et les arguments qui fondent les prévisions climatiques mais aussi l’origine des incertitudes et des interrogations qui subsistent.

3. DESCRIPTION DES SÉANCES

3.1 Formuler le problème et motiver les élèves

Notre étude effectuée en classe de seconde, porte sur la température globale de la Terre. Les informations fournies par la banque de données de la NOAA montrent une augmentation de presque 1°C au cours du XXe siècle qui inquiète les scientifiques par son amplitude et sa rapidité (figure 1). Un large consensus incrimine l’augmentation de la concentration atmosphérique en CO2 (figure 2).

La chronologie de cette augmentation pourrait être compatible avec la chronologie de l’utilisation des combustibles fossiles.

Le problème suivant est alors formulé avec les élèves : « L’Homme serait-il responsable de l’augmentation des gaz à effet de serre (GES) ? La combustion des carburants fossiles depuis le début de la révolution industrielle pourrait-elle expliquer le réchauffement climatique observé ? »

3.2 Faire émerger les conceptions pour construire un modèle simplifié

On demande aux élèves de répondre à la question « Où va le CO2 d’origine anthropique ? ». Les

productions des élèves présentent une grande diversité mais les notions d’atmosphère et d’un flux anthropique entrant dans l’atmosphère sont largement partagées. Certaines d’entre elles présentent des flux supplémentaires entre l’atmosphère et la biosphère, ou/et l’atmosphère et l’océan, plus rarement vers l’espace. Il est alors proposé aux élèves de construire un modèle numérique de l’enrichissement de l’atmosphère en CO2 au cours du temps de façon à pouvoir par la suite

envisager les conséquences de cet enrichissement sur le climat. Une discussion collective permet de faire le choix de construire un modèle simplifié à un compartiment, l’atmosphère, et un flux, les émissions anthropiques, correspondant aux éléments du modèle qui fait consensus dans la classe.

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Figure 1 : Les températures globales de la planète Terre fournies par la NOAA.

Figure 2 : Les carottes de glace de l’Antarctique (Taylordome et Lawdome) montrent que la concentration atmosphérique en CO2 a peu varié autour de 280 ppmv depuis 2000 ans mais depuis

1860 on assiste à une augmentation exponentielle du CO2. Cette augmentation est

confirmée par les mesures directes effectuées par le réseau WCDGG, la station du Mauna Loa notamment.

Figure 3 : Modèles construits dans Vensim

Figure 3a : Ce modèle repose sur l’hypothèse d’un compartiment atmosphérique fermé. Figure 3b : Ce modèle ajoute un flux de 31 Gt de C quittant l’atmosphère entre 1991 et 2001

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Pour construire son modèle, l’élève va devoir le paramétrer en exploitant les données fournies par les chercheurs. À partir de la banque WCDGG il détermine la quantité de carbone présent dans l’atmosphère à l’instant initial, à partir de celle de l’University of North Dakota il détermine la valeur du flux anthropique pour la période étudiée. L’élève construit alors son modèle simple à un compartiment et un flux à l’aide du logiciel VensimPLE (gratuit dans sa version de base).

3.3. Simuler pour éprouver le modèle construit

Les élèves simulent et comparent les valeurs mesurées sur le terrain (courbe bleue) aux valeurs calculées par le modèle (courbe rouge) (figure 3-a). Ils constatent que les émissions anthropiques sont plus que suffisantes pour expliquer l’augmentation du CO2 atmosphérique ce qui conforte

l’hypothèse d’une relation avec les activités humaines. Toutefois le modèle n’est pas satisfaisant. Tout le carbone émis par l’Homme ne se retrouve pas dans l’atmosphère, une partie a disparu. Les élèves identifient de nouvelles nécessités que doit remplir le modèle et le modifient pour qu’il tienne compte des résultats de la simulation. Cette modification consiste dans l’ajout d’un flux correspondant à une fuite vers un compartiment que l’on appellera puits (figure 3-b).

3.4 Manipuler le réel pour identifier les caractéristiques du modèle

Les productions initiales à la question « Où va le CO2 d’origine anthropique ? » de certains élèves

permettent d’examiner deux compartiments candidats aux fuites de CO2, soit une fuite vers les

végétaux chlorophylliens, soit vers les océans. L’étude des flux existant entre les différents compartiments et les concepts biologiques et physico-chimiques sous jacents sont réalisés au travers d’activités de travaux pratiques. Des travaux de laboratoire, notamment des expériences assistées par ordinateur permettent de mesurer des échanges de CO2 entre l’air et l’eau d’une part, entre l’air

et le vivant d’autre part. L’exploitation des mesures effectuées par les chercheurs et disponibles dans les banques de données rend possible des études à l’échelle de l’écosystème.

3.5 Simuler pour prévoir

On propose alors d’exploiter un modèle de chercheur (figure 4) pour comprendre le climat actuel et prévoir le climat futur. En mode simulation, les élèves testent les différentes hypothèses, fuite de carbone vers l’océan, fuite vers la biosphère. Le modèle va aussi leur permettre de tester différentes situations environnementales mettant en cause certains facteurs aggravants comme la déforestation ou les incendies climatiques. Il pourra également évaluer l’impact des mesures d’atténuation préconisées par le protocole de Kyoto, comme la réduction des émissions de CO2 ou la

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de tester les différents scénarios socio-économiques du GIEC calculant les climats possibles pour le XXIe siècle.

Figure 4 : La simulation effectuée avec le modèle complet permet de calculer l’évolution du carbone atmosphérique et de la température globale de 1780 à 2000 et de les comparer au réel.

Ces résultats confortent l’hypothèse :

« l’Homme pourrait bien être le responsable du réchauffement climatique actuel ».

4. UNE PREMIÈRE ANALYSE DU DISPOSITIF D’ENSEIGNEMENT

4.1 La modélisation et la simulation pour traiter la question du réchauffement climatique

Le travail initial sur un modèle très simplifié participe à l’appropriation des caractéristiques d’un modèle à compartiments par les élèves : ils identifient les réservoirs, les flux, la variable, le

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Le travail sur le réel, activités de laboratoire et interrogation des banques de données, permet de caractériser les mécanismes impliqués dans les différents flux et nourrit le travail de modélisation numérique. Ce travail initial est nécessaire pour que les élèves puissent, par la suite, comprendre le formalisme des modèles complexes du chercheur. Il évite également que ces modèles n’apparaissent comme des boîtes noires.

Dans le cadre de ces activités, la simulation a plusieurs fonctions. Elle permet de visualiser, sous forme de diagrammes et de graphes les phénomènes impliqués. Elle permet également de prévoir le comportement du système modélisé. Elle permet enfin d’éprouver le modèle. La confrontation des valeurs calculées par le modèle aux valeurs mesurées sur le terrain permet de constater un écart entre ces valeurs. L’élève est alors conduit à identifier de nouvelles nécessités du modèle, c’est-à-dire les caractéristiques qu’il doit posséder pour répondre au problème. La modélisation est alors un processus itératif guidé par les résultats de la simulation.

Ces activités rendent au modèle son statut d’instrument pour l’investigation scientifique, il est alors un outil pour comprendre, expliquer le climat du passé et prévoir le climat du futur. Une telle démarche permet dans le cadre de l’enseignement d’une question socialement vive d’éviter les pièges d’un point de vue normatif qui dirait la vérité et d’un point de vue relativiste qui ne ferait pas la distinction entre les opinions et les savoirs.

4.2 Des difficultés pédagogiques, conceptuelles et de raisonnement

Des difficultés d’ordre pédagogique se sont posées pour l’organisation de ces séances : travail en co-disciplinarité articulant l’enseignement de physique-chimie et celui des sciences de la vie et de la Terre, complexité des outils informatiques ou encore temps nécessaire pour conduire des situations qui laissent le temps de la réflexion et de l’autonomie des élèves. D’autres difficultés relèvent des concepts utilisés. Il s’agit en partie de la complexité du thème étudié qui mobilise des concepts de différentes disciplines. Il s’agit également des difficultés liées au formalisme utilisé pour décrire un modèle à compartiment. Par ailleurs, certains modes de raisonnement sont difficiles à mettre en œuvre par les élèves. On note en particulier les difficultés qu’ont les élèves pour passer d’une représentation symbolique qui raconte une histoire et dans laquelle les objets sont représentés à une modélisation formelle. On retient aussi les réticences des élèves à remettre en cause un modèle qu’ils ont construit bien qu’il soit invalidé par les résultats de la simulation. Ce n’est le plus souvent qu’après avoir interrogé les modalités techniques de leur travail ou l’exactitude des valeurs nécessaires au paramétrage du modèle que ceux-ci acceptent de modifier leur modèle.

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5. CONCLUSION

Il nous paraît important de construire, pour l’enseignement des sciences, des situations dans lesquelles les élèves sont amenés à modéliser. Nous escomptons en effet que l’engagement des élèves dans un travail d’investigation scientifique fondé sur la modélisation et la simulation les conduira à comprendre les démarches et les arguments qui fondent les prévisions climatiques mais aussi l’origine des incertitudes et des interrogations qui subsistent.

BIBLIOGRAPHIE

Barrere J., Lhuillier Th. (à paraître). Modélisation du cycle du carbone et impacts climatiques, Bulletin de l’APBG, N° 3-2007

Beaufils D. (2001). Expérimentation d'une utilisation de logiciels de simulation en physique : analyse théorique, http://formation.etud.u-psud.fr/didasco/RapSimIufm/AnalyseTh.htm.

Bunge M., (1975). Philosophie de la physique. Éditions du Seuil, Paris.

Halloun I. (2007). Mediated Modeling in Science Education. Science & Education, 7-8, 653-697. Legardez, A. (2003). L'enseignement de questions sociales et historiques socialement vives. Le

Cartable de Clio n° 3, Lausanne, 245-253

Sanchez E., Prieur M. Fontanieu V. (à paraître) Modèles et modélisation dans l’enseignement des sciences de la Terre au lycée : Points de vue et pratiques d’enseignants. Ve rencontres de l’ARDIST.

Van Driel J., Verloop N. (1999). « Teacher’s knowledge of models and modelling in science ». International Journal of Science Education, 11, 1141-1153.

Figure

Figure 3 : Modèles construits dans Vensim
Figure 4 : La simulation effectuée avec le modèle complet permet de calculer l’évolution  du carbone atmosphérique et de la température globale de 1780 à 2000 et de les comparer au réel

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