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L'inertie thérapeutique dans la prise en charge de l'hypertension artérielle : inertie réelle ou abstention appropriée ?

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

UNIVERSITE DE PICARDIE JULES VERNE

FACULTE DE MEDECINE D'AMIENS

Année 2015

N° 2015-69

L'INERTIE THERAPEUTIQUE DANS LA PRISE EN CHARGE

DE L'HYPERTENSION ARTERIELLE:

INERTIE REELLE OU ABSTENTION APPROPRIEE ?

______________________

THESE

POUR LE DOCTORAT EN MEDECINE

Diplôme d'Etat

Médecine Générale

Par Thomas FREMEAUX

Né le 22 mars 1987

Présentée et soutenue publiquement le 24 juin 2015

______________________

Président du jury: Monsieur le Professeur Christophe TRIBOUILLOY

Membres du jury: Monsieur le Professeur Kaïss LASSOUED Monsieur le Professeur Giampiero BRICCA Madame la Professeure Colette DUFOUR Monsieur le Docteur Jean SCHMIDT

Directeur de thèse: Madame le Docteur Catherine SZYMANSKI

(2)

2 A mon président de jury,

Monsieur le Professeur Christophe TRIBOUILLOY

Professeur des Universités - Praticien Hospitalier (Cardiologie)

Chef du service de Cardiologie

Chef du Pôle "Cœur-Thorax-Vaisseaux"

J'ai débuté mon internat dans votre service et j'en ai gardé de très bons souvenirs. Grâce à vos qualités pédagogiques, j'ai pu acquérir de solides bases en cardiologie. Vous me faites l'honneur aujourd'hui de présider le jury de cette thèse.

(3)

3 A mon juge,

Monsieur le Professeur Kaïss LASSOUED

Professeur des Universités - Praticien Hospitalier (Immunologie)

Pôle "Biologie, pharmacie et santé des populations"

Je vous remercie pour avoir spontanément accepté de faire partie de ce jury.

Vous me faites l'honneur d'évaluer cette thèse.

(4)

4 A mon juge,

Monsieur le Professeur Giampiero BRICCA

Professeur des Universités - Praticien Hospitalier Pharmacologie clinique

Je vous remercie pour l'intérêt que vous avez immédiatement porté à ce sujet.

Vous me faites l'honneur de juger ce travail.

Veuillez trouver l'expression de mes sincères remerciements ainsi que toute ma reconnaissance.

(5)

5 A mon juge,

Madame la Professeure Colette DUFOUR

Professeure des Universités - Médecin généraliste (Médecine Générale)

Coordonnateur du Département de Médecine générale

Sans vos précieux conseils ce travail n'aurait pas été possible.

Vous vous êtes toujours montrée disponible pour l'élaboration du projet et je vous en suis très reconnaissant.

Vous me faites l'honneur de participer à cette thèse.

(6)

6 A mon juge,

Monsieur le Docteur Jean SCHMIDT

Maître de Conférences des Universités - Praticien Hospitalier Médecine Interne

Vous me faites l'honneur de participer à ce jury de thèse et je vous en suis très reconnaissant.

(7)

7 A mon directeur de thèse,

Madame le Docteur Catherine SZYMANSKI

Maître de Conférences des Universités - Praticien Hospitalier Cardiologie

Je te remercie d'avoir eu un intérêt profond pour ce sujet et ce fut un réel plaisir de travailler avec toi. Tu as eu le courage de supporter mes moments de doute et de m'encourager.

Ta présence et ta disponibilité m'ont été précieuses. Ton exigence et ton souci du détail m'ont incité à approfondir ma réflexion.

C'est un honneur que tu fasses partie de ce jury de thèse.

(8)

8 Remerciements

- A ma femme Lucie,

Nous nous sommes rencontrés sur les bancs de la faculté de médecine et depuis nous vivons les plus beaux moments ensemble. Tu as toujours été présente pour me soutenir et m'encourager au cours de ces longues années d'études. Tu as eu également le mérite de me supporter dans mes moments de doute et de stress lors de la réalisation de ce travail.

Merci mille fois.

- A mon futur petit prince,

Ta maman et moi t'attendons avec impatience...

- A mes parents,

Je vous remercie pour votre confiance que vous avez eu en moi depuis le début de ces années de médecine. Vous avez toujours été présents pour me soutenir et je vous en suis très reconnaissant. Vous êtes des parents au top!

- A ma sœur Caroline et mon beau-frère Stéphane,

Pour votre soutien et les futurs bons moments à vivre ensemble.

- A ma grand-mère et ma tante

Vous avez toujours porté un intérêt à me soutenir dans mes études et je vous en remercie. Recevez toutes les deux mon profond respect.

- A mes papys,

Une énorme pensée pour vous. J'aurais tant aimé que vous soyez présents ce jour. De là-haut, j'espère que vous êtes fiers de votre petit-fils.

- A ma belle-famille,

Je vous remercie de m'avoir toujours accueilli dans la joie et la bonne humeur. Pour vos encouragements au cours de ces années.

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9 - A Julien, Jean-Baptiste, Clément, Romain, Audrey, Olivier, Kathleen, Ludovic, Pauline, Amandine, Charles, Richard et Marine,

Pour votre amitié...

- Au Docteur Gérard Boulfroy,

Pour tes conseils avisés dans la pratique de la médecine générale. Tu m'as accompagné avec bienveillance dans mes premiers pas en médecine libérale. Merci pour ton écoute, ta disponibilité et ta bonne humeur.

- Au Docteur Philippe Bury,

Je sais que vous auriez été ravi de venir à ma soutenance mais la vie en a décidé autrement. Vous avez été mon modèle. Pour toutes ces années où vous m'avez soigné en tant que médecin de famille, merci...

(10)

10 ABREVIATIONS

HTA: hypertension artérielle IT: inertie thérapeutique

Score IT: score d'inertie thérapeutique PA: pression artérielle

PAS: pression artérielle systolique PAD: pression artérielle diastolique

IEC: inhibiteurs de l'enzyme de conversion

ARAII: antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II SFHTA: Société française d'hypertension artérielle

CFLHTA: Comité français de lutte contre l'hypertension artérielle EBM: Evidence-based-medicine

AVC: Accident vasculaire cérébral

FDRCV: Facteurs de risque cardiovasculaire. DPC: Développement Professionnel Continu. MSU: Maître de stage Universitaire

MAPA: Mesure ambulatoire de pression artérielle AMT: Automesure tensionnelle

(11)

11

TABLE DES MATIERES

1 INTRODUCTION ... 14

2 ETAT DES LIEUX... 15

2.1 Focus sur l'hypertension artérielle en soins primaires. ... 15

2.1.1 L'hypertension artérielle: un facteur de risque cardiovasculaire ... 15

2.1.2 L'étude Mona Lisa ... 16

2.1.3 L'étude FLAHS 2014 ... 16

2.1.4 Le registre PASSAGE ... 17

2.2 L'inertie thérapeutique ... 18

2.2.1 Définition et affinement du concept dans la littérature ... 18

2.2.2 L'inertie: incidence, facteurs et enjeux dans la prise en charge de l'HTA ... 19

3 MATERIEL ET METHODE ... 21 3.1 Type d'étude ... 21 3.2 Population étudiée ... 21 3.2.1 Description ... 21 3.2.2 Critères d'inclusion ... 21 3.2.3 Critères d'exclusion ... 22

3.3 Période et méthode de recueil des données ... 22

3.4 Architecture des questionnaires ... 22

3.4.1 Questionnaire d'étude de dossier médical ... 22

3.4.2 Questionnaire d'entretien au cabinet médical ... 23

3.5 Evaluation de l'inertie thérapeutique dans la prise en charge de l'HTA ... 23

3.5.1 Recommandations retenues pour définir une HTA non contrôlée ... 23

3.5.2 Définition de l'inertie thérapeutique retenue pour l'étude ... 23

3.5.3 Score d'inertie thérapeutique et raisons d'abstention retenues ... 24

3.6 Saisie et analyse des données ... 25

4 RESULTATS ... 26

(12)

12

4.1.1 Médecins généralistes du département de l'Oise ... 26

4.1.2 Population globale de patients hypertendus suivie en ambulatoire ... 27

4.2 Cibles de pression artérielle considérées par les médecins généralistes. ... 29

4.3 Taux d'inertie thérapeutique dans la population de médecins généralistes ... 30

4.3.1 Caractéristiques générales de la population de médecins généralistes. ... 30

4.3.2 Modes d'exercices ... 30

4.3.3 Score d'inertie thérapeutique ... 31

4.4 Etat des lieux des consultations ... 31

4.4.1 Caractéristiques de la population de patients soumise à l'inertie ... 31

4.4.2 Traitements antihypertenseurs et consultations soumises à l'inertie ... 35

4.4.3 Seuils de pression artérielle systolique et diastolique ... 36

4.4.4 Relevés de mesure ambulatoire de pression artérielle et/ou d'automesure tensionnelle ... 37

4.5 Inertie justifiée et raisons de l'abstention thérapeutique des médecins ... 37

4.5.1 Inertie justifiée et inertie non justifiée ... 37

4.5.2 Raisons de l'abstention thérapeutique des médecins généralistes ... 38

5 DISCUSSION ... 40

5.1 Discussion de la méthodologie ... 40

5.1.1 Type d'étude ... 40

5.1.2 Effectifs de médecins généralistes et de patients hypertendus ... 40

5.1.3 Modalités de recueil des données ... 41

5.2 Discussion des résultats ... 41

5.2.1 Population soumise à l'inertie ... 41

5.2.2 Influence de la thérapie anti-hypertensive ... 42

5.2.3 Inertie et seuils de PA systolique et diastolique ... 43

5.2.4 Taux d'inertie thérapeutique des médecins généralistes. ... 44

5.2.5 Abstention appropriée ou non du médecin ... 45

5.3 Définition de l'inertie thérapeutique dans la prise en charge de l'HTA ... 47

(13)

13

6 CONCLUSION ... 50

7 BIBLIOGRAPHIE ... 51

8 ANNEXES ... 55

8.1 Questionnaire d'étude de dossier du patient hypertendu connu ... 55

8.2 Questionnaire pour entretien avec le médecin généraliste ... 57

(14)

14 1 INTRODUCTION

La prise en charge de l’hypertension artérielle (HTA) a fait la preuve de son efficacité sur la réduction du risque cardiovasculaire et de la morbimortalité. Son contrôle et la prévention de ses complications sont des enjeux de santé publique. Malgré les recommandations, il persiste une proportion de patients traités dont la pression artérielle reste non contrôlée.

Ces situations sont fréquentes en médecine générale et certaines sont directement liées aux médecins quand ceux-ci n’instaurent ou n’augmentent pas le traitement de façon appropriée, c’est la notion d’inertie thérapeutique (IT).

C’est un concept récent (2004) qui reste méconnu des praticiens et qui s'intègre dans le concept initial d'inertie clinique. Elle représente un frein au bon contrôle de la pression artérielle (PA) avec des conséquences néfastes potentielles.

En effet, dans les études quantitatives, l'inertie est prise en compte à chaque fois que les chiffres de PA sont enregistrés au dessus des seuils définis par les dernières recommandations.

Or il est évident qu'il existe des situations cliniques qui n'autorisent pas l'intensification thérapeutique en présence de chiffres élevés, soit parce qu'une situation aigüe exige le maintien du niveau de PA soit parce qu'une douleur ou simplement un effet blouse blanche ne sont pas représentatifs du niveau de PA du patient. Ces situations ne sont pas prises en compte dans les analyses de données, majorant ainsi l'ampleur de l'inertie thérapeutique. Il devient dès lors intéressant d'explorer des déterminants plus précis de l'inertie thérapeutique, de façon à pouvoir nuancer cette notion qui à ce jour n'a pas de définition consensuelle.

L'objectif principal de notre étude a été d'évaluer le taux d'inertie thérapeutique dans la pratique des médecins généralistes libéraux exerçant dans le département de l'Oise, dans la prise en charge de l'HTA.

L'objectif secondaire a été de mettre en évidence les causes de cette inertie thérapeutique qui pour certains refléteraient plutôt une abstention thérapeutique justifiée du médecin généraliste, relativisant ainsi l'inertie réelle.

Pour répondre à ces objectifs, une étude a été réalisée sur le département de l'Oise en interrogeant les praticiens de médecine générale ainsi qu'en analysant les dossiers de leurs patients hypertendus en fonction des chiffres de PA sur plusieurs consultations.

(15)

15 2 ETAT DES LIEUX

2.1 Focus sur l'hypertension artérielle en soins primaires.

2.1.1 L'hypertension artérielle: un facteur de risque cardiovasculaire

L'HTA constitue l'un des principaux facteurs de risque cardiovasculaire. Elle augmente le risque d'accident vasculaire cérébral, de maladie coronaire, d'insuffisance cardiaque, d'insuffisance rénale et de troubles cognitifs. Elle a été à l'origine de 7 à 8 millions de décès dans le monde en 2011.

La méta-analyse de Lewington et al. a conclu à l'existence d'une augmentation du risque de décès cardiovasculaire proportionnelle à l'augmentation des chiffres de PA. Ce résultat n'est pas retrouvé pour des chiffres de PA en dessous de 115/75 mm Hg. En revanche, entre 40-69 ans, chaque majoration de 20 mm Hg de la pression artérielle systolique (PAS) ou de 10 mm Hg de la pression artérielle diastolique (PAD) entrainait un doublement du taux de décès par AVC ou par autre cause vasculaire [1]. Dans l'étude Framingham, il a été montré que le risque cardio-vasculaire était d'avantage lié à la pression systolique qu'à la pression diastolique [2]. La prévalence de l'HTA en France reste élevée, estimée à environ 12 millions de patients traités pour HTA [3]. D'autre part, l'HTA représente environ 15% des consultations en médecine générale [4]. De nombreuses recommandations de pratiques ont été publiées en France et dans le monde pour une conduite optimale du diagnostic, de la prise en charge thérapeutique ainsi que du suivi de l'HTA dans la population adulte [5-6-7].

Le seuil de PAS maximal toléré est de 139 mm Hg pour une prise de la PA réalisée au cabinet médical après 10 min de repos pour tous les patients, y compris chez les diabétiques (ce qui est différent des précédentes recommandations qui préconisaient un contrôle tensionnel plus strict dans la population des sujets diabétiques [8]) ou les patients présentant une maladie rénale avec protéinurie. Le seuil maximal toléré pour la PAD est de 89 mm Hg pour tous les patients.

Au-delà de 80 ans, en l'absence d'hypotension orthostatique, les objectifs sont moins stricts avec une PAS qui doit être inférieure à 150 mm Hg.

Le rythme de suivi en ambulatoire est de l'ordre d'une consultation tous les 3 à 6 mois si la PA est bien contrôlée.

En 2007, environ 20% des hypertendus connus n'étaient pas traités et environ 50% des hypertendus traités n'étaient pas contrôlés [9]. Pourtant, les dépenses liées au traitement de

(16)

16 l'HTA ont augmenté de 44% entre 2000 et 2008 [10]. Plusieurs enquêtes ont été réalisées dans le but d'évaluer la qualité du contrôle des patients hypertendus.

2.1.2 L'étude Mona Lisa

L'étude Mona Lisa (Monitoring National du Risque Artériel) [11] a été réalisée entre 2005 et 2007 dans la communauté urbaine de Lille, dans les départements du Bas-Rhin et de la Haute-Garonne. Le but de ce travail était d'évaluer la prévalence et les modalités de prise en charge de l'HTA en France. La population était représentée par les habitants âgés de 35 à 74 ans.

Figure 1: Tableau issu du BEH thématique 49-50 de décembre 2008

Dans cette étude, la prévalence de l'HTA restait élevée surtout chez les 65-74 ans (79.8% chez les hommes et 71.3% chez les femmes (p<0.0001)). Un traitement antihypertenseur était retrouvé dans 80% des cas avec le plus souvent une pluri-thérapie (53%) surtout chez les plus âgés (59%). Seuls 24% des hommes et 39% des femmes étaient bien contrôlés et ces taux semblaient diminuer avec le vieillissement.

2.1.3 L'étude FLAHS 2014

La dernière étude FLAHS (French League Against Hypertension Survey) d'octobre 2014 [12] réalisée par Kantar Health à la demande du comité français de lutte contre l'hypertension artérielle (CFLHTA), indiquait que plus de 30% des sujets de plus de 35 ans, étaient traités par un médicament antihypertenseur.

(17)

17 Une monothérapie était prescrite chez 45% de la population. Les antagonistes de l’angiotensine 2 (ARAII) étaient les plus fréquemment utilisés (35% des prescriptions) puis les bétabloquants (26%) et les IEC (19%).

Le nombre de sujets traités pour HTA n'a pas évolué depuis la dernière étude FLAHS de 2012. En 2014, moins d'un patient hypertendu traité sur deux avait une pression artérielle contrôlée en auto-mesure à domicile.

Ce chiffre est comparable à celui de 2007 en France, montrant qu'il n'y a pas eu d'amélioration de la prise en charge de l'HTA depuis 7 ans [13].

Figure 2: Usage des antihypertenseurs en 2014 (www.comitehta.org)

L'étude FLASH 2014 a suggéré qu'un trouble de la mémoire qui justifiait un bilan clinique était moins fréquent chez les sujets qui avaient une pression artérielle contrôlée.

D'ailleurs, Forette et al. avaient également démontré le rôle préventif du traitement antihypertenseur sur le risque de déclin cognitif et de démence [14].

2.1.4 Le registre PASSAGE

Cette enquête a été réalisée 1 an après la publication des nouvelles recommandations 2013 de la société française d'hypertension artérielle (SFHTA). Ce registre a confirmé que le

(18)

18 pourcentage de patients contrôlés en médecine générale, stagnait en France, contrairement à d'autres pays européens [15]. Seuls 54.4% des patients avaient une PA normalisée par le traitement.

En revanche, l'application d'un seuil spécifique moins strict pour les sujets de plus de 80 ans a permis d'atteindre un contrôle de PA satisfaisant chez 73% d'entre eux. D'après cette enquête, 54.5% des patients hypertendus non équilibrés n'étaient traités que par une monothérapie, 26% par une bithérapie et 13.8% par une trithérapie.

Le pourcentage élevé des patients non contrôlés sous monothérapie révélait une certaine inertie thérapeutique pour de nombreux médecins généralistes qui n'adaptaient pas toujours leurs prescriptions.

Dans une étude suédoise publiée en 2008, Midlöv et al. ont décrit que la plupart des praticiens acceptaient des niveaux de pressions artérielles plus élevés par rapport aux recommandations officielles avant d'envisager une introduction ou une majoration du traitement antihypertenseur. Un tiers d'entre eux évoquait l'âge élevé du patient pour justifier l'absence de modification thérapeutique [16].

2.2 L'inertie thérapeutique

2.2.1 Définition et affinement du concept dans la littérature

La première définition de l'inertie clinique a été proposée dans la littérature en 2001 dans l'article de Phillips et al. "Clinical Inertia" [17]. Ce concept était alors défini comme l'échec de la mise en œuvre de la part des médecins d'une démarche appropriée de diagnostic ou de soins (entreprendre ou renforcer un traitement) alors qu'ils connaissent les recommandations existantes et qu'ils disposent des moyens pour agir. La notion d'inertie clinique recouvre en fait 3 comportements distincts du praticien confronté à la prise en charge d'une maladie chronique. Le premier est la surestimation des soins prodigués, attitude très largement répandue chez les professionnels de santé. Le deuxième comportement évoqué est le recours à de mauvaises justifications ("soft reasons") pour ne pas intensifier le traitement. Enfin, on évoque le manque de connaissances des objectifs thérapeutiques [18-19] qui regroupe à la fois l'insuffisance de formation spécifique au concept d'objectif thérapeutique, et l'insuffisance de formation générale sur l'inertie thérapeutique.

En 2004, un article d'Andrade et al. évoquait "l'Inertie Thérapeutique" (IT) s'inscrivant dans le cadre plus large de "l'inertie clinique" [20].

(19)

19 En 2006, l'étude d'Okonofua et al. définissait l'IT dans l'HTA comme l'absence d'augmentation ou de modification du traitement médicamenteux antihypertenseur chez un patient non contrôlé lors d'une consultation [21]. Il convient donc de distinguer l'inertie clinique qui peut être imputée au système de soin dans sa globalité, au médecin généraliste ainsi qu'au patient lui-même, de l'inertie thérapeutique qui se réfère au médecin seul.

Certains auteurs dont O'Connor et al. ont décrit l'inertie clinique comme une erreur médicale pouvant être responsable d'effets indésirables, majorant ainsi le risque cardiovasculaire [22-23]. En revanche, d'autres études ont montré que cette attitude d'abstention thérapeutique pouvait être une démarche appropriée du médecin généraliste [24], notamment en terme de balance bénéfices-risques du traitement antihypertenseur. La réalité des chiffres de PA obtenus en consultation au cabinet médical peut également être discutée en fonction d'un éventuel "effet blouse blanche", ou d'une inobservance au traitement médicamenteux [25].

Pour Safford et al. le concept d'inertie thérapeutique doit être nuancé par celui "d'inaction ou d'abstention appropriée" car il peut exister, dans certaines situations précises, des raisons de ne pas intensifier un traitement antihypertenseur en raison de l'histoire, des antécédents, et du contexte social du patient [26].

2.2.2 L'inertie: incidence, facteurs et enjeux dans la prise en charge de l'HTA

L'inertie thérapeutique affecterait entre 60 et 90% des patients hypertendus non contrôlés. Sur la base des enquêtes nord-américaines NHANES (National Health and Nutrition Examination Survey), la prévalence de l'inertie thérapeutique dans l'HTA non contrôlée semble cependant diminuer progressivement, estimée à 88.7% pour la période 1988-1994 à 80.2% pour la période 2005-2008 [27].

Dans l'étude rétrospective de cohorte d'Okonofua et al. incluant 7253 patients ayant bénéficié d'au moins 4 visites médicales durant l'année, la pression artérielle n'était pas contrôlée dans 46% des cas avec une inertie thérapeutique retrouvée au cours des 86.4% des consultations concernées. Ainsi, à partir de cette étude, un score d'inertie thérapeutique (score d'IT) a été créé en utilisant la différence entre la fréquence de changements au niveau de la thérapie médicamenteuse attendue et celle observée.

Un score élevé correspondait donc à une plus grande IT. Le score IT en moyenne était de 0.44 ± 0.19 [21]. Une diminution de 50% des scores d'IT qui se traduirait par une intensification du traitement antihypertenseur lors d'environ 30% des consultations, augmenterait le contrôle de la pression artérielle de 45% à 65% sur une année. Cette étude a aussi montré que plus les

(20)

20 facteurs de risques cardiovasculaires étaient nombreux, plus l'IT augmentait. Pour Guthrie et al. l'inertie thérapeutique touchait entre 16 et 30% des consultations [28].

Selon Redon et al. certains patients hypertendus semblaient être plus volontiers associés à une inertie clinique (population âgée, HTA grade 1, monothérapie anti-hypertensive) [29].

L'étude DUO-HTA a montré un lien entre la motivation déclarée du médecin généraliste et le niveau de contrôle des chiffres de PA. Seulement 26.5% des praticiens s'estimaient motivés ou très motivés pour prendre en charge les patients hypertendus [30].

Concernant le seuil tensionnel, l'étude d’Oliveira et al. a retrouvé dans 30% des consultations avec inertie que la tolérance du praticien vis-à-vis de chiffres de PA élevés était la cause la plus fréquente d'absence de majoration du traitement (et donc d'IT) [31].

Outre le défaut de motivation, et des "soft reasons" (raisons trop simplistes pouvant justifier d'une abstention du médecin), certains auteurs justifient les défauts de prescriptions par des attitudes de soins réfléchies (en prenant en compte des facteurs psychosociaux et du contexte de consultation, justifiant la décision thérapeutique), c'est à dire en respectant les principes de l'Evidence-Based-Medicine (EBM) [32].

Safford et al. considéraient que dans 61.5% des cas, l'inaction sur l'HTA était appropriée, ce qui relativisait cette notion d'inertie.

Crowley et al. ont utilisé dans leur étude, des tensiomètres télémétriques. Ils ont conclu que l'absence de majoration du traitement antihypertenseur chez des patients ayant une HTA légèrement élevée initialement était une attitude appropriée, les mesures télémétriques postérieures étant correctes [33]. L'utilisation de l'auto-mesure tensionnelle (AMT) par le patient hypertendu, limitant ainsi le risque d'HTA "blouse blanche", a montré un effet positif sur l'inertie clinique [34-35].

La prévalence de l'HTA non contrôlée est encore élevée en France et dans le monde. Deux facteurs étiologiques comportementaux, l'un dépendant du patient (inobservance thérapeutique) et l'autre du médecin traitant (inertie thérapeutique) semblent jouer un rôle décisif dans ce mauvais contrôle de l'HTA.

Le véritable problème est de bien distinguer "l'inertie réelle" de l'inaction appropriée, et l'intérêt est de connaître la fréquence de cette véritable IT.

(21)

21 3 MATERIEL ET METHODE

3.1 Type d'étude

Il s'agissait d'une étude descriptive rétrospective réalisée dans le département de l'Oise.

3.2 Population étudiée

3.2.1 Description

Il s'agissait d'un échantillon de médecins généralistes libéraux et installés dans le département de l'Oise. L’URPS (Union Régionale des Professionnels de Santé) des médecins libéraux de Picardie ne pouvant nous sélectionner un échantillon à l’échelle départementale, les médecins ont été sélectionnés aléatoirement par tirage au sort selon la liste de référence consultable sur le site internet du conseil national de l'ordre des médecins (CNOM).

La proportion de médecins généralistes contactés par téléphone pour chaque secteur d'activité (milieux urbain, semi-rural et rural) était identique.

Via la participation à cette étude des médecins, les dossiers de leurs patients hypertendus connus ont pu être analysés.

3.2.2 Critères d'inclusion

Les médecins généralistes étaient inclus s'ils exerçaient une activité libérale à part entière. Il s'agissait exclusivement de médecins généralistes libéraux installés dans le département de l'Oise.

Pour chaque médecin généraliste, cinq dossiers de patients hypertendus connus et ayant bénéficié d'une consultation avec renouvellement d'ordonnance dans les 15 jours précédant le jour de l'inclusion dans l'étude ont été analysés. N'étaient inclus que les patients ayant une HTA évoluant depuis au moins un an.

(22)

22 3.2.3 Critères d'exclusion

N'étaient pas inclus dans l'étude les cardiologues libéraux, les angiologues ainsi que les médecins généralistes libéraux exerçant une activité mixte (médecine d'urgence, ostéopathie, médecine légale).

3.3 Période et méthode de recueil des données

L'étude s'est déroulée de fin juillet 2014 à fin février 2015.

Dans un premier temps, les médecins généralistes libéraux ont été contactés par téléphone, après sélection aléatoire dans l'annuaire téléphonique, afin de convenir d'un rendez-vous au cabinet médical pour pouvoir analyser les dossiers de leurs patients hypertendus. La durée moyenne de l'entretien était de 30 minutes.

L'entretien était donc divisé en 2 parties :

 La première partie était consacrée à l'étude des dossiers des patients hypertendus connus, en commençant par le dernier venu.

L'évaluation se faisait sur 4 consultations en rétrospectif.

 La deuxième partie était consacré à l'interrogatoire du médecin généraliste afin de recueillir les données le concernant et d'analyser sa prise en charge.

3.4 Architecture des questionnaires

Deux questionnaires ont été testés auprès de trois médecins généralistes du département de l'Oise, afin d’évaluer la bonne compréhension et la pertinence des questions mais aussi le temps nécessaire pour y répondre. Ces réponses obtenues n’ont pas été incluses dans les résultats de l’étude.

3.4.1 Questionnaire d'étude de dossier médical

Ce questionnaire était divisé en plusieurs parties et les réponses étaient de types binaires. Il se décomposait de cette manière:

(23)

23  Les premières parties concernaient les caractéristiques cliniques des patients inclus. Le dernier traitement antihypertenseur prescrit devait également figurer. L'intérêt était de connaître si le patient concerné avait une PAS et/ou une PAD normale(s).

 La dernière partie synthétisait l'état des lieux des 4 dernières consultations pour renouvellement d'ordonnance du patient hypertendu concerné.

S'il existait une PA supérieure aux seuils définis, la démarche thérapeutique du médecin généraliste était analysée.

3.4.2 Questionnaire d'entretien au cabinet médical

Hormis la question concernant les PA maximales tolérées, les questions étaient à réponses binaires.

Outre les caractéristiques du médecin généraliste dans la première partie du questionnaire, ce tableau (verso du questionnaire) avait pour but de déterminer chaque patient soumis à l'inertie, les raisons de l'abstention thérapeutique pour chaque consultation, si le médecin avait une justification. Les différentes raisons d'abstention étaient discutées lors de l'entretien au cabinet médical, en référence à l'étude de Safford et al.

3.5 Evaluation de l'inertie thérapeutique dans la prise en charge de l'HTA

3.5.1 Recommandations retenues pour définir une HTA non contrôlée

Cette étude s'est basée sur les dernières recommandations officielles de la société française d'hypertension artérielle, publiées en janvier 2013 et qui sont actuellement la référence [6].

3.5.2 Définition de l'inertie thérapeutique retenue pour l'étude

La définition d'inertie thérapeutique était celle définie par Okonofua et al. avec quelques précisions:

 Le seuil de PAS maximal toléré a été établi à 140 mm Hg. Le seuil maximal de PAD a été fixé à 90 mm Hg. Pour les patients âgés de plus de 80 ans, la PAS devait être inférieure à 150 mm Hg [6].

(24)

24  Pour toute consultation avec une valeur de PAS et/ou une valeur de PAD au dessus de ces seuils, et en l'absence de modification thérapeutique, on considérait qu'il existait une inertie thérapeutique.

 Le délai entre 2 consultations pour renouvellement d'ordonnance devait être d'au moins un mois. Le rythme moyen était d'une consultation tous les 3 mois soit 4 consultations annuelles.

 L'hypertension artérielle du patient devait évoluer depuis plus d'un an.

3.5.3 Score d'inertie thérapeutique et raisons d'abstention retenues

Pour le besoin de l'étude, nous avons utilisé un score d'inertie thérapeutique (score IT) en référence à l'étude d'Okonofua et al. Ce score a été calculé pour l'ensemble des 4 consultations des 205 patients, constituant la population de l'étude [21].

Ce score IT ou taux d'inertie thérapeutique s'obtenait en soustrayant le taux attendu de modification thérapeutique (en divisant le nombre de consultations où avait été observé une PA élevée par le nombre de consultations totales) par le taux observé de changement (en divisant le nombre de consultations où avait été observé une modification thérapeutique lorsqu'il y avait une PA élevée sur le nombre de consultations totales).

Ce score IT du médecin, était le résultat de la moyenne de l'ensemble des scores IT obtenus pour chaque patient hypertendus donné au cours des 4 consultations. Plus le score se rapprochait de 1 et plus le médecin était en inertie. La formule utilisée était la suivante:

La liste des raisons d'abstention thérapeutique du médecin généraliste a été établie selon l'étude de Safford et al.

Ces différents motifs d'abstention n'étaient énoncés au médecin généraliste, que s'il existait une inertie pour un patient hypertendu donné sur chaque consultation concernée afin de préciser au mieux les raisons de cette inertie.

(25)

25 3.6 Saisie et analyse des données

Après anonymisation des questionnaires, les données concernant le médecin généraliste interrogé, ainsi que les données issues du dossier médical (informatisé et/ou en papier) ont été analysées.

Pour l'ensemble des 4 consultations de chaque patient inclus, un contrôle des chiffres de PAS et de PAD a été réalisé entre ce que rapportait le médecin et ce qui était inscrit sur le dossier (informatique ou en papier) médical du patient.

L'analyse des données était faite sur le logiciel Microsoft Excel© pour Windows©.

Les résultats concernant les variables numériques ont été présentés en moyenne ± écart type. Les résultats concernant les variables qualitatives ont été présentés sous forme de pourcentage. Pour certaines variables, les comparaisons entre les groupes ont été réalisées

avec le test du 2 via le logiciel SPSS© version 20 (Statistical Package fort the Social

Sciences).

(26)

26 4 RESULTATS

4.1 Caractéristiques de l'échantillon

4.1.1 Médecins généralistes du département de l'Oise

Sur 120 médecins généralistes libéraux contactés par téléphone, 41 ont accepté de participer à l'étude.

Les hommes représentaient 63% (n=26) de l'effectif total, et les femmes 37% (n=15).

 Age des médecins:

L'âge moyen des médecins interrogés était de 50.8 ± 12 ans.

La tranche d'âge 50-59 ans a été la plus représentée à 34.1% (n=14) de la population totale de cet échantillon; 26.8% (n=11) appartenaient à la tranche d'âge 60-69 ans; 22% (n=9) étaient âgés de moins de 40 ans, et 17.1% (n=7) avaient un âge compris entre 40 et 49 ans.

 Secteur d'activité libérale:

(27)

27  Participation des médecins généralistes aux séances de développement professionnel

continu (DPC):

Parmi les 41 médecins inclus dans l'étude, 63.4% (n=26) participaient aux DPC.

 Proportion de maîtres de stage universitaires:

Dans l'échantillon, 34.1% (n=14) étaient maîtres de stage universitaire (MSU).

4.1.2 Population globale de patients hypertendus suivie en ambulatoire

Cinq dossiers de patients hypertendus connus étaient étudiés par médecin généraliste, 205 patients ont donc été inclus dans cette étude. Les caractéristiques globales des patients sont représentées dans le tableau suivant:

Caractéristiques Population globale de patients Age moyen (ans) 67 ±13

Homme 59% (n=121) Femme 41% (n=84) PAS moyenne (mm Hg) 137 ±11 PAD moyenne (mm Hg) 78 (±7) Tabagisme 20% (n=41) Age comme FDRCV 82.9% (n=170) Dyslipidémie 45.9% (n=94) Hérédité 7.8% (n=16) Diabète de type 2 26.8% (n=55) Alcoolisme 12.2% (n=25) Obésité/surpoids 33.2% (n=68) Sédentarité 43.4% (n=89) Coronaropathie 20% (n=41) Antécédent d'AVC 3.9% (n=8) Artériopathie 6.8% (n=14) Néphropathie 7.3% (n=15) Rétinopathie hypertensive 3.4% (n=7)

(28)

28  Durée d'évolution de l'HTA:

Trente-et-un (15.1%) patients avaient une durée d'évolution d'HTA inférieure à 5 ans, 46 (22.4%) entre 5 et 10 ans, et 128 (62.4%) avaient une HTA évoluant depuis plus de 10 ans.

Figure 4: Durée d'évolution de l'HTA de la population globale de patients

 Traitement antihypertenseur:

Figure 5: Répartition des patients selon le nombre de traitements antihypertenseurs prescrits lors de l'inclusion.

(29)

29 La proportion des différentes classes thérapeutiques anti-hypertensives est rapportée dans la figure suivante.

Figure 6: Différentes classes thérapeutiques prescrites indépendamment de leur association éventuelle

Concernant les associations:

En bithérapie, l'association "IEC+diurétiques" était la plus fréquente chez 11.2% (n=23); 10.2% (n=21) étaient sous "IEC+Inhibiteur calcique". 10.2% (n=21) avaient une trithérapie associant "IEC+diurétiques+inhibiteur calcique". 5% (n=11) des patients avaient une quadrithérapie associant "IEC+bétabloquants+inhibiteur calcique+diurétique".

4.2 Cibles de pression artérielle considérées par les médecins généralistes.

Les moyennes considérées comme le seuil à ne pas dépasser sur l'ensemble de la population de médecins ont été établies dans le tableau suivant.

Patient non diabétique ni insuffisant rénal Patient diabétique de type 2 Patient avec maladie rénale PAS moyenne (mm Hg) 139 ±6 131 ±6 130 ±6 PAD moyenne (mm Hg) 86 ±6 81 ±6 80 ±6 Tableau 2: Cibles maximales tolérées de PA dans la population de médecins généralistes

(30)

30 4.3 Taux d'inertie thérapeutique dans la population de médecins généralistes

4.3.1 Caractéristiques générales de la population de médecins généralistes.

L'inertie thérapeutique était présente chez 34.1% (n=14) des femmes médecins, et chez 63.4% (n=26) des hommes médecins (p=0.110).

Il n'a pas été non plus observé de différence significative entre les différentes tranches d'âges des médecins (p=0.775).

Il n'existait pas de différence significative ni selon le secteur d'activité (p=0.633), ni en fonction de la participation active aux séances de DPC (p=0.110) entre les médecins sans inertie et ceux avec inertie (53.7% (n=22) étaient en inertie et participaient aux DPC)

4.3.2 Modes d'exercices

 Activité hebdomadaire:

Cinq (12.2%) médecins réalisaient moins de 100 consultations par semaine, 26 (63.4%) entre 100 et 150, et 10 (24.4%) effectuaient plus de 150 consultations.

Il n'a pas été observé de différence significative (p=0.395) pour le nombre de consultations par semaine entre les médecins sans inertie et ceux avec inertie.

 Types de consultations:

Trente-quatre (83%) médecins avaient un mode d'exercice exclusif sur rendez-vous, un (2.4%) avait un mode d'exercice exclusif sans rendez-vous, et 6 (14.6%) avaient un mode d'exercice mixte.

Il n'y avait pas de différence significative (p=0.634) entre les 2 groupes "inertie" et "absence d'inertie" selon le mode de consultation.

(31)

31 4.3.3 Score d'inertie thérapeutique

Le score d'IT moyen était de 0.18 ± 0.12.

A l'issue de cette étude, sur l'ensemble des médecins inclus, le score IT individuel moyen variait de 0 à 0.45. 63.4% (n=26) des médecins avaient un score IT compris dans l'intervalle [0-0.20]. 34.1% (n=14) appartenaient à l'intervalle [0.21-0.40]. 1 seul médecin généraliste avait un score IT compris dans l'intervalle [0.41-0.60].

Le taux d'inertie dans la population de médecins était de 43% pour les PAS et/ou les PAD élevées (> 140 mm Hg pour la PAS et > 90 mm Hg pour la PAD)

4.4 Etat des lieux des consultations

Un total de 820 consultations a pu être analysé; 152 (18.5%) faisaient l'objet de l'inertie du médecin généraliste. Le taux d'inertie était évalué à 67% pour les patients non diabétiques et à 75% pour les diabétiques.

4.4.1 Caractéristiques de la population de patients soumise à l'inertie

Les caractéristiques cliniques entre les 2 populations sont présentées dans le tableau suivant.

(32)

32 Caractéristiques

Patients soumis à l'inertie (n=91; 44.4%)

Patients non soumis à l'inertie

(n=114; 55.6%)

Valeur de p

Age moyen (ans) 66.04 ±12.89 67 ±13 0.544

Homme 58.2% (n=53) 59.6% (n=68) 0.839 PAS moyenne (mm Hg) 155.52 ±12.20 131.80 ±7.24 <0.0001 PAD moyenne (mm Hg) 84.91 (±10.72) 75.17 ±5.74 <0.0001 Tabagisme 23.1% (n=21) 17.5% (n=20) 0.325 Age comme FDRCV 83.5% (n=76) 82.5% (n=94) 0.841 Dyslipidémie 41.8% (n=38) 49.1% (n=56) 0.293 Hérédité 7.7% (n=7) 7.9% (n=9) 0.957 Diabète de type 2 26.4% (n=24) 27.2% (n=31) 0.895 Alcoolisme 12.1% (n=11) 12.3% (n=14) 0.967 Obésité/surpoids 35.2% (n=32) 31.6% (n=36) 0.588 Sédentarité 50.5% (n=46) 21.0% (n=43) 0.066 Coronaropathie 20.9% (n=19) 19.03% (n=22) 0.779 Antécédent d'AVC 3.3% (n=3) 4.4% (n=5) 0.689 Artériopathie 7.7% (n=7) 6.1% (n=7) 0.662 Néphropathie 6.6% (n=6) 7.9% (n=9) 0.722 Rétinopathie 3.3% (n=3) 3.5% (n=4) 0.934

(33)

33  Durée d'évolution de l'HTA:

Figure 7: Durée d'évolution de l'HTA et existence de l'inertie

Il existait une différence significative selon la durée d'évolution de l'HTA (p=0.047).

 Population de patients soumise à l'inertie selon le nombre de consultations concernées:

Figure 8: Consultations et Inertie

Cette figure a permis de décrire la répartition des patients selon qu'une ou plusieurs consultations aient été soumises à l'inertie du médecin traitant. La proportion de patients sous inertie diminuait au fur et à mesure que le nombre de consultations augmentait (p < 0.0001).

(34)

34  Pour la catégorie des patients âgés de plus de 80 ans:

Figure 9: L'inertie selon l'appartenance ou non à la catégorie des patients de plus de 80 ans

Parmi l'échantillon de patients inclus, 18% (n=37) étaient âgés de plus de 80 ans.

Sur l'ensemble des consultations où il existait une PA hors norme, 45.9% d'entre elles étaient soumises à l'inertie du médecin pour la catégorie des plus de 80 ans, contre 74% pour le reste de la population (p<0.0001).

 Statut social et inertie:

26.8% (n=55) des patients étaient des actifs, 6.8% (n=14) étaient des sans emplois et 66.3% (n=136) étaient des retraités.

Il n'existait pas de différence significative entre les différents statuts sociaux et l'existence d'une inertie (p=0.585).

(35)

35 4.4.2 Traitements antihypertenseurs et consultations soumises à l'inertie

 Les proportions obtenues ont été établies après analyse des prescriptions médicamenteuses des 152 consultations sous inertie.

Figure 10: Proportions des thérapies anti-hypertensives selon l'inertie

 Dans le tableau suivant, sont répertoriés pour chaque consultation, la proportion du nombre de traitements prescrits pour la population sujette à l'inertie.

Monothérapie Bithérapie Trithérapie Quadrithérapie > 4 p Consultation n°1 38.9% (n=14) 8.3% (n=3) 27.8% (n=10) 19.4% (n=7) 5.6% (n=2) 0.009 Consultation n°2 32.1% (n=9) 17.9% (n=5) 17.9% (n=5) 10.7% (n=3) 21.4% (n=6) 0.007 Consultation n°3 26.2% (n=11) 21.4% (n=9) 26.2% (n=11) 19% (n=8) 7.1% (n=3) 0.018 Consultation n°4 26.1% (n=12) 37% (n=17) 17.4% (n=8) 15.2% (n=7) 4.3% (n=2) 0.016

Tableau 4: Proportions des thérapies anti-hypertensives par consultation dans la population sujette à l'inertie

(36)

36 4.4.3 Seuils de pression artérielle systolique et diastolique

 Pour la PAS:

Figure 11: Différents seuils de PAS selon l'inertie

L'inertie était mise en évidence pour 155 ± 12 mm Hg de PAS (p<0.0001).

 Pour la PAD:

Figure 12: Différents seuils de PAD selon l'inertie

(37)

37 4.4.4 Relevés de mesure ambulatoire de pression artérielle et/ou

d'automesure tensionnelle

Sur les 820 consultations analysées, seulement 2% (n=13) ont fait l'objet d'un relevé de MAPA et/ou d'AMT sur les 4 consultations étudiées. 92.3% (n=12) étaient réalisés chez des sujets non soumis à l'inertie. Un seul relevé a été identifié dans la catégorie des patients soumis à l'inertie soit 7.7% des relevés totaux (NS).

4.5 Inertie justifiée et raisons de l'abstention thérapeutique des médecins

4.5.1 Inertie justifiée et inertie non justifiée

Parmi les 152 consultations (18.5%) soumises à l'inertie, il était important de distinguer une inertie justifiée par le médecin d'une inertie non justifiée. En ce sens, il a été observé que 107 consultations étaient "justifiées" versus 45 consultations sans justification du médecin.

(38)

38 4.5.2 Raisons de l'abstention thérapeutique des médecins généralistes

D'après l'étude de Safford et al. il a été extrait plusieurs raisons d'abstention thérapeutique qui étaient considérées comme les plus pertinentes pouvant ainsi relativiser la notion d'inertie thérapeutique. Certaines sont liées au médecin et d'autres au patient. Pour chaque consultation étudiée et pour chaque patient, chaque justification a été extraite des questionnaires afin de déterminer les proportions de chaque item (représentées dans la figure suivante). Sur les 107 consultations justifiées, 183 justifications ont été extraites du tableau.

Les autres raisons étaient le refus de la part du patient de consulter le cardiologue (chez un patient), la consommation régulière de réglisse chez un autre patient, et enfin l'alternative d'une éventuelle dénervation rénale.

(39)

39 Figure 14: Différentes raisons d'abstention retenues par les médecins généralistes

(40)

40 5 DISCUSSION

Le but de cette étude était d'évaluer le taux d'inertie dans la population de médecins généralistes du département de l'Oise et d'étudier les facteurs qui peuvent justifier l'inertie dans la pratique quotidienne.

5.1 Discussion de la méthodologie

5.1.1 Type d'étude

L'étude réalisée était descriptive. Concernant l'étude des dossiers d'hypertendus, les différentes données (antécédents, traitements, PA pour chaque consultation) étaient recueillies dans le dossier de chaque patient hypertendu inclus. Pour le questionnaire d'entretien, bien que les raisons d'abstentions soient présentées ou suggérées au médecin généraliste, les réponses étaient déclaratives.

Cette étude rétrospective, permettait d'éviter un biais dans les réponses apportées par les médecins. En effet, il existait une tendance à ce que le médecin généraliste modifie sa pratique sachant qu'il devait recueillir des données sur le contrôle de la PA de ses patients hypertendus ainsi que sur les raisons d'abstention thérapeutique. Les médecins inclus avaient donc possiblement une inertie thérapeutique amoindrie.

5.1.2 Effectifs de médecins généralistes et de patients hypertendus

Sur les 120 médecins généralistes contactés et répartis de manière homogène en 3 secteurs (40 dans chaque secteur (urbain, semi-rural et rural)), 34% ont accepté de participer à cette étude. Il existait donc un biais de recrutement rendant cet échantillon moins représentatif à l'échelle du département de l'Oise.

Cette faible participation pouvait s'expliquer par la durée de l'entretien qui occupait plusieurs vacations de consultations. De plus, compte tenu de la désertification médicale, la charge de travail rendait difficile voire même impossible de "réserver" une plage horaire pour l'entretien. Les médecins répondant sur la base du volontariat, on peut supposer que les participants étaient ceux qui étaient les plus sensibilisés à ce sujet. Ce faible taux de participation des médecins pouvait s’expliquer aussi par la saison hivernale (l'étude s'étant déroulée pour la majeure partie pendant cette saison), période à forte activité pour les médecins généralistes.

(41)

41 Le nombre de patients hypertendus inclus était donc tributaire du nombre de médecins généralistes participant à l'étude. Il n'existe aucune étude sur l'inertie réalisée à l'échelle départementale. Ceci explique la faible proportion de patients par rapport aux effectifs des grandes études [17-22-26-28], pouvant influencer la significativité des résultats par manque de puissance. Néanmoins, le but de cette étude était essentiellement descriptif afin de dresser une cartographie de l'inertie dans la pratique des médecins. Nous avions décidé de choisir arbitrairement 5 patients par médecin généraliste interrogé étant donné le temps limité pour l'analyse des dossiers.

5.1.3 Modalités de recueil des données

Après contact téléphonique, un rendez-vous était fixé avec le médecin pour une durée de 30 minutes afin de pouvoir analyser les 5 dossiers de patients hypertendus. La sélection des patients se faisait le plus souvent par ordre chronologique à partir du dernier patient hypertendu ayant consulté le médecin. Cela a permis d'éviter un biais de sélection dans le sens où le médecin généraliste ne pouvait pas sélectionner uniquement des patients où le contrôle de PA était difficile à obtenir. En revanche la durée de l'entretien était un frein pour bon nombre de médecins contactés par téléphone.

Le questionnaire dédié à l'entretien du médecin comportait une liste préétablie des différentes raisons d'abstention afin d'écarter les raisons peu pertinentes. Certains critères étaient subjectifs et ne pouvaient être documentés dans le dossier clinique du patient comme la mauvaise observance au traitement médicamenteux, la réticence du patient, ou l'automédication par une autre molécule susceptible de modifier le profil tensionnel.

5.2 Discussion des résultats

5.2.1 Population soumise à l'inertie

L'âge moyen de ces patients ne différait pas de manière significative de celui de la population non soumise à l'inertie, ce qui signifiait que dans cette étude, l'âge du patient ne modifiait pas l'attitude thérapeutique du médecin. En revanche, chez les patients de plus de 80 ans, la proportion de consultations sujettes à l'inertie était significativement plus faible que chez les patients âgés de moins de 80 ans, probablement en raison des seuils de PAS moins stricts dans

(42)

42 la population âgée de plus de 80 ans. La multiplicité des pathologies dans cette catégorie d'âge amènerait le médecin à rester vigilant et à surveiller plus étroitement son patient.

Le sexe du patient, les facteurs de risque cardiovasculaire, le statut social, le diabète de type 2 et l'insuffisance rénale ne semblaient pas influencer significativement l'inertie thérapeutique. Dans l’étude d’Okonofua et al. plus le nombre de facteurs de risque cardiovasculaire augmentait et plus l’inertie était présente [21]

.

En prévention secondaire (coronaropathie, antécédents d'AVC), il n'y avait pas non plus de différence significative en terme d'IT. Andrade et al. retrouvaient dans leur étude une plus grande intensification thérapeutique chez des patients ayant comme antécédent un AVC, par crainte de la récidive d'accidents neurologiques et/ou cardiaques[20].

Concernant la durée d'évolution de l'HTA, le nombre de sujets sous inertie était plus important dans le groupe dont l'HTA évoluait depuis plus de 10 ans que dans les autres groupes. Ceci pouvant être le reflet du nombre important de retraités dans notre étude, s’expliquant notamment par le fait que la prévalence de l’HTA augmente avec l'âge. Plus l'évolution de l'HTA était ancienne et plus l'inertie thérapeutique du médecin se majorait, de manière significative. La durée d'évolution de l'HTA était donc un facteur d'inertie dans notre étude. On pourrait émettre l'hypothèse qu'à long terme, le médecin puisse se résigner à agir devant la probable monotonie du suivi et le défaut de motivation surtout si le patient adopte une attitude peu observante. Le médecin serait moins motivé à prendre en charge un risque qu'une affection symptomatique pour laquelle son action aurait des effets visibles.

Dans notre étude, l'inertie a été mise en évidence de manière significative dans le groupe "une consultation" et avait tendance à diminuer, avec une proportion plus faible d'inertie dans le groupe "4 consultations". L'hypothèse serait que le médecin commencerait à agir seulement à l'issue de 2 ou de 3 consultations où le patient présenterait systématiquement une PA élevée afin de s'assurer de la réalité et de la permanence de cette instabilité tensionnelle.

5.2.2 Influence de la thérapie anti-hypertensive

Parmi les traitements les plus utilisés, les IEC et/ou ARA2 représentaient 79% des prescriptions, en accord avec l'étude FLAHS 2014.

Parmi les consultations sujettes à l’inertie, la majorité des patients était sous mono ou bithérapie. Lorsque le médecin est confronté à une PA élevée avec notamment des difficultés à la stabiliser, il serait plus favorable à l’augmentation du nombre de traitements jusqu’à se retrouver limité par les possibilités thérapeutiques qui lui sont offertes avec le risque d’octroyer des effets secondaires à son patient. L’inertie serait donc à relativiser pour cette

(43)

43 catégorie de médecins. Certains médecins évoquaient un éventuel recours à des examens complémentaires et/ou à des avis de confrères spécialistes pour essayer d’adapter au mieux le traitement et ne se considérant alors plus comme en inertie. La proportion de consultations sous inertie élevée pour les monothérapies, bithérapies et trithérapies, pourrait s'expliquer par le fait que les praticiens se donneraient plus de temps pour pouvoir adapter au mieux le traitement antihypertenseur de leur patient, illustrant l'inertie définie par les différents auteurs dans la littérature [17-20-21-22-26].

On pourrait également évoquer l'hypothèse qu'en monothérapie, le médecin généraliste pourrait avoir tendance à "banaliser" dans le but de ne pas inquiéter son patient par une escalade thérapeutique. Une fois la bithérapie ou la trithérapie atteinte, le praticien changerait de stratégie et deviendrait alors plus incisif en ayant recours aux nouvelles associations fixes jusqu'à se retrouver limité dans sa démarche thérapeutique en raison d'une iatrogénie potentielle. D'ailleurs, le nombre de consultations sujettes à l'inertie diminuait significativement dans les thérapies à plus de 3 médicaments antihypertenseurs par rapport aux monothérapies et bithérapies. Les études d'Okonofua et d'Andrade retrouvaient également une diminution de l'inertie thérapeutique avec l'augmentation du nombre de médicaments antihypertenseurs [20-21].

5.2.3 Inertie et seuils de PA systolique et diastolique

Le niveau de PA joue un rôle important dans l'IT. En effet, on a observé dans notre étude, que les médecins généralistes intervenaient pour des seuils bien au-delà de 140 mm Hg pour la PAS. La majorité de médecins étaient en inertie pour des seuils de PAS entre 140 mm Hg et 160 mm Hg.

Au delà, la proportion de consultations sous inertie diminuait, probablement parce que le médecin était beaucoup plus "actif" pour des PAS supérieures à 160 mm Hg. Plus on s'éloigne des valeurs normales de PAS et plus le taux d'inertie diminue de manière significative. On a pu l'observer également pour la PAD où le taux d'inertie diminuait à partir de PAD supérieures à 100 mm Hg. L'étude d'Andrade et al. retrouvait également ces résultats [20]. Plus les PA étaient élevées et donc "alarmantes", plus il semblait facile de changer le traitement qui était accepté par le patient. L'absence de modification en cas de PAS ou de PAD "limites hautes", ne semblerait pas être la conséquence d'une mauvaise connaissance des recommandations. La majorité des médecins généralistes interrogés sur ce sujet, connaissaient les valeurs limites de PAS et de PAD de la population générale. Certains appliquaient encore les recommandations de la HAS de 2005 [8] avec des objectifs de PA plus stricts que ceux

(44)

44 mentionnés lors des dernières recommandations de la SFHTA de janvier 2013 [6]. Pour certains, le fait d'établir un seuil plus élevé de PAS (non observé pour la PAD) au delà de 140 mm Hg était un choix délibéré, se refusant de suivre les recommandations. Cela représentait 20% de l'effectif de médecins inclus pouvant donc être un déterminant de l'IT.

5.2.4 Taux d'inertie thérapeutique des médecins généralistes.

Dans cette étude, il n'a pas été mis en évidence de relation entre l'inertie suivant le mode de consultation, le secteur d'activité, la participation active aux DPC, le nombre de consultation par semaine, le sexe et la tranche d'âge du praticien. Cela pouvait être possiblement lié au faible échantillon de notre étude.

Si on compare le score IT global de cette étude par rapport aux données de la littérature qui fixaient des scores IT variant de 0.41 à 0.9, celui-ci était relativement faible, en dessous des moyennes des scores IT. Okonofua retrouvait un score d'IT à 0.44 ± 0.19 dans son étude [21]. Ceci était en partie expliqué par le fait que nous avions fixé des seuils de PAS et de PAD à la limite haute, ce qui sous-estimait l'inertie dans la population par rapport aux autres études qui fixaient un seuil plus strict. En effet, tous les médecins rencontrés, utilisaient des brassards tensionnels manuels avec des chiffres de PA arrondis au dixième contrairement aux tensiomètres électroniques. Toutes les valeurs recueillies dans les dossiers de patients hypertendus, rendaient des PA arrondies. Le médecin pouvait constater par exemple une PAS entre 135 et 140 mm Hg mais décidait d'arrondir à 140 mm Hg pouvant ainsi majorer l'ampleur de l'inertie. C'est d'ailleurs pour cela, que nous avons fixé la limite supérieure en systolique à 140 mm Hg (et non entre 130 et 139 mm Hg comme mentionné dans les recommandations), de même pour la PAD avec un seuil maximal à 90 mm Hg. La PA ne devait plus être strictement inférieure à 130/80 mm Hg pour les patients diabétiques et/ou en cas d'insuffisance rénale conformément aux recommandations de la SFHTA [6].

Malheureusement, l'utilisation de la MAPA et/ou de l'auto-mesure tensionnelle était modeste. Devant l'absence de significativité, nous ne pouvions conclure en une association entre la pratique de l'automesure tensionelle et l'IT. Agarwal et al. ont décris qu'il existait une tendance significative concernant l'association entre l'inertie thérapeutique et l'absence d'utilisation de l'automesure [34]. Couplée à une stratégie de titration des thérapies anti-hypertensives, ils observaient un meilleur contrôle de la PA.

Ce faible taux d'inertie par rapport aux données de la littérature, pouvait s'expliquer par le fait que les patients inclus avaient une HTA qui évoluait depuis plus d'un an et supposée contrôlée. En effet, dans la définition même de l'inertie, cela concerne également un retard

(45)

45 d'initiation à une thérapie lorsque l'on détecte une HTA. Nous avions fait le choix de ne pas inclure ces patients car le délai pour obtenir une PA contrôlée étant de 6 mois, nous aurions eu des difficultés pour l'analyse des résultats: les médecins nécessitent plus de 6 mois en pratique quotidienne (bon vouloir des patients pour consulter leur médecin de manière régulière, faisabilité de la réalisation de mesures de PA en dehors du cabinet médical) et il aurait fallu remonter à plus d'un an de consultations pour établir à partir de quel moment le praticien aurait dû agir ce qui aurait allongé le temps d'étude des dossiers médicaux.

La majorité des médecins étaient en inertie sur une seule consultation parmi les 4 analysées. Le taux d'inertie diminuait de manière statistiquement significative lors des consultations itératives. L'inertie du médecin ne semble pas être due à un manque de formation, car 53.7% des médecins en inertie interrogés, participaient aux DPC, même si la thématique de chaque séance ne portait pas forcément sur un sujet vasculaire et/ou cardiaque.

5.2.5 Abstention appropriée ou non du médecin

Plusieurs déterminants interviennent dans l'IT. Les déterminants relevant du médecin généraliste seul, ceux dépendants du patient et les déterminants liés au système de soin (ne faisant pas l'objet de notre travail).

Il était important de distinguer l'inertie réelle d'une abstention "appropriée" vu le contexte clinique, le vécu du patient et son statut social qui rentrent en compte dans la démarche décisionnelle.

Ce n'est pas la prise en charge d'une maladie isolée, mais d'un patient dans sa globalité conduisant à adopter une attitude différente des recommandations.

Plusieurs raisons ont été suggérées aux médecins interrogés et la plupart de ces justifications étaient subjectives. En effet, les modalités de réponse pour cette partie du questionnaire étaient basées sur la déclaration du médecin avec le choix entre le "oui" ou le "non" pour chaque item sans pouvoir le justifier de manière explicite dans le dossier informatique ou papier.

Philips et al. avait décrit les "soft reasons" ou "raisons molles" synonyme plutôt d'une passivité, comme faisant partie des déterminants d'inertie clinique liés au médecin [17]. Certaines situations cliniques au contraire, nécessitent une abstention qui est appropriée en raison de la situation clinique complexe du patient. Safford considérait que l'inertie pouvait être un choix raisonnable et adapté du médecin [26]. Ainsi dans notre étude, sur l'ensemble des justifications données, la majorité des réponses concernaient un deuil ou un stress (différent du stress lié à l'effet blouse blanche), ou une pathologie aiguë intercurrente pour justifier

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46 l'absence de renforcement momentané du traitement pharmacologique. En effet, cette étude s'est déroulée majoritairement au cours de la saison hivernale. La symptomatologie infectieuse et/ou douloureuse suffisait au médecin pour qualifier de "normal" ce déséquilibre de PA.

"L'effet blouse blanche" a été fréquemment évoqué par les médecins. Pour cet item, la réponse n'était validée que si le médecin apportait la preuve d'une HTA contrôlée à domicile car beaucoup de médecins suspectaient un effet blouse blanche et en faisaient un diagnostic sans avoir eu de preuve formelle. En revanche, dans notre étude, l'HTA évoluait depuis plus d'un an, ce qui pouvait remettre en cause la légitimité de ces données, l'HTA étant une pathologie évolutive avec une surveillance des mesures à domicile chez ces patients étiquetés "effet blouse blanche". Cela peut nous amener à prendre avec précaution l'impact de cette justification. Si le médecin ne la remet pas en question pour chaque patient concerné, on risque de passer vers une banalisation de la situation, synonyme alors d'inertie réelle.

Certaines raisons étaient en rapport avec le comportement du patient comme l'inobservance au traitement, le refus de se sevrer, la réticence du patient à prendre un nouveau médicament, la poly-médication (surtout retenue pour une population âgée de plus de 80 ans), l'automédication par une autre molécule susceptible de déséquilibrer la PA (anti-inflammatoires non stéroïdiens). Ces intuitions du médecin difficilement objectivables, rendaient complexe la quantification de l'inertie réelle. En plus des items proposés, lors de l'entretien, le médecin pouvait émettre une justification supplémentaire. Un des médecins avait d'ailleurs évoqué "l'attente de la dénervation rénale" ce qui justifiait son attitude d'abstention puisque la conduite à tenir avait été établie selon les avis des différents spécialistes consultés par le patient.

Les 3 principales raisons citées dans l'étude de Safford et al, étaient la mauvaise observance du patient, l'effet blouse blanche et l'erreur dans la prise du traitement [26].

Ce tableau avait aussi pour but d'écarter les raisons trop simplistes qui seraient rapportées par les médecins interrogés, comme le "demain ça ira mieux", la résignation du médecin, ou encore le motif de consultation différent qui ne nécessitait pas selon le médecin une prise de PA. Au lieu d'explorer les nouvelles possibilités thérapeutiques, le couple médecin/patient adhère à l'attente, attitude d'autant plus compréhensible que la maladie est silencieuse, et que la principale difficulté est liée à l'observance des traitements et aux modifications des habitus, alors que le contexte de vie a peu de chances d'évoluer. Parfois cette situation peut durer des mois et des années jusqu'à la survenue d'un évènement médical ou de vie qui va imposer au couple médecin/patient un changement de stratégie.

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47 En réalité, la véritable inertie clinique est celle où on ne peut pas trouver une telle justification avec comme condition princeps, que le médecin lui-même pense que la recommandation s'applique au patient qu'il a en face de lui. Reach Gérard avait décris le paradoxe de l'inertie clinique [36]. En effet, on peut comprendre qu'il soit naturel pour un patient de ne pas être observant mais le phénomène d'inertie clinique quant à lui est plus gênant à critiquer vis à vis d'un médecin.

5.3 Définition de l'inertie thérapeutique dans la prise en charge de l'HTA

Toutes les études réalisées à ce sujet n'ont pas réussi à établir une définition consensuelle, ce qui aboutissait à des résultats variables sur le taux d'inertie dans la population de médecins. Nous avions choisi l'étude d'Okonofua car elle constituait une des références les plus citées dans la littérature [37-38]. Pour le calcul du score IT, nous nous sommes basés sur cette étude mais il était nécessaire d'apporter des modifications notamment pour l'inclusion des patients. Il était important de pouvoir discuter de cette définition étant donné que l'applicabilité dans la pratique quotidienne de la médecine générale, et nous l'avons vu par le biais de l'étude des raisons d'abstention, était difficile.

Le concept d'inertie thérapeutique comporte: l'inertie thérapeutique appropriée ou abstention appropriée et l'inertie thérapeutique réelle ou inappropriée. Les termes abstention, appropriée et inappropriée ont l'avantage d'être neutres. De plus, la caractérisation précise de chaque entité pourrait débarrasser le terme "inertie" de toute nuance péjorative. La définition devrait prendre en compte également le caractère global de la prise en charge d'un patient (globalité subjective, personnelle, et psychosociale) et faire preuve de réalisme par rapport à la pratique des médecins généralistes.

Ainsi, une définition moins stricte et plus adaptée avec la pratique quotidienne pourrait être proposée. Par exemple, une modification thérapeutique ne serait envisagée que lorsque le médecin généraliste constaterait 2 mesures de PA élevées à au moins un mois d'intervalle, avec nécessité d'un relevé récent de PA en dehors du cabinet médical pouvant rendre compte du caractère "anormal" de la PA.

De plus, cette modification thérapeutique lors d'un renouvellement d'ordonnance ne pourrait se réaliser qu'en l'absence d'une pathologie aiguë intercurrente qui pourrait déstabiliser la PA au cabinet médical. Par ailleurs, la qualité et la faisabilité de la mesure sur laquelle se base la décision thérapeutique sont capitales. Les facteurs de l'inertie apparente (facteurs objectivables et subjectifs) pourraient servir de facteurs d'exclusion pour une meilleure quantification de l'inertie réelle.

Figure

Figure 1: Tableau issu du BEH thématique 49-50 de décembre 2008
Figure 2: Usage des antihypertenseurs en 2014 (www.comitehta.org)
Figure 3: Répartition des médecins selon leur secteur d'activité
Tableau 1: Caractéristiques globales des patients inclus dans l'étude
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Références

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