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La protection des actionnaires minoritaires lors d'opérations de prises de contrôle

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(1)

Faculté de Droit

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Université

rU,

de Montréal

Université

rH,

(2)

Université de Montréal

La protection des actionnaires minoritaires lors

d'opérations de prises de contrôle

par

Kaïs BELGHITH

Faculté de droit

Thèse présentée à la Faculté des études supérieures en vue de l'obtention du grade de doctorat

en droit

Mai, 2007

(3)

Université de Montréal Faculté des études supérieures

Cette thèse intitulée:

La protection des actionnaires minoritaires lors d'opérations de prises de contrôle

présentée par :

Kaïs BELGHITH

a été évaluée par un jury composé des personnes suivantes :

Le professeur Ejan Mackaay, président-rapporteur Le professeur Stéphane Rousseau, directeur de recherche Le professeur Guy Lefebvre, membre du jury

Le professeur Jean-Louis Navarro, examinateur externe , représentant du doyen de la FES

(4)

Résumé

Les actionnaires sont au centre du gouvernement des entreprises. Bien qu'une certaine passivité leur soit parfois reprochée, simultanément, des craintes existent qu'une démocratie des actionnaires ne limite excessivement la gestion quotidienne des entreprises. Loin d'être incompatibles, ces deux remarques reflètent la diversité des actionnaires. En pratique, leurs attentes et leur comportement dépendent fortement de deux éléments : la part du capital ou des voix qu'ils détiennent de même que leur identité.

Notre recherche porte sur la protection des actionnaires minoritaires dans le cadre d'opérations de prises de contrôle de sociétés publiques. Le sujet soulève une problématique d'une grande actualité dans le contexte canadien, contexte caractérisé par une concentration de l'actionnariat des sociétés publiques. Le sujet fait la conjonction de deux problèmes d'actualité. D'une part, la multiplication des prises de contrôle s'est accrue lors des dernières décennies et ce phénomène semble, plus que jamais, promis à un brillant avenir. D'autre part, le problème de la protection des actionnaires minoritaires se pose de façon toujours plus aiguë, dans le cadre des sociétés par actions de plus en plus importantes où leur rôle tend à s'amenuiser.

Mots-clés: Gouvernement d'entreprise, actionnaires minoritaires, pnses de contrôle, égalité de traitement, divulgation de l'information.

(5)

11

Abstract

Shareholders are at the heart of corporate govemance. While sorne reproach them a certain passivity, others, at the same time, fear that a shareholders' democracy could unduly limit the daily management of corporations. Far from being incompatible, these two statements reveal the

wide diversity that sUITounds shareholders. In practice, their expectations and

their behavior strongly depend on two items: their share in capital or their share of votes, as weIl as their identity.

Our thesis deals with the issue of minority shareholders' protection in the context of takeover operations involving public companies. This topic raises issues of great relevance and is particularly CUITent in the Canadian context that is characterised by a shareholding concentration of public companies. Our topic brings together two CUITent problems. On the one hand, the rise in takeover operations has, in the last decades, been significant and this phenomenon seems, more than ever, to be destined to a very bright future. On the other hand, the issue of minority shareholders' protection also arises, ever so sharply, in the context of growing shareholding companies where shareholders' role seems to be fading.

Keywords: Corporate govemance, minority shareholder, take-over bids, equal treatment, information disclosure.

(6)

iii

Table des matières

Introduction 1

Cadre théorique 3

Problématique 8

La théorie de réseau de contrats 10

Les limites à la théorie de réseau de contrats 20

Les questions de recherche 23

Hypothèse 29

Chapitre préliminaire: La légitimité de la protection des actionnaires minoritaires lors d'opérations de prises

de contrôle 33

Titre 1: Le principe de l'égalité de traitement entre actionnaires 37

Chapitre 1 : L'égalité de traitement relative à l'exercice des droits politiques 42 Section 1 : L'égalité de traitement en matière d'information des actionnaires

minoritaires sur la vie sociale 44

Paragraphe 1 : L'information comptable et financière 45

Paragraphe 2 : L'information sur la gestion 55

Section II : L'égalité de traitement devant les organes de prises de décisions 61

Paragraphe 1 : Le droit d'accès des minoritaires aux assemblées 63

Paragraphe 2 : Le droit d'expression des minoritaires dans les assemblées_73

Chapitre II: L'égalité de traitement relative aux droits financiers 80

Section 1: L'égalité de traitement relative aux titres 81

Paragraphe 1 : La création de catégories d'actions 81

Paragraphe 2 : Les garanties lors de la modification des droits

d'une catégorie 87

Section II : L'égalité de traitement relative au capital 89

Paragraphe 1 : Le capital et ses variations 90

(7)

IV

Titre II : La fragilité de la position des actionnaires minoritaires 110

Chapitre 1: Les techniques d'oppression affectant les droits des actionnaires

minoritaires 112

Section 1 : L'oppression au niveau des droits politiques 112

Paragraphe 1 : L'asymétrie de l'information 113

Paragraphe 2 : L'émergence d'un pouvoir politiquement majoritaire

mais minoritaire en proportion du capital détenu 119

Section II : L'oppression au niveau des droits financiers 124

Paragraphe 1 : Les abus au niveau de la distribution des dividendes_ _ 126

Paragraphe 2 : L'option pour la dette au lieu de l'équité 131

Chapitre II : Les techniques d'oppression permettant l'exclusion des actionnaires

minoritaires 135

Section 11L'expropriation des actionnaires minoritaires 136

Paragraphe 1 : La dépossession forcée des actionnaires minoritaires 137

Paragraphe 2 : La règle majoritaire et les techniques d'expulsion 144

Section II : Les conséquences de l'expropriation des actionnaires minoritaires _152

Paragraphe 1 : Le dénouement de l'acquisition forcée 152

Paragraphe 2 : Le montant de l'indemnisation des actionnaires

minoritaires 155

Première partie: Les enjeux fondamentaux de la protection des actionnaires minoritaires lors d'opérations de prises de contrôle:

L'accès àl'information et l'égalité financière 159

Titre 1 : L'accès àl'information, enjeu primordial de la protection des actionnaires

minoritaires 162

Chapitre 1 : L'égalité devant l'information en amont d'opérations de prises

de contrôle 165

Section 1 : Le cadre juridique conditionnant l'appel public à l'épargne 166

Paragraphe 1 : Les exigences en matière d'informations conditionnant

l'accès au marché des valeurs mobilières 167

Paragraphe 2 : L'information continue délivrée par les sociétés cotées_ _ l72

Section II : L'exigence de transparence sur la répartition du capital 177

Paragraphe 1 : Les déclarations suite aux franchissements de certains

seuils et lors des changements importants 178

Paragraphe 2 : L'impact de la notion de concert sur la répartition du

(8)

v

Chapitre II : L'égalité devant l'infonnation lors du déroulement d'opérations

de prises de contrôle 187

Section 1 : L'exigence de la divulgation d'une infonnation complète et respectueuse

de l'égalité de traitement 191

Paragraphe 1 : L'obligation d'infonnation de l'initiateur 191

Paragraphe 2 : Les exigences en matière d'infonnation pour la

société cible 199

-Section II : Un regard critique sur le processus infonnationnel 202

Paragraphe 1 : Les dispenses accordées par la Loi sur

les valeurs mobilières, 203

Paragraphe 2 : Les prises de contrôle réalisées par la voie

d'arrangements statutaires 211

Titre II : L'égalité financière, principe protecteur des actionnaires minoritaires_217

Chapitre 1: Le principe d'égalité financière légitime l'offre publique d'achat 218

Section 1 : Les conditions de déclenchement de l'offre publique d'achat

relèvent de la notion de contrôle de la société 219

Paragraphe 1 : Une prise en compte élargie de la notion de participation 220

Paragraphe 2 : Les conditions matérielles de l'offre publique d'achat visant à protéger les intérêts financiers des actionnaires

minoritaires 232

Section II : La sécurité juridique des actionnaires minoritaires requiert un engagement

de l'offrant sur la validité de l'offre et une limitation des délais 238

Paragraphe 1: Les limitesàla révocabilité de l'offre 238

Paragraphe 2 : Le principe de liberté contractuelle justifie les conditions

suspensives à une offre publique d'achat 243

Chapitre 2 : Le libre jeu des offres et surenchères, facteur de protection

des actionnaires minoritaires 247

Section 1 : L'objectifde protection des actionnaires minoritaires consacre les contre offres comme moyen privilégié de contrer

une offre publique d'achat 247

Paragraphe 1 : La protection des actionnaires minoritaires impose un droit de

rétractation unilatéral des actionnaires 248

Paragraphe 2: Le droit de dissidence et l'acquisition forcée, dispositif complémentaire de la protection des actionnaires

minoritaires 254

Section 2 : Les limites aux ripostes à une offre imposées par l'impératif de

protection des actionnaires minoritaire 259

(9)

VI

Paragraphe 2 : Le principe de surenchère cadre les offensives contre l'offre

publique d'achat 262

Deuxième Partie: La liberté de restructuration est conditionnéeàla protection

des actionnaires minoritaires 267

Titre 1 : Les mécanismes de protection des actionnaires minoritaires lors des prises

de contrôle 268

Chapitre 1 : Les mécanismes juridiques de protection des actionnaires

minoritaires 269

Section 1 : Les obligations des administrateurs: gage de protection des intérêts

des actionnaires minoritaires 270

Paragraphe 1 : Le devoir de loyauté et de diligence 271

Paragraphe 2 : Le devoir d'égalité de traitement des actionnaires 292

Section II: Les devoirs des administrateurs lors des fusions et acquisitions

amicales 300

Paragraphe 1 : L'obligation de vendre la société au plus offrant 300

Paragraphe 2 : Le respect de la liberté de choix des actionnaires 313

Chapitre Il : Les recours judiciaires comme moyen de pression des actionnaires

minoritaires sur les actionnaires de contrôle et les dirigeants 326

Section 1 : Les recours de droit communs 326

Paragraphe 1 : Les recours en vertu du

c.c.Q.

327

Paragraphe 2 : Les recours en vertu de laL.C.S.A. 333

Section II : Les recours en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières 340

Paragraphe 1 : Les recours basés sur le défaut ou la qualité d'information_341 Paragraphe 2 : Les recours en responsabilité pour les transactions illégales

par des initiés 350

Titre Il : Pour une protection rationnelle des actionnaires minoritaires, 358

Chapitre 1: Les limites rationnelles àla protection des actionnaires minoritaires_358

Section 1 : La préservation de l'intérêt social 359

Paragraphe 1 : L'intérêt social comme limite à la protection des actionnaires

minoritaires 359

Paragraphe 2 : Larecherche de l'intérêt social lors d'opérations de prises

de contrôle 365

Section II : La loi de la majorité, mode de régulation rationnelle de la vie sociale_372

Paragraphe 1 : La capacité décisionnelle de la majorité 373

Paragraphe 2 : La majorité entre la ponctualité du pouvoir

(10)

VIl

Chapitre II : La protection des actionnaires minoritaires entre le pragmatisme des autorités boursières et le contrôle des autorités judiciaires 389 Section 1 : La protection des actionnaires par le pragmatisme des autorités

boursières 390

Paragraphe 1 : Le pouvoir réglementaire des autorités boursières pour

protéger les actionnaires minoritaires 390

Paragraphe 2 : L'appréciation des dispenses à une offre publique d'achaC394 Section II : Le contrôle judiciaire de l'application de l'égalité de traitement

entre actionnaires 398

Paragraphe 1 : L'extension du rôle dujuge dans les contentieux boursiers 398 Paragraphe 2 :Lerapprochement des décisions judiciaires, inspirées par la

protection des actionnaires minoritaires 404

Conclusion ...:.... 407

(11)

Vlll

(12)

IX

Remerciements

Le gouvernement d'entreprise a attiré mon intérêt lors d'un stage que j'ai eu l'opportunité d'effectuer au cours de l'année 2000 en tant qu'assistant de recherche au Centre de droit des affaires et du commerce international (CDACI). C'est pour cette raison que j'ai choisi d'aborder ce thème dans la présente thèse.

Mes remerciements vont tout d'abord à Monsieur Stéphane Rousseau, mon

directeur de recherche, pour son aide précieuse, sa disponibilité ainsi que pour la clarté et la qualité de ses explications.

Je tiens ensuite à remercier tout particulièrement la famille de l'Honorable

Alan B. Gold pour son aide financière qui m'a permis de me consacrer pleinement à

la rédaction de ma thèse.

Mes remerciements s'adressent de plus au professeur Guy Lefebvre pour sa confiance et son support de même que pour les connaissances scientifiques que j'ai pu acquérir grâce à lui lors de mon passage à la Faculté de droit de l'Université de Montréal. Ses conseils et son soutien, tout au long des cinq dernières années, m'ont permis de persévérer et de mener à terme ce projet.

La rédaction de cette thèse aurait été impossible sans une compréhension profonde de l'analyse économique du droit. Je tiens donc à remercier le professeur Ejan Mackaay pour les connaissances qu'il m'a transmises avec clarté et passion.

Ma gratitude et mon extrême reconnaissance vont à Madame Nadia Ménard pour son aide, sa patience et son support durant les années qu'a pris la rédaction de cette thèse.

En terminant, je tiens à remercier mes parents qui ont cru en moi et qui m'ont toujours encouragé à poursuivre les objectifs que je m'étais fixés.

(13)

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Introduction

La gouvernance présente l'une des matières les plus débattues de la loi sur les

sociétés ces dernières annéesl. L'objectif de nos recherches n'est pas d'évaluer la

puissance des minoritaires sur le pouvoir décisionnel de la société, mais de montrer les degrés variables d'un tel pouvoir et de démontrer que le gouvernement d'entreprise doit être repensé pour intégrer le rôle des actionnaires minoritaires. Cette étude essaie de soulever les questions relatives au rôle des actionnaires minoritaires et de déterminer les moyens de protection de ces derniers dans les cas d'opérations de prises de contrôle.

La principale question soulevée par la gouvernance est la suivante: Qui dirige la société? Cette question est également la raison pour laquelle une grande partie des études relatives au gouvernement d'entreprise se concentre sur les actionnaires majoritaires ou sur les dirigeants des sociétés. En réalité, l'un ou l'autre peut remporter facilement la bataille pour avoir le contrôle. Il serait, cependant, fallacieux de ne pas prendre en considération d'autres facteurs et éléments affectant le gouvernement d'entreprise. Les actionnaires minoritaires présentent l'un de ces facteurs. La minorité, malgré qu'elle semble avoir un poids minime dans le pouvoir décisionnel, peut changer les stratégies des majoritaires et avoir une influence sur les plans d'une société. Son influence peut atteindre la participation active dans le processus décisionnel et le partage des bénéfices d'une société.

1Il existe de nombreuses définitions de la«corporate governance». Cependant, la plupart d'entres elles

contiennent deux éléments centraux: les mécanismes par lesquels les sociétés sont dirigées et contrôlées et ceux par lesquels ceux qui dirigent et contrôlent la société sont contrôlés et surveillés.

Quelques définitions référent à l'équilibre des intérêts des différents actionnaires dans la société. À

propos de la définition du « corporate governance » voir: WEIL, GOTSHAL & MANGES,

«Comparative Study of Corporate Governance Codes Relevant to the European Union and its Member States », (2002) document disponible sur le site web: «www.juridix.net/cg/coro gov codes en.pdf ». Voir aussi Ian M. RAMSAY, « The Corporate Governance Debate and the Role of Directors Duties », in Coroorate Governance and the Duties of Company Directors, Melbourne, University of Melbourne, 1997, p. 2-3; Ronald J DANIELS and Jeffrey G MACINTOSH, « Toward a Distinctive Canandian Corporate Law Regime », 1991, Osgoode Hall Law Journal, No 4, vol. 29, p. 867; J BIRD and J HILL, « Regulatory Rooms in Australian Corporate Law», 1999, 25 Brooklyn Jnl of Int Law 555, p. 556-557.

(14)

.!=<.La~PIL"'!..l:o:.!.'te""c-,-,ti~01'-!...1~de~s~a~c!.!.ti~on~n~a-,-,ir~es~m~in~o~n-,-,·ta~ir~ec>!..s-,-,lo~rs~d-,-,'o~pe~'r~a~tio~n!o!.s~d~eJ!.p~ri~se~s..!'d~e~c~01~lt~ro~ï~e ,2 L'actionnaire minoritaire n'est pas forcément bien loti face aux injustices que peuvent lui faire subir les dirigeants et les majoritaires lors d'une prise de contrôle. Pour concilier les intérêts des actionnaires majoritaires et ceux des actionnaires minoritaires, la réglementation devrait établir un équilibre entre les conflits potentiels. D'une part, il est recommandé de créer autant de liberté et de flexibilité que possible afin d'encourager l'utilisation de la forme sociétaire. D'autre part, les actionnaires minoritaires doivent être conscients de la protection dont ils bénéficient face à l'opportunisme du couple administrateurs/majoritaires. L'opportunisme des actionnaires majoritaires peut être le résultat d'un abus de leur part de leur position stratégique au sein de la société, de l'information dont ils disposent vu leur position dans la société, du contrôle qu'ils ont sur la société ou de l'utilisation de conseils légaux ou de techniques complexes afin d'éliminer de la société un ou plusieurs actionnaires.

Notre recherche porte sur la protection des actionnaires minoritaires dans le cadre d'opérations de prises de contrôle des sociétés publiques. Le sujet soulève une problématique d'une grande actualité dans le contexte canadien qui est caractérisé par une concentration de l'actionnariat des sociétés publiques2.

Le régime juridique des prises de contrôle a été élaboré par la législation et par la jurisprudence dans le souci contradictoire de laisser aux majoritaires une liberté d'action opportune et de protéger les minoritaires. Mais des moyens ont été expressément mis à la disposition des actionnaires minoritaires afin qu'ils protègent convenablement leurs intérêts. Le droit des sociétés a beaucoup évolué ces dernières années et cette évolution se poursuit à un rythme accéléré. La réglementation vise à assurer un juste équilibre entre la protection des actionnaires et des créanciers des sociétés et le dynamisme de ces sociétés. En réalité, la loi sur les sociétés consacre

2La majorité des sociétés canadiennes de grande taille n'ont pas une propriété dispersée. Ainsi, 61%

des 500 plus grandes entreprises faisant partie de l'édition 2005 du Financial Post 500 Canada's

largest corporations ont un actionnaire principal qui détient plus de 50% des actions, et seulement

16% sontà capital diffus. Or, 63% des entreprises figurant dans le Fortune 500 entrent dans cette

catégorie. En effet, à l'exception de BCE, Alcan, Air Canada, Canadian Pacifie, Stelco et quelques

autres, les 100 plus importantes sociétés non financières canadiennes sont à propriété concentrée.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, le contrôle de la majorité des entreprises canadiennes est entre les mains de quelques individus, familles ou groupes.

(15)

~La"-"",pr,-"o"-,te""c"-,ti"""onc!"'=de""s--"a""c"'-'-tio",-,n..ccn",,a..ccir-,,,es,,-,m,,-,,-,,in""o,-,ri.!..!:ta""ir,-"e,,-s.!..!:lo,,",rs~d,,--,,:'o"",pe,,,-'r-"-a""tiO,(.!.l~IS.JOd,,,-e~p,-,ri~se"-'!s....!:d!.!<e'-"c~o!!.!nt"-'ro"-!.'l""'-e 3

une réglementation très détaillée et rigoureuse dont il est souvent prévu que les

manquements soient sanctionnés. Le droit des sociétés présente un outil qui est supposé répondre aux besoins des actionnaires aussi fidèlement que possible.

Autrement dit, il s'agit d'un outil qui, loin d'être une barrière à leur incorporation,

vient promouvoir leur développement et facilitera les transactions.

Notre introduction se présente en trois parties: Cadre théorique,

problématique et hypothèse.

L Cadre théorique

L'économie et le droit sont devenus deux disciplines aussi interactives qu'interdépendantes. S'il est indispensable pour les juristes de connaître l'impact économique des normes juridiques dans des domaines tels que le droit des sociétés ou celui des valeurs mobilières, il est tout aussi important que les économistes acquièrent une connaissance des structures juridiques sur lesquelles reposent les différents marchés et politiques.

L'analyse économique du droit étudie l'efficacité des règles juridiques3. La

discipline s'est développée surtout aux États-Unis à partir du début des années

soixante, avec les travaux précurseurs de Ronald Coase4, lauréat du prix Nobel

3Pour une étude exhaustive voir: Stephen M. BAINBRIDGE, Corporation Law and Economies, New

York, Foundation Press, 2002, p. 135; Ronald H. COASE, Le coût du droit, Paris, Presses universitaires de France, 2000, p. 45; Frank H EASTERBROOK and Daniel R FISCHEL, The Economie Structure of Corporate Law, Cambridge, Mass, Harvard University Press, 1991, p. 56; Wemer Z. HIRSH, Law and Economies : An Introductory Ana1ysis, San Diego, Academie Press, 1999, p. 45; Thierry KIRAT, Le droit dans l'action économique, Paris, CNRS, 2000, p. 26; Robin Paul MALLOY, Law and Market Economy: Reinterpreting the Values of Law and Economies, Cambridge, Cambridge University Press, 2000, p. 123; Eric A. POSNER, Law and Economies, A1dershot Ashgate, Darmouth, 2001, p. 215; David D. FRIEDMAN, Law's Order. What Economies Has to Do with Law

and WhyItMatters, Princeton, N.J., Princeton University Press, 2000, p. 132.

4RH. COASE, « The Prob1em of Social Cost », (1960) 3lL. & Econ. 1. Voir aussi: RA COASE.,

The Nature of the Firm, Economica, vol. 4, 1937, p. 386-405; R.A. COASE, «The Nature of the Firm: Origin », dans O.E. Williamson et S. Winter (eds), The Nature of the Firm, Oxford University Press, 1991, p. 34-47; RA. COASE, «The Nature of the Firm: Meaning », dans O.E. WILLIAMSON et S. WINTER eds, The Nature of the Firm, Oxford University Press, 1991, p. 48-6; R.A. COASE, «The Nature of the Firm : Influence», dans O.E. WILLIAMSON et S. WINTER eds, The Nature of the Firm, Oxford University Press, 1991, p. 61-74; RH. COASE, « Accounting and the Theory of the Firm », (1990) Journal of Accounting and Economies, vol. 12, 1990, p. 3-13; R COASE, « The New Institutiona1 Economies », (1998) The American Economie Review, vol. 88, n° 2, p. 72-74.

(16)

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d'économie, et ensuite avec ceux de Richard Posner5. N'importe quel domaine du

droit et n'importe quel système juridique se prête aux techniques de l'économie, mais c'est surtout le droit anglo-américain qui a été soumis à cette l'analyse. Selon le professeur Mackaay, il existe maintenant des courants similaires dans plusieurs autres pays6.

Dans la tradition néoclassique qui sous-tend l'analyse économique du droit, l'efficacité s'identifie à l'obtention de la plus grande valeur économique possible, étant bien entendu que l'évaluation se fait par tous les individus concernés. Il s'agit de maximiser le revenu sans s'occuper de sa répartition.

Il est d'ailleurs démontré que les règles légales sont incapables d'atteindre des

objectifs de répartition puisque les conditions de l'échange s'adaptent

automatiquemene. La condition d'efficacité d'un système juridique est, en résumé, la suivante: les droits doivent être assignés aux personnes pour lesquelles ils ont le plus de valeur ou, sinon, ils doivent pouvoir leur être transférés aisément par l'échange.

Ainsi, l'analyse économique du droit cherche à expliquer les institutions juridiques par les paramètres de l'économie. Elle prend en compte non seulement la

norme juridique stricto sensu, mais aussi les comportements, les actions et les

interactions des principaux acteurs de la société. L'analyse économique du droit cherche le coût et l'efficacité derrière chaque institution juridique.

Selon le professeur Ejan Mackaay8, le but de cette analyse est, tout d'abord,

de dégager la structure incitative: les règles entraînent des coûts et le changement de règles changera le comportement des intéressés. Cette théorie, appliquée au sujet de notre étude, nous amène d'abord à nous demander dans quelle mesure la protection des actionnaires minoritaires dépend de la densité des règles impératives plutôt que de la force du marché à établir un équilibre entre les actionnaires minoritaires et les actionnaires majoritaires. Ensuite, cette théorie nous conduit à introduire les coûts de transaction et autres sources de friction, à savoir, à impliquer la notion de coûts de

5R. A.POSNER, op. cit., note 3, p. 45; Nicholas MERCURO, Economies and the Law: From Posner

to Post-Modernism, Princeton, Princeton University Press, 1997, p. 102.

6 Ejan MACKAAY, L'analyse économique du droit. vol. 1: Fondements, Montréal et Bruxelles,

Éditions Thémis et Bruylant, 2000, p. 20.

7Nicholas MERCURO, op. cit., note 5, p. 102.

(17)

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transaction dans les choix des dispositions contractuelles dans le cadre d'un contrat de société. Enfin, elle nous amène à effectuer des analyses empiriques afin de déterminer quelles sont les limites de l'analyse économique du droit.

Un problème méthodologique réside dans la notion même d'efficacité économique utilisée par les théoriciens de l'analyse économique du droit qui exige de comparer l'utilité subjective obtenue par divers individus. De plus, le point de départ ou la répartition initiale du revenu affectera la valeur normative des résultats des processus d'échange. Cette limite concerne aussi une autre question: dans quelle mesure le système juridique doit-il reposer sur des sanctions après le fait ou sur des

contrôles administratifsa priori?

L'indétermination de la notion d'efficacité économique explique peut-être,

comme l'admet Friedman9,pourquoi il est parfois possible de se servir de cette notion

pour rationaliser ex post une règle légale et son contraire de même que, devant un

résultat de l'évolution biologique, une explication évolutionniste est toujours trouvée. Cela étant, l'approche économique des phénomènes juridiques nous rappelle l'importance des conséquences des lois, qui dépendent plus des incitations individuelles que de la volonté des bien-pensants.

À la souscription, l'actionnaire conclut un contrat dans un but lucratif, celui

d'accroître la valeur de son investissement. Le potentiel de réalisation de cet objectif dépend d'un certain nombre de données qui ont déterminé son engagement.

Dans un monde idéal, les parties seraient en mesure de négocier les contrats qui répartiraient explicitement des droits et des obligations entre des contractants pour toutes les éventualités possibles qui pourraient surgir durant la vie du contrat. En réalité, les contractants ne peuvent pas prévoir toutes les éventualités possibles qui pourraient s'appuyer sur l'opération du contrat. En outre, être préparé pour toutes les éventualités prévisibles peut être tant difficile que coûteux. Par conséquent, tous les

contrats, saufles plus simples, sont, dans une certaine mesure, incomplets10. Il y a des

vides dans les dispositions explicites et implicites du contrat qui laissent les obligations des parties non spécifiées dans certaines éventualités. Il revient aux

9D. FRIEDMAN, op. cit., note 3, p. 67.

10Jan AYRES & Robert GERTNER, «Strategie Contractual Jnefficiency and the Optimal Choice of

(18)

=La=-..<.p,-"ro,-"te=c=ti=on,",-=de=s,-,a=c=ti"",o'=m=a=iY-",es"-=m=if,,,,lO~n='ta=iY:....>e",-s=lo:.:..r.,,-s.:::.d-"'o~p""éY-=a=tio"",'"""lS,-,d=e-"p",-n,,,"·s=es:....:d=e,-,c,",,,o=nt'"'-Yo=ï=e 6

législateurs etàla jurisprudence de créer des règles qui vont remplir le vide laissé par le contrat11. Le processus par lequel le législateur doit déterminer le fond de telles

règles a soulevé un grand débat doctrinal, particulièrement au cours des dernières décenni es12.

La sélection des normes juridiques efficaces a dominé le débat. Les règles supplétives, par leur nature, ne présentent pas des instruments de protection ni des tierces personnes, ni des parties l'une de l'autre. Par exemple, il serait illogique d'établir des règles supplétives interdisant la fraude pour protéger des contractants, plutôt que d'établir des règles à caractère impératif, règles que les parties seraient obligées de respecter13. Les règles supplétives ordonnées dans de tels buts

échoueraient probablement et augmenteraient les coûts de la transaction.

La théorie de Coasel4 précise que les contractants peuvent négocier à

l'assignation efficace des droits et des obligations si les coûts de négociation sont basl5. Par conséquent, les parties doivent convenir des clauses du contrat, sans tenir

compte du fond des règles supplétivesl6. Le corollaire de la théorie de Coase réside au

fait que, quand les coûts de la transaction sont élevés, lescontractant~ vont opter pour

11Dennis PATTERSON, «The Pseudo-Debate over Default Rules in Contract Law», (1993) 3 S. Cal.

Interdisc. L.J., 235, 236-37; Lawrence A. CUNNINGHAM, «Herrneneutics and Contract Default

Rules: An Essay on Lieber and Corbin», (1995) 16 Cardozo L. Rev, 2225, 2235.

12lan AYRES & Robert GERTNER, «Filling Gaps in Incomplete Contracts: An Economic Theory of

Default Rules», (1989) Yale L.J., 87; Jason Scott JOHNSTON, «Strategic Bargaining and the

Economic Theory ofContract Default Rules», (1990) 100 Yale L.J. 615;1. AYRES & R. GERTNER,

loc. cit., note 10, p. 730; lan AYRES & Robert GERTNER, «Symposium on Default Rules and

Contractual Consent», (1993) 3 S. Cal. Interdisc. L.J., 1; Randy E. BARNETT, «The Sound of Silence: Default Rules and Contractual Consent », (1992) 78 Va. L. Rev., 821; Jules L. COLEMAN et al., A, «Bargaining Theory Approach to Default Provisions and Disclosure Rules in Contract Law», (1989)

12 Harv. J.L. & Pub. Poly, 639; lan AYRES, «Making a Difference: The Contractual Contributions of

Easterbrook and Fischel», (1992) 59V. Chi. L. Rev. 1391; F. H. EASTERBROOK& D. R. FISCHEL,

op. cit., note 3, p. 148.

13Clare DALTON, «An Essay in the Deconstruction of Contract Doctrine», (1985) 94 Yale L.J. 997,

1002; Jay M. FEINMAN, «Critical Approaches to Contract Law», (1983) 30 VCLA L. Rev, 829; Jay M. FEINMAN, «The Last Promissory Estoppel Article», (1992) 61 Fordham L. Rev. 303, 311-15.

14R.H. COASE, loc. cit., note 4, p. 1.

15 Robert COOTER& Thomas VLEN, Law and Economics. Boston, Pearson/Addison Wesley, 2004

p. 81-82; Stewart J. SCHWAB, «Collective bargaining and the Coase theorem», (1987) 72 Cornell L. Rev. 245, 266-67.

16RobertA. HILLMAN, «The Richness ofContract Law: An Analysis and Critique ofContemporary

Theories of Contract Law», Dordrecht, Boston, London, Kluwer Academic Publishers, 1997; Bernard

S. BLACK, «Is Corporate Law Trivial? : A Political and Economic Analysis », (1990) 84 Nw.U. L.

(19)

~La~pr~o~te~cc.!.!ti~on~de~s~a~c"-!;ti~on~n.!.!:!a~ir~es,,-,m=in~o!...!ric!;.!:ta~ir~es~/o~rs"-,d~'op~e,,,-'r.!:!;at~ioo!!..n~s..!'!d""-eJot.p!...!ri~se~s..!'!d,,,-e-,,-co~n~t!...!ro~A/e"-- 7

les règles supplétives17.

L'argument d'efficacité18d'un modèle de négociation hypothétique réside dans

le fait que les règles supplétives présentent une projection de «la solution à laquelle

arriveraient les parties intéressées si elles avaient pu envisager et régler la question dans des conditions idéales de négociation»19. Ainsi, les règles supplétives supposent implicitement que les coûts de la conclusion d'un contrat sur la base d'une règle supplétive sont les mêmes, en moyenne, pour la majorité des parties pour qui les règles supplétives sont efficaces, tandis que la minorité qui préférerait des règles différentes va assumer des coûts supplémentaires. Si les coûts des transactions sont systématiquement plus élevés pour la minorité que pour la majorité des contractants,

les règles supplétives peuvent être considérées comme efficaces2o. Ainsi, dans

quelques cas, les coûts des transactions pourraient être réduits au minimum en exigeant à la majorité des parties de contracter par des règles supplétives. La minorité

qui préfère ne pas opter pour les règles supplétives, quant à elle, assume des coûts

supplémentaires. Par conséquent, les législateurs doivent prendre en considération la variation des coûts des transactions selon qu'ils se placent parmi la majorité qui accepte l'application des règles supplétives ou parmi les minorités qui optent pour

une négociation pour aboutir à des règles qu'elles jugent équitables et qui diffèrent

des règles supplétives.

Les juristes-économistes qui ont étudié les stratégies de conclusion des contrats ont essayé de démontrer que les coûts de négociation ne présentent pas la

17Steven SHAVELL, «Damage Measures for Breach ofContract », (1980) Il BellJ.Econ. 466,468.

18Le concept d'efficacité porte sur le rapport entre la fin et les moyens. Les conceptions de l'efficacité

varient selon la façon dont nous mesurons les fins ou les moyens qui nous intéressent. On dit qu'une situation est efficace selon les critères de Pareto s'il n'existe aucune autre situation dans laquelle au moins une personne se trouve mieux et aucune ne se trouve moins bien. L'objectif est mesuré par la satisfaction des préférences et les moyens sont les différentes allocations possibles des ressources de la société. Le principe de Pareto évite délibérément les comparaisons interpersonnelles de bien-être et doit donc être muet lorsqu'un changement de situation risque d'avoir pour effet que certains se trouvent moins bien et que d'autres se trouvent mieux. Voir dans ce sens: Edward ELGAR, «Economie Efficiency in Law and Economies », (2002) ISUMA, Volume 3, p. 2.

19 Raymonde CRÊTE et Stéphane ROUSSEAU, Droit des sociétés par actions, Montréal, Éditions

Thémis, 2002, p. 86. Voir aussi: Lucian A. BEBCHUK, « The Debate on Contractual Freedom in

Corporate Law», (1989) 89 Col. L. Rev., p. 1395; B.R. CHEFFENS, Company Law - Theory,

Structure and Operation, Oxford, Oxford University Press, 1997, p. 145.

20I. AYRES & R. GERTNER, loc. cit., note 12, p. 93; David CHARNY, « Hypothetical Bargains :

(20)

""La",-",-,p~,"",o.::.>te"""ct"""io~n"-,d,,,,,e,,,-s-"!:ac""t"",io"-,-n:.:;,na:<.:;.ir,-,,e,,,-s=m=in"",o-,-,ri"",ta"",ir-",es"--"",lo-,-,,rs,-,d,,--'o~p,-"é-,-,ra"",ll""·o,-"ns,-,d::.>e~p",-r:><is""es,-,d"",e,-,,c=on:.:;,t-,-,ro<.!:.'le,,-- 8

cause principale de l'inefficacité des contrats21. Les professeurs Ian Ayres et Robert

Gertner22 ont soutenu que, même quand les coûts de transaction sont bas, les parties

ne vont pas nécessairement opter pour une règle supplétive23• Ils précisent qu'une

partie pourrait préférer contracter une disposition inefficace si elle est consciente que

la négociation exigerait la révélation d'informations que l'autre partie ignore24.

Chaque partie à la négociation doit avoir deux préoccupations. D'une part, elle doit essayer de tirer le plus de profits tout en prétendant que la transaction est

profitable à tous les contractants25. D'autre part, quand l'autre partie se rend compte

de sa stratégie et revendique les profits supplémentaires, le négociateur raisonnable préférera arrêter la négociation.

Une partie contractante peut avoir une motivation à accepter des règles supplétives inefficaces plutôt que de tenter de négocier si elle possède de l'information qui pourrait imposer des coûts et que le fait de négocier les règles supplétives l'amènerait à révéler l'information à l'autre partie.

IL Problématique

La théorie du réseau de contrats repose sur le fait que les parties coopèrent

.' pour optimiser le rendement de leurs transactions. Cette coopération atteint son

apogée quand les transactions visent un objectif commun. Cependant, la flamme de cette collaboration va s'épuiser lorsque les décisions porteront sur la distribution des bénéfices ou la restructuration du capital actions. Dans ces derniers cas, chacune des parties va essayer d'influencer le processus de distribution des bénéfices en essayant

de profiter de l'asymétrie substantielle dans ses rapports avec les autres parties26.

Cette asymétrie peut se matérialiser par «un pouvoir de monopole, local ou temporel,

21 Eric A. POSNER, «Contract Remedies, Precaution, Causation, and Mitigation», Encyclopedia of

Law and Economies, Edward Elson ed., 1998,3-11.

221.AYRES& R.GERTNER, loc. cit., note 12,99-100.

23Guido CALABRESI& A. Douglas MELAMED, <<Property Rules, Liability Rules, and Inalienability

: One View of the Cathedral», (1972) 85 Harv. L. Rev. 1089; Elizabeth HOFFMAN & Matthew L.

SPITZER, «The Coase Theorem: Sorne Experimental Tests», (1982) 25 J.L.& Econ. 73.

241.AYRES& R. GERTNER, loc. cit., note 12, p. 93.

25David A. LAX & JamesK. SEBENIUS, The Manager as Negotiator: Bargaining for Cooperation

and Competitive Gain, New York, The Free Press, 1986, p. 124.

(21)

""La~pr,-"o,-,-,te"""c"-,ti""Olc!"'l....de"",s,-,a""c"-,ti",,Ol,",",m",-,,a,-,!ir-,,e,,-s!.'-'m"-'Cù",l0,",-,rl",·ta"-'.ir,-"es",--,-,lo<.!..r,,-s....d-"'o~p"'"ér-,oa.u.tio"'-'n-"'s'-"d"'e..t'p'"'-'rl""'·se""'s'-!:d'""e-"c""o!.'-'/lt"-'ro"'-'·l-".e 9

sur l'accès à l'information ou encore sur la juste évaluation de petites probabilités ou arrangements complexes (rationalité limitée) ou sur la capacité d'assumer les risques»27. L'asymétrie des rapports peut engendrer un risque d'opportunisme.

L'hypothèse d'opportunisme, au sens de O. E. Williamson28, consiste en «la

recherche de son propre intérêt en ayant recours à la ruse». En d'autres termes,

l'opportunisme consiste en une redistribution de la richesse au détriment de l'autre partie et sans son consentement, et ce en dissimulant de l'information ou en profitant d'une position de force. Ainsi, l'opportunisme suppose implicitement une infraction aux normes éthiques. Or, si cette infraction est coûteuse et qu'elle est source de désutilité, les agents ne sont pas nécessairement opportunistes. Cependant, ils peuvent l'être s'ils estiment que les gains issus de l'opportunisme sont supérieurs aux coûts induits.

Dans les sociétés par actions, les problèmes d'asymétrie de l'information entre dirigeants et actionnaires peuvent être déterminants pour la performance de

l'entreprise29. La majorité des études sur la relation d'agence se sont intéressées aux

mécanismes d'incitation mis en place par les actionnaires ou résultant des marchés3o.

Peu d'études3! semblent s'intéresseràl'autre composante du conflit d'agence, àsavoir

l'accroissement du pouvoir de négociation de l'agent (en l'occurrence le dirigeant). L'enracinement traduit la volonté de l'agent de s'affranchir, au moins partiellement, du contrôle du principal (les actionnaires) afin de pouvoir s'octroyer des avantages personnels plus importants (soit sous forme de rémunération en espèces, soit sous forme d'avantages en nature).

Suite à l'opportunisme engendré par ce type de rapports, est-il possible

27 Ejan MACKAAY, « L'analyse économique du droit dans les systèmes civilistes », document de

travail, Université de Montréal, 2000, p.20; Voir aussi: William A. KLEIN, «The Modem Business Organization: Bargaining underConstraints», 1981-82,91 Yale L.J. 1521, 1556.

28 O.E. WILLIAMSON, «Corporate Finance and Corporate Governance», (1988) Journal of Finance,

vol.43 , n° 3, July, 567-591. Voir aussi: O.E. WILLIAMSON, «Strategy Research: Governance and Competence Perspectives», (1999) Stategic Management Journal, vol. 20, 1087-1108; S WINTER, «On Coase, Competence, and the Corporation», 1999, in O.E. WILLIAMSON and S. WINTER (eds), The Nature of the Firm, Oxford, Blackwell, 1991, p. 179-195.

29M.C. JENSEN, W.H. MECKLING, «Theory of the Firm, Managerial Behavior, Agency Costs and

Ownership Structure», (1976) Journal of Financial Economics, vol. 3, 305-360.

30E.P.H. FURTADO and V. KARAN, «Causes, Consequences, and Shareholder Wealth Effects of

Management Turnover, A Review of the Empirical Evidence», (1999) Financial Management, 60-75.

31 A SHLEIFER, R. VISHNY, «Management Entrenchment: The Case of Manager-Specific

(22)

=<L"",a~p"',-"o""te","c'""tio"-,-/l,-,d,,-,e,,,-s-""ac"-,-t",-"io"-,/l,-"/la"",-i!....>re",-s.!..!..m,-,!i'-,-,,I0,,-,rz,-,-,·ta,,,,,irc.:e",-s"'""lo"-'rs'--'d:!....'-"'Jop"-'é'"'"'ra~t"'""io"-'lls"--"'de"-Jp"-'-r-'-"is""es'--'d"-'e:....!c'-"o.!..!.;11 t,,-,ro,,-!-l.=:..e 10

d'établir un équilibre entre les actionnaires minoritaires et les actionnaires majoritaires par des règles supplétives?

Les solutions proposées par le législateur doivent-elles êtres concrétisées par

des règles supplétives ou impératives ou à la fois par des règles impératives et

supplétives?

Pour répondre à ces questions, deux théories juridiques rivalisantes de la

société ont émergé, chaque avancement de l'une s'opposant aux réponses de l'autre. La première théorie, la théorie de réseau de contrats, définit la société comme un ensemble de rapports contractuels entre le centre de la société et les divers fournisseurs. Les détracteurs de la théorie de réseau de contrats, en opposition, affirment que la conception de la société comme un réseau de contrats ne fait que laisser la voie ouverte aux actionnaires majoritaires, ce qui engendrerait un déséquilibre entre les actionnaires de la société.

A. La théorie de réseau de contrats:

Dans l'interprétation dominante des théories contractuelles appliquées à la

société, l'analyse du schéma de création et d'appropriation de la valeur est très spécifique. La justification des frontières de la société repose principalement sur la

vision Williamsonnienne de la théorie des coûts de transaction32, à savoir que la

société existe pour pallier aux failles du marché, ces dernières étant liées aux problèmes posés par la spécificité des actifs et l'opportunisme potentiel des acteurs. Autrement dit, on internalise pour éviter d'être spolié et afin de perdre le minimum de

valeur par rapport à ce qui serait réalisable et par rapport à l'optimum de premier

rang, à l'économie du Nirvana. Appliqué à la finance, ce schéma conduit

Williamson33 à justifier le recours aux fonds propres externes pour financer les

investissements spécifiques.

L'interprétation fondée sur la théorie de l'agence reprend principalement les

arguments associés au modèle financier de Jensen et Meckling3

4,

à savoir que la

32O.E. WILLIAMSON, loc. cit., note 28, p. 567-591.

33Id., p. 581.

34M.C. JENSEN, « Organization Theory and Methodology », (1983) The Accounting Review, vol. 58,

n° 2, p.319-339; M.C. JENSEN, «Agency Costs of Free Cash Flow, Corporate Finance, and Takeovers», (1986) American Economic Review, vol. 76, n° 2, 323-329; M.C. JENSEN, «The Modem

(23)

~L:::..a""-p,-,ro,-,-t=ec=tl=·o,,-,ll....::d=es,,--,,,-ac=t=io=n=n.::.Ql:.:..·r~eS,-,",,-,I:.:.;ill=o.:....:rl=·ta~i'-'res"'--"'lo"-'rs-"--"'d'-"o~p=é'-'ra~t""io=n"-s=d"-e~p'-'ri"-'se""s....::d=e....::c'-"'o'-"/lt:.:..ro""ï=e ll

gestion des contrats entre la société, centre contractant, et les partenaires financiers (actionnaires et créanciers financiers) doit se faire de façon à réduire au mieux les coûts d'agence, c'est-à-dire les pertes de valeur.

L'article de Jensen et Meckling, «Theory of the Firm : Managerial Behavior,

Agency Costs and Ownership Structure»35, est généralement considéré comme ayant

introduit une rupture de paradigme en finance des sociétés en donnant naissance à la finance organisationnelle. L'objectif de cet article n'était cependant pas de faire une recension mais plutôt de prendre du recul par rapport aux développements de la finance.

De leur côté, Alchian et Demsetz36 considèrent que «la firme est un substitut

spécialisé au marché pour l'utilisation en équipe des facteurs de production .. elle constitue un meilleur vecteur de recueil et d'obtention de la connaissance sur des ressources hétérogènes»37. Le rôle de la connaissance organisationnelle, créée par le

management pour aboutir à une performance productive supérieure, est explicite38.La

Industrial Revolution, Exit, and the Failure of InternaI Control Systems», (1993) Journal of Finance, vol. 48, n° 3, 831-880; M.C. JENSEN, «Self Interest, Altruism, Incentives, and Agency Theory», (1994) Journal of Applied Coroorate Finance, vol. 7, n° 2; M.C. JENSEN, Foundations of organizational strategy. Harvard University Press, 1998, p. 165; M.C. JENSEN, A theorv of the firm: Governance. residual claims and organizational forms, Harvard University Press, 2000, p. 43; M.C. JENSEN, «Value Maximization and the Corporate Objective Function», (2000) in M. Beer et N. Nohria, Breaking the Code of Change, Harvard Business School Press, p. 37-57; M.C. JENSEN et W.H. MECKLING, «Theory of the Firm : Managerial Behavior, Agency Costs and Ownership Structure», (1976) Journal of Financial Economics, vol. 3, n° 4, 305-360; M.C. JENSEN et W.H.

MECKLING, «Specific and General Knowledge and Organizational Structure», (1992) inL.WERIN

et H. WIJKANDER, Contract Economics, Oxford, Blackwell, p. 251-274; M.C. JENSEN et W.H. MECKLING, «The Nature of Mam>, 1994, Journal of Applied COI:porate Finance, vol. 7, n° 2, 4-19.

35 M.C. JENSEN and W.H. MECKLING, «Theory of the Firm: Managerial Behavior, Agency Costs

and Ownership Structure», (1976) Journal of Financial Economics, vol. 3, n° 4,305-360.

36A.A. ALCHIAN and H. DEMSETZ, <<Production, Information Costs, and Economic Organization»,

(1972) American Economic Review, vol. 62, n° 5, 777-795.

37 Id., p. 794, «... the firm is a specialized surrogate for a market for team use of inputs; it provides

superior (i.e. cheaper) collections and collation ofknowledge about heterogeneous resources».

38 On trouvera un argument similaire dans A.A. ALCHIAN, «Corporate Management and Property

Rights», (1969) in H. MANNE (ed.), Economic Policy and the Regulation of Corporate Securities, Washington, D.C., American Enterprise Institute for Public Policy Research, p. 337-360. Dans cet

article,ilattribue la compétitivité des grandes firmes à l'existence des marchés internes du capital et du

personnel. Ces marchés internes permettent d'obtenir une information, une connaissance qu'il est impossible d'obtenir sur des marchés externes. Cette analyse est confirmée par le rôle que Demsetz

attribue à la connaissance«It may weil be that superior competitive performance is unique to the firm,

viewed as a team, and unobtainable to others except by purchasing the firm ... The firm may have established a reputation or goodwill that is di/ficult to separatefrom thefirm itself. .. Or it may be that the members of the employee team derive their higher productivity from the knowledge they possess about each otherinthe environment ofthe particularfirminwhich they work, a source ofproductivity

(24)

""La~p~ro~te~c:..!.!tl~·o!.!-n..!:!d~es~ac~t~io:!.!n!.!-na~I:!.:·re~Sc.!m!'!cl~·n~o!..!.ri!..!:ta~ir~e:>!..s..!..!lo!.!-r..>!..s~d~'o~p~ér!..!:a~tl~·o!.!-ns~de=:...PltJr~iso!.,!;e~s..!:!d~e~c~on~t~ro~'l.=:.e 12

connaissance organisationnelle allait prendre un rôle encore plus important chez

Demsetz39 dans sa théorie de la firme spécialisée. Dans cet article, qui constitue une

critique sévère de la théorie des coûts de transaction dans sa version

Williamsonnienne, et notamment de l'argument de la spécificité à la base de l'intégration verticale, Demsetz propose une définition de la société faisant intervenir de nombreux autres motifs que la spécificité: «Chaque firme est un panier

d'engagements envers une technologie, du personnel et des méthodes, tous contenus et contraints par une couche d'informations spécifiques à la firme qui l'isole, et ce

panier ne peut être transformé ou imité facilement ou rapidement»40. Cette définition s'inscrit cependant dans la perspective contractuelle telle que la définit Demsetz. Pour

ce dernier, un réseau de contrats ne constitue une firme que sous trois conditions: (1)

la société doit être une unité spécialisée de production pour autrui, (2) le réseau de contrats doit être durable et (3) la coordination doit être dirigée. Il ajoute qu'au-delà des considérations traditionnelles associées aux coûts de la coordination marchande et de surveillance, le troisième facteur, déterminant la productivité de la société, est lié aux conditions qui sous-tendent l'acquisition et l'utilisation de la connaissance, ce qui le conduit à définir les sociétés comme «des répertoires de connaissances

spécialisées et d'inputs spécialisés pour mettre en œuvre cette connaissance»41,leurs frontières étant déterminées, notamment, par le souci de réduire les coûts liés à la

connaissance42.

that may be difficult to transfer piecemeal»; H. DEMSETZ, «Industria1 Structure, Market Riva1ty, and

Public Policy», (1973) Journal of Law and Economies, vol. 16, 1-10.

39H DEMSETZ, «The Theory of the Firm Revisited», (1991)inO.E. WILLIAMSON and S. WINTER

eds, The nature of the firm, Oxford University Press, p. 159-178, publié initialement dans le : Journal of Law, Economies and Oganization, vol. 4,1988,141-163.

40 Id., p. 165 <<Each jirm is a bundle of commitments to technology, personnel and methods, ail

contained and constrained by an insulating layer of information that is specifie to the jirm, and this bundle cannot be altered or imitated easily or quickly».

41 Id., p. 171, «as repositories of specialized knowledge and of the specialized inputs required to put

this knowledge to work».

42Id., p. 173,«The vertical depth of the jirm may be considered from the perspective of the need for

conserving on information costs. » On peut remarquer que Coase est jinalement proche de cette analyse. Comme il l'écrit«...while transaction cost considerations undoubtly explain why jirms come into existence, once most production is carried out within jirms and most transactions are jirm-jirm transactions and not factor-factor transactions, the level of transaction costs will be greatly reduced and the dominant factor determining the institutional structure ofproduction willingeneral no longer be transaction costs but the relative costs of difJerent jirmsin organizing particular activities». R.H.

(25)

""La"-.t'.'P",-"o"-,te",'c-,-"tio,,,,'-'...ld"",e""s-"a",-c,-"tio"-,n!-!.;n..."a-,-"ir-",es,--,m=in",,o,--,ri"'-"ta!.!.!ir~e:!...s ~lo~rs"--d~'ot!-'pe,,,-'r-",-at,-"ioo!.!..ll!>!.s..:od""-eJ;!.p,--,ri"-,se""-s--,,d,,,-e-,,,c~O'!.!.!lt.!..>ro,,-,-'l,,-e 13

À la lecture de l'œuvre de Jensen et Meckling, nous constatons qu'ils ont été

directement influencés pour construire leur théorie des organisations, dont est issu

leur modèle de la structure de financement, par Demsetz43,par Hayek44et par Alchian

et Demsetz45. Tant leur théorie de l'architecture organisationnelle que leur théorie de

la gouvernance46 sont fondées sur l'idée clé que les structures de propriété, les

systèmes de gouvernance, les systèmes de décision et les systèmes de contrôle sont déterminés de façon à exploiter au mieux la connaissance spécifique, supposée être le déterminant de la perfonnance.

La théorie du réseau de contrats présente la société non pas comme une entité mais comme un agrégat de plusieurs fournisseurs «inputs» qui agissent ensemble dans le but de produire des biens ou des services. Les employés fournissent le travail. Les créanciers fournissent des capitaux sous forme de créances. Les actionnaires fournissent le capital actions, supportent le risque de perte et contrôlent la performance de la gestion. Les dirigeants, quant à eux, contrôlent la performance des employés et coordonnent les activités de tous les fournisseurs de la société. La société n'est qu'un réseau complexe de relations contractuelles entre ces fournisseurs. En d'autres tennes, la société est constituée par un réseau de contrats explicites et implicites qui instituent des droits et des obligations parmi la variété des

fournisseurs47.

12,3-13.

43 H. DEMSETZ, «The Theory of the Firm Revisited», (1991) in O.E. WILLIAMSON and S.

WINTER eds, The Nature of the Firm, Oxford University Press, p. 159-178, publié initialement in Journal of Law, Economics and Organization, vol. 4, 1988, 141-163.

44F.A. HAYEK, «The Use of Knowledge in Society», (1945) American Economic Review, vol. 35,

519-530.

45 A.A. ALCHIAN et H. DEMSETZ, «Production, Information Costs, and Economic Organization»,

(1972) American Economic Review, vol. 62, n° 5, 777-795.

46 M.C. JENSEN, Foundations of Organizational Strategy, Harvard University Press, 1998; M.C.

JENSEN, A Theory of the Firm: Governance, Residual Claims and Organizational Forms, Harvard University Press, 2000, p. 145.

47Frank H. EASTERBROOK & Daniel R. FISCHEL, «Close Corporations and Agency CostS», (1986)

38 Stan. L. Rev. 271; Frank H. EASTERBROOK & Daniel R. FISCHEL, «Limited Liability and The Corporation», (1985) 52 U. Chi. L. Rev. 89; Frank H. EASTERBROOK & Daniel R. FISCHEL, «Optimal Damages in Securities Cases», (1985) 52 U. Chi. L. Rev. 611; Frank H. EASTERBROOK &

DanielR. FISCHEL, «Mandatory Disclosure and the Protection of Investors», (1984) 70 VA. L. Rev.

669; Frank H. EASTERBROOK & DanielR. FISCHEL, «Voting in Corporate Law», (1983) 26 J.L. &

Econ. 395; Frank H. EASTERBROOK & Daniel R. FISCHEL, «Corporate Control Transactions»,

(26)

",La=-..<.p,-"ro,-"fe",c""tl""·o!.!.n.",d""es"--""ac"",f"-"io,-"n,,-,n-,",a1!L.·r,,,,es,-,m!.!.1,,,,·n""o!....!ri~fa~ir~e"'-s..!.llo02r.""-'S-"d--"o~p""'é!....!ra~fl!;.!<·O:!..!n>!...s"",de~pr!....!is~e~s..!;d~e~c""o!!.!nf"-ro",",'I,,,-e 14

Le génie de ce modèle de société réside dans le fait qu'il permet la

spécialisation de chacun des facteurs de production48. Cette spécialisation mène à

l'efficacité de la sociétë9. Ainsi, les fournisseurs de capitaux sont des experts dans le

risque à supporter àtravers leur investissement dans la société et les dirigeants sont

des experts dans la coordination entre les divers moyens de production. Tout comme les autres types de rapports contractuels, les meilleurs contrats sont ceux négociés dans un environnement de marchés libres et dont les parties disposent de l'information pertinente parce que, dans un tel contexte, les prix seront correctement établis et les ressources auront une utilisation optimaléo.

Ainsi, la société, àla différence des autres formes d'organisation des affaires,

est caractérisée par la séparation formelle de la propriété et du contrôle. Malgré le fait que les actionnaires possèdent la société, ils n'ont virtuellement aucun pouvoir décisionnel. En fait, ils détiennent seulement le droit d'élire les membres du conseil d'administration et de voter un nombre limité des transactions de la société.

Malgré le fait que la séparation entre la propriété et le contrôle présente l'un des attributs essentiels des sociétés commerciales, elle en est aussi un des aspects les plus controversés. Les sociétés publiques peuvent ê.tre classifiées en trois catégories:

sociétés contrôlées par la majorité5!,sociétés contrôlées par la minorité52et sociétés

48R.H. COASE, loc. cit., note 4, 15; Voir aussi: R.A. COASE, The Nature of The Firm, Economica,

1937, vol. 4, p. 386-405; R. A. COASE, «The Nature of the Firm: Origin», in O.E. WILLIAMSON et S. WINTER eds, The Nature of The Firm, Oxford University Press, 1991, p. 34-47; RA COASE, «The nature of the fIrm : Meaning », in O.E. WILLIAMS ON et S. WINTER eds, The Nature of The Firrn, Oxford University Press, 1991, p. 48-60; R.A. COASE, «The nature of the fIrm : Influence», in O.E. WILLIAMSON et S. WINTER eds, The Nature of The Firm, Oxford University Press, 1991, p. 61-74; R.H. COASE, «Accounting and the Theory of The Firm», (1990) Journal of Accounting and Economies, vol. 12, 3-13; R. COASE, «The New Institutional Economies», (1988) The American Economie Review, vol. 88, n° 2, 72-74.

49F. H. EASTERBROOK & D. R. FISCHEL, op. cit., note 3, p. 148, chapitre 1; voir aussi: Oliver

WILLIAMSON, « Corporate Governance », (1984) 93 Yale L.J. 1197; William W. BRATTON, «The «Nexus of Contracts» Corporation: A Critical Appraisal », (1989) 74 Cornell L. Rev. 407.

50Ronald. J. DANIELS and Jeffrey G. MACINTOSH, loc. cit, note 1, p.867.

51Société contrôlée par la majorité: société qui a un actionnaire dominant ou un groupe d'actionnaires

qui agissent de concert et qui contrôlent ou qui portent plus de 50 % des actions extraordinaires votantes. Les sociétés contrôlées par la majorité démontrent une séparation partielle entre la propriété et le contrôle. Les actions des actionnaires minoritaires leur permettent de participer dans la propriété de la société mais pas dans le contrôle.

52Société contrôlée par la minorité: société qui a un actionnaire dominant ou un groupe d'actionnaires

qui agissent de concert et qui ont moins que 50 % des actions extraordinaires votantes mais qui, malgré tout, sont capables d'exercer un contrôle de vote effectif. Dans ce cas, la minorité contrôle la société, ce qui démontre une séparation partielle de la propriété et du contrôle.

(27)

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contrôlées par les administrateurs53.

La croissance du contrôle par les administrateurs est due à l'éparpillement du capital-actions entre beaucoup d'actionnaires, aucun d'entre eux ne disposant d'assez d'actions pour affecter matériellement la gestion de la société.

La séparation entre la propriété et le contrôle présente l'un des facteurs du succès des sociétés, et cela peut être constaté, d'une part, du fait que la plupart des investisseurs dans les sociétés préfèrent être des détenteurs passifs du capital-actions et, d'autre part, au fait que la séparation entre propriété et contrôle engendre une efficacité au niveau du pouvoir décisionnel.

Cependant, le risque consiste au fait que les administrateurs peuvent décider de dépenser les profits dans des projets qui seront plus bénéfiques aux administrateurs qu'aux actionnaires. Pour faire face à la divergence potentielle d'intérêts entre les administrateurs et les actionnaires, plusieurs législations ont essayé de trouver des solutions pratiques à ce dilemme. Nous pouvons citer, par exemple, le fait d'essayer d'unifier le contrôle et la propriété en donnant aux actionnaires plus de contrôle de la société. Ce contrôle se manifeste par le rôle actif des investisseurs institutionnels qui interviennent dans «le gouvernement des sociétés», en combinant, du moins

partiellement, la propriété et le contrôle. D'autres législations ont visé la

responsabilité des administrateurs qui résulte de la séparation entre la propriété et le contrôle. Puisque les actionnaires ne contrôlent pas la société, ils ne peuvent pas discipliner les administrateurs qui mettent leurs intérêts personnels avant l'intérêt social. Le gouvernement d'entreprise fourni des alternatives, des mécanismes

légaux54et économiques55 pour discipliner les dirigeants qui abusent de leur position.

Il y a aussi des tentatives d'aligner les intérêts des actionnaires et ceux des dirigeants. En ce sens, nous pouvons citer les dispositions fiscales qui encouragent les

administrateurs à acheter les actions de la société56.

53 Société contrôlée par les administrateurs: société dans laquelle aucun actionnaire ou groupe

d'actionnaires ne dispose d'un nombre d'actions qui leur permet d'avoir le contrôle de la société. Dans ce cas, ce sont les dirigeants ou les membres du conseil qui contrôlent la société, ce qui démontre une séparation entre la propriété et le contrôle de la société.

54Nous pourrons citer à titre d'exemple l'obligation de loyauté, voir infra, p. 268.

55Nous pourrons citer à titre d'exemple les offres publiques d'achat hostiles, voir infra, p. 318.

(28)

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La théorie du réseau de contrats suggère que les règles supplétives

gouvernent. Les seules entraves à cette utopie utilitariste5? sont les coûts de

négociation et le contrôle de l'exécution de ces contrats. Les coûts de la

transaction consistent dans les dépenses pour obtenir l'infonnation, négocier les contrats, de même que les dépenses résultant de la divergence d'intérêts entre les dirigeants et les fournisseurs de capital. Ainsi, selon la théorie du réseau de contrats, le but structurel du droit des sociétés et de son rôle régulateur est de réduire les coûts des transactions et des dépenses d'agence. La réduction des dépenses d'agence est accomplie par le maintien d'un marché relativement libre et efficace dans lequel les divergences des moyens de gestion vont engendrer la maximisation de bénéfices qui seront transmis aux fournisseurs de capital, et des mesures punitives ou correctives peuvent être effectuées par le marché avec une intervention gouvernementale

minime58. Cependant, avant que des réajustements sur le marché ne puissent avoir

lieu, une réduction de prix de l'action pourrait nuire à quelques fournisseurs de

capital. Un investisseur qui détient un portefeuille diversifié ne sentira pas la douleur

de la perte59. Le système du marché est, après tout, conçu pour maximiser la

protection sociale globale plutôt que n'importe quelle sorte de justice

distributionnelle6o. Bien que des pertes puissent avoir lieu, l'investisseur peut les

réduire au minimum en reproduisant le marché dans son portefeuille personnel61.

Néanmoins, la théorie du réseau de contrats reconnaît l'exigence de l'établissement de certaines règles de jeu qui priment en cas de conflit d'intérêts entre les dirigeants et les actionnaires pour empêcher le niveau global du marché de chuter. Autrement dit, si les abus des biens sociaux par des dirigeants faisaient partie du jeu, les actionnaires escompteraient le coût prévu d'un tel abus aussi bien que le coût de contrôle et des

remèdes d'un tel comportement au niveau du prix des actions62. Par conséquent,

Easterbrook et Fischel ont fait une concession aux règles juridiques relatives à ce

57Jules L. COLEMAN, «The Nonnative Basis of Economie Analysis: A Critical Review of Richard

Posner's the Economies of Justice», (1982) 34 Stan.L. Rev. 110S-II13.

58F. H. EASTERBROOK & D.R.FISCHEL, op. cit., note 3,p.IS.

59Id., p. 121.

60Id.,p. 122.

61 Richard BREALEY & Stewart MEYERS, Principles of Corporate Finance, Boston, Mass,

McGraw-Hill/Irwin,i hed, 2003, p.136-39.

(29)

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qu'ils ont appelé le devoir de fiduciairé3.Nous précisons ce qu'ils appellent le devoir

de fiduciaire parce que le devoir qu'ils décrivent est différent de n'importe quelle formulation juridique usuelle du devoir de loyauté. Ce n'est ni un devoir d'agir dans l'intérêt de la société ou ses actionnaires, ni un devoir de diligence et de loyauté envers la société ou ses actionnaires. Plutôt, les auteurs décrivent les règles de fiduciaires comme la négociation que les parties auraient menée, en ce qui concerne l'affaire en jeu, s'ils avaient pu négocier et mettre en application leurs accords, en absence de dépenses de négociation.

Easterbrook et Fischel reconnaissent que cette négociation est strictement hypothétique. Cette reconnaissance, cependant, mène à la question relative à la source du modèle de la négociation hypothétique. Selon les auteurs, la solution est simple: c'est le marché. Les juges doivent compter sur les solutions auxquelles sont parvenues des parties qui ont déjà négocié une affaire similaire et sont obligés de

contraindre les parties à appliquer les termes de cette négociation64.'Ainsi, même dans

le cas où une intervention jurisprudentielle est nécessaire, le marché mène le jeu. Nous pouvons constater que les tenants, tout comme les détracteurs de la théorie du réseau de contrats, ne semblent pas accorder une grande importance au rôle

d'un acteur institutionnel central, à savoir le pouvoir judiciaire65. La jurisprudence66,

employant des techniques d'interprétation des lois et des contrats d'intra-société, réconciliera souvent n'importe quelle tension qui peut exister entre «contractarians»

63Id., p. 92.

64 F. H. EASTERBROOK & D. R. FISCHEL, op. cit., note 3, p. 34. À propos du modéle de

négociation hypothétique voir: David CHARNY, «Hypothetical Bargains: The Normative Structure of

Contract Interpretation», (1991) 89 Mich.1. Rev., 1877-78; 1. AYRES& R. GERTNER, loc. cit., note

12, p. 127; Ronald DWORKIN, «Why Efficiency?», (1980) 8 Hofstra 1. Rev. 574-84; Jules 1.

COLEMAN, «The Normative Basis of Economie Analysis: A Critical Review of Richard Posner's

«The economics of Justice»», (1982) 34 Stan. 1. Rev 105, 1113, 119-27; Michael J. SANDEL,

Liberalism and the Limits ofJustice, Cambridge University Press, second edition, 1998, p.105-13.

65 John C. COFFEE, «The Mandatory/Enabling Balance in Corporate Law: An Essay on the Judicial

Role», (1989) 89 Colum. 1. Rev. 1618; M. Eisenberg, The Structure of the Corporation: A Legal

Analysis, Little Brown& Co Law& Business, 1977, p.l34-211; Brudney, «Corporate Govemance,

Agency Costs, and the Rhetoric of Contract», (1985) 85 Colum. 1. Rev., 1403, Frank H.

EASTERBROOK& Daniel R. FISCHEL, «The Proper Role of a Target's Management in Responding

to a Tender Offen>, (1981) 94 Harv. 1. Rev. 1161, 1175, 1189, 1201; Frank H. EASTERBROOK &

Daniel R. FISCHEL, «Mandatory Disclosure and the Protection of Investors», (1984) 70 V. 1. Rev.

669,697-99.

66 Voir à titre d'exemple: McClurg c.Canada, [1990] 3 R.C.S. 1020, voir dans le même sens Neuman

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