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Devenir élève en petite section : comment le jeune enfant devient-il un sujet actif pour apprendre au sein d'un groupe d'élèves ?

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Submitted on 10 Dec 2018

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Devenir élève en petite section : comment le jeune

enfant devient-il un sujet actif pour apprendre au sein

d’un groupe d’élèves ?

Marie Laferrière

To cite this version:

Marie Laferrière. Devenir élève en petite section : comment le jeune enfant devient-il un sujet actif pour apprendre au sein d’un groupe d’élèves ?. Education. 2018. �dumas-01917821�

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É

COLE SUPERIEURE DU PROFESSORAT ET DE L

EDUCATION DE L

ACADEMIE DE

P

ARIS

DEVENIR ELEVE EN PETITE SECTION

Comment le jeune enfant devient-il un sujet actif pour apprendre au sein

d’un groupe d’élèves ?

Marie Laferrière MEMOIRE DE MASTER MEEF

Mention Premier degré

Sous la direction de Claire Martinot

2017-2018

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TABLE DES MATIERES

TABLE DES MATIERES... 2

INTRODUCTION... 5

I. De l’enfant à l’élève : apprendre à apprendre avec les autres ... 7

I.1. L’élève, un statut particulier ... 7

I.1.1. Quelle évolution historique de l’élève dans le temps ? ... 7

I.1.2. Quelle place pour l’élève dans les instructions officielles ? ... 8

I.1.3. Vers une définition de l’élève : l’élève-sujet ... 9

I.2. La petite section, un cas d’école ... 10

I.2.1. Gestion de classe ... 10

I.2.2. De l’implicite dès l’entrée à l’école ... 11

I.2.3. Le lien avec l’acquisition du langage ... 12

I.3. Éviter les malentendus, quelles solutions ? ... 13

I.3.1. L’étayage : l’enseignant, médiateur des apprentissages ... 13

I.3.2. Vers un enseignement explicite ... 15

I.3.3. L’estime de soi, une variable indispensable ... 16

I.4. Les domaines du devenir élève ... 18

I.4.1. Vivre ensemble ... 18

I.4.2. Devenir autonome ... 19

I.4.3. Apprendre à apprendre ... 21

II. Former les élèves de petite section : expérimentation en classe ... 23

II.1. Enquête empirique ... 23

II.1.1. Présentation du terrain ... 23

II.1.2. Choix de la méthode ... 23

(4)

II.2. Exemples des dispositifs mis en place pour apprendre à devenir élève ... 24

II.2.1. Les règles de vie ... 24

II.2.2. Le tutorat ... 26

II.2.3. Les responsabilités ... 27

II.2.4. L’estimomètre et autoévaluation... 27

II.2.5 Un exemple de séquence « explicite » ... 28

II.3. Retour sur les hypothèses de départ ... 30

II.3.1. Règles de vie ... 30

II.3.2. Le tutorat ... 31

II.3.3. Les responsabilités ... 32

II.3.4. L’estimomètre et autoévaluation... 32

II.3.5. Un exemple de séquence « explicite » ... 33

II.4. Perspective ... 34

CONCLUSION ... 35

ANNEXES ... 37

1. Progression « Devenir élève » ... 37

2. Séquence : Règles de vie ... 38

3. Progression des règles de vie avec explicitation ... 39

4. Séquence : tutorat ... 40

5. Les responsabilités... 42

7. Fiche d’autoévaluation en motricité ... 43

8. Séquence sciences : Le corps ... 44

9. Grille d’évaluation « devenir élève » pour l’enseignant ... 48

BIBLIOGRAPHIE ... 50

I. Partie théorique ... 50

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REMERCIEMENTS

Je tenais d’abord à remercier toutes les personnes qui ont participé de loin ou de près à l’élaboration de ce mémoire. Mes collègues d’une part, qui tout au long de l’année ont su m’aiguiller et me donner des conseils dans mon thème de recherche. Mon directeur d’école, qui a partagé son expérience et son temps pour aider les jeunes collègues comme moi dans leur démarche pédagogique. Mais aussi mes collègues PES, sans qui la métacognition n’existerait pas. Bien que peu expérimentés dans le domaine de l’enseignement, nos discussions et questionnements profonds sur l’attitude et la posture de l’élève, m’ont permis d’éclaircir ma problématique tout au long du stage.

Je remercie également Madame Claire Martinot, tutrice de mémoire, pour sa bienveillance, son temps de concertation auprès des étudiants et son aide pour élaborer et répondre à ma problématique.

Enfin, je remercie toutes les personnes de mon entourage qui ont accepté de lire ce mémoire afin de m’aider à l’améliorer.

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INTRODUCTION

« Ceux qui découvrent l’univers scolaire comme un univers relativement nouveau et étranger dépendent le plus complètement de l’école pour réussir1. » Les enfants de petite

section découvrent cet univers nouveau que nous décrit Lahire. Ils arrivent dans un nouvel espace réglementé avec de nouveaux adultes référents. Beaucoup de changements s’effectuent durant l’année de petite section. Autant de changements qui vont leur demander une grande adaptabilité aux exigences de ce lieu. C’est ce que j’ai pu constater dans ma classe de petite section.

L’effectif étant de 28 élèves, nous avons dû vite nous acclimater à la dynamique de ce niveau de classe particulier et singulier. Particulier car ce niveau est propre aux enfants de trois à quatre ans et singulier, car il représente la première immersion au sein de l’école. Les sphères de développement de l’enfant qu’elles soient physiques, cognitives, affectives ou sociales sont inséparables.

La problématique à laquelle j’ai dû faire face dans ma classe peut se traduire par la question suivante : comment aider les enfants de petite section à intérioriser les règles de vie de classe et de l’école pour apprendre et devenir progressivement élèves ?

La première question que je voulais approfondir dans ce mémoire concernait la gestion de classe d’une classe de 28 élèves. Je me demandais d’abord comment gérer le nombre d’élèves qui semblait très important selon les collègues. Puis, en me penchant sur la question j’ai élargi le domaine de recherche en me demandant comment faire en sorte que l’effectif ne soit pas une contrainte. Je suppose alors qu’en aidant les enfants à devenir élèves, la gestion de classe ne pourra que s’améliorer.

Mes craintes concernant la gestion de classe des élèves de petite section, qui ne sont par définition, pas encore élèves, m’ont amenée à me questionner sur les différents outils et moyens à concevoir pour construire la posture d’élève. Lors de mes premières recherches sur le devenir élève, les mémoires qui se sont penchés sur la question ont précisé leur démarche en ciblant un élément qui participe de la formation de l’élève comme les comptines ou encore les coins jeux. J’ai fait le choix d’élargir les moyens à mettre en place car je pense que c’est l’ensemble des éléments qui permettent aux enfants d’évoluer en tant qu’élèves.

1 Lahire, Bernard, La raison scolaire. École et pratiques d'écriture, entre savoir et pouvoir, Rennes, Presses

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Compte tenu des références bibliographiques étudiées, j’émets l’hypothèse qu’à travers l’apprentissage des règles de vie, la mise en place de responsabilités, l’appropriation des outils pour apprendre à être autonome (estimomètre, tutorat) et l’explicitation de l’enseignement, les élèves faciliteraient eux-mêmes la gestion de classe.

J’ai alors débuté mes recherches bibliographiques pour consolider mes connaissances théoriques sur le devenir élève, précisément en maternelle. L’écart entre enfant et élève n’est pas si contrasté qu’il n’y paraît. On ne peut se contenter de considérer l’enfant dans sa sphère privée et l’élève au sein de la classe. Le simple passage du seuil de l’école ne suffit pas à se trouver élève. La formation de l’élève ne se restreint d’ailleurs pas à la seule année de petite section, on apprend à être élève tout au long de son cursus scolaire en réinvestissant et en intégrant chaque année de nouveaux codes et règles. Pour tenter de répondre à cette question, il a fallu élaborer des séquences d’apprentissage en prenant en compte le « devenir élève » qui est inscrit dans les programmes de maternelles depuis 2008. J’ai mis en place des dispositifs comme l’estimomètre ou le tutorat pour aider les élèves à adopter la posture d’élève.

Il s’agit d’abord de définir le devenir élève, à la fois dans les programmes mais aussi selon les pédagogues et les solutions qu’ils proposent de mettre en place. Nous préciserons le cas de la petite section et les différents domaines qui composent le devenir élève. Nous verrons ensuite en pratique quels dispositifs j’ai élaboré. Enfin, nous analyserons leurs résultats sur le devenir élève.

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I. De l’enfant à l’élève : apprendre à apprendre avec les

autres

I.1. L’élève, un statut particulier

I.1.1. Quelle évolution historique de l’élève dans le temps ?

Avant de s’intéresser aux pratiques à mettre en œuvre dans la classe, je m’intéresse aux éléments qui construisent le devenir élève. Une approche historique sur la formation de l’élève nous permettra ensuite d’analyser les attendus des programmes actuels puis de définir la notion d’élève du point de vue de Meirieu.

Alors qu’il n’existait jusqu’à la fin du XIXème siècle, que des maisons d’asiles pour

enfants, c’est en 1881 que la loi Jules Ferry définit l’école « maternelle » publique comme une institution à part entière, laïque, gratuite et non obligatoire. C’est à Pauline Kergomard que l’on doit, en France, les premiers apports sur les besoins spécifiques du jeune enfant. Elle préconise le respect de l’enfant et le jeu comme forme naturelle de l’apprentissage. En 1887, les institutrices sont formées en Écoles Normales spécifiques à l’école maternelle. L’enfant est capable d’apprendre et il faut nourrir sa curiosité. A l’époque, devenir élève n’est pas la priorité de l’école maternelle. Il s’agit de prendre en compte les capacités des enfants pour les ouvrir au monde qui les entoure.

Au début du XXème siècle, le développement des sens, du corps et de l’hygiène est

privilégié sans toutefois intégrer les apprentissages que l’on connaît aujourd’hui. C’est seulement en 1977, qu’une circulaire indique que la pédagogie doit être centrée sur l’enfant, « acteur de ses apprentissages ». Le rôle éducatif de l’école maternelle commence à se dessiner. En 1985, les programmes scolaires précisent que toutes les potentialités de l’enfant doivent être prises en compte afin de lui permettre de réussir à l’école et dans la vie. L’année suivante, les apprentissages se précisent dans quatre domaines d’activités (éducation physique, expression orale et écrite, expression artistique et sciences). Trois objectifs sont clairement identifiés : scolariser, socialiser et faire apprendre. On se rapproche de l’idéologie de la maternelle d’aujourd’hui où l’enfant vient à l’école pour apprendre tout en prenant en compte ceux qui l’entourent, enfants et adultes.

En 1989, la loi d’orientation met l’enfant au centre du système éducatif, alors sectionné en plusieurs cycles d’apprentissages. En 1995, des programmes spécifiques font de la maternelle la base du système scolaire, complémentaire à l’éducation familiale. L’objectif est

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clairement de préparer à l’école élémentaire. Cela implique de conditionner l’enfant de maternelle à la posture d’élève attendue en école élémentaire. Les programmes de 2002 illustrent bien cette volonté en créant deux axes forts : la maîtrise du langage et l’éducation civique. Le « Vivre ensemble » apparaît comme premier objectif dans les programmes scolaires. Les programmes de 2008, bien que fortement réduis en termes de contenus, établissent le « Devenir élève ».

Du vivre ensemble au devenir élève, s’allient des compétences communes : construire sa personnalité au sein de la communauté scolaire, comprendre et s’approprier les règles du groupe, échanger et communiquer dans des situations variées. L’apport du devenir élève permet d’associer le vivre ensemble à la notion de savoir. L’élève devient autonome, sait dire ce qu’il apprend. Alors que la définition de l’élève se précise progressivement dans les programmes, que prévoit le dernier Bulletin Officiel de 2015 sur le devenir élève ?

I.1.2. Quelle place pour l’élève dans les instructions officielles ?

Les nouveaux programmes de 2015 combinent les deux préceptes de vivre ensemble et de devenir élève, décryptés précédemment. La section concernée s’intitule « Une école où les enfants vont apprendre ensemble et vivre ensemble ». Ces programmes s’inscrivent dans un cadre national particulier où le vivre ensemble réapparaît comme une priorité de l’École de la République. L’école fonde les bases de la citoyenneté en faisant respecter les règles et la laïcité. Elle s’inscrit parfaitement dans une pluralité de cultures parmi lesquelles les enfants vont évoluer. A l’école maternelle, « l’enfant est appelé à devenir élève »2. On comprend

qu’une progression sur tout le cycle 1 est à envisager par les équipes pédagogiques pour atteindre au mieux cet objectif.

Les attendus en termes de devenir élève sont explicités de la sorte : repérer les rôles des adultes, s’approprier la fonction des différents espaces et respecter les règles de vie. Dès l’école maternelle, les enfants participent au débat collectif pour construire leur pensée sur des sujets de société tels que l’égalité entre les filles et les garçons. Ainsi, l’école assure les principes de la vie en société. Deux objectifs sont cités : connaître les fonctions de l’école et se construire comme personne singulière au sein d’un groupe.

Notons que le terme « élève » n’apparaît que neuf fois dans le programme contre plus de deux-cents fois pour le terme « enfant ». L’enfant est donc au cœur des programmes,

2 Bulletin officiel spécial n° 2 du 26 mars 2015

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l’élève, lui, se construit au long de sa formation. L’élève ne doit pas se réduire à sa fonction d’écolier sous peine de mettre à distance l’enfant qui le caractérise, omniprésent. Cette réflexion de terminologie a son importance quand on sait que les jeunes enseignants doivent employer le mot « élève » dans leurs présentations orales et écrites (lors du CRPE par exemple). La connivence entre ces deux termes est donc relative, prendre en compte l’élève de petite section c’est considérer l’enfant qui va progressivement construire cette posture. Pour cela, il faut se détacher du contenu purement didactique et pédagogique dans les préparations pour y intégrer certains autres critères comme l’attitude d’élève attendue dans une situation d’apprentissage. En effet, être élève c’est aussi savoir répondre aux attendus de l’école, de la société. C’est le processus de socialisation primaire, à savoir, la transmission des valeurs et des normes dans le but d’intégrer l’individu à la société et à son environnement social.

Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture consacre tout un domaine à la « Formation de la personne et du citoyen ». Bien qu’il concerne les élèves à partir du CP, l’école maternelle se doit de suivre les différents axes du socle pour préparer au mieux les élèves à la vie en société. Apprendre la vie en société, respecter les choix d’autrui et se former moralement et civiquement participe à la construction du futur citoyen et ce, dès la maternelle. Au cycle 1, cet apprentissage s’effectue à travers le respect des règles de vie, l’adaptation de soi dans un groupe hétérogène et l’initiation aux débats collectifs. L’école assure ainsi l’acquisition des principes de la vie en société. Mais entre l’élève et le futur citoyen, l’école renonce-t-elle bien au formatage et à la normalisation des enfants ? Philippe Meirieu nous livre sa vision de l’élève pour y répondre.

I.1.3. Vers une définition de l’élève : l’élève-sujet

Philippe Meirieu définit l’élève comme élève-sujet3. Selon lui, l’élève doit être capable de vivre dans le monde qui l’entoure sans pour autant en être le centre. Il prend sa place dans le groupe et accepte de s’intégrer dans un collectif solidaire. Il prend conscience que chacun peut s’impliquer dans ce groupe et prendre part à un projet commun. L’élève sait estimer les conséquences de ces choix sur lui, les autres et la société. Il prend plaisir à apprendre et comprendre les phénomènes qui l’entourent en distinguant ce qu’il fait de ce qu’il apprend. Être élève c’est aussi accepter l’avis de l’autre envers soi et adopter un comportement réflexif.

3 Meirieu, Philippe, « Qu’est-ce qu’un « élève-sujet » et comment l’aider à le devenir ? »,

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C’est être capable de s’investir pleinement dans la tâche proposée en intériorisant les exigences qui lui sont demandées. L’élève doit savoir distinguer le savoir et le croire. Il transfert ses pulsions grâce aux expressions artistiques, physiques ou scientifiques. Cependant, les enfants subissent la pression du monde de consommation dans lequel ils vivent. Être à l’école pour avoir un métier, accomplir ses études, gagner sa vie pour consommer, autant d’inquiétudes qui forgent une tension constante pour « réussir ». Or, Meirieu précise bien dans son article qu’ « il faut s’opposer de toutes ses forces à la réduction de l’individu à ses pulsions archaïques instrumentalisées par la machinerie marchande ».

Être élève ne relève pas seulement de la faculté à recevoir un enseignement, l’ambitieuse définition que nous dépeint Meirieu est bien plus complète. C’est à l’école de guider l’élève afin qu’il s’approprie chacune de ses capacités qui forgeront à terme le citoyen de demain. C’est bien cela que l’on doit retenir en tant qu’enseignant, apprendre aux élèves à devenir élèves c’est leur faire prendre conscience qu’ils sont un dans un ensemble et que chacun d’eux enrichie ses connaissances grâce à des compétences qui leur sont propres. Les enseignants aident les enfants à s’élever et à grandir. Alors comment résiste -t-elle à l’infantilisation des élèves ? Intéressons-nous à la section des petits pour comprendre dans quel contexte ils se construisent en tant que personnes.

I.2. La petite section, un cas d’école

I.2.1. Gestion de classe

La première scolarisation en école maternelle implique de nombreux changements pour les enfants. La gestion de classe des petits reflète les particularités de ce niveau. Nous verrons qu’ils sont confrontés aux normes de l’école très rapidement et que l’implicite généré accentue les inégalités entre les élèves notamment dans le domaine du langage.

Former les enfants à devenir élèves s’intègre lors des apprentissages mais plus généralement dans la gestion de la classe. Pour cela, l’enseignant doit installer un climat de confiance entre lui et ses élèves mais aussi entre les pairs. Si les élèves se sentent à l’aise dans leur classe, leur comportement sera adapté à celui de l’école et propice aux apprentissages.

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Germain Duclos, psychoéducateur Québécois, s’est intéressé au développement de l’enfant et à l’estime de soi. Dans son ouvrage4, l’enfant de trois ans éprouve des besoins

particuliers. Il imite l’autre car il se sent rassuré de savoir comment réagir à une situation. L’imagination des petits demande sans cesse à être alimenter. Les jeux symboliques sont sources d’exploration des rôles de chacun, ils sont très sollicités par les enfants. L’enfant de trois et quatre ans est en quête de réponses à ses questions. Il intériorise progressivement les règles sociales. Son besoin de socialiser se traduit par l’affection qu’il éprouve envers les adultes plus ou moins proches de lui et par la création d’amitiés suscitant la socialisation des enfants.

Passer du statut d’enfant unique qui a toute l’attention demandée par ses deux parents au partage d’un adulte avec 27 autres enfants relève d’un réel défi pour un élève de petite section. Fortement égocentré, il va apprendre dans son nouvel environnement à vivre avec les autres, à partager. L’école maternelle est une école bienveillante qui veille à l’épanouissement des enfants dans leur nouvel espace de vie. Les enfants doivent s’adapter à un nouveau rythme alternant le temps scolaire et périscolaire. La relation affective entre l’enfant et l’enseignant ou les autres adultes de l’école est très présente et importante pour le jeune enfant. Sa vision de l’école s’établit dès sa première année de scolarisation. Le regard porté sur chacun a un impact immédiat sur l’attitude des élèves. Il faut prêter une attention égale pour tous, ne pas se focaliser sur les élèves difficiles qui demandent plus d’attention et à être rassurés. Si l’école, au contraire, les rejette en les excluant systématiquement de la classe ou du groupe par exemple, la confiance est rompue, l’élève se dit qu’il n’est pas fait pour l’école. Or notre objectif c’est la réussite de tous en prenant en compte les différences de chacun. Chaque jeune enfant a besoin d’être entouré avec précaution et bientraitance. Gérer une classe de petite section est donc une tâche complexe qui consiste à créer un climat favorable à l’apprentissage. Mais cet apprentissage est-il accessible pour tout le monde ?

I.2.2. De l’implicite dès l’entrée à l’école

L’être social que représente l’enfant doit se reconnaître en tant que personne à part entière. Il apprend à vivre auprès d’autres enfants bien qu’il ne soit pas complètement constitué en sujet autonome. Cela implique la découverte des richesses et des contraintes du groupe. L’enfant répond à des attentes souvent implicites de l’école dans l’intégration

4 Duclos, Germain, Aider les jeunes enfants en difficulté : Prévention et intervention, Montréal, CHU St-Justine,

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d’exigences externes. Comme nous le démontrent les travaux de Marin et Crinon5, les tâches

proposées aux élèves sont la plupart du temps explicites à partir du moment où l’élève sait quoi faire mais les apprentissages, eux, resteraient implicites. L’élève comprend-il pourquoi il fait le travail ? Qu’a -t-il retenu de la tâche effectuée ? Sait-il mettre en mots ce qu’il a appris ? Autant de questions auxquelles les élèves n’ont souvent pas de réponse, restant dans l’exécution pure et simple de la tâche. Ce système que génère l’école accentue encore plus l’écart entre les élèves selon leur niveau social. PISA expose à chaque session le cas de la France : les élèves issus des milieux défavorisés ou de la deuxième génération d’immigrés ont les moins bons scores. L’école de la République n’accomplit qu’imparfaitement sa mission de réussite pour tous laissant les élèves en difficulté dans une reproduction d’échec scolaire.

J’ai moi-même pris conscience que je générais souvent de l’implicite avec les élèves. Ce phénomène était d’autant plus flagrant que plus les enfants sont petits plus il y a d’implicite. Leur panel de mots de vocabulaire étant restreint, beaucoup de notions sont très abstraites pour eux si elles ne sont pas développées ou montrées en exemple. En motricité, lorsqu’on leur demande juste de faire la queue pendant les ateliers et d’attendre les uns derrière les autres car cela nous paraît évident en tant qu’adulte, ce n’est pas suffisant. Bien sûr, beaucoup connaissent déjà le principe mais bien d’autres n’ont aucune représentation d’une file, il faut alors montrer un exemple en prenant cinq élèves et instituer ce rituel. C’est ainsi que l’enseignant évince l’implicite de sa classe. La difficulté réside dans l’approfondissement de la moindre notion évoquée. Ceci nous pousse à explorer davantage la corrélation entre l’implicite de l’école et le langage.

I.2.3. Le lien avec l’acquisition du langage

Viviane Bouysse (Inspectrice générale de l’Éducation nationale spécialisée en maternelle) insiste sur le rapport existant entre le devenir élève et le langage6. L’apprentissage

de la langue orale de l’école est un apprentissage complexe et souvent implicite. A l’entrée au CP, les enfants devraient maîtriser environ 1000 mots de vocabulaire. Or, certains ne possèdent uniquement que 500 mots quand d’autres dépassent largement les 20007. La

5 Marin, Brigitte & Crinon, Jacques, « Tâches explicites, apprentissages implicites ? Des compétences

discursives à l’école élémentaire », https://edutice.archives-ouvertes.fr/edutice-00495054/file/Marin (consulté le 30/03/2018)

6 Bouysse, Viviane, « Apprendre à l’école maternelle », Administration & Éducation, n° 152, 2016, p. 61-69 7 Bentolila, Alain, Rapport de mission sur l'acquisition du vocabulaire à l'école élémentaire, 2007

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capacité des élèves à nommer les choses révèle la compréhension qu’ils ont du monde qui les entoure. Ces différences s’expliquent par plusieurs facteurs parmi lesquels le vécu extrascolaire des enfants est le plus influent. La prise de conscience d’un langage propre à l’école par les enfants (faire des phrases, réinvestir le vocabulaire appris) résulte de leur compétence en vocabulaire mais aussi de l’usage qu’il génère : distancié et réflexif. Le degré d’acculturation à l’écrit inégal selon les familles favorise cet usage de la langue selon qu’on lit une histoire par jour ou non par exemple. Selon Viviane Bouysse, le maniement du langage permet la réussite à l’école. L’enfant devient élève en prenant de la distance par rapport à son vécu au même titre qu’il exerce un usage réflexif sur le langage.

L’importance de la maîtrise du langage en termes de qualité et de quantité du vocabulaire participe donc à la construction de l’élève. S’il n’y a aucun sens derrière les mots employés ou entendus, l’élève s’écarte petit à petit du système scolaire, rempli d’implicite dans le langage qu’il génère. Les aptitudes du futur élève se révèlent dans la progressivité du langage. La capacité d’évocation (anticiper, revenir sur ce qui a été fait), la diversification des discours utilisés (expliquer, raconter, argumenter) et la prise de conscience que le langage est un apprentissage permanent (prise de distance présente dans tous les domaines) sont autant de facteurs qui aident l’enfant à comprendre les codes de l’école pour devenir élève.

Pour autant, des malentendus (représentation sociale erronée) persistent et altèrent le rapport au savoir des élèves. C’est ce qu’a montré Rochex8, en demandant aux enfants « A

quoi sert l’école ? ». Les élèves en réussite scolaire répondent en majorité « pour apprendre » tandis que les élèves en échec scolaire répondent « avoir un métier ». Comment détourner les élèves de ce malentendu en permettant à tous de comprendre sa fonction d’élève ?

I.3. Éviter les malentendus, quelles solutions ?

I.3.1. L’étayage : l’enseignant, médiateur des apprentissages

Les trois premières années de la vie établissent les fondations de la personne sans pour autant en déterminer le devenir. Les trajectoires individuelles ne sont pas prédictibles. Les enfants doivent avoir un large panel de possibilités et de découvertes à leur disposition afin de construire leur propre identité tout en s’inscrivant dans leur groupe classe. Chacun construit cette identité à son rythme, il ne s’agit pas de précipiter leur évolution au risque de se

8 Bautier, Élisabeth Charlot, Bernad & Rochex, Jean-Yves, École et savoir dans les banlieues et ailleurs, Paris,

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conformer trop rapidement à une scolarisation élémentaire. Mais c’est là le paradoxe entre le respect du développement de chaque enfant et celui des attentes des programmes : former la personne tout en formant l’élève qui devra répondre à des codes spécifiques pour réussir sa scolarité.

L’apprentissage du devenir élève est transversal et se construit au quotidien. L’enfant comprend les fonctions de l’école, acquiert l’attitude d’élève et apprend à apprendre. Pour cela, l’enseignant doit provoquer des situations d’apprentissages où les élèves ont envie d’apprendre. Avec les petits, l’imaginaire est un levier qu’il faut utiliser systématiquement. Quand les enfants entrent dans une histoire ou une quête ils sont bien plus impliqués et volontaires pour réaliser la tâche demandée. Le rôle de l’enseignant est alors d’atteindre l’objectif d’apprentissage en motivant les élèves par un biais pédagogique ; laisser croire aux élèves qu’ils ont le choix d’une activité parmi plusieurs propositions qui auront toutes été ciblées au préalable par l’enseignant. Ainsi, l’élève se sent acteur de son apprentissage puisqu’il aura lui-même choisi son activité. Il ne s’agit pas de subir les apprentissages mais au contraire de donner aux élèves l’envie d’apprendre.

Selon Jérôme Bruner9, l’étayage représente l’ensemble des interactions de l’adulte qui

permettent à l’enfant d’apprendre à organiser ses conduites cognitives et comportementales dans le but de résoudre seul un problème qu’il ne savait pas résoudre avant. C’est la Zone Proximale de Développement. Autrement dit, l’élève est face à une situation nouvelle qu’il est en moyen d’exécuter car il sait qu’il a les ressources nécessaires pour y répondre. Parmi ces ressources on retient notamment l’intervention de l’enseignant. Le défi réaliste qui lui est alors proposé suscite à l’élève l’envie de réaliser la tâche car il sent qu’il en est capable. Cela renforce l’estime de soi d’où l’importance de différencier les apprentissages. Si une tâche trop difficile par rapport à ses capacités est donnée à un élève, il se situe alors dans la Zone de Rupture. L’enfant se braque, l’apprentissage est impossible. De même, si la tâche est trop simple, l’élève se situe dans la Zone d’Autonomie, il sait déjà faire et ne met pas en jeu de nouvelles compétences pour progresser. Les diverses situations d’apprentissage doivent cibler la Zone Proximale de Développement. C’est de cette manière que les élèves poursuivront le développement de leurs compétences en réinvestissant leurs connaissances antérieures, en s’appuyant sur le soutien de l’enseignant et sur l’interaction avec ses pairs.

Cette notion est essentielle dans la démarche à entreprendre pour amener ses élèves à devenir élèves. Première fonction de cet étayage : l’enrôlement de la tâche. Il s’agit de

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susciter la curiosité de l’enfant pour qu’il s’engage dans la tâche. L’intention de l’enseignant est de faire apprendre à ses élèves quelque chose. Pour atteindre cet objectif le médiateur doit faire en sorte que son intention devienne celle des enfants pour qu’ils aient envie de s’engager dans la tâche. Comment mettre cet enrôlement en place ?

I.3.2. Vers un enseignement explicite

Il existe plusieurs critères de médiation. D’abord, l’enseignant rend l’enseignement explicite, il expose pourquoi les élèves apprennent et en quoi cela leur sera utile au quotidien. Par exemple, sur une séquence de lancer en motricité, on explicite aux élèves qu’apprendre à lancer leur permet de maîtriser un geste utile pour jouer entre camarades. C’est un moyen simple et indispensable qui permet en plus de les motiver. Rendre l’enseignement explicite c’est aussi présenter aux élèves le déroulement de notre séquence. Au même titre qu’en université où le professeur présente son syllabus (plan développé, contenue des cours, niveau prérequis, organisation pratique, nombre de crédits représentés, coordonnées de l'enseignant, modalités d'évaluation), le professeur des écoles annonce le déroulement de sa séquence aux élèves. Il justifie ses choix au vu de convaincre les élèves d’apprendre. En effet, si les élèves savent ce qu’ils vont apprendre ils en seront d’autant plus motivés. Une fois impliqués dans le contexte d’apprentissage, les apprenants sont amenés à transposer ce qu’ils ont appris dans leur espace et temps personnel. Le professeur provoque lui-même des situations de transposition afin d’élaborer sa phase d’enrôlement. Par exemple, si l’on veut que les élèves apprennent à lire une recette, ils vont devoir cuisiner de réelles recettes pour savoir comment se faire à manger au quotidien.

Célestin Freinet propose une pédagogie de projet : les élèves sont impliqués dans la tâche car ils ont un projet commun. Ce projet est motivé par une problématique à résoudre. Pour écrire le journal de l’école, il faut se renseigner sur la structure d’un article et ne pas faire de fautes. Cela engagera un travail de fond sur l’étude de la langue. La coopération est un medium efficace. Les élèves apprécient travailler en groupes, rassurés par les convergences d’idées de chacun pour enrichissent le projet. Il faut que le projet donne sens, à la fois à l’activité et aux apprentissages.

Expliciter l’enseignement c’est aussi du point de vue des élèves exercer la métacognition. Si un élève réussit à répondre à une question c’est parce que ses connaissances et les liens qu’il établit entre elles lui permettent d’arriver à la bonne réponse. Les élèves

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doivent dépasser le rapport binaire entre le fait de savoir et de ne pas savoir. Pour cela, les élèves en difficulté ont besoin de verbaliser le travail intellectuel qui leur permet de passer d’un état à un autre. Il y a alors explicitation des procédures, stratégies et connaissances mobilisées pour traiter la tâche. L’enseignant est invité à se poser les mêmes questions pour guider l’élève dans sa méthodologie. Cela peut également s’effectuer entre pairs. L’échange des procédures entre élèves est à valoriser. Lors du rituel sur l’emploi du temps de la journée, les élèves choisissent les pancartes (avec photo et texte du moment de la journée) dans l’ordre chronologique. Lors du regroupement, demander à un élève de choisir la pancarte du « regroupement » pour l’afficher sur la frise. C’est à ce moment qu’on lui demande : « Comment tu sais qu’il s’agit de la pancarte du regroupement ? » L’élève répond alors : « Parce qu’on est tous ensemble sur la photo. » Ainsi les autres élèves peuvent s’aider de cette information pour discriminer les moments de la journée, quand d’autres reconnaîtront le long mot « REGROUPEMENT » au-dessus de la photo. Autant de stratégies à expliciter par les élèves pour permettre à l’ensemble de mobiliser leurs connaissances et répondre à la question. Savoir faire c’est donc savoir expliquer comment je fais pour trouver la réponse.

Chez les petits, on rencontre ce phénomène de malentendu quand les élèves lèvent le doigt mais qu’ils n’ont rien à dire. Cette situation révèle l’impact important de ce qui est attendu en classe. C’est très fréquent dans ma classe. La difficulté est de faire prendre conscience aux élèves que ce qu’attend la maîtresse ce n’est pas qu’ils lèvent le doigt mais qu’ils réfléchissent et exercent leur pensée pour construire la réponse. L’estime de soi va être un facteur déterminant dans la réalisation de la tâche des élèves. J’ai repéré trois élèves de ma classe qui sont systématiquement dans l’échec avant même d’essayer. Ce sont des élèves qui ont besoin de l’attention de l’enseignant et d’être encouragés. Mais je ne peux pas être présente en continu pour les mêmes élèves, c’est suite à une conférence sur les enjeux de l’estime de soi à l’école maternelle, que j’ai découvert l’utilisation d’un nouvel outil permettant de remédier à ce problème de confiance en soi : l’estimomètre.

I.3.3. L’estime de soi, une variable indispensable

Comme il l’est dit précédemment, les élèves bien que confrontés à une même tâche, ne l’abordent pas avec les mêmes possibilités. Alors que certains découvrent les notions, d’autres sont déjà dans la phase d’entraînement car ils connaissent bien le sujet étudié. L’hétérogénéité des niveaux dans une classe de 28 élèves est d’autant plus flagrante et à prendre en compte.

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Selon les travaux de Grégory Delboé (formateur-chercheur à l’ESPE de Lille), l’utilisation de l’estimomètre a un effet bénéfique sur la réalisation de la tâche par l’enfant. Il est individuel (deux pancartes par élèves avec sa photographie, une AVANT, l’autre APRES). Il consiste à évaluer le degré de confiance en soi : « Je me sens : très faible, un peu faible, un peu fort, très fort ». Cela reprend l’expérimentation que l’Union Sportive de l’Enseignement du Premier degré (USEP) a mis en place pour développer le goût de la pratique physique et sportive et renforcer l’estime de soi. Trois réglettes individuelles permettent d’évaluer son degré de plaisir dans la tâche (j’ai aimé / j’ai détesté), d’effort (c’était facile, c’était trop difficile) et de progrès (j’ai fait mieux que la dernière fois). Cette démarche permet à l’enfant de renforcer son estime de soi par une meilleure prise de conscience de ses possibilités. Ce qui importe c’est d’estimer ses progrès pas l’estime de soi à un moment donné.

Cet outil lui permet de se situer émotionnellement avant de réaliser l’activité, de ressentir sa capacité de réussite. L’enfant pointe sur l’estimomètre son ressenti, il sera davantage concentré sur la tâche car il s’est engagé en amont à savoir s’il va réussir ou non. C’est l’élève, lui-même, qui évalue son degré de réussite. Cette forme d’autoévaluation permet à l’élève de prendre confiance en lui et de mieux se connaître. Cet intermédiaire entre l’élève et la tâche renforce la motivation et la mobilisation de l’élève. Être élève ce n’est pas seulement être à l’école, c’est se mobiliser pour pouvoir apprendre. Comme les élèves sont obligés d’y aller, il faut que cette contrainte se transforme en bénéfice : prendre du plaisir pour se mobiliser et agir. La pertinence des apprentissages doit déclencher chez les élèves cette envie de réussir. Un élève épanoui est un élève qui prend plaisir à apprendre, à voir ses progrès et à terminer son travail.

Après la réalisation de la tâche, les élèves échangent avec l’enseignant. Ce moment permet de faire verbaliser les enfants sur ce qu’ils viennent d’apprendre, comment ils ont procédé. C’est l’occasion de les féliciter et de favoriser leur sentiment de réussite afin qu’ils développent leur estime de soi. En effet, l’estime de soi est indépendante du sentiment de compétence. Grégory Delboé a prouvé par ses expériences qu’entre des élèves de maternelle et des étudiants de Polytechnique le degré d’estime de soi a tendance à s’inverser dans le temps. Plus on a d’expérience dans un domaine moins on est sûr de soi car il y a une multitude de possibilités et par conséquent une incertitude s’enclenche. D’où l’intérêt d’exercer ce module avec les petits qui sont plus facilement sûrs d’eux et de leur choix car l’éventail de leurs capacités est plus restreint. Apprendre à se connaître, à justifier ses

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décisions et à s’autoévaluer font partie intégrante du devenir élève. Voyons dans quels domaines du devenir élève ces capacités peuvent s’organiser.

I.4. Les domaines du devenir élève

Les travaux de Joël Agrapart et de Véronique Finkenberg (inspecteur et conseillère pédagogique) présentent les différentes composantes du devenir élève. Selon eux, il se distingue par trois domaines : vivre ensemble, devenir autonome, apprendre à apprendre.

I.4.1. Vivre ensemble

Pour vivre ensemble les élèves doivent intégrer la loi et les règles de vie, découvrir la morale et adopter les règles de civilité. Dans le premier attendu, plusieurs compétences sont mises en jeu : comprendre et respecter une règle de vie en situation ou un règlement, comprendre la fonction du règlement, se référer au règlement pour analyser et ajuster son comportement. Pour être acquises ces compétences doivent être vécues par les élèves. Il s’agira dans ce domaine de concevoir les règles de vie avec les élèves en fonction des problèmes rencontrés en classe. Pour que ces règles aient du sens il faut les construire au fur à et à mesure des incidents rencontrés en classe. Par exemple, dans ma classe, il a rapidement fallu trouver une solution pour réduire le volume sonore des enfants au nombre de 28. On laisse les élèves trouver des idées puis on leur propose un dispositif permettant de maintenir le bruit à un niveau raisonnable : une échelle de bruit représentant les décibels sur un dégradé de vert, orange et rouge. Quand le niveau sonore est trop élevé, la jauge se situe dans le rouge, tout le monde devra chuchoter. Il est important d’expliciter les sanctions en cas de non-respect des règles. Le règlement protège des décisions arbitraires, tout le monde est soumis au même règlement et par conséquent aux mêmes sanctions. L’objectif est de respecter le règlement pour mieux vivre ensemble, et non pour éviter la sanction.

Dans le second attendu qui s’attèle à la morale et à la civilité, les élèves apprennent à utiliser les formules de politesse en situation, construire des valeurs communes, intégrer les valeurs morales laïques et débattre en acceptant le point de vue de l’autre. Pour les petits il s’agit de faire respecter les règles de politesse au quotidien et lors de rituels (dire bonjour, s’il te plaît, merci). Les élèves adhèrent à des valeurs communes comme le partage ou le respect

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du matériel. Ils sont initiés au débat philosophique dès la petite section sous forme de discussion ouverte.

I.4.2. Devenir autonome

Selon Kant, l’autonomie serait un choix qui repose sur la volonté propre de l’homme en opposition avec l’hétéronomie où les choix sont soumis à un élément extérieur comme la loi, la norme ou l’intérêt. La majorité de nos choix relèvent donc de l’hétéronomie et ne seraient qu’illusoires car ils n’obéissent pas à la volonté propre de l’individu. Mais le sujet accède à l’autonomie à condition de respecter les règles de la société. Elle se construit donc par la contrainte de l’autre et de la loi. C’est une manière d’être, de penser, d’être plus libre dans ses choix. Comment favoriser l’autonomie de l’enfant à l’école ?

L’enseignant favorise la construction d’une attitude d’élève et le développement d’une autonomie organisationnelle, cognitive, affective et relationnelle. Pour développer ces aptitudes, les enfants doivent acquérir plusieurs niveaux de compétences. D’abord, comprendre la fonction de l’école. L’enseignant explicite les moments d’apprentissage pour que les élèves sachent qu’ils sont là pour apprendre. Ils cultivent alors leur envie d’apprendre et manifestent de l’intérêt pour les activités proposées grâce aux projets de l’enseignant. L’élève sait se tenir à une tâche en restant concentré. Le temps de concentration chez les petites sections est d’environ dix minutes par heure. Ils doivent faire preuve d’attention, de participation et persévérer dans la tâche pour finir le travail demandé. S’appliquer dans son travail fait également partie des composantes de l’élève. Certains enfants ont tendance à gribouiller leur production finale, ils éprouvent du plaisir à occuper tout l’espace de la feuille quitte à recouvrir entièrement leur travail. En petite section c’est un des objectifs que je fixe aux élèves : savoir prévenir la maîtresse quand son travail est terminé pour qu’elle module ou valide la compétence. L’élève apprend aussi à prendre place dans les échanges. L’enseignant favorise la prise de parole en petit groupe ou en collectif. En classe, travailler par domaine de compétences permet de mieux organiser les traces produites par les élèves de façon à ce qu’ils voient leurs progrès. L’autoévaluation est un autre moyen qui aide les élèves à se construire une attitude d’élève. En petite section, l’accompagnement de l’adulte dans cette tâche est indispensable.

Développer l’autonomie organisationnelle des élèves c’est leur donner des repères dans l’espace et dans le temps. Ils apprennent à se repérer dans la classe et dans l’école.

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L’enseignant organise progressivement la découverte collective des lieux puis favorise l’appropriation individuelle. Les élèves construisent des repères dans ces espaces à l’aide de règles de vie spécifique à la salle de motricité ou pour la récréation par exemple. L’élève organisé sait gérer ses affaires, il pose son doudou dans le panier à l’accueil, met son manteau avant de sortir, prend son sac pour partir après l’école. Le rangement fait partie intégrante de cette compétence. Les exigences concernant le rangement du matériel sont progressives en termes de durée, de niveau sonore, de responsabilité (un responsable pour ranger les chaises, un élève par table range le matériel) et d’organisation (ranger les feutres sur l’étagère puis les ranger par couleurs). Les élèves se repèrent dans la journée à l’aide d’une frise chronologique sur laquelle ils avancent le curseur. Ils doivent savoir se repérer dans l’activité. L’enseignant explique la fonction de la tâche par rapport à l’apprentissage et donne des repères de temps aux enfants.

Concernant l’autonomie affective et relationnelle, l’élève de petite section accepte progressivement la séparation avec ses parents et ne pleure plus pour aller en classe. Pour cela, le moment de l’accueil doit être bien préparé pour donner envie aux élèves de jouer et de rester en classe. Le rôle rassurant de l’enseignant et de l’ATSEM est primordial pour l’enfant qui se sent en insécurité loin de ses repères familiaux. L’empathie de l’adulte sur l’élève l’aide à se sentir bien à l’école. Un élève épanoui est plus serein pour apprendre. Les élèves savent identifier les différents rôles des adultes (enseignant, atsem, directeur, animateurs, cantiniers). Entre pairs, les enfants apprennent à partager le matériel, vaincre leur inhibition pour s’impliquer dans les échanges et osent demander de l’aide quand cela est nécessaire. L’enseignant encourage la prise de risque. Comme le conseille Pierre Peroz, toute prise de parole est à valoriser. Un élève qui prend la parole pour répéter ce qu’a dit un camarade est positif. Si on met en avant le fait qu’il a répété l’élève aura moins confiance en lui tandis que s’il est mis en valeur parce qu’il a pris la parole il osera reprendre la parole. Ce travail de l’enseignant est d’autant plus important en petite section, on attendra plus des élèves d’élémentaire qu’ils ne répètent pas ce qui a déjà été dit.

Développer une autonomie cognitive relève de plusieurs compétences. D’abord, comprendre qu’apprendre c’est rechercher des procédures, faire évoluer ses représentations et réinvestir ses connaissances. A la fin d’une séquence, réaliser des affiches retraçant le chemin parcouru par les élèves : au début nous pensions que … puis nous avons cherché comment … et nous avons appris à… pour … Pour cela, les élèves osent tenter une réponse qui peut être erronée mais ils prennent l’initiative de réfléchir. Ils réinvestissent les procédures dans des situations analogues. Demander aux élèves quand ils ont eu besoin

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d’utiliser telle notion pour résoudre le problème. Ainsi ils se souviennent du pourquoi ils en ont eu besoin pas seulement comment on procède. Cela permet de construire les apprentissages dans la durée et de créer des liens entre les compétences mobilisées. Les élèves prennent conscience de leurs progrès, ce qu’ils ont appris et ce qu’ils doivent encore apprendre. Les bilans de séances sont essentiels pour stabiliser les acquis des élèves.

I.4.3. Apprendre à apprendre

Les élèves doivent s’inscrire dans un projet d’apprentissage. Ils découvrent d’abord l’objectif de compétence en répondant à la question « Qu’est-ce qu’il faut apprendre pour réussir à faire cela ? » L’objectif est clairement formulé par l’enseignant. L’élève sait le reformuler en disant ce qu’il faut savoir faire. Il visualise grâce à la progression de l’enseignant les différents niveaux de performance à atteindre sur une frise ou un tableau à compléter par les enfants. L’enfant prend conscience des différentes phases de l’apprentissage explicitées par l’enseignant. Il sait que telle séance sert à découvrir, chercher, s’informer, s’entraîner, ou s’améliorer. Il apprend à évaluer son propre travail en verbalisant ce qu’il sait faire ou en matérialisant sa réussite sur une fiche avec des pictogrammes et des gommettes.

L’élève apprend progressivement à être actif dans la résolution de problèmes, persévérant et fait preuve d’initiative. Il ose choisir le matériel adéquate pour répondre à un problème, il sait recommencer après un échec et cherche d’où viennent ses difficultés (vitesse d’exécution, mauvais geste). A partir de la confrontation de plusieurs procédures, l’élève prend conscience qu’il existe plusieurs manières de faire. Lors des bilans, les uns expliquent aux autres comment ils ont fait pour peindre un bonhomme par exemple, on se rend compte que plusieurs solutions existent : commencer par le visage ou par les pieds.

La métacognition doit être pratiquée par les élèves le plus souvent possible. En langage d’évocation les élèves apprennent à dire ce qu’ils ont fait. Ils recommencent la tâche donnée pour prendre conscience des différentes phases de l’action. Auprès de l’enseignant, l’élève verbalise ses gestes. La différence de niveau de langage des élèves de petite section peut parfois poser problème car il leur manque le vocabulaire nécessaire pour décrire ce qu’ils font. Du moins ils s’y exercent et l’enseignant les aide et reformule, d’où l’importance de la répétition afin de maîtriser le vocabulaire souhaité. L’élève apprend à construire une représentation mentale et à justifier sa démarche. Pour cela, il faut indiquer aux élèves

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comment on se représente une image mentale. La méthodologie doit être systématique : je ferme les yeux, je visualise comment j’ai fait, je me revois en train de faire.

L’élève de petite section doit également s’initier à la notion de consigne. C’est une des principales difficultés à laquelle j’ai dû faire face cette année. Le passage de la consigne est un moment essentiel de la séance. Les élèves ont du mal à reformuler la consigne, j’ai l’impression que la tâche demandée leur importe peu. Au début de l’année cela était encore plus flagrant, les élèves faisaient ce qu’ils avaient en tête. Par exemple, au moment de dessiner un bonhomme, beaucoup en début d’année ont dessiné complètement autre chose. Certains avaient tout simplement oublié la consigne entre le moment de regroupement et le passage sur les tables. D’autres prenaient plaisir à dessiner librement. Ce problème me pousse à trouver des solutions pour faire comprendre la fonction de la consigne aux élèves. Il est possible de produire la consigne à partir d’une solution problème : présenter le matériel et laisser deviner la consigne aux élèves. Pour comprendre et exécuter la consigne, l’enseignante peut montrer aux élèves ce qu’il faut faire ou laisser un élève montrer l’exemple. Afin de ne pas toujours donner la même consigne pour une même situation, les élèves apprennent à s’adapter à la conformité de la consigne. Tout au long de l’année l’enseignant établit une progression de la complexité des consignes.

S’autoévaluer permet aux élèves d’apprendre à analyser leurs productions par rapport à un niveau de performance. Pour cela, les critères de réussites doivent être clairement identifiés avec les élèves pour qu’ils sachent quoi faire et évaluer. C’est à l’enseignant d’expliciter ce qui a été produit : « Les cercles sont bien fermés. / La balle est arrivée dans la caisse. » plutôt que d’émettre un jugement de valeur du type « C’est bien. / C’est joli. » L’élève, lui, repère ses réussites et ses erreurs, avec l’aide ou non de l’enseignant (« Qu’est-ce que tu n’arrives pas à faire ? Comment tu t’y es pris ? »). Une fois l’analyse de sa production faite, il cherche à l’améliorer en interagissant avec ses pairs (« Demande à … comment il s’y est pris. ») Pour que l’autoévaluation ait une finalité, on propose aux élèves de matérialiser leur niveau de performance sur un tableau ou une fiche (avec utilisation de logo, photographies ou pictogrammes). Le recours aux supports facilite l’autoévaluation pour les élèves. Selon les domaines, il est plus simple de visualiser ses efforts. En motricité il serait intéressant de filmer les élèves pour qu’ils voient leur réalisation par exemple.

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II. Former les élèves de petite section : expérimentation en

classe

II.1. Enquête empirique

II.1.1. Présentation du terrain

L’école maternelle accueille 160 enfants répartis dans 6 classes (deux par niveau). Le niveau social des familles est hétérogène, les élèves sont d’origines géographiques variées. Les classes de petites sections se situent au rez-de-chaussée et donnent directement sur la cour de récréation. C’est un choix de l’équipe pédagogique afin d’éviter aux petits de monter les escaliers. Il y a deux services de récréation afin de réduire les conflits. La salle de motricité assure plusieurs fonctions dans notre école : passage des parents et enfants le matin, centre de loisirs, chorale, motricité. L’effectif élevé de ma classe de 28 élèves a rapidement suscité de l’inquiétude et été un facteur de difficulté pour ma part. Il fallait donc permettre aux élèves d’expérimenter le vivre ensemble tout en permettant d’apprendre ensemble.

II.1.2. Choix de la méthode

J’ai d’abord élaboré une progression sur l’année en ce qui concerne le devenir élève [voir annexe 1]. D’après les éléments de recherches citées en première partie, je décide d’expérimenter plusieurs dispositifs et de présenter quelques exemples pertinents dans ce mémoire : les règles de vie, le tutorat, les responsabilités, l’estimomètre et l’autoévaluation, un exemple de séquence explicite en sciences (enrôlement, consigne). L’enjeu est d’installer un cadre d’apprentissage bienveillant et exigeant afin de développer une mobilisation efficace des élèves. Il s’agit donc de concevoir ces moments pour qu’ils soient vecteurs de progression dans le domaine du devenir élève. Je propose par la suite d’analyser les résultats obtenus selon les démarches engagées. Pour cela, j’ai créé une grille d’évaluation qui me permettra d’estimer la progression des élèves dans le devenir élèves [voir annexe 8].

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II.1.3. Formulations des hypothèses

Dans l’état actuel de ma réflexion, je cherche à montrer que l’enfant devient élève en vivant des situations qui le poussent à agir en tant qu’élève. Susciter des moments de vivre ensemble où les valeurs communes prennent sens, aider l’enfant à devenir de plus en plus autonome et créer une atmosphère propice aux apprentissages doivent être l’objet de la préparation de l’enseignant. Mes recherches théoriques m’ont amenée à tester en classe divers dispositifs ou démarches pour aider les élèves à devenir élèves. Je pense que les élèves de petite section intègrent leur rôle d’élèves grâce à ces dispositifs pédagogiques.

II.2. Exemples des dispositifs mis en place pour apprendre à

devenir élève

II.2.1. Les règles de vie

La construction des règles de vie avec les élèves est une étape importante dans une classe. Tout comme une société a besoin d’être régie par des lois, une classe doit suivre certaines règles qui lui sont propres. Le but est-il de respecter ces règles pour vivre ensemble ou pour apprendre ensemble ? La confrontation aux autres va permettre le développement des enfants en sujets singuliers pour apprendre dans une dynamique collective. Au début de l’année les règles n’étaient pas fixées auprès des élèves. J’ai élaboré une séquence [voir annexe 2 & 3] qui je pense être un bon moyen pour faire appliquer les règles de vie et ainsi apprendre aux enfants une compétence essentielle de leur fonction d’élève : respecter les règles, les autres et le matériel. Pour cela, il est nécessaire avant de la fixer, de faire ressentir aux élèves la nécessité d’une règle pour pouvoir apprendre ensemble. Ensuite, on peut formaliser et expliciter les différentes règles (de classe, de la cour, de la motricité). Dans la continuité du cycle, on peut imaginer la mise en place de conseils d’enfants pour réguler l’application des règles établies. Rien n’empêche en petite section d’avoir des moments de discussion sur les règles mais cette phase ne me semble pas essentielle dans ce niveau.

En période 1, le rangement était très long car beaucoup ne savaient pas comment ranger des jeux après y avoir joué. En approfondissant mes recherches sur l’enseignement explicite je me dis que cette action n’avait sûrement pas de sens pour les élèves. C’est sur le

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vécu commun à tous les élèves que les règles se sont construites. Par exemple pour le rangement : après l’accueil j’ai demandé aux élèves de venir s’asseoir directement sans ranger. En lançant l’activité suivante, je voulais que les élèves se rendent compte de la nécessité de ranger pour en faire une règle de vie de classe. C’est d’ailleurs ce qui s’est passé, en s’installant sur les tables les élèves m’ont dit qu’il y avait des choses dessus et cela les dérangeait. J’ai donc rappelé tout le monde en regroupement pour confronter les remarques des élèves. Je demande alors aux élèves : « Qu’est-ce que vous pourriez faire pour pouvoir travailler ? » Quelques enfants ont trouvé la solution en répondant : « Il faut ranger les jeux. » Je valorise l’idée et propose à tout le monde de ranger. Après avoir rangé la classe, les élèves se regroupent et j’en profite pour formaliser la règle sur le rangement à l’oral dans un premier temps : « Il faut ranger la classe, remettre les jeux à leur place pour pouvoir travailler et apprendre dans de bonnes conditions. »

Dans la même optique, j’ai laissé les élèves s’exprimer sur les sanctions possibles s’ils ne respectaient pas une de ces règles. Pour éviter de sanctionner, il est préférable de prévenir le plus possible les élèves en rappelant les règles pour chaque lieu dans lequel vont aller les enfants. Sur le même principe, les élèves doivent avoir connaissance des sanctions possibles et en comprendre leur sens. Afin de modérer les exclusions des élèves lors du regroupement, j’ai décrété que les élèves qui perturbaient leurs camarades pendant le regroupement en parlant ou en chahutant avec d’autres, se calmeraient dans le coin bibliothèque. De cette manière, il reste à proximité du groupe classe tout en étant isolé pour se calmer. Quand l’élève se sent calmé il peut à son initiative retourner s’asseoir sans déranger le groupe.

La réalisation des affiches sur les règles de vie ne suffit pas à elle seule à améliorer le climat scolaire. Ce procédé permet d’instituer les règles et de s’y référer si besoin mais appliquer ces règles s’apprend en les vivant. L’intérêt de cet outil en maternelle est bien d’être élaboré une fois que les règles ont été intériorisées par les élèves. Pourquoi existe-t-il des règles différentes de celle de la maison ? Pour apprendre, l’enjeu crucial du devenir élève. A travers les règles, l’élève comprend ce qu’il fait à l’école et comment il le fait. Les règles des jeux de société ou symboliques mis en place dans la classe permettent d’apprendre. Quand les élèves jouent à la maison c’est pour partager un moment en famille tandis qu’à l’école le jeu génère des apprentissages dans un domaine spécifique. La formalisation des règles amène les élèves à réfléchir sur le but de l’école et apprendre ensemble.

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II.2.2. Le tutorat

Au moment de réfléchir sur les dispositifs à mettre en place dans la classe pour aider les élèves à devenir élèves, j’ai de suite pensé au tutorat. Comenius disait « Qui enseigne aux autres s'instruit soi-même ». Je pense que ce système d'enseignement où les apprenants s'aident les uns les autres permet aux élèves d’apprendre ensemble, de coopérer et de s'exercer à la solidarité. Les situations de tutorat permettent aux élèves de mobiliser leurs aptitudes langagières, à exercer la métacognition en communicant entre pairs. Le tuteur bénéficie autant si ce n’est plus du tutorat car c’est lui qui met en œuvre l’articulation entre pensée et langage. Le tutoré va progressivement se fabriquer un horizon d’attente et apprendre à mieux mesurer ce qu’on attend de lui. Le tutorat est un bon outil pour expliciter l’enseignement : les élèves réfléchissent sur leur manière d’apprendre pour pouvoir l’expliquer à d’autres sans intervention systématique de l’enseignant. Chacun doit s’adapter à l’autre, c’est le parfait exemple du devenir élève dans le vivre ensemble. La question était de savoir comment choisir les binômes, à quel moment et dans quel but. J’ai d’abord imaginé un tutorat entre élèves de grande section et de petite section. Puis, j’ai été surprise à plusieurs reprises de voir les élèves prendre des initiatives seuls. Un jour, au moment de l’habillage après la sieste, j’ai vu deux élèves aider volontairement des camarades à enfiler leur pantalon et à mettre leurs chaussures. Une autre fois, pendant le rangement des jeux, un groupe d’élèves s’est spontanément formé à trois pour pouvoir ramener la grosse caisse de lego sur le meuble. Il fallait saisir ces occasions pour proposer le tutorat aux élèves. Le tutorat permettrait donc à un individu moins compétent de progresser dans une situation qu’il ne pourrait pas réaliser seul. C’est l’idée d’étayage de Jérôme Bruner mais par l’intermédiaire d’un autre enfant.

Je propose donc de tester le tutorat dans une séquence dédiée [voir annexe 4]. L’avantage du tutorat avec un élève plus âgé est que ce dernier réussira plus facilement à expliquer au plus jeune les procédures mises en jeu dans l’apprentissage. On propose lors des séances de tutorat, des tâches simples pour qu’il n’y ait pas de surcharge cognitive tout en restant dans les Zone Proximale de Développement.

Les élèves apprennent à coopérer en assumant la responsabilité qui leur a été attribuée. Ils font preuve d’initiative en s’engageant dans l’activité. Les compétences développées par le tutorat sont multiples : devenir autonome dans ses apprentissages, acquérir les qualités de tuteur, être responsable. Autant d’attitudes qui confortent les enfants dans leur rôle d’élèves.

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II.2.3. Les responsabilités

Sur le même principe que les règles de vie, il a fallu proposer aux élèves des situations où l’instauration de responsabilités était nécessaire. Cela permet de développer dès la petite section des comportements adaptés à leur socialisation. Les responsabilités ont été introduites en période 4. Le fait d’être responsable demande un minimum de discernement, c’est pourquoi j’ai attendu avant de les mettre en place. Les situations proposées aux élèves étaient simples. Un jour où aucun des élèves n’avait pensé à faire avancer le curseur de la frise chronologique, j’ai demandé : « Quelle solution vous pourriez trouver pour qu’on n’oublie plus ? » J’explicite en précisant pourquoi c’est embêtant d’oublier, on ne sait plus ce qu’on doit faire si le curseur est resté sur l’accueil.

La mise en place des responsabilités [voir annexe 5] s’est donc progressivement agrémenté de nouvelles responsabilités. D’abord, nous avons eu besoin d’un responsable du curseur de l’emploi du temps pour savoir ce que nous allions faire dans la journée.

Le fait d’endosser un rôle qui va permettre à tous les élèves de la classe de travailler dans les meilleures conditions possibles est une compétence nécessaire au devenir élève. L’organisation de la classe ainsi aménagée va je pense améliorer la gestion de classe. Si les élèves ont quelque chose à faire et qu’ils savent pourquoi ils le font, l’intérêt de ces responsabilités prendra tout son sens.

D’autres exemples sont à citer comme la responsabilité « rapatrier les élèves de la cour ». Longtemps les élèves ont mis plus de cinq minutes à venir entrer dans la classe après la sonnerie de la récréation. De retour en classe j’ai lancé une discussion sur le fait que les élèves prenaient trop de temps à entrer en classe. Ils ont eux-mêmes proposé à ce que des élèves se chargent de chercher les retardataires. De même, pour les responsabilités du rangement qui font partie de la séance 6 dans la séquence sur les règles de vie.

II.2.4. L’estimomètre et autoévaluation

Après avoir lu des ouvrages et assisté à la conférence de Grégory Delboé sur l’impact de l’estime de soi chez l’enfant, j’ai trouvé le dispositif intéressant à mettre en place dans la classe. Il se compose donc de deux réglettes une « avant » et une « après » la séance [voir annexe 6]. L’élève est invité à dire comment il se sent avant de réaliser la tâche. S’il se sent faible, on lui demande pourquoi, quelles sont les raisons que lui font penser qu’il ne réussira

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