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Revue consommation / Caractéristiques des ménages à bas revenus / En 1978, selon l'enquête Cnaf-Crédoc, 12% des familles non agricoles ont un revenu disponible par unité de consommation inférieur à 60% du Smic

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Texte intégral

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Enquête Cnaf-Credoc 1979

Georges Hatchuel*

Sous l’effet des difficultés économiques et de ses manifestations les plus évidentes : accroissement du nombre de chômeurs et allongement de la durée du chômage, baisse du niveau de vie, endettement accru, etc., on assiste, depuis quelques années, à une progression du nombre d’individus ou de familles en situation précaire, se traduisant par une sensible augmentation des demandes d’aides diverses. Or, les données statistiques permettant de mesurer l’ampleur de la pauvreté en France et son évolution restent rares. Il en est de même des études représentatives fournissant une description statistique des principales caractéristiques des populations à bas revenus. C’est dans ce contexte qu’il a paru utile de réexploiter l’enquête CNAF-CREDOC de 1979. Certes, les informations analysées portent sur l’année 1978. Mais elles permettent de mettre en évidence quelques-unes des caractéristiques structurelles des populations défavorisées, qui n’ont pu que se renforcer avec le développement du chômage.

L’étude montre que les familles à bas revenus pouvaient être classées, en 1978, en six groupes relativement stables et homogènes, définis par des caractéristiques précises constituant les éléments pivots autour desquels se focalisent les situations de précarité de ressources. Ces groupes vont des familles nombreuses où l’homme est ouvrier ou employé, non qualifié, et la femme inactive sans diplômes, aux familles monoparentales dont le chef est de sexe féminin, principalement actif, mais non qualifié. Les personnes âgées y figurent en bonne place, comme les chômeurs, les malades ou handicapés, ou les artisans-petits commerçants dont l’exploitation est déficitaire. Mais chacun de ces groupes n’a pas la même importance démographique : celui des familles nombreuses représentait 29 % des défavorisés de 1978, celui des personnes âgées inactives, vivant seules ou en couple, presque la moitié. Depuis 1978, le groupe des chômeurs s’est gonflé, tandis que l’importance relative des personnes âgées a diminué.

Au total, 12 % des familles non agricoles françaises (soit 2 121 000 familles) ne disposaient, en 1978, que d’un revenu disponible par unité de consommation inférieur à 60 % du SMIC.

Quelles sont les caractéristiques socio-démo­ graphiques des ménages situés au plus bas de l’échelle des revenus et peut-on tenter d’en élaborer une typologie ? Autrement dit, les populations les plus défavorisées répondent-elles à certaines caractéristiques précises communes, qui les diffé­ rencient nettement des populations non précaires, ou sont-elles composées de familles dont les élé­ ments distinctifs apparaissent fortement disparates ? En tentant d’apporter des réponses à ces qestions, notre objectif n’est pas de définir ce qu’on pourrait appeler « les pauvres », les ménages

pauvres ou les familles pauvres, mais de qualifier les ménages situés au plus bas de l'échelle des revenus, les moins bien pourvus en ressources monétaires, et ce faisant, d’apporter un éclairage partiel sur certaines situations de pauvreté. Il ne s'agit donc pas de présenter le revenu, ni comme une mesure de la pauvreté, ni comme une explica­ tion de celle-ci, mais seulement comme un indica­ teur de situations défavorisées.

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Le revenu : un indicateur de pauvreté parmi d’autres

L’approche de la pauvreté en termes de revenus se heurte à une série d’objections aussi bien concep­ tuelles que statistiques. Ainsi le rapport de la fondation pour la recherche sociale (FORS) sur « la pauvreté et la lutte contre la pauvreté [4]' souligne-t-il qu’une telle approche est unidimen­

sionnelle, par opposition au caractère véritable­

ment multidimensionnel de la pauvreté ; quantita­

tive, alors que l’irrégularité et l’incertitude du

revenu sont peut-être aussi significatives en matière de pauvreté que le montant des ressources propre­ ment dit ; conventionnelle, car reposant sur la définition arbitraire d’un ou de divers « seuils » de pauvreté ; et incomplète : l’approche par le revenu saisit mal les emplois instables, non déclarés ou les catégories dépourvues de toutes ressources.

Par ailleurs, les limites statistiques d’une telle approche sont importantes [13, 14, 16], On sait en effet que les revenus sont mal connus, et surtout ceux des catégories appartenant aux extrêmes de la distribution. Plus généralement, les enquêtes auprès de l’administration fiscale (enquêtes de l’I.N.S.E.E. sur les revenus déclarés) présentent trois types d’inconvénients : d’abord, les revenus déclarés peuvent être sous-estimés et les règles d’imposition de certains groupes de population (indépendants, exploitants agricoles par exemple) se traduisent par une évasion fiscale tout-à-fait légale. Ensuite, certaines ressources ne sont pas imposables (prestations familiales, minimum vieil­ lesse ou aide publique au chômage par exemple), si bien qu’elles peuvent être selon les cas, soit exclues de l’analyse, soit estimées par calcul théori­ que. Dans ce dernier cas, l’évaluation se traduit alors par une assimilation certainement abusive entre allocataire potentiel et prestataire effectif. Enfin, tous les ménages n’effectuent pas de déclara­ tion fiscale. Ces deux derniers inconvénients ont ici toute leur importance car ils concernent à l’évidence plutôt les ménages les plus défavorisés.

L’enquête CNAF-CREDOC

Dans ces conditions, pour essayer de caractériser les ménages à bas revenus, il était tentant d’utiliser un matériau statistique différent de celui d’une enquête d’origine fiscale. Et ce d’autant que l’ex­ ploitation à cette fin des enquêtes revenus fiscaux de 1975 et 1979 de l’I.N.S.E.E., a déjà été réalisée [10]. L’enquête CNAF-CREDOC 1979, qui visait à apprécier les effets redistributifs des politiques sociales, pouvait constituer ce matériau puisqu’elle a été effectuée directement par interview auprès des ménages (encadré p. 51). Le recours à cette enquête permet donc d’éviter à la fois les opérations de redressement des ménages au revenu inconnu du fait de l’absence de déclaration et celles d’esti­ mation théorique de certains transferts non impo­ sables. D’autre part, le champ même des presta­ tions couvertes est plus large dans l’enquête

CNAF-CREDOC que dans les enquêtes revenus. Celle-ci comprend la totalité des prestations fami­ liales, les retraites, imposables ou non, les indemni­ tés de chômage, les prestations pour handicap ou invalidité et divers autres revenus de transferts (certaines aides en espèces de l’aide sociale, pen­ sions d’anciens combattants, rentes d’accidents du travail, de réversion, etc...). A l’inverse, le risque de sous-estimation des ressources, s’il existe dans les deux cas, peut se révéler plus important dans une enquête directe auprès des familles. Il semble cependant que la méthode adoptée pour l’enquête CNAF-CREDOC, comportant notamment la confrontation des réponses fournies avec certaines informations d’origine administrative, ait permis de limiter ces risques, sauf pour les revenus mobi­ liers et les revenus d’indépendants, dont les mon­ tants fournis à l’enquête restent sous-estimés. Comme pour l’enquête sur les revenus de l’INSEE, les revenus d’activité indépendante recueillis sont les revenus fiscaux.

D’autre part, le recours à une enquête directe par interview présente l’avantage de pouvoir dispo­ ser de multiples informations socio-économiques, autorisant une meilleure qualification des caracté­ ristiques des populations enquêtées. Parmi les divers renseignements originaux fournis par l’en­ quête CNAF-CREDOC, il faut citer, outre les renseignements socio-démographiques habituels, le niveau de confort du logement, les principaux biens durables possédés, les diplômes du chef de ménage et de son conjoint, le pourcentage représenté par les transferts dans les ressources globales, le chômage éventuel des membres du ménage, les difficultés à « boucler » son budget, le recours à l’emprunt, l’état de santé du chef de ménage ou de son conjoint, leur régime de sécurité sociale, etc.

L’enquête CNAF-CREDOC présente néan­ moins deux inconvénients par rapport aux enquê­ tes revenus de l’I.N.S.E.E. D’une part, la popula­ tion agricole en est exclue. En fait, pour les raisons déjà évoquées d’évaluation forfaitaire du revenu des agriculteurs, l’exclusion des exploitants agrico­ les se serait de toute façon imposée lors de l’exploi­ tation. Or, les salariés agricoles et surtout les retraités anciens agriculteurs sont sur-représentés dans les populations défavorisées. Par conséquent, le nombre de familles situées au plus bas de l’échelle des revenus est quelque peu sous-estimé par nos évaluations1 2. D’autre part, l’échantillon de ménages analysés dans l’enquête CNAF- CREDOC est de taille nettement plus faible que celui des enquêtes sur les revenus fiscaux de

1. Voir également [9, 12, 17].

2. Cf. Info-DAS, n° 5 [10], Selon cette publication, les ménages de salariés agricoles et d’anciens agriculteurs dont les revenus étaient inférieurs à 62 % du S.M.I.C. étaient environ au nombre de 280 000 en 1979 (les ménages d’anciens agri­ culteurs en constituaient les trois quarts).

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l’I.N.S.E.E. (3 800 ménages contre 33 000 environ en 1979).

Il reste que l’enquête CNAF-CREDOC est repré­

sentative de l’ensemble des ménages français non agricoles de 1978. Ainsi, le nombre de « ménages

ordinaires » français était de 19 160 000 au début 1979 (enquête emploi de l’I.N.S.E.E. de mars 1979). L’ensemble des ménages dont le chef n’ap­ partenait pas à un régime de Sécurité sociale agricole était de 17 065 000.

Les concepts retenus

La notion de « bas revenus » et le concept de ménages « défavorisés » utilisé ici ne sauraient en réalité se définir dans l’absolu. Us peuvent, soit se référer à un pourcentage de population située au bas de l’échelle des revenus, pourcentage défini arbitrairement (les 10 % de ménages ayant les revenus les plus faibles par exemple), soit être appréciés par rapport à un seuil de revenu donné, dont le caractère peut être plus ou moins significatif (le SMIC ou la moitié du SMIC par exemple) ou relatif (par exemple le revenu moyen ou un certain pourcentage de ce revenu). Mais quel que soit le mode de référence choisi, la méthode utilisée ne peut être que conventionnelle.

La plupart des études menées en France en matière de pauvreté retiennent comme référence, soit le revenu disponible moyen par unité de consommation, soit le SMIC ; les seuils en-dessous desquels les ménages concernés sont considérés comme particulièrement ou « simplement » défa­ vorisés se réfèrent le plus souvent à 40 ou 60 % de ces montants.

Le revenu disponible par unité de consommation

Le revenu disponible se définit comme l’ensemble des ressources monétaires des ménages (salaires, revenus d’indépendants, revenus mobiliers et immobiliers, retraites de base et complémentaires, prestations familiales, indemnités de chômage, prestations pour handicap ou invalidité y compris rentes d’accidents du travail, transferts divers) diminuées des impôts directs (impôt sur le revenu, taxe d’habitation et impôt foncier sur le logement principal).

La référence au revenu disponible moyen par ménage ne permet cependant pas de tenir compte des différences de taille des ménages et donc des inégalités de « niveau de vie » qui en résultent. Aussi se réfère-t-on généralement au revenu dispo­ nible par unité de consommation (U.C.). Celui-ci

L’enquête CNAF-CREDOC 1979

Le CREDOC a effectué en 1979, à la demande de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), une enquête portant sur 3 800 ménages et concernant 14 000 individus. Il s’agissait d'étudier l’impact socio-économique des prestations familiales. L’étude ne se limitait cependant pas à ces seules prestations. Elle avait pour but, plus largement, d’apprécier l’effet que les divers transferts, positifs et négatifs, de l’Etat et de la Sécurité sociale ont sur la situation financière des ménages, de façon à évaluer aussi bien l'impact propre des prestations familiales que de le comparer à celui des autres types de transferts. L’enquête a ainsi donné lieu à des travaux successifs, concernant les prestations maladie, les retraites ou les cotisations sociales.

Réalisée sur le terrain par plus de mille enquêteurs, travailleurs sociaux et personnel technique de 104 caisses d’allocations familiales, l’enquête est représentative de l’ensemble des ménages français non agricoles de 1978.

Relativement lourd, le questionnaire d’enquête visait à enregistrer l’ensemble des ressources perçues en 1978 par chacun des membres des ménages enquêtés (différents types de revenus primaires et de transferts) et les principaux impôts directs acquittés la même année. Diverses informations sur les conditions de vie des familles (conditions de logement, possession de certains équipements, etc.) venaient par ailleurs s’ajouter aux principaux renseignements détaillés, d'ordre socio-démographique, habituellement recueillis dans les enquêtes auprès des ménages.

L’enquête était par ailleurs complétée par le recueil de certaines informations d’origine administrative : prestations familiales versées aux familles allocataires de la C.N.A.F., prestations « maladie, maternité, décès» versées par le régime général de la C.N.A.M.T.S. (caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés) et le régime des indépendants non agricoles (C.A.N.A.M.), prestations « vieillesse » du régime général de la C.N.A.V.T.S. (caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés).

La confrontation des masses tirées de l’enquête et de celles fournies par les comptes nationaux montre que la masse des salaires, celles des retraites et des prestations familiales sont estimées de façon tout-à-fait correcte par l’enquête : l’écart est inférieur à 10 %. Le taux de couverture des revenus d’indépendants est cependant moins bon (87 %) ; il en est de même des taux de couverture des revenus fonciers et mobiliers et de celui de l’impôt sur le revenu, qui sont en partie liés à celui des revenus non salariaux [6],

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correspond au quotient du revenu du ménage par le nombre d’unités de consommation qu’il comporte.

L'échelle d’équivalence adoptée dans l’étude pour

la détermination des unités de consommation est la suivante : 1 pour le premier adulte du ménage, 0,7 pour chacune des autres personnes du ménage de plus de 14 ans et 0,5 pour les enfants de 14 ans et moins ; c’est d’ailleurs l’échelle retenue habituellement par l’I.N.S.E.E3.

Les seuils choisis

Pour plus de commodité et afin de faciliter les comparaisons éventuelles, on s’est référé à la valeur du SM IC. Celui-ci s’élevait sur la base de 40 heures de travail hebdomadaire, à 22 076 francs bruts en 1978 (soit 1 840 francs par mois). On a considéré que les ménages défavorisés en 1978 étaient ceux dont le revenu disponible par unité de consomma­ tion était inférieur à 14 000 francs annuels, soit 60 % du SMIC (63 % exactement). Cette valeur a été retenue car elle représente, dans l’enquête CNAF-CREDOC, la moitié du revenu disponible moyen par unité de consommation de 1978. Ce dernier s’élève en effet, dans l’enquête, à 28 000 francs.

Selon les cas, d’autres seuils ont été retenus pour les commentaires (tableau 1), dont on donne la correspondance à la fois en pourcentage du SMIC et en pourcentage du revenu disponible moyen par unité de consommation.

Le noyau familial

L’unité statistique de référence pour la présenta­ tion des résultats de l’enquête CNAF-CREDOC n’est pas le ménage, mais le noyau familial : il s’agit, soit de la famille au sens habituel du terme (père, mère, enfants), soit d’une personne seule. Constitue une personne seule toute personne vivant seule dans un logement ou toute personne d’un ménage non incluse dans une famille. Il peut donc, selon ces définitions, coexister plusieurs

TABLEAU 1

Les différents seuils retenus

Ressources disponibles annuelles par U.C. en Francs de 1978

Correspondance : En % du revenu En % du SMIC disponible moyen

par U.C.1 9 000 40 1 32 1 I 000 50 40 14 000 60 50 17 000 77 60 22 000 100 79

1. Il s'agit du revenu disponible moyen par unité de consommation de 1978, fourni par l'enquête CNAF-CREDOC (hors ménages agricoles).

« noyaux » dans un même ménage (c’est-à-dire dans un même logement). Précisons cependant que 95 % des ménages ne sont composés que d'un seul noyau4.

L’affectation des unités de corisommation a été réalisée au niveau « ménage ». Selon cette méthode, le chef d’un noyau « secondaire » ne vaut pas une unité de consommation, mais 0,7. Ceci revient à surévaluer le revenu disponible par unité de consommation des noyaux secondaires, ce qui peut se justifier par l’apport dont ils bénéficient grâce à la cohabitation.

Un exemple permettra de clarifier ces définitions : le ménage composé du père, de la mère, de leurs enfants et de la grand-mère com­ prend deux noyaux familiaux. Dans le noyau primaire (père, mère, enfants), l’affectation des unités de consommation répond aux définitions habituelles (1 pour le père, 0,7 pour la mère et 0,5 pour les enfants de moins de 14 ans). Le noyau « secondaire » (grand-mère) comprend, selon nos définitions, 0,7 unité de consommation. Cela revient à surévaluer le revenu disponible par unité de consommation de ce noyau secondaire, traduc­ tion conventionnelle du bénéfice qu’il tire de sa cohabitation avec le noyau primaire. Seulement 5 % des ménages non agricoles comportent plu­ sieurs noyaux familiaux.

Combien de « défavorisés » en 1978 ?

Sur les 17 837 000 familles5 non agricoles de 1978,2 121 000, soit 12 %, disposaient d’un revenu disponible par unité de consommation inférieur à 60 % du SMIC (tableau 2). Etaient ainsi concer­ nées 6 263 000 personnes, soit 13 % de la popula­ tion non agricole française.

Autrement dit, presque un huitième de la popu­ lation non agricole disposait en 1978 d’un revenu inférieur à la moitié du revenu disponible moyen par unité de consommation de l’ensemble des familles françaises.

On retrouve là les résultats de S. Milano obtenus par exploitation de l’enquête de l’I.N.S.E.E. sur les revenus fiscaux de 19796 : selon ses estimations,

12 % des ménages français, soit 2 340 000 ménages (y compris cette fois les ménages agricoles) dispo­ saient en 1979 de moins de la moitié du revenu disponible moyen par unité de consommation de l’ensemble des ménages.

3. Sur le passage du salaire au niveau de vie, voir [1, 2], 4. Dans le cas d’un ménage comportant plusieurs noyaux, le noyau comportant le chef de ménage est appelé noyau « primaire » ; les autres noyaux constituent des noyaux dits « secondaires ». La plus grande partie des noyaux secondaires sont en fait des noyaux de personnes seules âgées (parent ou beau-parent du chef de ménage).

5. Le terme « famille » utilisé par commodité dans le texte correspond en fait au « noyau familial » défini précédemment.

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TABLEAU 2

Nombre de noyaux familiaux par tranche de revenus en 1978

Le revenu disponible par unité de consommation du noyau

familial est :

Nombre de noyaux familiaux1 Nombre de personnes correspondant (en milliers) Nombre moyen de personnes par noyau En milliers En % Inférieur à 40 % du SMIC... 507 ) 2,8 1 100 2,2

compris entre 40 et 50 % du SMIC... 406 [ 2 121 2,3 11,9 1 404 3,4

compris entre 50 et 60 % du SMIC... 1 208 ] 6,8 3 759 3,1

compris entre 60 et 77 % du SMIC... 19,01 10,7 5 924 3,1

compris entre 77 % et le SMIC... 3 362 J 5 272 18,8 29,5 9 311 2,8

supérieur au SMIC... 10 444 58,6 25 178 2,4

Ensemble... 17 837 100,0 46 676 2,6

1. Hors population agricole.

Toutes les autres familles ne peuvent être cepen­ dant considérées comme « avantagées » : on relève notamment que 5 272 000 noyaux familiaux (soit 30 % du total) disposaient en 1978 d’un revenu disponible compris entre 60 et 100 % du SMIC (15 235 000 personnes).

Au total, 41 % des familles bénéficiaient en 1978 d’un revenu disponible par unité de consommation inférieur au SMIC, c’est-à-dire inférieur à environ 80 % du revenu disponible moyen de l’ensemble des familles.

Familles défavorisées,

fragilisées ou non-précaires

Quelles sont les caractéristiques des familles selon leur niveau de ressources ? En quoi les noyaux familiaux situés au plus bas de l’échelle des revenus se distinguent-ils des plus aisés ?

Pour répondre à ces questions, on a procédé à une analyse multi-critères visant à décrire la partition de l’ensemble des cellules familiales clas­ sées selon le montant de leur revenu disponible par unité de consommation. Trois classes ont été définies à cette fin7, dont l’intitulé est tout-à-fait conventionnel :

— les noyaux familiaux dont le revenu disponi­ ble annuel par unité de consommation est inférieur à 60 % du SMIC (« noyaux défavorisés »)8 ;

— ceux dont le revenu disponible annuel par unité de consommation est compris entre 60 % du SMIC et le SMIC (« noyaux fragilisés ») ;

— ceux au revenu disponible annuel par unité de consommation supérieur au SMIC (« noyaux non-précaires »).

Les familles défavorisées

Elles sont au nombre de 2 121 000 et représen­ tent 12 % des noyaux familiaux. La modalité la

plus caractéristique les concernant est relative au statut du chef de noyau : il est inactif, non retraité

d’une activité propre dans 27 % des cas, alors que

les cellules familiales dont le chef appartient à cette catégorie ne représentent que 9 % de l’ensemble de la population. Cette sur-représentation tient notamment à la présence en nombre important, parmi les noyaux défavorisés, de ménages dont le chef est en longue maladie ou handicapé (8 % des chefs de noyaux défavorisés le sont contre 1 % des noyaux non-précaires) (tableau 3). De même, la proportion de noyaux composés d’une femme seule inactive, âgée de 60 ans et plus, et n’ayant jamais exercé d'activité professionnelle, y est élevée (14 % contre 4 % dans l’ensemble des noyaux). Le pourcentage de noyaux défavorisés dont le chef est retraité d’une activité propre n’est cependant pas négligeable : un quart des noyaux défavorisés est dans ce cas. Enfin, les noyaux familiaux dont le chef est au chômage y sont fortement sur-représentés : 8 % des chefs de noyaux défavori­ sés le sont, contre 3 % des noyaux non-précaires. L’inactivité du chef de noyau semble donc caractéristique des familles défavorisées : 56 % (chômeurs inclus) le sont. Cela ne concerne que 43 % des noyaux fragilisés et 28 % des familles non-précaires. On constate d’ailleurs que près de la moitié (46 %) des noyaux défavorisés ne comportent aucun actif (tableau 4). Directement liées à cette inactivité, d’autres caractéristiques prédominent : un tiers des noyaux défavorisés ont un chef âgé (65 ans et plus), 43 % sont marqués par l’absence de conjoint, plus d’un tiers (36 %) ne comportent qu’une seule personne et une pro­ portion similaire a un chef de sexe féminin (contre 24 % dans l’ensemble de la population).

Mais ce groupe n’est pas seulement composé d’inactifs. Il comprend aussi 22 % de familles dont

7. Pour plus de détails sur la méthode adoptée et la descrip­ tion de chacune des classes, voir [5].

8. Il est clair que le seuil adopté conduit à mêler arbitraire­ ment dans un même ensemble des familles caractérisées par une absence totale de ressources et d'autres moins désavantagées.

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le chef est ouvrier spécialisé, qualifié ou mineur, 7 % de manœuvres-gens de maison (contre 3 % dans l’ensemble de la population) et 9 % d’em­

ployés. Ces noyaux sont le plus souvent des familles

nombreuses : 13 % des noyaux défavorisés com­

portent six personnes et plus contre 4 % dans

TABLEAU 3

Situations comparées des chefs de noyaux défavorisés, fragilisés ou non-précaires (1978)

Partition des noyaux en fonction de leur revenu disponible par unité

de consommation1 Noyaux défavorisés1 1 Noyaux fragilisés1 i Noyaux non-précaires1 1---Ensemble % de noyaux où le chef est :

— inactif, non retraité d’une activité propre (hors

chômeurs)... 26,9 10,4 4,0 8,6

dont : en longue maladie, handicapé... 8,0 2,5 1,1 2,3

— retraité d'une activité propre... 23,9 30,2 21,3 24,2

— ouvrier... 29,0 34,0 24,0 27,6

dont : manœuvre, personnel de service... 6,7 4,2 1,2 2,8

— cadre... 1,8 8,3 30,0 20,2

— de sexe féminin... 36,4 25,5 19,7 23,4

— de nationalité étrangère... 12,9 8,2 3,5 6,0

% de noyaux où le chef dispose : — d’un diplôme technique...

— du bac ou d’un diplôme d’enseignement supé- 13,6 20,3 27,3 23,6

rieur... 5,9 3,3 20,7 13,8

— d’aucun diplôme... 59,2 49,2 24,0 35,6

% de noyaux où le chef a été au chômage au moins

un mois en 1978... 7,7 3,0 3,0 3,6

% de noyaux où le chef a 65 ans ou plus... 32,8 33,4 21,2 26,2

1. Voir définitions dans le texte.

TABLEAU 4

Composition des noyaux familiaux (1978)

Partition des noyaux en fonction de leur revenu disponible par unité

de consommation1 1 Noyaux défavorisés1 1 Noyaux fragilisés1 Noyaux non-précaires1 1---Ensemble % de noyaux composés :

— d’un^ couple où l’homme est actif et la femme

inactive... 30,2 32,5 17,5 23,5

— d’un couple où l’homme et la femme sont

actifs2... 6,8 18,7 40,8 30,2

— d'un couple où les deux conjoints sont inac­

tifs2... 18,0 16,5 9,6 12,6

— d’une personne vivant sans conjoint (avec ou

sans enfants)... 42,9 30,2 29,6 31,4

dont : familles monoparentales3... 6,9 5,0 1,7 3.3

Parmi les seuls noyaux composés d'un couple, % de ceux où le conjoint est :

— inactif non retraité... 77,0 60,6 30,7 44,3

— actif... 15,6 29,8 61,5 47,4

% de ceux où le conjoint ne dispose d’aucun

diplôme... 64,2 47,7 26,5 36,6

% de noyaux composés :

— d’une seule personne... 35,5 23,3 25,3 25,9

— de six personnes et plus... 13,0 6,1 1,3 4,1

— de trois enfants et plus... 18,0 14,6 3,8 8,7

% de noyaux ne comportant aucun actif2... 45,7 35,1 20,6 27,9

1. Voir définitions dans le texte.

2. Sont considérées « actives », comme pour les enquêtes emploi de l’I.N.S.E.E., les personnes ayant un emploi ou celles à la recherche d’un emploi. Les chômeurs ne font donc pas partie ici des « inactifs ».

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l’ensemble de la population. 18 % comprennent trois enfants et plus contre 4 % des noyaux non- précaires.

L’absence de qualification du chef de famille

paraît être un trait caractéristique des noyaux défavorisés, que ce chef soit actif ou non : 59 % des chefs de noyau défavorisé n’ont aucun diplôme (contre un quart des noyaux non-précaires). 14 % seulement ont un diplôme technique (contre 27 % des chefs de famille non-précaire) et 6 % disposent du baccalauréat ou d’un diplôme d’enseignement supérieur contre 14 % dans l’ensemble de la popu­ lation (tableau 3). Mais cette absence de qualifica­ tion concerne aussi le conjoint. Parmi les seuls noyaux composés d’un couple, le conjoint ne dispose d’aucun diplôme dans les deux tiers des familles défavorisées alors que cela ne concerne qu’un quart (26 %) des familles non-précaires (tableau 4). De fait, dans la grande majorité des familles défavorisées composées d’un couple, le conjoint est inactif non retraité (77 % des cas), alors que chez les familles non-précaires, le conjoint est le plus souvent actif (62 % des cas).

L’ambivalence du groupe des noyaux défavori­ sés, composés à la fois d’un grand nombre d’inac­ tifs vivant seuls et d’actifs chargés de famille nombreuse, apparaît aussi dans l’importance rela­ tive des transferts sociaux perçus (prestations fami­ liales, prestations chômage, prestations pour han­ dicap ou invalidité, transferts divers) : pour 11 % de ces familles, les transferts représentent l’ensem­ ble, sinon la totalité (80 à 100 %), des ressources. Pour 15 % autres, ils constituent 30 à 50 % des revenus. A l’opposé, 45 % de ces familles ne bénéficient d’aucune prestation (tableau 5).

L'absence de divers éléments de confort, comme la

non-possession de certains types de biens durables, paraît typique des familles à faibles revenus

(tableau 6) : un tiers d’entre elles ne disposent pas de cabinet de toilette ou de salle de bains à l’intérieur de leur logement, un quart ne disposent pas de W.C. intérieurs, 28 % n’ont pas d’eau chaude courante. De même, un tiers ne disposent pas de machine à laver, la moitié n’ont pas de voiture, 61 % n’ont pas le téléphone, 80 % ne disposent pas de la télévision couleur et 94 % n'ont pas de lave-vaisselle. Les différences avec les familles non-précaires sont particulièrement sensibles.

A ce niveau de ressources, les difficultés budgé­ taires sont ressenties avec une acuité particulière :

17 % des familles défavorisées ont déclaré à l’en­ quête avoir de « grosses difficultés » à boucler leur budget (contre 5 % pour l’ensemble de la population). 39 % au total ont indiqué avoir « des difficultés » ou de « grosses difficultés » (contre 16 % pour l’ensemble). Enfin, 18 % ont déclaré avoir parfois recours à l’emprunt « pour finir le mois » (tableau 5). Mais, l’attitude des familles vis-à-vis de la façon dont elles ressentent leurs difficultés budgétaires varie sensiblement selon les différentes catégories constituant le groupe des noyaux défavorisés.

Trois caractéristiques supplémentaires apparais­ sent enfin très significatives de situations défavorisées :

— 20 % des noyaux défavorisés sont logés avec une autre famille ou sont logés gratuitement (tableau 6) ;

— 13 % sont de nationalité étrangère. Cette proportion est de 3 % chez les familles non- précaires (tableau 3) ;

— 7 % sont des familles monoparentales, contre 3 % dans l’ensemble de la population (tableau 4).

TABLEAU 5

Quelques caractéristiques budgétaires (1978)

Partition des noyaux en fonction de leur revenu disponible

par unité de consommation1

Noyaux défavorisés1 Noyaux fragilisés1 Noyaux non-précaires1 Ensemble % de noyaux ayant déclaré n'avoir aucune difficulté à boucler

54,8 41,1

leur budget... 18,1 23,1

% de noyaux ayant déclaré avoir « des difficultés » ou « de

grosses difficultés » à boucler leur budget... 38,9 23.1 7,7 15,9

% de noyaux ayant déclaré avoir parfois recours à l’emprunt

10,5 4,2 7,7

pour « boucler le mois »... 18,0

% de noyaux bénéficiaires des :

— allocations familiales... 29,0 32,6 15,1 21,9

— complément familial... 22,7 25.4 7,7 14,7

— allocation-logement... 23,7 29,0 4,8 14,2

% de noyaux bénéficiaires d’au moins une prestation familiale... 42,2 50,2 22,7 33,1 % de noyaux pour lesquels les prestations sociales, hors retraites.

11.1 1,8 0,7 2,3

représentent de 80 % à 100 % de leurs ressources...

% de noyaux ne bénéficiant d’aucune prestation sociale (hors

retraites)... 45,3 38,9 60,0 52,0

(8)

TABLEAU 6

Statut d'occupation du logement et niveau d’équipement (1978)

Partition des noyaux en fonction de leur revenu disponible par unité de

consommation1

Statut d’occupation du logement :

% de noyaux ne disposant pas à l’intérieur de leur logement :

% de noyaux ne disposant pas : 1 ' % de logés

% de % de gratuitement propriétaires locataires ou avec leur

famille ,, 1 de salle , . de bains ou de courante de cabinet W.C. courante dg toilette 1 i 1 , j,_ d'une de la , machine

télé-telephone voiture à ,avgr vision Noyaux défavorisés1...

Noyaux fragilisés1... Noyaux non-précaires1 Ensemble des noyaux...

41,2 38,5 20,3 39.9 45,8 14,3 46,5 42,3 11,2 43.9 42,9 13,2 27.8 32,7 25,8 23,7 25,0 22,0 7,9 11,3 9,0 14.9 17,9 14,9 61,0 50,7 33,8 13,3 57,5 42,7 25,4 8,7 35,1 24,3 21,6 9,0 44,8 32,9 24,2 9,4 1. Voir définitions dans le texte.

Les familles fragilisées

On en compte 5 272 000, soit 30 % des noyaux familiaux. Leur caractéristique essentielle est d’être

allocataires de prestations familiales : la moitié

d’entre elles en bénéficient. 29 % perçoivent l’allocation-logement (contre 14 % dans l’ensem­ ble de la population), un quart touchent le complé­ ment familial et un tiers les allocations familiales (tableau 5). Comparés aux noyaux défavorisés, ces ménages ont le plus souvent deux ou trois enfants, (c’est le cas de 28 % de ces familles), mais le moins souvent quatre enfants ou plus (4 %). Ces pourcentages sont respectivement de 18 % et 11 % pour les familles défavorisées.

L’inactivité de l’épouse concerne presque la moitié des familles fragilisées. En réalité, un tiers d’entre elles sont composées d’un couple où l’homme est actif et la femme inactive. Mais l’inactivité du chef de famille lui-même n’est pas rare : un tiers des noyaux fragilisés ne comportent aucun actif (tableau 4). Dans ce cas, le chef de famille a très souvent plus de 65 ans et il est à la retraite.

Certes, quelques différences sensibles apparais­ sent entre familles fragilisées et ménages défavorisés : moins d’un quart des noyaux fragili­ sés sont composés d’une seule personne contre 36 % des noyaux défavorisés ; dans la moitié des cellules familiales fragilisées, le chef est salarié, surtout ouvrier qualifié ou spécialisé, alors que cela ne concerne qu’un tiers des familles défavori­ sées. De même, rares sont les familles fragilisées qui ne vivent, pour l’essentiel, que de transferts sociaux (2 % des noyaux fragilisés, 11 % des noyaux défavorisés) (tableau 5). Pour 40 % d’entre elles en effet, les transferts sociaux — le plus souvent les prestations familiales — représentent de 10 à 30 % de leurs ressources totales.

Mais d’autres caractéristiques rapprochent très fortement les noyaux fragilisés des familles défavorisées : la moitié des chefs de famille fragili­ sée n’ont aucun diplôme ; un quart ne disposent pas d’eau chaude courante à l’intérieur du logement, 22 % n’ont pas de W.C. intérieurs, un quart n’ont

pas de cabinet de toilette ou de salle de bains. De même, 43 % n’ont pas de voiture et 58 % n’ont pas le téléphone.

En fait, une des principales différences entre le groupe des familles défavorisées et celui des ménages fragilisés tient à la situation du conjoint : celui-ci est actif dans 30 % des noyaux fragilisés comportant les deux conjoints. Ce pourcentage n’est que de 16 % chez les ménages défavorisés, où il y a nettement plus souvent (43 % contre 30 %) absence de conjoint (tableau 4). Mais finale­ ment, les différences entre les deux groupes sont moins importantes que leurs ressemblances. Les familles non-précaires

Leur nombre s’élève à 10 444 000 et correspond à 58 % des noyaux familiaux. Ce groupe est relativement disparate : il est constitué à la fois de familles dont le revenu par unité de consommation est à peine supérieur au SMIC et d’autres dont le revenu est deux à trois fois plus élevé (40 % de ces familles ont un revenu par unité de consommation compris entre une fois et une fois un tiers le SMIC ; 20 % ont un revenu supérieur à deux fois le SMIC). Malgré cette disparité relative, la sélection des modalités les plus caractéristiques de cette classe fait apparaître de nettes différences avec les familles défavorisées ou fragilisées. Ces dissem­ blances portent tout autant sur la composition du ménage et la situation du chef et de son conjoint que sur le perception qu’ont les familles de leurs difficultés budgétaires éventuelles.

D’une part, c’est l'activité du conjoint qui semble être une des caractéristiques les plus pertinentes pour qualifier ces familles. En effet, dans 62 % des noyaux non-précaires comportant les deux conjoints, l’épouse est active ; cette proportion n’est que de 16 % et 30 % pour les deux autres groupes de cellules familiales analysées (tableau 4). Ceci apparaît d’ailleurs directement lié au niveau de formation du conjoint : 27 % des épou­ ses ne disposent d’aucun diplôme dans les familles non-précaires ; cela concerne 64 % des épouses dans les noyaux défavorisés. Corrélativement, le chef de noyau, plus souvent que dans l’ensemble

(9)

de la population, est cadre supérieur (11 %) ou cadre moyen (19 %) et son niveau de formation est révélateur de cette position plus avantageuse dans l’échelle sociale : 21 % des chefs de familles non-précaires disposent du baccalauréat ou d’un diplôme d’enseignement supérieur, 27 % ont un diplôme technique (tableau 3).

D’autre part, la grande majorité (80 %) des noyaux non-précaires déclarent ne pas avoir de difficultés à « boucler leur budget » (55 % répon­ dent par la négative à la question sur d’éventuelles difficultés, pendant que 26 % répondent « pas de difficultés, mais c’est juste »). De même, seulement 4 % signalent avoir parfois recours à l’emprunt pour « boucler » le mois.

Ces deux situations, relatives à la perception qu’ont les familles de l’absence de réelles difficultés budgétaires, apparaissent très fortement caracté­ ristiques des ménages non-précaires.

Le niveau de confort du logement, comme le niveau d’équipement, sont radicalement opposés à ceux mis en évidence pour les deux groupes précédents (tableau 6) : l’immense majorité des familles dites non-précaires disposent de l’eau chaude courante, de W.C. intérieurs et d'un cabinet de toilette ou d’une salle de bains. Les deux tiers disposent du téléphone, 43 % de la télévision couleur, 19 % d’un lave-vaisselle, 21 % de deux voitures et plus. 12 % de ces familles disposent aussi d’une résidence secondaire.

Le statut d’occupation du logement n’apparaît pas lui-même discriminant : 46 % des familles non-précaires sont propriétaires de leur logement. Mais 40 % des familles fragilisées et 41 % des familles défavorisées le sont aussi. Aucune diffé­ rence significative n’apparaît non plus sur le nom­ bre de pièces dû logement ou sur sa superficie.

Les prestations sociales ne représentent qu’une part relativement faible des ressources des ménages non-précaires : 60 % d’entre eux ne perçoivent aucune prestation (tableau 5) et pour 17 %, ces aides représentent moins de 5 % de leurs revenus. En fait, c’est surtout sur les prestations familiales que les différences sont le plus sensibles entre les

familles non-précaires et les autres : les deux tiers des noyaux non-précaires n’ont en effet aucun enfant. Un quart de ces noyaux sont constitués d’une personne seule et 39 % comprennent au moins deux personnes, mais sans aucun enfant ouvrant droit aux prestations. Finalement, les trois quarts des ménages non-précaires ne perçoivent aucune prestation familiale. 95 % ne bénéficient pas de l’allocation-logement, 92 % ne touchent pas le complément familial et 85 % ne perçoivent pas d'allocations familiales (tableau 5). Au total, les prestations familiales représentent en moyenne moins de 2 % des ressources des familles non- précaires, contre presque 13 % pour les noyaux défavorisés (tableau 7).

En contrepartie, la part des ressources représen­ tée par les salaires est deux fois plus élevée chez les noyaux non-précaires (65 %) que dans les familles défavorisées (30 %).

Les « défavorisés » :

des familles nombreuses...

...aux familles monoparentales

Les familles défavorisées se définissent par rap­ port aux autres types de ménages selon certains traits spécifiques. Ceux-ci ne font en réalité que refléter les caractéristiques des divers sous-groupes relativement typés qui composent la population à bas revenus. Comment se définit précisément chacun de ces sous-groupes et quel est leur poids démographique respectif? Pour répondre à cette question, on a réalisé, à partir du système SPAD, une classification en groupes homogènes des noyaux familiaux « défavorisés », caractérisés par une batterie importante de variables issues de l’enquête CNAF-CREDOC 19799.

9. Sur la méthode, voir [8] ; sur les variables retenues, voir [5].

TABLEAU 7

Composition des ressources (1978)

Partition des noyaux en fonction de leur revenu

disponible par unité de consommation1

Revenu disponible

annuel moyen par U.C.

en Francs

-Part, en %, des ressources constituées par les : 1

Salaires Retraites

Transferts dont :

Prestations ' Pr™ons ' Prestations ' _ K1 familiales invalidité chômage Ensemble Noyaux défavorisés1... Noyaux fragilisés1... Noyaux non-précaires1... Ensemble... 10 400 18 000 36 600 28 000 30,0 32,6 47,1 32,7 65,4 20,8 55,8 25,7 12,6 5,2 3,5 22,6 8,4 2,5 1,4 13,0 1,6 1,7 1,4 5,5 5,0 2,3 1,6 9,8

(10)

Il apparaît que les familles à bas revenus peuvent être classées en six groupes relativement stables et homogènes. Ces groupes sont certes d’importance démographique variable, mais ils se définissent assez simplement par des caractéristiques précises, qui constituent finalement les éléments-pivots autour desquels se focalisent les situations de précarité de ressources. L’intitulé proposé ne signi­ fie pas pour autant que chaque groupe est unique­ ment constitué de noyaux familiaux répondant à l’ensemble des caractéristiques mentionnées. Cer­ taines cellules familiales peuvent en effet ne pas répondre à la totalité de ces traits distinctifs, mais leurs principaux éléments qualificatifs les portent à se regrouper, dans chacun des groupes cités, avec des familles dont les caractéristiques sont relativement proches. Les six groupes sont les suivants :

A - Les familles nombreuses, composées d’un couple où l’homme est salarié, principalement ouvrier ou employé, non qualifié, et la femme inactive. Autour de ces caractéristiques centrales, se regroupent 29 % des familles défavorisées de

1978.

B - Les personnes seules, âgées, de sexe féminin, sans enfants, principalement pensionnées de réver­ sion. 33 % des noyaux familiaux défavorisés de

1978 se regroupent autour de ces caractéristiques centrales, parmi lesquelles l’isolement prédomine.

C - Les familles âgées, sans enfants, composées d’un couple d’inactifs où seul l’homme est pen­ sionné, principalement ancien indépendant ou

ancien salarié du secteur privé, non diplômé (16 % des familles défavorisées).

D - Les familles de travailleurs indépendants, artisans ou petits commerçants, pour lesquelles le revenu d’exploitation est, soit déficitaire, soit relativement faible. La situation de ces familles apparaît pour partie liée au système d’imposition fiscal des travailleurs indépendants et à l’évaluation souvent forfaitaire de leur revenu sur laquelle ce système repose. A ce groupe s’ajoutent, du fait de l’activité de l’épouse, des familles composées d’un couple où l’homme est inactif (souvent malade ou handicapé) et la femme active (10 % des familles défavorisées au total).

E - Les chômeurs, principalement de longue durée, surtout ouvriers ou employés, jeunes ou en fin de carrière (6 % des noyaux défavorisés en

1978).

F - Les familles monoparentales10, dpnt le chef est de sexe féminin, principalement actif, mais non qualifié (7 % des noyaux défavorisés en 1978).

Les tableaux 8 à 12 présentent quelques-uns des traits principaux de chacun de ces groupes. Ces données mettent en évidence de profondes différen­ ces entre les noyaux familiaux composant chacun de ces sous-groupes.

10. Le terme de « familles monoparentales » se réfère ici aux familles composées d’un seul des deux parents et d’au moins un enfant ouvrant droit aux prestations familiales.

TABLEAU 8

Situations comparées des chefs de noyaux défavorisés selon leur groupe d’appartenance (1978)

Groupes constituant les noyaux défavorisés1 — Groupe A GroupeB — Groupe C 1 Groupe D — Groupe E GroupeF Ensemble des noyaux défavorisés % de noyaux où le chef est :

— inactif, non retraité d'une activité propre

(hors chômeurs)... 4,3 59,2 21,7 15,4 n.s. 19,1 26,9

dont : en longue maladie, handicapé... 3,9 8,0 15,6 14,7 n.s. n.s. 8,0 — retraité d'une activité propre... n.s. 31,3 78,3 n.s. n.s. — 23,9

— ouvrier... 73,2 n.s. — 12,0 38,5 52,6 29,0

dont : manœuvre, personnel de service... 10,4 n.s. — n.s. n.s. 40,6 6,7

— indépendant... n.s. n.s. — 67,3 - n.s. 9,8

de sexe féminin... n.s. 83,0 n.s. — 40,0 94,1 36,4

— de nationalité étrangère... 21,3 10,5 6,2 n.s 6,9 23,6 12,9

% de noyaux où le chef dispose :

— d’un diplôme technique, du bac ou d’un

diplôme d’enseignement supérieur... 22,8 17,8 5,5 31,1 41,7 13,1 19,5

— d’aucun diplôme... 60,5 58,9 76,3 40,5 48,9 53,1 59,2

% de noyaux où le chef a été au chômage au

moins un mois en 1978... n.s. 67,9 61,9 n.s. 8,8 100,0 13,6 7,7 32,8 % de noyaux où le chef a 65 ans ou plus...

(11)

TABLEAU 9

Groupes constituant les noyaux défavorisés1 — Groupe A — Groupe B — Groupe C — Groupe D --- T Groupe E ---r Groupe F Ensemble des noyaux défavorisés % de noyaux composés :

— d’un couple où l’homme est actif et la femme

inactive-... 86,7 — — 32,5 40,0 — 30,2

— d’un couple où l’homme et la femme sont

actifs-... 5,1 — — 47,8 6,1 — 6,8

— d’un couple où les deux conjoints sont inac­

tifs2... 5,8 n.s. 98,8 — — — 18,0

— d’une personne vivant sans conjoint (avec

ou sans enfants)... n.s. 99,1 n.s. — 53,9 100,0 42,9

dont : familles monoparentales3 n.s. — — — 22,3 72,8 6,9

Parmi les seuls noyaux composés d’un couple, % de ceux où le conjoint est :

77,0

— inactif non retraité... 94,6 n.s. 75,0 32,5 82,5 —

— actif... 5,4 n.s. — 67,5 14,0 15,6

% de ceux où le conjoint ne dispose d'aucun

diplôme... 69,5 n.s. 77,1 28,6 63,2 — 64,2 % de noyaux composés : 27,2 7,6 20,4 35,5 13,0 18,0 — d'une seule personne...

— de six personnes et plus... — de trois enfants et plus...

37,2 52,8 98,0 n.s. n.s. n.s. n.s. 31,6 9,4 11,3

% de noyaux ne comportant aucun actif2... n.s. 89,6 91,4 — — 14,9 45,7 1. Voir qualification de chaque groupe dans le texte.

2. Sont considérées comme actives les personnes ayant un emploi des « inactifs ».

3. Noyaux composés d’un seul des deux parents et d’au moins un pour être significatifs.

ou celles à la recherche d'un emploi. Les chômeurs ne font donc pas partie ici enfant ouvrant droit aux prestations familiales, n.s. = effectifs trop restreints

Le groupe A : des familles nombreuses, surtout ouvrières

Ce groupe (611 000 noyaux familiaux) est com­ posé majoritairement de familles nombreuses, allo­ cataires de prestations familiales (93 %) où

l’homme est actif, salarié (86 %), principalement

ouvrier (73 %) ou employé (12 %) et la femme

inactive (93 %).

Le chef est le plus souvent salarié du secteur privé (74%); il n’a aucun diplôme (61 %) ou seulement le certificat d’études primaires (17 %) et il exerce une activité professionnelle depuis déjà au moins quinze ans (64 %) : il a le plus souvent entre 35 et 54 ans (64 %).

La raison principale de la présence de ces familles au sein du groupe défavorisé tient au nombre d’enfants qu’elles comportent : 2,9 en moyenne, contre 1,1 pour l’ensemble des familles défavorisées et 0,8 pour l’ensemble de la popula­ tion. Un tiers de ces familles comportent quatre enfants et plus et 22 % en comportent trois. Plus des trois quarts de ces familles touchent les allocations familiales, et 55 % l’allocation- logement (contre 24 % des familles défavorisées et

14 % de l’ensemble de la population).

La présence de ces familles parmi les ménages dits défavorisés tient en fait à la norme de référence

adoptée pour la classification : le revenu disponible par unité de consommation. En effet, le revenu disponible moyen par noyau familial est, pour ce groupe, de 42 100 francs contre 23 900 francs pour l’ensemble des familles défavorisées et 54 000 francs pour l’ensemble de la population. Compre­ nant en moyenne 3,6 unités de consommation, ces ménages voient leur revenu disponible moyen par unité de consommation descendre à 11 700 francs contre 10 400 francs pour l’ensemble des familles défavorisées et 28 000 francs pour l’ensemble des noyaux (tableau 11). Cette remarque met en évi­ dence combien l’échelle adoptée pour déterminer les unités de consommation influe sur l’évaluation du nombre de familles défavorisées.

Le groupe ainsi défini ne comporte que très peu de chômeurs, ou d’invalides et handicapés. Les transferts perçus sont donc constitués essentielle­ ment de prestations familiales, qui représentent en moyenne 28 % des ressources totales de ce groupe. Ce sont les salaires qui constituent la majeure partie de leurs revenus (tableau 11).

Comparés aux autres catégories défavorisées, ces ménages semblent relativement mieux logés : 22 % n’ont cependant pas de cabinet de toilette ou de salle de bains dans leur logement (contre 33 % pour les noyaux défavorisés dans leur ensem­ ble), 18 % ne disposent pas de W.C. intérieurs

(12)

TABLEAU 10

Quelques caractéristiques budgétaires des noyaux défavorisés (1978)

Groupes constituant les noyaux

défavorisés1 GroupeA GroupeB GroupeC

Groupe D GroupeE GroupeF Ensemble des noyaux défavorisés % de noyaux ayant déclaré n’avoir aucune

difficulté à boucler leur budget... 9,0 24,3 15,3 32,7 26,7 18 1

% de noyaux ayant déclaré avoir « des difficultés » ou « de grosses difficultés » à bou­

cler leur budget... 41,5 32,6 38,5 32,3 57,5 54,1 38,9

% de noyaux ayant déclaré avoir parfois recours

à l’emprunt pour « boucler le mois »... 27,0 8,0 10,7 21,1 35,4 26,1 18,0 % de noyaux bénéficiaires des :

— allocations familiales... 77,1 _ n.s. 21,9 21,9 35,1 29 0

— complément familial... 65,8 — n.s. 6,8 22,1 21,1

22.7 23.7

— allocation-logement... 54,8 5,6 16,0 n.s. 31,3 20,8

% de noyaux bénéficiaires d’au moins une

prestation familiale... 92,5 5,6 22,7 26.3 62,0 67,5 42,2

% de noyaux pour lesquels les prestations sociales, hors retraites, représentent de 80 à

100 % de leurs ressources... n.s. 7,8 11,3 70,1 28 9 1 1 1

% de noyaux ne bénéficiant d’aucune prestation

sociale (hors retraites)... 6,5 80,1 57,6 53,6 8,9 32,5 45,3

1. Voir qualification de chaque groupe dans le texte, n.s. = effectifs trop restreints pour être significatifs.

(contre 26 %). Ils semblent aussi mieux équipés : 70 % ont une voiture (contre 49 %), 97 % dispo­ sent de la télévision (contre 87 %) - mais, surtout, en noir et blanc - et, nombre d’enfants oblige, 88 % disposent d’une machine à laver le linge (contre 66 %). Par contre, ils sont nettement plus souvent locataires de leur logement (55 % contre 38 % pour l’ensemble des noyaux défavorisés) (tableau 12).

Signalons enfin que 21 % de ces familles sont de nationalité étrangère, contre 13 % pour l’ensemble des noyaux défavorisés et 6 % pour l’ensemble de la population.

Le groupe B : surtout des femmes seules, inacti­ ves et âgées

Ce groupe (689 000 noyaux familiaux) est consti­ tué de personnes seules (98 %), inactives (90 %). Il s’agit le plus souvent d’une femme (83 %), de plus

de 65 ans (68 %), elle-même rarement retraitée

d’une activité propre : 59 % n’ont pas exercé d’activité antérieure tandis que 31 % sont retrai­ tées de leur activité. 61 % de ces personnes seules sont veuves. ■

Ces personnes vivent principalement d’une retraite de faible montant : la plupart sont pension­ nées de réversion ; les retraitées d’une activité propre figurant dans ce groupe sont affiliées, soit au régime général, soit au régime des indépendants. Ces personnes vivant seules et n’ayant donc pas d’enfants à charge, ne bénéficient pas de presta­ tions familiales. 6 % touchent cependant l’allocation-logement. Elles ne perçoivent d’ailleurs

aucune prestation sociale autre que les retraites : 80 % sont dans ce cas. La principale aide dont elles bénéficient consiste donc dans l’exonération de la taxe d’habitation : 71 % ne paient pas cet impôt (contre 41 % pour l’ensemble des familles défavorisées et 20 % pour l’ensemble de la popula­ tion). Plus largement, 53 % n’acquittent aucun impôt direct (impôt sur le revenu, impôt foncier, taxe d’habitation).

Ces personnes sont mal logées et mal équipées (tableau 12) : plus d’un tiers ne disposent pas de l’eau chaude courante dans leur logement ou de W.C. intérieurs, la moitié n’ont pas de cabinet de toilette ou de salle de bains (contre un tiers de l’ensemble des noyaux défavorisés). Si plus des trois quarts ne disposent pas de voiture (il s’agit principalement de femmes seules âgées), 61 % n’ont pas de machine à laver, 19 % n’ont pas de télévision (85 % n’ont pas la télévision couleur). Elles n’ont ni congélateur (88 %), ni lave-vaisselle (97 %). 16 % sont logées gratuitement et 19 % cohabitent avec une autre famille dans le même logement. Notons que ce groupe comprend aussi 6 % d’étudiants sans activité professionnelle vivant seuls ou en cohabitation, parfois logés gratuite­ ment.

Enfin, si 47 % des personnes du groupe se déclarent malades ou handicapées (contre 37 % pour l’ensemble des noyaux défavorisés), 93 % ne bénéficient pas de prestations pour handicap ou invalidité (5 % perçoivent cependant l’allocation aux adultes handicapés) et elles ne paraissent pas être de forts consommateurs médicaux. En fait,

(13)

8 % ne sont pas couvertes par la Sécurité sociale (contre 3 % pour l’ensemble des noyaux défavori­ sés et moins d’1 % pour l’ensemble de la popula­ tion).

Curieusement, ces personnes seules ressentent moins que d’autres, à ce niveau de revenu, leurs difficultés budgétaires : un quart déclarent n’avoir aucune difficulté à « boucler leur budget » (contre 18 % pour l’ensemble des noyaux défavorisés). On peut voir là, soit une accoutumance à ces difficultés éventuelles (il s’agit principalement de personnes âgées), soit un effet de la cohabitation avec une autre famille — souvent leurs enfants — qui peut, le cas échéant, les aider. En tout état de cause, elles n’ont pas l’habitude de recourir à l’emprunt pour « boucler le mois » : seuls 8 % déclarent le faire, contre 18 % pour l’ensemble des familles défavorisées.

Le groupe C : des couples d’inactifs, retraités ou handicapés

Comme le groupe précédent, cette catégorie (335 000 noyaux familiaux) vit principalement de retraites (tableau 11), mais elle est composée cette fois de couples où l’homme et la femme sont inactifs (99 %), ayant rarement des enfants à charge (91 % n’en ont pas). Le chef de famille est le plus souvent retraité (78 %), généralement du secteur privé (38 %) ou ancien indépendant (24 %). Ceci se traduit par des retraites relativement plus faibles que celles en provenance du secteur public [7], d’autant que ces pensions se réfèrent à des emplois antérieurs peu qualifiés : les trois quarts des chefs de famille de ce groupe ne disposent d’aucun diplôme (contre 59 % pour l’ensemble des ménages défavorisés). Le chef de famille peut aussi être en longue maladie ou handicapé (16 %). Son conjoint

TABLEAU 11

Composition des ressources des noyaux défavorisés (1978)

Groupes constituant les noyaux défavorisés1 1---Revenu disponible annuel moyen par U.C.

en Francs

-Nombre moyen de personnes par noyau

Part, en %, des ressources constituées par les

Salaires Retraites Transferts dont : Prestations familiales Prestations pour invalidité T Prestations chômage Ensemble Groupe A... 11 700 5,3 64,1 0,4 27,8 1,7 0,6 30,2 Groupe B... 9 600 1,0 8,8 62,5 1,3 5,7 0,1 10,0 Groupe C... 10 600 2,4 4,7 71,7 3,0 11,6 — 16,1 Groupe D... 11 100 3,6 37,5 4,4 4,0 6,8 0,4 11,2 Groupe E... 8 400 2,8 12,4 6,4 22,8 2,3 49,2 74,9 Groupe F... 9 300 2,7 49,6 0,8 29,8 2,9 5,8 39,4 Ensemble

des noyaux défavorisés... 10 400 3,0 30,0 32,6 12,6 5,2 3,5 22,6

Ensemble des noyaux... 28 000 2,6 55,8 25,7 5,0 2,3 1,6 9,8

1. Voir qualification de chaque groupe dans le texte.

TABLEAU 12

Statut d’occupation du logement et niveau d’équipement des noyaux défavorisés (1978)

Groupes constituant les noyaux défavorisés1

Statut d’occupation du logement :

% de noyaux ne disposant pas à l’intérieur de leur logement

% de noyaux ne disposant pas --- 1---% de % de propriétaires locataires % de logés gratuitement ou avec leur famille T d’eau chaude courante de salle de bains ou de cabinet de toilette de W.C. 1 du d’une téléphone voiture d’une machine à laver de la télévision Groupe A... 37,5 55,0 7,4 23,5 22,0 18,4 71,2 29,9 12,0 3,2 Groupe B... 32,6 32,6 34,8 33,6 50,0 34,1 63,1 78,0 60,7 19,0 Groupe C... 50,0 30,0 20,0 38,3 38,2 33,1 59,8 55,7 34,8 18,1 Groupe D... 74,7 21,9 3,4 14,6 13,4 10,4 30,3 10,2 10,6 — Groupe E... 19,8 48,9 31,3 21,1 22,8 29,9 56,7 47,6 40,4 35,2 Groupe F... 45,7 32,9 21,4 19,2 20,8 20,8 61,6 61,9 24,9 19,8

Ensemble des noyaux

50,7 33,8 13,3

défavorisés... 41,2 38,5 20,3 27,8 32,7 25,8 61,0

Ensemble

24,2 9,4

des noyaux... 43,9 42,9 13,2 14,9 17,9 14,9 44,8 32,9

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est le plus souvent inactif, non retraité d’une activité propre (74 %).

La retraite perçue est, en valeur absolue, du double de celle touchée par les pensionnés du groupe B (15 500 francs en moyenne contre 7 500 francs), mais la référence au nombre d’unités de consommation du noyau rend le niveau de vie de ces deux groupes tout-à-fait comparable (tableau 11). Au décès du mari, une bonne partie des épouses de ce groupe « rejoindront » le groupe B avec une pension de réversion égale à environ la moitié de la pension antérieure de leur mari.

Si le chef peut être lui-même en longue maladie ou handicapé, son conjoint se déclare également souvent malade (40 %), si bien que 80 % de ces familles comportent au moins un de leurs membres malade ou handicapé. En fait, 21 % de ces noyaux perçoivent effectivement une prestation pour han­ dicap ou invalidité (y compris rente d’accident du travail), contre 12 % pour l’ensemble des familles défavorisées et 9 % pour l’ensemble de la popula­ tion. Les prestations pour handicap représentent en moyenne 12 % des ressources des ménages du groupe (tableau 11). Ce sont pratiquement les seules prestations dont ils bénéficient. 16 % tou­ chent cependant l'allocation-logement.

Plus souvent propriétaires de leur logement que les ménages du groupe B (tableau 12), ils ne jouissent cependant pas d’un niveau de confort minimal important : plus d’un tiers ne disposent pas d’eau chaude courante, de W.C. intérieurs ou de cabinet de toilette ou de salle de bains. Le recours à l’emprunt pour « boucler le mois » n’est que très rarement utilisé (tableau 10) : 11 % déclarent parfois le faire. Ceci les rapproche une nouvelle fois du groupe B.

Le groupe D : souvent des travailleurs indépen­ dants

Ce groupe (220 000 noyaux familiaux) est le moins homogène de tous, mais il se caractérise de façon relativement précise. Il est composé aux deux tiers (67 %) de familles dont le chef est

indépendant, essentiellement artisan ou petit com­

merçant. Son conjoint — il n’y a pas de personne seule dans ce groupe — peut être actif (aide familial surtout), comme inactif. Ces travailleurs indépendants connaissent, soit un déficit d’exploi­ tation, soit une évaluation (système du forfait le plus souvent) de leurs revenus d’activité relative­ ment faible. La plupart d’entre eux ont plus de vingt ans d’activité professionnelle et la grande majorité a entre 35 et 55 ans.

Le troisième tiers appartenant à ce groupe est majoritairement constitué de ménages composés d’un couple où l’homme est inactif, le plus souvent malade ou handicapé (15 %), et la femme active. C’est précisément l’activité du conjoint qui a conduit ces ménages à « rejoindre » les travailleurs indépendants cités précédemment, dont plus du

tiers des épouses travaillent. Dans l’ensemble des noyaux défavorisés comprenant un couple, le conjoint est actif dans seulement 16 % des cas. Cela concerne par contre 68 % des noyaux du groupe D (tableau 9).

Les indépendants constituant la majorité des ménages du groupe influent d’autant plus profon­ dément sur les principales caractéristiques permet­ tant de le qualifier qu’ils présentent, par exemple, sur le niveau d’équipement de leur logement ou les principaux biens durables possédés, plus de similitudes avec les noyaux non-précaires qu’avec les ménages défavorisés. Le montant de leurs revenus annuels d’activité semble d’ailleurs en contradiction avec les informations, partielles, dont on dispose sur leur niveau de vie. Le tableau 13 compare ainsi certains éléments de la situation des seuls indépendants appartenant aux noyaux dits « défavorisés » avec les situations respectives de l’ensemble des ménages défavorisés, de l’ensem­ ble des ménages non-précaires et des seuls ménages d’indépendants appartenant à la catégorie des noyaux non-précaires. Néanmoins, certaines des caractéristiques retenues dans le tableau 13 sont parfois directement liées à l’activité professionnelle des travailleurs non salariés (par exemple disposi­ tion du téléphone, d’une voiture ou d’un logement relativement vaste) et ne sont donc pas toujours la traduction réelle d’un certain niveau de vie. Quoi qu’il en soit, sans atteindre la situation très favorable des indépendants non-précaires, les familles d’indépendants défavorisés disposent d’un niveau d’équipement les classant nettement à part dans l’ensemble des noyaux à bas revenus. Cette situation tout-à-fait particulière explique le « déphasage » qui apparaît dans le tableau 12 entre le groupe D dans son ensemble et les autres catégories appartenant aux noyaux défavorisés.

Les ménages d’indépendants à bas revenus pré­ sentent cependant quelques caractéristiques assez différentes des autres types de noyaux non-salariés, qui expliquent en partie leur situation : dans plus de la moitié des cas (52 %), l’épouse ne travaille pas (contre 30 % pour l’ensemble des indépendants). Quand celle-ci est active et salariée (18 % des cas), elle est le plus souvent ouvrière (15 %), essentiellement manœuvre ou « personnel de service », contrairement aux autres ménages d’in­ dépendants où le conjoint salarié est bien plus souvent « employé ». 56 % de ces travailleurs indépendants n’ont aucun diplôme ou seulement le C.E.P. (contre 45 % pour l’ensemble des indé­ pendants). Enfin, 18 % ont au moins trois enfants contre 11 % pour l’ensemble des familles de non- salariés.

La présence dans ce groupe de familles compo­ sées d’un couple où l’homme est handicapé expli­ que qu’en moyenne 7 % de leurs ressources sont constituées de prestations pour handicap ou invali­ dité (tableau 11). Au total, les transferts ne repré­ sentent en moyenne que 11 % des revenus des

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TABLEAU 13

Les travailleurs indépendants en milieu défavorisé et non-précaire (1978)

En % Caractéristiques retenues Familles d’indépendants appartenant aux noyaux défavorisés Ensemble des noyaux défavorisés Ensemble des noyaux non-précaires Familles d’indépendants appartenant aux noyaux non-précaires % de noyaux propriétaires de leur logement...

% de noyaux disposant d’un logement de 6 pièces ou plus...

66 41 46 66

28 10 10 30

% de noyaux ne disposant pas à l’intérieur de leur logement :

— de l’eau chaude courante... 10 28 8 3

— d’un W.C.... 7 26 9 4

— d’un cabinet de toilette ou d’une salle de bains... 13 33 11 2

% de noyaux ne disposant pas :

— du téléphone... 18 61 35 14

— d’une machine à laver le linge... 15 34 22 9

% de noyaux disposant :

— de 2 voitures ou plus... 38 8 21 34

— d’un lave-vaisselle... 21 6 19 40

— d’un congélateur indépendant... 47 22 25 39

— de la télévision couleur... 40 21 43 48

— d’une résidence secondaire... 7 4 12 13

% de noyaux ayant déclaré n’avoir aucune difficulté à « boucler 35 18 55 61 leur budget »...

familles du groupe, contre 23 % pour l’ensemble des familles défavorisées.

Le groupe E : des chômeurs, souvent de longue durée

Ce groupe (122 000 noyaux familiaux) est en totalité composé de ménages dont le chef est au

chômage. Tous les ménages défavorisés dont le

chef est sans emploi n’appartiennent d’ailleurs pas à ce groupe, mais les trois quarts d’entre eux y figurent. Il s’agit principalement de ceux qui ont été au chômage plus de six mois en 1978 : 92 % de ces chômeurs de longue durée y figurent. Leur période de chômage ne se limite pas à l’année 1978 : plus de la moitié (56 %) d’entre eux ont également été au chômage l’année précédente. Des chômeurs de plus courte durée (moins de six mois en 1978) figurent aussi, en moins grand nombre, dans ce groupe, mais tous ne sont pas présents dans cette catégorie, car ils peuvent appartenir au groupe F principalement composé de familles monoparentales.

Quelles sont les caractéristiques de ces familles ? Elles sont composées en majorité (54 %) d’un chef vivant sans conjoint ou d’un couple où la femme est inactive (40 %). Le chef est principalement employé (40 %) ou ouvrier (39 %) et il appartient au régime général de la Sécurité sociale (98 %). Il est, soit relativement jeune : 47 % ont moins de 35 ans (contre 20 % pour l’ensemble des noyaux défavorisés), soit en fin de carrière professionnelle : 19 % d'entre eux ont entre 60 et 65 ans (contre 6 % pour l’ensemble des noyaux défavorisés). Le chef de famille est plus souvent pourvu d’un

diplôme technique (31 %) que dans l’ensemble des ménages à bas revenus (13 %). Notons que le pourcentage d’étrangers y est aussi plus faible (7 % contre 13 % pour l’ensemble des noyaux défavorisés).

Le seul apporteur de ressources du noyau étant au chômage, ces familles sont, de tous les noyaux dits défavorisés, celles dont le niveau de vie est le plus faible. Plus de la moitié d’entre elles disposent en effet d’un revenu disponible par unité de consommation inférieur à 40 % du SMIC. Les prestations-chômage représentent en moyenne la moitié de leurs ressources et les prestations familia­ les, un quart (tableau 11 ). Cette importance relative des prestations familiales n’est pas directement liée à la présence dans ce groupe d’un grand nombre de familles nombreuses : 44 % n’ont en effet aucun enfant à charge. Mais ce sont, pour un quart, des ménages monoparentaux avec enfant(s) : 19 % des noyaux classés ici touchent l’allocation d’orphelin (contre 4 % pour l’ensemble des noyaux défavori­ sés). Ces cellules familiales sont néanmoins de petite taille ; elles ne comportent en général qu’un seul enfant : un tiers des ménages appartenant au groupe E sont dans ce cas (contre 15 % pour l’ensemble des noyaux défavorisés).

Ces ménages vivent donc principalement de transferts : pour 70 % d’entre eux, ces prestations constituent l’essentiel de leurs ressources ; seuls 11 % de l’ensemble des noyaux défavorisés sont dans ce cas.

Cette faiblesse des ressources se traduit directe­ ment dans les difficultés que ressentent ces noyaux à « boucler leur'budget » : 58 % d’entre eux éprou­

Références

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