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Lendemain du Grenelle : et maintenant ?

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Academic year: 2021

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HAL Id: halshs-00372642

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Submitted on 14 May 2018

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Lendemain du Grenelle : et maintenant ?

Yves Crozet, Jean-Pierre Orfeuil

To cite this version:

Yves Crozet, Jean-Pierre Orfeuil. Lendemain du Grenelle : et maintenant ?. Infrastructures et mobil-ité, 2008, pp.13-15. �halshs-00372642�

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Lendemains du Grenelle: et maintenant ?

Jean-Pierre Orfeuil

Ingénieur civil des mines de Paris et docteur en statis-tiques, Jean-Pierre Orfeuil est professeur à l’Institut d’Urbanisme de Paris de l’Université Paris XII où il en-seigne l’analyse de la mobilité et les enjeux écono-miques, sociaux, territoriaux et environnementaux des politiques de déplacements. Il préside la Chaire universitaire de l’institut pour la Ville en mouvement. Il vient de publier « Une ap-proche laïque de la mobilité » aux Éditions Descartes et va sortir aux Éditions Les carnets de l’Info « Mobilités urbaines : l’âge des possibles ».

Yves Crozet

Doyen de la faculté de sciences économiques et de ges-tion de Lyon II de 1992 à 1996, Yves Crozet est profes-seur agrégé de sciences économiques et membre élu du conseil scientifique de l'Université de Lyon II. Il a été di-recteur du Laboratoire d'Economie des Transports (LET, UMR n°5593, CNRS, ENTPE) de janvier 1997 au 1erseptembre 2007. Yves Crozet est responsable, depuis 2004, du master « Transport et logistique industrielle et commerciale ». Il est aussi président du groupe opérationnel n°6 du Predit 4 (2008 - 2012) : « Politiques de transport. »

L’Assemblée nationale a voté le projet de loi «Grenelle 1 » à une très large majorité, le 21 octobre dernier. Au-delà de cette belle unanimité, un certain nombre de décisions concrètes sont attendues et seront débattues dans le cadre des travaux pratiques du « Grenelle 2 » Il n’est pas inutile de connaître à ce sujet la vision de deux observateurs (très) éclairés. Besoins réels d’infrastructures nouvelles, modes de financement, rôle des collectivités, place de la voiture, sont quelques unes des questions que nous leur avons soumises dans le cadre du 79èmedébat d’Infrastructures et Mobilité.

n Au-delà des décisions du Grenelle, de quelles infrastructures de transport (voyageurs et fret) la France a-t-elle encore vé-ritablement besoin pour répondre aux exigences de la mobilité durable ?

Jean-Pierre Orfeuil

« Le Grenelle » est une sorte d’ovni politique sympathique, mais lui prêter des pouvoirs de décision est un peu ex-cessif et un brin centralisateur. Par déontologie, je ne ré-ponds que sur le domaine où je crois avoir quelque com-pétence, la mobilité urbaine et régionale.

Dans ce domaine, je ne vois pas que les pouvoirs de déci-sion aient été enlevés aux collectivités territoriales, et c’est heureux. Proposer depuis Paris 1500 km de nou-veaux de sites propres en province d’ici 2020 (alors que nous sommes à 443 km) nous renvoie aux meilleurs temps du centralisme, l’illusion en plus. Les collectivités feront les projets qui leur tiennent à cœur et qu’elles ont les moyens de financer. Il ne fait guère de doute qu’il y a des besoins importants d’infrastructures de rocade rapi-de en transport collectif dans la petite couronne franci-lienne, pour des raisons de congestion notamment. Il ne fait guère de doute qu’avec le renchérissement des car-burants, il y a des besoins notables d’offre de services sur le créneau des distances quotidiennes longues, disons de 10 à 50 km.

Selon les contextes, cela passera par des renforcements de TER, des services d’autocar, du covoiturage, la ré-ponse ne peut pas passer que par des infrastructures. Pour le reste, on peut toujours investir, mais cela n’a pas grand chose à voir avec l’objectif de réduire les

émissions de CO2 des transports. Ce n’est sans doute

pas un hasard si « Le Grenelle » ne chiffre pas la

contri-bution CO2de sa proposition sur les sites propres (alors

que cette évaluation est faite pour d’autres mesures). La commission des comptes transport s’y est essayée pour les quinze réseaux de province qui se sont dotés de sites propres. Elle ne trouve que 69 000 tonnes annuelles de

CO2 évitées pour neuf milliards d’euros investis, une

goutte d’eau. Ces nouveaux investissements doivent se justifier au cas par cas dans une optique plus locale, cel-le du confort et des gains de temps des voyageurs, de la contribution à la décongestion ou à des congestions ad-ditionnelles, etc.

Yves Crozet

Les conclusions du Grenelle sont assez claires, même si elles sont parfois difficiles à entendre. Premièrement, nous avons besoin d’infrastructures car la mobilité des personnes et des marchandises demeure une valeur forte des sociétés démocratiques. Deuxièmement, les infra-structures dont nous avons besoin ne sont pas les mêmes que celles qui étaient demandées, et en général obtenues, au cours des dernières décennies. En d’autres termes, les autoroutes n’ont plus le vent en poupe. Par contre, les lignes ferroviaires, fret et voyageurs, tiennent désormais la corde pour la simple raison que le transport collectif est le seul qui peut massifier les flux et réduire les coûts pri-vés et externes dans les zones denses. Mais attention à ne

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sur tous les axes principaux (LKW Walter, Manspeed, K&N, Voss, Transalliance, etc), et les chargeurs commencent, à intégrer pour les premiers, et à impo-ser pour les seconds, l’utilisation de ce segment ferroviaire. Et le tout dernier succès commercial de Lorry Rail, c’est un contrat annuel de plusieurs milliers de semi-remorques remises par Ford

Il faut aller plus loin, « un pont plus loin… »

Et ne plus douter de la pertinence de cette solution innovante, de la validité des modèles économiques.

Prenez une bonne traction ferroviaire fiable sur 1000 Km à 10 à 11€/km, un wagon qui parcourt plus de 300 000 km par an à 3 à 4€/km maintenance compri-se, des chantiers « optimisés » au coût de 30 à 40€ par transbordement, et des frais généraux, pas trop élevés. Pour un bon taux de remplissage, offrez plu-sieurs départs par jour et par sens, 7 jours sur 7, et les camions seront au ren-dez vous.

Avec ces coûts d’exploitation bien mai-trisés, vous pouvez offrir d’emblée un service « iso – coût » par rapport au coût routier, pré et post acheminement

com-pris, rapidité, sécurité, flexibilité et 44t en plus !

Cette démonstration a été faite par Lorry-Rail en quelque mois !

Bouffée de bon air supplémentaire, la loi Grenelle votée la semaine dernière par nos députés permet d’envisager sérieu-sement l’intégration « sonnante et trébu-chante » des incontestables économies de gaz à effet de serre de ces nouveaux services : ce sont déjà 14 000 tonnes de CO2évitées par an et 20 000 camions par l’AFA, au moins le même résultat attendu par Lorry-Rail dès 2009.

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Il n’y a guère de raison de se fixer un objectif général et in-différencié de réduction des trafics automobiles. Il faut le faire là où l’automobile pose des problèmes. En ville et dans les parties les plus denses, l’extension de la portée du vélo par promotion et accueil des vélos, scooters électriques et autres petits véhicules électriques légers est sans doute une bonne solution face à la saturation de l’espace. TER, cars et covoiturage sont à mobiliser pour les déplacements les plus longs, qui posent des problèmes au budget des gens. Enfin, la desserte des zones d’activités périphériques doit pouvoir être assurée par des systèmes souples ciblés sur les ho-raires d’embauche. Les employeurs de ces zones devront bien se résigner à jouer cette carte pour s’assurer d’un re-crutement diversifié.

Yves Crozet

Rappelons d’abord qu’il faut se défier de toute « haine de

l’automobile ». Cette dernière est un outil remarquable qui est à juste titre associé à l’idée de liberté. Mais le problème est que la prospérité et la liberté ont transformé la solution automobile en problème car la voiture consomme beau-coup d’espace, pour stationner et pour circuler. Remettre en cause la suprématie de l’automobile, c’est donc la cana-liser, limiter son impact sur certains espaces, notamment urbains, que l’on veut protéger. Pour cela, il existe deux moyens, le premier vise à accroître le coût (péage, TIPP, prix des carburants, stationnement), le second s’intéresse à l’autre terme du coût généralisé, à savoir la vitesse. Or ce qui se passe depuis quelques années est que l’on agit vo-lens novo-lens sur les deux termes du coût. La voiture aujour-d’hui, c’est donc plus cher et moins vite ! Et cela non pas parce que l’automobile serait détestable, mais tout au contraire parce qu’on l’aime. Chacun connaît l’expression « qui aime bien châtie bien ». Dans le domaine routier, il faut savoir que « qui aime bien tarifie bien ».

n Transports, urbanisme, logements (foncier), gouvernance : comment résoudre l’interdépendance entre ces quatre piliers ?

Jean-Pierre Orfeuil

Marc Wiel a écrit un livre entier, et excellent, (« Planifier les villes autrement », L’Harmattan) sur le sujet, dont a rendu compte Infrastructures et Mobilité. Le sujet est trop vaste

pour pouvoir être traité en quelques mots.(1)

Yves Crozet

Il est impossible de répondre en quelque mots car c’est vraiment un défi. On peut seulement noter que dans un pays comme l’Allemagne, qui sait souvent mieux que nous gérer l’articulation entre transport et localisation des mé-nages et des activités, les collectivités territoriales

dispo-sent d’une importante maîtrise foncière. On peut, dans la même veine, regretter qu’en France les infrastructures de transport soient gérées par des entités différentes. Les routes aux départements, les trains aux Régions. C’est à l’évidence source de surinvestissement et de problèmes de coordination. Pourquoi ne pas envisager une autre ré-partition : les lycées et les collèges aux départements, les routes et les trains aux Régions ! Ce serait plus logique et moins irréaliste que d’annoncer la suppression des dépar-tements, par ailleurs fort utiles (RMI, aide aux familles, aux personnes âgées, etc).

n Les collectivités ont des programmes ambitieux pour répondre à l’augmentation de la demande de transport public. Comment peuvent-elles en maîtriser les coûts ?

Jean-Pierre Orfeuil

La demande a augmenté ces dernières années, et il faut s’en réjouir. Cela dit, si tous les bus, trams et métros étaient pleins, on n’aurait sans doute pas un ratio véhicule/kilo-mètre de 3,4, ce qui, sur une base de 4 km par voyage, nous

donne une occupation moyenne inférieure à 15 voyageurs, et des besoins de soutien public à l’exploitation si élevés qu’ils obèrent les capacités d’investissement. Une première piste, que même l’administration sait mettre en œuvre, est donc dans le redéploiement des moyens des services peu chargés

(suite de la page 13)

n Quelles sont les solutions réalistes pour diminuer sensiblement, à court et moyen terme, la suprématie de l’automobile dans les déplacements urbains et péri-urbains ?

Jean-Pierre Orfeuil

C’est une lapalissade que de dire qu’on financera d’autant plus facilement que les coûts des projets seront mieux maîtrisés. Cela mérite malheureusement d’être rappelé, puisque j’ai encore entendu en 2008 qu’une région ne pou-vait pas se permettre d’adopter chez elle un matériel déjà en service dans une autre. Cela fait sans doute le bonheur de l’industrie ferroviaire, mais c’est avec des raisonne-ments de ce type que l’automobile est restée confinée à l’élite avant la seconde guerre mondiale. On financera aussi d’autant mieux un programme que le nombre de projets sera restreint à ceux qui bénéficient des meilleures perspectives de clientèle, et de clients venant de l’automobile. Une agence d’évaluation indépendante, composée pour moitié au moins d’experts étrangers, pourrait aider à faire la sélection. Alors dans ce cas, il n’est pas déraisonnable d’imaginer que l’État transfère un peu plus de recette de TIPP aux acteurs régionaux, ou que l’Agence des infrastructures soit sollicitée. L’argent est

ra-re, c’est vrai, mais ce qui manque d’abord, c’est la crédi-bilité et la confiance.

Yves Crozet

Un des moyens de se prémunir de la fuite en avant est de poser très en amont la question de la tarification. Si la mobilité est une valeur, n’oublions pas qu’elle a aussi un coût. Il est donc nécessaire de se diriger, comme on est en train de le faire dans le ferroviaire, vers une logique de coût complet. Cela n’interdit pas les subventions, notam-ment dans les zones moins denses. Mais ces dernières ne sont possibles que si la tarification est forte dans les zones à fort trafic. Pour les routes et autoroutes, on doit aussi se diriger vers une logique de coût complet incluant les coûts environnementaux. La loi Grenelle 1 a décidé la mise en place du péage poids lourds sur le réseau natio-nal. C’est une première étape nécessaire, elle doit être suivie par d’autres.

n Existe-t-il des solutions économiquement justifiées et socialement équitables pour les financer? Lesquelles faut-il privilégier?

pas se précipiter vers la seule logique des lignes nou-velles. Il faut souvent commencer par rénover ce qui

exis-te, en optimiser l’utilisation et la gestion. Attention donc à la fuite en avant.

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n Comment résoudre en particulier la problématique en Ile-France, où les déplacements de banlieue à banlieue sont de-venus prépondérants ?

Jean-Pierre Orfeuil

L’Ile-de-France est dans une situation paradoxale. C’est sans doute le territoire où le développement de nou-velles lignes fortes de transport public est le plus à mê-me de trouver des clients et de susciter des transferts de la voiture, à condition de bien cibler sur des terri-toires pertinents (la petite couronne et les quelques pôles de grande couronne) et des services rapides. Elle bloque elle-même ses capacités de développement par des tarifs artificiellement bas par rapport au service rendu (et c’est un consensus entre la droite et la gauche), et par une politique d’investissements localiste qui n’attire que très peu d’automobilistes. Tant que ce problème de nature politique n’est pas résolu, on voit mal comment s’en sortir.

Yves Crozet

Comme je l’ai indiqué plus haut, en Ile-de-France encore plus qu’ailleurs, il faut d’abord poser le problème de la tarification car les besoins de financement sont importants. Bien évidem-ment, c’est du côté du péage urbain qu’il faut se tourner. Pas un péage compliqué avec des coûts de fonctionnement qui mangent les recettes. Pour commencer, un péage simple, de type vignette, et peu élevé, mais sur une zone étendue comme le veut le principe qu’une assiette fiscale large est toujours la meilleure solution. Ensuite, une fois dégagés clairement ces financements, il faut voir quels modes améliorent le plus l’ac-cessibilité dans les différents espaces. Dans les zones denses, ce sont certainement les TC, ailleurs, il faut voir. Une certaine ouverture à la concurrence dans les TC peut les rendre plus performants pour les trajets de périphérie à périphérie.

n A la veille des décisions qui s’annoncent, et compte-tenu des ressources disponibles, quelles principales suggestions fai-re aux politiques sur les bonnes décisions à pfai-rendfai-re et les vrais objectifs à atteindfai-re ?

Jean-Pierre Orfeuil

C’est le pouvoir politique qui a inscrit l’objectif «facteur 4» dans la loi. Si c’est bien l’objectif premier, on ne peut que lui conseiller d’abord d’avoir recours à une incitation économique simple, une taxe carbone intersectorielle sur toutes les activi-tés émettant des gaz à effet de serre, et pas seulement sur les transports. Il faut ensuite inviter l’État à se préparer aux conséquences de son éventuel succès. S’il réussit (ce qu’on peut souhaiter), il percevra beaucoup moins de recettes de TIPP venant des transports. Il lui faut donc se préparer soit à maigrir, soit à trouver d’autres recettes. Les controverses ac-tuelles sur le bonus malus, une excellente mesure qui mérite d’être renforcée et étendue, montrent que cette question n’a pas été posée à temps. Tant qu’elle n’est pas résolue, l’État continuera à appuyer sur l’accélérateur dans les discours et sur les freins dans les actes. Supposons maintenant qu’elle le soit, et répondons par deux questions. Dans un espace écono-mique européen de plus de 400 millions d’âmes, dont les villes souhaitent préserver leur identité, est-il vraiment impossible de trouver un (des) constructeur(s) capables de faire des véhi-cules légers, peu encombrants, fiables, à vitesse limitée, qui rendraient performante une motorisation électrique, des col-lectivités locales qui organiseraient l’accueil de ces véhicules et la sécurité de leur usage, des consommateurs qui seraient

séduits par des coûts faibles? Au moment où l’on invite les ménages à sortir de leur seul statut de consommateur pour devenir aussi producteurs d’électricité dans des conditions économiques discutables, ne serait-il pas temps de légitimer ceux qui tentent, sur des bases économiques plus saines, de coproduire leurs déplacements dans les pratiques de covoitu-rage en les aidant de façon visible?

Yves Crozet

La principale recommandation est de tirer toutes les conclu-sions du Grenelle, à savoir que la mobilité des personnes et des marchandises sera de moins en moins une activité subvention-née par la collectivité. Les coûts qu’engendrent la mobilité doi-vent être mis en lumière et facturés à ceux qui en sont respon-sables. C’est bien sûr une révolution culturelle dans un pays où l’on distribue généreusement les infrastructures de transport. Mais c’est la condition même de leur développement. Après avoir fantasmé sur les bénéfices des sociétés d’autoroutes (création de l’AFITF) et sur les recettes de la TIPP (qui a cessé d’être une vache à lait), il faut se rendre à l’évidence : pas de nouvelles infrastructures sans développement de la tarification. Je prends même un pari : avant dix ans, les collectivités territo-riales auront demandé, et sans doute obtenu, le retour de la vi-gnette automobile. Quand on aime, on ne compte pas!

(1) En fait, I&M a publié une libre opinion de Marc Wiel en février 2008 (n°75). Nous rendrons compte prochainement de son dernier ouvrage, évoqué ici par Jean-Pierre Orfeuil (ndlr).

vers ceux qui le sont trop. Une deuxième piste est dans la maîtrise globale des coûts de fonctionnement. On ne peut ni raisonnablement, ni durablement, placer de grands espoirs dans un secteur qui exige une augmentation du soutien pu-blic de 4 % par an, et qui ne démontre pas de gains signifi-catifs de productivité.

Une troisième piste est à explorer du côté des usagers. Le rapport de la commission des comptes déjà cité considère que le surplus net des usagers lié à l’amélioration de l’offre dans les 15 réseaux de province qui se sont dotés de sites propres est de 500 millions d’euros. Ce n’est pas négli-geable, et cela suggère qu’une augmentation des tarifs liée à l’amélioration de la qualité de service est une piste pos-sible, à équilibrer avec des réductions à caractère social. Mettre en avant ces trois mesures, c’est envoyer un signal clair : on peut investir, parce que la dérive des besoins pu-blics pour le fonctionnement est enrayée. Enfin, si ces conditions sont remplies, et puisque ces infrastructures sont censées participer à la décongestion, des dotations aux

investissements proportionnées à ces gains de la part de l’Agence des infrastructures peuvent être envisagés, ou en-core des transferts de TIPP de l’État vers les collectivités territoriales.

Yves Crozet

Votre question est importante, elle parle de la maîtrise des coûts avant d’évoquer une éventuelle hausse de la participa-tion des usagers. Or il y a là un vrai problème. Dans le secteur des transports publics urbains, les salaires sont de 20 à 30% supérieurs à ce qu’ils sont dans le reste de l’économie. Cela vaut pour les conducteurs mais aussi pour les cadres et tech-niciens. En outre, la productivité est faible. Les formes ac-tuelles de concurrence (voir le rapport remis au Predit par le Let et Atom) ne permettent pas de faire baisser les coûts. Il faudra donc trouver autre chose, par exemple l’allotissement. Mais les élus y sont-ils prêts? Les connivences implicites entre élus et opérateurs (voir le rapport du conseil de la concurrence) ne me rendent pas très optimiste sur ce point. IM82-cahier bi-def 27/10/08 16:16 Page 15

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