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CUMP victimes et société : de la représentation des victimes aux soins

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Academic year: 2021

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HAL Id: dumas-01882577

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Submitted on 27 Sep 2018

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CUMP victimes et société : de la représentation des

victimes aux soins

Hélène Marie Joanne Poncet Berremili

To cite this version:

Hélène Marie Joanne Poncet Berremili. CUMP victimes et société : de la représentation des victimes aux soins. Médecine humaine et pathologie. 2018. �dumas-01882577�

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AVERTISSEMENT

Ce document est le fruit d'un long travail approuvé par le

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1 UNIVERSITÉ GRENOBLE ALPES

UFR DE MÉDECINE DE GRENOBLE

Année : 2018

Discipline : Psychiatrie

CUMP VICTIMES ET SOCIETE

De la représentation des victimes aux soins.

THÈSE

PRÉSENTÉE POUR L’OBTENTION DU TITRE DE DOCTEUR EN MÉDECINE DIPLOME D’ÉTAT

Hélène Marie Joanne PONCET BERREMILI

THÈSE SOUTENUE PUBLIQUEMENT À LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE GRENOBLE

Le 25/09/2018

DEVANT LE JURY COMPOSÉ DE : Président du jury :

M. le Professeur Thierry BOUGEROL Membres :

M. le Professeur Guillaume DEBATY Mme. le Professeur Virginie SCOLAN

M. le Docteur Patrice BARO (directeur de thèse) Mme. Catherine GUCHER

L’UFR de Médecine de Grenoble n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les thèses ; ces opinions sont considérées comme propres à leurs auteurs.

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(8)

6

CUMP Victimes et Société

De la représentation des victimes aux soins.

“The research worker gropes but everything recedes, and nowhere is there a firm support. Everything seems to be an artificial effect inspired by his own personal will. Every formulation melts away at the next test. He looks for that resistance and thought constraint in the face of which he could feel passive.”

Ludwik Fleck

“But human pain is a slippery thing, if it is a thing at all : how it is registered and measured depends on philosophical and socio moral considerations that evolve over time and cannot simply be reduced to a technical matter.” Derek Summerfield

Rien de ce que qui est écrit dans cet ouvrage ne doit être interprété comme une banalisation du vécu des victimes. Au-delà de tous les débats d’idées, la souffrance est

(9)

7

Remerciements

A Monsieur le Professeur Thierry BOUGEROL,

Merci de m’avoir fait l’honneur de bien vouloir présider le jury. Merci pour votre soutien tout au long de mon cursus et vos encouragements. Soyez assuré de ma considération et de ma gratitude.

A Monsieur le Professeur Guillaume DEBATY,

Merci d’avoir accepté sans hésitation de participer à ce jury. Veuillez trouver l’expression de mes sincères remerciements et l’espoir d’une future collaboration.

A Madame le Professeur Virginie SCOLAN,

Merci d’avoir accepté de participer à ce jury et de nous apporter vos compétences, vous qui connaissez si bien le sujet. Veuillez trouver l’expression de mes sincères remerciements.

A Monsieur le Docteur Patrice BARO,

Merci d’avoir accepté d’être mon directeur de thèse et merci infiniment de m’avoir fait confiance et de m’avoir donné la possibilité de m’impliquer à la CUMP

A Madame Catherine GUCHER,

Merci d’avoir été présente tout au long de ce projet. Merci d’accepter de participer à ce jury afin de nous apporter votre soutien et vos compétences.

A Madame le Docteur Camille QUENEAU,

Merci d’avoir consacré beaucoup de temps à analyser toutes les données en double aveugle et pour m’avoir soutenue tout au long de ce projet.

A tous les soignants qui ont participé à cette étude,

Merci de vous être prêtés avec enthousiasme à l’exercice du focus group et d’y avoir consacré du temps.

(10)

8 A mes chers parents, Dorrit et Jean-Christophe PONCET,

Merci d’avoir toujours été présents et de continuer de m’entourer, de m’aider et de me secourir régulièrement. Sans vous je ne serais rien.

Papa, Maman, cette thèse est aussi la votre.

A mon mari Zakari BERREMILI,

L’homme de ma vie. Merci pour ton soutien inconditionnel, ton talent et ton enthousiasme à toute épreuve.

A ma sœur Vérane PONCET SALVI, Merci d’être toujours là en cas de pépin.

A mes amies Nadège LALLE, Mélanie MEILLAND-REY, Marine GOUBIER, Camille QUENEAU,

Merci pour votre amitié fidèle qui me porte chaque jour.

A mes formidables co-internes de psychiatrie cuvée « GRENOBLE 2014 »,

Merci pour ces années de bonne humeur et surtout rendez vous pour de nouvelles aventures.

A toutes les équipes (Cèdre, Dominique Villars 1er étage, CUMP, Interfas, Dauphiné, Groddeck,

Liaison…) qui m’ont vu grandir en tant qu’interne,

Merci de m’avoir appris et donné le goût de ce beau métier.

A tous les psychiatres qui m’ont inspirée,

Dr Amandine BASSON, Dr Zohra GAOUA, Dr Marc DUBUC, Dr Elisabeth GIRAUD BARO, Dr Clara BERCOVITZ…

Merci de savoir garder le cap d’une psychiatrie humaniste.

A tous les psychologues qui m’ont ouvert les portes de leurs consultations et bien plus encore, Carola ALEGRIA PIZZARO et Pauline D’ANTONA vous êtes devenue des amies.

Alain MARIN et Véronique BOURGADE, merci de m’avoir transmis un peu de votre savoir – faire.

A Monsieur B, Merci.

(11)

9

Sommaire

Table des illustrations. ... 12

Liste des sigles et acronymes. ... 13

Résumé. ... 14

Abstract. ... 15

Argumentaire. ... 16

1. Introduction ... 19

2. Cellule d’urgence médicopsychologique : CUMP. ... 21

2.1. Historique des CUMP en France ... 21

2.2 Fonctionnement actuel national ... 22

2.3 Mode de prise en charge ... 24

2.3.1 Principes généraux. ... 24

2.3.2 La prise en charge immédiate (dans les 24 heures) ... 25

2.3.3 La prise en charge en post immédiat (de 48 heures à 1 mois) ... 28

2.4 Spécificités ... 28

2.5 Nouveautés depuis les attentats récents ... 28

3. Problématisation. ... 31

3.1 Description de la problématique. ... 31

3.2 Hypothèses ... 34

3.3 Objectifs... 35

3.4 Définition du terme « Représentation ». ... 35

4. Recherche bibliographique « Victime » ... 38

4.1 Méthodologie. ... 38 4.1.1 Mots clefs. ... 38 4.1.2 Ressources. ... 38 4.1.2.1 Ressources locales. ... 38 4.1.2.2 Banques de données. ... 38 4.1.2.3 Navigateurs web. ... 39

4.1.3 Analyse des résultats. ... 39

4.2 Etymologie et histoire. ... 39

4.3 En psychiatrie. ... 40

4.3.1 L’événement traumatique ... 40

(12)

10

4.3.3 Le TSPT : Trouble stress post traumatique. ... 45

4.3.3.1 Définition nosographique actuelle ... 45

4.3.3.2 Notion associée : le souvenir traumatique. ... 49

4.3.4 Différents regards au sein de la psychiatrie ... 51

4.3.4.1 Regard psychanalytique ... 51 4.3.4.2 Regard neurobiologique. ... 55 4.3.5 Traitement. ... 58 4.3.5.1 Historique ... 58 4.3.5.2 Principes généraux ... 59 4.3.5.3 Psychothérapies individuelles. ... 61 Psychothérapies psychodynamiques ... 62 L’hypnose... 63

Les thérapies cognitives et comportementales. ... 64

L’EMDR ... 66

La relaxation. ... 67

Les enfants. ... 67

4.3.5.4 Psychothérapies de groupe. ... 68

4.3.5.5 Thérapeutiques médicamenteuses. ... 70

4.3.5.6 Résumé des recommandations de la NICE. ... 72

4.3.5.7 Spécificités à l’étranger ... 73

4.4 La victime depuis le point de vue sociologique, médiatique et politique ... 76

4.4.1 Sociologie... 76

4.4.2 Médias et politique. ... 86

4.5 La victime depuis le point de vue juridique. ... 92

4.6 La victime depuis le point de vue philosophique et anthropologique. ... 96

4.6.1 Philosophie. ... 96

4.6.2 Anthropologie ... 97

5. Recherche qualitative. ... 107

5.1 Méthodologie ... 107

5.1.1 Justification de l’approche qualitative ... 107

5.1.2 Aspects réglementaires et éthiques ... 107

5.1.3 Population de l’étude ... 108

5.1.3.1 Caractéristiques ... 108

(13)

11

5.1.4 Schéma de la recherche ... 109

5.1.4.1 Procédure de collecte ... 109

5.1.4.2 Données à recueillir ... 110

5.1.4.3 Qualité des données ... 110

5.1.4.4 Analyse des données ... 110

5.2 Résultats ... 113

5.2.1 Effectifs ... 113

5.2.2 Données obtenues... 116

5.2.3 Résultats de l’analyse ... 120

5.2.3.1 Globaux ... 120

Eléments influençant les représentations. ... 153

Position par rapport aux CUMP. ... 154

Réactions vis-à-vis de l’étude. ... 155

5.3 Discussion ... 155 5.3.1 Principaux résultats ... 155 5.3.2 Validité du projet ... 169 5.4 Grille conclusive. ... 170 6. Conclusion et perspectives. ... 173 Références bibliographiques. ... 177 Recommandations de lectures ... 184 Annexes ... 185

Annexe 1. Récépissé déclaration normale ... 185

Annexe 2. Information et formulaire de consentement. ... 186

Annexe 3. Questionnaire préliminaire. ... 188

Annexe 4. Guide d’entretien. ... 188

Annexe 5. Extrait de retranscription ... 189

Annexe 6. Extrait de relevé de thèmes d’un focus group ... 189

Annexe 7. Analyse à partir du relevé de thèmes global du groupe « CUMP » ... 190

(14)

12

Table des illustrations.

Tableau 1. Effectifs du groupe « CUMP » ... 113

Tableau 2. Effectifs détaillés du groupe « CUMP » ... 114

Tableau 3. Effectifs du groupe « CUMP » par rapport aux effectifs CUMP 38 ... 114

Tableau 4. Effectifs du groupe « non CUMP » ... 115

Tableau 5. Effectifs détaillés du groupe « non CUMP » ... 115

Diagramme 1. Répartition des sous-thèmes. ... 116

Diagramme 2. Répartition du temps de parole dans le groupe « CUMP » ... 117

Histogramme 1. Thèmes émis par les participants ayant le moins d’expérience. ... 118

Histogramme 2. Saturation des thèmes pour le groupe « CUMP » ... 118

Histogramme 3. Saturation des thèmes pour l’ensemble des groupes ... 119

Histogramme 4. Saturation des sous-thèmes pour le groupe « CUMP » ... 119

Histogramme 5. Saturation des sous-thèmes pour l’ensemble des groupes. ... 120

Arbre thématique 1. Le vécu de victime. ... 128

Arbre thématique 2. Prise en charge. ... 143

(15)

13

Liste des sigles et acronymes.

AFORCUMP : Association de formation et de recherche des CUMP APA : American psychological association

SFP : Société française de psychotraumatologie AMU : Aide médicale urgente

ARS : Agence régionale de santé

BDSP : Banque de données en santé publique

CISMeF : Catalogue et index des sites médicaux de langue française CNUH : Conseil national de l’urgence hospitalière

CUMP : Cellule d’urgence médicopsychologique

DSM : Diagnostic and statistical manual of mental disorders EMDR : Eye movement desensitization and reprocessing ESPT : Etat de stress post traumatique

HeTop : Health terminology / ontology portal

INAVEM : Institut national d’aide aux victimes et de médiation IPPI : Intervention psychothérapique post immédiate

MESH : Medical subject heading

NICE : National institute for health and care excellence NLM : National Library of medicine

ORSAN : Organisation de la réponse du système de santé en situations sanitaires exceptionnelles ORSEC : Organisation de la réponse de sécurité civile

PBSC : Psychology and Behavioral Sciences Collection PTSD : Post-traumatic Stress disorder

PUMP : Poste d’urgence médicopsychologique RER : Réseau express régional

SAMU : Service d’aide médicale urgente

SFMU : Société française de médecine d’urgence TCC : Thérapies cognitives et comportementales TSPT : Trouble stress post traumatique

SIVIC : SI-victimes

SUDOC : Système universitaire de documentation IRM : Imagerie par résonnance magnétique IRS : inhibiteur de la recapture de la sérotonine TEP : Tomographie par émission de positons

(16)

14

Résumé.

Introduction. Les CUMP ont un fonctionnement original remis en cause. L’objectif

principal est l’analyse et la comparaison de la représentation des victimes et de leur prise en charge entre des soignants d’une CUMP et de psychiatrie « non spécialisée ».

Méthode. Après une revue de la littérature pour réaliser un guide d’entretien, une étude

qualitative a été menée. Les critères d’inclusion principaux étaient : être psychiatre, psychologue ou infirmier en psychiatrie en Isère. Les données ont été analysées selon la méthode thématique de façon indépendante puis triangulées et comparées.

Résultats. Dans un contexte d’inflation du terme « victime » au niveau sociétal,

beaucoup d’éléments sont communs. Des différences concernaient la spécificité de la prise en charge. Pour les « CUMP » uniquement, il s’agissait d’une pratique « spécifique » nécessitant une « spécialisation ». Dans le groupe « non CUMP » beaucoup se sont questionnés à propos de la notion de victime avec un manque de connaissance du dispositif CUMP et une difficulté face à l’urgence. Dans les deux groupes, il était reconnu que les victimes d'un traumatisme aigu (collectif) nécessiteraient une aide spécifique (plus « active ») et une expertise particulière. La cellule d’intervention permettrait un travail en équipe rassurant.

Conclusion. L’opinion est divergente au sujet de la « spécialisation ». Les soignants du

groupe « non CUMP » ont peu connaissance du dispositif, il faudrait une meilleure collaboration entre professionnels.

Mots clefs : « victime », « définition », « représentation », « concept », « statut »,

« limite », « victimisation ».

(17)

15

Abstract.

Introduction. The CUMP has an original functioning regularly questioned. The main

objective is to analyze and compare the representation of who is victim and what care is needed, as held by caregivers belonging to a CUMP and those of “non-specialized” psychiatry.

Method. After a review of the literature aiming to create an interview guide, a

qualitative study was conducted. The main inclusion criteria were: to be a psychiatrist, psychologist or psychiatric nurse in Isère. The data were analyzed independently using the thematic analysis method and then triangulated and compared.

Results. In a context of inflation of the notion of victim in society, many elements are

in common in the two groups. Differences appeared related to specificity. For the “CUMP” group (not for the “non CUMP” group) it was a “specific” practice needing a “specialization”. In the "non CUMP" group many questions appeared about the notion of victim with a lack of knowledge about the CUMP functioning and a feeling of helplessness in emergency situations. In both groups, it was recognized that victims of acute (collective) trauma would require specific help (more “active”) that would require a particular expertise. An emergency unit allows reassuring teamwork.

Conclusion. There is a divergent opinion about the "specialization". The “non CUMP”

group has a lack of knowledge about the functioning of CUMP and there should be a better collaboration between the different professionals.

MESH terms : « victim », « meaning », « disaster management »

(18)

16

Argumentaire.

Au cours de mon cursus d’interne en psychiatrie, je me suis très tôt intéressée à la question des victimes. Cette curiosité m’a d’ailleurs amenée à m’inscrire dès la deuxième année de mon internat au diplôme universitaire de victimologie à Lyon puis à prendre contact dans la foulée avec le médecin responsable de la CUMP de l’Isère. C’est ainsi que, moi qui avant le début de mon internat n’avait aucune connaissance du dispositif, je me suis trouvée rapidement immergée dans une équipe passionnée et particulièrement active. J’ai ainsi pu participer à des formations, des exercices puis des interventions en conditions réelles et ainsi acquérir une « expérience de terrain » comme on le dit à la CUMP.

Néanmoins, j’ai également progressivement découvert l’image des CUMP renvoyée dans les médias, les voix dissidentes, les débats à propos de la prise en charge des victimes ainsi que le regard porté sur les volontaires par les autres soignants (et inversement !). J’ai d’ailleurs pu avoir des échanges riches à ce sujet avec des collègues, des proches, parfois même des patients. En effet, comme je le montrerai dans la première partie, les CUMP sont un dispositif récent, original, avec un fonctionnement distinct de la celui de la psychiatrie dite « générale ». C’est également une pratique spécialisée et en lien étroit avec le contexte général. Très sollicitées et très exposées, les CUMP sont ainsi régulièrement remises en cause par des voix de tous bords. Moi même, je me suis d’ailleurs régulièrement interrogée sur les modalités de prise en charge. Au fur et à mesure de mes lectures, je me suis rendue compte à quel point les CUMP, et à travers elles la question de la prise en charge des victimes, suscitaient l’intérêt et le débat. Combien il s’agissait d’une question complexe, ramifiée et non tranchée. A travers les CUMP, à travers la question des victimes, c’est en fait un véritable enjeu de société qui se dessine.

En effet, si la CUMP est un dispositif médical, le terme « victime » en soit n’est pas une catégorie nosographique stricte. Dans le domaine général de la psychiatrie, de la

(19)

17

psychothérapie, de la psychanalyse, le terme même de « victime » n’est presque pas utilisé. (1) On évoque plutôt le trauma, le traumatisme, le vécu traumatique, l’état de stress post traumatique. (1) Dans le langage courant, on peut être victime autant de car-jacking que d’abus sexuel, d’inondation, de la drogue, de la mode, de la société, du mauvais sort, de soi-même, de sa propre crédulité… (1) Le terme est devenu omniprésent dans le langage courant. (1) Pourtant le terme « victime » semble désigner une grande diversité de vécus ne relevant pas tous des mêmes enjeux (1) , notamment au niveau du soin. Comme le dit très bien Anne Françoise Dahin, psychologue de longue date dans un service d’aide aux victimes à Bruxelles : « Sur le plan psychique, se sentir victime, être victime, revendiquer le statut de victime,

refuser la condition de victime, s’identifier à la victime… ne participent pas des mêmes enjeux et appellent à des positionnements professionnels différents » (1)

L’idée sous-jacente de ce travail est donc en fait qu’il existerait peut être une représentation singulière de la victime parmi les soignants participant à la CUMP, et que cela pourrait être à l’origine d’un positionnement différent de celui d’autres structures de soins ou d’autres organes de la société (justice, médias, politiques…). Ces différences de positionnement, et donc de prise en charge, pourraient ensuite à leur tour expliquer des malentendus et des points de friction.

Partant de cette hypothèse, j’ai donc effectué une recherche bibliographique large sur la notion de victime afin d’appréhender le contexte historique, psychiatrique, juridique, sociologique, anthropologique, politique et même médiatique. Ensuite, sur cette base, j’ai poursuivi mon exploration par le cœur de mon travail : une étude qualitative ayant pour but d’approcher et de comparer la ou les représentation(s) des victimes et des soins aux victimes entre des soignants appartenant à une cellule d’urgence médicopsychologique et des soignants exerçant en psychiatrie non spécialisée.

(20)

18

Je pense qu’il s’agit d’une démarche pertinente car il n’existe à ma connaissance aucun autre travail similaire dans la littérature scientifique. Une ambition plus générale de ce travail était également de tenter d’esquisser un état des lieux “de terrain” à l’échelle locale permettant d’ouvrir le débat et encourager une réflexion entre les professionnels de tous bords impliqués dans ce type de prise en charge, tant à l’échelle groupale qu’à l’échelle individuelle. En effet, il me semble nécessaire en tant que soignant de se questionner, notamment sur son intérêt à travailler avec les victimes, sur son référentiel et sur les objectifs attendus de la prise en charge. (1) Comme le dit encore Anne Françoise Dahin, quand nous parlons de la victime, nous parlons tous à partir de nos représentations qui, et nous n’en avons pas toujours conscience, s’ancrent dans notre histoire et sont directement liés aux avatars de notre vécu. (1) Il n’est donc pas si facile de se positionner face à celui ou celle qui, pour un moment ou un temps plus long, semble revêtir cette identité. (1)

(21)

19

1. Introduction

Le 25 Juillet 1995 à 17h30, heure de pointe, une bouteille de gaz remplie de clous explose dans un train de la ligne du RER B en gare Saint-Michel à Paris. (2) Il s’agit d’un attentat terroriste revendiqué par le groupe islamique armé (GIA) qui fera de très nombreux blessés et sera responsable de la mort de huit personnes. (2)

Cette date, les volontaires CUMP la connaissent tous. En effet, ils savent que dès le lendemain, Jacques Chirac et Xavier Emmanuelli, alors ministre de l’action humanitaire d’urgence, réalisent que contrairement aux blessés physiques, rien n’a été fait pour les atteintes psychiques. Cela étonne beaucoup les deux hommes qui réclament alors que lors de tels événements, la souffrance psychique soit soulagée au même titre que la souffrance physique. (3) C’est à partir de là que très rapidement un dispositif totalement nouveau, la « cellule d’urgence médicopsychologique » est mise en place, assortie d’un programme de formation sous la supervision de l’emblématique médecin-général Louis Crocq. (3)

Cela nous paraît aujourd’hui intuitif, que les blessés psychiques soient pris en charge par des professionnels dans de telles circonstances. Mais sommes-nous si sûrs de savoir ce dont a besoin une victime sur le plan psychique? Comment bien la prendre en charge ? Il s’agit là en fait un sujet qui n’a pas attendu l’attentat du RER B pour faire débat et qui est toujours brûlant aujourd’hui.

Entre les « partisans » des CUMP et leurs détracteurs, les médias, les « experts », les « victimes », il est parfois difficile de s’y retrouver. Le terme « victime », bien qu’employé quotidiennement dans le registre médical, n’est pas une pathologie reconnue ni même un terme sémiologique. Mais au fond, plus qu’une question de nosographie et de techniques, ne toucherait-on pas là du doigt une question beaucoup plus large? N’est-ce pas là en fait la question de la ou des représentation(s) même(s) de la ou des victime(s) qui est en jeu?

(22)

20

Qui est cette victime dont on parle tant ? A travers tous ces débats, il est un protagoniste qui, bien qu’omniprésent, nous échappe. C’est la victime elle-même. On parle en son nom, on l’entend et on la voit partout mais la connaît-on si bien ? Ou plutôt les connaît-on si bien ? Car il semblerait qu’elles soient multiples… (4)

Et si une part des conflits et controverses sur les méthodes d’intervention et de prise en charge provenaient en fait d’une variété des représentations, en premier lieu entre professionnels ? A une autre échelle, la position adoptée par chaque soignant ne dépend-elle pas de nécessairement de ses représentations ? Comment ces représentations personnelles s’articulent-elles avec celles partagées par le groupe ?

Ce travail se veut une synthèse ancrée dans la pratique et destinée à fournir des pistes de réflexion aux soignants de tous bords (psychiatrie mais aussi médecine d’urgence, réanimation, orthopédie…) désireux de s’engager ou de poursuivre leur cheminement personnel.

L’objectif principal est l’analyse et la comparaison de la représentation des victimes et de leur prise en charge entre des soignants appartenant à une CUMP et des soignants exerçant en psychiatrie « non spécialisée ».

Les objectifs secondaires sont l’étude des facteurs influençant les représentations entre les groupes « CUMP » et « non CUMP », l’étude des facteurs influençant les représentations au sein même de chaque groupe et enfin la proposition d’une grille de lecture pour l’analyse des représentations de la victime chez les soignants.

(23)

21

2. Cellule d’urgence médicopsychologique : CUMP.

2.1. Historique des CUMP en France

Comme évoqué dans l’introduction, la première CUMP a été mise en place en France à la suite de l‘attentat de Paris du 25 Juillet 1995 (RER B, gare St Michel). (2) Lors de cet attentat, les nombreuses victimes ont été prises en charge à l’hôpital Saint Antoine à Paris où se développait déjà de façon continue depuis les années 1984-1986 une activité autour du traumatisme psychique. (5)

Devant l’ampleur du traumatisme chez les victimes et dans la population générale, le gouvernement de l’époque, représenté par son secrétaire d’état à l’action humanitaire d’urgence Xavier Emmanuelli, a réuni la première cellule d’urgence médicopsychologique le 28 Juillet 1995. L’objectif était alors de définir les modalités d’une prise en charge psychique des victimes d’événements collectifs sur la région Ile-de-France. (5)Peu de temps après, le 17 août 1995, la cellule effectuait sa première mission à l’occasion d’un nouvel attentat, avenue de Friedland à Paris. (5)

Le dispositif a ensuite été rapidement généralisé à l’ensemble du territoire (circulaire du ministère de la santé du 28 mai 1997) : (6)

« Les catastrophes occasionnent non seulement des blessures physiques mais aussi des blessures psychiques individuelles ou collectives, immédiates ou différées, aiguës ou chroniques. Ces victimes nécessitent des soins d’urgence au même titre que les blessés physiques. L’intervention rapide de médecins psychiatres, de psychologues et d’infirmiers préalablement formés et intégrés aux unités d’aide médicale urgente doit permettre une prise en charge immédiate et post-immédiate. Cette prise en charge doit s’étendre au soutien psychologique des sauveteurs. Elle comprend également un bilan psychologique de chaque mission ».

(24)

22

Initialement, le premier réseau national de l’urgence médicopsychologique comportait 7 CUMP régionales (Marseille, Toulouse, Nantes, Lille, Lyon, Nacy et Paris) disposant de moyens permanents et des CUMP départementales avec un psychiatre référent et des volontaires. (7) Le dispositif a ensuite été renforcé en 2003 avec la création de 30 nouvelles CUMP. (7)

Ce réseau est devenu un dispositif de santé publique (placé sous la responsabilité des ARS) depuis le décret du 7 Janvier 2013. (8) Les CUMP permanentes deviennent « CUMP régionales » et « CUMP renforcées » (CUMP permanentes supplémentaires selon des critères de densité de population et de risques spécifiques, dont fait partie la CUMP 38 opérationnelle à partir de 2007). (7)

A noter enfin que c’est un dispositif qui constitue une « exception française » dans le sens qu’il n’existe en tant que tel dans aucun autre pays. (7) Il existe donc peu de données à son sujet dans la littérature scientifique internationale. (7)

2.2 Fonctionnement actuel national

On compte aujourd’hui 37 équipes. Comme on l’a déjà vu plus haut, l’organisation répond à un cadre juridique précis défini par plusieurs textes de loi (9) qui n’a cessé de se renforcer et de se préciser pour mieux faire face à ses missions.

Le réseau des CUMP est organisé selon des zones de défense et de sécurité avec une organisation hiérarchique à l’échelon des zones (CUMP zonale) puis régionale (CUMP régionale). (10) (11) (7)

(25)

23

Les CUMP sont des unités fonctionnelles du dispositif de l’aide médicale urgente (AMU). (7) D’ailleurs, chaque établissement siège d’un SAMU possède une CUMP. (7)

Elles sont placées sous la responsabilité d’un médecin psychiatre référent (ou à défaut un psychologue ou un infirmier) désigné par l’ARS et dédiées à la prise en charge médicopsychologique précoce des victimes et sauveteurs en cas de catastrophes, accident impliquant un grand nombre de victimes ou d’événement susceptible d’entraîner d’importantes répercussions psychologiques. (7) (9)

Les CUMP permanentes, comme celle de l’Isère, sont composées d’un psychiatre référent à temps, d’un psychologue à temps, d’un assistant médico-administratif à mi-temps et de professionnels volontaires (médecins, psychologues et infirmiers spécialistes ou compétents en santé mentale). (7)

Les professionnels volontaires interviennent dans le cadre d’une convention et doivent recevoir une formation spécifique dispensée par le référent de chaque CUMP. (7) Ils ne bénéficient pas de rémunération spécifique pour leur intervention, notamment lorsqu’ils sont professionnels libéraux.

(26)

24

Un psychiatre référent national assisté d’un adjoint anime le réseau des référents et préside un groupe de travail permanent constitué au sein du conseil national de l’urgence hospitalière (CNUH) associant les professionnels de l’urgence médicopsychologique : les sociétés savantes concernées (AFORCUMP-SFP), les psychiatres référents zonaux et des représentants des CUMP. (7)

2.3 Mode de prise en charge

2.3.1 Principes généraux.

Les interventions visent à prévenir et traiter la constitution de séquelles psychiques, c'est-à-dire la réduction de l’impact psychique individuel mais aussi collectif et institutionnel engendré par l’événement potentiellement traumatique. (7)

La CUMP, qui est joignable en permanence, est mobilisée par le SAMU, le plus souvent par le médecin régulateur :

- Lors d’événements à fort retentissement psychologique (c'est-à-dire un événement ressenti comme inhabituellement fort par les équipes de secours et partenaires habituellement engagés).

- A la demande du préfet lorsqu’il s’agit de plans relevant de sa responsabilité comme le dispositif ORSEC (Organisation de la réponse de sécurité civile) (9)

- A la demande du directeur général de l’ARS lorsqu’il s’agit de l’ORSAN (Organisation de la réponse du système de santé en situation sanitaire exceptionnelle). (9)

Lors d’un événement, la CUMP est tout d’abord mise en alerte (information donnée au référent) puis selon les circonstances, elle est activée (mobilisation de CUMP sans notion de délai) et cela aboutit éventuellement sur une intervention (dont la pertinence et les modalités

(27)

25

sont discutées avec le référent CUMP). (7) Le référent de la CUMP établit alors, en coordination avec le médecin régulateur, les moyens humains et matériels nécessaires. (7) L’ARS est systématiquement informée. (7)

La cellule d’urgence médicopsychologique possède également une activité de consultation externe spécialisée de psychotraumatologie même si elle n’a pas vocation à assurer le suivi des patients nécessitant une prise médicopsychologique au-delà des soins immédiats et post-immédiats. (7)

La CUMP a par ailleurs comme mission générale de développer des partenariats formalisés avec les acteurs départementaux de l’aide aux victimes et de participer à la sensibilisation de l’ensemble des acteurs de santé de leur région susceptibles d’être concernés par la problématique. (7)

2.3.2 La prise en charge immédiate (dans les 24 heures)

Lorsqu’une intervention immédiate est décidée, le référent CUMP déclenche selon les besoins la mobilisation des volontaires disponibles.

Lorsqu’elle se déroule sur le terrain même des événements, les personnels CUMP sont identifiés et disposent des produits de santé nécessaires. On établit alors un ou des PUMP (poste d’urgence médicopsychologique) dans le but de prodiguer les soins médicopsychologiques nécessaires aux victimes et éventuellement aux professionnels de santé et sauveteurs. (7) Les victimes sont triées en fonction de leur état clinique et le soin n’est jamais imposé. (7) Un patient suspect de lésion somatique doit impérativement être préalablement examiné par un médecin somaticien pour pouvoir bénéficier des soins somatiques nécessaires incluant une analgésie efficace. (7) (12)

(28)

26

Les soins immédiats sur le terrain débutent par la mise en place d’une organisation globale dans l’objectif de réduire la charge émotionnelle produite par l’événement. (7) Cette action indirecte très spécifique a pour but de réhumaniser et de réintroduire un espace de pensée dans le désordre. (7) Il est important que les membres des équipes de secours aient une attitude contenante calme (12) et puissent dispenser des informations claires, notamment sur les ressources futures (principalement sociales et psychologiques) (12)

Plusieurs techniques sont ensuite adaptées aux différentes situations cliniques.

Le « defusing », ou désamorçage en français, consiste en une première narration émotionnelle ou « mise en mots » où les faits, les émotions et les pensées sont liées dans une temporalité. Temporalité qui va permettre, grâce à la contenance, au respect des défenses psychiques de la victime et à l’empathie du soignant, d’aider le sujet à reprendre une forme de maîtrise par l’élaboration et la réhumanisation. (7) (13) Cette technique est destinée aux personnes en état de stress adapté, c'est-à-dire accessibles à la relation. (7) Elle peut se pratiquer de façon individuelle ou en petits groupes pour respecter les étayages individuels. (7)

Pour les patients en stress dépassé présentant des troubles comportementaux (sidération, agitation, fuite panique voire suicidaire, actes automatiques), il faut adopter une attitude vigilante mais non intrusive d’accompagnement et d’apaisement. (7) A ce stade, il est contre indiqué de confronter la personne à une narration des événements traumatique, au risque d’une répétition traumatique. (7) Dans l’état actuel des connaissances, une anxiolyse médicamenteuse sédative n’est pas recommandée. (7)

(29)

27

Pour les patients présentant une décompensation de troubles de la personnalité ou de pathologies psychiatriques antérieures, on prodigue des soins apparentés à ceux de la psychiatrie de l’urgence. (7)

Les victimes nécessitant une hospitalisation sont évacuées après régulation par le SAMU.

Un renfort au niveau de la zone de défense et de sécurité peut être organisé en cas de situation sanitaire exceptionnelle. (7)

Une fiche médicale nationale est remplie pour chaque patient par le volontaire responsable de la prise en charge et conservée par la CUMP. Un certificat médical descriptif des lésions médicopsychologiques et une note d’information nationale sont remis à la victime. (7) (13)

Les soins psychiatriques immédiats sont une amorce vers des soins ultérieurs comprenant une orientation vers des soins et la mise en lien avec des structures associatives ou judiciaires si nécessaire. (7). On peut citer l’INAVEM (Institut national d’aide aux victimes et de médiation) qui regroupe 150 associations d’aide aux victimes, souvent situées dans les tribunaux de grande instance et qui permettent un accueil gratuit des victimes d’infractions pénales et de catastrophes pour un soutien psychologique, social et d’informations juridiques dans le cadre d’un accompagnement tout au long de la procédure judiciaire. (13) On peut citer également les associations de victimes, généralement des associations de défense qui ont la possibilité de représenter les intérêts des victimes et de se constituer partie civile. (13). Les services hospitaliers et les professionnels libéraux sont bien sûr des partenaires de choix pour les soins. (13) Enfin, il arrive plus exceptionnellement que le

(30)

28

lien soit fait avec des structures plus spécifiques comme les associations de migrants, l’éducation nationale, l’aide sociale à l’enfance par exemple. (13)

2.3.3 La prise en charge en post immédiat (de 48 heures à 1 mois)

Il peut s’agir de prises en charges individuelles ou collectives. (7)

L’intervention psychothérapique post immédiate (IPPI) est particulièrement adaptée aux intervenants (pompiers par exemple) ou aux groupes préalablement constitués. C’est une technique spécifique et complexe qui peut permettre de favoriser la cohésion groupale après un événement majeur. (7) Il ne doit concerner que les individus ayant directement vécu l’événement et volontaire pour participer. (7)

La seconde alternative est celle de la consultation individuelle spécialisée de psychothérapie. (7). On prescrit alors peu de traitements car aucun n’a démontré une balance bénéfice – risque favorable (propranolol, hydroxyzine, benzodiazépines). (7) On prescrit par contre volontiers un arrêt de travail aux patients psychotraumatisés. (7)

Les personnes sont ensuite orientées besoin vers un dispositif de suivi adapté. (7)

2.4 Spécificités

Certaines CUMP ont des spécificité de prise en charge : enfants, outils psychothérapiques spécifiques… (7)

A la CUMP 38, il a été développé l’accueil spécifique des enfants. La cellule travaille également en lien étroit avec le service de psychiatrie de liaison, intervenant dans les différents services du CHUGA et les médecins du bassin Grenoblois suspectant une pathologie relevant de ce registre peuvent solliciter un avis.

(31)

29

Depuis le 13 novembre 2015 et les attentats qui ont nécessité des moyens de prise en charge considérables (5000 entretiens spécialisés en 15 jours) (5), le dispositif fait l’objet d’un intérêt accru et son champ d’action s’étend à de très nombreuses situations potentiellement traumatiques collectives. (14)

L’instruction ministérielle du 6 janvier 2017 traitant de l’organisation des CUMP a affirmé la nécessité d’un réseau national de l’urgence médicopsychologique cohérent et homogène à travers l’ARS et une organisation pyramidale. (9) (7)

Des recommandations par consensus formalisé ont été élaborées par la Société française de médecine d’urgences (SFMU) avec la collaboration de l’Association de Formation et de Recherche des Cellules d’Urgence MédicoPsychologique – Société Française de Psychotraumatologie (AFORCUMP-SFP) dans le but d’harmoniser les pratiques de l’urgence médicopsychologique. Y figure notamment des recommandations claires sur le champ d’intervention des CUMP : (7)

SITUATION ALERTE ACTIVATION

Evénements potentiellement traumatiques entraînant une situation de chaos

Systématique Systématique

Evénements potentiellement traumatiques où la réaction émotionnelle provoque la désorganisation des

moyens de secours

Systématique Systématique

Evénements potentiellement traumatiques entraînant la déstabilisation d’un groupe social (incapacité de

réaction, sidération)

Systématique Systématique

Impact émotionnel estimé inhabituellement fort par les secours médicaux

(32)

30 Impact émotionnel estimé inhabituellement fort par les

secours

Systématique Non systématique

Problèmes de violences sociétales, mouvements de revendication, négociations

Jamais Jamais

Mort inattendue du nourrisson Jamais Jamais

Urgence psychiatrique / Cas individuels Jamais Jamais

Dans certaines circonstances, comme par exemple les situations dont l’impact émotionnel est estimé fort par les témoins, les suicides en milieu professionnels, les morts violentes en milieu familial, l’alerte de la CUMP reste à l’appréciation au cas par cas, l’état actuel des connaissances ne permettant pas de trancher.

Enfin, pour ce qui est des événements à valence sociale ou impact médiatique élevé, des décès accidentels en milieu professionnels, ou des éléments anticipés, au vu de l’état actuel des connaissances et en l’absence de consensus, il n’est pas recommandé d’activer systématiquement la CUMP.

De nombreuses situations font également uniquement l’objet d’un accord relatif, ce qui témoigne de la persistance éventuelle d’une disparité de positionnements entre les CUMP.

Un référentiel pédagogique national a été établi. (7)

Un logiciel (SIVIC) a également été mis en place pour le dénombrement et le suivi des victimes prises en charge en temps réel. Il est actuellement en cours de déploiement.

Enfin, des services spécialisés en victimologie, dont certains pointent le manque, se développent progressivement dans les services hospitaliers. (13)

(33)

31

3. Problématisation.

3.1 Description de la problématique.

Pour Louis Crocq, l’intervention en phase aigüe est une obligation morale. La rencontre sur les lieux même de la catastrophe serait déjà thérapeutique en soi car ce serait en cela que les victimes se sentiraient reconnues. (15)

Les « partisans » des CUMP s’appuient également généralement sur le fait que d’avoir été sujet à un stress aigu dépassé rendrait plus vulnérable à l’état de stress post traumatique, ce qui justifierait l’importance de son diagnostic précoce. (16) (17) (5) Il serait également nécessaire de prendre en charge les sujets les plus exposés (blessures physiques, mort d’un proche mais également relogement et déplacement de population ou pertes financières) pour traiter les symptômes précoces. (18)

En outre, plus une thérapie serait débutée tôt, plus elle aurait de chances d’être brève. (19) En d’autres mots, une intervention précoce visant à réduire les manifestations cliniques immédiates (stress dépassé, dissociation péri traumatique, état de stress aigu ou attaque de panique) aurait le mérite, en plus de son action curative, de réduire le risque d’évolution psychopathologique dommageable. (5) (20) De plus, les troubles chronicisés seraient souvent résistants aux traitements pharmacologiques et psychothérapiques avec des comorbidités fréquentes. (20)

Enfin, de façon pragmatique, l’intervention précoce permet la gestion des évacuations et le triage, la prise en charge de l’angoisse et du stress, la prise en charge des états psychiatriques caractérisés, l’écoute et l’information, la création d’un lien de confiance pour une éventuelle poursuite de la prise en charge. (21) (15) A une échelle collective et institutionnelle, l’intervention permettrait, comme cité plus haut, de réduire l’impact engendré par l’événement potentiellement traumatique. (7)

(34)

32

Néanmoins, ces valeurs, et à travers elles le réseau des CUMP, sont actuellement abondamment et profondément controversées. En effet, certains plaident contre la médicalisation de la détresse liée au traumatisme psychique et pour le renforcement du soutien communautaire. (22) Certains encore remettent en question les facteurs prédictifs du traumatisme psychique et du TSPT. (23) Par exemple, il a été montré que les études désignant la dissociation péri traumatique comme un facteur de risque de TSPT étaient souvent biaisées et manquaient de valeur statistique car très souvent rétrospectives (24) En fait, aucune étude n’a formellement tranché sur la rapidité avec laquelle les soins psychiques devaient être mis en place et quels symptômes précis devaient être pris en charge. (25)

Pour ce qui est du cas plus spécifique du débriefing, amplement décrié, les revues de la littérature ne mettent pas en évidence une efficacité du débriefing précoce individuel dans la prévention des complications tardives du psychotraumatisme et notamment du TSPT (26). Il n’a pas non plus été montré d’efficacité des prises en charge en aigues par rendez-vous multiples. (26) Il a même été mis en évidence un effet péjoratif pour certains patients (27). Le risque d’effet péjoratif serait dû à un traumatisme « secondaire » lié à la réexposition psychique au traumatisme via le récit et l’imaginaire (26).

La conclusion des deux revues de la littérature référencées dans le Cochrane (prise en charge en aigue unique et multiple) est même qu’aucune psychothérapie n’est recommandée en aigu et peut même être délétère (27) (26). Il est donc recommandé de ne plus pratiquer ces méthodes. (26) Malgré tout, il est précisé que le modèle du « psychological first aid» (détaillé plus loin) pourrait peut-être constituer une alternative intéressante en proposant une prise en charge globale, pratique et sociale et en se référant si besoin et dans des cas bien spécifiés, à

(35)

33

un spécialiste en psychiatrie. (26) En effet, dans ce cadre, les études ayant concerné plus d’un entretien semblent montrer des bénéfices. (26)

Pour aller plus loin, le risque de dérive consisterait en la « médicalisation » de la détresse psychologique physiologique (26) et pourrait favoriser l’émergence de symptômes chez des patients qui n’en auraient pas présenté en interférant avec les mécanismes de défense psychique (déni précoce) (26)

Dans « Je suis victime, incroyable exploitation du Trauma », publié en 2015, Boris Cyrulnik et Hélène Romano vont encore beaucoup plus loin en dénonçant une grande mascarade, exploitée par tous les médias, ensevelie sous une logique comptable et financière, le « drame de la victimisation », le « drame devenu spectacle ». (28) L’extension des missions (en dehors du cadre des catastrophes collectives ou pour des actions préventives ou encore en l’absence de confrontation à la mort) de la CUMP est ainsi dénoncée. Le risque pointé est celui d’une « psychiatrisation de la tristesse » ou encore de la stigmatisation de réactions psychiques normales si on force la prise en charge. Il est aussi dénoncé le risque de disqualification de l’entourage familial, de dépossession de son rôle de soutien. Il existerait également un risque de dépendance de la société à ces recours « psy ». Le débriefing donnerait l’illusion que le problème « est réglé » et les personnes se sentiraient abandonnées une fois l’attention médiatique retombée. (28)

Autre dérive, le risque de « victimisation » : « La situation actuelle est paradoxale :

d’un côté, il existe une plus grande reconnaissance de la réalité des blessures psychiques et des conséquences potentiellement causées par un événement traumatique et, de l’autre, cette prise en compte systématique conduit à une revendication identitaire collective du fait

traumatique et le transforme en enjeu politique.[Les médias] laissant à penser que tout sujet, pour exister et bénéficier d’une reconnaissance, devrait être avant tout une victime. » (28) Le

(36)

34

statut de victime serait issu d’un véritable processus de « iatrogénisation » accompagné d’une légitimation sociale qui ferait presque oublier que toute victime d’un traumatisme n’entrerait pas forcément dans cette catégorie figée. (29)

Pour Hélène Romano et Boris Cyrulnik, hors les plans rouges, les événements à fort retentissement psychologique collectif et les événements catastrophiques, les CUMP n’auraient pas à être déclenchées. (28) La surenchère des moyens déployés s’expliquerait par un processus d’identification projective et par la satisfaction des désirs inconscients de réparation et de gratification narcissique.

On voit que les dissensions sont importantes.

3.2 Hypothèses

C’est donc face à ce constat que l’hypothèse a été émise que, comme à l’échelle médiatique et scientifique, il existerait au niveau soignant une disparité de positionnement vis-à-vis des soins et que cette disparité de positionnement serait liée à une disparité des représentations de la ou des victime(s). Les soignants de la CUMP auraient leur(s) propre(s) représentation(s) qui serait(-ent) différente(s) de celle(s) des autres soignants. Car au fond :

« Qu’est-ce qu’une victime? Qu’est-ce qu’être victime? Qui peut être victime? »

« Être victime s’inscrit dans une dimension sociale et culturelle qui évolue et n’a donc

pas la même signification en fonction des époques et des cultures. […]

Au-delà de ces évolutions, qu’ont ces victimes en commun, qu’est-ce qui les rapproche

(37)

35 3.3 Objectifs

L’objectif principal de ce travail, c'est-à-dire l’objectif principal de la recherche qualitative, est l’analyse et la comparaison de la représentation des victimes et de leur

prise en charge entre des soignants appartenant à une CUMP et des soignants exerçant en psychiatrie « non spécialisée ».

Les objectifs secondaires sont l’étude des facteurs influençant les représentations entre les groupes « CUMP » et « non CUMP », l’étude des facteurs influençant les représentations au sein même de chaque groupe et enfin la proposition d’une grille de lecture pour l’analyse des représentations chez les soignants.

3.4 Définition du terme « Représentation ».

Le concept de représentation sociale, « inventé » par Emile Durkheim, célèbre sociologue français considéré comme le père de la sociologie (30), a été l’objet de très nombreux travaux en psychologie sociale. (31) Cette notion tend aujourd’hui à occuper une place centrale dans toutes les sciences humaines. (31)

Néanmoins, elle reste complexe dans sa définition et son traitement. (31) En fait, une représentation sociale est faite d’éléments informatifs, cognitifs, idéologiques, normatifs, de croyances, de valeurs, d’attitudes, d’opinions, d’images, organisés sous la forme d’un savoir disant quelque chose sur l’état de la réalité. (31) Elle se distingue du savoir scientifique dans le sens où c’est une forme de connaissance socialement élaborée et partagée, avec une visée pratique participant à la construction d’une réalité commune à un ensemble social. (31)

En effet, nous avons besoin de bâtir des représentations pour nous ajuster au monde qui nous entoure, s’y conduire, le maîtriser physiquement ou intellectuellement, identifier et

(38)

36

résoudre les problèmes qu’il pose. (31) (32) (33) Grâce à ces dernières, l’individu, qui est quotidiennement confronté à une quantité infinie d’information, n’est pas psychiquement submergé alors que sa capacité de gestion est très limitée. (34) Comme l’écrit Denise Jodelet, spécialiste reconnue de l’étude des représentations sociales, « La représentation sociale est un

instrument, socialement élaboré et partagé, pour comprendre l’autre, nous conduire vis-à-vis de lui, voire lui assigner une place sociale. » (31) « Elles nous guident dans la façon de

nommer et définir ensemble les différents aspects de notre réalité de tous les jours, dans la

façon de les interpréter, statuer sur eux et, le cas échéant, prendre une position à leur égard

et la défendre » (31)

A travers les différentes significations qu’elle donne à l’objet, la représentation exprime ceux qui la forgent et construit une vision consensuelle de la réalité qui guide leurs actions et leurs échanges du quotidien, remplit une fonction de maintien de l’identité sociale, mais qui peut aussi entrer en conflit avec celle d’autres groupes. (31) On peut dire que toutes prémices à la relation sont donc « teintées » par nos représentations, ce qui aura pour conséquence des attitudes particulières. Concernant les soins, le concept de neutralité bienveillante du soignant stricto sensu ne serait en fait possible que s’il n’existait pas de représentation. Il ne semble pas y avoir de vérité unique dans la perception d’autrui, simplement des consensus plus ou moins partagés. (35) C’est parce que nous considérons nos représentations sociales comme des faits, des réalités, qu’elles affectent notre jugement. (34) La prise de conscience de l’influence de nos représentations sociales est donc une solution possible à la gestion de leur impact. (34)

Les représentations proviendraient à la fois d’un héritage culturel (fondamentalement) et de l’expérience vécue (secondairement). (35)

Mais alors comment les étudier ? Selon Emile Durkheim, la représentation possède une certaine fixité et une objectivité car elle est partagée et reproduite de manière collective. (31)

(39)

37

Selon Jodelet, les représentations sociales « […] circulent dans les discours, sont portées par

les mots, véhiculées dans les messages et images médiatiques, cristallisées dans les conduites

et les agencements matériels ou spatiaux. » (31) Il existe en fait une multitude de façon de les

étudier et comme le dit bien Willem Doise, qui a été professeur de psychologie sociale à Genève, : «La richesse et la variété même des travaux inspirés par cette notion font qu’on

hésiterait même à la faire évoluer par un réductionnisme qui privilégierait par exemple une

approche exclusivement psychologique ou sociologique. Ce serait précisément enlever à la notion sa fonction d’articulation de différents systèmes explicatifs. » (31)

(40)

38

4. Recherche bibliographique « Victime »

4.1 Méthodologie.

4.1.1 Mots clefs.

Les mots clefs ont été définis à l’aide de l’outil de recherche MESH grâce au moteur de recherche PubMed ainsi qu’à l’aide du portail des terminologies de santé HeTop via CISMeF. Certains mots clefs ont également été inclus à partir des mots clefs d’articles de référence.

Les MESH retenus étaient : « victim », « meaning », « disaster management ». Les mots clefs francophones retenus : « victime », « définition », « représentation », « concept », « statut », « limite », « victimisation ».

4.1.2 Ressources.

Une recherche volontairement large a été effectuée à l’aide de sources d’information variées.

4.1.2.1 Ressources locales.

Catalogue RUGBIS du réseau des bibliothèques de l'Université Grenoble Alpes et de Grenoble INP.

Catalogue ODYSSEE des bibliothèques des Universités Pierre Mendès France et Stendhal.

Interface G@el : plateforme de ressources électroniques.

4.1.2.2 Banques de données.

Le SUDOC (système universitaire de documentation), le CAIRN, MEDLINE, et EM Premium ont été systématiquement exploités.

(41)

39

Ont également été consultés, mais de façon moins systématique : Psycarticles, Psycinfo, Sciencedirect, Springerlink, la BDSP, la Cochrane Library, Europress, Pascal, Francis et Larousse.

4.1.2.3 Navigateurs web.

Google Scholar a été utilisé.

4.1.3 Analyse des résultats.

Les articles ont été sélectionnés sans limite d’ancienneté selon la pertinence de leur titre. Les thèses et documents non dactylographiés ont été exclus.

Un logiciel de gestion documentaire, Zotero ©, a été utilisé pour répertorier les documents retenus.

4.2 Etymologie et histoire.

Etymologiquement, le terme victime dans son origine latine « victima » signifie « celle qui fut offerte à Dieu », il y a donc une proximité linguistique avec le terme de « sacrifice ». (1) (13) Le terme désignera aussi par extension ensuite toute personne qui souffre des agissements d’autrui. (36) (37) Son emploi reste néanmoins rare avant la fin du XVe siècle. (38) Il s’emploie progressivement à partir du XVIIIe siècle, pour indiquer toute personne tuée ou blessée à la suite d’un cataclysme, d’un accident ou d’une violence quelconque. Ce sens est dominant de nos jours, mais la valeur ancienne reste active lorsque le terme s’applique à une décision humaine volontaire. (36) (37)

A l’époque contemporaine, la plupart des encyclopédies et des dictionnaires utilisent l’expression pour qualifier les personnes ayant subi un grave dommage corporel (38)

(42)

40

La définition la plus élaborée provient de la Résolution 40/34 du 11 décembre 1985 de l’Assemblée Générale des Nations Unies qui qualifie les victimes comme « des personnes

qui, individuellement ou collectivement, ont subi un préjudice, notamment une atteinte à leur

intégrité physique ou mentale, une souffrance morale, une perte matérielle, ou une atteinte grave à leurs droits fondamentaux, en raison d’actes ou d’omissions qui enfreignent les lois pénales en vigueur dans un État membre, y compris celles qui proscrivent les abus criminels

de pouvoir ». (13)

Le sens commun a banalisé le concept en utilisant l’expression « victime » pour définir toute personne subissant un préjudice ou un dommage. (38) Est “victime” celui (ou celle) qui subit la violence ou les injustices de quelqu’un, celui (ou celle) qui souffre à la suite d’événements néfastes, celui (ou celle) qui meurt à la suite d’une maladie ou d’un accident, celui (ou celle) qui a été violé(e), torturé(e), assassiné(e) etc. (38)

Il n’est donc pas aisé de définir précisément le concept sans banaliser l’expérience de la victime. (38)

4.3 En psychiatrie.

4.3.1 L’événement traumatique

Le mot « traumatisme » vient du grec trauma qui veut dire « blessure avec effraction » ou encore « désastre ou déroute d’une armée ». (19)

Il s’agit d’une notion d’inspiration psychanalytique qui désigne la confrontation à la mort (de façon directe ou indirecte) et à l’arbitraire lors d’un événement grave mettant en danger l’intégrité physique et psychique. (13) (20) Cette confrontation constitue une rupture

(43)

41

dans le cours de l’existence du sujet. Elle est génératrice d’un stress important et pourvoyeuse d’un sentiment de culpabilité et d’une altération du sentiment d’appartenance. (20)

Que ce soit à l’échelle individuelle ou collective, cet événement possède un très fort potentiel de désorganisation, il est véritablement « déshumanisant » et surprend le sujet (ou le groupe) alors en état de repos, non préparé. (20) Selon Sigmund Freud, le sujet, non préparé, serait surpris dans la survenue brève d’un événement et incapable de faire face à la « surcharge d’excitation ». (13) L’événement viendrait donc faire « effraction » dans le psychisme du sujet psychotraumatisé. Le sujet expérimenterait alors ce qu’on appelle « l’effroi », associant la confrontation au réel de mort associé à l’expérience transitoire d’une absence d’affect, de pensées et de mots et d’un vécu d’événement inimaginable. (20) Dans un premier temps le sujet serait sidéré, il ne pourrait penser et répondre de façon adaptée, il serait envahi par un sentiment d’impuissance, d’abandon et/ou d’horreur. (13) Ensuite, on observerait un phénomène dissociatif avec un sentiment de détachement, une absence de sensibilité émotionnelle, des réactions automatiques, la dépersonnalisation, l’amnésie dissociative et un sentiment massif d’impuissance, d’abandon, d’ « objectalisation ». Une fois le danger écarté, le sujet réaliserait vraiment les faits et surviendraient l’agitation, la frayeur, les pleurs, l’effondrement, la fuite panique et/ou l'hyperactivité neurovégétative. (13)

En fait, l’évènement traumatique n’est pas défini par sa cause mais par ses conséquences sur le sujet. En d’autres mots, c’est le vécu subjectif (effroi, impuissance, indicible) qui est à l’origine du traumatisme psychique.(6) (20) En effet, on classifie souvent les victimes par l’acte qu’elles ont subi mais d’un point de vue psychologique cela ne se justifierait pas. (13) « Le symptômes traumatiques sont très semblables, quel que soit

l’événement subi et quelle que soit la culture d’origine » (13) La variabilité résiderait plus

(44)

42

paramètres varieraient en fonction de l’acte subi, mais également en fonction de la personnalité de la victime et de la culture d’appartenance. (13)

La notion de traumatisme psychique, reliée à celle d’événement traumatique, désigne la réaction psychique à long terme : répétition, évitement, troubles anxieux, troubles cognitifs, état dépressif, troubles de la conduite, somatisation. (13)

Ces symptômes, comme ceux éprouvés dans la phase aigüe de la confrontation à un événement, sont en fait repris dans la nosographie actuelle.

4.3.2 Le stress aigu.

Placé en situation aigue, le sujet est soumis à un stress physiologique (39) qu’on appelle « adapté » : analgésie, augmentation de la force musculaire (multipliée par 4-5), symptômes physiques, focalisation de l’attention, mobilisation des capacités mentales, incitation à l’action. (40)

Les symptômes du stress sont essentiellement neurovégétatifs : pâleur, sueur, tachycardie, hypertension, sensation d’oppression thoracique, gorge nouée, envie impérieuse d’uriner, frissons…

Malheureusement, ce mécanisme est extrêmement coûteux en énergie et si le stimulus est trop intense, trop long ou répété, il peut dépasser les capacités du sujet. On entre alors dans le cadre du stress dit « dépassé » ou « désadapté » (6) qui peut prendre plusieurs formes : sidération, agitation, fuite panique, actes automatiques (réflexes ou par imitation aveugle) (39) En général, les patients présentent un tableau d’amimie, de pâleur avec un trouble du contact relationnel et un regard fixe.

(45)

43 DSM 5. Trouble stress aigu

A. Exposition à la mort effective ou à une menace de mort, à une blessure grave ou à des violences sexuelles d’une (ou plus) des façons suivantes :

1. En étant directement exposé à un ou plusieurs événements traumatiques

2. En étant témoin direct d’un ou de plusieurs événements traumatique survenus à d’autres personnes

3. En apprenant qu’un ou plusieurs événements traumatique est/sont arrivés à un membre de la famille proche ou à un ami proche.

4. En étant exposé de manière répétée ou extrême à des caractéristiques aversives du ou des événements traumatiques

B. Présence de 9 (ou plus) des symptômes suivants de n’importe laquelle des cinq catégories suivants :

Symptômes envahissants :

1. Souvenirs répétitifs, involontaires et envahissants du ou des événements traumatiques provoquant un sentiment de détresse

2. Rêves répétitifs provoquant un sentiment de détresse dans lesquels le contenu et/ou l’affect du rêve sont liés à l’événement ou aux événements traumatiques

3. Réactions dissociatives au cours desquelles le sujet se sent ou agit comme si le ou les évènements traumatiques allaient se reproduire

4. Sentiment intense ou prolongé de détresse psychique lors de l’exposition à des indices internes ou externes évoquant ou ressemblant à un aspect du ou des événements traumatiques en cause.

Humeur négative :

5. Incapacité persistante d’éprouver des émotions positives Symptômes dissociatifs :

6. Altération de la perception de la réalité, de son environnement, ou de soi même

La dissociation péri traumatique est objectivable en imagerie fonctionnelle. En fait, l’hyperstimulation des amygdales entraîne une coupure des afférences émotionnelles vers le cortex cérébral. C’est donc une dissociation entre le cerveau et le cortex préfrontal avec une impossibilité de mettre l’événement traumatique dans son contexte. (5)

(46)

44

Il existe des signes anamnestiques qui doivent faire suspecter à postériori un état dissociatif aigu (comme l’explique Nathalie Prieto, psychiatre référent national de la CUMP) : l’amnésie péri traumatique (qui n’est pas forcément secondaire à un traumatisme crânien), le déroulement au ralenti ou « comme dans un film », « comme un robot », ou encore le sujet qui déclare « je continuais mes activités ». Ces éléments sont des témoins du détachement et de la déréalisation à la phase aigüe du traumatisme.

Cela a son importance car pour certains, la dissociation pendant l’événement serait prédictive de la survenue d’un TSPT (41) même si cela reste contesté.

Dans le registre des états de stress pathologiques, on peut aussi observer ce qu’on appelle un stress « coloré » : comme l’attaque de panique ou l’épisode psychotique.

Pour ce qui est du groupe, toujours selon Nathalie Prieto, on peut observer plusieurs types de dynamiques qui ne se réduisent pas à la somme des réactions individuelles.

- Adaptées : maintien au poste de travail, comportements organisés d’entraide, de secours, de sauvetage, respect d’une hiérarchie (existante ou improvisée)

- Inadaptées : dissolution de la hiérarchie, stupeur, panique, fuite centrifuge, suicides collectifs, violence avec recherche de boucs émissaires, comportements régressifs…

Vient ensuite le temps de latence qui n’en est pas vraiment un car on peut observer des signes de rumination perplexe, de retrait, de tristesse ou encore d’euphorie. (40)

Ensuite, passée la phase aigüe et le temps de latence, peuvent se manifester ce que l’on appelle des troubles post immédiats : (39)

Figure

Tableau 1. Effectifs du groupe « CUMP »
Tableau 3. Effectifs du groupe « CUMP » par rapport aux effectifs CUMP 38
Tableau 5. Effectifs détaillés du groupe « non CUMP »
Diagramme 1. Répartition des sous-thèmes.
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