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La procréation assistée au Québec: de la science de laboratoire au service public

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LA PROCRÉATION ASSISTÉE AU QUÉBEC :

DE LA SCIENCE DE LABORATOIRE AU SERVICE PUBLIC.

CHRISTINE BAUDOUIN

FACULTÉ DE DROIT

UNIVERSITÉ MCGILL, MONTRÉAL JUIN 2012

UNE THÈSE SOUMISE À L’UNIVERSITÉ MCGILL EN RÉPONSE PARTIELLE AUX OBLIGATIONS DU DIPLÔME DE MAÎTRISE EN DROIT (L.L.M.)

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AGRÉGÉ

Les avancées scientifiques des dernières années en matière de reproduction de l’être humain ont changé notre conception traditionnelle de la maternité et de la famille. La loi sur les activités cliniques et de recherche en matière de procréation assistée adoptée par le gouvernement du Québec en 2010 offre à ses citoyens un accès étendu aux techniques de reproduction comme si ceux si avaient un droit subjectif et absolu de s’en prévaloir. Etant perçu comme un véritable service public, la procréation assistée appartient désormais au domaine de la santé publique et intéresse la société toute entière parce qu’elle devient un enjeu collectif. Ce constat émane de deux phénomènes principaux : Le premier est que la loi québécoise est le reflet des normes éthiques nord-américaine, soit l’autonomie, le bien-être, la non-maléficience et la justice. Le second est le phénomène de la médicalisation de l’infertilité. Suite à ce constat, il est normal que la loi québécoise soit soumise à la critique notamment quant à la façon dont les principes éthiques qui la sous-tendent ont été interprétés pour ne servir que des intérêts individualistes, utilitaristes, et au détriment de la santé des femmes. Contrairement à l’approche préconisée par la société française, nous verrons que le législateur québécois a manqué l’occasion de s’interroger sur les conséquences à long terme d’une telle loi sur l’ensemble de sa population et de prévoir une réflexion publique avant l’adoption de la loi.

ABSTRACT

Science has made tremendous progress over the last years in the area of Assisted Reproductive Technologies, which has changed our traditional vision of maternity and family. The Quebec government has adopted in 2010 the Act respecting clinical and research activities related to assisted procreation, which offers to its citizens a complete access to the techniques as if they had a subjective and absolute right to them. Being perceived as a public service, assisted procreation now belongs to the Public Health domain, and is therefore of interest to the whole society, since it has become a collective issue. This observation originates from two phenomena: The first being that the Quebec law is based on the main North American ethical norms: autonomy, beneficience, non maleficience and justice. The second on is the medicalization of infertility. Following this analysis, the Quebec law will be criticized and particularly, the way the underlying ethical principles have been interpreted to serve only individualistic and utilitarian interests, to the detriment of women’s health. Contrary to what has been adopted by the French society, we will see that the Quebec legislator has failed to address the long term consequences of the law on the whole society and to lead a public reflection before its adoption.

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REMERCIEMENTS

Mes premiers et plus profonds remerciements vont à mon mari Paul qui m’a supporté inconditionnellement durant la rédaction de ma thèse, s’est occupé des enfants lorsque j’avais besoin de calme pour rédiger et a répondu à mes multiples questions et frustrations informatiques. Je lui en suis reconnaissante et je l’aime plus que tout. A mes enfants, Philippe, Elliott et Anne-Saskia, qui, vu le manque de temps de leur mère, se sont souvent demandés pourquoi elle retournait à l’école…

Merci à Angela Campbell ma directrice de thèse pour son temps, sa disponibilité et ses conseils toujours objectifs et judicieux.

Merci à mes professeurs du département de bioéthique qui ont su me faire réfléchir et penser différemment, c’est à dire, au delà du strict cadre juridique : Eugene Bereza d’abord, pour être l’incarnation du médecin empathique, humain et qui applique dans sa vie professionnelle, les principes qu’il nous enseigne. Carolyn Ells pour m’avoir fait découvrir, malgré moi, mon petit coté féministe, Nick King pour m’avoir initié au monde de la santé publique avec le dynamisme qui lui est propre et finalement, Jonathan Kimmelman pour m’avoir fait découvrir Hans Jonas à travers un cours fascinant.

Merci à Mélanie Beauchamp pour son aide précieuse à la mise en page et Jacqueline Avard pour sa confiance inconditionnelle.

Merci finalement à mon père, pour avoir été un précurseur à la fois dans le domaine de l’éthique et du droit et pour avoir su m’écouter et me soutenir dans mes doutes.

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Table des matières:

INTRODUCTION ...6

PARTIE I: LA LOI QUÉBECOISE: LES PRINCIPES QUI LA SOUS-TENDENT ...16

1) L’ORIGINE ET L’ÉVOLUTION DES PRINCIPES D’AUTONOMIE, DE BIEN ÊTRE ET DE JUSTICE: ...19

A. Le Code Nuremberg et le Rapport Belmont:...20

B. L’influence de Childress and Beauchamp: ...25

C. Les normes éthiques nord-américaine:...26

i) L’autonomie: ...26

ii) Le bien-être:...31

iii) La justice: ...33

iv. La non-maléficience:...35

2) LE PHÉNOMÈNE DE LA MÉDICALISATION DE L’INFERTILITÉ ...39

A. Le problème de fertilité dans les sociétés occidentales ...39

B. L’avènement de la médicalisation: ...40

C. La norme sociale et de consommation: ...46

D. L’intervention de l’État ...48

3) LA DISTINCTION AVEC L’APPROCHE FRANÇAISE ...50

A. Aperçu du droit français ...50

B. L’accès aux techniques ...53

C. Qui peut s’en prévaloir...54

D. Les pouvoirs de surveillance et de contrôle...57

PARTIE II: LA LOI COMME VECTEUR DE PROMOTION DE LA SANTÉ PUBLIQUE ...59

1) LA SANTÉ PUBLIQUE: ...60

A. Origine et transformation...60

B. Ses composantes et sa finalité: ...64

2) LES OBJECTIFS DE LA LOI QUÉBECOISE...68

A. Prévention et promotion ...69

B. La sécurité:...72

i) Structure organisationnelle...72

ii) L’acte médical...73

C. La Surveillance ...77

D. La prise de contrôle par le gouvernement: information, inspection et sanctions...80

i. L’information ...81

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PARTIE III. LA CRITIQUE DE L’APPROCHE QUÉBECOISE: ...88

1) LES PRINCIPES ÉTHIQUES ...90

A. L’exercice de l’autonomie:...90

i. L’autonomie personnelle...91

ii. l’autonomie responsable ...96

B. Le bien-être: ...99

C. La justice: ...104

D. La non-maléficience ...109

2) LA SANTÉ PUBLIQUE ET LES RATÉES DE LA LOI QUÉBECOISE: ...113

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INTRODUCTION

La rapide et récente évolution de la science et des technologies sur le potentiel et les capacités de reproduction de l’humain n’ont pas été sans conséquence.

On découvre en effet que la science peut atteindre, modifier, voire restructurer ce qui jusqu’à maintenant semblait immuable, soit le potentiel génétique de l’être humain à travers de nouvelles manières de procréer. Non seulement ces avancées scientifiques ont un effet sur le déchiffrage du code génétique de l’être humain mais aussi sur les structures, les conventions et les modèles établis depuis toujours dans nos sociétés dont celle de père, de mère, d’enfant et de famille.

Ces avancées scientifiques ont poussé les sociétés depuis les 30 dernières années à s’interroger et réfléchir sur l’impact de ces techniques qui devenaient rapidement des réalités avec lesquelles il fallait nécessairement traiter. Elles ont en effet obligé les sociétés à entrer - parfois malgré elles - dans cette sphère et à asseoir les balises avec lesquelles chacune d’elle allait devoir composer. Dans un premier temps, il s’agissait nécessairement de départager le moral de l’immoral, le bon du mauvais, l’acceptable de l’inacceptable et finalement le permis de l’interdit. Dans un second temps, pour la plus part, de réglementer cette sphère d’activité.

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La science s’est imposée de facto et ce qui relevait autrefois de la science fiction ou de la pure imagination est rapidement apparu à nos portes comme une réalité toute proche. Une réalité à laquelle il fallait réagir, au nom de l’ordre public et de l’avenir de l’humanité. Les nouvelles technologies de reproduction sont un exemple éloquent ou le droit et l’éthique ont été à la remorque de la science et en quelque sorte forcés de prendre le pas et de composer avec une réalité dont ils ne pouvaient ignorer les impacts.

Le Canada, contrairement à d’autres pays, a connu une longue réflexion qui s’est amorcée par la création de la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction1. Cette commission aussi connue sous le vocable de la

Commission Baird, avait pour mandat d’enquêter et de formuler des recommandations sur l’utilisation des nouvelles techniques de reproduction au Canada. Le gouvernement canadien s’inquiétait, en effet, des répercussions morales, religieuses, juridiques et sociales des progrès de la science en matière de procréation assistée2. Ce processus aura eu au moins pour effet de sonder la

population canadienne et des divers groupes d’intérêts.

                                                                                                               

1  Le  25  octobre  1989,  le  gouvernement  canadien  adopte  le  décret  C.P.  1989-­‐2150  qui  

crée  la  Commission  royale  sur  les  nouvelles  techniques  de  reproduction.  

2   Voir   à   ce   sujet   l’analyse   de   la   cour   d’appel   du   Québec   dans   :   Renvoi   fait   par   le  

gouvernement  du  Québec  en  vertu  de  la  Loi  sur  les  renvois  à  la  Cour  d’appel,  L.R.Q.,  ch.   R-­‐23,  relativement  à  la  constitutionnalité  des  articles  8  à  19,  40  à  53,  60,  61  et  68  de  la   Loi  sur  la  procréation  assistée,  L.C.  2004,  ch.2  (Dans  l’affaire  du),  2008  QCCA  1167  (  Can   LII)  

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Après un long et sinueux parcours politique, la Loi fédérale sur la procréation assistée3 à l’exception de certains articles4, est entrée en vigueur le 22 avril 2004. Elle est l’aboutissement des travaux de la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction.

La loi fédérale est sans aucun doute le résultat de la volonté de « pallier à l’urgent », c’est à dire la consécration d’un ordre public et de protection dans ce domaine ou la peur et l’angoisse du dérapage étaient une priorité. On prohibe certaines pratiques par la loi et l’ordre, on édicte ce qui relève de l’interdit dans la société canadienne, et a fortiori, on détermine ce qui est acceptable voir autorisé. Au delà, on encadre. Certaines pratiques de procréation assistée sont dès lors, spécifiquement permises mais compte tenu du temps écoulé depuis l’amorce de cette réflexion éthique et juridique, celles-ci sont désormais considérées comme étant l’aboutissement normal et le simple reflet de l’évolution des mœurs de la société canadienne. Celle-ci n’est toutefois pas restée seule longtemps à réglementer le domaine de la procréation assistée.

En effet, la Loi sur les activités cliniques et de recherche en matière de procréation assistée5 et ses règlements, certains diront pour des motifs

                                                                                                               

3  Loi  concernant  la  procréation  assistée  et  la  recherche  connexe,  L.C.  2004,  ch.2.  

4  La  loi  entre  en  vigueur  à  l’exception  des  articles  8,  12,  14  à  19,  21  à  59,  72  et  74  à  77.  

L’article  8  entre  en  vigueur  le  1er  décembre  2007  en  même  temps  que  le  Règlement  sur   la   procréation   assistée   D.O.R.S.   2007-­‐137   qui   régit   l’obtention   du   consentement   des   donneurs  en  matière  de  procréation  assistée.  

5  Loi  sur  les  activités  cliniques  et  de  recherche  en  matière  de  procréation  assistée,  L.R.Q.  

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essentiellement politiques, fut quant à elle adoptée en août 2010. Tout en respectant les interdits de la Loi fédérale, elle a un impact direct à la fois sur l’accès aux techniques de reproduction, puisqu’elle assure la prise en charge financière de trois (3) cycles de fertilité, mais également sur la santé des femmes, les professionnels de la santé et les cliniques qui offrent ces services.

L’évolution des mentalités et les choix éthiques et juridiques posés par nos législateurs et que nous étudierons dans cette thèse nous mènera à conclure que désormais la procréation, parce qu’elle est désormais reconnue et encadrée par l’État, a délaissé la sphère simplement privée et relève maintenant de la sphère publique, ce qui n’est pas sans conséquence. La loi québécoise, à l’intérieur de sa sphère de compétence constitutionnelle, permet en effet à ses citoyens de se prévaloir de diverses techniques scientifiques pour procréer comme s’ils bénéficiaient d’un véritable et authentique droit de consommer ce service offert. Parce que les techniques scientifiques existent et sont de surcroit acceptées et permises, le gouvernement et les citoyens agissent comme si ces derniers avaient désormais un droit subjectif et absolu de s’en prévaloir lorsque certaines conditions minimales posées par les autorités publiques sont remplies. Ainsi, étant perçu comme un véritable service public, la procréation assistée et ce qui entoure ce phénomène appartient au domaine de la santé publique et intéresse donc la société toute entière parce qu’elle devient désormais un enjeu collectif.

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Nous tenterons d’expliquer ce constat dans la première partie de cette thèse en étudiant les assises de la loi québécoise sur la procréation assistée qui émanent selon nous, de deux phénomènes principaux.

Le premier, est certainement que la loi québécoise est le reflet des principales normes éthiques nord-américaines classiques soit la recherche de l’autonomie, du bien-être, de la non-maléficience et de la justice. En effet, nous verrons que l’autonomie de la personne et son bien être de manière générale, occupent le premier plan au chapitre des normes d’éthique médicale nord américaine. Ceci se traduit principalement par le fait que l’individu, comme sujet de droit, est et doit demeurer maître de ses décisions, de son corps et de son avenir. Ces principes éthiques d’autonomie et de bien être placent ainsi les désirs des individus et leurs réalisations au centre des préoccupations éthiques et servent d’assises aux dispositions législatives de notre société. La loi québécoise répond aussi spécifiquement au principe éthique de justice, en n’exerçant aucune discrimination sur qui peut se prévaloir de ses dispositions et sur la capacité financière d’accéder à ce service, phénomène qui est tant décrié dans plusieurs sociétés occidentales.6

                                                                                                               

6   Chambers,   Georgina   M.,   Aullivan,   Elizabeth,   Osamu   Ishihara,   Chapmant,   Michael   et  

Adamson,  David,  “The  economic  impact  of  assisted  reproductive  technology:  a  review  of   selected  developed  countries”  (2009)  91  Fertility  and  Sterility  2281;  Ata,  Baris  et  Urman,   Bulent,“Infertility  Treatment:  Varying  Approaches  Across  Continents”  (2011)  (ed.  E.  Seli),   Wiley-­‐Blackwell,  Oxford,  UK.;  Rauprich,O.,  Berns  E.  et  Vollmann,  J.“Who  should  pay  for   assisted  reproductive  techniques  ?  Answers  form  patients,  professionals  and  the  general   public  in  Germany,  (2010)  25  Human  Reproduction  1225;  Ryan,  Martin  J.,  Bromer,  Jason   G.,   Sakkas,   Denny,   et   Patrizio,   Pasquale,   “Insurance   coverage   and   in   vitro   fertilization   outcomes:   a   US   perspective”   (2011)   95   Fertility   and   Sterility   964;   Loane   Skene”   An  

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Le second phénomène qui explique l’aboutissement à une structure législative qui émane d’une idéologie de santé publique est certes, la médicalisation ou certains diront, la pathologisation de l’infertilité. L’infertilité considérée à l’origine comme un problème purement médical est désormais et nécessairement considérée comme un problème social plus général et ce, peu importe son origine. En effet, que l’infertilité d’une personne émane ou non d’une condition physiologique naturelle, d’un statut ou d’un comportement social, importe peu et est sans objet. Parce qu’on en fait un enjeu, qui touche à la fois l’individu mais aussi la société toute entière, l’infertilité intéresse désormais la santé publique et le gouvernement.

Il n’est certes pas de notre propos ici de nous pencher sur les considérations politiques qui ont mené nos deux paliers de gouvernement et notamment l’Assemblée Nationale du Québec à adopter ces dispositions législatives. Toutefois, nous verrons qu’à notre avis, il existe un lien direct entre l’idéologie éthique nord-américaine prônée par la loi québécoise en matière de procréation assistée et le phénomène observé ou la procréation assistée relève désormais de la sphère publique intéressant la société dans son ensemble.

Nous terminerons cette première partie par une brève comparaison avec l’approche française parce qu’elle nous permettra de mieux conceptualiser les

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                          overview  of  Assisted  Reproductive  Technology  in  Australia  and  New  Zeeland”  (2000)  35   Tex.   Int’l   L.J.   31;   Ryan,   Mandy   “Should   government   fund   assisted   reproductive   techniques?  A  study  using  willingness  to  pay?  “  (1997)  29  Applied  economics  841;  

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contrastes politiques mais surtout éthiques de l’appréciation de ce phénomène. La loi française comme nous le verrons, utilise en effet le vocable d’assistance médicale à la procréation pour évacuer des pratiques, la médecine dite du désir. En France, ce n’est pas tant la procréation en tant que telle qui est régie, mais l’activité médicale et pour des nécessités qui restent d’ordre spécifiquement pathologique. L’individu - et de là son désir - n’est pas l’unique épicentre de la réflexion. L’enfant, la famille et la structure sociale traditionnelle aussi sont très fortement considérés par la société française. Le recours à la procréation médicalement assistée en France reste donc tributaire d’une condition d’infertilité médicale seulement.

Dans notre seconde partie nous analyserons les conséquences pragmatiques des principes énoncés ci-haut sur les mœurs et les pratiques de notre société. Parce que la loi autorise la procréation assistée, le gouvernement se trouve désormais dans l’obligation de s’en occuper et de la contrôler puisqu’il reste un bailleur de fonds important. Nous tenterons de définir la notion de santé publique dans un premier temps et d’en étudier les composantes. Nous regarderons ensuite les objectifs de promotion de la santé et de sécurité prônés par la loi québécoise et qui s’adressent principalement à une population vulnérable. Puis nous verrons finalement, que la législation québécoise met ainsi en place une série de mesures donnant au gouvernement, le contrôle quasi complet de cette sphère d’activité qui, à prime abord, relèverait plutôt de la relation privée d’un individu et de son médecin. Cette structure incorpore des mesures de

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surveillance, de quête d’informations personnelles, d’inspection et de sanction propre à la culture de la santé publique. Notre propos permettra d’analyser ces phénomènes et de voir qu’à travers des objectifs de protection et de promotion de la santé, la législation québécoise agit en fait comme un vecteur de la promotion de la santé publique.

Pour faire suite à ces constatations, dans notre troisième partie, nous effectuerons une certaine critique de l’approche préconisée par le législateur québécois. Il nous est bien sûr impossible dans le cadre de ce projet de thèse d’effectuer une critique complète et exhaustive de tous les impacts de cette loi sur notre société, ni de faire des recommandations précises sur tous les aspects touchés. Le but n’est pas non plus, comme le lecteur pourra le constater, de faire une analyse à la pièce des bons et moins bons côtés de la loi et de ses règlements ou des choix exercés par le législateur en matière de non discrimination ou d’égalité par exemple. Notre analyse sera plutôt centrée sur l’impact général et le résultat des options prises par le législateur en l’instance. Nous verrons en effet, que dans la lignée de la loi fédérale, la loi québécoise déplace le phénomène de la procréation assistée de la sphère privée à la sphère publique et crée une sorte d’ouverture à la consommation générale d’un service autrefois réservé à la cure d’une pathologie, ce qui n’est pas sans avoir d’impact sur les décisions des couples ou individus infertiles à y recourir. Malheureusement et accessoirement, comme si le législateur avait ignoré ou occulté la question, beaucoup d’interrogations touchant la santé des femmes

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restent sans réponse. En évitant de se pencher sur les causes de l’infertilité et en investissant uniquement dans l’offre médicale palliative eu égard à un phénomène qui existe pourtant depuis toujours, notre société renforce l’idée que de recourir aux techniques est la chose à faire et devient socialement, presque un impératif. Nous critiquerons la manière dont les principes éthiques qui sous-tendent notre législation ont été interprétés et utilisés pour servir des intérêts utilitaristes.

Finalement nous constaterons qu’en présentant une offre de service à la population, la loi et le gouvernement servent une vision macrosociale au profit essentiellement, nous le verrons, d’intérêts démographiques. Ceci se fait toutefois au détriment parfois des intérêts individuels des femmes ou de leur bien être puisque le recours aux techniques n’est pas sans conséquence sur leur santé à court et à long terme. Mais au delà de plusieurs considérations et avancées qui sont, sommes toutes louables selon certains, le plus grand dérapage de cette loi est sans aucun doute, à notre avis, la vision politique réductrice qui vise à rencontrer l’objectif très limité et en vase clos de procréation sans autre vision globale de son impact sur la santé des femmes et des structures sociales notamment sur ses effets chez les enfants. Le gouvernement a, nous semble-t-il manqué l’occasion de s’interroger sur la nécessité d’inscrire et d’intégrer la procréation assistée dans une vision plus large une structure globale ou la santé des femmes et leur épanouissement dans la société va au delà de la simple possibilité de gestation mais comprend une réforme sociale

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leur permettant d’assumer leur rôle de mère et de femme citoyenne active pour leur bien, celui de leur famille et de la société toute entière.

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PARTIE I: LA LOI QUÉBECOISE: LES PRINCIPES QUI LA SOUS-TENDENT La loi sur les activités cliniques et de recherche en matière de procréation assistée est clairement le reflet des principes éthiques nord-américains qui ont été développés et appliqués plus particulièrement au cours des trente, voire quarante dernières années. Il s’agit principalement des principes d’autonomie de la personne, de bien-être, de non-maléficience et de justice. Ces derniers, comme nous le verrons plus en détail, jouissent d’une normativité qui leur confère presque force de loi et sont ancrés dans la culture nord-américaine à titre de principes quasi sacro-saint. Certains prétendent même qu’ils sont passés du statut de principe ou de théorie à celui d’idéologie7.

De la même manière, cette loi s’inscrit aussi dans la lignée des grands principes du droit canadien et notamment de la préservation des droits fondamentaux prévus à la Charte canadienne des droits et libertés8, et la Charte des droits et liberté de la personne9 d’une part. Il s’agit notamment du droit à la liberté, à la sécurité et à la dignité de la personne. D’autre part, la loi prend aussi nécessairement assise sur les principes émis au Code civil du Québec comme le droit à l’inviolabilité et à l’intégrité de la personne prévus au chapitre des droits de la personnalité 10. L’article 3 du Code civil du Québec inscrit au Titre de la jouissance et de l’exercice des droits civils indique en effet :

                                                                                                               

7  Ells,  Carolyn,  Shifting  the  Autonomy  Debate  to  Theory  as  Ideology,  Journal  of  Medicine  

and  Philosophy,  2001,  Vol.  26  no.  4,  pp.  417-­‐430.  

8  Charte  canadienne  des  droits  et  libertés  L.R.C.  (1985),  app.II  no.44,  ann.B.   9  Charte  des  droits  et  libertés  de  la  personne,  L.R.Q.,  c.  C-­‐12.  

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« Toute personne est titulaire de droits de la personnalité, tels le droit à la vie, à l’inviolabilité et à l’intégrité de sa personne, au respect de son nom, de sa réputation et de sa vie privée. »

L’article 10 du Code civil du Québec, tout aussi fondamental, prévoit spécifiquement que toute personne est inviolable et a droit à son intégrité et que sauf dans les cas prévus par la loi, nul ne peut lui porter atteinte sans son consentement libre et éclairé.

La Loi canadienne sur la procréation assistée spécifie quant à elle dès ses premières lignes que:

« Le Parlement du Canada, reconnaît et déclare ce qui suit: (…) La prise de mesures visant à la protection et à la promotion de la santé, de la sécurité et de la dignité et des droits des êtres humains constitue le moyen le plus efficace de garantir les avantages que présentent pour les individus, les familles et la société en général la procréation assistée et la recherche dans ce domaine. »

La déclaration d’objectif est donc, dans les deux cas, clairement exprimée.

Le principe de la dignité humaine, très présent en droit canadien est lié à celui du respect de la personne, qui a été consacré comme nous le verrons, dans le

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Rapport Belmont. Le respect de la personne signifie, dans le contexte biomédical, le respect de son autonomie, de sa volonté et du droit du sujet de disposer de son corps.

Le respect de l’autonomie est central dans la théorie éthique nord-américaine tout comme le sont aussi les principes de bien-être de non-maléficience et de justice. Ces principes doivent d’ailleurs être interprétés en harmonie les uns avec les autres et adaptés selon les circonstances de l’espèce. Ils sont considérés par la doctrine américaine comme n’étant ni absolus ni approximatifs, mais comme des principes que l’on doit appliquer prima facie11.

« Rather, they are prima facie : they are always binding unless they conflict with obligations expressed in another moral principle, in which case a balancing of the demands of the two principles is necessary. (…) Which principle overrides in a case of conflict will depend on the particular context, which is likely to have unique features. »

Ainsi dans un contexte biomédical, ces principes sont élevés au rang d’un ordre moral supérieur qui se doit de prévaloir et d’être appliqué en chaque circonstance et imposent donc une normativité de contrainte. Lorsque l’on veut s’en écarter, toute dérogation doit premièrement être nécessaire, compte tenu de

                                                                                                               

11  Tom  L.  Beauchamp,  The  Four-­‐principles’  Approach,  Principles  of  Health  Care  Ethics,  

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contexte propre à l’affaire en cause, et l’on doit s’assurer, dans un deuxième temps, que l’atteinte à ce principe éthique soit la moins grave possible12.

Avant de les aborder et de les examiner de façon critique avec l’esprit et le texte de la loi québécoise, nous évoquerons brièvement leur origine.

1) L’ORIGINE ET L’ÉVOLUTION DES PRINCIPES D’AUTONOMIE, DE BIEN ÊTRE ET DE JUSTICE:

Il est évidemment malaisé de tenter synthétiser l’évolution de l’éthique biomédicale nord-américaine en quelques lignes. Les principes de ce qui est maintenant la bioéthique remontent en effet, il y a plus de 2500 ans avec le serment et la déontologie d’Hippocrate13 qui pour la première fois avait réuni les préceptes influents de la philosophie grecque, les choix moraux et éthiques devant s’appliquer dans la relation du médecin et de son patient. On y retrouve notamment les obligations de bien-être et de ne pas faire de mal14, de confidentialité, de vertu, de devoir, de compassion et de justice. Certes, l’évolution des principes éthiques entre Hippocrate et notre époque s’est poursuivie, mais il a fallu attendre le 20ième siècle pour que la consécration des principes émis dans la Grèce antique prenne la forme d’une philosophie morale

                                                                                                               

12  Ibid  note  11  p.  7.  

13  Hyppocrates:  Jones  WHL,  trans.  The  oath  in:  Hyppocrates.  Cambridge,  Mass  :  Harvard  

University  Press;  1972  1;  289-­‐302;  303-­‐333,  263-­‐265;  Edmund  D.  Pellegrino,  Edmund  D.   The  Metamorphosis  of  Medical  Ethics-­‐  A  30  years  Retrospective,  JAMA  March  3,  1993   Vol  269  no.9.  

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objective et théorique15. Surtout développés dans la foulée de scandales ou

d’actes inhumains touchant l’expérimentation biomédicale et les recherches cliniques, les différents textes qui ont été rédigés à partir de la fin de la seconde guerre mondiale représentent la base de notre morale éthique nord-américaine d’aujourd’hui.

A. Le Code Nuremberg et le Rapport Belmont:

La première consécration écrite de principes éthiques en matière médicale est le Code de Nuremberg rédigé dans la foulée des découvertes des expérimentations médicales menées dans les camps de concentration par le régime Nazi. Le Code de Nuremberg16 ne comporte que 10 principes énoncés sans prédominance, mais qui sont fondamentaux et qui marqueront sans conteste l’évolution de la bioéthique, particulièrement en Amérique du Nord. Rédigé en 1947, il constitue d’ailleurs la première tentative de coucher par écrit des principes fondamentaux en matière d’éthique biomédicale et plus particulièrement dans le domaine des soins et de l’expérimentation médicale. Le consentement éclairé des sujets de recherche est selon le Code de Nuremberg « un préalable absolu à toute à la conduite de la recherche mettant en jeu des sujets humains. »

                                                                                                               

15  Pellegrino,  Edmund  D.  supra  note  13.   16  Le  Code  de  Nuremberg  1947:  Nuremberg  -­‐

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Ainsi, ces principes maximisent le rôle déterminant de la volonté et du consentement libre et éclairé du sujet humain. L’expérimentation doit avoir des résultats pratiques pour le bien de la société, mais doit aussi être pratiquée de façon à éviter toute souffrance, dommage physique et mental ou inconvénient qui ne sont pas nécessaires. Le Code de Nuremberg stipule aussi que les fondements des expérimentations médicales doivent résider dans le réultats d’expériences antérieures faites sur des animaux. Aucune expérience ne doit être tentée s’il y a raison de croire qu’elle entrainera la mort ou une invalidité, et chacune doit présenter un équilibre entre les risques encourus et les bénéfices escomptés. Finalement, les expériences ne doivent être réalisées que sur des personnes aptes, qui doivent être libres d’interrompre le traitement en tout temps.

Les ouvrages marquants ainsi que la réglementation qui donneront le ton par la suite, aux principes éthiques appliqués à notre époque, sont sans exception basés sur les principes du Code de Nuremberg.

Il faut cependant attendre le milieu des années 1970 pour voir ressurgir aux États-Unis la nécessité de se pencher de manière plus approfondie sur les principes éthiques devant gouverner le domaine médical. En effet, en 1966 un médecin américain du nom de Henry Beecher a mis en lumière dans un article intitulé « Experimentation in man » et paru dans le célèbre New England Journal

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of Medicine,17 que la très grande majorité des projets de recherche effectués en

sol américain ne respectaient pas les principes du Code de Nuremberg. Dans cette foulée, plusieurs scandales18 ont été révélés aux États-Unis dont le plus célèbre et controversé est certainement le scandale de la syphilis à Tuskegee en Alabama19. Le département de la santé publique au États-Unis avait mis sur pied une étude clinique visant spécifiquement des hommes noirs émanant d’une région rurale pauvre en Alabama. Six cent hommes ont en effet été enrôlés dans cette étude entre 1932 et 1972 qui avait pour objectif d’étudier et d’observer la progression de la syphilis chez l’homme et ce, sans offrir à ces cobayes aucun traitement. Or, dès les années 1940, le département de santé publique et les médecins qui menaient cette étude, savaient pertinemment que la pénicilline était un remède efficace et standard pour traiter la syphilis. Plusieurs hommes prenant part à cette étude sont morts sans qu’aucun soin ou traitement pourtant disponible et susceptible de les sauver, ne leur soit offert. Les hommes qui participaient à cette étude pensaient quant à eux qu’ils étaient traités pour du « mauvais sang » et qu’ils recevaient en échange des soins de santé gratuits, des repas gratuits et une assurance leur procurant les moyens d’obtenir un enterrement digne à peu ou pas de frais pour leurs familles.

                                                                                                               

17  Beecher,  H.K.  (1966),  Experimentation  in  men,  Ethics  and  clinical  research.  N.  Eng.l  J.  

Med.  274.  

18  Par  exemple  voir  le:  Willowbrook  State  School  scandal,  Tuskegee  Syphilis  Experiment  

Study,  The  Brooklyn  Jewish  Chronic  Diseases  Hospital  Scandal.  

19  En  anglais  Tuskegee  Syphilis  Experiment.  Voir  à  ce  sujet  :  Final  Report  of  the  Tuskegee  

Syphilis   Study   Legacy   Commitee  :  

http://www.hsl.virginia.edu/historical/medical_history/bad_blood/report.cfm.;  Heller  J,   «  Syphilis   Victims   in   U.S.   Study   Went   Untreated   for   40   years  :   Syphilis   Victims   Got   no   Therapy  »  http://select.nytimes.com/gst/abstract.html.  

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La mise en lumière de ce scandale notamment, a donné naissance à la National Commission for the Protection of Human Subjects of Biomedical and Behavioural Research20 qui a publié le Rapport Belmont en 1978.

Le Rapport Belmont est sans aucun doute l’ouvrage le plus influent de sa catégorie et demeure éminemment pertinent et influent encore aujourd’hui. Les principes qui y sont énoncés ont sans conteste forgé toute la base de la bioéthique nord-américaine et ont radicalement donné le ton aux principes fondamentaux qui sont aujourd’hui appliqués dans le domaine de la procréation assistée. Ils ont eu une influence déterminante au Canada, comme l’a révélé le travail de la Commission de Réforme du droit du Canada dans son rapport sur la caractère sacré de la vie et sur la qualité de la vie du point de vue de l’éthique, de la médecine et du droit21.

Le cœur des principes éthiques élaborés par le Rapport Belmont sont le respect de l’autonomie, le bien-être, l’évaluation indépendante des risques et des bénéfices et la justice. Ces principes sont si fondamentaux et ont une telle valeur qu’ils ont été par la suite formellement codifiés dans le Code of Federal Regulations22 qui régit les normes en matière d’éthique de la recherche sur le

                                                                                                               

20   National   Commission   for   the   Protection   of   Human   Subjects   of   Biomedical   and  

Behavioural  Research,  US  Government  printing  office,  April  18,  1979;  Belmont    Report   :http://ohsr.od.nih.gov/guidelines/belmont.html  

21  Le  caractère  sacré  de  la  vie  ou  la  qualité  de  la  vie  du  point  de  vue  de  l’éthique,  de  la  

médecine   et   du   droit  :   étude   écrite   pour   la   Commission   de   Réforme   du   Droit  :   étude   écrite  pour  la  Commission  de  Réforme  du  droit  du  Canada  1979.  

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territoire américain. Dans cette même veine, il faut mettre en exergue que la législation canadienne en la matière, intitulée l’Énoncé de politique des trois conseils23, a également incorporé ces principes dans notre droit.

Finalement, plusieurs normes internationales comme la Déclaration d’Helsinki ou celles édictées par les Nations Unies en la matière, ont aussi consacré des principes et règles éthiques qui vont dans le même sens. Elles dépassent toutefois le simple cadre des projets de recherche pour s’étendre à l’ensemble de l’éthique biomédicale24. La Déclaration d’Helsinki adoptée pour la première fois en 1964, apporte une distinction fondamentale entre la recherche thérapeutique ou la recherche clinique et la recherche non-thérapeutique (la recherche biomédicale non clinique) tout en reconnaissant la possibilité de joindre la recherche biomédicale aux soins médicaux. En effet, certains considéraient le Code de Nuremberg comme étant trop restrictif puisqu’il ne permettait pas la recherche sur les personnes incapables juridiquement comme les mineurs ou les individus souffrant d’une déficience intellectuelle. La Déclaration d’Helsinki énonce aussi l’exigence éthique voulant que chaque phase de l’expérimentation soit clairement définie dans un protocole ayant été soumis au préalable à un comité indépendant. Comme le Code de Nuremberg, elle souligne le volontariat et qu’une expérience ne peut être tentée que si

                                                                                                               

23   Énoncé   de   politique   des   trois   conseils:  

http://www.frsq.gouv.ca/fr/éthique/pdfs_éthique/3C_ethics-­‐f-­‐pdf.   Voir   notamment   la   section  C:  Principes  éthiques  et  directeurs.  

24   La   Déclaration   d’Helsinki:   http://   www.wma.net/e/policy/b3.htm.   U.S.   CIOMS:  

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l’importance du but est en rapport avec le risque couru par le sujet. 25 Elle

reconnaît finalement la validité de la recherche médicale sur les incapables ou les mineurs avec le consentement du représentant légal ou d’un proche.26 D’abord élaborée en 1964, la Déclaration d’Helsinki a connu huit révisions jusqu’à nos jours.

B. L’influence de Childress and Beauchamp:

Outre ces normes éthiques de type législatif ou du moins d’une normativité quasi juridique, la doctrine contemporaine a aussi eu une influence considérable dans l’application de ces principes. Cette doctrine a façonné l’interprétation de ces règles et a renforcé leur application dans les grandes sphères de la médecine. Parmi les plus influents on retrouve sans conteste les auteurs Tom L. Childress et James F. Beauchamp27 qui ont formulé notamment à travers leur ouvrage de doctrine « Principles of Biomedical Ethics » une réelle théorie des principes de l’éthique médicale. Ces auteurs ont identifié et développé quatre principes devant prédominer dans toutes les sphères de l’éthique médicale qu’il s’agisse du contexte de recherche ou du contexte classique de prestation de soins: l’autonomie, le bien-être, la non malfaisance, et la justice. Ces quatre principes qui, selon les auteurs doivent s’appliquer de manière universelle dans tout processus de réflexion morale en bioéthique, sont à la base de toute l’idéologie

                                                                                                               

25  Déclaration  de  Helsinki,  Ibid,  Partie  1,  article  15.   26  Déclaration  de  Helsinki,  Ibid,  Partie  1,  article  11.  

27  La  dernière  édition  :  T.L.  Beauchamp  and  J.F.  Childress,  Principles  of  Biomedical  Ethics,  

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éthique contemporaine au Canada et aux États-Unis. Nous les aborderons ci-après brièvement.

C. Les normes éthiques nord-américaine : i) L’autonomie:

L’autonomie, concept intrinsèquement lié au respect de la personne est certainement le principe le plus proche de l’idéologie de la philosophie sociale et du style de vie américain basé sur l’individualisme, la vie privée et l’auto-détermination. Appliqué de façon très large aux États-Unis, il place l’individu au centre des décisions et toute atteinte à sa vie privée, à son autonomie décisionnelle est vue avec défaveur ou suspicion surtout si elle provient de l’État et susceptible d’être sanctionnée. Aux États-Unis notamment, cette protection est accordée par la garantie constitutionnelle qui consacre le Right of Privacy qui consacre le pouvoir d’autodétermination dont dispose l’individu de faire des choix et le protège contre toute forme de contrôle public.

Le Canada ne fait pas exception. Les valeurs canadiennes font une grande place à l’autonomie de la personne. Outre les principes éthiques que nous avons mentionnés et les règles spécifiques en matière d’éthique à la recherche, la Charte canadienne28, la Charte des droits et libertés de la personne29, ainsi que

le Code civil du Québec30, donnent une place prépondérante à ce principe. Nous

les aborderons brièvement.

                                                                                                               

28  Charte  canadienne,  Supra  note  8.  

29  Charte  des  droits  et  libertés  de  la  personne,  Supra  note  9.   30  Code  civil  du  Québec,  Supra  note  10.  

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La Charte canadienne des droits et libertés

En droit canadien en effet, l’autonomie ou le droit à l’auto détermination s’exprime à travers les notions de dignité, de liberté et de sécurité prévues à la Charte. La notion de dignité humaine a été développée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R. c. Jones31, ou pour la première fois, est apparue, de façon claire, l’émergence d’une approche subjective de cette notion.

« La dignité humaine contribue à laisser chacun vivre comme cela lui semble bon, qu’à forcer chacun à vivre comme cela semble bon aux autres. (…) Chaque individu doit être perçu comme le gardien de sa propre santé tant physique que mentale et spirituelle. »32

Plus tard, la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Morgentaler33 réitérera le principe de l’autonomie de l’individu en faisant cette fois un lien direct entre dignité humaine et autonomie corporelle. Le respect de la dignité humaine impliquerait en effet, le droit de prendre des décisions personnelles fondamentales sans l’intervention de l’État. Il faut aussi mentionner que ce droit à l’autonomie relève de l’article 7 de la Charte canadienne et englobe le droit à la fois à l’intégrité physique et psychologique.34 L’arrêt Rodriguez c. Colombie-Britannique (Procureur général)35, rendu quelques années plus tard, laisse cependant

                                                                                                               

31  R.  c.  Jones,  (1986)  2  R.C.S.  284.   32  Ibid  à  la  page  319.  

33  R.  c.  Morgentaler,  (1988)  1  R.C.S.  30.     34  Mills  c.  La  Reine,  (1986)  1  RCS  863.  

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entrevoir que le principe d’autonomie est loin d’être absolu et demeure malgré tout relatif au Canada. La Cour suprême, à la majorité simple, a reconnu que bien que la sécurité de la personne prévu à l’article 7 de la Charte canadienne englobe des notions d’autonomie personnelle du moins en ce qui concerne le droit de faire des choix concernant sa propre personne, de contrôle sur son intégrité physique et mentale sans ingérence de l’État et de dignité fondamentale, cet exercice de l’autonomie n’était pas absolu. La Cour suprême a en effet refusé de décriminaliser l’aide au suicide au nom de ce principe. L’autonomie personnelle même en matière de contrôle sur son propre corps est donc relative et connaît des limites. On notera qu’une décision toute récente de la Cour supérieure de la Colombie-Britannique va permettre de rouvrir le débat puisqu’elle a trouvé que la criminalisation de l’aide au suicide était inconstitutionnelle puisqu’ empiétant notamment sur le droit à la sécurité de la personne prévue à la Charte canadienne36.

Récemment toutefois, deux jugements, cette fois-ci, de la Cour suprême nous laissent croire que l’interprétation de l’autonomie de la personne est une valeur encore plus affirmée. D’abord dans l’affaire Chaoulli c. Québec (Procureur général),37 donne à votre avis une nouvelle dimension à l’autonomie puisque la Cour suprême a indiqué que l’État ne pouvait restreindre le choix des individus désirant obtenir des soins de santé privés compte tenu des délais d’attente inhérents et longs du système public puisqu’en l’espèce, la chose contreviendrait                                                                                                                

36  Carter  c.  Canada  (Attorney  General),  2012  BCCS  886.   37  Chaoulli  c.  Québec  (Procureur  général),  (2005)  1  R.C.S.  791.  

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à leur droit à la sécurité prévu par l’article 7 de la Charte canadienne. De même, dans Canada (Procureur général) c. PHS Community38, mieux connu comme l’affaire du site d’injection supervisé de Vancouver Insite, la Cour suprême a encore une fois réaffirmé la préséance de l’autonomie de la personne sur toute intervention de l’État qui aurait pour but de porter atteinte à son droit fondamental à la sécurité. Le débat sur le périmètre exact de cette notion reste donc, pour le moment, encore à définir.

La Charte des droits et libertés de la personne

L’interprétation de l’autonomie eu égard aux principes fondamentaux de la Charte québécoise des droits et liberté qui s’applique sur le territoire de notre province, est dans les faits, la même que celle effectuée en vertu des principes émis par la Charte canadienne. L’article 1 de la Charte québécoise reconnaît, en effet, le droit à l’intégrité de la personne qui se traduit essentiellement de la même manière qu’en vertu de la Charte canadienne. Deux décisions rendues en matière médicale peuvent illustrer ce propos. D’abord, la décision Daigle c. Tremblay 39 vient affirmer l’autonomie de la femme enceinte qui désire subir un avortement alors que son ex-conjoint et père du fœtus insiste pour qu’elle mène l’enfant à terme. L’autonomie décisionnelle de madame Daigle a été affirmée à l’encontre des droits du père et de ceux de la protection du fœtus. Ensuite, l’affaire Nancy B. c. Hôtel-Dieu de Québec40 où un juge de la cour supérieure a

                                                                                                               

38  Canada  (Procureur  général)  c.  PHS  Community,  (2011)  3  R.C.S.  134.   39  Daigle  c.  Tremblay,  (1989)  2  R.C.S.  530.  

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conclu que l’article 1 de la Charte des droits et libertés de la personne consacrant le droit à l’intégrité et à la liberté de l’individu, reconnaît le droit absolu et incontestable de la personne à l’exercice de son autonomie même quand celui-ci se traduit par un refus de soin qui n’est pas dans son meilleur intérêt, compte tenu des circonstances et qui mène donc directement à la mort. La cour a fait ici une distinction importante entre l’arrêt volontaire de traitement et le suicide.

Le Code civil du Québec

Le Code civil du Québec est l’expression même de la règle de droit qui régit les différents rapports de droit privé des individus entre eux. Le Code civil du Québec comprend notamment un Livre qui porte sur le droit des personnes. Les articles 3, 10 et 11 affirment l’autonomie de la personne dans le contexte de la prestation de soins de santé et reconnaissent d’une façon on ne peut plus claire les principes d’inviolabilité de la personne, du respect de son intégrité et de son autonomie dans la prestation des soins médicaux. Les principes du Code civil de Québec s’interprètent d’ailleurs, comme le mentionne le Préambule du Code, en harmonie avec les droits fondamentaux prévus aux Chartes.

C’est ainsi qu’en matière de procréation assistée41, comme dans les autres sphères relevant de la vie privée des individus, l’idéologie prédominante veut que les interventions législatives et les intrusions étatiques demeurent limitées et que                                                                                                                

41   On   peut   faire   ici   le   parallèle   entre   le   droit   à   l’autonomie   reconnu   en   matière  

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les droits constitutionnels et fondamentaux des individus priment. Nous verrons que ceci se traduit clairement en droit québécois. L’accès aux techniques de reproduction assistée, comme nous l’évoquerons, est devenu presqu’un droit consacré et ce, peu importe qu’il soit ou non issu d’une condition médicale. Il est désormais présenté et consacré comme un droit qui est offert à tous.

ii) Le bien-être:

Traduit de l’anglais beneficience, (le bien-être) émane directement de l’obligation relevée par Hippocrate de toujours agir dans le meilleur intérêt du patient et d’éviter ainsi de lui causer un préjudice. Encore une fois dans la lignée des principes idéologiques qui sous-tendent la société américaine, l’idée du bonheur individuel et donc de son épanouissement et de sa satisfaction par la société est très présente. En matière médicale, le principe d’éviter de causer un préjudice au patient est certes consacré, mais l’idée va plus loin. La notion de bien-être est essentiellement positive et peut ainsi être interprétée comme largement dépassant le simple devoir de ne pas causer préjudice. Elle peut effectivement s’étendre au fait positif de procurer au patient une sensation de bonheur, d’accomplissement et d’épanouissement personnel tant sur le plan physique que psychologique. Cette notion comprend également un second élément qui n’est pas négligeable, soit celui de toujours rechercher et défendre un équilibre entre les bénéfices escomptés d’une intervention et les risques encourus par le sujet. Ce second élément devient particulièrement important en matière de recherche médicale ou de soins novateurs chez l’être humain plus particulièrement lorsqu’il

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convient de tester ou de tenter une technique nouvelle ou un traitement précurseur ou innovateur.

Cette interprétation élargie et généreuse de la notion de bien-être est évidemment très subjective mais peut, en l’absence de balises législatives spécifiques, mener directement à la reconnaissance d’un droit positif pour l’individu au nom de son épanouissement personnel et de son bonheur. En droit, le principe du bien être rejoint donc celui du droit à la sécurité prévu à l’article 7 de la Charte canadienne ainsi qu’aux articles 11 et 12 du Code civil du Québec qui prévoient que nul ne peut être soumis à des soins, quelle qu’en soit la nature, sans son consentement et que celui qui consent ou refuse des soins pour autrui, doit le faire dans le seul intérêt de la personne soignée. C’est donc le bien être de la personne qui compte qui doit être reconnu et surtout respecté et qui passe par l’impératif absolu de ses volontés. La Loi sur les services de santé et les services sociaux42 comprend également une série de dispositions43 qui mettent de l’avant le bien être de la personne dans le contexte précis de la prestation des services et des soins de santé. L’article 3 est particulièrement évocateur à cet effet en ce qu’il prévoit une série d’obligations aux prestataires de services visant le bien être de la personne qui requiert des soins. Outre d’affirmer que la raison d’être des soins est la personne qui les requiert, la loi sur les services de santé et les services sociaux précise aussi que dans toute intervention l’individu doit être traité avec courtoisie équité et compréhension, dans le respect de sa dignité, de                                                                                                                

42  Loi  sur  les  services  de  santé  et  les  services  sociaux,  L.R.Q.  c.  S  4-­‐1.   43  Ibid,  aux  articles  3  à  13.  

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son autonomie, de ses besoins et de sa sécurité. Ceci conforte bien évidemment l’idée que tout individu doit être traité non seulement avec respect mais aussi avec commisération.

C’est ainsi que les nouvelles techniques de reproduction contribuent à l’amélioration de la qualité de vie et de l’épanouissement personnel des individus y ayant recours, mais aussi des enfants à naître. Comme nous le verrons, c’est la notion éthique de bien-être qui a contribué au Canada à créer de facto un droit d’accès presque sans limite aux techniques de reproduction, au nom de la protection de la santé des femmes et de leur sécurité, voulant bien sur inférer, de leur bien être.

iii) La justice:

Le principe de justice est celui à qui on a porté peut-être le moins d’attention dans le développement de la morale éthique médicale. Ce n’est que récemment qu’il a été développé dans cette sphère, surtout eu égard à l’accès aux soins, à la rareté des ressources et à la distribution des soins et services de santé particulièrement dans les périodes difficiles de compressions budgétaires. Dans le Code de Nuremberg, le principe de justice était entendu dans un sens qui nous paraît aujourd’hui un peu restrictif, comme étant celui de « fairness » ou d’égalité dans le choix des sujets faisant l’objet de la recherche. On faisait alors référence à un concept large de la justice, celle qui nous impose d’agir équitablement, et justement envers ceux et celles qui requièrent des soins de

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santé.44 Plus tard, le débat a été élargi en ce qui à trait notamment à la justice

distributive et au nécessaire équilibre entre droits individuels et bien-être de la collectivité.45

A l’heure actuelle, et particulièrement en matière de procréation assistée le principe de justice fait l’objet de moult débats. En effet, c’est l’accès aux techniques qui est pointé du doigt compte tenu principalement du coût important qu’il engendre pour les individus désirant s’en prévaloir et au delà, pour la société toute entière plus particulièrement en période d’absence de prospérité économique. Plusieurs auteurs sont d’avis que les coûts nécessaires pour pouvoir avoir recours à ces techniques favorisent non seulement les plus aisés de la population mais aussi exercent une forme de discrimination en ce que souvent les minorités et les femmes constituant les plus vulnérables de nos sociétés, ont peu de chance d’y avoir accès faute de moyens. D’autres considèrent qu’il s’agit là d’un luxe qui tranche nettement avec les besoins criants et matière de santé publique.

Le Québec est l’une des rares sociétés à avoir choisi d’éliminer ce débat en offrant à sa population l’accès gratuit aux techniques de procréation assistée quasi sans restriction. Nous verrons en effet que l’article 10 de la loi interdit le transfert d’embryons chez une femme qui n’est plus en âge de procréer ce qui                                                                                                                

44  Theoretical  Approaches  to  Health  Care  Ethics,  Penn  State  University,  The  College  of  

Health  and  Human  Development,  http  :  www.personal.psu.edu  dxm12.  

45  Rawls  J.A.,    A  theory  of  Justice,  Cambridge,  Mass.  Harvard  University  Press;  1971  302-­‐

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constitue la seule limitation normative à l’accès aux techniques de procréation assistée. Le Règlement modifiant le Règlement d’application de la Loi sur l’assurance maladie46 prévoit en effet que les coûts d’un maximum de trois cycles seront pris en charge et assurés par le gouvernement du Québec et l’on peut donc conclure que le principe éthique de justice a été ainsi indirectement incorporé dans la législation. Toute personne, peu importe sa condition économique peut avoir accès aux techniques de procréation assistée au Québec. Si l’on peut sans contredit affirmer que le Québec respecte le principe éthique de justice dans la sphère de la procréation assistée en l’offrant à tous, on peut toutefois se poser la question de savoir si ce choix est effectivement juste dans une perspective globale ou l’accès au soins de santé même essentiels pour la population est difficile et ou les coûts du système sont de plus en plus importants pour une population vieillissante.

Ceci dit, les principes éthiques qui sous-tendent la législation québécoise tendent à donner aux individus l’impression – si ce n’est pas l’assurance - qu’ils ont le droit de recourir aux services de procréation assistée, le droit de consommer ce service comme n’importe quel autre.

iv. La non-maléficience:  

Le principe de non-maléficience a longtemps été associé en médecine avec le postulat latin « primum non nocere » qui signifie, et peut être traduit dans le                                                                                                                

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langage courant par: Avant toute chose, ne faite pas de mal.47 Comme nous

l’avons vu, la déontologie d’Hippocrate reconnait en effet le principe de bien être, mais également, celui positif de ne pas faire de mal. Ce principe, indissociable de celui de bien être que nous avons déjà abordé, s’adresse avant tout à celui ou celle qui procure des soins de santé. En effet, la non-maléficience comme principe éthique incombe d’abord au médecin ou de façon générale, à la personne ou à l’organisme qui détient la connaissance, et en quelque sorte le pouvoir décisionnel ou d’influence eu égard aux décisions d’ordre médical. Ensemble, ces préceptes sont à l’origine du concept sans cesse réitéré et fondamental dans l’éthique médicale moderne, soit de toujours agir dans le meilleur intérêt de l’individu dans la prestation de soins de santé et de services sociaux. La non-maléficience, très présente dans notre tradition médicale contemporaine commande donc un devoir moral et éthique d’agir toujours et en tout temps dans le meilleur intérêt de la personne soignée.

Au début du 19ième Siècle, un médecin anglais du nom de Thomas Percival48 a

mis en mot cette notion éthique et morale et a ainsi forgé la base d’une doctrine éthique médicale devant servir à tous les médecins dans le traitement de leurs patients. Selon Thomas Percival, le bien être et la non-maléficience doivent servir d’assise à l’obligation première de tout médecin, et représentent le

                                                                                                               

47  Tom  L.  Beauchamp,  “The  Four  Principles  Approach,  Principles  of  Health  Care  Ethics.”  

Raanan  Gillon  (ed).  New  York:  John  Wiley  &  Sons  Ltd,  1994,  3-­‐11.  

48  Percival,  Thomas,  “Medical  ethics;  or  a  code  of  institutes  and  precepts,  adapted  to  the  

professional  conduct  of  physicians  and  surgeons”,  1803,  S.  Russell,  Manchester  pp.  165-­‐ 166.  

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