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Capacités langagières en langue des signes française et en français écrit chez l'enfant sourd bilingue - RERO DOC

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UNIVERSITE DE GENEVE FACULTE DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES DE L’EDUCATION SECTION DE PSYCHOLOGIE

Professeur Ulrich Frauenfelder

CAPACITES LANGAGIERES EN LANGUE DES SIGNES FRANÇAISE ET EN FRANÇAIS ECRIT CHEZ L’ENFANT SOURD BILINGUE : QUELLES RELATIONS ?

THESE

Présentée à la

Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation

de l’Université de Genève pour obtenir le grade de

Docteur es psychologie

par

Nathalie Ann NIEDERBERGER de

Stans (NW)

Thèse No 321

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RESUME

Les capacités en langue orale et écrite de la majorité des enfants sourds sont très déficitaires, contrairement aux capacités que ceux-ci développent en langue des signes en cas d’exposition précoce. Le rapport entre ces différentes capacités langagières a été étudié chez des enfants sourds bilingues de Suisse Romande, en Langue des Signes Française et en français écrit. Les capacités de 39 sujets ont été évaluées, en production et en compréhension, au niveau discursif et morphosyntaxique. D’autres facteurs pouvant influencer ces capacités (français oral, capacités cognitives, caractéristiques familiales et scolaires) ont aussi été considérés. Les résultats montrent un lien positif et très significatif entre les capacités développées en français écrit et en Langue des Signes Française. La relation semble plus importante en compréhension qu’en production, et sur le plan discursif que sur le plan morphosyntaxique. En outre, les capacités langagières orales paraissent un facteur également important dans cette interaction.

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FINANCEMENT

Ce travail de thèse et la recherche TELSF qui y est liée ont été partiellement financé par diverses

institutions :

Le Fond National Suisse pour la Recherche Scientifique Bourse FNS Jeunes Chercheurs, 2002-2003

attribuée à Nathalie Niederberger

Bourse FNS Jeunes Chercheurs, 2003-2004 (prolongation) attribuée à Nathalie Niederberger

La Société Académique de Genève Fonds B. et E. Henneberg, 2001 attribué pour la Recherche TELSF

au Prof. U. Frauenfelder, Laboratoire de Psycholinguistique Expérimentale, Université de Genève

et Nathalie Niederberger et Saskia Delachaux Djapo, Service Médico-Pédagogique de Genève

Le Réseau Romand de Mentoring Féminin

La Fédération Suisse des Sourds Région Romande Le Service Médico-Pédagogique de Genève

Le Laboratoire de Psycholinguistique de l’Université de Genève Le Centre pour Enfants Sourds de Montbrillant

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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier ici toutes les personnes qui m’ont aidée, conseillée et soutenue au cours de ces trois années de travail de thèse. Sans leur investissement et leurs encouragements, ce projet n’aurait pu être réalisé.

Mes remerciements vont en premier lieu au Professeur Uli Frauenfelder, pour la confiance et la liberté qu’il m’a accordées dans mes choix de recherche. Bien que la thématique que j’ai développée n’entre pas directement dans le champ de ses intérêts scientifiques premiers, il a dirigé mon travail avec grande efficacité, et m’a beaucoup aidée à mieux articuler mes idées et mon texte. Il a grandement facilité les recherches de fonds nécessaires à la réalisation de ce projet. Les réunions scientifiques de son équipe m’ont permis également de développer une réflexion critique et méthodologique qui m’a été très utile dans l’analyse de la littérature et lors du traitement de mes propres données.

Je souhaite remercier également chaleureusement le Professeur Ioanna Berthoud-Papandropoulou, qui par son insistance m’a convaincue de commencer cette thèse, et m’a offert conjointement avec le Professeur Frauenfelder l’infrastructure pour la réaliser. Nos échanges théoriques, en tête-à-tête ou lors de réunions d’équipe, ont profondément enrichi ma réflexion scientifique. Ses encouragements et critiques constructives à chaque phase importante de ce travail ont beaucoup contribué l’amélioration de celui-ci.

Le Professeur Philip Prinz, de San Francisco State University, a été aussi d’un très grand soutien, d’abord en me laissant la responsabilité de réaliser, sous la supervision du Professeur Frauenfelder et avec l’aide de mes collègues, l’adaptation du test qu’il a créé avec le Dr Michael Strong et Marlon Kuntze, puis en m’accueillant dans son équipe à San Francisco lors de la dernière année de la thèse. Grâce à lui, j’ai pu également entrer en contact avec les chercheurs et les étudiants travaillant dans le même champ de recherche et prendre connaissance de documents peu accessibles ou non encore publiés.

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Mes remerciements vont également au Dr Penny Boyes Braem, du Forschungszentrum für Gebärdensprache de Bâle, dont l’enthousiasme et l’intérêt sincère pour mon thème de recherche ont constitué des encouragements importants lors des périodes de doutes et d’essoufflement. Ses questions pointues, ses recommandations, et sa connaissance approfondie en matière de langues des signes ont largement contribué à la précision de ce travail. Elle a été pour moi également une mine extrêmement précieuse de références et de contacts.

Le Professeur Jesus Alegria, de l’Université Libre de Bruxelles, a été aussi d’une grande aide, par sa générosité et son accueil chaleureux. Je le remercie pour le temps et les connaissances qu’il a partagés avec moi. Nos discussions à propos des stratégies de lecture des Sourds ont beaucoup enrichi ma réflexion. Les outils et les documents qu’il a mis à ma disposition m’ont été très utiles.

Je tiens à remercier également le Professeur Geneviève de Weck, de l’Université de Neuchâtel, qui m’a formée pendant mes premières années de recherche alors qu’elle était chargée de cours à l’Université de Genève. Travailler à ses côtés a été une expérience extrêmement précieuse qui m’a beaucoup aidée à planifier efficacement mes recherches de thèse.

Je souhaite aussi remercier le Professeur Juan Manzano, Directeur du Service Médico-Pédagogique de Genève et Maurice Dandelot, à l’époque Adjoint à la Direction et responsable du Secteur Spécialisé, pour leur soutien au projet TELSF. Sans la participation financière du SMP et leur accord pour libérer ponctuellement les collaborateurs du Centre pour Enfants Sourds de Montbrillant (CESM) de leurs tâches habituelles, l’adaptation du test n’aurait pu être réalisée.

Mes remerciements vont aussi à tous mes collègues et amis du CESM, qui ont participé avec moi à l’aventure du projet TELSF, Saskia Delachaux Djapo, logopédiste, qui a mis beaucoup d’énergie dans le démarrage et la recherche de fonds pour ce projet, les

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collaborateurs Sourds, pour leur investissement tout au long de ce projet, en particulier Serge Aubonney et Giovanni Palama, pour la grande qualité de la vidéo réalisée en LSF et leur implication dans la passation des épreuves, et Monique Aubonney, pour la grande rigueur de ses analyses. Leurs remarques linguistiques et pratiques lors de la constitution du test en LSF ont grandement contribué à la qualité de sa réalisation. Claire Dunant-Sauvin, interprète et logopédiste de formation, a été d’un grand soutien par son dynamisme. La pertinence de ses questionnements, ses recherches inlassables et son perfectionnisme ont beaucoup contribué à la précision des descriptions des épreuves en LSF. Elle a également réalisé la traduction de celles-ci en français. De plus, son aide a été très efficace pour synthétiser les recommandations des diverses sources et suggérer des solutions pratiques conservant les objectifs fixés pour l’évaluation. Sandrine Morier, psychologue consultante, est intervenue dans la partie de l’évaluation cognitive des sujets avec grande expertise. Elle a également été une ressource importante sur le plan bibliographique. Enfin, je tiens à remercier Jean-François Chavaillaz, logopédiste, pour le temps et les connaissances qu’il a partagés avec enthousiasme au long de nos années de collaboration et ses encouragements, ainsi que Catherine Haus Schneuwly, responsable pédagogique et le Dr Maurice Rey, responsable thérapeutique, pour leur soutien au projet et l’intérêt qu’ils ont manifesté tout au long de la recherche.

Je voudrais remercier également Brigitte Guidollet, Directrice à l’époque de l’Ecole Cantonale pour Enfants Sourds de Lausanne, Jean-Marc Charrière, Responsable à l’époque de la Section Surdité et Christophe Ramadan, à l’époque enseignant, de l’Institut Saint-Joseph de Fribourg pour avoir facilité mes recherches, ainsi que les professionnels de ces établissements qui ont participé avec beaucoup de sérieux à la récolte des données : Béatrice Bula, Stéphane Liard, Bernard Morel, Françoise Richard, Jessica Swallert et Olivier Troillet.

Un certain nombre de chercheurs et professeurs ont aimablement accepté de formuler des suggestions sur la première rédaction du projet de thèse ou de discuter une partie de ses développements : le Professeur Pascal Zesiger et le Dr Johaquim Dolz de l’Université de Genève, le Professeur François Grosjean ainsi qu’Alexandre Duchênes de l’Université de Neuchâtel, le Professeur Rachel Mayberry de McGill University, les Professeurs Astrid Vercaingne-Ménard et Chris Miller, ainsi que Hélène Perreault de l’Université du Québec à

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Montréal, Evelyne Thommen, Professeur à l’époque à l’Université de Franche-Comté, le Dr Marion Blondel de l’Université de Rouen, le Dr Emmanuelle Canut, de l’Université de Nancy et le Dr Cyril Courtin, de l’Université de Caen et de l’Université Paris V.

Le soutien de la communauté des Sourds de Suisse Romande, et en particulier de la Fédération Suisse des Sourds Région Romande et du CRAL, Centre de Rencontres et d'Activités culturelles en Langue des signes, a été aussi très important. Leurs encouragements, leur participation financière et leur aide technique ont été très utiles. De même, les interprètes LSF-français de Suisse Romande (SRILS) ont été d’une grande aide par leurs interprétations lors de certaines réunions importantes et par leur expertise et leurs conseils, en particulier Catherine Delétra, Anne-Claude Prélaz, Françoise Rickli, et Jessica Swallert. Un certain nombre de professionnels romands de la surdité ont pris part aux premières étapes du projet, en acceptant de participer en tant que sujet à la version pilote du test, ou en visionnant les premières versions vidéo des épreuves en LSF. Leurs recommandations ont été extrêmement utiles pour améliorer l’adaptation du test. Enfin, je remercie également vivement les enfants qui ont participé à la recherche et leurs parents pour leur confiance et leurs encouragements.

Je souhaite remercier également chaleureusement tous mes collègues et amis de l’Université de Genève pour leur soutien quotidien, leurs encouragements et leur aide, et tout spécialement les Dr Laurence Chillier, Elisabeth Fonteneau, Julie Frank et Marcel Zentner, de même qu’Odile Bagou, Anne-Marie Bottinger, Frédérique Cerchia, Stéphanie Cortese, Sébastien Dubé, Christian Lachaux, et Carole Savioz . Je remercie également les étudiants de licence et de diplôme qui ont participé à cette recherche, pour leur apport au travail et leurs suggestions pertinentes.

Mes remerciements vont également à toutes les personnes qui m’ont accueillie à San Francisco et facilité mon travail de thèse : le Professeur Dan Slobin de l’Université de Californie à Berkeley, le Dr Michaël Strong de l’Université de Californie à Santa Cruz, Patrick Boudreault, Bryan Chong, John Gargani, Marlon Kuntze et Wolfgang Mann.

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Enfin, je voudrais remercier mon compagnon Daniel Costello ainsi que ma famille, en particulier mes parents Geneviève et Anton Niederberger et mon frère Stefan Niederberger, et tous mes amis pour leur soutien, leurs encouragements et leur patiente compréhension pendant ces longs mois de travail qui ont affecté ma vie sociale et émotionnelle.

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TABLE DES MATIERES

FINANCEMENT………. i

REMERCIEMENTS……… ii

TABLE DES MATIERES……… vii

1. INTRODUCTION………. 1

1.1. CAPACITES LANGAGIERES CHEZ L’ENFANT SOURD……… 1

1.2. DEVELOPPEMENT DU LANGAGE EN LANGUE DES SIGNES………. 3

1.2.1. Acquisition d’une langue des signes par les enfants sourds de parents Sourds……… 5

1.2.1.1. Babillage………. 5

1.2.1.2. Premiers signes, premières combinaisons de signes………... 6

1.2.1.3. Acquisition de la phonologie………. 8

1.2.1.4. Développement du lexique………. 9

1.2.1.5. Acquisition de la morphosyntaxe………. 11

Acquisition des pronoms……… 11

Acquisition des formes verbales……… 12

Acquisition des classificateurs……… 13

1.2.1.6. Développement des capacités discursives………. 16

1.2.2. Acquisition d’une langue des signes par les enfants sourds de parents entendants………. 17

1.2.3. Conséquences d’une exposition tardive à la langue des signes……….. 20

1.3. APPRENTISSAGE DE L’ECRIT CHEZ L’ENFANT SOURD……….. 22

1.3.1. Apprentissage de la lecture………. 24

1.3.2. Apprentissage de l’écriture (production écrite)……… 26

1.3.3. Facteurs influençant l’apprentissage de l’écrit ……… 31

1.4. RELATIONS ENTRE LANGUES DES SIGNES ET LANGUES ORALES/ECRITES……… 33

1.4.1. Différences et parenté entre les langues des signes et les langues orales/écrites……… 33

1.4.2. Bilinguisme et surdité………. 37

1.5. RELATIONS ENTRE CAPACITES DEVELOPPEES EN LANGUE DES SIGNES ET EN LANGUE ECRITE………. 39

1.5.1. Apport de la connaissance d’une langue des signes pour l’apprentissage d’une langue écrite : perspectives pédagogiques……… 39

1.5.1.1. Les programmes bilingues………. 40

1.5.1.2. Outils pédagogiques spécifiques……… 43

Formes signées de langues orales……….….. 44

Technique de glossing……… 44

Technique de chaining……… 45

SignWriting……… 46

Techniques de traduction……… 46

Comparaisons inter-langues……… 46

1.5.2. Relations entre capacités en langue des signes et capacités en langue écrite : hypothèses………….…. 48

1.5.2.1. Hypothèse d’une absence de relation entre capacités en langue des signes et capacités en langue écrite… 49

1.5.2.2. Hypothèse de l’existence d’une relation entre capacités en langue des signes et capacités en langue écrite ……….. 50 1.5.3. Relations entre capacités en langue des signes et capacités en langue écrite : études empiriques………. 56 1.5.3.1. Premiers travaux : corrélations entre capacités en ASL et en anglais écrit……….. 57

Description du projet TASL – Test of American Sign Language……….…. 57

Autres études sur les capacités en ASL et en anglais écrit………. 61 1.5.3.2. Etudes complémentaires : spécificité du lien entre capacités en langue des signes et en langue écrite et

études dans différents contextes linguistico-culturels………. 68

(11)

2. OBJECTIFS ET HYPOTHESES THEORIQUES………. 73

2.1. APPORT SCIENTIFIQUE DE L’ETUDE PRESENTEE ………. 73

2.2. HYPOTHESES ET QUESTIONS THEORIQUES………. 76

2.2.1. Hypothèse 1 : Existence d’une relation entre capacités langagières en LSF et en français écrit………. 76

2.2.2. Hypothèse 2 : Types de relations entre capacités langagières en LSF et français écrit……… 77

2.2.3. Hypothèse 3 : Facteurs influençant le développement des capacités langagières………. 78

3. METHODE……… 79 3.1. POPULATION……….. 79 3.1.1. Groupe expérimental ………. 80 3.1.2. Groupe contrôle……….…. 84 3.2. EPREUVES……… 86 3.2.1. Epreuves en LSF………. 86 3.2.1.1. LSF-P1……… 87 Introduction……….. 87 Matériel……… 88 Procédure……….… 88 Cotation……… 89 3.2.1.2. LSF-P2……… 96 Introduction……….. 96 Matériel……… 96 Procédure………. 96 Cotation……… 97 3.2.1.3. LSF-C1………... 101 Introduction………. 101 Matériel……… 101 Procédure………. 103 Cotation……… 104 3.2.1.4. LSF-C2………... 104 Introduction………. 104 Matériel……… 104 Procédure………. 106 Cotation……… 107

3.2.2. Epreuves en français écrit……….. 107

3.2.2.1. EP1……….…. 107 Introduction………. 107 Matériel……… 108 Procédure………. 108 Cotation……… 109 3.2.2.2. EP2……….… 115 Introduction………. 115 Matériel……….. 115 Procédure……… 116 Cotation……….. 117 3.2.2.3. EC1………... 117 Introduction……… 117 Matériel………... 117 Procédure……… 119 Cotation……….. 119 3.2.2.4. EC2………... 120 Introduction……… 120 Matériel………... 120 Procédure……… 121 Cotation……….. 122 3.2.3. Epreuves complémentaires………... 122

(12)

3.2.3.1. Epreuves complémentaires en français écrit………. 123 3.2.3.1.1. EC3……… 123 Introduction……… 123 Matériel………... 123 Procédure……… 124 Cotation………... 125 3.2.3.1.2. ORTHO……….. 125 Introduction………. 125 Matériel………... 125 Procédure……… 126 Cotation………... 127

3.2.3.2. Epreuves en français oral……….. 127

3.2.3.2.1. OP1………. 128 Introduction………. 128 Matériel……… 128 Procédure………. 128 Cotation……… 129 3.2.3.2.2. OP2………. 135 Introduction………. 135 Matériel……… 135 Procédure………. 136 Cotation……… 137 3.2.3.2.3. OC1………. 137 Introduction……….. 137 Matériel……… 138 Procédure………. 138 Cotation……… 139 3.2.3.2.4. OC2………. 140 Introduction……….. 140 Matériel……… 140 Procédure………. 141 Cotation……… 142 3.2.3.3. ECP……… 142 Introduction……….. 142 Matériel……… 142 Procédure………. 143 Cotation……… 145 3.2.3.4. Epreuves cognitives………... 145 3.2.3.4.1. Cubes………... 146 Introduction……….. 146 Matériel……… 146 Procédure………. 146 Cotation……… 146 3.2.3.4.2. Arrangement d’images……… 147 Introduction……….. 147 Matériel……… 147 Procédure………. 147 Cotation……… 148 3.2.3.4.3. PM38………... 148 Introduction……….. 148 Matériel……… 148 Procédure………. 149 Cotation……… 149

3.2.4. Récapitulation de l’ensemble des épreuves………... 149

3.3. PASSATION……….. 150

(13)

3.3.1.1. Passation des épreuves en LSF……….. 151

3.3.1.2. Passation des épreuves de français écrit……… 152

3.3.1.3. Passation des épreuves de français oral………. 153

3.3.2. Passation pour le groupe contrôle………. 154

3.3.2.1. Passation des épreuves de français écrit……… 154

3.3.2.2. Passation des épreuves de français oral………. 155

3.4. HYPOTHESES OPERATIONNELLES……….. 156

3.4.1. Question 1 : Existence d’une relation entre capacités langagières en LSF et en français écrit………... 156

3.4.2. Question 2 : Types de relations entre capacités langagières en LSF et français écrit……….. 158

3.4.2.1. Capacités de production et de compréhension………... 158

3.4.2.2. Capacités discursives et morphosyntaxiques……… 159

3.4.3. Question 3 : Facteurs influençant le développement des capacités langagières……… 162

3.4.3.1. Développement langagier……….. 163

Capacités en français écrit : unités de bas niveaux………. 163

Capacités langagières orales………... 163

Capacités métaphonologiques……… 164

3.4.3.2. Développement général……….. 164

Age……….. 164

Développement cognitif……… 164

3.4.3.3. Milieu socio-familial et scolaire………. 165

Profession des parents……… 165

Statut auditif des parents………. 165

Langues pratiquées à la maison……….. 165

Utilisation du LPC à la maison………... 165

Age d’exposition à la LSF……….. 166

Types de scolarisation : internat ou externat……….. 166

Ecole suivie………. 166

Utilisation du LPC pendant la passation………. 166

3.4.3.4. Caractéristiques de la déficience auditive……….. 167

Degré de surdité……….. 167

Degré de récupération auditive………... 167

Types d’aide audio-prothétique………... 167

3.4.3.5. Divers………. 167

Genre……… 167

4. RESULTATS………. 168

4.1. RESULTATS AUX EPREUVES EN LSF……… 169

4.1.1. Production discursive LSF-P1……… 169

4.1.1.1. Performance des sujets………... 169

4.1.1.2. Résultats par critères………... 170

4.1.1.3. Validité interne………... 171

4.1.2. Production morphosyntaxique LSF-P2……… 173

4.1.2.1. Performance des sujets………... 173

4.1.2.2. Résultats par items……….. 174

4.1.2.3. Validité interne………... 175

4.1.3. Compréhension discursive LSF-C1………... 176

4.1.3.1. Performance des sujets………... 176

4.1.3.2. Résultats par items……….. 177

4.1.3.3. Validité interne………... 177

4.1.4. Compréhension morphosyntaxique LSF-C2………... 178

4.1.4.1. Performance des sujets………... 178

4.1.4.2. Résultats par items……….. 179

4.1.4.3. Validité interne………... 180

4.1.5. Note globale et corrélations entre les épreuves de LSF……… 183

4.2. RESULTATS AUX EPREUVES EN FRANÇAIS ECRIT………. 184

(14)

4.2.1.1. Performance du groupe expérimental………. 184

4.2.1.2. Résultats par critères………... 185

4.2.1.3. Validité interne………... 187

4.2.1.4. Résultats du groupe contrôle……….. 188

4.2.1.4.1. Performance du groupe contrôle……….. 188

4.2.1.4.2. Résultats par critères (groupe contrôle)………... 189

4.2.2. Production morphosyntaxique EP2……….. 191

4.2.2.1. Performance du groupe expérimental………. 191

4.2.2.2. Résultats par items……….. 192

4.2.2.3. Validité interne………... 193

4.2.2.4. Résultats du groupe contrôle……….. 193

4.2.2.4.1. Performance du groupe contrôle……….. 193

4.2.2.4.2. Résultats par items (groupe contrôle)……….. 194

4.2.3. Compréhension discursive EC1………. 195

4.2.3.1. Performance du groupe expérimental………. 195

4.2.3.2. Résultats par item………... 196

4.2.3.3. Validité interne………... 197

4.2.3.4. Résultats du groupe contrôle……….. 197

4.2.3.4.1. Performance du groupe contrôle……….. 197

4.2.3.4.2. Résultats par items (groupe contrôle)……….. 198

4.2.4. Compréhension morphosyntaxique EC2………. 199

4.2.4.1. Performance du groupe expérimental………. 199

4.2.4.2. Résultats par items……….. 200

4.2.4.3. Validité interne………... 200

4.2.4.4. Résultats du groupe contrôle……….. 201

4.2.4.4.1. Performance du groupe contrôle……….. 201

4.2.4.4.2. Résultats par items (groupe contrôle)……….. 202

4.2.5. Note globale et corrélations entre les épreuves de français écrit………. 203

4.3. RELATIONS ENTRE LES RESULTATS AUX EPREUVES EN LSF ET EN FRANÇAIS ECRIT…... 205

4.3.1. Existence d’un lien entre capacités langagières en LSF et capacités langagières en français écrit……. 205

4.3.2. Types de relations entre capacités langagières en LSF et en français écrit………... 206

4.3.2.1. Relations entre les résultats aux différents sous-tests………. 206

4.3.2.2. Capacités de production et de compréhension……… 207

4.3.2.3. Capacités discursives et morphosyntaxiques……… 208

4.4. RESULTATS AUX EPREUVES COMPLEMENTAIRES……… 211

4.4.1. Epreuves complémentaires en français écrit………. 211

4.4.1.1. Compréhension lexicale EC3………. 211

4.4.1.1.1. Performance du groupe expérimental……….. 211

4.4.1.1.2. Résultats par items………... 212

4.4.1.1.3. Validité interne……… 212

4.4.1.1.4. Résultats du groupe contrôle………... 213

4.4.1.1.5. Performance du groupe contrôle……….. 213

4.4.1.1.6. Résultats par items (groupe contrôle)……….. 213

4.4.1.2. Orthographe lexicale ORTHO……… 215

4.4.1.2.1. Performance du groupe expérimental……….. 215

4.4.1.2.2. Résultats par items………... 216

4.4.1.2.3. Validité interne……… 216

4.4.1.2.4. Résultats du groupe contrôle………... 217

4.4.1.2.5. Performance du groupe contrôle………. 217

4.4.1.2.6. Résultats par items (groupe contrôle)………. 218

4.4.2. Epreuves en français oral……… 219

4.4.2.1. Production discursive OP1………. 219

4.4.2.1.1. Performance du groupe expérimental……….. 219

4.4.2.1.2. Résultats par critères……… 220

4.4.2.1.3. Validité interne……… 222

(15)

4.4.2.1.5. Performance du groupe contrôle………. 223

4.4.2.1.6. Résultats par critères (groupe contrôle)………... 224

4.4.2.2. Production morphosyntaxique OP2………... 226

4.4.2.2.1. Performance du groupe expérimental……….. 226

4.4.2.2.2. Résultats par items………... 227

4.4.2.2.3. Validité interne……… 228

4.4.2.2.4. Résultats du groupe contrôle………... 228

4.4.2.2.4.1. Performance du groupe contrôle……….. 228

4.4.2.2.4.2. Résultats par items (groupe contrôle)……….. 229

4.4.2.3. Compréhension discursive OC1………. 230

4.4.2.3.1. Performance du groupe expérimental……….. 230

4.4.2.3.2. Résultats par items………... 231

4.4.2.3.3. Validité interne……… 232

4.4.2.3.4. Résultats du groupe contrôle………... 232

4.4.2.3.5. Performance du groupe contrôle……….. 232

4.4.2.3.6. Résultats par items (groupe contrôle)……….. 233

4.4.2.4. Compréhension morphosyntaxique OC2……….. 234

4.4.2.4.1. Performance du groupe expérimental……….. 234

4.4.2.4.2. Résultats par items………... 235

4.4.2.4.3. Validité interne……… 236

4.4.2.4.4. Résultats du groupe contrôle………... 236

4.4.2.4.4.1. Performance du groupe contrôle……….. 236

4.4.2.4.4.2. Résultats par items (groupe contrôle)……….. 237

4.4.2.5. Note globale et corrélations entre les épreuves de français oral……… 238

4.4.3. Epreuve de conscience phonologique ECP……… 240

4.4.3.1. Performance du groupe expérimental………. 240

4.4.3.2. Résultats par items……….. 241

4.4.3.3. Validité interne………... 242

4.4.3.4. Résultats du groupe contrôle……….. 242

4.4.3.4.1. Performance du groupe contrôle………. 242

4.4.3.4.2. Résultats par items (groupe contrôle)………. 243

4.4.4. Epreuves cognitives………. 244

4.4.4.1. Cubes……….. 245

4.4.4.2. Arrangement d’images……… 245

4.4.4.3. PM38……….. 246

4.5. RELATIONS ENTRE LES RESULTATS AUX EPREUVES EN LSF, EN FRANÇAIS ECRIT ET LES AUTRES FACTEURS CONSIDERES……….. 247 4.5.1. Facteurs influençant le développement des capacités en LSF………. 248

4.5.1.1. Comparaison deux à deux……….. 248

4.5.1.2. Analyses de régression………... 250

4.5.2. Facteurs influençant le développement des capacités en français écrit………. 250

4.5.2.1. Comparaison deux à deux……….. 250

4.5.2.2. Analyses de régression………... 252

5. DISCUSSION………. 254

5.1. Capacités des enfants sourds en LSF……… 254

5.2. Capacités des enfants sourds en français écrit………. 257

5.3. Relations entre capacités langagières en LSF et en français écrit……….. 260

5.4. Facteurs influençant le développement des capacités langagières en LSF et en français écrit…………... 264

5.5. Considérations méthodologiques……….. 274

5.6. Perspectives cliniques et pédagogiques………. 276

6. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES……….. 278

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES……… 280

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1. INTRODUCTION

1.1. CAPACITES LANGAGIERES CHEZ L’ENFANT SOURD

Chez le jeune enfant sourd, la perception déficiente des stimuli auditifs a des conséquences très importantes sur le développement du langage. En effet, tout le langage oral adressé à l’enfant par son entourage sera perçu de manière très parcellaire. En cas de surdité importante, sévère ou profonde, et précoce, de naissance ou survenant pendant les premiers mois de la vie, les informations linguistiques perçues auditivement et visuellement (par la lecture labiale) ne constituent pas un input suffisamment complet pour permettre un développement normal du langage (Tuller, 2000; Hage, 1998). De plus, la perte auditive réduit les possibilités de contrôle de l’enfant sur ses propres productions vocales-orales (boucle audio-phonatoire), conduisant à une diminution de l’intelligibilité de la parole. En conséquence, le développement du langage oral chez l’enfant ayant une surdité importante est retardé et le plus souvent très déficitaire, autant en compréhension qu’en production. Il nécessite un apprentissage et ne peut se faire sans une aide audio-prothétique, des moyens spécifiques (systèmes d’aide à la lecture labiale tels que Langage Parlé Complété, ci-après LPC; verbo-tonale) et des aides spécialisées (guidance familiale, traitement logopédique). Une fois atteint l’âge adulte, les capacités langagières orales peuvent être très variables d’une personne sourde à l’autre, et plus ou moins fonctionnelles. La nouvelle technologie amenée par l’implant cochléaire va sans doute modifier à l’avenir les perspectives ainsi décrites, mais si l’apport perceptif de cette technique en développement est largement démontré désormais, les bénéfices pour le développement du langage lui-même sont encore mal déterminés (Marschark, 2002).

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Le développement des capacités langagières peut par contre se faire sans obstacle perceptif ni délai, si l’enfant sourd est exposé à un langage qui lui est adressé en modalité gestuelle comme c’est le cas des langues des signes (voir section 1.2). Cette situation se trouve essentiellement pour les enfants sourds nés dans une famille comprenant d’autres membres sourds (parents, frères/sœurs, etc.) et dans laquelle une langue des signes est déjà une des langues familiales. Pour les enfants sourds nés dans une famille dont les autres membres sont tous entendants, l’accès à ce type d’input linguistique est rarement possible de manière précoce en raison du délai fréquent dû au diagnostic de surdité, souvent posé plusieurs mois après la naissance, ainsi qu’à l’absence de locuteur compétent en langue des signes dans l’entourage immédiat de l’enfant (Morford, 2000). Les conséquences de cette exposition retardée de quelques mois ou même d’une année ou deux semblent cependant porter un préjudice de faible conséquence au niveau du développement langagier de l’enfant puisque dans ce cas l’enfant peut percevoir l’intégralité des informations linguistiques contenues dans les messages qui lui sont adressés (Slobin, 2002). De même, ce dernier peut avoir un contrôle direct sur ses propres productions. La question de l’intégration sociale de l’enfant reste par contre très problématique puisque même si ce dernier développe de bonnes capacités langagières dans cette langue, les possibilités d’interactions se trouvent grandement limitées par le nombre restreint de locuteurs compétents en langue des signes dans la société en général.

Les répercussions de la surdité sur le développement du langage de l’enfant et les conséquences directes sur son insertion sociale et professionnelle future sont donc dans tous les cas très importantes. L’apprentissage du langage écrit est également problématique chez l’enfant sourd profond, notamment parce que cet apprentissage ne peut s’appuyer sur les capacités langagières orales de la même manière que chez les enfants entendants (voir section

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1.3). Le constat effectué à maintes reprises dans différents pays est que même les adultes sourds ont pour la majorité d’entre eux des difficultés à traiter l’écrit de manière autonome et fonctionnelle, ce qui restreint notamment les possibilités de formation et de choix professionnels. Le développement de moyens permettant d’acquérir une meilleure maîtrise de l’écrit apparaît donc comme une véritable nécessité.

La recherche présentée dans ce travail a pour objectif d’étudier les capacités développées par les enfants sourds bilingues en Langue des Signes Française (ci-après LSF) et en français écrit, ainsi que les relations entre ces deux types de capacités. Dans ce qui suit nous allons présenter les principales caractéristiques du développement du langage réalisé en langue de signes, puis les particularités de l’apprentissage de l’écrit chez l’enfant sourd, ainsi que les principales difficultés qui ont été relevées sur ce plan. Puis nous décrirons brièvement les relations entre langues des signes et langues orales/écrites. Enfin, dans la dernière partie de ce chapitre, nous décrirons l’état actuel des connaissances relatives aux liens existants entre les capacités langagières développées dans une langue des signes et à l’écrit.

1.2. DEVELOPPEMENT DU LANGAGE EN LANGUE DES SIGNES

Depuis les travaux précurseurs de (Stokoe, 1960), les langues des signes sont reconnues comme des langues à part entière, au même titre que les langues orales. Les premiers travaux linguistiques, datant de cette période, cherchaient avant tout à démontrer les similitudes avec les langues orales pour fournir des arguments supplémentaires visant à confirmer le statut linguistique des langues des signes (voir p.ex. Markowicz, 1979). C’est ainsi que de

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nombreux travaux se sont attachés à décrire le principe de double articulation dans les langues des signes, qui est composé d’unités significatives (signes ou kinèmes) elles-même décomposables en unités distinctives (paramètres de la formation des signes ou chérèmes), de même que le caractère d’arbitrarité dans ces langues, malgré une composante iconique plus importante que dans les langues orales (Cuxac, 1997). Sur le plan de l’acquisition, les premiers travaux ont cherché également à démontrer la similarité de l’acquisition du langage en langue des signes avec celle que l’on connaît pour les langues orales. De fait, les études portant sur les enfants sourds de parents sourds décrivent un développement très comparable à celui observé dans les langues orales, avec les mêmes étapes, survenant dans le même ordre et à des âges similaires (Lepot-Froment, 2000; Lillo-Martin, 1999). Dans cette section, nous décrirons le développement de la langue des signes en distinguant deux situations bien différentes, la première étant la situation des enfants sourds de famille de Sourds1, qui acquièrent une langue des signes en tant que langue maternelle à un âge très précoce, et la seconde étant la situation des enfants sourds dont la famille est entendante, et qui acquièrent la langue des signes plus tardivement, dans des circonstances qui peuvent varier considérablement d’un cas à l’autre. Cette présentation est limitée par le développement de ce champ de recherche, actuellement encore très parcellaire. Ainsi, la majorité des données présentées ici concernent la langue des signes américaine (ASL), davantage étudiée et dont les études sont mieux diffusées. A notre connaissance, aucune étude n’a été encore faite concernant l’acquisition de la LSF. Toutefois, chaque fois que possible, nous mentionnerons des travaux réalisés dans d’autres langues des signes, permettant ainsi de relever les aspects communs au développement de ce type de langues. Par ailleurs, certains aspects de

1 Conformément à l’usage, nous utilisons le terme Sourd avec majuscule pour référer aux membres de la culture

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l’acquisition du langage ne seront pas présentés ici, par manque de travaux s’y rapportant. C’est notamment le cas des capacités pragmatiques et des capacités métalinguistiques qui à notre connaissance n’ont pas encore été étudiées de manière approfondie dans ce type de langues.

1.2.1. Acquisition d’une langue des signes par les enfants sourds de parents Sourds

L’acquisition d’une langue des signes comme langue maternelle est très comparable dans ses étapes à celle d’une langue orale. On retrouve ainsi une période de babillage, suivie des premiers mots (signes) isolés, de l’extension rapide du vocabulaire, puis d’énoncés à deux mots. On observe également les mêmes phénomènes de surgénéralisation que pour les langues orales (pour l’accord du verbe p.ex., appliqué d’abord à tous les verbes, alors qu’il ne concerne qu’une partie d’entre eux dans les langues des signes les plus étudiées). Cependant plusieurs travaux attestent que l’apparition du langage serait plus précoce en modalité gestuelle (Anderson & Reilly, 2002; Bonvillian & Folven, 1993), en raison notamment de l’avance de la motricité manuelle sur la motricité bucco-phonatoire chez les jeunes enfants (voir ci-dessous).

1.2.1.1. Babillage

Le babillage manuel consiste en productions répétitives de mouvements cycliques sans signification dans un espace délimité correspondant à l’espace qui est utilisé pour la production des signes par les adultes (Meier, Moreland, & Cheek, 2000; Petitto & Marentette, 1991). Il a été observé chez les bébés dans toutes les communautés de langue des signes

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étudiées (Emmorey, 2002). Comme pour le babillage vocal, la question de la continuité entre babillage et premières unités signifiantes reste ouverte, les premiers signes de la langue partageant avec les productions antérieures sans signification les mêmes emplacements et configurations (Emmorey, 2002).

1.2.1.2. Premiers signes, premières combinaisons de signes

Bonvillian et Folven (1993) décrivent les débuts du langage en ASL en se basant sur deux études longitudinales conduites par eux-mêmes et portant au total sur 22 enfants sourds et entendants dont au moins un des parents est Sourd. A partir de rapports parentaux, d’interviews et de séquences d’interactions filmées à domicile sur plusieurs mois, ils constatent que le développement du langage en langue des signes suit les mêmes étapes que celles décrites pour les langues orales, avec notamment l’apparition première de signes isolés produits dans des situations d’imitation ou dans des contextes ritualisés, puis utilisés pour dénommer et étiqueter de nouveaux objets ou événements, et par la suite des combinaisons de deux signes. Toutefois, l’âge d’apparition de ces différentes étapes semble plus précoce en langue des signes : les premiers signes reconnaissables sont observés entre 5 et 11 mois avec une moyenne de 8 mois et demi, et les premières combinaisons de deux signes entre 12 mois et demi et 22 mois, avec une moyenne de 16,7 mois. Cette précocité du développement du langage en langue des signes apparaît de manière encore plus frappante chez 5 sujets de l’étude, entendants de parents Sourd/entendant et ayant de ce fait un environnement parfaitement bilingue de naissance. En effet, dans chaque cas, on note une avance très nette du vocabulaire en langue des signes par rapport au vocabulaire de la langue orale. Au-delà de la deuxième année cependant, on ne constate plus de différence.

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Les auteurs évoquent des facteurs liés à la modalité particulière des langues des signes pour expliquer ces différences. En effet, les systèmes moteurs impliqués dans la modalité gestuelle ont une maturation plus précoce que ceux impliqués dans la modalité orale, le contrôle global œil-main se réalisant plus tôt que le contrôle audio-phonatoire. A cela s’ajoutent des avantages perceptifs d’auto-contrôle direct de l’enfant sur ses propres productions manuelles et la possibilité pour les parents de modeler les productions des enfants en façonnant la configuration attendue dans leurs mains. Cette précocité a été cependant questionnée (Petitto, 1988; Volterra & Casellli, 1985, cités par Bonvillian & Folven, 1993), arguant que les premiers signes sont des gestes conventionnalisés produits par tous les enfants de même âge. Toutefois, les auteurs obtiennent la même avance en langue des signes en éliminant les signes qui prêtaient à double interprétation. Ces résultats vont dans le même sens que plusieurs études de cas (voir pour une revue Bonvillian & Folven, 1993). Ils ont été confirmés récemment par une étude basée sur les informations provenant de rapports parentaux concernant 34 enfants sourds de parents Sourds suivis longitudinalement (ASL-CDI, Anderson & Reilly, 2002). Cette précocité ne semble pas non plus liée à la composante iconique des langues des signes. En effet, seuls un tiers des signes présents dans le premier répertoire des enfants relève de cette catégorie (Bonvillian & Folven, 1993).

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1.2.1.3. Acquisition de la phonologie2

Les premiers signes produits par les enfants correspondent à des versions simplifiées des formes standard adultes (baby signs) et semblent répondre aux contraintes du développement de la motricité (Dubuisson, Lelièvre, Parisot, & Vercaigne-Ménard, 2001; Meier et al., 2000; Boyes-Braem, 1990). Les signes sont composés de différents paramètres (voir section 1.4.1) qui sont acquis graduellement. Le premier paramètre acquis est l’emplacement, ou lieu d’articulation, puis vient le mouvement, puis la configuration de la main (Meier et al., 2000; Morford, 2000). Les paramètres secondaires tels que l’orientation de la main sont également acquis plus tardivement. En comparant les productions de deux enfants à l’âge de 2 ans, l’un apprenant l’ASL, l’autre la langue des signes espagnole, Holzricher, Knapp & Meier (2001) constatent le même pattern d’erreurs, à savoir davantage d’erreurs en ce qui concerne le mouvement et surtout la configuration, alors que l’emplacement est généralement correct. Ces résultats vont dans le sens de l’hypothèse que les contraintes motrices plutôt que linguistiques détermineraient l’acquisition de la phonologie en langue des signes.

L’acquisition des configurations se prolonge sur plusieurs années et ne serait maîtrisée que vers l’âge de 4 ans (Emmorey, 2002). Boyes-Braem (1990) propose un modèle de développement en quatre étapes. Les premières configurations produites par les enfants au cours des 12 premiers mois sont les plus simples à réaliser sur le plan moteur, et dérivent des activités de manipulation, à savoir la configuration neutre « A », les pointages (configuration

2 Par analogie aux langues orales, la phonologie des langues des signes se réfère aux unités distinctives de la

langue, bien que dans ce cas précis les unités (chérèmes ) n’aient aucun support phonique. En effet, les chérèmes correspondent aux paramètres de la formation des signes : configuration manuelle, emplacement, orientation, mouvement et expression du visage.

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G) et les configurations n’impliquant qu’une dissociation entre le pouce et/ou l’index et les autres doigts (en particulier les configurations S, L, bO, 5, C; voir Annexe A pour une illustration des configurations manuelles pour l’ASL). Lors d’une deuxième étape apparaissent les configurations « B », « F » et « O », qui sont utilisées uniquement dans un but communicatif. Puis dans les stades 3 et 4 surviennent les configurations plus complexes et aussi moins fréquentes dans la langue (respectivement I, Y, D, P, 3, V, H, W et 8, 7, X, R, T), qui impliquent sur le plan du contrôle moteur la différenciation de tous les doigts, l’inhibition sélective de certains et pour le stade 4 des croisements ou insertions. Boyes-Braem (1990) mentionne également que ces configurations peuvent être produites d’abord isolément avant d’être insérées dans un contexte linguistique combiné avec les autres paramètres des signes. Cet auteur relève sur le plan des erreurs une majorité de substitutions de configurations soit de même stade, soit de stades antérieurs.

Ces principes semblent régir l’acquisition de toutes les langues des signes. Ainsi, Dubuisson et al. (2001) constatent également en observant les signes de 3 enfants à l’âge de 3 et 4 ans apprenant la langue des signes québécoise (LSQ) qu’ils commettent moins d’erreurs sur les configurations les moins « marquées », c’est-à-dire n’exigeant que peu de modifications par rapport à la configuration neutre « A ». Boyes-Braem (1990) mentionne des études de cas en ASL, en langue des signes britannique (BSL) et en langue des signes finlandaise qui indique un pattern de développement très similaire.

1.2.1.4. Développement du lexique

La composition du premier lexique, en terme de catégories sémantiques et grammaticales, est très similaire en ASL et en anglais. On y répertorie ainsi davantage de

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noms que de mots d’action ou de mots foncteurs, référant principalement aux animaux, véhicules et objets ménagers familiers (Bonvillian & Folven, 1993). Une étude récente (Anderson & Reilly, 2002) nous donne des informations plus détaillées sur la composition du premier lexique des enfants sourds de parents Sourds. En utilisant une version qu’elles ont adaptée pour l’ASL du MacArthur Communicative Development Inventory, ces auteurs ont suivi le développement du langage de 34 enfants. Les données ainsi récoltées fournissent des indications sur les signes produits sur la période de 8 à 35 mois. Les productions ont été classées sur le plan sémantique à partir d’une liste de 20 catégories et sur le plan syntaxique en trois catégories majeures : noms, prédicats et signes de classe fermée.

Une comparaison des 35 premiers signes utilisés par l’ensemble des sujets avec les normes pour la langue anglaise indique de grandes similarités, à l’exception des cris d’animaux qui sont sans surprise totalement absents du répertoire en ASL. Les verbes cognitifs apparaissent dans le même ordre qu’en anglais et à des âges comparables (WANT3 à 18 mois environ, LIKE vers 24 mois, THINK entre 30 et 36 mois).

Au niveau des catégories syntaxiques, les noms prédominent nettement, particulièrement lors des premiers mois. Les signes appartenant aux autres catégories apparaissent aux alentours de 12 mois. Lorsque la taille du lexique atteint 100 signes, le rapport noms/prédicats se modifie, avec une courbe fléchissant pour les noms et une courbe croissant pour les prédicats. Ce pattern est décrit comme très proche de celui observé en anglais, à la différence près que le nombre de prédicats est en tout temps plus élevé en ASL qu’en anglais. Les auteurs attribuent cette constante à la structure particulière de l’ASL, qui

3

Dans ce travail, les productions en langue des signes seront transcrites selon la convention habituelle, en utilisant pour chaque signe la forme française/anglaise la plus proche, en majuscules, afin de distinguer ces productions de celles en langue orale. Pour la transcription des énoncés, l’ordre des mots correspond à celui de la production et peut, dans les extraits cités, respecter ou non la syntaxe de la langue des signes, qui est très différente de celle des langues orales. Une partie des verbes ont une forme fixe dans les langues des signes, rendue par la forme infinitive française/anglaise dans ce système de transcription.

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donne une place très saillante au verbe, placé souvent en première ou dernière position dans la phrase (structures de type OSV de topicalisation et verbes incorporant S et O, voir ci-dessous et section 1.4.1).

Une dernière particularité du développement en ASL, relevée par Bonvillian et Folven (1993) et Anderson & Reilly (2002), est que l’accroissement de la taille du lexique se fait de manière linéaire, contrairement au développement des langues orales qui voit typiquement une explosion du vocabulaire au milieu de la deuxième année.

1.2.1.5. Acquisition de la morphosyntaxe

L’étude de l’acquisition de la morphosyntaxe en ASL est encore très parcellaire. Une des raisons est sans doute liée à la complexité de la tâche : en effet, les informations morphosyntaxiques sont codées spatialement et au moyen de différentes parties du corps simultanément (regard, mouvement des sourcils, mouvements labiaux, inclinaison de la tête, du buste, accompagnant les mouvements des mains) rendant toute analyse très difficile. Le codage, en particulier, ressemble presque, si l’on veut prendre en compte toutes les composantes de production, à une partition musicale (voir par exemple le système de transcription adopté dans le Projet LS-COLIN, Braffort et al., 2001). Dans cette section nous présenterons principalement les aspects les plus pertinents par rapport à notre étude.

Acquisition des pronoms

La première forme de pronoms produite par les enfants est réalisée par les procédés de pointage, sur soi, autrui ou un espace tiers pour référer à des personnes non présentes dans la situation de communication. Si, comme pour les enfants apprenant une langue orale, les

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enfants apprenant une langue des signes savent effectuer le geste communicatif de pointer aux environs de 9 mois, ce n’est que vers 18-24 mois qu’ils commencent à produire des pronoms, en commettant cependant des erreurs d’inversions. La maîtrise des pointages concernant les objets et personnes présents survient entre 2 ans et 2 ans et demi (Emmorey, 2002), tandis que l’usage du pointage pour des référents absents, qui requiert d’assigner arbitrairement une place au référent dans une portion de l’espace puis de s’y référer par la suite, n’est compris que vers 3 ans et produit que vers 3 ans et demi, et entre 4 ans et 4 ans et demi pour plusieurs référents (Lepot-Froment, 2000; Maller, Singleton, Supalla, & Wix, 1999).

Acquisition des formes verbales

Les langues des signes comprennent une sous-classe de verbes dits directionnels, dont la trajectoire dans l’espace (départ et arrivée) code le sujet et l’objet. Par exemple, en LSF, le verbe TELEPHONER qui se produit avec la configuration « Y » voit sa trajectoire modifiée par l’accord avec le sujet et l’objet. Ainsi, si le sujet est l’énonciateur (1ère personne), le mouvement part du corps en direction de la personne objet du verbe alors que si le sujet est une autre personne que l’énonciateur, le point de départ du mouvement sera le point de l’espace précédemment assigné à cette personne (voir Moody (1983) pour plus de détails en LSF ou Schembri (2003) pour une description plus générale).

Lors des premières phases de l’acquisition de ces formes, les enfants ont tendance à utiliser la forme standard du verbe sans modifier la trajectoire, ou à produire des erreurs de direction du mouvement (mouvement inverse). Vers 3 ans – 3 ans et demi, les formes sont maîtrisées pour les référents présents. Les erreurs les plus fréquentes pour les référents absents consistent à utiliser différents emplacements pour évoquer le même référent en produisant donc des mouvements avec des trajectoires différentes, ou à utiliser le même

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emplacement pour différents référents, créant ainsi une ambiguïté (Newport & Meier, 1986). Ces auteurs décrivent aussi une phase pendant laquelle les enfants produisent les différents morphèmes liés au verbe de manière séquentielle (par exemple la direction du mouvement puis la manière, avec répétition du verbe) au lieu de la forme simultanée adulte (direction et manière exprimées simultanément). On observe également une surgénéralisation de l’accord verbal, avec modification des verbes non-directionnels. Le système verbal est finalement maîtrisé en compréhension vers 5 ans et en production entre 5 et 6 ans (Emmorey, 2002; Lepot-Froment, 2000), voire entre 7 et 8 ans pour les formes à multiples morphèmes (Newport & Meier, 1986).

Acquisition des classificateurs

Les classificateurs sont des signes complexes que l’on retrouve dans toutes les langues des signes étudiées, même si leurs formes varient (Aikhenvald, 2003), et qui concentrent une quantité d’informations de niveaux linguistiques différents. Ils ont une fonction descriptive permettant de spécifier les caractéristiques d’un objet, d’un animal ou d’une personne (taille, forme, épaisseur, matière, orientation, nombre, localisation, déplacement; Kegl, 1976), ainsi qu’une fonction anaphorique intermédiaire entre l’anaphore nominale et pronominale, ce qui a conduit Moody (1983) à les qualifier de « super-pronom ». Emmorey les définit comme suit : « classifier constructions are used to described the location, motion, and visual-geometric properties of objects within a scene. The movement and location of the hands in signing space can schematically represent the motion and location of objects in the world in an isomorphic fashion. Choice of handshape in a classifier construction is based on semantic and visual-geometric properties of an object and is also affected by aspects of the action to be described.” (Emmorey, 2002; p. 194).

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Les classificateurs peuvent être incorporés dans les formes nominales, adjectivales ou verbales dont ils modifient certains des paramètres (configuration, emplacement, mouvement). Ils présentent également des composantes non-manuelles (Slobin et al., 2003). Ils constituent une des parts les plus créatives des langues des signes. En effet, comme le constate Anthony, « several different classifier handshapes may be used to represent a particular noun, depending on different semantic, syntactic, and pragmatic contexts" (Anthony, 2002; p. 41).

Bien que l’emploi du terme « classificateur » soit contesté par nombre de linguistes du fait que ces constructions n’ont pas pour fonction première de classifier les entités auxquelles elles se réfèrent (pour une revue récente voir (Schembri, 2003); pour la LSF (Cuxac, 1997), cela reste le terme conventionnel, parfois utilisé avec des guillemets (Slobin et al., 2003). La typologie la plus simple distingue trois catégories majeures de classificateurs (Schembri, 2003) : Handle handshapes, classificateurs de préhension, qui représentent soit la manière dont la main prend un certain type d’objet, soit la forme de l’objet pris, Entity handshapes, classificateurs sémantiques représentant une catégorie d’objet telle que quadrupèdes, personnes, véhicules, et les SASS, Size and Shape Specifiers, décrivant les caractéristiques visuo-géométriques d’un objet. Certains auteurs y ajoutent la catégorie Body and body part classifiers dans laquelle non seulement les mains mais une partie du corps ou le corps entier sont impliqués (Morgan & Woll, 2003).

La complexité des constructions incorporant des classificateurs rend leur maîtrise particulièrement tardive (8-9 ans) et requiert notamment des capacités à coordonner les deux mains pour représenter simultanément figure et fond, indiquer la perspective narrative choisie

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(voir section discursive ci-dessous), exprimer des déplacements et variations aspectuelles à l’intérieur de prédicats, et choisir l’échelle de grandeur appropriée (Emmorey, 2002).

Slobin et al. (2003) décrivent des premières formes, souvent approximatives, de classificateurs de préhension et de classificateurs sémantiques chez des enfants au courant de leur troisième année. Ces auteurs relèvent notamment des erreurs d’orientation de la main et des confusions dans le choix des configurations entre les objets de deux et de trois dimensions. Supalla (1982, mentionné par Slobin et al., 2003) décrit chez trois enfants suivis de 3;6 ans à 5;11 ans trois types d’erreurs : la sur-utilisation de configurations neutres ou peu marquées, l’emprunt de signes lexicaux et des déplacements corrects mais sans spécification de l’objet en déplacement. Schick (1990, mentionné par Slobin et al., 2003) étudiant 24 enfants entre 4;5 et 9;0 ans constate que les classificateurs de préhension sont difficiles à obtenir dans une tâche de description d’une image, alors que ces classificateurs sont présents dans les corpora de Slobin et al. (2003) dans des situations de manipulations d’objets bien plus précocement. Les classificateurs sémantiques apparaissent avant les SASS. Dans les situations de contraste figure/fond ou d’expression de relations spatiales entre deux objets, l’objet fixe est souvent omis ou mentionné préalablement ou encore mentionné avec une configuration neutre (Emmorey, 2002). Les premières formes de ce type apparaissent entre 3 et 4 ans mais ne sont pas maîtrisées avant l’âge de 8 ans (Maller et al., 1999; Kantor, 1980, cité par Anthony, 2002). Une étude récente réalisée avec des enfants apprenant la langue des signes britannique (BSL) montre un développement également tardif des Body classifiers, qui sont compris en situation expérimentale seulement par 40% des enfants entre 3 et 5 ans, par 70% des 6-9 ans et 90% des 9-12 ans et produits correctement par 40% des 6-9ans et 70% des 9-12 ans (Morgan & Woll, 2003).

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1.2.1.6. Développement des capacités discursives

Les capacités discursives des enfants en langue des signes sont encore peu étudiées. Les travaux existants se concentrent principalement sur la production des narrations et en particulier les procédés de cohésion anaphorique ainsi que les changements de perspectives, spécifiques aux langues des signes (voir ci-dessous).

Les langues des signes permettent en effet par des procédés originaux de combiner à l’intérieur d’une même narration différentes perspectives, décrivant une histoire à partir de différents points de vue physiques/psychologiques. Le narrateur peut ainsi décrire une scène visuellement depuis différents points de vue et peut aussi choisir de raconter l’histoire ou une partie de celle-ci en prenant le rôle d’un ou plusieurs des protagonistes, s’exprimant et agissant au nom de ces derniers (Poulin & Miller, 1994). Ces procédés, regroupés sous l’appellation referential shift par Emmorey (2002), sont maîtrisés tardivement par les enfants. Ils se manifestent par une modification de la position du buste et un changement de la direction du regard, indiquant le passage d’une perspective à l’autre. Maller et al. (1999) mentionnent que le passage entre la perspective du narrateur et une prise de rôle apparaît dans les productions des enfants vers 3;6 ans, et les prises de rôles multiples au cours de la cinquième année. Slobin et al. (2003) relèvent dans leurs données que les enfants de 5 ans ont tendance à conserver la perspective du narrateur tout au long de la narration alors que les enfants âgés de 12 ans passent avec aisance d’une perspective de protagoniste à une autre. Mann (2001) observe le même contraste entre des sujets de 8-11 ans et leurs aînés de 12-13 ans. Emmorey (2002) mentionne une étude réalisée par Reilly qui indique que les prises de rôle impliquant la citation des paroles d’un protagoniste seulement sont maîtrisées autour de l’âge de 7 ans et bien avant celles qui impliquent de « jouer » les actions d’un personnage.

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Les procédés de cohésion se réalisent en recourrant à l’usage de l’espace, notamment au moyen des pointages (introduction de nouveaux référents), des verbes directionnels, ainsi que de constructions complexes incluant classificateurs et changements de rôle décrits ci-dessus (maintien de référents). Anthony (2002) décrit que les meilleurs narrateurs en ASL utilise abondamment l’ensemble de ces procédés en les combinant dans des structures complexes (classifier predicates packages) qui augmentent la cohésion et la cohérence de la production. Ces structures ne sont cependant maîtrisées qu’au cours de l’adolescence et Slobin et al. (2003) notent que "even 12-year-olds do not use the entire set of options in adultlike fashion" (p.287). Ces auteurs relèvent également qu’à l’âge de 5 ans les enfants omettent régulièrement d’introduire les référents avant d’utiliser un classificateur, ce qui rend leurs productions ambiguës. Mann (2001) constate une évolution entre les élèves de 8-11 ans et ceux de 12-13 ans : les premiers utilisent beaucoup de marqueurs manuels tels que pointages et classificateurs isolés, alors que les seconds recourent moins à ces procédés isolément, préférant les intégrer dans des structures impliquant des prises de rôle complètes.

1.2.2. Acquisition d’une langue des signes par les enfants sourds de parents entendants

Nous évoquerons ici la situation des enfants sourds qui ne sont pas nés de parents Sourds mais qui sont entrés en contact avec une langue des signes dans les premières années de vie, soit par leurs parents désireux de les introduire à cette langue qu’ils sont eux-même en train d’apprendre, soit dans le cadre de guidance et d’activités pré-scolaires. Ces enfants sont ainsi exposés à une expérience langagière retardée, limitée aux interactions qui sont mises en place spécifiquement pour eux et restreinte par les capacités linguistiques développées par leurs interlocuteurs dans la langue visée (Morford, 2000).

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Peu d’études ont été réalisées systématiquement sur le développement langagier spécifique de cette population par ailleurs extrêmement hétérogène. Beaucoup de travaux mentionnent un développement retardé comparativement à celui des enfants sourds de parents Sourds, en particulier dans les premières années, mais qui serait rattrapé dans la deuxième partie de l’enfance pour les enfants suivant un programme bilingue (Schönström, Simper-Allen, & Svartholm, 2003; Anthony, 2002; Vercaingne-Ménard, 2002). Slobin (2002), par contre, affirme que le développement des enfants de parents Sourds et entendants est similaire dès les premières années, assurant que même un « input imparfait », tel que celui qu’un parent en train d’apprendre la langue peut offrir, serait suffisant pour assurer un développement du langage normal. Dans un travail collectif (Slobin et al., 2003), cet auteur donne des exemples de productions approximatives de classificateurs dans une tâche de manipulation chez les enfants sourds de parents entendants dès la troisième année, tout comme chez les enfants de parents Sourds. Lindert (2001), étudiant en détails trois enfants de la même population, décrit la qualité du langage fourni par leurs mères entendantes (toutes en train d’apprendre la langue des signes) et les conséquences sur l’acquisition des classificateurs par les enfants. Elle conclut que même des formes en variété réduite, et pour nombre d’entre elles non conventionnelles, semblent constituer un matériel suffisamment riche pour que les jeunes enfants construisent un système linguistique complexe.

Vercaingne-Ménard (2002) décrit l’évolution des enfants de classes élémentaires et primaires suivant un programme bilingue français/LSQ. Elle constate des progrès au cours de l’année scolaire, en l’espace de quelques mois, sur certains aspects de la langue des signes. Par exemple, les enfants maîtrisent de mieux en mieux les marques spatiales. D’autre part, ils développent des procédés pour maintenir la référence et de ce fait produisent moins de

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répétitions. L’espace morphosyntaxique reste très difficile à maîtriser alors que les enfants en fin d’année commencent à utiliser l’espace sur le plan topographique. Ainsi, il semble qu’un programme ciblé, incluant l’enseignement systématique de composantes de la langue des signes, permette un développement optimal des capacités langagières. Singleton et al. (Singleton, Supalla, Litchfield, & Schley, 1998) insistent sur la nécessité pour les enfants sourds de parents entendants de bénéficier d’un environnement riche sur le plan de la langue des signes, tel qu’un établissement en internat bilingue peut offrir.

Dans une autre étude, Vercaingne-Ménard et al. (Vercaingne-Ménard, Godard, & Labelle, 2001) étudient les narrations de deux enfants sourds de parents entendants entre 4 et 7 ans qui ont eu un contact précoce avec la LSQ. Ces auteurs notent que les enfants ne sont autonomes pour raconter l’histoire d’un dessin animé qu’ils viennent de voir que dans leur septième année. Par ailleurs, ces enfants utilisent que très peu de classificateurs, et produisent les verbes principalement dans leurs formes standard, sans modulation morphologique. De même, ils ne produisent que très peu de références spatiales et beaucoup de connecteurs en compensation (APRES, DANS, SUR). Anthony (2002) étudie les narrations d’enfants sourds de 9 et 12 ans, de parents Sourds et entendants. Elles constatent que les signeurs les plus faibles du groupe produisent moins de classificateurs et moins de structures complexes comprenant plusieurs classificateurs combinés. Elle cite également une étude de Galvan montrant que les signeurs non natifs produisent beaucoup moins de Body classifiers que les signeurs de naissance. Sur le plan des changements de perspectives et de prises de rôle, elle note que les faibles signeurs conservent généralement le point de vue du narrateur tout au long du récit alors que les signeurs forts du même âge produisent plus de 11 changements par narration. Les narrations des faibles signeurs ressemblent à la description faite par

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Vercaingne-Ménard et al. (2001) : utilisation de signes standard, quelques classificateurs simples, transition entre épisodes par un signe lexical (THEN), manque de cohésion. Toutefois, il faut noter que parmi les signeurs forts on trouve également des enfants de parents entendants, qui apparemment ont su développer des capacités comparables à celles de leurs pairs natifs. Il serait intéressant de savoir les raisons de leur réussite.

1.2.3. Conséquences d’une exposition tardive à la langue des signes

Certains chercheurs ont tenté de déterminer les conséquences d’une exposition plus tardive à une langue des signes comme première langue, dans la deuxième partie de l’enfance ou à l’adolescence (Mayberry, Lock, & Kazmi, 2002; Morford, 2000; Mayberry, 1993; Newport, 1990). Il apparaît que certains domaines du langage semblent plus sensibles que d’autres à l’âge d’acquisition. Ainsi, Morford (2000), dans une étude de cas portant sur deux sujets apprenant l’ASL comme première langue à l’adolescence, constate sur le plan phonologique que l’acquisition des configurations manuelles ne semble pas poser de difficulté : en l’espace d’une année, les deux sujets parviennent à produire plus des 2/3 des configurations de l’ASL et commettent peu d’erreurs, principalement des substitutions vers la configuration neutre « 5 », avec une main relâchée. L’âge d’acquisition de la langue des signes semble par contre avoir un effet sur la compréhension et la production de la morphologie complexe en ASL (Newport, 1990), sur le traitement des structures syntaxiques (Boudreault & Mayberry, 2000) et sur la vitesse de reconnaissance des signes présentés de manière isolée (Emmorey & Corina, 1990, cité par Emmorey, 2002).

Mayberry et Fisher (cité par Mayberry & Fischer, 1989) observent que les signeurs natifs arrivent mieux à répéter une histoire signée et à répondre à des questions de

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compréhension que des signeurs tardifs. Les erreurs de substitutions lexicales qu’ils commettent ne sont pas de même type : les signeurs natifs produisent des erreurs sémantiques, indiquant un traitement de sens, tandis que les signeurs tardifs commettent des erreurs phonologiques, traces d’un traitement de surface. Dans une autre étude (Mayberry & Eichen, 1991), ces chercheurs interrogent 49 adultes sourds qui utilisent l’ASL depuis 42 ans en moyenne et qui ont été exposés à cette langue durant l’enfance, de manière précoce ou plus tardive (à l’âge de 13 ans pour certains). Dans une tâche de répétitions de phrases longues et complexes en ASL, elles notent que plus l’âge d’acquisition de l’ASL augmente, plus le nombre d’erreurs augmente, la grammaticalité des réponses diminue et les erreurs phonologiques remplacent les erreurs sémantiques. Mayberry (1993) étudie également 4 groupes de sujets sourds (4 x 9 sujets) pratiquant l’ASL depuis 20 ans ou plus mais l’ayant acquis à différentes périodes : entre 0 et 3 ans, 5 et 8 ans, 9 et 13 ans, ainsi qu’un groupe de sourds post-linguaux ayant appris l’ASL comme langue seconde (L2). Dans une tâche similaire de répétitions de phrases longues et complexes, cet auteur relève que les sujets ayant appris l’ASL comme langue seconde se comportent comme les signeurs natifs : ils produisent essentiellement des erreurs sémantiques, attestant d’une bonne compréhension des stimuli. Les sujets ayant appris l’ASL tardivement comme première langue commettent au contraire en plus des erreurs sémantiques des erreurs phonologiques. Ces derniers ont également plus de difficultés à juger les phrases sur le plan grammatical et sur le plan sémantique. Ainsi, c’est bien l’acquisition d’une langue des signes comme langue première qui semble problématique. Singleton et al. (1998) rapportent que les enfants sourds qui ont accès à l’ASL avant l’âge de 6 ans se comportent comme des locuteurs natifs sur nombre de tâches évaluant les compétences en production et compréhension des structures grammaticales ASL et recommandent donc une exposition précoce.

Figure

Tableau 3.1.1 : Caractéristiques du groupe expérimental (N=39)
Tableau 3.1.2 : Caractéristiques du groupe contrôle (N=40)
Figure 3.2.4 : schéma récapitulatif de l’ensemble des épreuves
Tableau 3.4.1 : Calcul des notes globales LSF et français écrit   LSF  Points  Notes standardisées
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Références

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