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L'utilisation de la bande dessinée de superhéros comme outil didactique pour travailler la pensée critique chez les étudiants en classe d'histoire au collégial

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Academic year: 2021

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(1)

© Emilie St-Amand, 2019

L'utilisation de la bande dessinée de superhéros comme

outil didactique pour travailler la pensée critique chez

les étudiants en classe d'histoire au collégial

Mémoire

Emilie St-Amand

Maîtrise en didactique - avec mémoire (M.A.)

Maître ès arts (M.A.)

(2)

L’utilisation de la bande dessinée de superhéros comme

outil didactique pour travailler la pensée critique chez

les étudiants en classe d’histoire au collégial

Mémoire

Emilie St-Amand

Sous la direction de :

(3)

ii

Résumé

En histoire, l’utilisation de la bande dessinée (BD) comme outil didactique se limite généralement à un seul genre de BD, la bande dessinée à caractère historique, qui contient de façon consciente et planifiée des éléments historiques. Il existe une multitude de genres de BD qui ne sont pas utilisés en histoire. Ce mémoire propose d’utiliser un autre genre de BD pour l’enseignement de l’histoire au collégial, la bande dessinée de superhéros (BDSH), qui ne contient pas de façon consciente et planifiée des éléments historiques et qui nécessite l’application du processus de la pensée critique pour être étudié et interprété. Ce mémoire vise à comprendre comment la BDSH peut constituer un outil didactique pour travailler la pensée critique chez les étudiants en classe d’histoire au collégial. Pour répondre à notre objectif, nous avons eu recours à la recherche documentaire comme méthodologie de recherche qui nous a permis d’identifier les avantages et les prérequis de l’utilisation de la BDSH pour travailler la pensée critique. Cette méthode nous a également permis de présenter une synthèse (sous forme de tableau) des apports historiques et didactiques possibles identifiés par l’application du processus de la pensée critique sur trois BDSH produites entre 1941 et 1944 aux États-Unis et au Canada et discutant de la Deuxième Guerre mondiale. Nos conclusions nous ont permis d’établir que la BDSH, en étant une source primaire, peut-être un objet approprié et pertinent pour développer la pensée critique chez les jeunes adultes et pour l’enseignement et l’apprentissage de l’histoire au collégial. Dans des recherches futures, il serait intéressant d’étudier l’utilisation d’autres genres de BD afin de voir les apports spécifiques que chacun de ces genres comme la BDSH et son apport spécifique du filet de sécurité.

Mots clés : bande dessinée de superhéros, enseignement de l'histoire, collégial, recherche documentaire, pensée critique.

(4)

iii

Table des matières

Résumé ... ii

Table des matières ... iii

Liste des tableaux ... vii

Liste des figures ... viii

Liste des abréviations ... ix

Remerciements ... xii

Introduction ... 1

Chapitre 1 : Problématique ... 4

1.1. État de la question ... 4

1.2. Problème et question de recherche principale ... 10

1.3. Questions de recherche secondaires ... 10

1.4. Objectifs de recherche ... 10

1.5. Les concepts de recherche ... 10

1.6. Justification épistémologique ... 11

Chapitre 2 : Cadre conceptuel ... 13

2.1. La bande dessinée ... 13

2.1.1. Les origines ... 13

2.1.2. La définition de la bande dessinée ... 14

2.1.3. Les composantes ... 16

2.1.4. La lecture de la bande dessinée et l’ensemble des compétences qu’elle exige ... 18

2.1.4.1. Les étapes de lecture ... 18

2.1.4.2. Les compétences ... 20

2.2. Le superhéros comme un genre de la bande dessinée ... 22

2.2.1. Les origines ... 22

2.2.2. La définition du superhéros comme genre de la bande dessinée et ses composantes ... 23

2.2.2.1. Le superhéros ... 24

2.2.2.2. Le supervilain ... 26

2.2.2.3. La mégapole ... 29

2.2.3. Les différents âges de la BDSH ... 30

2.2.3.1. L’âge d’or (1938-1955) ... 30

2.2.3.2. L’âge d’argent (1956-1969) ... 31

2.2.3.3. L’âge de bronze (1970-1985) ... 31

2.2.3.4. L’âge moderne ou l’âge noir (1986-1998) ... 32

2.2.3.5. L’âge postmoderne (1999-présent) ... 33

2.3. La pensée critique ... 34

2.3.1. Les origines ... 34

2.3.2. La définition de la pensée critique et ses composantes ... 35

2.3.3. La place de la pensée critique dans l’éducation collégiale ... 38

Chapitre 3 : Méthodologie de recherche ... 40

3.1. Description de notre méthodologie sur le premier objectif secondaire : Identifier les avantages et les prérequis de l’utilisation de la BDSH pour travailler la pensée critique ... 41

(5)

iv

3.2. Description de notre méthodologie sur le second objectif secondaire : Présenter une synthèse (sous forme de tableau) des apports historiques et didactiques possibles d’une sélection de BDSH

pour travailler la pensée critique ... 44

Chapitre 4 : Les avantages et les prérequis de l’utilisation de la BDSH pour travailler la pensée critique ... 48

4.1. Les avantages et les prérequis de l’utilisation de la BDSH pour travailler la pensée critique chez les jeunes adultes ... 48

4.1.1. L’étudiant du collégial et ses caractéristiques générales ... 48

4.1.2. La pensée critique et les jeunes adultes ... 49

4.1.2.1. La motivation, un prérequis pour travailler la pensée critique chez les jeunes adultes ... 50

4.1.3. Les jeunes adultes et la bande dessinée ... 51

4.1.3.1. La bande dessinée et les habitudes de lecture des jeunes adultes ... 51

4.1.4. Le superhéros comme un genre de la bande dessinée et les jeunes adultes ... 51

4.1.4.1. Le SH, un univers simple d’approche pour les jeunes adultes ... 52

4.1.4.2. Le SH, un filet de sécurité pour ses lecteurs ... 54

4.2. Les avantages et les prérequis de l’utilisation de la BDSH pour travailler la pensée critique relativement au développement les compétences et les concepts historiques dans les cours d’histoire au collégial ... 56

4.2.1. L’enseignement de l’histoire au collégial et le développement de la pensée critique avec la BDSH ... 56

4.2.2. Les compétences et les concepts historiques développés dans les cours d’histoire au collégial grâce à l’utilisation de la pensée critique avec la BDSH ... 57

4.2.2.1. La source historique ... 57

4.2.2.2. La pensée historique ... 58

La source et les connaissances préalables à sa lecture ... 59

La perspective historique ... 60

4.2.2.3. La citoyenneté et l’éducation à la citoyenneté ... 62

4.3. Les avantages de l’utilisation de la BDSH pour travailler la pensée critique relativement aux visées et aux compétences à développer au collégial ... 66

4.3.1. La formation collégiale et ses caractéristiques ... 67

4.3.2. Les éléments des visées et des compétences communes à développer au collégial travaillés grâce à l’utilisation de la pensée critique avec son objet d’étude, la BDSH ... 67

4.3.2.1. La pensée critique ... 67

4.3.2.2. L’ouverture d’esprit ... 68

4.3.2.3. Les habiletés d’analyse, de synthèse et de recherche ... 68

4.3.2.4. Le transfert de connaissances ... 68

4.3.2.5. La citoyenneté ... 69

4.3.2.6. L’expression culturelle et son appréciation ... 69

Chapitre 5 : Élaboration d’un tableau des apports historiques et didactiques possibles de l’application du processus de la pensée critique sur une sélection de BDSH ... 73

5.1. Présentation des différentes étapes de la sélection et des BDSH sélectionnées ... 73

5.1.1. Les étapes de sélection de BDSH ... 74

5.1.2. Les bandes dessinées de superhéros sélectionnées... 76

5.2. Les connaissances préalables générales et spécifiques nécessaires à notre corpus de BDSH pour l’application du processus de la pensée critique ... 77

5.3. Présentation et justification des résultats obtenus par l’application du processus de la pensée critique à notre sélection de bandes dessinées de superhéros ... 80

(6)

v

5.3.1.1. Les évènements historiques ... 81

La Deuxième Guerre mondiale ... 81

Une guerre mondiale et totale ... 81

Les horreurs de la guerre ... 82

L’Axe ... 82

Le Japon ... 82

L’attaque de Pearl Harbor ... 82

L’appel à la libération des peuples colonisés ... 83

L’Allemagne... 84

L’invasion de la Russie ... 84

L’Italie ... 84

L’invasion de l’Éthiopie ... 84

5.3.1.2. Les personnages historiques ... 85

L’Antiquité et la mythologie gréco-romaine ... 85

Mars, dieu de la guerre ... 85

Aphrodite, déesse de l’amour ... 85

Athéna, déesse de la sagesse, Hercule, demi-dieu, et Mercure, messager des dieux .... 85

La Deuxième Guerre mondiale ... 86

L’Axe ... 86

Le Japon ... 86

Hiro-Hito, empereur du Japon (1901-1989) ... 86

Tojo Hideki (1884-1948)... 86

L’Allemagne... 87

Adolf Hitler (1889-1945) ... 87

Hermann Goering (1893-1946) ... 88

Joseph Paul Goebbels (1897-1945 ... 88

Heinrich Himmler (1900-1945) ... 88

L’Italie ... 88

Benito Mussolini (1883-1945) ... 88

5.3.1.3. Les concepts historiques... 89

La propagande ... 89

La citoyenneté ... 91

Le colonialisme ... 95

5.3.2. Les apports didactiques ... 96

5.3.2.1. Les apports didactiques possibles en classe d’histoire ... 96

La pensée historique ... 96

La source historique et son étude ... 97

La perspective historique ... 97

Le transfert de connaissances historiques dans une situation nouvelle ... 98

Le filet de sécurité ... 99

5.3.2.2. Les apports didactiques possibles au sein de la formation générale et commune au collégial ... 100

La pensée critique ... 101

La motivation et la persévérance scolaire ... 101

L’ouverture d’esprit ... 101

Le transfert de connaissances dans une situation nouvelle ... 102

La citoyenneté ... 103

Les habiletés d’analyse, de synthèse et de recherche ... 103

(7)

vi

5.4. Tableau récapitulatif des apports historiques et didactiques obtenus par l’application du processus de la pensée critique sur une sélection de BDSH produites aux États-Unis et au Canada

entre 1941 et 1944 ... 105

Conclusion générale ... 110

Bibliographie ... 114

A. Bibliographie générale ... 114

B. Bibliographie des bandes dessinées utilisées et citées ... 124

Annexes ... 127

Annexe A : Analyse statistique chiffrée ... 127

(8)

vii

Liste des tableaux

Tableau 1 : Récapitulatif des apports didactiques et historiques possibles de l’application du processus de la pensée critique sur une sélection de trois BDSH produites durant aux États-Unis et au Canada entre 1941 et 1944 ... 107-108 Tableau 2 : Répartition des types de bandes dessinées au sein des articles discutant de la bande dessinée et de l’enseignement de l’histoire depuis l’an 2000... 128

(9)

viii

Liste des figures

Figure 1 : Récapitulatif des catégories et des sous-catégories des apports identifiés par l’application du processus de la pensée critique à un corpus de BDSH ... 80 Figure 2 : Récapitulatif des composantes principales de la bande dessinée ... 134

(10)

ix

Liste des abréviations

B Bucky

BD Bande dessinée/Bandes dessinées

BDH Bande dessinée à caractère historique/Bandes dessinées à caractère historique

BDSH Bande dessinée de superhéros/Bandes dessinées de superhéros CA Captain America

CAC Captain America Comics

CCA Comics Code Authority

DGM Deuxième Guerre mondiale JA Jeune adulte/Jeunes adultes NNL Nelvana of the Northern Lights

SH Superhéros

SV Supervilain/Supervilains WW Wonder Woman

(11)

x

Je dédie ce mémoire à tous ceux qui, comme moi, sont passionnés par l’univers des

(12)

xi

« Children [and grown up] need to feel

strong. They need to feel powerful in the face

of a scary, uncontrollable world.

Superheroes […] are symbols of strengh »

(13)

xii

Remerciements

Au terme de cette passionnante et trop courte aventure, j’aimerais prendre quelques lignes pour remercier comme il se doit les personnes qui m’ont soutenue et encouragée tout au long de la rédaction de ce mémoire.

Tout d’abord, je voudrais remercier mon professeur de didactique des sciences humaines au collégial I et II, Clotaire Assoume Mendene, qui m’a parlée du programme de didactique et qui m’a encouragée à entreprendre des études supérieures en didactique de l’histoire.

Ensuite, j’aimerais tout particulièrement remercier mon directeur de recherche, Jean-François Cardin, de m’avoir permis d’entreprendre ce mémoire. J’aimerais également le remercier d’avoir fait preuve d’une grande ouverture d’esprit, de m’avoir conseillée, de son soutien constant, de sa grande disponibilité et de nos longues discussions.

J’aimerais également remercier tout particulièrement ma mère, Lyne Rouillard. Et oui, je t’avais dit que ton nom serait dans mon mémoire ! Merci d’avoir toujours été présente pour moi, de m’avoir écouté des heures au téléphone parler de mon mémoire et de mes inquiétudes, de m’avoir dit que j’étais capable et de m’avoir transmis l’amour de la lecture et du travail bien fait.

Je tiens aussi à remercier mes amies pour leur présence, leur écoute et nos échanges intellectuels. Pour finir, merci à l’ensemble de mes lecteurs (Jean-Didier, Jean-Louis, Marie-Ève et Maxime) pour leur travail assidu. Vos réflexions et vos commentaires m’ont permis d’améliorer et de retravailler considérablement mon mémoire.

(14)

1

Introduction

L’enseignement et l’apprentissage de l’histoire peuvent se faire par l’utilisation d’une grande variété de moyens comme le manuel scolaire, les archives, la nourriture, les jeux vidéo, les bandes dessinées (BD), la musique, etc. Plusieurs enseignants1 du primaire, du secondaire, du cégep et de l’université choisissent d’utiliser la bande dessinée comme un outil d’enseignement et d’apprentissage (Carano et Clabough, 2016; Charrette, 2010; Christensen, 2006; Delorme, 2010; Guay et Charrette, 2009; Sheffield, Chisholm et Howell, 2015). On peut voir chez ces auteurs que l’utilisation de la BD comme outil didactique en classe d’histoire permet de développer différentes compétences historiques comme « l’empathie historique » (Sheffield et al., 2015, p. 148) ainsi que plusieurs savoirs historiques comme des connaissances sur « la Grande Guerre [, sur] le génocide arménien [et sur] la Seconde Guerre mondiale » (Delorme, 2010, p. 75). Lorsque l’on s’arrête un instant pour examiner les bandes dessinées utilisées dans ses études, on peut voir que l’ensemble de ces auteurs n’utilise qu’un seul genre de BD, la bande dessinée à caractère historique (BDH). Ce genre de BD contient de façon consciente et planifiée un contenu historique et, dans certains cas, peut-être « prémâché », c’est-à-dire qu’il est construit dans le but de communiquer des savoirs historiques. Mais il existe un grand éventail de genres de BD qui sont peu ou pas utilisés en classe d’histoire.

Ce mémoire propose d’examiner l’utilisation d’un autre genre de BD pour l’enseignement de l’histoire au collégial, la bande dessinée de superhéros (BDSH) qui n’est pas un genre de BD qui contient de façon consciente et planifiée des éléments historiques et qui nécessite un travail de niveau supérieur de la part des étudiants. Pour arriver à étudier et à travailler avec des BDSH, les étudiants doivent avoir recours à des processus comme la pensée critique. Ce processus permet de faire le tri entre les éléments contenus dans la BDSH étudiée pour trouver l’information recherchée en utilisant des compétences, des connaissances et des concepts historiques et en ayant un regard critique.

L’objectif général de cette recherche est de comprendre de quelle manière la BDSH peut être utilisée comme outil didactique pour travailler la pensée critique chez les étudiants en classe d'histoire au collégial. Cette démarche tient son origine de trois sources distinctes : notre passion, depuis l’enfance, au monde des superhéros, notre désir de développer une réflexion critique chez les

1

Nous sommes conscients qu’il existe des hommes, des femmes et des individus non binaires enseignants, étudiants, scénaristes, dessinateurs, etc. Cependant, pour ne pas alourdir le texte, nous avons décidé d’utiliser le genre masculin comme un genre neutre pour désigner tous individus.

(15)

2

étudiants du collégial et notre souci constant de susciter l’intérêt d’apprendre chez les étudiants en utilisant des outils didactiques motivants comme la bande dessinée de superhéros. Ce mémoire se divise en cinq chapitres nous permettant de répondre à notre objectif de recherche.

Le chapitre 1, Problématique, expose la problématique, le problème, la question de recherche et sa pertinence scientifique et sociale. Ce chapitre est également l’occasion de présenter les questions, les objectifs et les concepts principaux de notre recherche et de présenter et de justifier notre posture épistémologique en tant qu’intellectuel.

Le chapitre 2, Cadre conceptuel, présente et explique les trois concepts centraux de ce mémoire, c’est-à-dire la bande dessinée, le superhéros comme un genre de la bande dessinée et la pensée

critique. L’ensemble de ces concepts fait l’objet de plusieurs courants et de plusieurs définitions

provenant de différents domaines. Après avoir fait l’étude de ces éléments et avoir pris en compte notre problématique, nous avons construit nos propres définitions adaptées aux besoins de notre recherche. Dans ce chapitre, nos constructions des trois concepts sont présentées, décomposées et expliquées.

Le chapitre 3, Méthodologie de recherche, sera l’occasion, dans un premier temps, de présenter la méthodologie employée dans le cadre de ce mémoire, la recherche documentaire. Dans un deuxième temps, nous expliquons les différentes étapes de l’application de notre méthodologie à nos deux objectifs de recherche. Ces deux objectifs font l'objet des chapitres 4 et 5 et nous permettent de répondre à notre question de recherche.

Le chapitre 4, Les avantages et les prérequis de l’utilisation de la BDSH pour travailler la pensée

critique, identifie, présente et justifie les avantages et les prérequis de l’utilisation de la BDSH pour

travailler la pensée critique en fonction de trois catégories : les jeunes adultes, les compétences et les concepts historiques à développer en classe d’histoire et les visées et les compétences à développer dans la formation générale et commune au collégial.

Le cinquième et dernier chapitre, Élaboration d’un tableau des apports historiques et didactiques

possibles de l’application du processus de la pensée critique sur une sélection de BDSH, synthétise

l’ensemble des éléments (concepts, compétences, attitudes, habiletés, etc.) présentés dans les précédents chapitres pour justifier et appuyer les différents apports didactiques et historiques possibles identifiés. Cette identification se fait à la suite de la préparation et de l’application du

(16)

3

processus de la pensée critique sur une sélection de trois BDSH produites entre 1941 et 1944 aux États-Unis et au Canada et discutant de la Deuxième Guerre mondiale. Ce chapitre se conclut par la présentation des différents apports identifiés sous la forme d’un tableau récapitulatif. Par l’application du processus de la pensée critique sur une sélection de BDSH, ce dernier chapitre nous amène à répondre à notre question de recherche.

Une conclusion générale termine cet écrit en présentant un résumé de la recherche effectuée, les principaux résultats, leurs limites et des pistes de recherche pour de futures recherches.

Deux annexes, Analyse statistique chiffrée et La bande dessinée, complètent ce mémoire en ajoutant des éléments complémentaires servant à illustrer et à justifier des étapes de notre processus de recherche2.

2

La majorité de nos citations provient de textes en anglais et, pour en simplifier la lecture, nous avons décidé de traduire (traduction libre) la majorité de nos citations anglophones en français. Une exception a été faite pour les extraits de BDSH anglophone dans un souci de garder la source historique dans son état premier et de ne pas risquer de la dénaturer par une traduction.

(17)

4

Chapitre 1 : Problématique

Dans ce premier chapitre, nous allons commencer en exposant l’état de la question de notre sujet, notre problème et notre question de recherche principale qui en découle. Ensuite, nous présenterons nos objectifs et nos objets de recherche. Nous terminerons en présentant notre posture épistémologique et en la justifiant.

1.1. État de la question

Dès ses débuts, à la fin du 19e siècle, la bande dessinée (BD) a suscité l’intérêt des lecteurs, que ce soit dans les pages d’un journal ou dans un ouvrage spécialisé. Enfants et adultes y trouvent matière à divertissement. Dans l’imaginaire collectif, l’idée de divertissement est associée à la BD autant que l’idée générale qu’elle est destinée aux enfants (Wertham, 1954). Dès les débuts de la BD, une des preuves que les enfants sont le principal public cible est la présence d’une préoccupation constante des contenus de la BD et de ses impacts sur les enfants (Nyberg, 1998). Des associations de parents, de religieux, de psychologues et d’éditeurs de bandes dessinées tentèrent de contrôler le contenu des bandes dessinées avec la censure et la création de codes de publication (Comics Code

Authority) pour s’assurer que les enfants ne soient pas contaminés par des éléments immoraux

(sexe, violence, mort, drogue, etc.) présents dans la bande dessinée (Nyberg, 1998). Cette association à l’enfance et la présence de la censure et de codes de publications donnent à la BD une image et une forme ludique, frivole et puérile qui l’empêche d’être considérée comme une littérature sérieuse et respectable. Cette image évoluera dans le temps pour inclure une plus grande variété de personnes et ainsi élargir le public de la BD.

Cette perception initiale de la BD, qui a évolué au fil des ans principalement dans le milieu souterrain (underground)3 avec l’apparition de « la bande dessinée adulte (ou plus sérieuse) » (Leroux, 2005, p. 238)4 tend à changer de façon radicale et à atteindre le courant dominant (mainstream) dans le début des années 1990. L’industrie de la bande dessinée opère alors un changement radical avec l’arrivée d’une nouvelle responsable éditoriale, Karen Berger, chez DC

3

L’univers de la publication de la bande dessinée se divise principalement en deux branches : le souterrain (underground) et le courant dominant (mainstream) (Leroux, 2005). Le milieu souterrain, « forgé en réaction contre le registre convenable de la bande dessinée » (Mouchart, 2012, p. 27), est le premier à changer de direction parce que les dessins et les histoires contenus dans les BD issues de cette branche ne sont généralement pas soumis à des codes ni à des censeurs. Les artistes du souterrain sont indépendants des grandes maisons d’édition et ils produisent et diffusent souvent à petites échellescomparativement aux artistes du courant dominant dont la production représente la majorité du marché de la BD.

4

Cette apparition se fait « dans les années 1970 et 1980, soit dans le monde des underground comics aux États-Unis, soit dans certaines revues françaises comme Métal hurlant » (Leroux, 2005, p. 238).

(18)

5

Comics5, l’une des deux plus grandes compagnies œuvrant dans la production de bandes dessinées à

l’époque et encore aujourd’hui, en 2019. En 1993, Karen Berger crée une nouvelle division de DC

Comics, Vertigo, qui cible un lectorat mature et qui discute de sujets sérieux (évènements

historiques, politique, économie, philosophie, psychologie, etc.) (Decker et Castro, 2012) et adultes (violence, sexe, drogue, mort, etc.). Par exemple, en 1995, Vertigo publie une nouvelle série,

Preacher, par Garth Ennis et Steve Dillon, qui discute de la désillusion de la croyance en Dieu d’un

prêtre, Jesse Custer, et de sa quête pour trouver Dieu dans les recoins les plus obscurs de l’être humain (guerre, prostitution, drogue, etc.) (Vertigo, s.d., paragr. 1). Cette action a pour conséquence d’élargir le lectorat (adolescent et adulte) et de faire rayonner la BD au-delà du monde de l’enfance. Un autre évènement décisif du changement de l’image de la BD est la remise du prix Pulitzer6, en 1992, à Art Spiegelman, un auteur de bande dessinée, pour son œuvre graphique, Maus (Spiegelman, 1987) (Delorme, 2010). Il s’agit d’un roman graphique7

« relatant la vie [du père de l’auteur], un juif polonais confronté […] à la montée du nazisme » (Delorme, 2010, p. 73), à la Seconde Guerre mondiale et à l’Holocauste. Cette reconnaissance de l’œuvre de Spiegelman aura comme impact d’augmenter la crédibilité de la BD et de la rapprocher du monde littéraire. Cette renommée permettra également à l’ouvrage de faire sa place en éducation en devenant « une des œuvres les plus utilisées en classe d’histoire pour discuter de la Seconde Guerre mondiale et de l’Holocauste » (Decker et Castro, 2012, p. 169).

Sa nouvelle image permet à la BD d’entrer dans les établissements scolaires via une nouvelle personne, l’enseignant8

. Auparavant, au grand désarroi des enseignants, la bande dessinée s’insinuait dans les établissements scolaires par le biais d’élèves qui lisaient les bédés durant la récréation ou en cachette durant les classes. Par exemple, en France, « dans les années cinquante et soixante, […] la bande dessinée […] était proscrite dans l’enceinte des écoles : les illustrés confisqués, les lecteurs de telles inepties réprimandés. L’immense majorité des professeurs se flattaient de ne jamais avoir lu d’illustrés » (Thiébaut, 2002, p. 42). Aujourd’hui, plusieurs enseignants du primaire, du secondaire, du cégep et de l’université font entrer la BD en classe d’histoire et ils l’utilisent comme un outil didactique pour développer des compétences et pour construire des savoirs avec les apprenants (Decker et Castro, 2012; Delorme, 2010; Christenson,

5

La compagnie d’édition DC Comics est une des grandes maisons d’édition avec Marvel à faire partie du courant dominant.

6

Il s’agit d’une première pour l’univers de la bande dessinée.

7

Le roman graphique est un type de bande dessinée qui se différencie des autres par sa longueur et par la profondeur des sujets discutés qui le rapproche du roman (Boutin et Martel, 2018). Tous les genres de BD peuvent inclure autant la bande dessinée sous sa forme classique que le roman graphique.

8

Par exemple, en France, la bande dessinée entre dans les écoles par le biais de « l’enseignement de la lecture de l’image prôné dès 1987 dans les textes officiels, qui se développe en classe à travers les programmes de 1996 pour le collège, 2001 pour le lycée et 2002 pour l’école primaire » (Rouvière, 2012, p. 9).

(19)

6

2006; Guay et Charrette, 2009; Sheffield et al., 2015). Par exemple, Sheffield et al. (2015) suggèrent que le roman graphique « peut être utilisé en classe d’univers social pour développer l’empathie historique [parce que] l’association images-mots permet à l’élève de voir les émotions et les réactions des personnages » (p. 148). Selon Guay et Charrette (2009), la bande dessinée permet également de « développer la pensée [et] l’esprit critique des élèves du secondaire en classe d’histoire » (p. 14-15). Malgré une grande diversité d’usage, la BD utilisée en enseignement semble se limiter à un genre particulier.

Le changement opéré dans la bande dessinée durant les années 1990 a permis de mettre de l’avant un type de BD qui, par son processus de création exigeant des recherches méticuleuses, est considéré comme plus intellectuel que d’autres types, la bande dessinée à caractère historique. Ce type de BD peut être découpé en quatre catégories : « la bédé d’aventure située à une certaine époque, généralement excitante, la fiction historique, où l’auteur traite d’une période donnée dans un lieu donné, mais crée de toutes pièces les personnages, la reconstruction historique [et] la bande dessinée éducative ou didactique » (Leroux, 2005, p. 239)9. La BDH peut inclure des notes de bas de page qui servent de précision ou de complément historique pour la compréhension du lecteur. Par exemple, l’auteur peut apporter des précisions sur la vie d’un personnage historique dans une note de bas de page pour faire comprendre au lecteur le sens des actions et des gestes du personnage dans le récit. Ce type de BD est également souvent accompagné d’un livret qui se trouve habituellement à la fin de l’ouvrage et qui contient des informations supplémentaires et des photographies ou des images de l’époque, des personnages et des évènements évoqués dans l’œuvre (Sheffield et al., 2015). Le livret a pour but de compléter et de solidifier les informations historiques contenues dans la BD pour faire valoir le sérieux historique et l’objectivité de l’œuvre et des choix de l’auteur. Par exemple, la BDH sur l’histoire du premier ordinateur, The Thrilling Adventures of

Lovelace and Babbage : The (Mostly) True Story of the First Computer de Sydney Padua (2015),

contient deux annexes situées à la fin de l’ouvrage. Ces annexes, sous forme de livret, permettent au lecteur « d’étudier des sources premières (lettres et articles) produites par Charles Baddage et Ada Lovelace » (Padua, 2015, p. 259), et de « comprendre le fonctionnement de la machine analytique de Charles Baddage » (Padua, 2015, p. 285). Pour arriver à un sérieux historique et à une certaine objectivité, la production de ce type de BD demande généralement une recherche historique méticuleuse dans les ouvrages et dans les sources historiques de la part de l’auteur qui tend à offrir une exactitude historique à ses lecteurs. Par exemple, un auteur peut étudier les vêtements de

9

À cette définition, l’on peut ajouter certains éléments de définitions plus récentes comme celle de Boutin et Martel (2018) avec les catégories de la biographie, de l’autobiographie, de l’investigation historisante et de l’essai à teneur historique.

(20)

7

l’époque où se situe son œuvre pour s’assurer de l’exactitude de la broderie et de l’emplacement des boutons sur les costumes de ses personnages.

Il existe une grande diversité de genres de bande dessinée (histoire, superhéros, romance, horreur, érotique, mystère, fantastique, science-fiction, satire, adaptation, animaux, aventure, western, policier, œuvres indépendantes, etc. (Filippini, 2000; McCloud, 2009)). Chacun de ses genres contient un corpus énorme d’ouvrages provenant de différents pays et de différentes époques. Cependant, la majorité des études sur l’enseignement de l’histoire ne présentent et ne suggèrent que l’utilisation de la bande dessinée à caractère historique comme outil didactique (Bordage, 2008; Carano et Clabough, 2016; Charrette, 2010; Christensen, 2006; Delorme, 2010; Guay et Charrette, 2009; Sheffield et al., 2015). Par exemple, Sheffield et al. (2015) suggèrent une liste de bandes dessinées à caractère historique pour étudier l’histoire des États-Unis et l’histoire mondiale avec les élèves en classe d’histoire (A Family Secret de Eric Heuvel (2009), Trinity : A graphic History of

the First Atomic Bomb de Jonathan Fetter-Vorm (2013), etc.) (p. 150). Dans un projet mené sur

l’utilisation de la bande dessinée en cours d’histoire au lycée, Delorme (2010) utilise quatre BD à caractère historique pour étudier « différents évènements historiques (la Grande Guerre avec C’était

la guerre des tranchées de Jacque Tardi [(1993)], le génocide arménien avec Medz Yeghern, Le grand mal de Paolo Cossi [(2009)] et la Seconde Guerre mondiale avec La fille de Mendel de

Martin Lemelman [(2006)] et avec Maus de Art Spiegelman [(1987)]) » (p. 75). L’utilisation de ce type de BD facilite l’apprentissage et l’enseignement de l’histoire parce qu’il contient de façon consciente et planifiée des éléments à caractère historiques (des évènements, des personnages, etc.). « Le corpus de nature historique en bande dessinée regorge d’œuvres qui peuvent participer, plus ou moins densément, à l’acquisition raisonnée de savoirs en classe d’histoire » (Boutin et Martel, 2018, p. 305). Dans certains cas, la BDH est alors « prémâchée » pour les étudiants, c’est-à-dire qu’elle a été construite dans le but de communiquer des savoirs historiques10. La recherche historique, les informations et les images supplémentaires que contient ce type d’ouvrage lui donnent souvent une forme didactique. Il serait intéressant de sortir de la BD contentant de façon consciente et planifiée un contenu historique et d’agrandir l’éventail des types de BD pouvant être utilisés en enseignement de l’histoire.

Ce mémoire propose de combler une lacune en levant le voile sur l’utilisation d’un autre type de BD pour l’enseignement de l’histoire au collégial, la bande dessinée de superhéros (BDSH), d’où la

10

Par exemple, si l’on utilise le découpage de Leroux (2015), on peut classifier les BD éducatives ou didactiques comme étant « prémâchées » pour les étudiants.

(21)

8

pertinence scientifique de cette recherche. Ce type de BD est très peu étudié comme outil didactique en enseignement de l’histoire dans la littérature française comparativement à la BDH qui occupe une place majoritaire dans les études. Par exemple, nous avons effectué une analyse statistique chiffrée du type de bande dessinée présenté et suggéré dans des articles sur l’utilisation de la bande dessinée en enseignement de l’histoire parus entre 2000 et 201811

provenant de 3 revues professionnelles québécoises (Traces (Société des professeurs d’histoire du Québec, 2000-2018),

Enjeux de l’univers social (Association québécoise pour l'enseignement en univers social,

2010-2017) et Bulletin de l'APHCQ (Association des professeures et des professeurs d'histoire des collèges du Québec. 2000-2016)) et de 2 revues professionnelles européennes françaises (Le

cartable de Clio (Groupe d’étude des didactiques de l’histoire de la Suisse romande et italienne,

2001-2013) et Historiens et géographes (Association des Professeurs d’Histoire et de Géographie, 2000-2018)) sur l’enseignement de l’histoire et des sciences sociales12. Le résultat obtenu nous montre que 96 % des articles publiés ne présentent et ne suggèrent que l’utilisation de la bande dessinée à caractère historique comme outil didactique13. Il en va autrement dans la littérature anglaise, provenant principalement des États-Unis, qui encourage l’utilisation de la BDSH en enseignement de l’histoire dans tous les degrés d’enseignement (Aiken, 2010; Pustz, 2012; Sibaja, 2011). Par exemple, Sibaja (2011) soutient que « la BDSH peut être utilisée en classe d’histoire pour étudier la culture américaine [en réalisant] des études chronologiques comparatives entre les éléments discutés dans les BDSH et l’histoire des États-Unis » (p. 2). Selon une autre auteure, Aiken (2010), en classe d’histoire, « la BDSH est utile pour étudier la culture populaire [et] l’histoire des États-Unis » (p. 41). Notre recherche se différencie des recherches anglophones en portant un regard centré sur la relation entre le savoir scolaire via la BDSH et l’apprenant. Autrement dit, nous nous concentrons sur la relation entre le jeune adulte étudiant au collégial et la BDSH comme outil didactique pour l’apprentissage de l’histoire. Pour ce faire, nous allons utiliser des données, des concepts, etc. provenant de différents domaines (psychologie, histoire, théorie de la BD, théorie du concept de superhéros, etc.) qui permettent d’étudier le processus de l’enseignement et de l’apprentissage. Notre conception de la didactique en est une qui inclut différents domaines qui s’additionnent aux données, aux concepts, etc. de la didactique pour

11

En fonction des disponibilités et des années de parutions des revues sélectionnées, les années d’analyses varient d’une revue à l’autre entre 2000 et 2018.

12

Voir l’annexe A.

13

Les cinq revues analysées ont publié 27 articles sur l’utilisation de la bande dessinée en enseignement de l’histoire entre 2000 et 2018. Sur ces 27 articles, 26 suggèrent, utilisent, construisent, etc. des BDH et 1 porte sur la bande dessinée de reportage. Voir l’annexe A, section résultats.

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9

chercher des réponses lors de l’étude de relations dans le triangle didactique14. Par exemple, l’étude des concepts sur l’apprenant et d’éléments provenant de la psychologie nous permet d’avoir un regard plus complet sur l’apprenant en fonction de son statut scolaire et de son développement psychologique.

La BDSH ne contient pas de façon consciente et planifiée un contenu historique et elle n’est pas une bande dessinée « prémâchée », c’est-à-dire qu’elle n’est pas construite dans un but de communiquer des savoirs historiques contrairement à certains types de BD à caractère historique. Il s’agit d’une source primaire parce qu’elle est produite par des témoins d’une époque, d’un évènement, d’une société, etc. Les BDSH « émergent d’un contexte spécifique, sont une réflexion de la politique, des préjudices et concernent un moment historique particulier » (Aiken, 2010, p. 41). De ce point de vue, ce type de BD nécessite un travail de niveau supérieur de la part des étudiants comparativement à la BDH, car la BDSH n’est pas écrite dans un but didactique ou historique et elle ne contient pas de livrets d’aide ou de notes de bas de page pouvant guider le lecteur. Avec l’aide de la pensée critique, l’étudiant doit faire le tri entre les éléments contenus dans la BD étudiée pour trouver l’information qu’il recherche en utilisant des connaissances, des compétences et des concepts historiques15 et en ayant un regard critique. La BDSH, comme l’ensemble des genres de la BD, est également une œuvre dont le but est de raconter, ce qui permet de rendre l’histoire et les personnages qui s’y trouvent plus dynamiques. On pense que l’utilisation de la bande dessinée de superhéros en classe d’histoire permet aux étudiants de dépasser les faits historiques pour vivre et ressentir le passé et développer une meilleure compréhension de l’histoire.

Ce mémoire veut également redorer l’image sociale de la bande dessinée de superhéros qui est vue comme peu sérieuse, traitant de sujets superficiels (Christensen, 2006; Sheffield, et al., 2015). Dans la culture populaire, dans les films, à la télévision et dans la littérature (Les Simpson, Sydney White, etc.), il n’est pas rare de voir un élève lire en cachette une BDSH et de se voir réprimander la lecture de celle-ci par ses pairs et par les intervenants scolaires. Faire un portrait des avantages de l’utilisation de la BDSH en enseignement de l’histoire au collégial pour travailler la pensée critique permettra de démontrer le sérieux et l’intérêt intellectuel de ce type de BD et ainsi redorer son image dans le milieu scolaire et dans la société, d’où la pertinence sociale de cette recherche.

14

Le triangle didactique peut être défini comme étant un triangle mettant « en interaction un agent - généralement un enseignant – et des [apprenants] à propos d’un objet de savoir (l’histoire), dans un certain milieu (la classe, [l’institution scolaire, etc.]) » (Martineau, 2010, p. 57).

15

Les connaissances et les concepts historiques sont des éléments préalables que les étudiants doivent maîtriser pour être à même d’analyser et de comprendre les bandes dessinées de superhéros (références politiques, culturelles, économiques et sociales, les actions et les gestes des personnages, etc.).

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10 1.2. Problème et question de recherche principale

De ce qui précède, il découle que le problème de recherche de ce mémoire est de comprendre l'utilisation de la BDSH comme outil didactique pour travailler la pensée critique chez les étudiants en classe d'histoire au collégial. Ce problème amène la question de recherche suivante : comment la BDSH peut-elle constituer un outil didactique pour travailler la pensée critique chez les étudiants en classe d’histoire au collégial?

1.3. Questions de recherche secondaires

Pour comprendre la bande dessinée de superhéros comme un outil didactique pour travailler la pensée critique chez les étudiants en classe d’histoire au collégial, il faut se questionner sur ses avantages16 et ses prérequis. Quels sont les avantages et les prérequis de l’utilisation de la BDSH pour travailler la pensée critique pour les jeunes adultes? Quels sont les avantages et les prérequis de l’utilisation de la BDSH pour travailler la pensée critique pour le développement des compétences et des concepts historiques dans les cours d’histoire au collégial? Quels sont les avantages et les prérequis de l’utilisation de la BDSH pour travailler la pensée critique pour les visées et les compétences à développer dans la formation générale et commune au collégial? On peut également se questionner sur les éléments historiques et didactiques qui peuvent être identifiés par l’application du processus de la pensée critique à des BDSH en classe d’histoire au collégial. Quels types d’éléments historiques (évènements, époques, culture, politique, etc.) et didactiques (concepts, habiletés, attitudes, etc.) l’étude de la BDSH par la pensée critique permet-elle de travailler avec les étudiants du collégial?

1.4. Objectifs de recherche

Cette recherche comporte deux objectifs qui découlent de notre problématique et de nos questions de recherche.

Le premier objectif est d’identifier les avantages et les prérequis de l’utilisation de la BDSH pour travailler la pensée critique. Ces avantages et ces prérequis seront divisés en trois catégories : pour les jeunes adultes, pour le développement des compétences et des concepts historiques dans les

16

Le choix du mot avantage a fait l’objet d’une sérieuse réflexion. Nous avons pensé à différents termes (fonction, utilité, bienfait, atout, avantage, etc.) et le mot avantage nous semble le plus approprié pour représenter l’une des catégories d’éléments que nous cherchons à identifier. Ce choix s’explique parce que notre but est d’identifier ce en quoi la BDSH peut-être « utile ou profitable » (Le Petit Robert, 2018) pour l’enseignement de l’histoire au collégial (avantage) et non d’identifier les « activités déterminées dévolues » (Usito, 2018) (fonction) à la BDSH.

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11

cours d’histoire au collégial et pour les visées et les compétences à développer dans la formation générale et commune au collégial.

Le deuxième et dernier objectif est de présenter une synthèse (sous forme de tableau) des apports didactiques et historiques possibles de l’application du processus de la pensée critique sur des BDSH en classe d’histoire au collégial. Cette élaboration s’effectuera sur une sélection de BDSH produites entre 1941 et 1944 et provenant des États-Unis et du Canada. Ce tableau permettra de donner un regard d’ensemble des apports historiques et didactiques possibles que contiennent les BDSH.

1.5. Les concepts de recherche17

L’objet principal de notre recherche est la pensée critique. Nous avons choisi ce concept parmi un ensemble de termes et concepts apparentés tels le sens critique, l’esprit critique, la réflexion critique, etc. parce que le processus de la pensée critique semble le plus adapté pour travailler les contenus et les concepts historiques comme la pensée historique, avec l’analyse de sources primaires (Gagnon, 2010) et l’empathie historique (Martineau, 2010). Il s’agit également d’un des processus importants à développer durant la formation collégiale (ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, 2017).

L’objet secondaire de notre recherche est la bande dessinée de superhéros que nous découpons en deux objets distincts18 : la bande dessinée et le superhéros comme un genre de la bande dessinée. Nous avons choisi cet objet parce qu’il correspond à l’outil didactique qui nous servira à travailler notre objet principal, la pensée critique, chez les étudiants du collégial en cours d’histoire.

1.6. Justification épistémologique

Cette recherche se fait avec une posture épistémologique constructiviste. Les savoirs qui seront produits dans ce mémoire ne seront pas découverts, mais construits (Astolfi, 2008). Ainsi, il s’agit de pistes de réflexion pour les enseignants en histoire au collégial sur l’utilisation de la BDSH et non des recettes à appliquer. La construction des savoirs se fait également en interdépendance avec le chercheur (Gavart-Perret, Gotteland, Haon et Jolibert, 2012). Par exemple, le tableau des apports historiques et didactiques possibles des BDSH qui sera fait dans le cadre du deuxième objectif de

17

Les objets présents dans cette section, la pensée critique, la bande dessinée et le superhéros comme un genre de la BD, seront définis en profondeur et reliés à notre problématique dans le chapitre 2.

18

Ce découpage est nécessaire parce que l’on ne peut pas comprendre la BDSH comme outil didactique si l’on ne maîtrise pas et que l’on ne comprend pas ses composantes, c’est-à-dire la bande dessinée et le superhéros comme un genre de la bande dessinée.

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12

cette recherche présentera des éléments qui seront déterminés par les structures conceptuelles, les intentions, les intérêts et le bagage intellectuel d’historienne que nous avons construits au fil des ans en sélectionnant des éléments de connaissance qui suscitent notre intérêt. Les résultats obtenus grâce à l’analyse sont propres au chercheur et une autre personne qui analyserait les mêmes BD n’arriverait probablement pas aux mêmes résultats que nous parce que ses structures conceptuelles, ses intentions, ses intérêts, etc. sont différents des nôtres. Par exemple, une classe qui ferait l’analyse d’une BDSH obtiendrait des apprentissages différents d’une autre classe parce que les structures conceptuelles, les intentions, les intérêts, le bagage intellectuel et les outils (documents historiques, sources, concepts, etc.) fournis par l’enseignant ne seraient pas les mêmes d’un groupe à l’autre.

(26)

13

Chapitre 2 : Cadre conceptuel

Maintenant que nous avons présenté notre problématique, il convient de prendre le temps pour détailler les concepts qui constituent l’assise de cette recherche. En effet, pour bien comprendre l’utilisation de la bande dessinée de superhéros comme outil didactique pour travailler la pensée critique chez les étudiants en classe d’histoire au collégial, il est nécessaire de préciser les concepts centraux de cette recherche, la bande dessinée, le superhéros comme un genre de la bande dessinée et la pensée critique19. Ces trois concepts possèdent plusieurs définitions provenant de différents domaines. Il est donc important de préciser la définition que nous avons choisie et construite parce que ce choix aura un impact sur la manière dont on utilisera ces concepts dans cette recherche. Tout d’abord, nous présenterons la bande dessinée en étudiant ses origines, sa définition, ses composantes et sa lecture. Nous verrons ensuite le superhéros comme un genre de la bande dessinée en présentant et en expliquant ses origines, sa définition, ses composantes et les différents âges de la BDSH. Nous terminerons par la définition de la pensée critique en étudiant ses origines, sa définition, ses composantes et sa place dans l’éducation collégiale.

2.1. La bande dessinée

Pour mieux comprendre la bande dessinée, nous verrons ses origines, sa définition, les éléments qui la composent, sa lecture et les compétences qu’elle exige.

2.1.1. Les origines

De nombreux chercheurs et théoriciens de la BD ont tenté d’identifier les origines de ce genre littéraire. Une grande partie des auteurs considèrent que l’on peut trouver de multiples traces des ancêtres de la BD en parcourant l’histoire de l’humanité. Par exemple, on peut trouver des traces dans l’art pariétal, dans les hiéroglyphes égyptiens, dans les vases et les fresques grecques et romaines et dans des manuscrits du Moyen-Âge (Heer et Worcester, 2009; Kerrien et Auquier, 2018; McCloud, 2007; Quella-Guyot, 1996). Par exemple, au Moyen-Âge, le texte entre dans le cœur même de l’image avec l’apparition de rubans sortant de la bouche des personnages pour représenter les paroles (Kerrien et Auquier, 2018, p. 5). Ces rubans peuvent être vus comme les ancêtres des bulles, élément caractéristique de la BD20. La naissance dite officielle de la bande

19

Il est à noter que bien d’autres concepts seront utilisés dans cette recherche comme le présentisme et la pensée historique, mais ils ne feront pas partie de notre cadre conceptuel parce qu’ils sont des concepts secondaires à notre problématique de recherche et que nous n’avançons pas de nouveaux éléments.

20

Les caractéristiques de la BD seront vues plus en profondeur dans les sections 2.1.2. La définition et 2.1.3. Les composantes du présent chapitre.

(27)

14

dessinée21 se situe avec l’arrivée des premiers albums du « pédagogue, politicien et écrivain suisse, Rodolphe Töpffer (1799-1846) » (Kerrien et Auquier, 2018, p. 8), au 19e siècle. Cet auteur est considéré comme le premier théoricien22 de la bande dessinée et il est le créateur de nombreuses « histoires en estampes »23 (Groensteen, 2014; Peeters, 1993) que l’on appelle déjà album24. La BD s’est ensuite étendue dans les journaux et les magazines autant en Europe qu’en Amérique (Duncan et Smith, 2009). Maintenant que nous avons vu les origines de la bande dessinée, il serait intéressant de définir l’objet pour une meilleure compréhension.

2.1.2. La définition de la bande dessinée

L’absence de définition complète et formelle de la bande dessinée dans les études sur l’utilisation de la BD en enseignement (Carano et Clabough, 2016; Decker et Castro, 2012; Delorme, 2010) nous amène à chercher ailleurs une définition pour clarifier l’objet de ce mémoire. Les dictionnaires de l’éducation, de la didactique de l’histoire ou de la bande dessinée25

ne présentent pas de définition complète du terme bande dessinée. Nous devons donc nous tourner vers les études théoriques sur la bande dessinée pour réussir à bien définir notre concept. La définition de la bande dessinée est sujette à de multiples distorsions entre les théoriciens. Par exemple, il existe un conflit sur la question de l’inclusion de la BD dans l’univers littéraire26

. Nous avons choisi de définir la BD comme un genre littéraire parce que « reconnaître à la bande dessinée le potentiel et la dignité d’une littérature à part entière […] c’est affirmer […] que les images aussi bien que les mots peuvent servir de supports aux discours les plus élaborés et engendrer de grands textes » (Groensteen, 2007, p. 8).

Voici notre définition de la bande dessinée, définition que nous décomposerons par la suite :

21

Certains auteurs situent la naissance de la bande dessinée avec l’arrivée en 1895 de Yellow Kid d’Outcault en avançant l'argument de l’acceptation commerciale de la BD par sa présence dans les journaux (Pomier, 2005). Cependant, nous ne retenons pas cette hypothèse parce que, comme Pomier (2005, p.45), nous considérons qu’elle « est dangereuse pour qui s’aviserait de défendre des productions remarquables, mais qui n’auraient pas rencontré le moindre écho auprès du public ».

22

On peut trouver ses théories « les plus […] complètes […] dans le bref texte de 1845 intitulé Essai de physiognomonie » (Pomier, 2005, p. 45).

23

Par exemple, « « Histoire de Monsieur Jabot » (1833), « Histoire de Monsieur Crépin » (1837) [et] « Les amours de Monsieur Vieux Bois » (1839) » (Kerrien et Auquier, 2018, p. 8).

24

Dans une « lettre de janvier 1845, Cham écrivait à Töpffer : « C’est à vos premiers Albums – Jabot, Crépin et Vieux Bois – que je dois la carrière que je me propose de suivre. » » (Groensteen, 2007, p. 13).

25

Il est à noter que les dictionnaires de bande dessinée ne définissent pas l’objet ni ses composantes. Ces dictionnaires cherchent plutôt à présenter les auteurs (scénaristes et dessinateurs) et les personnages de bande dessinée.

26

Dépendamment des auteurs, la bande dessinée est considérée comme une littérature (Groensteen, 2007; Morgan, 2003) ou comme une paralittérature (« synonyme de sous-littérature » (Morgan, 2003, p. 22)) (Fresnault-Deruelle, 1972).

(28)

15

La bande dessinée est une forme de « récit de (semi)fiction multimodale » (Boutin et Martel, 2018, p. 269) dans lequel des « images picturales et autres, [sont] volontairement juxtaposées en séquences » (McCloud, 2007, p 28.) et accompagnées souvent de textes qui forment un « langage » (Eisner, 2009, p. 7) dans le but de « narrer une histoire » (Quella-Guyot, 1996, p. 34-35) ou « de présenter une idée » (Eisner, 2009, p. 5). La bande dessinée est également constitué de différents genres (histoire, superhéros, romance, horreur, érotique, mystère, fantastique, science-fiction, satire, adaptation, animaux, aventure, western, policier, œuvres indépendantes, etc. (Filippini, 2000; McCloud, 2007)).

Notre définition porte sur deux éléments de la BD : ses composantes et ses buts. Tout d’abord, la bande dessinée est une forme de récit multimodale parce qu’elle utilise « une variétés de ressources sémiotiques [(textes, images, gestes, sons, etc.)] pour représenter et communiquer des idées » (Sefarini, 2014, p. 172). La BD est constituée d’« images picturales et autres » (McCloud, 2007, p. 28), c’est-à-dire que l’œuvre peut contenir des éléments visuels présentés sous différentes formes, tels le dessin, la photo, le collage, la peinture, la vidéo27, etc. Ces éléments visuels sont « volontairement juxtaposés en séquences » (McCloud, 2007, p. 28). Lors de la création, l’auteur28 détermine un ordre dans la présentation des éléments pour communiquer un message. Les éléments visuels sont souvent accompagnés de textes pour donner une parole aux personnages, pour préciser la pensée des personnages, pour présenter le lieu et le temps des évènements, pour faire une narration, pour s’adresser directement au lecteur, etc. (Chante, 2000). Cependant, certaines œuvres restent muettes et utilisent seulement les éléments visuels pour communiquer et exprimer des évènements et des émotions. Dans la bande dessinée, les images et les mots se transforment « en codes visuels et verbaux qui coexistent et collaborent » (Mission, 2012, p. 83) pour former un « langage » (Eisner, 2009, p. 7) propre à la BD. L’œuvre « communique dans un langage qui est issu des expériences visuelles communes au lecteur et à l’auteur qui partagent une même culture » (Eisner, 2009, p. 7). Lorsque le lecteur est éloigné de l’auteur par le temps ou le milieu, il devient plus difficile au lecteur de comprendre les éléments sous-entendus de l’œuvre telles les références culturelles, politiques, etc. Nous avons choisi le concept du langage parce qu’il rejoint l’approche que nous préconisons de la BD dans ce mémoire, c’est-à-dire une construction qui utilise et qui représente la société à un moment et à une époque précises. Le langage d’une bande dessinée est propre à son époque. L’auteur utilise des signes, des images, des référents, etc. qui sont connus du

27

Lors de l’arrivée de l’Internet, plusieurs dessinateurs ont commencé à l’utiliser pour publier des bandes dessinées avec des effets visuels mouvants (vidéo) et audios (McCloud, 2006, p. 170).

28

Nous verrons les différentes dimensions de « l’auteur » de bande dessinée dans la section 2.1.3. Les composantes du présent chapitre.

(29)

16

lecteur qui provient du même milieu et de la même époque que l’auteur, d’où l’importance de comprendre l’époque ou l’évènement historique où a été créée une œuvre avant de l’étudier. Ensuite, la BD a deux buts : « narrer une histoire » (Quella-Guyot, 1996, p. 34-35) ou « présenter une idée » (Eisner, 2009, p. 5). L’auteur raconte une histoire et souvent il communique une idée, un concept, une thèse, etc. Par exemple, l’auteur peut raconter l’histoire d’une femme qui aide les Américains à vaincre les nazis durant la Deuxième Guerre mondiale et, en même temps, défendre une thèse sur la place des femmes dans la société comme le fait William Moulton Martson avec l’œuvre Wonder Woman (Hanley, 2014).

2.1.3. Les composantes

Outre ses origines et sa définition, pour bien comprendre la bande dessinée et son langage spécifique, il est important de connaître et de comprendre les éléments qui la composent. Les composantes de la bande dessinée sont les éléments qui forment son langage particulier. Dans cette section, nous allons étudier les composantes suivantes : l’auteur, la planche, la bande, la case, le cadre, l’ellipse et la bulle. L’ensemble de ses composantes, mis à part l’auteur, sera mis en lien dans un dessin avec légende29 pour faciliter la compréhension des liens entre les différentes composantes.

La première composante de la bande dessinée est son créateur, l’auteur. Cet auteur a généralement un double rôle30 : celui de scénariste et de dessinateur31. Le scénariste a pour rôle « d’imaginer l’histoire et [de] fournir au dessinateur le découpage ainsi que les dialogues » (Groensteen, 2007, p. 209). Après avoir reçu les indications du scénariste, le dessinateur a pour rôle de « mettre le scénario en images » (Quella-Guyot, 1996, p. 12).

La bande dessinée, en tant qu’objet, prend généralement la forme de l’album32. Il est composé de plusieurs planches. La planche est une page entière de la bande dessinée qui se « présente par deux, disposées en vis-à-vis, une fois la première page d’un album tournée » (Groensteen, 2007, p. 26)33. La planche est également appelée multicadre parce que « plusieurs cadres […] s’en partagent la surface » (Groensteen, 2007, p. 25).

29

Voir Annexe B, La bande dessinée, 2.1. Les composantes, figure 2.

30

Ce double rôle peut être occupé par une seule ou plusieurs personnes. Par exemple, une bande dessinée peut avoir deux auteurs, le scénariste et le dessinateur.

31

Dans certains cas, on peut ajouter un troisième rôle, le coloriste. Il s’agit d’un « assistant spécialisé dans la mise en couleurs des bandes dessinées, sur une épreuve d’imprimerie appelée « bleu », ou sur ordinateur » (Peeters, 1993, p. 207).

32

L’album est « un livre publiant un récit [ou plusieurs récits] en bandes dessinées » (Quella-Guyot, 1996, p. 78).

33

La présence d’une ou de deux planches à la fois a un impact différent sur le choix des cases de l’auteur et sur la lecture de l’œuvre. Nous verrons plus en profondeur ses impacts sur la lecture dans la section 2.1.5. La lecture de la bande dessinée et les compétences qu’elle exige du présent chapitre.

(30)

17

Avant de présenter le cadre, il est important de comprendre ce qu’il contient en présentant la case. Il s’agit de « l’unité de base de la narration en bande dessinée, elle consiste en un dessin encadré [par le cadre], généralement isolé par du blanc, et comprenant ou non des inscriptions verbales » (Peeters, 1993, p. 207). La case se présente généralement en plusieurs lignes droites dans la planche. Chacune de ces lignes de cases porte le nom de bande (Quella-Guyot, 1996).

Afin de délimiter la case, l’auteur de bande dessinée utilise généralement le cadre34. Il s’agit d’un

élément qui se présente traditionnellement sous la forme du rectangle ou du carré35, mais il peut également prendre différentes formes en fonctions des besoins de l’auteur. Par exemple, un auteur peut décider de faire un cadre en forme de cercle au milieu de la planche pour créer un effet de centralité accentuée36. Le cadre est l’endroit où se trouve généralement l’image. Cependant, dans certains cas, l’image se trouve également dans les contours de la planche37

pour ajouter à l’histoire présente dans les cadres, pour ajouter une histoire extérieure au cadre ou pour agrémenter visuellement la planche. Le cadre peut également servir à délimiter le texte qui se trouve généralement sous la forme de bulles38.

La bulle, également appelée ballon ou phylactère, est « un espace réservé pour les paroles ou les pensées des personnages » (Quella-Guyot, 1996, p. 78). Elle a généralement une forme ovale avec un triangle inversé et souvent courbé qui pointe dans la direction du personnage qui prend la parole. Cependant, la bulle et le texte qu’elle contient peuvent avoir différentes formes en fonction de « la nature et de l’émotion du discours » (Eisner, 1985, p. 27) du personnage. Par exemple, un ballon avec un tracé en zigzag et contenant un texte avec des majuscules et en gras peut transmettre l’émotion de la colère. Il existe également des bulles qui ne sont pas reliées à un personnage. Ces bulles ont souvent une forme rectangulaire et elles servent généralement à l’auteur pour présenter le

34

Le cadre « est courant, mais pas obligatoire. Très souvent, les personnages empiètent, transgressent cette limite fictive » (Quella-Guyot, 1996, p. 54) en sortant du cadre ou en étant libre de tout cadre. Pour un exemple, vous pouvez vous référer à la série The Spirit de Will Eisner (Eisner, 1974-1980) qui utilise et transgresse le cadre à de multiples reprises.

35

Le cadre est généralement carré ou rectangulaire parce que « le support imprimé (album ou magazine) [est] lui-même rectangulaire, et par conséquent […] chaque planche, les vignettes tendant à entrer dans un rapport mimétique […] avec cette forme imposée » (Groensteen, 2011, p. 57). Une raison de ce choix est que « mieux qu’un cercle, un losange, une forme étoilée, un triangle ou un trapèze, le rectangle (ou son avatar régulier, le carré) se laisse aisément mettre en série, ranger en bandes » (Groensteen, 2011, p. 57).

36

Vous pouvez voir un exemple de cette pratique dans la BDSH A Very DC Rebirth Holiday Sequel (Adams et al, 2018). Dans les planches 62 et 63 de la BDSH, on peut voir un usage d’un cadre central en forme de cercle qui permet de mettre l'accent sur l’action qui se déroule dans le milieu de la double planche (Adams et al., 2018, planches 62 et 63).

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Par exemple, dans plusieurs des albums Le Petit Spirou, les planches sont agrémentées d’images dans le haut par-dessus le premier cadre sur la gauche. Pour un exemple, vous pouvez vous référer au numéro 14 de la série (Tome et Janry, 2009) qui utilise abondamment l’image à l’extérieur des cadres.

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Cependant, certains types de texte se trouvent en dehors de la bulle. Par exemple, les bruits dans la bande dessinée comme la sonnerie d’un téléphone ne se trouvent pas dans une bulle, mais plutôt « sous la forme d’onomatopées » (Quella-Guyot, 1996, p. 48) flottant dans l’espace près de l’objet d’où provient le bruit.

(31)

18

lieu et le temps des évènements, pour faire une narration ou pour s’adresser directement au lecteur (Chante, 2000).

Une dernière composante de la bande dessinée est l’ellipse. Il s’agit de la zone blanche qui sépare visuellement et qui relie séquentiellement les cadres entre eux. Grâce à l’ellipse, les « images placées côte à côte sont lues comme des prélèvements opérés sur un continuum spatio-temporel qu’il appartient au lecteur39

de reconstituer mentalement en comblant les blancs » (Groesteen, 2007, p. 24).

Maintenant que nous avons présenté les principales composantes de la bande dessinée, il est important de comprendre comment on peut faire la lecture de la bande dessinée et comment l’ensemble de ses composantes exige différentes compétences chez le lecteur.

2.1.4. La lecture de la bande dessinée et l’ensemble des compétences qu’elle exige

Comme nous l’avons vu précédemment, la bande dessinée est un genre littéraire qui se caractérise par l’association image-texte et par des composantes très lointaines de l’écrit comme l’ellipse ou la case. Pour ces raisons, la lecture de la bande dessinée se fait différemment de la lecture d’un écrit (Frémion, 1993; Groesteen, 2007). Cette lecture est considérée comme étant plus difficile et complexe que la lecture de l’écrit en « supposant un lecteur compétent40, c’est-à-dire un lecteur

ayant appris à déchiffrer un certain nombre de « codes » et de conventions propres au neuvième art » (Groesteen, 2007, p. 56). Par exemple, selon plusieurs auteurs, la lecture d’une BD est d’une telle complexité qu’un lecteur adulte se limitant à la lecture d’écrits et non-initié durant l’enfance41

à la BD éprouvera de nombreuses difficultés à lire efficacement un album de BD (Frémion, 1993; Groesteen, 2007; Pomier, 2005). Pour bien comprendre les particularités de la lecture de la BD, dans cette section, nous verrons les différentes étapes de la lecture d’une bande dessinée et l’ensemble des compétences que cette lecture exige.

2.1.4.1. Les étapes de lecture

39

Nous verrons plus en profondeur le rôle du lecteur dans la lecture des ellipses dans la section 2.1.5. La lecture de la bande dessinée et les compétences qu’elle exige du présent chapitre.

40

Certains auteurs présentent le lecteur compétent comme un lecteur ayant un double rôle, « lecteur et interprète » (Missiou, 2012, p. 93). En plus de lire l’œuvre, le lecteur doit interpréter les différents éléments qui se présentent à lui.

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De façon intuitive, l’enfant aura intériorisé les codes et les règles et il aura développé les compétences nécessaires à la lecture de la BD (Pomier, 2005). « À l’âge habituel de « l’initiation » - vers cinq ou six ans – la dominance du monde du verbal sur celui des images n’est pas encore tout à fait établie » (Pomier, 2005, p. 73), ce qui facilite le décodage et la compréhension dans la lecture d’une œuvre associant image et texte.

Figure

Figure 1. Récapitulatif des catégories et des sous-catégories des apports identifiés par l’application  du processus de la pensée critique à un corpus de BDSH

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