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Citoyens et démocratie participative dans les collectivités territoriales en France

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Academic year: 2021

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Citoyens et démocratie participative dans les collectivités territoriales en

France Christelle Perrin Maître de Conférences

Université de Versailles - Institut Supérieur du Management LAREQUOI, laboratoire de recherche en Management

47, Boulevard Vauban F-78 047 Guyancourt Tel (33) 0139255519 christelle.perrin@uvsq.fr

Résumé :

La participation des citoyens au processus de décision des collectivités territoriales en France est une réalité de plus en plus prise en compte. Cette participation, souvent mise en place à l’initiative des acteurs politiques locaux, reflète cependant la volonté des citoyens à s’impliquer dans la sphère politique locale avec des degrés d’engagement et des attentes parfois différents. Nous éclairerons le lecteur dans cet article sur les contours et les enjeux de la démocratie participative dans les collectivités locales françaises.

Mots clés : démocratie participative, collectivités territoriales, création de valeur.

Abstract :

The participation of citizens in decision-making of local authorities in France is a reality increasingly taken into account. Participation, often set up at the initiative of local politicians, however, reflects the willingness of citizens to get involved in local politics with varying degrees of commitment and sometimes different expectations. This article highlight the reader about the definition and the issues of participatory democracy in the French local authority.

Key words : participative democracy, local authorities, creating value.

Biographie de l’auteur

Christelle Perrin est maître de conférences en Sciences de Gestion à l’Institut Supérieur de Management (ISM) de l’Université de Versailles Saint Quentin en Yvelines. Elle mène ses recherches sur le management des organisations non marchandes (associations, organisations non gouvernementales, économie sociale et solidaire, organisations publiques). Elle est l’auteur de différents articles sur la gouvernance, l’éthique, le management, le financement des organisations non marchandes.

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Citoyens et démocratie participative dans les collectivités territoriales en

France

La satisfaction des citoyens/usagers des services publics sur un territoire est une préoccupation permanente des acteurs locaux. C’est la raison pour laquelle, les collectivités territoriales en France, afin de requérir l’avis des citoyens sur des problématiques locales qui les concernent directement, s’interrogent à la manière de mieux les intégrer au sein des processus de négociation/ décision de ces collectivités.

Ces démarches participatives, bien que de plus en plus prises en compte par les acteurs locaux (Blondiaux & Sintomer, 2002), soulèvent néanmoins de nombreuses interrogations notamment quant à leur application et leur impact sur le territoire.

Certains recherchent alors des réponses à leurs questions en se tournant vers l’expérience des pays d’Amérique Latine, où la dynamique participative est réelle. Y aurait-il donc des enseignements à en tirer ? Il est toutefois important de souligner que l’activisme des citoyens dans ces pays n’est en rien comparable à celui de la France.

Nous souhaitons dans cet article, définir les contours et les enjeux de la démocratie participative pour une meilleure compréhension des lecteurs de tout horizon.

Dans un premier temps nous présenterons quelques démarches participatives, puis nous aurons une réflexion sur l’implication des citoyens pour ces démarches participatives pour enfin analyser le rôle des collectivités territoriales dans la mise en place de ces démarches.

1. Une démocratie participative et des démarches participatives

La participation revêt une diversité de démarches qui sont plus ou moins institutionnalisées et plus ou moins contraignantes pour les élus qui en sont ou pas à l’initiative. En France, il existe quatre niveau de participation que sont : l’information, la consultation, la concertation et enfin la participation. L’information est le processus de participation le plus classique et le moins impliquant. Elle peut être descendante et vise à donner des éléments de compréhension sur les décisions prises. Elle peut aussi être ascendante lorsqu’elle nécessite de prendre en compte les doléances des citoyens. La consultation est un dispositif qui permet aux autorités locales de recueillir l’avis des citoyens. Elle prend souvent la forme d’enquêtes publiques (dispositif parfois obligatoire) qui précèdent la réalisation de projets. La consultation porte généralement sur les problématiques d’urbanisme, d’aménagement, de protection de l’environnement, et plus particulièrement sur tout projet présentant un risque ou ayant un impact sur la sécurité ou la santé publique. A titre d’exemple, la mise en place d’infrastructures de transport comme la création d’un tramway nécessite la mise en place d’une

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procédure de consultation. La consultation intervient généralement lorsque le

dossier est bien avancé et n’est pas juridiquement contraignant.

Le processus de concertation réunit des experts, des politiques et des citoyens sur des projets nécessitant à la fois un éclairage technique mais aussi stratégique. Cette démarche vise à associer la population au traitement d’un dossier, à l’instruction de la décision qui reste cependant du ressort de l’élu. Enfin, le processus de participation offre aux citoyens le pouvoir de s’impliquer dans le processus décisionnel des politiques publiques. Cette participation au pouvoir peut être déléguée lorsque la municipalité, par exemple, décide d’attribuer un budget pour un projet de quartier.

Ces formes de participation sont multiples1. Elles se concrétisent par la mise

en place de référendums locaux qui permettent aux citoyens de décider par le vote de la mise en œuvre d’un projet local, mais aussi de conseils de quartier qui réunissent les citoyens, les élus, éventuellement des experts, pour débattre de toutes les problématiques qui concernent le quartier. Il peut s’agir en l’occurrence de toutes les questions portant sur les projets d’animations dans le quartier mais aussi des délicates questions du financement des infrastructures, obligatoires pour les communes de plus de 80000 habitants. Ces dispositifs participatifs peuvent prendre aussi la forme de débats publics (obligatoires par la loi du 2 février 1995 avec une saisine de la commission nationale de débat public - CNDP).

La démocratie participative à la française est un véritable « patchwork » selon Blatrix (2009). Pour autant, ces dispositifs sont de plus en plus organisés voire obligatoires (voir ci-dessus les conseils de quartiers, etc...). Cette injonction à participer peut être interprétée comme une nouvelle contrainte pour les acteurs publics. D’une part, ces derniers sont amenés à organiser tous ces débats, d’autre part, ils doivent dans une certaine mesure tenir compte des avis et besoins des citoyens. Cette contrainte est d’autant plus forte qu’ils restent maîtres du design organisationnel et des processus de mise en place de la démocratie participative. A l’heure où la démocratie représentative connaît une crise, la démocratie participative se révèle être une nouvelle alternative à l’implication des citoyens. Et la non prise en compte de cette réalité par les élus pourrait leur être fatale. En effet, le besoin de participation et d’expression reste très présent sur un territoire même si Lippmann (2008) affirme que cette participation n’est que partielle et que les citoyens préfèrent vaquer à leurs affaires personnelles plutôt que de s’impliquer sur des problématiques locales.

2. La participation des citoyens au processus de décision des collectivités territoriales en France : comment, pourquoi, dans quel but ?

2.1. Implication versus engagement

Bien que cette participation soit souvent mise en place à l’initiative des acteurs politiques locaux elle manifeste cependant la volonté des citoyens à s’impliquer dans la sphère politique locale avec des degrés d’engagement et des attentes parfois différents (Mazeaud & Talpin, 2010). Elle correspondrait à ce qu’affirme (Blondiaux & Sintomer, 2002) à un impératif participatif. Pour autant, associer les citoyens au processus de décision reste parfois une gageure tant il est difficile de définir les raisons qui les poussent réellement à participer aux débats publics. Il est donc difficile de prévoir le taux de

1 Voir le site de l’ADELS – Association pour la démocratie et l’éducation locale et sociale – qui présente un

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participation à une enquête publique ou à un conseil de quartier, car

l’engagement n’est pas linéaire sur la durée et dans le temps.

Mazeaud et Talpin (2010) se sont penchés sur la question et ont analysé les raisons qui les conduisent à s’impliquer ou non dans le processus de participation. Ils ont identifiés quatre motifs de participation : la réponse à un devoir civique : pour certains, il est de leur devoir de participer à la vie locale, pour d’autres ils l’a rejettent, l’intérêt personnel : le plus souvent, les citoyens participent lorsqu’ils en ressentent le besoin ou lorsqu’ils se sentent directement concerné par le débat ou toute autre forme de participation. Ainsi le territoire a une place importante pour la participation. Il faut qu’il y ait un intérêt direct pour le citoyen, la participation n’est donc pas désintéressée, l’intégration sociale : participer c’est aussi se reconnaître au sein d’un groupe et partager ses convictions, tisser des liens sociaux avec les autres participants, le développement cognitif : participer aux débats démocratiques c’est aussi s’enrichir des avis des autres citoyens mais aussi des experts, ouvrir son champs de compréhension sur différents domaines qu’ils soient techniques ou non et pouvoir ainsi bâtir son propre raisonnement à la lumière des explications fournies.

La participation des citoyens reste inégale et parfois non représentative. D’une part certaines catégories de la population ne sont pas représentées. Il s’agit généralement des jeunes, des étrangers ou des classes populaires), mais aussi les personnes faiblement diplômées ou estimant ne pas avoir les compétences requises pour pouvoir suivre et participer à des débats publics. Se posent alors les questions de l’intérêt et de la compétence bien que chercheurs et élus s’accordent à penser que cette compétence est accessible à tous.

2.2. Des racines historiques et culturelles de l’implication

Cette problématique de l’implication est cependant bien française. L’implication des citoyens dans la vie publique locale a des racines historiques différentes suivant les pays ou les régions. Elle s’explique en partie par le rôle joué par l’Etat. On pourrait ainsi faire un parallèle avec l’implication des citoyens dans les associations. Le regroupement associatif en France a longtemps été interdit car vu comme étant une menace pour l’Etat. La loi Le Chapelier interdit toute association volontaire ou coalition. Archambault y voit un véritable frein à l’essor des associations et de la mobilisation des acteurs locaux dans la vie publique locale.

« La récession du tiers secteur sous la révolution et l’empire se prolongera au XIXème siècle qui sera marqué par un conflit permanent entre l’Etat centralisateur et la société civile qui reconstitue avec persévérance des réseaux associatifs diversifiés en dépit de la prohibition. Cette longue récession est l’origine historique du retard du secteur non lucratif français sur celui des pays Anglo-Saxons » (Archambault, 1996).

Ce n’est qu’à partir XIXème siècle que les associations prirent leurs essor et notamment avec la loi 1901 qui autorise à deux ou plusieurs personnes à se regrouper au sein d’une association à but non lucratif. Ayant effectué ses recherches sur le développement des associations à la fois en France et aux Etats-Unis, Archambault présentent les associations américaines comme étant une alternative à l’Etat non présent dans certains secteurs comme l’éducation et la santé. Salamon et Anheier (1997) précisent que la société est née de l’Amérique bien avant qu’elle ne le soit de l’Etat ce qui pourrait expliquer l’activisme des américains dans les causes associatives et l’importance accordée à la philanthropie même si un certain nombre d’autres arguments sont parfois présentés pour expliquer ce phénomène. La participation pourrait donc trouver une explication dans l’histoire et la capacité des acteurs à se mobiliser pour des problématiques publiques.

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En ce qui concerne la démocratie participative, l’Amérique Latine est souvent

prise en exemple. Il est fait l’apanage, de l’implication des habitants le plus souvent des quartiers populaires et des bidonvilles. Cette participation à la vie publique locale est initiée par les mouvements populaires ou communautaires (mAuss) qui sont très présents dans ces pays et qui veulent lutter contre les inégalités. Le cas le plus probant est celui de la guerre de l’eau mené à Cochabamba en Bolivie dans les années 2000. En 1999, le nouveau gouvernement Bolivien décide de privatiser la distribution de l’eau à Cochabamba. Cette initiative entraîna une augmentation significative du prix de l’eau, générant de fortes inégalités entre les couches sociales de la population. L’eau devint ainsi inaccessible aux populations les plus pauvres. S’ensuit, un mouvement de revendications coordonné par des associations, des syndicats, des paysans qui se sont réuni en collectif pour défendre « l’eau et la vie ». Un bras de fer s’établit entre la population pauvre et le Gouvernement. Cela met en lumière la difficile gestion des partenariats publics privés et les collaborations plus ou moins conflictuelles entre les différents partenaires et l’engagement actif des populations locales notamment lorsque les droits et la sécurité des populations sont bafoués. Dans ce cas présent, les populations se substituent à l’Etat défaillant car ils estiment qu’il ne remplit pas ses missions et luttent contre la malveillance des acteurs privés.

L’engagement des acteurs, nous semble-t-il est étroitement lié à l’histoire des politiques publiques mais aussi au positionnement et l’action de l’Etat dans la société.

2.3. Une sensibilisation des jeunes à la démocratie participative

Afin de remédier à cette désaffection de participation, certaines institutions tentent d’éduquer certains profils de la population à participer aux décisions publiques. C’est le cas par exemple des enfants. L’ONU a noué des partenariats avec des Lycées (Lycée Marseilleveyre à Marseille) afin que des jeunes comprennent mieux le fonctionnement des institutions et puissent ensuite prendre position sur des thématiques internationales. Il en est de même pour l’Assemblée Nationale à Paris qui invite régulièrement des groupes de lycéens ou d’étudiants à participer à des débats. A un niveau plus local, diverses initiatives sont également prises. Mais le plus souvent ces associations reposent sur un partenariat entre deux organisations (Institution et école) et l’intègrent dans un processus d’apprentissage. Les démarches individuelles des jeunes à ces manifestations ne sont en revanche que très peu nombreuses.

2.4. Participation et outils de démocratie participative

L’implication et l’engagement sont étroitement corrélés aux outils de démocratie participative développés par les collectivités territoriales. De la simple information à la participation, les outils participatifs s’adaptent aux volontés de chacun. Pour autant, si certains processus démocratiques ne mobilisent physiquement que peu de participants, d’autres moyens permettent de mobiliser plus massivement les citoyens tels que les NTIC (nouvelles technologies de l’information et de la communication). Plus anonyme, moins impliquant, les NTIC sont un canal d’information de plus en plus utilisé par les collectivités territoriales soit en interne par information directe (accès à un site internet pour donner son avis ou présenter une réclamation) soit dans le cadre d’une veille. En effet, les citoyens s’expriment via les réseaux ou par le biais d’associations qui défendent collectivement les intérêts de leurs membres. Etre à l’affut de ces mouvements collectifs c’est aussi repérer les attentes des citoyens.

La démocratie participative ne doit donc pas se limiter à un seul outil de participation. C’est la conjonction de tous ces modes de participation qui permettra aux collectivités territoriales d’être au plus près de la réalité des attentes des citoyens.

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3. Le rôle des collectivités territoriales dans les démarches participatives

La mise en place de démarches participatives nécessite donc l’implication à la fois des citoyens mais aussi la contribution des acteurs publics qu’ils soient élus ou agent. Cela nous amène à formuler deux questions. Comment ces démarches de participation contribuent-elles au développement de véritables politiques publiques de participation comme semble l’affirmer Gourgues (2012) et ces démarches « participationnalistes » (Blatrix, 2009) ne remettent-elles pas en cause la démocratie représentative ?

3.1. Démocratie participative et démocratie représentative

Selon Blatrix (2009) « les dispositifs de démocratie participative font partie intégrante de la démocratie représentative ». En effet, il est difficile de les déconnecter de toute démarche politique même si nous pourrions estimer parfois estimer le contraire.

En effet, la plupart des dispositifs de participation sont encadrés par la loi et impose aux élus d’y requérir surtout dans les domaines qui touchent la sécurité et la santé des citoyens. Cependant, les débats animés, les représentants de groupes de revendication pourraient conduire à remettre en cause leur légitimité, la vigilance est donc de rigueur. Pour Lascoumes (1996), « l’ordinaire de l’action publique est en grande partie une lutte sourde et continue des réseaux en place pour le repositionnement face aux enjeux sociaux. Les stratégies qui s’y développent visent à les qualifier ou les disqualifier en tant que problème politiquement traitable… ».

Il est donc important pour les élus de mesurer l’impact de la participation sur la représentativité et il est difficile de l’extraire de toute démarche politique. En effet, l’utilisation de ces démarches participatives uniquement comme faire valoir peut nuire à la représentativité. Pour autant, comme le souligne Blatrix (2009), l’articulation entre ces deux logiques – démocratie participative et démocratie représentative- reste difficile car elles sont fondamentalement différentes.

3.2. Des démarches qui nécessitent de revoir le mode de gestion des politiques publiques

En ce qui concerne sa mise en application, la démocratie participative est le reflet même des débats et ambiguïtés qui animent aujourd’hui la sphère publique autour des enjeux de la gouvernance verticale et la gouvernance horizontale. A la fois, la démocratie participative s’avère souvent être une démarche verticale décidée à l’initiative des acteurs publics mais elle laisse place aussi au triptyque participatif que sont les élus, les administratifs, les citoyens avec toutes les stratégies de jeux d’acteurs et de pouvoir que cela génère.

Une démarche de démocratie participative doit donc se construire autour de cette coalition d’acteurs et non être le reflet d’une seule volonté politique ou d’acteurs engagés. Ce n’est qu’à cette condition que la démocratie participative pourra être génératrice de valeur.

On pourrait s’inspirer du management des parties prenantes pour étudier le processus de création de valeur dans le cadre d’une démarche de participation. L’objectif est de tenir compte et d’arbitrer entre des demandes potentiellement contradictoires. Mais cela signifierait qu’il y ait un arbitre à la participation. Plutôt que de donner une suprématie de pouvoir des uns sur les autres, il est plus intéressant de se pencher sur la création de valeur générée par les échanges entre les acteurs. Sintomer (2008) précise que chaque acteur à la décision dispose d’un savoir exploitable. Ce savoir évolue par le dialogue entre les

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différentes parties prenantes au processus de participation. Cette étape est

nécessaire afin que les besoins s’expriment vers un savoir plus exploitable. Bien sûr ce savoir «s’inscrit dans le paradigme de la proximité entendu dans un triple sens » : une proximité géographique qui s’appuie sur un savoir local, la connaissance du milieu, de la communauté ; une proximité de communication sur le terrain entre les élus et les habitants, et une proximité « sociologique » entre décideurs et administrés lorsque la représentativité est à l’image du profil sociologique des habitants. Ainsi, qui mieux qu’un ouvrier peut connaitre les besoins et les ressources des ouvriers, qui mieux qu’une mère de famille peut connaître la réalité du quotidien des mères de familles. La présence d’une multiplicité d’acteurs au processus participatif permet alors de limiter les comportements opportunistes, dans le meilleur des cas, et si les avis sont pris en compte, pour évoluer vers des consensus ou des décisions génératrices de sens pour les uns et pour les autres. Ainsi l’expression des besoins, la re-formulation des attentes et la création de savoir communs et de décisions communes est porteuse de sens pour les uns comme pour les autres.

Les collaborations permettent donc de créer des externalités positives supérieures aux intérêts personnels de chacune des parties (Brinkerhoff, 2011) et contribue ainsi à renforcer l’intérêt général. D’autre part, la complémentarité entre les acteurs est une source de création de valeur (Kivleniece et Quelin, 2012). Elle permet l’accès ou le partage de savoirs, de compétences. Pour aller dans le même sens, des auteurs comme Koschman et al (2012), s’appuient sur la communication comme outil d’interaction et générateur de sens supérieur aux intérêts de chacun. Ils se focalisent sur la création de valeur du collectif.

4. Les effets des dispositifs participatifs sur l’action publique

Mais quels sont vraiment les effets des dispositifs participatifs sur l’action publique ?

Il est toujours possible d’évaluer les effets à court terme d’une démarche de participation. Il est en revanche beaucoup plus difficile d’obtenir une estimation globale des effets de participation sur un territoire. Beaucoup de travaux n’ont pas cherché à démontrer les effets de la participation mais plutôt à essayer d’identifier les succès ou les échecs des procédures participatives. Pour (Mazeaud, 2012), deux techniques sont généralement retenues. La première porte sur des approches ethnographiques, la seconde sur l’évaluation normative. La première s’intéresse aux savoirs mobilisés pour contester ou défendre un projet, la seconde se focalise sur les procédures afin d’en rechercher les effets sur la décision. On peut citer par exemple les budgets participatifs qui permettent de lutter contre la corruption et qui favoriserait une juste distribution des ressources. (Sintomer, Herzberg, Röcke, 2008). Blatrix (2009-2) quant à elle, a analysé les grilles d’évaluation des procédures de concertation. Ces grilles d’évaluation portent sur des critères quantitatifs ou qualitatifs allant du nombre de participants (et sa diversité, la logistique : nombre d’invitation envoyées, nombre d’experts mobilisés, etc…) à la qualité des échanges lors des concertations (possibilité à tous de pouvoir s’exprimer, diversité des arguments présentés, etc…). Ces démarches servent surtout au design institutionnel en partant du postulat que des « procédures équitables donnent des résultats équitables » (Blatrix 2009-2).

Mais l’important n’est- ce pas la qualité des échanges et la construction en vue d’introduire le changement plutôt que la satisfaction à tout prix d’objectifs recherchés ?

Conclusion :

La démocratie participative fait partie intégrante de la dynamique des territoires. Elle trouve, en partie, sa légitimité dans la crise de confiance des citoyens à l’égard des politiques. Pour autant, certains auteurs s’accordent à

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dire que ces dispositifs participatifs contribuent au travail de politisation

c'est-à-dire qu’ils entretiennent la croyance en la capacité d’action du politique sur l’action publique (Eymeri-Douzans, 2003).

L’implication des citoyens aux démarches participatives est aléatoire. Elle dépend de l’intérêt que chacun y trouve, de son engagement dans des démarches citoyennes, de l’âge, du sexe mais aussi de la culture. Les collectivités qui en prennent conscience doivent alors adapter des outils de démarche participative à la portée de tous (réunions, enquêtes, utilisation des NTIC…).

A la démarche purement verticale de la prise de décision (par le politique) s’ajoute une démarche plus horizontale avec une participation d’une pluralité d’acteurs. Cela nécessite de revoir le processus de gouvernance et nous interroge sur la création de valeur d’un tel dispositif. Les interactions entre la population et les agents modifient les perceptions, génèrent du sens à l’action. D’autre part cela nécessite pour les agents des collectivités territoriales de travailler encore plus dans la transversalité en ne raisonnant pas uniquement par compétence ou par métier mais en envisageant les problèmes évoqués par les citoyens dans leur globalité.

Si la démocratie participative peut être un moyen supplémentaire dans l’aide à la décision publique il ne doit en revanche par être le dépositaire exclusif. C’est la pluralité des dispositifs mis en œuvre sur le territoire qui contribueront à la performance de l’action publique territoriale.

Bibliographie :

Archambault (1996) : “Le secteur sans but lucratif : associations et fondations de France”, ed Economica, Paris.

Blatrix C. ( 2009) : « La démocratie participative en représentation », Sociétés contemporaines, vol 2, n°74, p. 97-119.

Blatrix C. (2009-2) : « synthèse de la littérature et des débats récents sur l’évaluation de la concetation , CDE Séminaire permanent 1, www.concertation-environnement.fr.

Blondiaux L. & Sintomer Y. (2002), « L’impératif délibératif », Politix , 57 (15), p. 17-35.

Eymeri-Douzans J.-M, 2003, ≪ Frontieres ou marches ? De la contribution de la haute administration a la production du politique. ≫ in Lagroye J. (dir.), La politisation, Paris, Belin.

Gourgues G. (2012) : « Des dispositifs participatifs aux politiques de la participation. L’exemple des conseils régionaux français, Participations, vol 1(2), p. 30-52.

Kivleniece I. & Quelin B.V. (2012), « Creating and capturing value in public-private ties : a public-private actor’s perspective”, Academy of Management Review, vol 3 (2), p. 272-299.

Koschmann M.A., Kuhn T.R., Pfarrer M.D. (2012) : « A communicative framework of value in cross-sector partnerships, Academy of management, vol 37 (2), p. 272-299.

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Lippman W., 2008 [1925], « Le public fantôme », Paris, Demopolis.

Mazeaud A. (2012) : « L’instrumentation participative de l’action publique : logiques et effets. Une approche comparée des dispositifs participatifs conduits par la région Poitou-Charentes », Participations, vol 1, n°2, p. 53-77.

Mazeaud A. & Talpin J. (2010), « Participer pour quoi faire, esquisse d’une sociologie de l’engagement dans les budgets participatifs, Sociologie, vol 1 (3), p. 53-70.

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Références

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