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La coopération Nord-Sud : don ou partenariat ?

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La coopération Nord-Sud : don ou partenariat ?

Gwenaëlle Ogandaga

To cite this version:

Gwenaëlle Ogandaga. La coopération Nord-Sud : don ou partenariat ?. Biennale internationale de l’éducation, de la formation et des pratiques professionnelles, CNAM Paris, Jun 2015, Paris, France. �halshs-01188484�

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1 Communication n° 811 - Atelier de communication : « international »

La coopération Nord-Sud : don ou partenariat ?

Gwenaëlle OGANDAGA, Docteur en Sciences de Gestion, chercheur indépendant.

gwenaelle.ogandaga@yahoo.fr

Résumé

La coopération internationale menée par les collectivités territoriales implique l’établissement d’une relation et d’un échange entre celles-ci. Comme toute forme de coopération inter-organisationnelle, elle est structurée par différentes règles de l’échange social (notamment, la réciprocité). Dans cette analyse, la coopération est abordée à partir de la théorie du don. Des partenariats entre des organisations publiques locales du Nord et du Sud sont examinés. Les déclinaisons du don et de la réciprocité, dans des coopérations inter-organisationnelles parfois pas déséquilibrées, permettent de questionner la nature de la coopération Nord-Sud. S’agit-il d’un don ou d’un partenariat ? Un examen de l’articulation du registre du calcul et de celui du don, pour parvenir à coopérer de manière efficace et durable, est ainsi proposé.

Mots clés : coopération, partenariat, don, réciprocité, collectivités territoriales.

Introduction

La coopération décentralisée regroupe l’ensemble des initiatives et actions de coopération internationale menées par une ou plusieurs collectivités territoriales (régions, départements, communes et/ou leurs groupements) et une ou plusieurs autorités territoriales étrangères et/ou leurs groupements. Le terme « coopération » indique que les collectivités locales ne peuvent intervenir dans des pays étrangers qu’en relation avec des collectivités territoriales, et non de manière unilatérale. Ne s’inscrivant pas dans le cadre d’accords internationaux, elles se rapportent à une coopération strictement limitée aux compétences exercées par les collectivités locales dans le cadre de la loi et en fonction de l’intérêt local. Elles revêtissent alors la forme d’échanges et de relations entre collectivités s’inscrivant dans un partenariat formalisé par une convention. Comme toute forme de coopération inter-organisationnelle, la coopération décentralisée est structurée par différentes règles de l’échange social dont la réciprocité. Dans cette analyse, la coopération est abordée à partir de la théorie du don. L’étude repose sur l’analyse de vingt-deux cas partenariats liant des collectivités territoriales française à des collectivités territoriales africaines. La coopération décentralisée conduit à des formes de coopération et/ou de collaboration entre organisations et/ou entre individus. Au niveau organisationnel, il s’agit principalement des collectivités territoriales et des entités étrangères ayant le statut de partenaires. Au niveau individuel, il s’agit des personnes chargées d’animer les partenariats et qui sont ainsi amenées à collaborer ensemble et personnellement pour la mise en œuvre des différents projets. Les entités partenaires, ainsi que les individus

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2 qui les composent, s’engagent à travers des comportements coopératifs et collaboratifs en vue de la réalisation des objectifs du partenariat.

Au-delà de l’aspect collaboratif, les coopérations représentent un moyen d’accès, d’acquisition ou d’échange de compétences permettant aux organisations partenaires d’élargir leur base de compétences et de soutenir leur développement (Hamel, 1991 ; Kogut & Zander, 1993 ; etc.). Ainsi, étant susceptibles d’être acquises dans le cadre de la coopération décentralisée, les ressources et compétences ont pour vocation d’améliorer la qualité globale des collectivités bénéficiaires (efficience et efficacité). Pourtant, de nombreux déséquilibres caractérisent ces coopérations. En effet, le système d’échange ne décrit pas toujours une relation mutuellement avantageuse telle que cela est énoncé dans les conventions de partenariat. De manière générale, le partenaire du Sud est le bénéficiaire prioritaire de telle coopération. Dans ce contexte, la réciprocité est remise en question. Au regard des asymétries existant entre ces partenaires, nous interrogeons la nature de ces coopérations Nord-Sud. S’agit-il d’un don ou d’un partenariat ? Nous proposons un examen de l’articulation du registre du calcul et de celui du don. Préalablement, nous effectuons une description des types de relations inter-organisationnelles, puis, présentons successivement la coopération en tant que don et la coopération en tant que partenariat. A l’issue de ces exposés théoriques, une discussion est proposée ; elle repose sur l’analyse des entretiens effectués dans le cadre de la recherche.

1. Quels types de relation entre les organisations ?

Le Sénat français considère la coopération décentralisée comme « toutes les relations d’amitié, de jumelage ou de partenariat nouées entre les collectivités françaises et les collectivités équivalentes d’autres pays ». D’une large amplitude, cette définition permet d’appréhender tout phénomène relationnel organisé entre des collectivités locales pour l’intégrer dans le champ de la coopération décentralisée. Mais cela pose néanmoins des difficultés évidentes pour saisir la diversité de nature, de forme ou de configuration des projets et des relations inter-organisationnelles qui les sous-tendent. Ces difficultés ne sont pas propres à la coopération décentralisée. La caractérisation et la qualification des relations de coopération entre organisations sont des problématiques prégnantes dans le domaine de la gestion. Elles portent notamment sur la nature (transactionnelle ou collaborative) et sur les types de coopération.

La nature des relations inter-organisationnelles est conditionnée par celle de l’échange entre organisations. Les rapports entre structures sont présentés sous la forme d’un continuum allant de l’échange transactionnel à l’échange collaboratif ou relationnel (Anderson & Narus, 1991), selon les études ont trouvera les termes d’échanges ou de relations caractérisés avec les même les mêmes qualificatifs.

Ces types se distinguent suivant des critères tels que l’existence de liens sociaux entre les parties (caractère personnel ou impersonnel des relations), l’inscription de leurs échanges dans une histoire commune aux parties, ainsi que leur ancrage dans la durée.

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3 Les relations transactionnelles sont d’ordre économique avec la fixation d’un prix pour une transaction isolée du point de vue des partenaires. Plus explicitement, aucun lien n’existe entre les partenaires de l’acte d’échange (ni antérieurement, ni postérieurement). Le caractère isolé de l’acte d’échange et l’impersonnalité de la relation, liée à l’ignorance des identités des participants, lui confèrent un caractère discret (Macneil, 1980).

Pour ce qui concerne les relations collaboratives, celles-ci sont caractérisées par des actes d’échanges (transactions) ancrés dans une histoire commune et dans l’anticipation de l’avenir de cette histoire. Dans cette perspective, sont considérés à la fois l’antériorité « the shadow of the past » (Soda, Usai, & Zaheer, 2004) et la postérité de la relation (« the shadow of the future »). La relation future est basée sur des présupposés implicites et explicites, la confiance et le projet (en tant qu’intention collaborative future). Les participants à ce type d’échange sont supposés trouver de la satisfaction personnelle (non basée sur des aspects économiques) et s’engager dans des échanges sociaux. La nature (transactionnelle ou relationnelle) des relations est susceptible de varier selon les secteurs (Anderson & Narus, 1991). Ainsi, suivant l’analyse de Lefaix-Durand et al. (2006), seule la relation collaborative est marquée par l’existence de liens diversifiés. C’est pourquoi ces auteurs estiment que l’ensemble des relations inter-organisationnelles correspond aux relations collaboratives (dénommées par Anderson & Narus, 1991). A ce titre et de fait, les coopérations impliquant des collectivités territoriales constituent des formes de relations collaboratives.

2. La coopération décentralisée : une relation d’échange.

2.1.La coopération : du don au partenariat.

Mobiliser les théories du don dans une étude des rapports sociaux liés au monde du travail peut sembler paradoxale. C’est le constat posé par Norbert Alter (2009) à partir de son analyse de la coopération en milieu professionnel, en tant que système d’échange. Il considère que coopérer, c’est donner. Compte tenu de cette affirmation, il importe de savoir s’il s’agit d’un don pur, unilatéral ou d’un système de don-contre-don

Le don

Le don pur est « l’acte par lequel un personne donne un objet ou rend un service sans rien attendre ni recevoir en retour » (Malinowski, 1989). Cette conception du don « unilatéral et sacrificiel » s’oppose à celle des sciences sociales qui présente plutôt un échange marchand impliquant un retour avec comme caractéristique implicite : l’équivalence des éléments échangés. Nous adoptons la définition plus récente de Godbout et Caillé (1992, p.32) : « toute prestation de bien et de service effectuée, sans garantie de retour, en vue de créer, nourrir ou recrée un lien entre les personnes ». Cette définition est étendue aux comportements et aux actions qui sont du registre de la générosité, du don de soi n’ayant pas pour visée d’alimenter le lien social (Caillé, 2005). Il peut s’agir d’une assistance, de ressources de natures diverses (financières, matérielles, technique, etc.), de services, de conseils, de gestes, de sentiments. Inviter et recevoir son partenaire constituent également des prestations assimilables à des dons.

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4 Inscrite dans le même registre, la notion d’aide correspond à un transfert de ressources (techniques, humaines, financières) sans préjuger des conditions de ce transfert, c'est-à-dire de savoir si la source d'aide s'implique dans la réalisation, s'il y a coopération ou substitution totale vis-à-vis du groupe ou de la structure aidée. Elle peut être l'objet principal d'une relation ou n'en être qu'un élément parmi d’autres (DGCID1

2004, p. XIX). Ainsi, la coopération en tant que don correspond donc à la situation dans laquelle :

­ l’aide (ou la contribution) n’est pas conditionnée à la contribution du partenaire ; ­ l’aide peut être fournie même en cas d’absence de liens émotionnels entre les

partenaires ;

­ l’aide et les investissements sont désintéressés ;

­ l’aide peut excéder le niveau de contribution du partenaire qui en bénéficie.

Concrètement, l’aide prend la forme de don. Or, il y a la volonté de plus en plus prégnante de pratiquer le renforcement des compétences au détriment de la fourniture d’équipements divers, ou d’aide unilatérale. De ce fait, la logique de coopération paternaliste dite « à l’ancienne », caractérisée par l’envoi de containers du Nord-vers le Sud, est décriée aussi bien par les partenaires du Nord que par ceux du Sud. Le besoin d’une contrepartie devient alors un réflexe. Ce qui domine alors est le besoin pour chaque partenaire d’apporter une contribution significative pour que la relation soit saine et équilibrée. Sont ainsi mises en exergue : les notions d’équité et de bénéfice mutuel (apport mutuel d’expertise par exemple). Autrement dit, il s’agit de réciprocité, caractéristique majeure d’un partenariat.

Le partenariat

La coopération en tant que partenariat se caractérise par : ­ le souci pour l'intérêt mutuel ;

­ l’importance accordée à l'équivalence des contributions et des bénéfices tirés du partenariat ;

­ l’ajustement des contributions aux efforts du partenaire ;

De nombreuses variables sont mobilisées pour décrire le partenariat. Le tableau ci-après les présente de manière non-exhaustive. Cela constitue des éléments d’analyse et d’appréciation d’une relation partenariale.

1

Direction Générale de la Coopération Internationale et Décentralisée, (2004). Convention d'objectifs avec Cités Unies France. Evaluation de la convention d'objectifs (2000-2003). MAEE.

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Tableau 1 Les variables du partenariat

Variables Définition Synonymes ou concepts associés

Références

Durée de la relation Période de temps depuis laquelle le partenariat existe.

Age ou durée de la relation, continuité, durée avec le

partenaire.

Dyer & Chu, 2000; Kumar, Scheer, & Steenkamp, 1995.

Volonté de poursuivre la relation ou orientation long terme

Intention des partenaires de maintenir la relation dans le futur.

Poursuite de la relation, intention de rompre le partenariat, continuité de la relation.

Krause, 1999; Kumar, Scheer, & Steenkamp, 1995; Heide &

Miner, 1992.

La dépendance Evaluation de la valeur des ressources procurée par le partenaire combinée à l’absence ou la faiblesse des alternatives.

Dépendance relative ou asymétrique, coûts de rupture,

déséquilibre du pouvoir ; Interdépendance.

McCarter & Northecraft, 2007; McElroy et al.,2001;

Emerson, 1962.

La coordination Actions et prises de décision conjointes entre les partenaires pour l’accomplissement des tâches collectives.

Coopération, actions conjointes. Morgan & Hunt, 1994 ;Anderson & Narus,

1990.

Les partenariats de coopération décentralisée s’inscrivent dans un horizon temporel relativement long (conventions pluriannuelles). L’intention de poursuivre la relation est présente dans les différents discours. Par ailleurs, les renouvellements de convention-cadre ou la signature de conventions opérationnelles (annuelles ou pluriannuelles) sont des indicateurs pertinents de l’inscription de la relation dans la durée.

L’ancienneté de la relation constitue un facteur mobilisateur pour l’échange coopératif. Deux types d’ancienneté coexistent : l’ancienneté formelle qui s’évalue à partir de la date de formalisation du partenariat par le biais de la signature d’une convention et l’ancienneté informelle relative aux premiers contacts et aux autres formes de relation (entre les collectivités territoriales) qui préexistaient avant la formalisation.

Les relations entre organisations impliquent une influence mutuelle mais pas forcément d’égale ampleur. Dès lors, on parle d’interdépendance caractérisée par la dépendance mutuelle entre les organisations. Il s’agit de la condition selon laquelle les bénéfices et les stratégies d’une organisation sont affectés par le comportement conjoint des deux parties (Mahapatra et al. 2010). Il convient donc d’opérer une distinction entre une interdépendance transactionnelle et une interdépendance relationnelle (Cornu, 2004). L’interdépendance transactionnelle est caractéristique d’une relation dominée par les considérations économiques et l’intérêt (calculatoire). Pour une collectivité, la dépendance transactionnelle s’évalue au regard du volume de projets, des coûts de de ces derniers, du montant de l’aide, de l’impact économique sur le territoire, etc. L’interdépendance relationnelle repose sur la force des relations inter-organisationnelles et interpersonnelles. Elle est influencée par le contexte historique et social ainsi que ses évolutions. Ce sont les liens créés entre les individus qui vont constituer l’actif spécifique de la relation partenariale.

La coordination correspond à la manière dont les parties travaillent correctement ensemble dans l’objectif d’accomplir un ensemble de tâches collectives. L’objectif d’une coordination est d’assurer la cohérence globale des actions menées concomitamment par différentes parties prenantes. Celle-ci est principalement évaluée par la prise de décision conjointe.

Les partenariats étudiés se caractérisent par une indépendance relationnelle élevée entre les partenaires. Ainsi, une coordination multiniveaux est menée dans le but d’assurer la

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6 cohérence et l’efficacité des actions. Ces partenariats ont pour vocation d’être durables. Ils lient des collectivités partenaires aux spécificités distinctes et sont ancrés dans un système d’échange parfois asymétrique.

3. La structure d’échange : investissements et bénéfices.

Les investissements sont les contributions de chaque partenaire en termes de temps, d’effort, de ressources (matérielles, financières, techniques, humaines, etc.) afin de construire et conforter la relation. Les variables permettant de mesurer la qualité de la relation sont nombreuses. Il peut s’agir des investissements réalisés pour le bon fonctionnement de la relation (formation, équipement, ressources humaines, etc.), de la spécificité du bien ou du service échangé (Joshi et Stump, 1999), des contributions respectives (réelles ou attendues) des partenaires aux bénéfices réalisés (Kim, 1999), de la possibilité et de la capacité de remplacer ce partenaire (De Ruyter et al., 2001). Les ressources humaines semblent toutefois constituer l’actif spécifique le plus important. En effet, celles-ci renvoient aux connaissances, aux compétences, aux savoir-faire, à la relation de travail construite dans le temps, aux formations particulières effectuées dans l’intérêt particulier d’un partenariat, à la création de routines dédiées au partenariat (Payan & Svensson, 2007). Tant qu’elles ne sont pas suivies d’une contrepartie, les contributions sont assimilables à des dons (voir tableau 2).

Tableau 2 Les variables de la structure de l'échange entre les partenaires

Variables Définition Synonymes ou concepts associés

Références

Investissements Contribution de chaque partenaire en termes de temps, d’effort, de ressources (matérielles, financières, techniques, humaines…) afin de

construire une relation solide.

Contributions, apports de nature diverses, aide.

Palmatier, Dant, Grewal, & Evans, 2006 ; De Wulf, Odekerken-Schröder, &

Iacobucci,2001; Jap & Ganesan, 2000 ; Ganesan 1994.

Bénéfices de la relation

Bénéfices tirés du partenariat incluant des aspects matériels et immatériels de nature

instrumentale et/ou symbolique

Bénéfices, gains, retombées et apports fonctionnels et sociaux.

Palmatier et al., 2006; Meyer & Hercovitch, 2001; Morgan & Hunt, 1994.

Les contributions financières des partenaires constituent la caractéristique majeure des investissements : montant du financement octroyé, quotités respectives des partenaires (non seulement pour les collectivités directement partenaires mais aussi pour les partenaires associés, tels que les Etats, l’Union Européenne, etc.). Il peut ainsi coexister plusieurs sources de financement. On observe que les investissements sont éminemment variables selon les projets mais également selon les collectivités territoriales. Ils sont tributaires des capacités de financement respectives. Outre les apports financiers directs et chiffrables, il y a également la valorisation des actifs mobilisés dans les projets. Cette valorisation est constituée d’une estimation financière d’éléments matériels, techniques et humains, mis à contribution par un partenaire. Cela témoigne ainsi de la diversité de la nature des investissements.

Dans le cadre des relations inter-organisationnelles, les bénéfices ou apports correspondent à ce qui crée ou ajoute de la valeur pour chacune des parties. Ces bénéfices peuvent être de différentes natures : financière, relationnelle, professionnelle ou encore organisationnelle

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7 (compétences, techniques…). Au regard des investissements effectués par les parties dans la relation, la question des bénéfices renvoie à la notion de calcul. C’est aussi la spécificité des apports du partenariat qui est soulignée (Morgan & Hunt, 1994).

Au niveau individuel, les bénéfices de la relation génèrent un engagement normatif. Il provient d’une obligation de symétrie (Meyer & Hercovitch, 2001) liée à la norme de réciprocité (Gouldner 1960 ; Wu et al. 2006). Cette approche est transposable dans l’analyse de la coopération inter-organisationnelle. En effet, la question des bénéfices attendus (pour l’organisation) est déterminée par la réciprocité. En l’occurrence, la réciprocité entre les partenaires organisationnels ne se limite pas uniquement aux investissements et aux bénéfices (intérêts). Phénomène plus complexe qu’il n’y parait, la réciprocité inclut aussi pour les organisations, des dimensions d’intention, d’attente, de temporalité, de valeur ou encore de conditionnalité. Ainsi, il convient de ne plus inscrire le débat dans une considération dichotomique visant à opposer le don (comme transfert unilatéral, altruiste, désintéressé, inconditionnel et qui répond à la norme de bienfaisance), à la transaction (bilatérale, intéressée, conditionnelle, qui répond à la norme de réciprocité). Cette dernière est conçue comme le gage du succès d’un partenariat.

Conclusion

Il est concevable que l’asymétrie, existant parfois entre les partenaires nord-Sud, crée un déséquilibre dans l’échange. Cela conduit donc à la non-équivalence des bénéfices. Les notions de rationalité et de motivation de l’action rappellent « qu’on ne donne pas pour rien » : ne pas attendre de retour déterminé ne signifie pas ne rien attendre du tout, agir sans motivation et sans visée, sans pourquoi (cause) et sans pour quoi (but) (Caillé, 2005). Même si coopérer, c’est donner (Alter, 2009), l’obligation de coopération Nord-Sud va au-delà d’un devoir moral d’aide et d’assistance et s’inscrit désormais dans le cadre d’un partenariat ou d’une coopération inter-organisationnelle. En conséquence, étudier les rapports Nord-Sud, dans leurs déséquilibres et leurs spécificités, suggère de mettre l’accent sur l’ensemble des sources de l’action humaine et sociale que sont : l’obligation, la spontanéité, l’intérêt à (registre de l’instrumentalité) et l’intérêt pour (registre du plaisir).

Bien que n’ayant pas vocation à créer et alimenter le lien social entre des partenaires, le don pur joue ce rôle lorsqu’il engage la relation et la nourrit dans le cadre d’un partenariat durable. Conformément à la norme de réciprocité, le don doit être suivi du contre-don. A une logique de transfert succède une logique de transaction. Ainsi, plutôt que de chercher à savoir s’il s’agit d’un don ou non, en raison du déséquilibre des échanges, il conviendrait davantage de pointer la question de la satisfaction par rapport à la relation (Kale et al, 2002). En tant qu’état affectif résultant d’une évaluation multidimensionnelle de relation de collaboration entre deux organisations (Geysken, Steenkamp & Kumar, 1999), la satisfaction est une évaluation affective globale portée sur la relation partenariale (Anderson & Narus, 1990). Elle repose sur de l’appréciation des dirigeants de la coopération. Geyskens et al. (1999) considèrent deux types de satisfaction économique et non-économique.

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8 La satisfaction économique est une réponse affective (positive) étroitement liée aux retombées économiques de la relation avec un partenaire. L’atteinte des buts fixés constitue également un critère de satisfaction. Ainsi, la satisfaction porte autant sur l’efficacité générale et la productivité de la relation avec le partenaire que sur les résultats financiers. Il convient de souligner que certaines coopérations décentralisées, bien que portant parfois sur des thématiques économiques, n’ont pas pour vocation de « faire du chiffre », c’est-à-dire de produire des effets immédiatement profitables aux collectivités partenaires. La satisfaction non-économique est une réponse affective (positive) aux aspects non économiques ou psychosociaux de la relation (Mohr et al. 1996 ; Dwyer & Gassenheimer, 1992 ; Anderson & Narus, 1990). Dwyer & Gassenheimer (1992, p. 184) insistent sur le caractère fiable, équitable et gratifiant des interactions sociales entre les partenaires d’échange. Dans cette perspective, on renouvelle l’intérêt pour la réciprocité.

L’évolution des logiques de coopération (et les discours afférents) témoigne que le don pur est de moins en moins pratiqué dans les coopérations Nord-Sud en faveur de la réciprocité. Dès lors, les déséquilibres sont comblés par la prise en compte de retombées symboliques et indirectes tel que : l’enrichissement culturel, l’ouverture sur le monde, le rayonnement.

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10 Kumar, L. N., Scheer, L. K., & Steenkamp, J.-B. E. (1995). “The effects of perceived interdependence on vulnerable resellers”. Journal of Marketing Research, vol.32(August), p. 348-356.

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Figure

Tableau 1 Les variables du partenariat
Tableau 2 Les variables de la structure de l'échange entre les partenaires

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