• Aucun résultat trouvé

« Ça veut dire quoi "non-sélectif" ? Ils prennent tout le monde ?! » La socialisation des lycéen•ne•s à la sélection

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "« Ça veut dire quoi "non-sélectif" ? Ils prennent tout le monde ?! » La socialisation des lycéen•ne•s à la sélection"

Copied!
15
0
0

Texte intégral

(1)

HAL Id: halshs-03192704

https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-03192704

Submitted on 8 Apr 2021

HAL is a multi-disciplinary open access

archive for the deposit and dissemination of

sci-entific research documents, whether they are

pub-lished or not. The documents may come from

teaching and research institutions in France or

abroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est

destinée au dépôt et à la diffusion de documents

scientifiques de niveau recherche, publiés ou non,

émanant des établissements d’enseignement et de

recherche français ou étrangers, des laboratoires

publics ou privés.

monde ?! ” La socialisation des lycéen

•ne•s à la sélection

Marion Valarcher

To cite this version:

Marion Valarcher. “ Ça veut dire quoi ”non-sélectif” ? Ils prennent tout le monde ?! ” La socialisation

des lycéen

•ne•s à la sélection. Sélections, du système éducatif au marché du travail : XXVIèmes

journées du longitudinal, Toulouse, 12-13 novembre 2020, pp.121-136, 2021, Céreq Echanges,

978-2-11-151942-8. �halshs-03192704�

(2)

monde ?! »

La socialisation des lycéen·ne·s à la sélection

Marion Valarcher

*

Introduction

La mise en place en 2018 de Parcoursup, nouveau dispositif d’orientation post-bac, a cristallisé les mobilisations étudiantes et enseignantes contre la sélection à l’entrée de l’enseignement supérieur et notamment de l’université1. Arguant que la sélection existait déjà de fait dans l’ancien système (APB,

admission post-bac), Jean-Michel Blanquer, ministre porteur de la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (loi ORE), affirmait qu’il s’agissait de trouver une solution pour les formations non sélectives dites « en tension » pour lesquelles il y avait davantage de candidat·e·s que de places et qui recouraient alors au tirage au sort. Il expliquait alors qu’il n’était pas du tout question d’organiser la sélection à l’entrée de l’université2. Deux rhétoriques s’opposent ainsi : celle du gouvernement affirmant

que certaines formations seraient sélectives et d’autres non, et la rhétorique mobilisée par les détracteurs de la réforme soutenant que toutes les formations de l’enseignement supérieur sont désormais, de fait, sélectives. Le site internet de Parcoursup reprend la rhétorique gouvernementale et distingue les formations sélectives des formations non sélectives. Ces dernières correspondent aux licences auxquelles les bacheliers et bachelières doivent pouvoir accéder une fois titulaires de leur baccalauréat mais « dans la limite des capacités d’accueil » (Image 1). Cette restriction par rapport aux places disponibles constitue un argument de plus pour les détracteurs·trices de Parcoursup qui l’accusent ainsi d’entériner la généralisation de la sélection à l’entrée de l’enseignement supérieur.

En effet, le manque de places dans certaines formations non sélectives de l’enseignement supérieur empêche de facto que l’ensemble des bacheliers et bachelières le désirant s’y inscrivent. Ces formations pratiquent donc, d’une manière ou d’une autre et selon des critères variables, une forme de sélection. La distinction institutionnelle s’apparente ainsi davantage à un héritage historique qu’à une labellisation pertinente. On peut se demander si cette distinction fait sens pour les lycéens et lycéennes qui s’orientent maintenant vers l’enseignement supérieur. Dans quelle mesure mobilisent-ils la distinction entre formations sélectives et non sélectives dans leurs discours sur l’enseignement supérieur ? Cette labellisation prend-elle davantage de sens dans leurs pratiques d’orientation ?

Nous proposons ici d’analyser les récits de la sélection qui sont faits par les lycéennes et les lycéens afin de comprendre leurs représentations de l’enseignement supérieur et d’étudier les processus de socialisation à l’origine de ces récits.

* OSC Sciences Po.

1

https://www.lemonde.fr/campus/article/2018/02/01/journee-d-action-contre-la-selection-a-l-universite-et-la-reforme-du-bac_5250136_4401467.html

(3)

Image 1 Formations sélectives et formations non-sélectives

Capture d’écran du site de Parcoursup.fr (juin 2020)

Cette recherche s’inscrit dans le cadre d’une thèse en cours qui s’efforce de saisir les déterminants des pratiques et des vécus de l’orientation post-bac de lycéennes et de lycéens d’Île-de-France. Elle vise notamment à étudier les effets des dispositions temporelles genrées et de classe sur l’orientation (Masy, 2013) et leur articulation avec les dispositifs nationaux et locaux de l’orientation (VanZanten & Legavre, 2014 ; Lemêtre & Orange, 2017). La partie de ce travail présentée ici repose sur le suivi pendant un peu plus d’un an de quarante-et-un lycéennes et lycéens scolarisé·e·s entre 2018 et 2020 en classe de première puis en terminale dans trois lycées d’Île-de-France. Les trois établissements se différencient les uns des autres selon différents critères dont le lien avec l’orientation ont été bien documentés par des travaux précédents : ils diffèrent tant sur le plan de la composition sociale des élèves accueilli·e·s, que sur celui des filières de baccalauréat qu’ils proposent (Convert, 2010) ou encore en fonction de leur situation géographique dans l’agglomération parisienne (Frouillou, 2015) et donc des types de formations du supérieur présentes dans les alentours (Nakhili, 2008 ; Orange, 2010).

Le lycée Germaine Tillion3 est situé dans la banlieue éloignée de Paris, une ligne de TER le relie à la

capitale en une quarantaine de minutes. C’est un grand lycée d’enseignement général, technologique et professionnel qui propose les trois filières de bac général, trois filières de bac technologique et six filières de bac professionnel ainsi que deux CAP. Dans la continuité des classes technologiques, il propose deux sections de techniciens supérieur (préparation du BTS). Son secteur de recrutement recouvre la sous-préfecture où est situé l’établissement et vingt-deux communes rurales alentours.

3 Les noms des établissements ainsi que ceux des personnes enquêtées ont été modifiés afin de garantir l’anonymat de celles et

ceux qui ont accepté de donner de leur temps pour cette recherche. Les prénoms des lycéen·ne·s ont été modifiés de façon à ce qu’ils conservent les connotations de genre, de classe et d’appartenance ethnoraciale des prénoms originaux, sauf demande expresse des enquêté·e·s. Les noms des établissements ont été choisis de manière plus libre et correspondent à des noms de femmes célèbres

(4)

45 % des jeunes qui y sont scolarisé·e·s appartiennent aux classes supérieures4 et 20 % aux classes

populaires.

Le lycée Olympe de Gouges est situé à 15 kms de Paris, en RER, dans l’académie de Versailles. Le lycée propose les trois filières de bac général et une classe de filière technologique (Sciences et techniques de marketing et de gestion, STMG). Il accueille en son sein un grand nombre de classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) plus ou moins bien réputées. La population qui fréquente l’établissement se compose principalement de jeunes issu·e·s des classes supérieures (plus de 75 %), souvent très diplômées, qui vivent dans la ville ou qui ont obtenu des dérogations pour être scolarisé·e·s dans le prestigieux établissement.

Le lycée Louise Michel est un établissement général, technologique et professionnel situé dans l’académie de Créteil, non loin d’une station de métro, à quelques kilomètres du périphérique parisien. En plus des filières de bac général on peut y suivre des formations dans l’une des trois classes de STMG ou en bac professionnel Gestion des administrations. Après le bac, le lycée propose une classe préparatoire littéraire et une filière de BTS de Service informatiques aux organisations, et une formation complémentaire d’initiative locale. L’établissement scolarise 44 % de jeunes issu·e·s des classes populaires et 10 % de classes supérieures.

Le travail présenté ici repose principalement sur l’analyse qualitative des entretiens semi-directifs et des échanges intermédiaires par SMS et/ou par appels téléphoniques (Blocket al., 2012) réalisés avec les quarante-et-un lycéen·ne·s entre la fin de leur année de première et l’été suivant leur terminale. L’intensité des échanges pendant une période de parfois un an et demi a donné accès à des informations sur les représentations des enquêté·e·s — notamment de l’enseignement supérieur —, sur leurs pratiques scolaires et culturelles ainsi que sur leurs positions sociales. L’approche longitudinale permet de saisir en actes les processus de socialisation et la construction des catégorisations de l’enseignement supérieur pendant les années de première et de terminale.

Ce dispositif d’enquête est également complété par une méthode expérimentale inspirée du travail d’analyse des catégorisations socioprofessionnelles de L. Boltanski et L. Thévenot (1983), plus récemment renouvelée (Deauviau et al., 2014). Pendant l’un des entretiens, il a été demandé aux lycéen·ne·s de classer des cartes représentant quarante-huit formations de l’enseignement supérieur en différents tas (en regroupant les formations jugées les plus proches et en séparant les formations les plus différentes) puis de nommer les tas ainsi obtenus. Les cartes figurent un certain nombre d’informations sur les formations et parmi lesquelles on trouve la bipartition entre « formations sélectives » et « formations non-sélectives » évoquée précédemment. Ce dispositif permet d’appréhender les principes de catégorisation de l’enseignement supérieur. L’analyse portera autant sur le processus de classement et les justifications explicitées par les enquêté·e·s que sur le résultat de ce classement.

Enfin, la recherche repose également sur un dispositif d’expression graphique qui constitue une méthode visuelle dont l’intérêt peut être mis en perspective avec celui que représente l’usage de la photographie dans la recherche en sciences sociales. Les lycéen·ne·s ont représenté schématiquement sur une feuille blanche la manière dont ils et elles se figurent les études supérieures, proposant ainsi des « cartes mentales de l’enseignement supérieur » (Proboeuf, 2017). La méthode visuelle constitue d’une part un support à l’expression orale comme peut l’être l’usage de la photographie (photo-elicitation interview) (Meyer, 2017), permettant de développer dans le cadre de l’entretien des représentations de l’enseignement supérieur et de ses formations qui n’auraient pas été abordés spontanément auparavant. D’autre part, ce dispositif méthodologique s’apparente également à une démarche photo-participative (Burton-Jeangros et al. 2017) qui consiste à faire produire aux enquêté·e·s un regard sur le monde qui les entoure.

4 Les données sont issues des enquêtes IPES 2015, et reprennent les catégorisations d’appartenance de classe qui y sont

produites à partir des catégories socio-professionnelles des parents (distinguant les favorisé·e·s A, favorisé·e·s B, moyens et défavorisé·e·s)

(5)

Ces différents dispositifs d’enquête permettent donc d’étudier les manières indigènes de penser la sélection et les différents processus de socialisation qui concourent ainsi à créer ces conceptions différentes.

Nous verrons ainsi dans un premier temps que les élèves de lycée sont tellement conscient·e·s de l’existence d’une sélection généralisée à l’entrée de l’enseignement supérieur que la distinction entre formations sélectives et formations non sélectives ne fait plus sens pour elles et eux : ils et elles ne la mobilisent ni dans leurs discours, ni dans leurs pratiques d’orientation. Dans une deuxième partie, nous verrons que l’omniprésence de la sélection n’efface pas des distinctions que les élèves continuent d’opérer entre des formations plus sélectives que d’autres. Nous prêterons une attention particulière aux critères de sélection qui sont mobilisés par les lycéens et lycéennes et tenterons ⎼ en remettant ces critères en perspective avec leurs parcours scolaires et familiaux ⎼ d’identifier quelques processus de socialisation à l’origine de ces différences de représentations de l’enseignement supérieur.

1. Sélection partout, sélection nulle part

1.1. Une telle évidence…

Pour les lycéens et lycéennes rencontré·e·s, la sélection est omniprésente à l’entrée de l’enseignement supérieur. Plusieurs parmi elles et eux ont ainsi pu affirmer que, quelle que soit la formation, « on peut jamais être sûr d’être pris » : y compris dans les licences dites non sélectives, les places sont parfois chères et il n’est pas possible de se reposer uniquement sur cet affichage. Dès la classe de première économique et sociale, Candice veut s’inscrire en licence STAPS (Sciences et techniques des activités physiques et sportives). En terminale elle saisit donc sur Parcoursup des vœux de licence STAPS autour de chez elle et, comme elle n’est pas certaine d’être acceptée, elle demande le nombre maximal de licence STAPS que le site autorise. Le cas de Candice n’est pas exceptionnel : aucun·e des élèves rencontré·e·s souhaitant faire une licence « non sélective » ne s’est contenté de saisir un unique vœu pour cette formation.

Dans le cadre du dispositif d’enquête par jeu de cartes, la caractéristique « sélectif » ou « non sélectif » figurait sur chacune des cartes. La plupart du temps, la lecture de ce critère n’a suscité aucune réaction ni commentaire. Les rares fois où un élève a réagi en le voyant, c’était pour s’étonner de l’existence de formations non-sélectives. Ainsi, Sonny, en terminale Gestion administration au lycée Louise Michel au moment de l’expérience, s’exclame : « Ça veut dire quoi « non sélectif » ? Ils prennent tout le monde ?! ». Il semble découvrir à cette occasion l’existence de la distinction administrative entre ces deux types de formations ; sa réaction suggère assez nettement que la potentielle existence de formations non sélectives n’est pas compatible avec son mode de représentation de l’enseignement supérieur : pour lui, comme pour les autres lycéen·ne·s, toutes les formations sont sélectives.

Lorsqu’elles et ils sont interrogé·e·s sur l’origine des informations dont ils disposent pour assurer l’évidence de la sélection à l’entrée de l’enseignement supérieur, les élèves, dès la première, évoquent principalement les médias et leurs enseignant·e·s. Alix raconte ainsi comment, dès la première, certain·e·s enseignant·e·s ont insisté sur l’existence d’une sélection à l’entrée de l’enseignement supérieur afin de susciter un investissement scolaire de la part des élèves, en anticipation de cette sélection.

Alix : « Je pense que c’est notre prof principale qui nous a parlé de ça encore. Parce que… elle a fait comprendre à certains que l’année de Première était très importante, pour Parcoursup justement. Donc elle nous a mis la pression un peu quand même. Mais elle avait raison… »

Alix a 16 ans, elle est en première ES au lycée Germaine Tillion Sa mère est secrétaire dans un IME et son père adjoint au directeur d’un centre de loisirs

(6)

Les enseignant·e·s rencontré·e·s dans le cadre de la recherche racontent aussi ces moments pendant lesquels ils mettent en place un « chantage à l’orientation », menaçant les élèves de ne pas pouvoir poursuivre les études qu’ils et elles souhaitent pour les motiver à travailler davantage ou à changer de comportement en classe.

Chaque année, les médias consacrent plusieurs articles ou rubriques de journal TV aux affectations des lycéen·ne·s dans le supérieur et à Parcoursup. Les informations se centrent régulièrement sur le nombre d’élèves sans affectation et, pour peu que les lycéen·ne·s connaissent elles ou eux-mêmes des camarades qui n’ont pas reçu d’affectation, ils ont d’autant plus conscience de la sélection à l’entrée du supérieur. Alix raconte ainsi un reportage TV sur Parcoursup dans lequel elle a recueilli différentes informations sur la sélection.

Alix : « Euh bah les sondages à la fin de Parcoursup quand un étudiant sur trois, ou deux étudiants sur

trois n’avaient rien. Que Parcoursup c’était compliqué parce qu’on n’avait pas de plan B disons. Euh… et que Parcoursup c’était sur dossier et que ça pouvait revenir jusqu’à l’année de seconde, que c’était vraiment une analyse de… du comportement, des notes, que tout était passé au crible. »

Alix a 16 ans, elle est en première ES au lycée Germaine Tillion. Sa mère est secrétaire dans un IME et son père adjoint au directeur d’un centre de loisirs. Elle a 15/20 de moyenne.

1.2. …que ce n’est pas un critère

Assez étonnamment dans le cadre d’une recherche sur l’orientation vers l’enseignement supérieur, le mot « sélection » n’a jamais été mobilisé au cours des entretiens et le critère sélectif/non sélectif ne structure pas les représentations de l’enseignement supérieur.

Sur les quarante-et-un enquêté·e·s rencontré·e·s dans le cadre de cette recherche et s’étant prêté·e·s à l’exercice de catégorisation des cartes représentant des formations, aucun·e n’a commenté le critère « sélectif »/« non sélectif » qui figurait pourtant sur chacune des cartes des formations. Mais plus encore, ce critère n’a pas non plus été mobilisé comme principe de construction des différents tas : personne n’a regroupé entre elles les formations estampillées « non sélectives ». Les cartes des formations indiquaient pourtant différentes informations en rapport avec la sélection qui auraient pu être utilisées pour structurer les tas : le nombre de candidat·e·s et le nombre de personnes admises l’année précédente, notamment.

Les représentations graphiques de l’enseignement supérieur n’ont pas non plus été structurées selon ce principe d’opposition. Ces cartes mentales ont permis de mettre à jour deux grandes logiques de structuration de l’enseignement supérieur : d’une part, des cartes mentales qui se centrent sur les domaines ou disciplines d’études (Image 2) et, d’autre part, des structures fondées sur la durée des études (Image 3).

(7)

Image 2 • « Carte mentale » représentant l’enseignement supérieur par Joyce, élève en

terminale ES au lycée Germaine Tillion

Image 3 • « Carte mentale » représentant l’enseignement supérieur par Sonny, élève en terminale GA au lycée Louise Michel

(8)

Ces manières de structurer semblent particulièrement genrées : les garçons ont une vision de l’enseignement supérieur davantage hiérarchisée que les filles. Mais ni les filles, ni les garçons ne distinguent les licences non-sélectives des formations sélectives.

1.3. La sélection : un concept politisé

Ce critère dichotomique n’est ainsi pas mobilisé dans les discours autour des représentations de l’enseignement supérieur. Ce n’est pas non plus un critère mobilisé en acte, dans les différents dispositifs méthodologiques de catégorisation de l’enseignement supérieur. Pourtant la « sélection » est un terme théorique, un concept dont ils et elles ont parfois déjà entendu parler : ce n’est pas un principe structurant l’enseignement supérieur mais c’est un terme politisé.

Ainsi, la seule personne rencontrée (parmi les élèves ; plusieurs enseignant·e·s ont tenu un discours théorique et critique sur la sélection) qui parle de « la sélection » c’est Alix. Lorsqu’elle parle de la sélection, Alix le fait de manière critique et pour en dénoncer l’injustice.

Marion : « Est-ce que tu as entendu parler de Parcoursup ?

Alix : – Ah ben oui Parcoursup. [voix ennuyée] Marion : –Qu’est-ce que tu en as entendu ?

Alix : – Que ça allait être très complexe plus tard. Euh que c’était un logiciel où voilà on rentrait nos

vœux pour l’instant. Et après qu’il nous… pas qu’il nous dispatche mais…fin qui doit faire tout le travail de sélection d’écoles, de fac, etc. Qu’avec ça on ne peut plus aller à l’université comme on pouvait avant, avec le bac. C’est Macron encore. »

Alix a 16 ans, elle est en première ES au lycée Germaine Tillion. Sa mère est secrétaire dans un IME et son père adjoint au directeur d’un centre de loisirs. Elle a 15/20 de moyenne. Alix politise la question de la sélection en citant « Macron », alors président de la république. Cette politisation de la sélection est profondément liée à la socialisation politique d’Alix. Sa mère est déléguée du personnel et syndiquée à Sud Solidaires et la porte intérieure des WC de leur logement est couverte d’autocollants Sud et de slogans de manifestations. Ensemble, elles « parle[nt] beaucoup de politique, syndicat, grève et tout ça » et elles sont allées ensemble en manifestation, notamment contre la loi ORE et la mise en place de Parcoursup. La seule enquêtée qui considère la sélection comme un critère dichotomique est ainsi la plus politisée et la seule à avoir participé aux mobilisations contre Parcoursup.

À rebours de la labellisation institutionnelle de formations « sélectives » vs formations « non sélectives » que l’on retrouve notamment sur le site de parcoursup.fr, la sélection n’est ainsi pas appréhendée de manière dichotomique par les lycéen·ne·s. Pour les élèves rencontré·e·s, toutes les formations sont sélectives, bien qu’à des degrés divers. Il semble ainsi plus approprié de parler de sélectivité des formations et de s’interroger sur les critères mobilisés par les élèves de terminale pour placer les formations dans le continuum de la sélectivité. Ce concept de sélectivité n’est pas appréhendé de la même façon par les lycéens et les lycéennes selon leur champ des possibles post-bac, lequel est le résultat d’une socialisation scolaire et familiale genrée et de classe. Nous verrons que, pour certain·e·s, sont plus sélectives les formations jugées exigeantes, qui nécessitent un fort investissement scolaire, peu importe les chances objectives et subjectives d’être admis·e dans la formation. Pour d’autres, la sélectivité d’une formation dépend davantage de la pénibilité (dont le ressenti est lui-même socialement situé) du processus du candidature. Enfin, pour un troisième groupe d’élèves, les formations « très sélectives » sont en fait les plus prestigieuses dans le système français : les classes préparatoires.

(9)

2. Les réalités de la sélectivité

2.1. Des formations exigeantes : « J'ai vu que le niveau était

vraiment très sélectif »

Pour certain·e·s, un glissement s’opère rapidement entre la difficulté supposée de la formation et sa sélectivité. Ainsi, Gladys, scolarisée dans la filière professionnelle Gestion des administrations, considère qu’il est plus difficile d’entrer en licence de droit qu’en BTS Notariat. Quand elle explique d’où lui vient cette information, Gladys évoque une discussion en classe avec son enseignant de français qui expliquait que le niveau des licences de droit à l’université était élevé et qu’elles pouvaient être difficiles à suivre pour des élèves issus de bac professionnel. Gladys en retient que les formations universitaires sont plus difficiles que les autres formations de l’enseignement supérieur pour les élèves de bacs pro dont elle fait partie et elle finit par considérer qu’il est plus difficile d’entrer en licence qu’en BTS. Très ironiquement, cette définition entre en totale contradiction avec le critère de Parcoursup où l’on retrouve le BTS en « formation sélective » et la licence en « formation non sélective ».

Gladys : « BTS, ce serait plus facile pour y rentrer.

Marion : – Parce que c'est difficile de rentrer dans une université de droit ?

Gladys : – Bah je pense que si on fait pas un bac général, c'est plus difficile […] le prof de français a

dit que pour suivre en droit, c'était quand même compliqué, qu'il fallait avoir de bonnes notes en français d'abord, et dans la matière droit. »

Gladys, 17 ans, en terminale Gestion administration dans le lycée Germaine Tillion. Son père est maçon et sa mère est assistante commerciale.

Gladys a une moyenne de 14/20. Si ce glissement est relativement courant et que Gladys n’est pas la seule à confondre difficulté d’une formation et sélectivité, c’est notamment parce que ces problématiques s’entremêlent souvent pour les lycéen·ne·s, à un moment où leurs angoisses d’obtenir le baccalauréat (Merle, 1993) et d’être accepté·e·s dans une formation l’année suivante supplantent leurs questionnements au sujet des enseignements dispensés dans cette formation. Par ailleurs, cette confusion est également alimentée par les représentations selon lesquelles la sélectivité d’une formation est un gage de sa qualité et de son exigence comme l’illustrent les discours tenus lors des « cérémonies d’admission » en classes préparatoires par exemple (Darmon, 2015). Par extension, ils et elles considèrent que si une formation est exigeante, c’est donc qu’il doit être plus difficile d’y être accepté·e comme étudiant·e.

Les élèves qui amalgament difficultés d’entrer dans une formation et difficultés d’y réussir sont plus souvent des élèves pour qui le rapport à l’école est ou a été compliqué. Gladys, par exemple, raconte avoir eu des difficultés scolaires au collège et plus encore en seconde. Elle a, par ailleurs, mal vécu son orientation au lycée puisqu’elle a été affectée dans un établissement loin de chez elle alors que son lycée de secteur proposait la même formation de bac pro et elle ne comprend pas pourquoi elle a été envoyée au lycée Germaine Tillion « C'est un peu, comme eux ils voulaient quoi... ». L’utilisation d’un langage pragmatique (contextualisé, déictique) pour raconter son expérience de la sélection à l’entrée au lycée fait penser à la distinction entre ce type de vocabulaire qui serait utilisé davantage par les classes populaires et le vocabulaire analytique (décontextualisé, explicite) des classes supérieures (Lahire, 1993 et 2008).

Guillaume, en terminale économique et sociale (ES) dans le même lycée Germaine Tillion adopte également une définition de la sélectivité fondée sur le niveau scolaire et la quantité de travail attendu dans la formation. Particulièrement intéressé par le sport, il voulait s’inscrire en licence STAPS à l’université mais suite à une discussion avec son enseignant de sport pendant l’année de seconde, il découvre que « le niveau [est] très sélectif » et décide d’abandonner cette idée.

(10)

Guillaume : « Le choix de base au début, c'était que je voulais passer STAPS mais j'ai vu que le niveau

était vraiment très sélectif et fallait vraiment être un grand bosseur dans l'âme et sans attendre non plus qu'il y ait une réponse, entre guillemets, derrière. Que tu doives le repasser l'an d'après, l'année d'après, donc… […] Il [le prof de sport] m'a expliqué, en gros, qu’à peu près on l'assimile un petit peu la première année de médecine qui est assez rude et je suis un peu renseigné, j'ai vu que c'était… […] Je me suis renseigné vraiment et je me suis rendu compte que, bah le niveau était quand même un petit peu élevé par rapport à mes capacités, malgré qu'si ça se trouve j'ai les capacités mais enfin vue l'envie que je... enfin la motivation que j'ai pour atteindre STAPS n'était pas assez grande pour... »

Guillaume, 17 ans, en terminale ES dans le lycée Germaine Tillion. Il a une moyenne de 10,5/20. Sa mère est experte comptable et son père est décédé trois ans avant l’entretien.

Cette conception de la sélectivité semble liée au rapport au travail scolaire des élèves, celles et ceux qui se vivent comme des mauvais élèves ou élèves moyens sont plus enclin·e·s à l’adopter. Ainsi, Guillaume indique qu’il « faisait des conneries » (il consommait du cannabis avec ses camarades) et ne « travaillait pas des masses au collège ». La comparaison avec la première année de médecine est éclairante, non seulement la référence aux formations de médecine n’est pas décorrélée du champ des possibles post-bac de Guillaume : il appartient à un milieu social favorisé et ses parents sont/étaient particulièrement diplômé·e·s. Mais il compare entre elles deux formations avec un taux de passage en deuxième année plutôt faible. Il n’est pas étonnant que les trois formations universitaires ici évoquées par Guillaume et Gladys soient celles qui aient cristallisés les débats autour du tirage au sort lors des dernières années d’APB : médecine, droit et STAPS (et psychologie dans une moindre mesure)

2.2. La sélectivité comme pénibilité des procédures d’admission

Pour plusieurs élèves rencontré·e·s, souvent parmi les plus défavorisé·e·s sur le plan scolaire, le critère qui fonde la sélectivité des formations repose sur la pénibilité ressentie des procédures de candidature et d’admission. Ainsi, pour Sonny, élève en bac professionnel Gestion administration au lycée Louise Michel, il est plus difficile d’être pris dans une formation via Parcoursup que dans une formation hors Parcoursup parce que la procédure est plus longue. La sélectivité semble ici fonction du temps d’attente avant d’avoir une réponse et de la pénibilité de la procédure. Cette préférence pour le présent est socialement située (Bourdieu, 1977) : les conditions matérielles d’existence les plus précaires rendent difficiles les projections dans un avenir incertain. Pourtant, les formations hors Parcoursup sont des formations privées et bien souvent payantes. Dans le cas de Sonny, élevé avec son petit frère par sa mère seule, employée à l’accueil de la mairie d’une ville de Seine-Saint-Denis, il a candidaté à une formation privée en alternance, dont le coût doit être pris en charge par l’employeur qu’il compte rechercher ensuite.

Pour d’autres élèves, ce sont les multiples étapes dans la candidature à des formations qui fondent leur sélectivité. Ainsi, les formations en alternance, notamment, sont jugées plus sélectives que les formations initiales parce qu’elles impliquent ⎼ en plus de la procédure « classique » Parcoursup ⎼ de démarcher des entreprises et de trouver un·e employeur·euse qui accepte de les embaucher. C’est notamment le cas de Yosri qui, suite à une discussion avec des amis du quartier où vit son père, comprend que sa motivation première ⎼ de « gagner un peu d’argent » pendant ses études ⎼ peut être satisfaite en intégrant un BTS en formation initiale grâce à la bourse sur critère sociaux à laquelle il peut prétendre.

Marion : « La dernière fois tu me parlais de BTS en alternance.

Yosri : – Ouais, je me disais que l'alternance bah c'était bien pour gagner un peu d'argent. Et après, on

m'a dit aussi que tu peux aussi gagner de l'argent en BTS normal avec ta bourse. Donc je me suis plus projeté vers BTS normal que BTS alternance. Au début je voulais faire en alternance mais j'ai changé d’avis. »

(11)

Son père est plombier et sa mère est aide-soignante dans une clinique. Yosri a une moyenne de 14/20. Il décide donc de ne candidater sur Parcoursup qu’à des formations initiales, où il estime qu’il est moins difficile d’être accepté. En effet, pour Yosri, les formations en alternance sont plus sélectives parce qu’elles demandent à la fois d’être accepté·e dans une école et dans une entreprise. Le seul avantage Si Yosri a conscience des difficultés qu’il peut rencontrer pour trouver une entreprise c’est qu’il a eu du mal à trouver des endroits où faire son stage pendant son année de troisième puis ses stages professionnels pendant ses années de bac pro.

Marion : « Du coup, comment tu les as trouvés tous tes stages ?

Yosri : Y'en a des fois c'est ma mère. Oui, parce que c'était le dernier jour et je n'avais pas trouvé de

stage. Du coup elle s'est déplacée deux fois. […] J’ai fait toute la ville, j’ai rien trouvé et elle elle est descendue et en une fois elle a trouvé un stage. »

Yosri, 17 ans, est en terminale Gestion administration dans le lycée Louise Michel. Son père est plombier et sa mère est aide-soignante dans une clinique.

Yosri a une moyenne de 14/20. Si la mère de Yosri lui a trouvé deux stages en discutant avec des commerçants de leur ville de résidence, cela n’enlève rien à la difficulté que cela a été pour lui, qui avait auparavant cherché des stages en suivant le même procédé, sans que ce ne soit concluant. Par ailleurs, cette difficulté supplémentaire n’est pas sans lien avec les expériences de racisme et de discrimination qu’il a connues et que lui et les autres lycéen·ne·s racisé·e·s comme non-blanc·he·s ont très souvent fait état lors des entretiens.

D’autre part, les lycéen·ne·s pour qui la recherche d’une entreprise concourt à rendre la formation plus sélective sont souvent celles et ceux qui sont le moins à l’aise avec le système scolaire et à qui les enseignant·e·s conseillent plus volontiers de s’orienter dans ces filières professionnalisantes. Ils et elles sont soit scolarisé·e·s dans des filières moins prestigieuses de la hiérarchie des filières de bac, soit ont des résultats scolaires jugés trop faibles, soit leurs parents ne sont pas ou peu diplômé·e·s et sont, parfois, dans toutes ces situations à la fois. Ce sont ainsi celles et ceux qui sont les moins à l’aise avec les exercices scolaires de rédaction de CV et de lettres de motivation et ils anticipent donc les difficultés objectives qu’ils peuvent rencontrer dans leurs démarches. La formation en alternance est plus sélective parce qu’elle implique de nombreuses démarches qui sont difficiles, particulièrement pour les jeunes racisé·e·s issu·e·s des classes populaires dont les parents ne disposent pas d’un important capital social ou peuvent difficilement les aider à rédiger leurs CV et lettres de motivation.

Toutes ces formations sont jugées plus sélectives de manière toujours relatives aux autres formations envisagées par les lycéens et lycéennes. Les critères de la sélectivité sont construits au sein du champ des possibles scolaires des élèves rencontré·e·s. Ainsi, celles et ceux qui considèrent les formations de BTS en alternance comme étant plus sélectives le font en comparaison avec des BTS en formation initiale qu’ils envisagent également. C’est pourquoi, de l’autre côté de la hiérarchie scolaire, ce sont plus souvent les élèves les plus favorisé·e·s qui identifient clairement les classes préparatoires comme les formations les plus sélectives.

2.3. Des formations très élitistes et très sélectives : les CPGE

Harry et Gabriela ont en commun un parcours scolaire passé par des lycées français à l’étranger, tou·te·s les deux pour suivre leurs parents dans leurs mobilités professionnelles. En terminale ES, il et elle souhaitent tou·te·s les deux être diplomates plus tard en intégrant pour cela une université européenne de sciences politiques pour l’une et un IEP pour l’autre. Dans les classements de jeux de cartes qu’il et elle ont produits, les formations sont regroupées disciplinairement, à partir des « thèmes » d’étude (commerce vs sciences, etc.). On retrouve également un tas à part (Image 4 et Image 5) qualifié

(12)

de « très sélectif » par les deux élèves et qui regroupe notamment les formations en classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE).

Image 4 • Tas « Très sélectif » d’Harry*, regroupant les CPGE, IEP et formations de préparation pour des écoles

* Harry, 19 ans, en terminale Économique et sociale au lycée Louise Michel. Son père et sa mère sont propriétaires de plusieurs restaurants au Cameroun. Il a une moyenne de 15/20.

(13)

Image 5 • Tas « Prépas sélectives » de Gabriela*, regroupant les CPGE et une formation universitaire de préparation aux grandes écoles

*Gabriela a 17 ans et elle est en Terminale Économique et Sociale au lycée Olympe de Gouges. Son père était diplomate et sa mère fonctionnaire internationale. Elle a une moyenne de 15,5/20

Le taux de pression de sélection (nombre de places divisé par le nombre de candidat·e·s) des formations regroupées dans ce tas est assez variable, il est compris entre 2 % et 40 % et il est en moyenne de 11 % tandis que le taux moyen de pression de sélection des formations présentées est autour de 22 %. Mais les formations n’ont pas été regroupées uniquement parce qu’elles ont un taux de sélection plus élevé. Les CPGE sont des formations prestigieuses et spécifiques au système français qu’Harry et Gabriela identifient comme plus sélectives notamment par comparaison avec les autres systèmes scolaires (notamment européens) qu’il et elle connaissent.

Aussi, les deux lycéen·ne·s soulignent qu’il s’agit de formations exigeantes, qui nécessitent beaucoup de travail. En ce sens, cette vision de la sélectivité se rapproche de la première conception présentée dans cette partie.

Les cartes ont été construites à partir des informations présentes sur Parcoursup, et les titres des formations sont ceux que l’on retrouve sur le site. Mais la maîtrise du vocabulaire et plus encore des acronymes des formations n’est pas répartie uniformément dans la population. Plusieurs élèves scolarisé·e·s dans des filières de bacs professionnels se sont enquit de la signification des lettres CPGE, l’acronyme n’ayant jamais été rencontré auparavant. Quelques-uns d’entre eux ⎼ ayant pour caractéristique commune d’avoir des résultats scolaires inférieurs à la moyenne et dont les parents n’ont pas fait d’études supérieures ⎼ ont ainsi découvert l’existence des classes préparatoires suite à l’expérience du jeu de cartes. Pour Harry et Gabriela, il n’y a pas de doutes sur la signification de l’acronyme CPGE mais il faut aussi souligner que les lycées Louise Michel et Olympe de Gouges dans lesquels ils étudient proposent des formations en CPGE.

(14)

Conclusion

Pour la majorité des élèves, les formations de l’enseignement supérieur sont toutes sélectives bien qu’à des degrés divers. La distinction entre filières sélectives et filières non sélectives ne fait pas sens pour les lycéennes et lycéens qui ont obtenu leur bac entre 2019 et 2020 et ont utilisé Parcoursup. En effet, les discours médiatiques et ceux de leurs enseignant·e·s insistent régulièrement sur les difficultés à être affecté·e dans une formation du supérieur. Ainsi, seule une élève mobilise la distinction entre les formations sélectives et non sélectives et elle le fait pour souligner la disparition de cette distinction suite à la mise en place de Parcoursup. Les représentations de l’enseignement supérieur des lycéen·ne·s sont davantage structurées en fonction de la durée des études pour les hommes et des disciplines scolaires pour les femmes.

Cependant, toutes les formations du supérieur ne sont pas jugées aussi sélectives les unes que les autres. Les critères qui fondent ces différences de sélectivité varient selon les positions sociales des lycéens et lycéennes et dépendent de leur socialisation de genre, de classe et de race. Ainsi, les élèves les plus défavorisé·e·s à la fois sur le plan scolaire (bac pro), matériel (parents ouvriers/employé·e·s) et racisé·e·s considèrent que les formations les plus sélectives sont celles qui nécessitent le plus d’étapes. Pour les élèves les plus favorisé·e·s et disposant d’un capital international, les formations les plus sélectives sont celles qui sont les plus spécifiques au système français et qui permettent d’accéder aux Grandes Écoles les plus prestigieuses : les classes préparatoires. Enfin, les élèves avec des résultats scolaires plus moyens ont tendance à davantage définir la sélectivité des formations à l’aune de la difficulté réelle ou imaginée des formations. Cette difficulté anticipée est principalement issue de discussions avec les enseignant·e·s de lycée qui informent les élèves sur la quantité de travail attendu dans les différentes formations. Ce sont ainsi plus souvent les formations de licence avec un faible taux de passage en deuxième année qui sont considérées comme plus sélectives (PACES, droit, STAPS). Ces différentes conceptions de la sélectivité sont toujours fortement dépendantes des formations que les élèves envisagent à un moment ou à un autre de suivre après leur baccalauréat (champ des possibles post-bac).

Pour la première fois en juin 2020, l’ONISEP n’indique plus sur son « Schéma des études supérieures » (Images 6 et 7) les éventuels critères de sélection à l’entrée. Auparavant, étaient indiqués les concours par lesquels il fallait passer pour intégrer une formation, reflétant au passage l’importance des concours écrits et anonymes dans les esprits méritocratiques français (Allouch, 2017). L’organisme s’adapte ainsi à une réalité dont, nous l’avons vu, étaient déjà conscient·e·s les lycéen·ne·s : en France, toutes les formations de l’enseignement supérieur sont sélectives. Ce changement permet de supposer que, dans un avenir plus ou moins proche, le site de Parcoursup.fr abandonnera également la désormais obsolète distinction entre formations « sélectives » et « non sélectives » entérinant et assumant ainsi la généralisation de la sélection à l’entrée de l’enseignement supérieur.

(15)

Images 6 et 7 • Schémas des études supérieures de l’ONISEP, mis en ligne respectivement en septembre 2019 et en juin 2020

Références

Documents relatifs

Les tests de substitution n’étant pas valables ici, quels indices pourraient nous aiguiller sur la (non)-coréférence établie entre le déclencheur d’antécédent

Je suis désolé, j’ai oublié mes devoirs à la

Dans la ville de Bethléem, Marie et Joseph n’ont pas été accueillis, alors que l’enfant Jésus allait naître d’un moment à l’autre… c’est pourquoi Jésus est né

Conformément au règlement général sur la protection des données personnelles (règlement UE n° 2016/679 du 27 avril 2016), vous disposez d’un droit d’accès, de rectification,

plusieurs activités de réflexion ou d’action en ligne pour sensibiliser les enfants à la protection de leurs données et de leur identité numérique.. La

Depuis la fin de l’année 2014, la Ville coordonne les réunions d’un groupe de travail sur les violences de genre qui réunit des institutions genevoises (DIP, BPEV, Service

3° la validation, partielle ou totale, des acquis de l’expérience. Les candidats doivent être âgés de dix-sept ans au moins à la date d’entrée en formation. 1) : « La

Remarque : les diplômes de niveau IV sont ceux qui sanctionnent une scolarité conduisant soit au baccalauréat soit à un diplôme délivré en fin de scolarité de second cycle du