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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Les représentations du savoir scientifique chez des adolescent-e-s québécois-e-s

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LES REPRESENTATIONS DU SAVOIR

SCIENTIFIQUE CHEZ DES ADOLESCENT-E-S

QUEBECOIS-E-S

Marle LAROCHELLE

Département de Didactique Faculté des Sciences de l'éducation Université Laval, Québec

MOTS-CLEFS: épistémologie, représentation, adolescent-e-s, programmes d'enseignement des sciences

enseignant-e-s,

RÉSUMÉ: Qu'est-ce qu'une connaissance scientifique? En quoi diffère-t-elle d'une connaissance religieuse? Quels sont les critères qui régissent sa production? Qu'est-ce que l'observation? L'expérimentation? Autant de questions-clés auxquelles ont répondu des adolescent-e-s, dans le cadre de notre programme de recherche portant sur l'élucidation de la représentat ion sco lai re de la sci ence. Nous présentons i ci une synthèse provisoire des discours recueillis, après avoir rappelé les conceptions typiques des enseignant-e-s sur le sujet et celles véhiculées par les prograrnnes d'enseignement des sciences du Québec.

What is scientific knowledge? How does it differ from religious knowledge? What are the criteri as that govern i ts producti on? What i s observati on? Experimentation? These are some of the questions that we asked adolescents, in the context of our research program beari ng upon the representation of school science. In the following pages, we present a brief synthesis of our findings accompanied by sorne commentaries on the

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1. Les représentations du savoir scientifique chez des adolescent-e-s

Je vdis tenter, dans les quelques pages qui suivent, de vous faire part des résultats de nos recht,'ches sur la représentation qu'ont des adolescent-e-s québé-cois-es à l'égard de la nature du savoir scientifique. Auparavant, je rappellerai, de manière sommaire, la représentation que véhiculent les programmes d'enseignement des sciences à ce propos ainsi que celle tenue par des enseignant-e-s.

1.1 la représentation de la science véhiculée par les progranmes d'enseignement des sciences·

Afin d'élucider la représentation de la science dans lesdits programmes ainsi que dans leurs guides pédagogiques, nous avons fait appel à une stratégie d'analyse en trois volets, qui s'inscrit dans la foulée du constructivisme contemporain. Un premier volet fut inspiré par les travaux récents en sociologie des sciences et, plus particulièrement, ceux qui reconnaissent la socialitè inévitaole de la pratique scientifique dans sa production comme dans ses produits. Un second volet fut conçu à partir de l 'historiographie contemporaine en histoire des sciences et visait à élucider le traitement accordé par les discours l'évolution et aux contingences socio-historiques de la connaissance scientifique. Enfin, dans un troi siflile volet, inspiré par la réflexion contemporaine en épi stémo1ogi e, nous nous sommes i ntéres sés à cerner 1a concept i on véh i cu1ée par les discours à l'égard: a) des apports du sujet et de l'objet dans la construction d'une connaissance; bl des régIes de production d'une connaissance et des critères de reconnaissance de sa scientificité; c) des instruments critiques que se donne une science pour évaluer le savoir qu'elle produit.

Remarquons, en premier lieu, que les discours étudiés se présentent comme un ensemble cohérent, dans la mesure où ils sont traversés par une représentation plutôt homogène de la science, et par une préoccupation constante d'associer les sciences et les rapports sociaux, les premières permettant la gestion, la régu1at i on des seconds. Nous avons, en outre, observé que cette représentat i on présuppose, de manière générale, les croyances suivantes:

la croyance en une science descriptive qui ne construit pas ses objets mais les trouve tout faits;

la croyance en une science privée d'un appareil critique conçu pour l'évaluation du savoir qu'elle produit;

* OËSAUTELS, Jacques, ANAOON, Marta et LAROCHELLE, Mdrie, 1986, La représentation de la science véhiculée par les progranvnes d'enseignement des SClences du R1nlstere de l'Ëducatl0n, au secondalre, Rapport de recherche, Quebec, Minlstere aeî'Tducat 10~1rect ion de 1a rechërche.

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la croyance en une démarche expérilll~"tale limitée aux seules opérations d'ohservation passive et de quéte empirique des connexions entre phénomènes; la croyance en une objectivité qui correspond à la réal ité et non pas aux paradigmes dominants, et qui serait atteinte par une sorte de jeu de dépersonnalisation;

la croyance en une science à portée universelle, indépendante des contextes socio-historiques qui participent à sa définition;

la croyance en une idée que le discours scientifique est le modéle, le discours

a

imiter pour résoudre les problémes de tout ordre;

la croyance en une science a-idéologique dans son effectuation, indépendante des conditions politiques et économiques nécessaires au fonctionnelllefit de son appareil de production;

la croyance en une science sans conscience historique et sociale des conditions de constitution des connaissances;

la croyance en ulle progression glorieuse et cumulative de la science vers la réalité, sans considération pour les régles relatives à la circonscription de la légitimité scientifique.

En somme, il semblerait que la tendance dominante des programmes ét.udiés pellt étre associée à une représentation scientiste de la science qui présente des recoupements certains avec les premiers modéles de science élauorés par l'École du positivisme logique de Vienne, au début de ce siécle.

1.2 La représentation des enseignant-e-s à l'égard de la nature du savoir scienti-fique*

On ne peut imputer aux enseignant-e-s la totalité de la responsabilité quant à

l'orientation de l'éducation à la science, phénomène qui, en dernière analyse, est le produit de procès sociaux débordant largement du cadre scolaire. Toutefois, ils sont bien placés pour influencer l'évolution de la situation, d'abord à cause de leur action immédiate et quotidienne, mais aussi en vertu des divers rôles qu'ils sont appelés à jouer dans le système scolaire: conception et évaluation des programmes, conception de l'évaluation des élèves, concept ion de méthodes d'enseignement, conception de manuels scolaires, etc. Voilà pourquoi, eu égard à

notre objectif de compréhension des postulats épistémologiques des adolescent.-e-s à l'égard de la science, il 1I0US importait d'élucider ceux sur lesquels repose

éventuellement la représentation des enseignant-e-s à l'égard de la nature du * DÉSAUTELS, Jacques, VALOIS, Paul avec la collaboration de Marie larochelle, 1986, l.a culture scientifique scolaire des années quatre-vin~t: grogramme de recherche et synt~~apport., Qué6e~fSterede l 'Ëaucatlon,lrectlon de la recherche.

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en laboratoire, un phénoméne processus inductif qui va de passant pas la formulation étant assimilée aux idées de savoir scientifique. À cette fin, nous avons interrogé une centaine d'enseignant-e-s travaillant aux niveaux secondaire et collégial. De maniére encore là globale, les conclusions qui se dégagent de cette étude nous amènent

a

penser qlk la majorité des enseignant-e-s interrogé-e-s (80%) adhérent à une vision réaliste-empiriste de la connaissance scientifique. En général, ces enseig/lC1/lt-e-s pensent ce qui suit:

Il existe à l'extérieur du sujet connaissant une nature ou une réalité, gouvernée par un ensemble de lois immuables.

La connaissance scientifique résulterait du dévoilement du réel et permettrait de décoder l'ordre inhérent à la nature, donc de divulguer la réalité, par approximations successives, car, dU fil des théories, l'objet d'étude serait

toujours le méme, seules les interprétations changeraient.

Les lois scientifiques seraient un reflet des lois de la nature, et les premiéres seraient établies par un processus inductif dont l'origine est l'observation, entendue conUlle une cueillette d'informations d'origine sensorielle.

L'établissement des lois scientifiques suivrait un l'observation à la formulation d'une loi, en d'hypothèses et l'expérimentation, cette dernière constat et de preuve et consistant à reproduire, naturel et à en effectuer des mesures.

L'objectivité est conçue cowne une attitude individuelle qui consiste en l'évacuation de ses sentiments et ses préjugés, afin de ne pas déformer le réel.

Le procès de production de la connaissance scientifique est vierge de toute contingence socio-historique: seuls ses produits peuvent en étre marqués, co~ne

l'illustrent les mauvais usages de la science (entendre militaire) ou les recherches qui about i ssent à des résu 1tats contradi etoi res (car, 1a recherche "pure" n'aboutirait qu'à une seule réponse).

En SOfllme, la représentat i on des ensei gnant-e- s s'apparente étroitement à ce 11 e déjà observée pour les programmes d'enseignement, ce qui n'est guére étonnant si l'on pense au fait qu'ils en sont les principaux artisans. Cependant, que seulement 10 à 15% des enseignant-e-s interrogé-e-s présentent des options qui se rapprochent des options dialectiques contemporaines, n'est pas sans soulever des questions. En effet, tout comme les programmes d'enseignement, mais à un autre niveau, les enselgnant-e-s participent â la définition du contexte de pruduction de la représentation qu'auront les élèves à l'égard de la science. Que pensent donc ceux-ci?

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1.3 La représentation des adolescent-e-s à l'égard de la nature du savoir scienti-fique*

Notre recherche s'est effectuée auprès de 25 adolescent-e-s, âgé-e-s entre 15 et 18 ans, terminant leurs études secondaires et ayant suivi en moyenne six cours de science. Comme nous l'avions déjà fait pour l'étude des prograrrunes et auprès d'enseignant-e-s, nous nous sommes intéressés, notanwnent, à l'élucidation de leurs postulats épistémologiques quant à la nature du savoir sci~ntifique, Ll~ sa production et de son institutionnalisation.

Si, de manière gènérale, on observe des recoupements certains entre les discours des éléves et ceux des enseignant-e-s et des programmes, notamment en ce qui a trait à leur vision réaliste-empiriste de la connaissance scientifique, il nous faut "emarquer également qu'on ne p~ut les y réduire. En effet, les discow's de la plupart des éléves semblent davantage tributaires d'un scientisme candide et de lacunes cognitives dont plusieurs sont d'ailleurs conscients, plutôt que d'un scientisme dur et militant qui postule la valeur cognitive absolue de la science pour tout ordre de phénomène. Citons, à titre d'exemple, les restrictions apportées par la très grande majorité des élèves quant à l'application généralisée de la "mèthode scientifique" pour régler les rapports sociaux (certains soulignent mème que cette application serait à la source de problèmes sociaux), alors que non seulement ces restrictions sont absentes des discours des enseignant-e-s et des programmes, mais, dans certains cas (surtout les discours des progralTlnes), on y promeut mème une telle généralisation, seule voie pour "combattre les irrationalités" inhérentes à la nature humaine. Ceci dit, que nous apprend le discours des adolescents?

Notons d'abord que, pour plusieurs sujets, la connaissance scientifique est dite telle parce que rattachée à une discipline scientifique (au sens classique de la division des disciplines) et ayant comme objet "la nature qui nous entoure". Pour la plupart des sujets, cependant, c'est parce qu'elle répond au pourquoi et au comment qu'elle est scientifique et, peu importe les tenants et aboutissants de cette explication, on lui attribue d'emblée un caractère de profondeur et de preuve qui lui confère nécessairement plus de crédibilité qu'aux autres types de connaissance, notarrunent parce qu'il s'agit d'une connaissance mathématisée:

"Quand c'est scientifique, les maths embarquent avec les formules pis aller plus en détails. C'est surtout (par rapport aux autres types de connaissance) la différence mathématique (et) comprendre le phénomène en profondeur".

(*) Le texte qui suit constitue une synthêse provisoire, quelques analyses étant non achevées. Cette recherche a fa it l'objet d'une subvent i on du Consei 1 de recherches en sciences humaines du Canada, alors que les précédentes étaient des cOl1l1landites du Ministère de l'Éducation du Québec.

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Pour quelques sujets, la connaissance scientifique serait telle aussi parce que palpable, c'est-à-dire "tout ce qui ne touche pas le menta1. .. qui a trait au matériel", alors que, pour d'autres qui la conçoivent essentiellement à partir de leur vécu scolaire, elle est avant tout du "bourrage de crâne" ou un savoir analyser répétitif: "C'est peut-être de savoir faire des analyses ( ... ), comme c'est là, ça fait quatre ans que l'on fait des analyses ... par la voie des chiffres et non pas des lettres".

Dans plusieurs cas, les définitions proposées de la connaissance scientifique tendent à faire reposer celle-ci sur une pratique plutôt vague, mal définie, ayant trait essentiellement à la description des raisons de la survenue d'un phénomène. Ainsi, l'idée de méthode et celle de production de la connaissance scientifique sont, pour la plupart des étudiant-e-s, des notions étrangères et, pour plusieurs, c'est dans les termes J'un sujet volontaire, le "savant", de sa capacité de curiosité, de sa volonté acharnée d'approfondir et, dans certains cas, son intelligence particulière "au-dessus de la moyenne" qu'ils envisagent ladite production. De façon générale, on remarque ainsi que les discours des êtudiant-e-s ne relèvent pas d'une argumentation étoffée mais tendent plutôt à mettre en commun des affirmations, des qualifications qui contl'ibuent à magnifier soit l'individu, soit les composantes d'un procès. Des clichés en résultent: l'expérimentation, "le milieu de la méthode" comme dit l'un, constitue pour plusieurs le symbole même de la science, fJuisqu'elle perrlldtrait à elle seule de découvrir les causes d'un phénomène sans que l'on ait, COIiUlie le dit Thom, à prolonger le réel par l'imaginaire: elle est un constat indéniable. Elle serait aussi une haute garantie de la rigueur de la théorie, une preuve directe et, la plupart du temps, absolue. En somme, à l'instar des enseignant-e-s et des programmes, les étudiant-e-s ont une conception vérificationiste de l'expérience qui les conduit, entre autres: a) â occulter l'effort théorique et la complexité de la mise en forme d'un procês de vérification; b) à ignorer l'interprétation instrumentale que requiêrent l'expérimentation et sa préparation; c) à penser que l'on prouve un fait plutôt qu'élucider I,utre rapport au fait. Nous avons également remarqué dans leurs discours sur l'expérimentation, tOllt conune dans ceux sur la notion de loi, qu'ils se représentent l'idée de répétabilité comme étant la répétition identique d'un fait, sans variation des données et des paramêtres, et non pas comme la répétabi 1ité d'une relation pour des valeurs différentes des variables. Notons que, pour plusieurs, cette conception s'accompagne aussi d'une idée de sondage expérimental tous azimuts: "ils (les scientifiques) essaient toutes sortes d'affaires".

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On remarque éga 1ement que, fréquelllnent, l es objet s d'étude de l a sc i ence sont confondus avec les objets présumés réels, et renvoient des expériences primitives, telles regarder le solei l se coucher, l'arbre qui pousse, etc. Par contre, et à l'opposé des discours des enseignant-e-s et des progrdllülles pour lesquels l'observation en soi fait naître un concept, les étudiant-e-s ont une conception plus constructiviste, la plupart signalant la nécessité d'idées préalables. Cependant, et on retrouve là leur conception "psychologisante" de la production de connaissance, ces idées sont plutôt personnelles que "professionnelles" ou inscrites dans une problématique théorique existante.

En somme, au regard de ces quelques informations et d'autres 4ue l'on pourra retrouver dans le rapport de recherche (telles leurs conceptions des concepts de loi, théorie, de découverte, d'objectivité, de vérité scientifique), il nous semble que les étudiant-e-s ont une représentation de la science qui, à l'instar des di.cvu,'s scolaires officiels, tend à se fonder sur des postulats empiristes et réalistes naïfs. Si, sur le plan de l'éducation à la science, cette représentation n'est pas sans poser des problémes - on peut s'interroger sur leurs possibilités de comprendre, par exemple, le concept d'atome en des termes autres que substantialistes - il nous faut en noter cependant les ouvertures. En effet, si les entrevues nous ont permis de constater que les étudiant-e-s n'avaient pas réfléchi sur la nature du savoir scientifique, leur réalisation illustre, selon nous, qu'ils le peuvent et que ce ne sont pas là des questionnements qui les dépassent et 4u'en outre ils y prennent plaisir!

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