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WAZARU-ET AUTRES NOMS LATINS MÉDIÉVAU X
DE LA GUËDE
(Isatis tinctoria) .
Dans une contribution auxMélanges J . Haust1 , notre collègu e de Louvain M . J . Gessler a récemment attiré l'attention sur deux mots, wazaro et wolda, qui figurent dans une sentenc e du doyen de Tongres au sujet des dîmes à payer aux desservants de Diepenbeek et de Hex (8 janvier 1230 n . s .) . Il propose de voir dans ces deux mots, qui ne figurent pas au Glossariu m
de Du Cange, respectivement le limb .waese (h . all . waso) «mott e de gazon », et le nl . woud u forêt s : le texte du dispositif ferai t dès lors allusion au « droit de récolter du bois dans les forêt s et de détacher les mottes de gazon » .
Rendant compte des Mélanges Haust dans la Revue Belge de Philologie et d'Histoire 2, nous nous sommes permis de pro
-poser une interprétation différente et entièrement personnell e des deux mots en cause, sans pourtant que nous pussions songe r alors, faute de place, à la développer et à faire valoir nos argu-ments . Nous sommes heureux que l 'hospitalité de
l'
Alma nou sfournisse aujourd'hui l'occasion de revenir utilement sur cett e question .
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La sentence du doyen de Tongres 3 a une portée générale ,
s . Notes de lexicologie comparée (limbourgeoise et liégeoise) (Mélanges de lin-guistique romane of/eras à M . Jean Haust, Liège, 1939), pp . 18 3- 85 .
2. Au moment où nous écrivons ces lignes le compte-rendu n'a pas encore été mis à l'impression .
3. Publiée d'après l'original par S . BORMANS et E . SCHOOLMEESTERS, Car-tulaire de l'Église Saint-Lambert de Liége, t . I, p . 257 (Bruxelles, 1893) : . . . cu m aliquando in concilio nostro Tungrensi . . . resideremus, inter domum Villariensem (l'abbaye cistercienne de Villers, à Tilly, Brabant) ex una parte et parrochianos
de principe, dirions-nous volontiers : elle affirme d'une part
la légitimité incontestable de la dîme, légitimité qui avait ét é mise en cause, elle spécifie d'autre part les produits qui tomben t sous son application, ainsi que le mode et le montant de l a taxation . Tout naturellement le rédacteur a été amené à dis-tinguer dans les produits « décimables » différentes catégorie s dont l'opposition est bien soulignée dans le texte par l'emplo i des conjonctions «in primis », « similiter», eautem » . Le dispo-sitif se présente donc comme suit :
i) e . . . in primis . . . de frugibus universis, de segete, de faba , de pisa, de papavere, de cepe et porra et alliis universisqu e seminibus que seminantur tam in ortis quam in agris, undccim a gelina vel fasciculus temporc quo colliguntur solvi debet »
z) « de lino similiter, tempore quo colligitur undecimus fasciculus solvatur »
3) « de feno et omnibus pratorum culturis, undecimus cu-mulus debetur »
4) «de wazaro et wolda, quintus decimus denarius de prim a collections solvi debet, de sequentibus vero collectionibus nichi l solvitur »
5) «lana autem, . . . »
6) « de pullis gallinarum . . . »
7) et 8) les autres produits de la ferme sur lesquels est pré-levée la dime sont les animaux et les fruits .
Une récapitulation ramène ces huit catégories à cinq prin-cipales : « . . . de universis que seminantur ; de fructibus etia m et animalibus et lana et feno . . . » : il est évident que le wazarus
(ou -um) et la wolda sont implicitement rangés dans la première , celle des «universa que seminantur », et que ces deux plante s cultivées constituent deux espèces d'un même genre .
Le problème est donc le suivant : x et y sont des plante s cultivées présentant certains caractères communs, soumise s d'une manière traditionnelle à la dîme, et dont l'une tout a u moins produit annuellement plusieurs récoltes de valeur mar-chande peut-être décroissante . La résolution de x est solidair e
de Dipponbeke (province deLimbourg)ex alia super solutione decimarum questi o subortaest, videlicet quo tempore et de quibus et qualiter solvi debeant de-cime . . .o .
de celle de y, et inversement, ce qui conditionne plus étroitemen t le problème, mais offre en même temps plus de garanties à toute solution acceptable .
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Nous aborderons le problème par la voie de y, le mot wolda .
Les textes nl . suivants, empruntés au Recueil de documents relatifs a l'histoire de l'industrie drapière en Flandre, publié pa r G . Espinas et H . Pirenne 1 , le présentent sous la forme woude : 1. Bruges, fin 13 e s . : « Voit, so wie so meet wulle, jofgaren , jof laken, dat hi se so mede ende so woud,e dat hem blijft bed e mede ende woude ende weet ghestade e (t . I, p . 506, 1 . 22) .
2. Gand, vers 1300 : « De marc van de wede . . . van meeden . . . De marc van der wouden . . . » (t . IV, p . 59, 1. 31) .
3. Ypres,avant 1362 : « Item, niemen moet rneten sijns zelve s mede of woude boven 9 ponden, up 3 lb . par . » (t . III, p . 611 ,
1 . g) .
4. Ardenbourg, milieu 14 e s . : «So wie se Vlaemsche woude
beseghede an sconen lakine . . . verbuert 3 lb . par . . . Ende dat heet Vlaemsche woude, die wast bedisside der Leihe » (t . I
p . 53, 1 . 16 et 18) .
Ce ni . nl . woude est bien connu 2 : il désigne la plante tincto-riale dont le nom scientifique est Reseda luteola ; on s'en servait
au moyen ê,ge pour teindre en jaune 8 . Son nom en a . fr . était
waudeen picard4, wodre ou wodeen wallon6 , gaudeen francien 6 .
1. Bruxelles, 1906-1924, 4 vol . in-4o .
2. VERwIJs et VERDAM, Middelnederlandsch Woordenboek, t . IX, 2 ('s-Gra-venhage, 1929), col . 2837, v o woude .
3. Voir J . B . WECIeERLIN, Le drap «escarlate» au moyen dge (Lyon, 1905) ,
pp . 62-63, et surtout W . L . J . DE NIE, De ontwikkeling der Noord-Neder-landsche textielver~w? erij van de veertiende tot de achttiende eeuw (Leiden, s. d.) ,
pp . 222-23 . G . ESPINAS, La draperie dans la Flandre française au moye n âge, t .II (Paris, 1823) etP . BAUD, L'industrie chimique en France ; étude histo-rique et géographique (Paris, 1932) n 'en font pas mention .
4. Voirpar exemple ESPINAS-PIRENNE, o . C ., t . II, p .561. 7 (Douai 1250C .) ,
I, p . 311, 1 . 14( Béthune, 1279), p . 140 1 . 16 (Arras, 1 335), p . 20 L 5 (Aire s . 1. Lys, 1358-59), et ajouter pour Valenciennes (1308) G. ESPINAS, Document s relatifs ala draperie de Valenciennes au moyen 8ge(Paris-Lille, 1931), p .151 .16 . 5. S . BORMANS, Le bon métier des drapiers de la cité de Liège (Bulletin de la Société liégeoise de Littérature Wallonne, 1865, t. IX (1867), pp . 204 (« wodre » , 1367) et 205 («wode ») .
6. F. GODEFROY, Dictionnaire de l'ancienne langue française, t. IX (Paris, x888)p . 689a, v o .
Toutes ces formes, tant romanes que germaniques, sont évidem-ment apparentées1 . La voleta de notre charte tongroise est . à n'en pas douter, de la gaude2 .
Ceci rend assez probable que l'autre plante, dite wazaru- ,
est, elle aussi, une plante tinctoriale, et des arguments philo -logiques, sur lesquels nous reviendrons plus bas, nous font opter pour la « guède » ou « pastel n (Isatis tinctoria), employé e dans la cuve de bleu 3 .
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En Europe occidentale cette crucifère était cultivée à de s fins industrielles en ordre principal en France (Somme, Nor
-mandie, Languedoc) et en Allemagne (Thuringe et Pays de Juliers) . Les feuilles récoltées étaient broyées au moulin, et l a pâte obtenue roulée en «tourteaux » qu'on laissait ensuite séche r en plein vent . Au cours d'un second cycle de manipulation s on concassait les «tourteaux », on en accumulait la poudre en tas appelés «tourtes », qu'on arrosait alors d'eau pour y provoquer, puis y entretenir, une fermentation putride . Il en résultait un produit assez comparable à une glaise de couleur sombre . Suffisamment sec, il était pilé et tamisé, et livré ainsi à la consommation .
Un champ de guède pouvait donner jusqu'à cinq récoltes d e feuilles, mais comme la teneur en matière colorante diminuai t d'une récolte à l'autre 4 ,l'honnêteté voulait que chaque « tourte » 1 . On rattache les formes gallo-romanes soit à un got . ewalda, W. MEYER-L$BICE, Romanisches Etymologisches Wörterbuch (Ieidelberg, 1930 8 ), n o 9490 , et E . GAMILLSCIIEG, Etymologisches Wörterbuch der französischen Sprache
(Heidelberg, 1928), vo gaude 1, soit à un germ . occ, owalda, O . BLOO1, Diction-naire étymologique de la langue franpaise (Paris, 1932), V o gaude 1, que M . GA-MILLSCIIEG, Romania Germanica, t . I (Berlin-Leipzig, 1934), p . 202, postul e
pour le francique .
2 . Gadildumfigure dans un tarif de 1252 cité par L.GILLIODTS-VAN SEVEREN , Inventaire des archives de la ville de Bruges ( . . .), t . II (Bruges, 1873), p . 196 , n. 15 : ücentenum garbarum gadildi quod est waudes>; WECKERLIN, o. C . ,
p . 63, note,cite encore, mais sans références, gaudyet gaudum . Voir aussi D u
CANGE, Gloss., v o Guaisdium (waida) .
3 . WECICERLIN, O . C ., pp . 58-61, ESPINAS, Draperie, t . II, pp . 90-93,BAUD , o. c ., p l) . 34-37, DENIE, o . c ., pp . 72-98, et J . HURRY, The woad plant and it s dye (Londres, 1930), passim .
fût formée par le produit d'une seule récolte . Pareillement u n même sac ne pouvait contenir des « tourteaux » de provenance s différentes . Ceci éclaire parfaitement le passage, au premie r abord un peu mystérieux, de la sentence du doyen de Tongres , où il est dit que pour le « wazaru- » et la gaude le quinzièm e denier est clû « de prima collectione, de sequentibus vero col-lectionibus nichil solvitur » : à Diepenbeek la dîme était levé e uniquement sur la première récolte de guède, qui dépassai t en valeur toutes les suivantes ; cette pratique semble avoir été généralement suivie : à Corbie, au 15e siècle, on prend soin de spécifier : «Nul ne poeult vendre disme (c'est-à-dire guède de dîme) s'elle n'est bonne et loyale et des premiers waides . . . »1 .
Mais le mode même de perception de la dîme explique qu'o n ait dû tolérer des dérogations : à Valenciennes, par exemple , où en principe les « tourteaux » ne pouvaient être mêlés a , on
fait une exception pour la guède « de droite disme » 3, soit que les curés bénéficiaires de la dîme accumulassent la guède pen-dant plusieurs années avant de la mettre en vente, soit encor e qu'ils la tirassent d'exploitations différentes, ou la prélevassent sur des récoltes successives .
Nous avons réservé pour . la fin de cet article l'examen lin-guistique du mot wazaro, mais nous croyons avoir réussi à montrer dès maintenant par des arguments puisés en parti e clans l'examen «interne » du dispositif de la sentence de 1230 ,
en partie dans des considérations de fait, la quasi-certitude de notre équation wazaro = guède .
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Les formes latines médiévales les plus anciennes et les mieu x caractérisées du mot « guède » peuvent se ramener à deu x types principaux :
1 . En -o, -onis . Le plus ancien exemple se lit au chapitre 4 3
du célèbre Capitulare de Villis, promulgué entre 770 et 813 4 : 1. A . THIERRY, Recueil des monuments inédits de l'histoire du Tiers État , 1Lo série, région du Nord, t . III (Paris 1856), no 55 . 8, §§ rs et 18 .
2. G . ESPINAS, Valenciennes, n° 235 § 3 et 236 §§ 1 à 3 .
3. O . C ., no 235 § 4 .
4. ((Il conviendra sans doute de dire désormais (c .-à-d . depuis les travau x de M . A . Do pscx) : le capitulaire est de Charlemagne, roi des Francs (entre
«Ad genicia nostra, sicut institutum est, opera ad tempus dar e faciant, id est linum, Ianam, waisdo, vermiculo, warentia, pec-tinos laninas . . . »i ; le rédacteur, ou tout au moins le scribe d e l'unique ms . parvenu jusqu'à nous, semble aligner à côté de s accusatifs régimes de « dace faciant » des nominatifs dûs ä l'attraction de « id est » : nous inclinons donc à voir dans waisdo
comme dans vermiculo 2 des nominatifs ; il est curieux de re -marquer que, d'une manière générale, nos prédécesseurs on t évité de se prononcer sur le paradigme auquel il convient d e rattacher waisdo . Le lexique du Cafiitulare de Villis semble caractéristique de la France de l'ouest (Normandie, Maine e t Anjou, Poitou, Saintonge, Limousin et Périgord) 3 : waisd o 770 et le 4 juin Soo), ou bien de Louis, roi des Aquitains (entre 794 et le moi s de septembre 813, date de l ' association de Louis à l ' Empire) n : telle est l a conclusion à la fois prudente et pleine de sens de M . Marc BLOCH, L'origine et la date du «Capitulare de Villis e (Revue Historique, t . 143, 1 923, pp. 4 0 -5 6) ,
p . 55, article auquel nous renvoyons une fois pour toutes . Nous sommes rede-vable de la connaissance de cet article, ainsi que de celui de M .vowWARTBUJRG, citéinfra, à l'inépuisable obligeance de notre ancien maître M . F. L . Ganshof.
r . Monumenta Germaniae Historien . Levais sectio secunda : Capitulaira reguna Francorum denuo edidit Alfredus BORETIUS, t . I, 1883, pp . 82-91 , chap . 43, page 87 .
2. Nous n'ignorons pas que a . fr. vermillonest généralement considéré comm e dérivé de a . fr, vermeil : voirE . GAMILLSCHEG, EWFS, col . 885a, v o vermillon
et O .BLOCIJ,Dict . étym ., t . II, col .363a, v overmeil ; «vermiculo tinctum» se rencontre déjà dans les Gloses de Reichenau contemporaines du Capìtulare d e
Villis ; des formes latines correspondant à vermillon font par contre défau t dans leGlossariumde DuCANGE .Il faut noter cependant quevermillon,tout au moins avec le sens de «rouge d'une nuance déterminée », est aussi ancien qu e
vermeil,puisqu'il se lit dans leRoman d'Eneas (3 e quart du Ize s .) : voir GonE-FROY,t . X, col . 847b, v 0vermillon .
3. Le problème de la localisation du Capitulare de Villis a été l'objet d e
débats souvent passionnés tant dans le camp des historiens que dans celui de s romanistes . On a fait remarquer avec raison que les deux problèmes, celui d e la e Geltungsbereich e du Capitulaire et celui de sa langue, et plus particulière -ment de son lexique, ne se confondent pas nécessaire-ment . Seul ce dernier nous intéresse . Dès la première édition de sa Wirtschaftsentwichlung, (t . I, 1912), M . A .DonsCH avait fait appel à des arguments linguistiques : pour lu i les «vulgarismes e qui émaillent le texte du Capitulaire seraient très exacte -ment des «provençalismes s, thèse reprise au cours d'une démonstration e n règle par E . WIwnLER, Zur Lokalisierung des sogenannten Capitulave de
Villis (Zeitschrift für Romanise/te Philologie, t . 37, 1913, pp. 5 1 3-5 68) (voir le
compte-rendu favorable de K .vow ETTMAYERdans les Mitteilungen des Insti-tuts far österreich . Geschichtsforschung, t . 35, 1914, p . 364) ; Wn«xLEn con-cluait «dass die Sprache des C . d . V . ebenso wie sachgesclùchtliche Erwägungen
pourrait dès lors «refléter» un mot gallo-roman occidental . La même forme, francisée quant à l'initiale, a été relevée dan s un traité médico-botanique en vers, longtemps connu sous le nom de Macey Floridus, le De Viribus Herbarum ; l'auteur, u n clerc et médecin de la première moitié du ne siècle, s'appelait en réalité Eudes de Meung1 , On lit au chapitre 55 de son poème (édition L . Choulant, Leipzig, 1832, p . loi) : « Isatis a Grecis est vulgo gaisdo vocata a (d'autres mss . présentent la leçon
gaisda) . Assez régulièrement Eudes a fait suivre les noms latin et grec de la plante dont il décrit les propriétés du nom popu-laire, roman par conséquent, sous une forme naturellemen t latinisée 2 : gaisdo peut donc recouvrir une forme française , régionale (à rapprocher du waisdo du Capitulaire) ou de la langu e commune .
II . En
-us, -i.
Cette forme se rencontre pour la première fois dans un glossaire médico-botanique du ioe siècle, de provenanc ekeinen Zweifel darüber lassen dass die Urkunde Südfrankreich zuzuweisen ist n (p . 568) . Les travaux de WINKLERont suscité toute une série de travaux similaires : MM . Jun et SPITZER, Zur Lokalisierungetc . (Wörter und Sachen,
t . 6, 1914, pp. 116-140) arrivent à la conclusion opposée « dass die Sprache des C . d . V . mindestens ebensowiele Anhaltspunkte dafür liefert, dass di e Urkunde Nordfrankreich zuzuweisen ist n (pp . 116-117), et ils concluent : « Wir meinen, es mit einer nordfranzösisch-karolingischen Kanzleisprache zu tun z u haben, die natürlich auch für periphere Gegenden angewendet wurden (p .140) ; voir la réplique longuement motivée de WINKLER, Nochmals zur Lokalisa-tion etc . (Zeitschriftetc ., t . 38, 1917, pp . 554-77), qui reste sur ses positions
premières, et qui ne peut que signaler, sans pouvoir le réfuter, l'article de G. BAIST, Zur Interpretation der BreviumExempta und des C . d. V .
(Vierteljahr-schrift fuir Sozial und Wirtschaftsgeschichte,
t.
12, 1914, pp . 22-70), favorabl eb. une origine française septentrionale.
Enfin tout récemment M . W . VON WARTBURG, Thelocalization oftheC . d . V.
(Speculum, janv . 1940, pp . 87-91 + carte) est revenu sur la question : s'aidant des matériaux incomparables de son Französisches Etymologisches Wörterbuch,
il a pu reporter sur une carte les isoglosses des différents termes «vulgaires n qui se sont glissés dans la rédaction du Capitulaire ; or ces isoglosses, dont l 'extension est naturellement variable, sont à une exception près centrée s sur le Poitou . « It is apparent that a more exact geographical defining of the word zones provides a striking substantiation of Dopsch's point of view. Th e capital and residence of the young king (Louis le Pieux) was indeed Poitiers. The capitulary is, therefore, written in a form of latin which clearly shows the coloring of the Romance tongue spoken in Poitiers n (p . go) .
1. M . MANITIUS, Geschichte der Lateinischen Literatur des Mittelalters,
t.
II (Munich, 1923), pp . 539-40 . 2. O . C ., p . 541 .
non déterminée 1 : «Incipit Hermeneolna hoc est interpretatio
pigmentorum uel herbarum de muftis compositis . Translatum ex graeco inlatinum » (Vatican, fonds de la reine Christine 126o,
fo 172 vo) : isatis i . muas dus unde tingunt persuma .
« Isatis waisdus . walda secundum phisicos rubea maior uo-catur . Guarantia rubea minor quamvis et sandix uocatur » se lit dans les Glosesubsilentiolegendequinous sont parvenue s dans un ms . du 12 esiècle 2;nous ignorons pareillement l'histoir e de ce texte .
A côté de ces formes bien caractérisées, nous en avons relev é d'autres, elles aussi anciennes, mais toutes plus ou moins aber-rantes .
III . Un guattum figure notamment dans un traité de peintur e de l'époque carolingienne, la Mappae Clavicule 3 .
r . G. GoETZ, Corpus glossaviorum latinorum, t . III (Leipzig, 1882), p . 583, 1 . 48 .
2. Elnonensia . Monuments des langues romane et tudesque ( . . .)p .p .HOFFMAN N DE FALLERSLEBEN, avec une traduction et des remarques par J . F. WILLEM S
(Gand, 1837, p . 21) .
3. C'est-a-dire u clef pour le tableau » . Ce traité nous a été conservé en deux mss . présentant des différences internes assez grandes : le plus ancien est d u zo e siècle (Schlestadt 1153 bis, au 160 siècle à, un évêque de Worms : voir A. GIRY, Notice sur un traité du moyen fige intitulé s De coloribus et artibus Roma-norum », Bibliothèque de l'École des Hautes Etudes, t . 35, 1878, pp .216-17), l e plus récent (acheté au début du siècle passé au curé de Saint-Eustache de Paris par Sir Thomas PHILLIrrs, et publié par Alb .WAYdans Archaeologia o r Miscellaneous Tracts . . . published by the Society of Antiquaries of London , t . 31, 1846, pp . 183-244), du Ise s . H . DIELs,Die Entdeckung des Alkohols (Ab-handlungen der Xön . ' Preuss . Akademie der Wissenschaflen, n e 3, 1913 (Berlin , 1913), p . 7, écrit : n Dagegen möchte ich die Vermutung wagen, dass der Ver-fasser dieser Sammlung in Frankreich, etwa zur Karolingerzeit, gelebt habe » ;
guattumse lit trois fois dans le ms . le plus ancien (une fois/olia guatti) .Ce même mot se rencontre encore dans un document (début du Io e siècle ?) provenan t du chartrier de l'abbaye de Saint-Martin de Tulle, publié Gallia Christiana ,
t . II (Paris, 1720, in-4 e), Instrumenta, col. 208 : SimiIiter dedit ei decimum de agnis, et de porcellis, et de lana, et guatt» (Cité parDuCANGE, Glossarium ,
t .IV,p,127, ve guatt), ainsi qu'en Italie sous la plume de Sébastien de Pérouse ( e . 1 454-t 1525) (Vita, B . Columbae Reatinae, V,325, Maii) : (( Si contigisset ea m cum convicinis matronis et puellis suri ad aliqua convenisse, putā vindemiae vel
guati (guatum quidem est herba tinctoria quae glaustrum dicitur), vitabat, ., »
(d'après nu CANGE, 1 . G .) . Faut-il rapprocher de ces formes latines, malgré leur vocalisme, un fr.guette,f . e guède s, attesté pour l'Aube ? Voir E .ROLLAND,Flore populaire, t . II (Paris, 1899), p. 123 .
IV. En sus ou -um, -i . C'est le hapax legomenen qui nous a inspiré la présente étude : wazarus (ou wazarum), Tongres ,
1230 . Nous y reviendrons plus bas .
Parmi les textes plus récents originaires du nord de la France , nous avons relevé les suivants :
V. En -ius (ou -ium), -i :guaisdius (-m ?) (Archives cathédrales d'Amiens, s . d .), et guesdius (-nt ?) (Archives cathédrales de Chartres, no 55, a° 1171) 1 .
VI. En -ia, -iae : watisdia (Archives cathédrales de Cambrai , a° 12oo ; aussi archives abbatiales de Corbie, a° 1303) 2 .
VII. En -a, -ae, et sans -s- : gueda (Archives abbatiales d e Saint-Maur-des-Fossés, ao 1276 2 ; aussi Paris ao 1306 3) .
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Il est indispensable, pour voir clair dans cette riche floraiso n de formes, de grouper celles qui appartiennent à la même pé-riode, et de distinguer ensuite selon la provenance géographique . C'est le type I (en -o, -unis) qui se prête le mieux à une tell e localisation dans le temps et dans l'espace : il semble repré-sentatif du français occidental prélittéraire ; il vivait encore au 170 siècle dans un angevin guesdon, connu de Ménage 4,
peut-être éteint depuis 4 , après avoir été évincé très tôt dans le français commun par le type guesde . Il s'agit évidemment d'un terme d'origine germanique, et probablement francique : à en juger d'après le paradigme suivi (-o, -onis), ce terme serait un thème francique masc . en -n, du type N . Kano, G . hanin ,
-un, D . hanun, Ace . hanun, -ine .
Comme les voyelles finales des paroxytons, exception faite i . Du CANGE, Glossarium, v o Guaisdium .
2. O . c ., v o Marceschia,
3. BEUGuor, Les Olim ou Registres des arrêts rendusetc ., t . III, 1e partie (1299-1311), p . 191,8 .
4. Dictionnaire Etymologique de la langue françoise, t . I (Paris, 1790), col . 715 b, art . Guesde : «Nous disons en Anjou guesdon e .
5. Nous n'avons rien trouvé dans ROLLAND, o . c ., mais le tosc . guadone
(à c6té de guado) «guède n, et le parm . guadon «il guado quando è d'infim a qualità e, E . GAMILLSCHEG, Rom . Germ,, t . II, p . 169 et O . PENZIG, Flora po -polare italiana, t . I (Gênes 1924), p . 248, méritent naturellement d'entrer e n ligne de compte .
pour -a, s'amuïssent en gallo-roman au courant du 7e siècle , et probablement déjà dans la seconde moitié du 6e 1 , l'assimi
-lation du terme francique au paradigme de latro, -onis doi t être placée dans la période antérieure : waisdo appartiendrait donc à la toute première couche des mots franciques pénétré s en gallo-roman .
Le même terme germanique a dû pénétrer une seconde foi s dans le latin des Gaules à une époque où l'affaiblissement de - o en -e s'était déjà réalisé : c'est tout au moins ainsi que nou s interprétons la forme gaisda, qui figure comme variante de
gaisdodans un certain nombre de mss . duDe Viribus Herbarum,
et qui se rencontrerait aussi dans un poème analogue (livre II , chapitre 30) que Du Cange place sous le nom de Marbodeus 2 : ainsi waisda se trouverait avec waisdo dans le même rapport que l'a . fr . vase avec l'a . fr . gazon, qui tous deux représenten t le franc . wazo S .
Les formes 1 . m . en -us, nous l'avons dit, se prêtent mal à un classement chronologique ou géographique : elles pourraient représenter des «latinisations » assez anciennes de a . fr . guesde
s . m ., comme les formes en -ius le sont certainement, pour une époque beaucoup plus basse ; parallèlement à guesdius m .
(ou -uni n .) qui reflète un a . fr . m . guesde, on a eu guesdia f .
en regard de a . fr . fém . guesde, et gueda en regard d'un a . fr ,
fém . guede (sans s) .
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Les formes germaniques et romanes du mot «guède » jusqu'ic i connues ont été rattachées par les étymologistes à l'un des troi s thèmes suivants : germ . owaizda- (°waisda-), o waida- et owizda,
dont les rapports mutuels ont été d'ailleurs diversement inter-I . O . C ., p . 257 .
2. Voguesdi' ni ;pas plus qu'A .THOMASnous n'avons pu identifier ce poème :
il est douteux qu'il faille songer à Marbode, évêque de Rennes (c . 1o35-1r23), . en lat . Marbodus, dont l' abondante production didactique en vers ne présente rien de semblable .
prêtés : pour Falk-Torp 1 , suivis pour l'essentiel par Kluge 2, °waida- constituerait un développement dialectal d'un
°waizda-antérieur 3 ; pour Walde 4 , au contraire, un tel développemen t
apparaît comme fort douteux, et ewaizda-, Owaida- et
Owizda-doivent être mis sur le même pied .
Quoi qu'il en soit, c'est naturellement de ewaizda- qu'il y a lieu de rapprocher notre wazaro, comme d'ailleurs les autre s 1. H . FALK et H . ToRi, Wortschatz der Germanischen Spracheinheit (Goet-tingue, 1909), pp . 379-80, v o Vaida (vaizda) (Etymologisches Wörterbuch d e
PIcx `,vol .3)rattachent à e waizda 1 . m . waisda et got . wizdila. Lefr . guèdefém . est généralement rattaché à franc . waizd- (Thomas waisd-) : W . MEYER-LÜBKE, O . C ., no 9486 a, A . THOMAS, Franç . «guède (Romania, t. XXXVI , 1907), p . 439, E . GAMILLSCHEG, Etyna . Wb ., p . 495 a, vo guède, et Rom . 'Germ . t . I, p .202 (le fém .du fr. ni, s ' expliqueraitparun collectifgallor. e waisda, su r waisdum (<franc, e waizd-), BLOCH, o . c ., t . I, p . 35xb, voguède, et J . HAUST , Dictionnaire liégeois, Liège, X933, col . 709 b, vo wése, wésse ; J . FELLER, L e fr. « guède » et le w. « waize » (Bulletin du Dictionnaire Wallon, 14eannée,1925) , p, 104, rattache les formes gallo-romanes, y compris les wallonnes,au got . wisdila : «Le nom germain ., . s'est répandu dans le centre et le nord [de la
Gaule] aveclamarchandise» . SeulM . VALKHOFR, Etude sur les mots français d'origine néerlandaise (Amersfoort, 1931), p . 154, rattache les formes fr . àl'a . ou au ni . nl . weed, weede : pour lui commepour BLOCH, comme encore pou r
E . WINKLER, Nochmals zur Lokalisierung des sog . e Capitulare de Villis (Zeit-schrift fur Romanische Philologie, t . 38, 1917), p. 575, 1's de l'a . fr, est dûàun hypercorrectisme, opinion judicieusement combattue par J . FELLER, o. c . , p . 97 etsuiv .,tont comme celle de V . BERTOLDI, Genealogia di nomi designanti il mirtillo ( Vaccinium tnyrtillus) (Italia Dialettale, t . I, 1925), pp . 95-96, qui songe
à une contaminationde l'aha . weit parle gaul . glastum .
2. Fr . KLUGE, Etymologisches Wörterbuch der Deutschen Sprache (Berlin ,
1934 11 ),p . 667 b, v o Waid ; ajouter pour le nl. FRANCK 'S Etymologiscle Woor-denboek der Nederlandsche Teal, 2 e druk door N . VAN WIJK ('s-Gravenhage , 1912), vo weede .
3. FALK-TORT, o . C ., 1 .c . :« Daneben germ . vaizda (woraus mundartlich vai-da ?) .Dans son Etym . Wb ., KLUGE glisse surla difficulté du traitement du -z
devant d- ; ils'est montré plusexplicite dans un article : Zum Corpus glossa-riorum latinorum (Archivum Romanicum, t . VI, 1922), p . 311 : «Der lautliche Zusammenhang (de 1 . m, waisdus) mit ( . . .) and . weit M ., angls . wdd N, «Waid-kraut» ( . . .) lässt sich nicht genau bestimmen : zwar kann angls . wdd einen -s Laut eingebüsst haben wie angls . inéd . « Lohn » neben mord « Lohn » (got . mizd8) ; aber ein solche Entwicklung ist für and . mhd . weit nicht wahrschein-lich, weil vor einem aus z (s) entstandenen r ê für germ . ai hätte antreten müssen » . Etpourtant la réalité du nexus -sd-, d'où résultent les difficultés présentée s
parles formesh. all ., nefait pasdedoute pourKLUGE,eu égardau got. ewisdila . 4. A . WALDE, Vergleichendes Wörterbuch der indogermanischen Sprachen , hgg . u . bearb . v . J . POSORNY, t . I (Berlin, 1930), p . 236 (weit-), qui écrit : « Die Verhältnisse des Wurzelansatzes sind unklar und scheinen auf Entlehnunge n
formes latines médiévales en usage en territoire français, C e rapprochement nous apprend quelque chose de nouveau, à savoir que ewaizda- n'est pas un thème-racine mais qu'il es t susceptible d'analyse, et qu'il présente à côté d'une racine
owaiz- un suffixe, différent dans owatizda et dans wazaro .
Dans ce dernier mot le suffixe soulève de nombreuses diffi-cultés, au point qu'un bon juge 1 a pu émettre des doutes quan t à l'authenticité de la forme en cause 2 ; comme le problème se
trouve en dehors du champ normal de notre activité scienti-fique, la philologie romane, et que d'autre part il est étrange r au latin médiéval comme tel, nous renonçons à le prendre davantage en considération ; nous nous attacherons uniquemen t au problème du vocalisme radical de wazaro .
Nous avons écrit plus haut que ce vocalisme radical, bien qu'il ne fût pas sans exemple,, ne laissait pas d'étonner : il cadre en effet assez mal avec -ai- de l'a . g. owaizda-, pour lequel
on s'attendrait, en territoire de langue néerlandaise, soit à -ê- 8 , soit à la rigueur à -ei-, assez bien représenté surtout en limbourgeois et en brabançon 4 ; or nous avons a . Les néer
-r . Not-re savant collègue M . G . VAN LANGENT-LOVE, titulaire du cours d e grammaire comparée clos langues indo-européennes à l'Université de Gand .
2. A notre demande le Conservateur des Archives de l'État â Liège, M. YERNAUX, a bien voulu revoir sur l'original la lecture wazaro elle est par-faitement conforme . La sentence du 8 janvier r23o avait été confirmée le même jour par le vice-archidiacre de Hesbaye : le passage corespondant porte : « . . . d e
wazaro etiam quintusdecimus denarius de prima collectione et de wolda simi -Iiter solvi debet et de sequentibus collectionibus nichil solvitur u : voirJ. PA-QVAY et Ch . VAN SWIjGENHOVEN, Chartes et documents anciens concernant la
paroisse de Diepenbeek (Bulletin de la Société Scientifique et Littéraire du Lim -bourg, t . XXVIII, 191o), p . 133 .
3. Voir d'ailleurs dans le Recueil ESPINAS-PIRENNE : «met wede8, Bruges,
1282, t. I, p, 379 1 . 20 weet u, fin 1 3° S•,p . 506 1 . 22 ; «van de wede u, Gand, vers 1300, t . IV, P. 59 1 . 29, «weet u, 1338, t . II, p . 425 1 . 8 ; «weet u, Ypres, ay . 1363, p . 628 1 . 25 ; la plus ancienne mention parait se trouver dans u n tarif de tonlieu audomarois de 1159-67 i § 94, cf . A . GIRY, Histoire de la ville de Saint-Omer et de ses institutions (Paris, 1877), p . 478 : «Bigata wet 2 d . waude, ij . d . waranche, ij . d . s, connu seulement, il est vrai, par une copie d e la fin du 13° s . ; ajouterVERWIJS-VERDAM, Mrd .Woordenboek, aux mots wede ,
weedetweet . SelonFRANCK-VAN WIJn, 1 . G., weed doitêtre la forme la plus an-cienne en nl .
4. J . FRANCK, Mittelniederländisclze Grammatik (Leipzig, 1910), pp . 31-32 ,
M . J . VAN DER MEER, Historische Grammatik der niederländischen Sprache , t . I (Heidelberg, 1927), pp, 26, 55, et M, SCHÖNFELD, Historiese Grammatik a
landistes posent en principe1que les reflets de -ai- germ . autre s que -ê- f-ei- demandent une explication spéciale : le -d- de nl . klaver «trèfle », par exemple, à côté du brabançon klêver (<
°klai-br6n) a fait considérer ce mot comme un emprunt au v . frison,
où, en effet, -ai- germ . passe à -d- . On pourrait donc être tent é
de considérer wazaro comme un emprunt au v . frison. Si nous ne prenons pas davantage en considération cette hypothèse , c'est que nous ne pouvons l'étayer d'aucun argument histo-rique . D'ailleurs -a- pour -ai- n'est pas isolé il a son pendant dans le wasdus du glossaire médico-botanique du Vatican 2 :
wazaro et wasdus doivent être justiciables de la même expli-cation .
On sait 8 que dans la couche la plus ancienne des emprunts faits par le gallo-roman au francique (ceux qui remontent A. une époque où le gallo-roman ne connaissait pas encore cett e diphtongue), -ai- germ . est régulièrement rendu par -a- : franc .
gadail «compagne » -a- lat . gadale (cf a . fr . laël «femme pu-bliqueD), franc . waidanjan -~ lat . wadaniare (cf a . fr . gaaignier)
etc . A un stade plus évolué le -ai- gallo-roman (de a +i) perme t de rendre plus fidèlement la diphtongue du germanique : franc .
laid -~ a . fr . laid, franc . haigro --} a . fr . haigron, hairon, etc . Comme maintenant un même mot francique peut avoir ét é emprunté à deux reprises, et par des voies différentes, il n' y a pas lieu de s'étonner de constater en fr . un vocalisme qui tantôt est -a- (emprunt le plus ancien), tantôt -ai- (emprun t le plus récent) . Nous croyons que notre wazaru- se trouve vis-à-vis de waisdo, waisdus (-m ?) du lat . méd . dans le même rappor t quant au vocalisme que par exemple les prov. /racla et /raidel
«scélérats, à rattacher tous deux à un franc . fraaic i «parjure » S.
En d'autres mots wazaro représente pour nous la forme latin e d'un emprunt gallo-roman au francique plus ancien que le s formes avec -ai- 4 .
G . DE POERCK
Chargé de cours d l'Université de Gand . I . VAN DER MBER, 0 . C ., p . x4 Rem . 2, et M . SCHÖNFELD, O . C.,p . 77 .
z . Sans compter que le v . fris, aurait ici wéd, forme suivie, il est vrai, dan s
FRANCK-VAN WIJK, L e ., d'un ?
E . GAMILLSCHEG, Rom . Germ ., t . I, pp . 237-38 .
4 . Il n'est pas exclu non plus qu'il s'agisse d'un phénomène purement wal -I2
ion : dans ce dialecte-ai-de l'a .fr, a souvent comme correspondant -a- voi r
M . VALI{HOFF, Philologie et littérature wallonnes (Groningen-Batavia, 1938) , p . 5o, qui cite des formes anciennes comme Makare (= Macaire), notare, ara -versare, et renvoie à la bibliographie spéciale . L'hypothèse d'un «wallonismei>
nous a conduit à rechercher les représentants possibles d'un °waizayum gallo , rom . en terre wallonne ; les formes liégeoises moderneswêse, wêsse, f . (J . HAUST ,
o. c ., 1 . c . ; ajouter pour le verviétois du 18° siècle vesse, J . FELLER, o . c ., p .
sob), pourraient, n' était la différence du genre, parfaitement se rattacher à
o waizarum (cf liég . kevlse < °cosere, 1 . cl . consuere), mieux sans doute qu' à
°waizd-, car la chute de d- semble récente (cf les formes liégeoises ancienne s
énumérées plus bas), et l ' on sait que le wallon, comme le français, a amuï - s fin de syllabe devantd-dès le 12° siècle (M . VALKHOFF,o . C .,p . 43, et W . MEYER-LtluxE, Historische Grammatik der Französischen Sprache, t . I (Heidelberg,
19342-5 ), § 200) : partant de °waizd-, comme le fait M . HAUST, o . C ., 1 . C ., on
s ' attendrait donc plutôt à °avait (avec assourdissement de la finale) ; la diffé-rence du genre ne semble d'ailleurs pas présenter de difficultés insurmontables : on pourra toujours soit postuler un collectif °waizaya,soit admettre un passage au féminin sous l'influence de la terminaison ; il est d'ailleurs à noter que le fr .
guède,masc . dans les plus anciens textes, puis fém ., se heurte à la même diffi-culté . Les formes liégeoises anciennes déconcertent un peu (citées d'aprè s S . BORMANS, Glossaire technologique du métier des drapiers (Bulletin de la So-ciété Liégeoise de Littérature Wallonne, 9° année, 1867), p . 295) : comme l e wallon ignore le -d- épenthétique entre -s sonore et y- (M . VALKHOFF, o . C . ,
p. 44, et W . MEYER-LÜBIE, o . C ., § 183 ; ajouter E . HERzoa, Neufranzösische
Dialekttexte (Leipzig, 1 9 1 42), § 344, qui cite pour le liég ., I, 6z : Ifö :zyé «cou-drez »), on s'attendrait à °waisre, d'où waize (1527) et liég . mod, wésse (voir dans laChronique de Floreffe (15° siècle), à la 3° pers . pl . du parf.firent, prisent,
misent, reconquisent, à côté de dissent (une fois), et de firent, dirent ; cf H .
PETERS, Ueber Sprache und Vers bau der Chronik von Flore/fo, diss . Halle, 1886, p . 19, n° 55) [il est vrai qu'il peut aussi s ' agir de formes analogiques, cf, P . FoucHt,Le verbe français (Paris, 1931), § 141] ; ajouter pour un domain e dialectal voisinIsara > Eisere, Eisre > Oise, SCHWAN-BEHRENS, Grammaire de l 'ancien français (Leipzig, 1932), § 130 Rem .) ; contrairement à l 'attente on a
waisdre(1335),wausdre (14 .47 waude «gaude n ?),vendre : sont-ce des emprunts à un parler voisin ? A noter que les formes en -dresont aussi représentées dan s une autre aire latérale et archaïsante du domaine gallo-roman : guédreetvouèdr e
f. sont signalés pour le normand par JORET (Voir ROLLAND, O . C ., t . II, p . I22) , et une forme similaire s'est conservée comme relique lexicale aux portes même s de Paris : Saint-Denis a uneplace aux gueldres, c'est-à-dire aux guèdes (CRAPE-LET, Proverbes etc., Paris, 1831, p . 47)