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Anorexie mentale, lien parental et attachement : étude du lien parental dans l’enfance chez une population d’enfants et d’adolescents avec anorexie mentale

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

HAL Id: dumas-01348208

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Submitted on 22 Jul 2016

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Anorexie mentale, lien parental et attachement : étude

du lien parental dans l’enfance chez une population

d’enfants et d’adolescents avec anorexie mentale

Audrey Albinhac

To cite this version:

Audrey Albinhac. Anorexie mentale, lien parental et attachement : étude du lien parental dans l’enfance chez une population d’enfants et d’adolescents avec anorexie mentale. Médecine humaine et pathologie. 2016. �dumas-01348208�

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Université de Bordeaux

U.F.R. DES SCIENCES MÉDICALES

Année 2016 N° 3049

Thèse pour l’obtention du

DIPLOME d’ÉTAT de DOCTEUR EN MÉDECINE

Présentée et soutenue publiquement Par Audrey ALBINHAC

Née le 14 juin 1986 à Montpellier Le 8 juillet 2016

Titre de la thèse

Anorexie mentale, lien parental et attachement :

Étude du lien parental dans l’enfance chez une population d’enfants et d’adolescents avec anorexie mentale

Directeur de thèse

Monsieur le Professeur Manuel BOUVARD

Jury

Madame le Professeur Hélène VERDOUX, Présidente Madame le Professeur Marie TOURNIER, Juge Monsieur le Professeur Bruno AOUIZERATE, Juge

Madame le Docteur Stéphanie BIOULAC, Juge Madame le Docteur Anne-Laure SUTTER, Juge Monsieur le Docteur Marc DELORME, Rapporteur

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1

Université Bordeaux

U.F.R. DES SCIENCES MÉDICALES

Année 2016 N° 3049

Thèse pour l’obtention du

DIPLOME d’ÉTAT de DOCTEUR EN MÉDECINE

Présentée et soutenue publiquement Par Audrey ALBINHAC

Née le 14 juin 1986 à Montpellier Le 8 juillet 2016

Titre de la thèse

Anorexie mentale, lien parental et attachement :

Étude du lien parental dans l’enfance chez une population d’enfants et d’adolescents avec anorexie mentale

Directeur de thèse

Monsieur le Professeur Manuel BOUVARD

Jury

Madame le Professeur Hélène VERDOUX, Présidente Madame le Professeur Marie TOURNIER, Juge Monsieur le Professeur Bruno AOUIZERATE, Juge

Madame le Docteur Stéphanie BIOULAC, Juge Madame le Docteur Anne-Laure SUTTER, Juge Monsieur le Docteur Marc DELORME, Rapporteur

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REMERCIEMENTS

A notre Présidente de thèse,

Madame le Professeur Hélène Verdoux,

Vous nous faites l’honneur d’assurer la présidence du jury de thèse.

Vos qualités professionnelles et votre investissement dans le partage de vos connaissances sont pour nous des exemples à suivre.

Nous tenons à vous témoigner notre respect et toute notre reconnaissance.

A notre Directeur de thèse,

Monsieur le Professeur Manuel Bouvard,

Nous vous remercions de nous faire l’honneur de diriger cette thèse et de nous avoir apporté votre soutien, vos critiques constructives et de nous avoir recentré sur le cœur de notre sujet tout au long de l’élaboration de ce travail.

Travailler avec vous a été pour nous très enrichissant. Recevez l’expression de nos sincères remerciements.

A notre Rapporteur de thèse,

Monsieur le Docteur Marc Delorme,

Vous nous faites l’honneur d’avoir accepté de participer au jury et d’être le rapporteur de cette thèse.

Nous vous remercions pour votre ouverture d’esprit et l’étendue de vos connaissances sur le sujet des troubles des conduites alimentaires.

(5)

3 A nos Juges,

Madame le Professeur Marie Tournier, Vous avez accepté de juger ce travail.

Veuillez trouver ici le témoignage de notre profond respect et de notre sincère considération pour votre savoir et votre rigueur.

Monsieur le Professeur Aouizerate,

Pour nous avoir fait l’honneur de siéger à notre jury de thèse. Pour la qualité de votre enseignement tout au long de notre internat. Recevez ici l’expression de notre vive gratitude.

Madame le Docteur Anne-Laure Sutter,

Pour nous avoir inspiré le sujet de cette thèse, nous avoir confirmé l’intérêt pour la périnatalité et nous faire l’honneur de bien vouloir juger ce travail.

Veuillez trouver dans ce travail l’assurance de notre estime et de notre reconnaissance.

Madame le Docteur Stéphanie Bioulac,

Nous vous remercions d’avoir accepté de participer à ce jury de thèse et de nous avoir confirmé le goût pour la pédopsychiatrie.

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Aux Médecins, Co-internes et Équipes soignantes qui ont traversé à mes côtés ces semestres d’internat en psychiatrie.

A Monsieur le Docteur Antoine Oliveira, qui m’a éclairé dans le chemin de la psychiatrie. A Monsieur le Docteur François Gosse, qui m’a donné l’envie de travailler avec les enfants. A Madame le Docteur Anne Postel, qui m’a donné le goût de la périnatalité.

A Madame le Docteur Astrid Claret, qui m’a donné l’envie d’aller plus loin, d’approfondir mes connaissances et de me dépasser.

A Monsieur le Docteur Xavier Pommereau, qui m’a ouvert l’esprit, montré de nouvelles et innovantes approches de la psychiatrie.

A Madame le Docteur Clarisse Locret, pour sa patience, sa gentillesse, ses précieux conseils, son accompagnement et ses relectures dans ce travail de thèse.

A Madame le Docteur Sophie Denard, Madame le Docteur Souad Bouzgarrou, Monsieur le Docteur Jean-Philippe Chaffiol, Monsieur le Docteur Jean-François Viaud, pour la transmission de votre savoir et pour m’avoir guidé au cours de mon internat.

A l’ensemble des équipes soignantes que j’ai rencontré durant ces années d’internat, pour leur accueil, leur professionnalisme, leur gentillesse et tout particulièrement à l’équipe de l’UTCA pour sa convivialité et son humour.

A Monsieur le Docteur Jean-Philippe Reneric, Madame le Docteur Anne Gaiffas, Madame Bayle, Monsieur Pons, l’équipe du SUHEA, l’équipe de UPSILON, l’équipe de l’UTCA et Valérie pour leur collaboration dans ce travail de thèse.

(7)

5 A ma famille,

A mes parents,

Pour leur amour et soutien de tous les jours.

Ceux grâce à qui je suis devenue qui je suis aujourd’hui. A mon frère,

Pour son amour, son réconfort, sa confiance et sa présence.

A mon papi et particulièrement à ma mamie, que j’aime et qui veille sur nous. A ma tante et mes cousines, pour leur amour et leur soutien.

A ma belle-famille, pour m’avoir si bien accueillie dans leur famille.

A mes amis,

A Marie, Noémie, Julie, Ombeline, Camille, Audrey, Pauline, Céline, Clémence, Mathilde, JB, Romain, Nico, la team bayonnaise et les autres,

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A Jean-Etienne,

(9)

7

Serment d'Hippocrate

Au moment d’être admise à exercer la médecine, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité.

Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux.

Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité.

J’informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs conséquences. Je ne tromperai jamais leur confiance et n’exploiterai pas le pouvoir hérité des circonstances pour forcer les consciences.

Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire.

Admise dans l’intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés. Reçue à l’intérieur des maisons, je respecterai les secrets des foyers et ma conduite ne servira pas à corrompre les mœurs.

Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément.

Je préserverai l’indépendance nécessaire à l’accomplissement de ma mission. Je n’entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés.

J’apporterai mon aide à mes confrères ainsi qu’à leurs familles dans l’adversité.

Que les hommes et mes confrères m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ; que je sois déshonorée et méprisée si j’y manque.

(10)

TABLE DES MATIERES

GLOSSAIRE 11

INTRODUCTION 12

PARTIE I : ÉTAT DES CONNAISSANCES 13

ANOREXIE MENTALE 13

I- Épidémiologie 13

A- Sexe ratio 13

B- Incidence 13

C- Prévalence 14

II- Classifications et critères diagnostiques 15

A- Critères diagnostiques : les différences selon les classifications 15

B- Apports du DSM-5 17

III- Formes cliniques 18

A- Forme typique de l’adolescent 18

1) Triade symptomatique 18

2) Comportements compensatoires 19

3) Distorsions cognitives 19

4) Aspects affectifs 20

5) Comorbidités 20

B- Autres formes cliniques 21

1) Anorexie mentale de la période pré-pubertaire 21

2) Anorexie mentale chez le garçon 21

IV- Facteurs étiopathogéniques 23

A- Facteurs biologiques 23 1) Génétiques 23 2) Neurobiologiques et neuropsychologiques 24 3) Prénataux et périnataux 24 4) Infectieux 26 B- Facteurs psychologiques 26 1) Individuels 26 2) Familiaux 27 3) Attachement et traumatisme 28 C- Facteurs socio-culturels 28 V- Évolution 30 A- Taux de mortalité 30 B- Facteurs pronostiques 31

VI- Prise en charge 32

ATTACHEMENT, LIEN PARENTAL et TROUBLES PSYCHIATRIQUES 34

I- Attachement normal 34

A- Rappel historique 34

B- Théorie de l’attachement 35

1) Concepts généraux 35

2) Ontogenèse du lien d’attachement 38

3) Styles d’attachement 39

4) Évolution de l’attachement 42

C- Attachement et ocytocine 42

D- Facteurs familiaux influençant l’attachement 44

1) Caractéristiques individuelles des parents 44

2) Environnement 46

(11)

9

4) Mode de garde 47

5) Caractéristiques individuelles de l’enfant 47

II- Troubles de l’attachement 48

A- Classifications et critères diagnostiques 48

B- Trouble réactionnel de l'attachement 51

C- Trouble de l'engagement social désinhibé 52

III- Attachement et pathologies psychiatriques 53

A- Enfant, adolescent 53 1) Comportements internalisés 53 2) Comportements externalisés 54 B- Adulte 55 1) Dépression 55 2) Suicide 55

3) État de stress post-traumatique 56

ATTACHEMENT, LIEN PARENTAL et ANOREXIE MENTALE 58

I- Lien parental et symptômes alimentaires dans la population générale 60

A- Chez les préadolescents et adolescents 60

B- Chez les adultes 61

II- Lien parental et troubles des conduites alimentaires 64

III- Lien parental et anorexie mentale 71

IV- Conclusion 74

PARTIE II : ÉTUDE PERSONNELLE

ÉTUDE DU LIEN PARENTAL DANS L’ENFANCE CHEZ UNE POPULATION D’ENFANTS ET

D’ADOLESCENTS AVEC ANOREXIE MENTALE 76

OBJECTIFS 76 HYPOTHÈSES 76 I- Principale 76 II- Secondaire 76 MATÉRIEL ET MÉTHODE 76 I- Population étudiée 76 A- Critères d’inclusion 77 B- Critères d’exclusion 77

II- Outil d’évaluation 77

A- Mini International Neuropsychiatry Interview for Children and Adolescent (MINI-KID) 77 B- Children's Depression Inventory (CDI) et Children Depressive Rating Scale (CDRS) 77

C- Parental Bonding Instrument (PBI) 77

D- Grille de recueil d’informations sur l’anorexie mentale 78

III- Procédure 79

A- Étapes de la procédure 79

B- Lieu de recrutement 79

IV- Analyse statistique 79

RÉSULTATS 80

I- Analyse descriptive 80

A- Données socio-démographiques 80

B- Données cliniques 80

1) Données cliniques sur les patientes souffrant d’anorexie mentale 80 2) Données cliniques sur l’ensemble de la population étudiée 81

3) Résultats concernant le PBI 83

II- Analyses de corrélation 88

A- Corrélation des scores du PBI par rapport à l’âge 88 B- Corrélation de la dépression par rapport au lien parental 88 C- Corrélation des variables de l’anorexie mentale par rapport au lien parental 89

(12)

D- Corrélation du lien parental perçu avec la mère par rapport à celui avec le père 89

DISCUSSION 90

I- Principaux résultats et comparaison avec les données de la littérature 90

II- Limites de l’étude 94

CONCLUSION ET PERSPECTIVES 95

BIBLIOGRAPHIE 97

(13)

11

GLOSSAIRE

AAI ACAA ADS AM AM-R AM-B APA BED BN CDI CDRS CIM CMR DSED DSM EAT EDM EDNOS GHQ GMM GPP HAS HDJ IC IMC IRMf MIO OMS OT OR OXTR PANDAS PBI PIU PTSD RAD SMR SNP SSPT STS TACA TCA TDA/H TGP TOC TS

Adult Attachment Interview

Attitudes et Comportements Alimentaires Anormaux Anxiété De Séparation

Anorexie Mentale

Anorexie Mentale de type Restrictif

Anorexie Mentale avec crise de Boulimie/vomissements ou prise de purgatifs

American Psychiatric Association Binge-Eating Disorder

Boulimie Nerveuse

Children's Depression Inventory Children Depressive Rating Scale

Classification internationale des maladies Crude mortality rate (Taux brut de mortalité)

Disinhibited Social Engagement Disorder (Trouble de l'engagement social désinhibé)

Diagnostic and Statistical Manual of mental disorders Eating Attitudes Test

Episode Dépressif Majeur

Eating Disorders Not Otherwise Specified General Health Questionnaire

Grand-Mère Maternelle Grand-Père Paternel Haute Autorité de Santé Hôpital de Jour

Intervalle de Confiance Indice de Masse Corporelle

Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle Modèles Internes Opérants

Organisation mondiale de la santé Ocytocine

Odds Ratio

Récepteur de l'ocytocine

Pediatric Autoimmune Neuropsychiatric Disorders Associated with Streptococcal infections

Parental Bonding Instrument

Problématique de l'Utilisation d'Internet

Post-traumatic stress disorder (État de stress post-traumatique) Reactive Attachment Disorder (Trouble réactionnel de l'attachement) Ratio standardisé de mortalité

Polymorphismes Nucléotidiques Simples Symptômes de Stress Post-Traumatique Stress Traumatique Secondaire

Trouble de l’Alimentation et des Conduites Alimentaires Trouble des Conduites Alimentaires

Trouble du Déficit de l’Attention / Hyperactivité Troubles Graves de la Personnalité

Trouble Obsessionnel Compulsif Tentatives de Suicide

(14)

INTRODUCTION

Les troubles des conduites alimentaires (TCA) semblent de plus en plus fréquents et suscitent un intérêt qui n'a cessé de croître durant ces dernières décennies. Cet intérêt est lié au caractère à la fois provocant et paradoxal de l'anorexie mentale (AM).

L’AM est une pathologie essentiellement psychologique, qui entraine des conséquences somatiques graves.

L’AM est présentée par certains auteurs comme une pathologie du lien à l’environnement et du lien à l’autre. Le dysfonctionnement familial prend également une place importante.

En parallèle, la théorie de l’attachement suscite également un intérêt croissant pour les cliniciens et les chercheurs dans le domaine de la psychopathologie au cours de ces dernières décennies. L’attachement est en lien avec la régulation des émotions, l’estime de soi, les stratégies d’adaptation, les compétences sociales (Sroufe 2005) mais aussi avec les pathologies psychiatriques.

La théorie de l’attachement fournit ainsi un modèle théorique pour comprendre l’interaction des caractéristiques individuelles et familiales de l’AM.

Au cours des dernières années, la question du lien entre les troubles de l'alimentation et les difficultés dans les relations interpersonnelles et plus spécifiquement familiales a pris une nouvelle actualité. La théorie de l'attachement est maintenant considérée comme une théorie non seulement des relations précoces des nourrissons avec leurs parents mais aussi comme une théorie plus générale des relations interpersonnelles. Elle a donc une place centrale dans l’étude de la santé psychique.

A l’heure actuelle, les chercheurs s’accordent sur le rôle de l’attachement insécure dans le développement et la pérennisation des TCA, bien que la nature de ce rôle reste largement inconnue en raison du petit nombre de recherches dans ce domaine. Les TCA pourraient représenter une tentative inadaptée pour faire face aux expériences de vie négatives de l’enfance. Celles-ci pourraient être un facteur de vulnérabilité psychopathologique ou un facteur de risque spécifique d’AM.

La nature multifactorielle de l’AM, la place centrale de la famille dans ce trouble et l’intérêt croissant pour la théorie de l’attachement dans les TCA, nous ont donné envie de nous questionner sur le rapport entre les liens intrafamiliaux et l’émergence de l’AM.

Nous allons présenter dans une première partie théorique, un état des lieux des données actuelles sur l’AM, l’attachement et les liens parentaux au travers de la théorie de l’attachement et enfin sur l’association entre attachement, lien parental et AM.

Dans une seconde partie expérimentale, nous avons confronté ces données théoriques à l’étude observationnelle d’une population clinique de 18 patientes ayant été hospitalisées en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent entre juin 2015 et janvier 2016 pour AM et 12 patientes témoins hospitalisées en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent pour épisode dépressif majeur (EDM) en questionnant le lien parental perçu dans l’enfance.

(15)

13

PARTIE I : ÉTAT DES CONNAISSANCES

ANOREXIE MENTALE

I- Épidémiologie

L’AM débute le plus souvent après la puberté avec un âge moyen de début des troubles à 17 ans. On observe deux pics de survenue : l’un autour de 13-14 ans et l’autre autour de 18 ans (Chaulet et al. 2015).

Le suivi de l’évolution de l’incidence et de la prévalence de l’AM au cours du temps est difficile. Il en est de même pour les différences entre les populations et les cultures étudiées dans les études. Ces difficultés peuvent être expliquées par différents facteurs:

- au fil des avancées de la recherche, les critères diagnostiques des classifications internationales, telles que le Diagnostic and Statistical Manual of mental disorders 5 (DSM - 5) de la classification américaine APA (American Psychiatric Association 2013) et la Classification internationale des maladies (CIM-10) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) (Pull 1994), évoluent.

- une faible prévalence en population générale associée au déni fréquent des troubles par le patient et leur évitement du système de soins.

- la non généralisation des données obtenues des cohortes issues de la population clinique à la population générale. La majorité des études étant issues de la population clinique du fait de la faible prévalence du trouble en population générale.

- la disparité méthodologique des études cliniques, des populations étudiées (en particulier l’âge des échantillons) et des durées de suivi.

De plus, nous soulignerons qu’aucune étude épidémiologique sur l’AM n’a été réalisée en France (N. Godart et al. 2009).

A- Sexe ratio

Le sexe ratio est le ratio des taux de prévalence à vie de l'AM chez les hommes contre les femmes. Il est souvent signalé comme égale ou inférieure à 1: 10 (Hans W. Hoek 2006). Chez les enfants, ce ratio change. Dans une étude canadienne de 161 enfants de moins de 13 ans, le sexe ratio a été de 6 :1 (Pinhas et al. 2011).

B- Incidence

Le taux d'incidence est le nombre de nouveaux cas d'une maladie dans la population sur une période donnée.

Dans la revue de la littérature de Smink et coll. (Smink, van Hoeken, et Hoek 2012), les auteurs ont montré que le taux d’incidence de l’AM est relativement stable au cours du temps mais qu’il s’accroit dans le groupe à risque des 15-19 ans.

(16)

L’augmentation de l’incidence de l’AM ces dernières décennies, a souvent été discutée, avec des questionnements sur une éventuelle épidémie nationale ou internationale. Cette augmentation serait plutôt en lien avec la médiatisation et la sensibilisation du public et des professionnels de santé avec une augmentation du dépistage et de l’accès aux soins.

Selon la revue de la littérature de Hoek et coll. (Hans Wijbrand Hoek et van Hoeken 2003), l’incidence de l’AM a varié entre 0,1 et 12 pour 100 000 personnes par an.

Selon la revue de la littérature de Roux et coll. (Roux, Chapelon, et Godart 2013), en population générale, l’incidence a été comprise entre 109 et 270 pour 100 000 personnes par an entre 15 et 19 ans.

Chez les enfants de moins de 13 ans, les études sont rares et les résultats ont varié entre 1,1 et 2,6 pour 100 000 personnes par an, à partir des bases de données des pédiatres, selon la revue de la littérature de Smink et coll. (Smink, van Hoeken, et Hoek 2012).

Chez l’homme, l’incidence a été de 1 pour 100 000 personnes par an (Hans W. Hoek 2006).

C- Prévalence

En épidémiologie, la prévalence est une mesure de l'état de santé d'une population à un instant donné. Pour une affection donnée, elle est calculée en rapportant à la population totale le nombre de cas de maladies présents à un moment donné dans une population (que le diagnostic ait été porté anciennement ou récemment). La prévalence est une proportion qui s'exprime généralement en pourcentage.

La prévalence vie entière de l’AM a été évaluée dans trois grandes études de cohorte en population de jumeaux. En Suède, chez une cohorte de jumeaux nés entre 1935 et 1958, elle a été de 1,2% pour les femmes et 0,29% pour les hommes (Bulik CM et al. 2006). En Australie, la prévalence vie entière a été de 1,9% chez des femmes âgées de 28 à 39 ans (Wade et al. 2006). Enfin, en Finlande, dans une cohorte de jumeaux nés entre 1975 et 1979, elle a été de 2,2% pour les femmes (Keski-Rahkonen et al. 2007) et 0,24% pour les hommes (Raevuori et al. 2009).

Selon la revue de la littérature de Hoek et coll. (Hans Wijbrand Hoek et van Hoeken 2003), comprenant des études allant de 1930 à 1999, la prévalence vie entière a varié entre 0 et 0,9% chez des populations dont l’âge varie entre 11 et 35 ans.

Chez les adolescents, dans l’étude de Swanson et coll.(Swanson SA et al. 2011), sur 10 123 patients âgés de 13 à 18 ans de la zone continentale des États-Unis, la prévalence vie entière a été de 0,3%.

Nous pouvons remarquer que la prévalence a tendance à varier en fonction de l’âge de la population étudiée.

(17)

15

II- Classifications et critères diagnostiques

L’AM est un trouble psychiatrique caractérisé. Les deux principales classifications des maladies mentales dont disposent actuellement les cliniciens et les chercheurs pour harmoniser leurs diagnostics et permettre une meilleure comparabilité, s’inscrivent dans une perspective descriptive, catégorielle et statistique. Ces deux modèles nosographiques sont la classification américaine établie par l’APA, le DSM et la CIM. Les versions successives de ces classifications ont permis de s’adapter progressivement à l’évolution des connaissances dans les TCA.

Les critères diagnostiques de l’AM pour ces deux systèmes sont répertoriés dans le tableau suivant.

A- Critères diagnostiques : les différences selon les classifications

Les critères diagnostiques d’AM sont répertoriés dans le tableau ci-dessous et les différences entre les classifications sont en couleur (tableau N°1).

Tableau N°1: Comparaison des critères diagnostiques de l’anorexie mentale selon les classifications.

DSM-IV-R DSM-5 CIM-10

Chapitre Trouble des conduites alimentaires (TCA)

Trouble de l’alimentation et des conduites

alimentaires (TACA) « Feeding and Eating Disorders » Trouble de l’alimentation (F50) Sous chapitres -Anorexie mentale -Boulimie

-Trouble des conduites alimentaires non spécifié

- Pica (chez l’enfant et chez l’adulte)

-Mérycisme (Rumination Disorder)

-Alimentation sélective (Avoidant/Restrictive Food Intake Disorder) -Anorexie nerveuse (type restrictif ou

binge-eating/purging) -Boulimie nerveuse -Hyperphagie (Binge-Eating Disorder)

-Autres TACA spécifiés -TACA non spécifiés (Unspecified Feeding or Eating Disorder) -Anorexie mentale -Anorexie mentale atypique -Boulimie -Boulimie atypique -Hyperphagie associée à d’autres perturbations psychologiques -Vomissements associés à d’autres perturbations psychologiques (Pica de l’adulte) -Autres troubles de l’alimentation -Troubles de l’alimentation sans précision Code AM (307.1) (307.1) (F50.1) Critères diagnos-tics de l’AM A) Refus de maintenir le poids corporel au niveau ou au-dessus d’un poids minimum normal pour

A) Restriction des apports énergétiques alimentaires menant à un poids significativement A) Poids corporel inférieur à la normale de 15% ou IMC ≤ 17,5; chez les patients

(18)

l’âge et pour la taille (perte de poids conduisant au maintien du poids à moins de 85% du poids attendu, ou incapacité à prendre du poids pendant la période de croissance conduisant à un poids inférieur à 85% du poids attendu). B) Peur intense de prendre du poids ou de devenir gros, alors que le poids est inférieur à la normale.

C) Altération de la perception du poids ou de la forme de son propre corps, influence

excessive du poids ou de la forme corporelle sur l’estime de soi, ou déni de la gravité de la maigreur actuelle. D) Chez les femmes postpubères, aménorrhée (absence d’au moins trois cycles menstruels

consécutifs).

bas pour l'âge, le sexe, la trajectoire de

développement, et la santé physique. Un poids significativement bas est défini par un poids inférieur au poids minimum normal, ou chez les enfants et les adolescents, inférieur au poids minimum attendu. B) Peur intense de prendre du poids ou de devenir gros, ou la persistance de comportements qui interfèrent avec la prise de poids, alors que le poids est

significativement bas. C) Altération de la perception du poids ou de la forme de son propre corps

(dysmorphophobie); influence excessive du poids ou de la forme corporelle sur l’estime de soi, ou déni de la gravité de la maigreur actuelle. D) Disparition du critère D.

prépubères, prise de poids inférieure à celle qui est escomptée pendant la période de croissance.

B) La perte de poids est provoquée par le sujet par le biais d’un évitement des aliments qui font grossir,

fréquemment associée à au moins une des

manifestations suivantes: vomissements

provoqués, utilisation des laxatifs, pratique excessive d’exercices physiques, utilisation de coupe-faim ou de diurétiques. C) Psychopathologie spécifique consistant en une perturbation de l’image du corps associée à l’intrusion d’une idée surinvestie: la peur de grossir.

D) Présence d’un trouble endocrinien diffus de l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique avec aménorrhée chez la femme, perte du désir sexuel et impuissance chez

l’homme.

E) Quand le trouble débute avant la puberté, les manifestations de cette dernière sont retardées ou stoppées. Sous

types

- Type restrictif («Restricting type»): pendant l’épisode actuel d’anorexie mentale, le sujet n’a pas, de manière régulière, présenté de crises de boulimie ni recouru aux

- Type restrictif («Restricting type»): durant les trois derniers mois, le sujet n’a pas, de manière régulière, présenté de crises de boulimie ni recouru aux vomissements provoqués

(19)

17 vomissements provoqués

ou à la prise de purgatifs (laxatifs, diurétiques, lavements).

- Type avec crises de boulimie/vomissements ou prise de purgatifs («Binge-Eating/Purging type »): pendant l’épisode actuel d’anorexie mentale, le sujet a, de manière régulière, présenté des crises de boulimie et/ou recouru aux vomissements provoqués ou à la prise de purgatifs (laxatifs, diurétiques, lavements). ou à la prise de purgatifs (laxatifs, diurétiques, lavements).

- Type avec crises de boulimie/vomissements ou prise de purgatifs («Binge-Eating/ Purging type »): durant les trois derniers mois, le sujet a, de manière régulière, présenté des crises de boulimie et/ou recouru aux vomissements

provoqués ou à la prise de purgatifs (laxatifs,

diurétiques, lavements).

AM : Anorexie mentale ; CIM : Classification Internationale des Maladies ; DSM : Diagnostic and Statistical Manual ; IMC : Indice de Masse Corporelle Différences entre les classifications

B- Apports du DSM-5

Les deux objectifs principaux ont été de clarifier les critères existants et de mieux spécifier les diagnostics au sein du groupe des TCA en diminuant la fréquence du diagnostic de TCA non spécifié du DSM-IV-R (ou dans le DSM-IV, EDNOS (eating disorders not otherwise specified)). Ces modifications ont ainsi permis de constituer des groupes plus homogènes pour la clinique et la recherche.

Les principaux changements ont concerné :

- le remplacement de la nomination de la catégorie.

- le regroupement des troubles habituellement diagnostiqués pendant la première, deuxième enfance ou l’adolescence (Pica, mérycisme et TCA de la première et deuxième enfance) avec les TCA dans un seul chapitre de cohésion.

- la reconnaissance de l’hyperphagie boulimie comme un diagnostic caractérisé. En ce qui concerne plus spécifiquement l’AM, on retrouve :

- la clarification du statut de faible poids.

- la modification du critère B de telle sorte que les patients ne doivent pas explicitement approuver la peur de prendre du poids ou de devenir gros. Ce changement est particulièrement intéressant en ce qui concerne les patients plus jeunes verbalisant difficilement leur motivation pour le comportement de restriction alimentaire.

- l’élimination du critère D, concernant l’aménorrhée, permettant ainsi de faciliter le diagnostic d’AM chez l’homme, chez la femme pré-ménarchale, la femme post-ménopausée et la femme prenant des contraceptifs oraux.

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III-

Formes cliniques

Les premières descriptions médicales historiques remontent au XIe siècle avec Avicenne et restent constantes et stables à travers les époques et les pays. C’est seulement en 1883, que Huchard lui donne son nom actuel d’AM.

Son diagnostic est avant tout clinique. Il nécessite classiquement la présence de la triade symptomatique dite des « 3A » : Anorexie-Amaigrissement-Aménorrhée décrite dès 1873 par Lasègue.

A- Forme typique de l’adolescent

1) Triade symptomatique

L’anorexie est le symptôme principal. Il s'agit non pas comme le suggère l'étymologie de ce mot d'une absence d'appétit mais d'une restriction alimentaire volontaire qualitative et quantitative. Cette restriction alimentaire représente une lutte active contre la faim, sensation à la fois source de honte rappelant les besoins instinctuels du corps et source d'une satisfaction jouissive, indice activement recherché de la maîtrise des besoins.

Les conduites de restriction sont quantitatives (diminution des quantités) et/ou qualitatives (exclusion des aliments les plus caloriques ou supposés tels) aussi appelées conduites de sélection. Elles sont accompagnées d’attitudes alimentaires aberrantes avec par exemple, tri dans l’assiette, découpage des aliments en portions minuscules, cuisson exagérée des aliments et consommation excessive de sel, d’épices… La patiente investit de plus en plus la cuisine jusqu’à l’occuper totalement. Les centres d’intérêts se focalisent progressivement et exclusivement sur la nourriture et le repas devient souvent un enjeu de conflits familiaux (Grall-Bronnec, Guillou-Landreat, et Vénisse 2007).

Une perte de contrôle peut se produire, ce d’autant plus que la restriction est importante. Elle se traduit par les crises de boulimie et représente 50 à 64% des cas (Stice et al. 2008).

L'amaigrissement correspond à une perte de poids importante ou à une absence de prise de poids pendant la croissance. Le diagnostic est posé lorsque le poids est au moins 15 % en dessous du poids attendu, soit un Indice de Masse Corporelle (IMC = poids en kg/taille en m2) inférieur au 10e percentile chez les adolescents, ou inférieur à 17,5 chez les adultes (American Psychiatric Association 2004; Hebebrand et al. 1996).

Il représente généralement le motif de consultation initial. L’inquiétude de l’entourage contrastant avec l’apparente indifférence, le déni de l’adolescent.

Cet amaigrissement procure initialement une illusion de mieux-être et permet d’effacer toutes traces de transformations pubertaires et notamment les caractères sexuels secondaires féminins.

Cet amaigrissement se répercute sur le plan somatique, au niveau des phanères (cheveux secs et cassants, ongles striés et cassants, peau sèche, lanugo et hypertrichose), au niveau cardio-vasculaire (bradycardie, pâleur, hypotension artérielle, acrocyanose, œdèmes de carences), au niveau central (hypothermie) et au niveau digestif (constipation).

L’aménorrhée peut être primaire si la jeune fille n'était pas encore réglée ou secondaire dans le cas contraire. On parle d'aménorrhée après une interruption de trois mois des règles précédemment régulières, ou de six mois si elles étaient irrégulières. Son apparition est

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19 précoce et elle est habituellement un des derniers symptômes à disparaître. L'aménorrhée est liée à l'importance de la dénutrition et de l'exercice physique et à leurs effets sur l'axe hypothalamo-hypophysaire gonadique (insuffisance gonadotrope centrale fonctionnelle), mais aussi à certaines dimensions psychopathologiques comme l’ont suggéré certaines données cliniques telles que l’aménorrhée précédant l'amaigrissement (30 % des cas) et la persistance de l'aménorrhée après la rééquilibration pondérale.

Les règles réapparaissent dans un délai extrêmement variable, avec un pourcentage d'aménorrhée persistant six à douze mois après le retour à un poids normal allant de 13 à 20 %. Les taux d'œstradiol périphériques ont alors été corrélés à des symptômes clés de l'AM tels que l'insatisfaction corporelle (Brambilla et al. 2003).

L’aménorrhée fait partie des symptômes cardinaux de l’AM mais peut être masquée par la contraception orale. Ainsi dans la nouvelle classification du DSM-5, ce critère n’est plus obligatoire pour porter le diagnostic d’AM (American Psychiatric Association 2013).

2) Comportements compensatoires

Ils sont mis en œuvre pour limiter la prise de poids en cas d’ingestion alimentaire jugée excessive ou pour favoriser une perte de poids. On retrouve l’hyperactivité physique qui est très fréquente chez les patientes avec une anorexie mentale de type restrictif (AM-R), les vomissements provoqués par des manœuvres destinées à entrainer un réflexe nauséeux, la prise de laxatifs ou de diurétiques.

Plus rarement, l’AM est associée à des comportements plus complexes: l’ingestion de grandes quantités d’eau, appelée la potomanie dans un but de « purification » ou même de « lavage d’estomac » ; une kleptomanie, avec notamment des vols d’aliments ; un mérycisme (retour provoqué du bol alimentaire pour être mastiqué à nouveau), toujours fait en cachette (N. Godart et Doyen 2015). Le mérycisme doit être recherché car il témoigne souvent de troubles profonds de la personnalité et est plus fréquent qu’il n’y paraît (Jeammet 2011).

3) Distorsions cognitives

Chez ces patientes il existe une distorsion, quasi délirante, de l’image de leur propre corps, on parle alors de dysmorphophobie qui peut être généralisée à l’ensemble du corps mais qui, le plus souvent, est centrée sur certaines zones (ventre, cuisses, hanches, fesses). Ce trouble de l’image du corps augmente paradoxalement avec l’amaigrissement (Nicolas, Lamas, et Corcos 2014). Il est à noter que le déni des troubles reflète l'importance du trouble de la perception de l'image du corps.

La crainte de grossir s'exprime difficilement d'emblée mais se traduit par de multiples conduites de vérification : pesées quotidiennes voire pluriquotidiennes, prise de mensurations. Sont également mises en évidence des croyances erronées relatives aux aliments et au fonctionnement digestif comme par exemple les propos d’une patiente: « chaque aliment ingéré s’accumule dans le ventre, en couches bien distinctes, comme un millefeuille ».

L’hyperactivité que l’on retrouve au niveau physique est également présente dans les activités intellectuelles. On rapporte classiquement un hyper-investissement dans le travail scolaire, un perfectionnisme très affirmé et une rigidité (Anderluh et al. 2003). Le mode de pensée est opératoire et se remarque surtout dans les domaines de l’apprentissage et peu dans ceux de l’imagination et la créativité (Nicolas, Lamas, et Corcos 2014). Contrairement aux idées reçues, ces patientes ne semblent pas avoir de performances intellectuelles supérieures à celles

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de la population générale. Les études concernant les fonctions cognitives et exécutives chez ces patientes ont montré que la défaillance des deux dimensions attention et flexibilité mentale sont à l’origine du perfectionnisme, de la rigidité et des comportements ritualisés (Carina Gillberg et al. 2007).

4) Aspects affectifs

Les patientes anorexiques ont en commun une grande insécurité intérieure et un manque d'estime de soi, qui les rendent dépendantes de leur entourage et hypersensibles à la déception. Leur comportement d'autodestruction leur permet de s'opposer et de retrouver force et maîtrise (Jeammet 2011).

On retrouve chez ces patientes un isolement relationnel de leurs pairs aboutissant à une dépendance relationnelle avec les parents et la fratrie. L’AM apparaît alors comme une tentative de se dégager de l’emprise de cette relation. Autrement dit, selon Chaulet, l’adolescente anorexique inverse les rôles, dans la mesure où c’est la famille qui devient dépendante de son bon vouloir. Cette « emprise manipulatrice » assure le succès d'un illusoire contrôle de la sphère affective. Les conflits avec les parents sont alors inévitables et contribuent à l'auto-renforcement de la conduite (Chaulet et al. 2015). Ces pervertisations des relations interpersonnelles sont à la hauteur des conflits internes du sujet (Nicolas, Lamas, et Corcos 2014).

Maurice Corcos et coll. (Corcos et Dupont 2007) ont décrit les patientes souffrant d’AM avec une incapacité à gérer les conflits et avec une prédisposition à une dépendance exagérée et un manque d’autonomie. Ils parlent ainsi de « pathologie du lien ».

L’estime de soi est très fortement dépendante de l’image du corps.

La sexualité est refoulée, désinvestie. Les transformations corporelles liées à la puberté sont niées.

5) Comorbidités

Il est retrouvé chez les patientes anorexiques une prévalence élevée de troubles anxieux ainsi que de troubles de l’humeur et en particulier d’EDM. Les troubles anxieux sont généralement rapportés comme prémorbides aux TCA et les plus fréquents sont la phobie sociale et le trouble obsessionnel compulsif (TOC) (N. T. Godart et al. 2002). Dans la publication de Kessler et coll., la prévalence globale des troubles de l’humeur chez les sujets anorexiques a été deux fois supérieure à celle observée dans la population générale (environ 23,9% selon la National Comorbidity Survey) (Kessler RC et al. 1994). Dans une revue de la littérature chez des patients anorexiques âgés de 7 à 17 ans, les auteurs ont retrouvé 26% de troubles anxieux et phobiques, 20,9% de troubles thymiques, 18,9% d’addictions, 17,9% de troubles graves de la personnalité (TGP), 12% de TOC et 6,5% de troubles schizophrénique (Steinhausen 2002).

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B- Autres formes cliniques

1) Anorexie mentale de la période pré-pubertaire

Le trouble a été décrit pour la première fois dans les années 1960 par Lesser et coll. (Lesser et al. 1960). Il s’agit d’une entité clinique qui se manifeste avant tout signe de puberté.

Il va être réalisé un résumé des différences cliniques retrouvées dans cette forme d’AM à partir de plusieurs publications (Peebles, Wilson, et Lock 2006; Heuzey et Acquaviva 2006; Doyen 2008; N. Godart et Doyen 2015).

Il est ainsi retrouvé un début souvent moins insidieux, avec une perte de poids rapide en raison de la faible masse grasse des enfants. Le premier signe est souvent représenté par une cassure de la courbe de croissance. Le tableau clinique est marqué par l'intensité des symptômes habituels avec la généralisation des conduites de refus, la restriction hydrique, la verbalisation rare des préoccupations corporelles ou pondérales et les plaintes somatiques fréquentes à type de douleurs abdominales ou de difficultés à avaler. Les choix alimentaires peuvent surprendre parfois, car ces enfants acceptent de manger des produits sucrés ou gras, mais toujours en quantité restreinte. Les conduites alimentaires rigides semblent l'apanage des très jeunes anorexiques qui témoigneraient de plus de perfectionnisme et de rigidité que les patients pubères.

Dans cette forme d’AM, les garçons sont plus représentés ainsi que le sous-type restrictif d’AM. Le sous-type avec vomissement puis avec mésusage de laxatifs devient plus commun avec l’âge.

Le fonctionnement familial est également modifié, plus le sujet est jeune et plus le contrôle et la tyrannie familiale sont majeurs (Doyen 2008).

Les antécédents de TCA dans la petite enfance sont fréquents et son pronostic semble plus grave.

Sur le plan des comorbidités, les études sont rares mais toutefois, les observations cliniques tendent vers une incidence élevée dans cette population. Dans la publication de Madden et coll. (Madden et al. 2009), les auteurs ont retrouvé que 62% des patients TCA présentent au moins une comorbidité psychiatrique et dans la publication de Nicholls et coll. (D. E. Nicholls, Lynn, et Viner 2011), la comorbidité la plus fréquente a été l’anxiété. La dépression, l’anxiété et le TOC sont présents chez 41% des enfants avec TCA.

2) Anorexie mentale chez le garçon

L'anorexie masculine a été décrite en 1694 par Morton (cité par (Chambry 2008)). Elle demeure relativement rare mais la plupart des auteurs suggèrent une sous-évaluation de sa prévalence. Ceci s'explique en partie par le faible nombre d’études menées en population générale, l'importance de l'aménorrhée ou de la baisse de la libido chez le garçon dans les critères diagnostiques, ainsi que par l'évolution longtemps supposée des formes masculines vers des troubles psychotiques.

Le tableau clinique se rapproche de la fille avec cependant quelques différences.

L’anorexie masculine débute plus souvent dans la période pré-pubertaire que chez la fille (Grall-Bronnec, Guillou-Landreat, et Vénisse 2007; Chaulet et al. 2015).

Les formes restrictives pures sont plus rares (Haute Autorité de Santé 2010).

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Les préoccupations sont plus marquées pour l’image corporelle et une moindre importance est accordée au poids avec un désir de perdre « leur graisse » afin de parvenir à l’idéal d’un corps musclé (N. Godart et al. 2009; Corbeil-Serre, Meilleur, et Turgeon 2014). On retrouve ainsi l’idéalisation des corps des athlètes et des culturistes (Heuzey et Acquaviva 2006).

L’IMC initial est plus élevé (Chambry 2008; Haute Autorité de Santé 2010).

L’hyperactivité physique prédomine sur l’investissement intellectuel (Haute Autorité de Santé 2010).

Il a été retrouvé moins de somatisation, de sensibilité interpersonnelle et d'anxiété (Raevuori 2014).

Il est fréquemment associé une obésité pré-morbide.

Les comorbidités psychiatriques sont quelque peu différentes (Woodside et al. 2001; Raevuori et coll. 2009). La notion classique d’une plus grande comorbidité avec la schizophrénie n’a pas été corroborée par les études récentes mais une plus grande fréquence de TGP de type obsessionnel-compulsif, antisocial et borderline a été signalée (Léonard 2015) ainsi que d’alcoolisme (Woodside et al. 2001). Par contre, les antécédents de TS (Gueguen, Godart, et Chambry 2012) et d’EDM (Woodside et al. 2001) sont moins fréquents.

Les investigations de l’orientation sexuelle ont produit des données contradictoires de sorte qu’il n’est pas possible non plus d’affirmer que l’homosexualité est plus fréquente chez l’homme (Léonard 2015).

L'évolution serait assez proche des formes féminines. Le fait d'être un garçon ne constituerait pas en soi un facteur pronostique péjoratif.

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IV-

Facteurs étiopathogéniques

L’étiopathogénie de l’AM reste encore mal connue. L’hypothèse la plus consensuelle actuellement est que l’AM est une pathologie d’origine multifactorielle avec des facteurs de vulnérabilité directement ou indirectement impliqués dans le symptôme. L’étude de ces facteurs dans l’AM est compliquée du fait de sa faible prévalence dans la population générale. La plupart des études sont des études transversales avec un nombre limité de facteurs de risque potentiels recherchés. De plus, peu d’études utilisent un groupe contrôle composé de patients avec un autre trouble psychiatrique et encore moins sans trouble psychiatrique. Voici un résumé de ces facteurs étiopathogéniques et facteurs de risque.

Rappelons qu’un facteur de risque est défini par l’OMS comme tout attribut, caractéristique ou exposition d’un sujet qui augmente la probabilité de développer une maladie ou de souffrir d’un traumatisme(« OMS | Facteurs de risque » 2016).

A- Facteurs biologiques

1) Génétiques

L’héritabilité de l’AM varie de 30 à 80% en fonction des études (Thornton, Mazzeo, et Bulik 2011).

Steinhaussen et coll. (Steinhausen et al. 2015) ont étudié l’agrégation familiale sur trois générations chez environ 9500 danois dans une étude cas-témoins et a retrouvé une prévalence au cours de la vie:

- six fois plus fréquente chez les mères de cas probants par rapport aux mères de contrôle avec un odds ratio : OR = 0,17 (IC 95% = 0,02 – 1,19 ; p < 0,05).

- quatre fois plus fréquente chez les frères et sœurs de cas probants par rapport aux frères et sœurs des contrôles avec un OR = 0,5 (IC 95% = 0,15 – 0,42 ; p < 0,001).

- cinq fois plus fréquente chez la progéniture des cas probants par rapport aux descendants des contrôles avec un OR = 0,19 (IC 95% = 0 ,03 – 1,12 ; p < 0,05).

- en revanche, aucun cas d’AM n’a été trouvé chez les pères.

Les nouvelles études ont suggéré que la puberté modifie les effets génétiques sur les troubles alimentaires, se déplaçant d'aucune influence génétique dans la période pré-pubère à une influence génétique importante après la puberté. En effet, il semblerait que le processus pubertaire et les modifications hormonales qui s’y produisent seraient essentiels à l’activation des gènes de susceptibilité en cause (Klump, McGue, et Iacono 2003; Klump et al. 2007; Culbert et al. 2009).

Les gènes les plus susceptibles d'être impliqué dans l'héritabilité des TCA concernent les systèmes biologiques en lien avec l'apport alimentaire, l'appétit, le métabolisme, l'humeur et le système de récompense-plaisir. Cependant, cette influence génétique n’a pas été attribuée à des gènes spécifiques, mais a résulté d'une interaction beaucoup plus complexe entre la vulnérabilité génétique et les facteurs environnementaux (Trace et al. 2013; Zerwas et al. 2014).

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Le sexe féminin est un facteur de risque de développer une AM OR = 22,1 (IC 95% = 5,2 - 94) (Dasha E. Nicholls et Viner 2009). Le risque attribuable pour ce facteur dans l’AM est de 89,4% (Raevuori, Linna, et Keski-Rahkonen 2014).

2) Neurobiologiques et neuropsychologiques

Dans l’étude de Favaro et coll. (Angela Favaro et al. 2014), les auteurs ont étudié la relation entre des altérations fonctionnelles et structurelles du striatum et l’AM. Ils ont conclu en l’existence d’altérations significatives de la connectivité fonctionnelle du striatum et des volumes du striatum chez les patients avec une AM. Ils ont également mis en évidence une association significative entre le nombre de complications obstétricales et la connectivité fonctionnelle des noyaux accumbens et du putamen, permettant ainsi d’émettre des hypothèses intéressantes sur la participation de ces zones cérébrales afin d’expliquer le rôle pathogène des complications obstétricales dans cette maladie.

Les études précoces de neuro-imagerie des TCA chez les enfants et les adolescents utilisant la tomographie par émission monophotonique ont démontré une hypo-perfusion principalement dans la région temporale du cerveau (Gordon 1997). Ces résultats ont été reproduits (Chowdhury 2003) et n’ont pas été réversibles avec une restauration de poids à long terme (Frampton 2011).

Plus récemment, des études en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) ont montré qu'une alimentation désordonnée peut être la conséquence d’une dérégulation du système de récompense et/ou d’un déséquilibre dans le traitement de l’information avec l’inhibition des systèmes motivationnelles de récompense. La restriction alimentaire peut ainsi être un moyen de réduire l’anxiété causée par des interactions biaisées entre le système sérotoninergique inhibiteur et le système de récompense dopaminergique (Kaye 2013).

3) Prénataux et périnataux

Les périodes prénatales et périnatales sont deux périodes se chevauchant. Le développement prénatal se réfère au processus de gestation d’un embryon ou d'un fœtus pendant la grossesse, allant de la fécondation jusqu'à la naissance. La période périnatale est définie par l’OMS de la 22ème semaine de grossesse jusqu'à la fin de la 1ère semaine de vie. Période comprenant donc la naissance (« WHO/Europe | Maternal and newborn health » 2015).

Au cours de ces périodes, il a pu être individualisé trois phases : la grossesse, l’accouchement ou la délivrance et le post-partum immédiat. Le plan suivra ces phases pour une meilleure clarté.

♦ Facteurs de risque au cours de la grossesse

Il est retrouvé dans la littérature, au cours de la grossesse, les facteurs de risque suivants : l’exposition à un stress au cours du troisième trimestre de la grossesse, suggérant ainsi la fin de la grossesse comme une «fenêtre de vulnérabilité» (St-Hilaire et al. 2015), un statut de poids chez la mère avant la grossesse avec insuffisance pondérale, surpoids ou obésité (relation non retrouvée chez les garçons) (A. Goodman et al. 2014), l’infarctus placentaire et la pré-éclampsie (Favaro A, Tenconi E, et Santonastaso P 2006; Tenconi et al. 2014).

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25 Il existe des preuves suggérant l'importance potentielle des infections maternelles comme l'exposition à la varicelle ou à la rubéole au cours du sixième mois de grossesse (A. Favaro et al. 2011) mais les réplications font défaut.

Le tabagisme de la mère (Dasha E. Nicholls et Viner 2009; A. Goodman et al. 2014), la prise de poids excessive de la mère pendant la grossesse (A. Goodman et al. 2014) et l’infection urinaire (Tenconi et al. 2014) n’ont pas été retrouvés comme des facteurs de risque d’AM. Les résultats sont plus contradictoires en ce qui concerne l’effet des hormones sexuelles prénatales, notamment la testostérone (Raevuori, Linna, et Keski-Rahkonen 2014), l’anémie et le diabète (Favaro A, Tenconi E, et Santonastaso P 2006; Dasha E. Nicholls et Viner 2009; Tenconi et al. 2014) .

♦ Facteurs de risque au cours de l’accouchement

Aucun facteur de risque n’a été clairement identifié au cours de l’accouchement.

L’inertie utérine et la disproportion céphalo-pelvienne n’ont pas été retrouvées comme des facteurs de risque d’AM (Tenconi et al. 2014).

L’accouchement par le siège (Lindberg et Hjern 2003; Tenconi et al. 2014), la rupture prématurée des membranes (A. Goodman et al. 2014), la césarienne (A. Goodman et al. 2014; Tenconi et al. 2014) et la méthode de délivrance par forceps ou à vide (Lindberg et Hjern 2003; Krug et al. 2013; A. Goodman et al. 2014; Tenconi et al. 2014) ont montré des résultats contradictoires.

♦ Facteurs de risque au cours du post-partum immédiat

Au cours du post-partum immédiat, les facteurs de risque d’AM identifiés dans la littérature sont : la détresse respiratoire, les tremblements, l’hypothermie (Tenconi et al. 2014), les problèmes cardiaques, l’hyporéactivité (Favaro A, Tenconi E, et Santonastaso P 2006; Tenconi et al. 2014), d'autres traumatismes de la naissance impliquant la tête, le cou ou le système nerveux central (non définis par les auteurs), les naissances multiples (jumeaux ou triplés) (A. Goodman et al. 2014) et la prématurité avec une relation dose-réponse (37-38 vs 39-41 semaines) (Krug et al. 2013; A. Goodman et al. 2014).

Par contre, aucune association n’a été retrouvée entre la cyanose, la présence de méconium dans le liquide amniotique, la nécessité de réanimation, l’hypotonie (Tenconi et al. 2014), la nécessité d'oxygène à la naissance ou d'intubation (Dasha E. Nicholls et Viner 2009; Tenconi et al. 2014), le score d’Apgar (A. Goodman et al. 2014), le poids de naissance (Dasha E. Nicholls et Viner 2009; Krug et al. 2013; Tenconi et al. 2014), une taille inférieure à l'âge gestationnel (A. Goodman et al. 2014; Tenconi et al. 2014) et le risque d’AM.

Les résultats sont plus contradictoires en ce qui concerne le céphalhématome (Lindberg et Hjern 2003; Krug et al. 2013; A. Goodman et al. 2014; Tenconi et al. 2014), le cordon ombilical noué ou enroulé étroitement autour du cou (Favaro A, Tenconi E, et Santonastaso P

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2006; Tenconi et al. 2014) et la saison de naissance (Winje, Willoughby, et Lask 2008; Winje et al. 2013).

♦ Facteurs de risque combinés

Une association entre un nombre plus élevé de complications obstétricales et l’AM a été retrouvée dans plusieurs publications avec une relation dose-réponse (Favaro A, Tenconi E, et Santonastaso P 2006; Tenconi et al. 2014) ainsi qu’un nombre plus élevé de complications obstétricales dans le sous type avec crise de boulimie/vomissements ou prise de purgatifs (AM-B) (Tenconi et al. 2014).

4) Infectieux

Il n’existe qu’un petit nombre de cas dans la littérature suggérant le déclenchement de l’AM par les infections. Le concept de troubles neuropsychiatriques pédiatriques auto-immuns associés à une infection à streptocoque (PANDAS : Pediatric Autoimmune Neuropsychiatric Disorders Associated with Streptococcal infections) a été plus largement étudié pour le TOC, les tics et le syndrome de Gilles de la Tourette mais reste hypothétique pour l’AM (Sokol 2000; Puxley et al. 2008).

L’exposition in utéro à des infections virales a également été suggérée comme un facteur de risque pour l’AM mais les réplications font défaut (A. Favaro et al. 2011).

B- Facteurs psychologiques

Le risque attribuable aux facteurs de risque psycho-sociaux est de 7,6% (Lindberg et Hjern 2003).

1) Individuels

Les préoccupations corporelles ont été retrouvées comme facteur de risque dans plusieurs études (Keel et Forney 2013).

Le perfectionnisme a été défini comme un facteur de risque spécifique de l’AM (Pike et al. 2008; Machado et al. 2014). Ces résultats ont été retrouvés quel que soit le sous-type étudié (Halmi, Bellace, et Berthod 2012). Il a été défini comme une caractéristique personnelle pouvant influencer la susceptibilité aux facteurs de risque tels que l'idéalisation de la minceur et les préoccupations corporelles par Keel et coll. (Keel et Forney 2013). Il a également été défini comme un facteur prédictif pour le sous-type restrictif (Hilbert et al. 2014).

Une haute estime de soi à l’âge de 10 ans a été retrouvée comme un facteur protecteur de développer une AM (Dasha E. Nicholls et Viner 2009).

Les difficultés alimentaires précoces ont été également retrouvées dans plusieurs études avec des problèmes d'alimentation fréquents après la naissance (Tenconi et al. 2014), dans les 6 premiers mois de vie (Dasha E. Nicholls et Viner 2009) et dans la petite enfance (Kotler et al. 2001).

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27 L’orientation sexuelle a été étudiée dans l’étude de Feldman et coll. (Feldman et Meyer 2007), dans la ville de New York, sur un échantillon de petite taille issu de la population générale, avec donc une faible prévalence de TCA. Ils n’ont pas retrouvé de différences significatives entre le groupe hétérosexuel (n= 136) et le groupe bisexuel ou homosexuel (n = 388) pour l’AM. Contrairement à la boulimie nerveuse (BN) dont la prévalence vie entière est plus importante chez les hommes homosexuels ou bisexuels comparé aux hétérosexuels.

2) Familiaux

• Résultats significatifs : facteur de risque

Un nombre plus élevé de frères et sœurs a été retrouvé comme un facteur protecteur d'AM. L'association avec les frères et sœurs a été particulièrement forte si les frères et sœurs étaient plus âgés (suggérant un effet protecteur supplémentaire de l'ordre de naissance), alors que l'association avec des demi-frères et sœurs a été observée indépendamment de l'âge (A. Goodman et al. 2014).

En ce qui concerne les antécédents familiaux d’AM, les résultats sont similaires en fonction des études. L’histoire familiale de TCA chez le père et la mère a été retrouvée comme un facteur de risque spécifique de l’AM pour l’enfant (Machado et al. 2014; Hilbert et al. 2014) et a été étudiée uniquement chez la mère dans l’étude de Goodman et coll. (A. Goodman et al. 2014).

La discorde familiale a été retrouvée dans plusieurs études, soit comme un facteur de psychopathologie générale (Machado et al. 2014), soit comme un facteur de risque spécifique (Pike et al. 2008; Hilbert et al. 2014).

Les exigences parentales élevées ont également été retrouvées comme facteur de risque (Pike et al. 2008; Hilbert et al. 2014).

Dans un article récent, Bould et coll. (Bould et al. 2015) ont étudié si les différentes maladies psychiatriques parentales sont des facteurs de risque de TCA chez leurs enfants. Ils ont utilisé les données d’un registre d'une étude de cohorte de 158 679 enfants âgés de 12-24 ans, résidants dans le comté de Stockholm entre 2001 et 2007. Les auteurs n’ont pu analyser que les données concernant les filles, les garçons atteints de TCA étant en nombre très insuffisant. Ils ont ainsi retrouvé que la maladie psychiatrique chez les parents était un facteur de risque. En prenant les maladies séparément, ils ont retrouvé le trouble bipolaire, le TGP et l'anxiété / dépression. Les autres troubles n’ont pas été significatifs.

• Résultats NON significatifs

L’âge du père et de la mère n’ont pas été associés de façon significative à l’AM (A. Goodman et al. 2014).

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• Résultats contradictoires

La qualité du rôle parental, à la fois dans son ensemble et à la fois spécifique au père ou à la mère ont été des facteurs de risque de TCA (Hilbert et al. 2014). Les résultats n’ont pas été retrouvés dans l’étude de Machado de plus petite envergure (Machado et al. 2014). Les mères sont parfois décrites comme peu chaleureuses, rigides, ayant des difficultés à percevoir les besoins propres de leur enfant et les pères comme effacés, permissifs, intervenant peu dans les décisions familiales. Ils sont plutôt chaleureux avec leurs enfants ; certains auteurs parlent même de pères « maternisés » (Chaulet et al. 2015).

3) Attachement et traumatisme

Le style d’attachement insécure anxieux semble être fréquemment retrouvé chez les adultes présentant un TCA (Illing et al. 2010), mais cette partie sera abordée plus en détails dans la partie attachement, lien parental et anorexie mentale (p 57).

La séparation de la mère et des difficultés psychologiques chez la mère pendant les 5 premières années de vie ont été associées avec le développement d’une AM plus tard (Dasha E. Nicholls et Viner 2009).

Les abus physiques et sexuels ont également été retrouvés comme un facteur de risque de TCA et d’AM-B (Hilbert et al. 2014).

Une récente méta-analyse d’environ 3 millions de patients psychiatriques, a retrouvé une association significative entre l’abus sexuel dans l’enfance et le diagnostic de TCA au cours de la vie (Chen et al. 2010).

C- Facteurs socio-culturels

L'exposition à l'idéal de beauté de l'Ouest, qui est associé, de nos jours, à la minceur, a été mise en évidence comme facteur de risque pour le développement de l'AM dans la publication de Smink et coll. (Smink, van Hoeken, et Hoek 2012), corroboré par la publication de Keel et coll. (Keel et Forney 2013).

Dans une autre étude, c’est le niveau d’intériorisation du message sociétal qui a été mis en évidence, c’est-à-dire le degré auquel les jeunes filles adhèrent aux valeurs de minceur. Plus le niveau d’intériorisation du message sociétal valorisant la minceur augmente, plus les jeunes filles sont insatisfaites de leur corps (Simon 2007). Les auteurs prennent d’ailleurs pour exemple, l’impact des médias avec l’étude réalisée aux îles Fidji en 1995 au moment de l’apparition de la télévision. À cette date, on parlait peu de régimes aux îles Fidji et les habitants manifestaient une préférence pour les corps aux formes généreuses. Trois ans après l’arrivée de la télévision, 11 % des jeunes filles disaient avoir vomi pour contrôler leur poids (contre 0% avant 1995) ; 29 % (contre 13 % en 1995) présentaient des risques de développer des troubles alimentaires et 74 % se trouvaient trop grosses (Becker et al. 2002).

De plus récentes et amples recherches ont été réalisées sur l'influence des médias directs et indirects sur le développement des TCA. Les auteurs ont constaté que l'exposition aux réseaux sociaux (medias indirects) a été associée à une augmentation de ces troubles chez les adolescentes dans les îles Fidji (Becker et al. 2011).

De plus, les sites internet pro-TCA deviennent une préoccupation de santé publique. Rodgers et coll. (Rodgers et al. 2016) ont étudié l’influence des sites pro-TCA sur l’image du corps et les troubles alimentaires dans une méta-analyse. Ils ont retrouvé une association significative

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29 de la fréquentation de ces sites avec une mauvaise image corporelle, les régimes et les émotions négatives mais pas sur les symptômes boulimiques.

Les plaisanteries sur l’apparence physique ont été mises en évidence dans la publication de Simon et coll. (Simon 2007). Dans l’étude de Machado et coll. (Machado et al. 2014), elles ont été retrouvées comme un facteur de risque de psychopathologie générale et non comme un facteur de risque spécifique de l’AM.

Sur le plan de la stigmatisation, d’après la revue de la littérature de Puhl et coll. (Puhl et Suh 2015), les résultats sont contradictoires avec un rejet social pour certains et pour d’autres une réponse pro-sociale voire même une admiration. Les parents ont été la source la plus fréquente de critiques au sujet de leur AM.

Sur le plan socio-économique, les niveaux d'enseignement supérieur de la mère et du père ont montré une association significative avec l’AM dans l’étude réalisée en Suisse sur une cohorte de 2 millions d’enfants nés entre 1975 et 1998, contrairement au niveau de revenus (A. Goodman et al. 2014).

Pour conclure, ces facteurs sont regroupés selon des modèles dont le plus consensuel, à l’heure actuelle, est le modèle multidimensionnel « bio-psycho-social » en fonction de leur survenue au cours du développement (figure N° 1). Les TCA, selon ce modèle, se déclareraient chez des sujets prédisposés, à la faveur de facteurs déclenchants et seraient maintenus par des facteurs pérennisants, réalisant ainsi un véritable cercle vicieux (Guelfi et Rouillon 2012).

Facteurs prédisposants Facteurs précipitants Facteurs pérennisants

Figure

Figure N° 1 : Schématisation du modèle « bio-psycho-social ».
Tableau N° 4 : Comparaison des critères diagnostiques des troubles de l’attachement selon les  versions utilisées du DSM
Tableau N° 6 : Antécédents familiaux de la population étudiée.  Groupe AM   &lt; 14 ans (N=6)  Groupe AM   = 14 ans (N=5)  Groupe AM   15-18 ans (N=7)  Témoins  (N=12)  effectif  %  effectif  %  effectif  %  effectif  %  ATCD   familiaux   TCA  absent  5
Tableau N° 8 : Comparaison des scores du PBI entre l’ensemble des groupes AM et le groupe                            témoin
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