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La pratique de l'orthopédagogue au sein d'un dispositif coenseignement en milieu inclusif

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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La pratique de l'orthopédagogue au sein d'un dispositif

coenseignement en milieu inclusif

Mémoire

Claudia Duquette

Maîtrise en psychopédagogie - avec mémoire

Maître ès arts (M.A.)

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La pratique de l’orthopédagogue au sein d’un

dispositif coenseignement en milieu inclusif

Mémoire

Claudia Duquette

Sous la direction de :

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Résumé

L’apport de collaboration, pour créer des milieux scolaires inclusifs où un soutien adapté et de qualité est offert à tous les apprenants, n’est plus à démontrer (Mujis et al., 2010 ; Rousseau & al., 2014). Par conséquent, le travail de l’orthopédagogue tend à évoluer et ce dernier intervient désormais plus étroitement auprès de l’enseignant titulaire et de son groupe-classe (Conseil supérieur de l’éducation, 2017b). Au travers d’une étude exploratoire, la pratique de deux orthopédagogues a été observée alors qu’ils collaboraient avec des enseignants durant des périodes de coenseignement. Grâce à l’observation de leur activité respective ainsi que de leurs propos récoltés en cours d’action, il a été possible de mieux comprendre comment un tel dispositif permet à ce professionnel de répondre aux mandats qui lui sont confiés. De surcroît, cette étude a permis d’observer comment le coenseignement peut être un levier tant pour l’enseignement que pour l’apprentissage, et donc, tant pour l’enseignant que pour l’élève. Les résultats démontrent que ce dispositif collaboratif semble notamment pertinent pour agir en prévention des difficultés d’apprentissage tout comme pour agir de manière ciblée plus rapidement en présence de celles-ci. Il s’agirait également d’un vecteur propice aux partages d’expertises entre les acteurs impliqués. Considérant que les compétences orthopédagogiques portent à la fois sur l’évaluation et l’intervention dynamique auprès de l’apprenant et tout autant sur la collaboration entre les acteurs gravitant autour de celui-ci (Brodeur & al., 2015), il semble pertinent de poursuivre la réflexion quant aux modèles de services permettant à l’orthopédagogue de répondre, avec un souci d’efficacité, à ces deux grands axes d’action.

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Abstract

The benefits of collaboration to create inclusive school environments where quality and adapted support is offered to all learners has been sufficiently proven (Mujis & al., 2010; Rousseau & al. 2014). As a result, the work of the remedial teacher (orthopedagogue) is evolving and the latter now works more closely with the general teacher and his/her class group (Conseil supérieur de l'éducation, 2017b ; Scruggs & Mastropieri, 2017). Through an exploratory study, the practice of two remedial teachers (orthopedagogues) was observed while working with teachers during periods of co-teaching. Through observation of their respective activities and their comments gathered in the moment, it was possible to better understand whether such a system enables these professionals to respond to the mandates entrusted to him or her. Moreover, this study made it possible to observe how co-teaching can be leveraged for both teaching and learning, and therefore benefit both the teacher and the student. The results show that this collaborative arrangement seems to be particularly effective for early intervention of learning difficulties as well as for acting in a targeted manner more quickly in the presence of such difficulties. It would also be a vector conducive to the sharing of expertise among the actors involved. Considering that remedial skills involve both evaluation and dynamic intervention with the learner and just as much collaboration between the actors involved (Brodeur & al., 2015), it seems relevant to continue thinking about intervention models that allow the remedial teacher (orthopedagogue) to respond, with a concern for effectiveness, to these two major lines of action.

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Table des matières

RÉSUMÉ ... II

ABSTRACT ... III

TABLE DES MATIÈRES ... IV

LISTE DES FIGURES... VI

LISTE DES TABLEAUX ... VII

LISTE DES ABRÉVIATIONS, SIGLES, ACRONYMES... VIII

REMERCIEMENTS ... X

INTRODUCTION ... 1

CHAPITRE 1 :ÉLÉMENTS CONTEXTUELS ET HISTORIQUES ... 5

1.1 Le souci pour l’élève en difficulté au Québec ... 5

FIGURE 1–DE L’EXCLUSION À L’INCLUSION ... 6

1.2. Les apprenants inclus dans l’appellation EHDAA ... 8

1.2.1. Les difficultés d’apprentissage et les élèves à risque ... 9

1.3. L’attribution des services destinés aux élèves hdaa et ceux à risque ... 10

CHAPITRE 2 :RECENSION DES ÉCRITS ET CADRE CONCEPTUEL ... 13

2.1. Le mandat de l’orthopédagogue au Québec ... 13

2.1.1. Bref historique de la profession ... 13

2.1.2. Définition de l’orthopédagogie ... 15

2.1.3. Référentiel des compétences en orthopédagogie ... 16

2.1.3.1. AXE 1 : évaluation-intervention spécialisées ... 17

2.1.3.2. AXE 2 : Collaboration et soutien à l’enseignement ... 18

2.1.3.3. AXE 3 : Éthique, culture et développement professionnel ... 19

2.2. Les approches du modèle de réponse à l’intervention (rai) ... 19

FIGURE 2- RAI–APPROCHE DU PROTOCOLE STANDARDISÉ ... 20

FIGURE 3-RAI–APPROCHE PAR RÉSOLUTION DE PROBLÈME ... 21

2.3. Modalités de services d’orthopédagogie ... 22

2.3.1. Les modèles de services à l’extérieur de la classe ... 23

2.3.2. Les modèles de consultation ... 23

FIGURE 4-LES COMPOSANTES DE LA CONSULTATION ... 24

... 24

2.3.3. Les modèles de services mixtes ... 24

2.3.4. Les modèles de services à l’intérieur de la classe... 24

2.3.4.1. La pratique du coenseignement ... 26

(6)

CHAPITRE 3MÉTHODOLOGIE ... 33

3.1. Recrutement des participants ... 33

3.1.1. Participants ... 35

3.1.1.1. Dyade A ... 35

3.1.1.2. Dyade Z... 35

3.2. Outils de collecte ... 36

3.3. Analyse des données ... 39

3.3.1. Organisation des données ... 40

3.3.2. Transcription des données ... 40

3.3.3. Codage des données ... 40

CHAPITRE 4 :RÉSULTATS ... 44

4.1. Présentation des périodes de coenseignement observées ... 44

4.1.1 Théâtre de fluidité par la dyade a ... 44

4.1.2. L’éveil aux mathématiques par la dyade Z ... 47

4.2. Données en lien avec l’axe 1 des compétences professionnelles en orthopédagogie... 50

4.3. Données en lien avec l’axe 2 des compétences professionnelles en orthopédagogie... 56

CHAPITRE 5 :DISCUSSION ... 64

5.1 Limites à l’étude ... 69

5.2. Pistes de recherches futures ... 70

CONCLUSION ... 72

BIBLIOGRAPHIE ... 74

ANNEXES ... 83

ANNEXE A :MODÈLES DE PLANIFICATION COENSEIGNEMENT ... 84

ANNEXE B :ANNONCE DESTINÉE AUX RÉSEAUX SOCIAUX ... 85

ANNEXE C :LETTRE DE PRÉSENTATION À L’INTENTION DES DIRECTIONS SCOLAIRES ... 87

ANNEXE D :AUTORISATION DE LA PART DES DIRECTIONS SCOLAIRES ... 88

ANNEXE E :FORMULAIRE DE CONSENTEMENT À L’INTENTION DES ORTHOPÉDAGOGUES ... 89

ANNEXE F :FORMULAIRE DE CONSENTEMENT À L’INTENTION DES ENSEIGNANTS ... 92

ANNEXE G :CANEVAS D’ENTRETIEN SEMI-DIRIGÉS À L’INTENTION DES ORTHOPÉDAGOGUES ... 95

ANNEXE H :CANEVAS D’ENTRETIEN À L’INTENTION DES ENSEIGNANTS ... 97

ANNEXE I :GRILLE D’OBSERVATION UTILISÉE PAR L’ÉTUDIANTE-CHERCHEURE ... 98

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Liste des figures

FIGURE 1–DE L’EXCLUSION À L’INCLUSION ... 6

FIGURE 2- RAI–APPROCHE DU PROTOCOLE STANDARDISÉ ... 20

FIGURE 3-RAI–APPROCHE PAR RÉSOLUTION DE PROBLÈME ... 21

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Liste des tableaux

TABLEAU 1-EFFECTIF DES EHDAA À LA FORMATION GÉNÉRALE DES JEUNES DANS LE RÉSEAU PUBLIC .. 9

TABLEAU 2-MODÈLES D’ORGANISATION DES SERVICES D’ORTHOPÉDAGOGIE ... 25

TABLEAU 3–ORGANISATION ET RÉPARTITION DES RÔLES SELON LES CONFIGURATIONS DE

COENSEIGNEMENT... 30

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Liste des abréviations, sigles, acronymes

ADOQ : Association des orthopédagogues du Québec

COPEX : Comité provincial de l’enfance inadaptée

CSE : Conseil supérieur de l’éducation

EHDAA : Élèves ayant un handicap et/ou une difficulté d’adaptation et d’apprentissage

LIP : Loi sur l’instruction publique

MELS : Ministère de l’Éducation du Loisir et du Sport (2005-2015)

MEES : Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (2015-aujourd’hui)

MEQ : Ministère de l’Éducation du Québec

UNESCO : Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture

SC : Service de consultation

SDE : Services directs à l’extérieur de la classe

SDI : Services directs à l’intérieur de la classe

SJ : Services jumelés

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It always seems impossible until it’s done.

-Nelson Mandela

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Remerciements

Ce projet de maîtrise, du début à sa fin, a été plus qu’un projet personnel ; ce fut un accomplissement de famille. J’ai souvent dit que ce mémoire n’aurait été possible sans le soutien de mon mari qui m’a encouragé tout au long du processus par son support à tous les niveaux. Grâce à notre travail d’équipe, je termine n’ayant pas de regret quant à la façon dont nous avons réussi à gérer notre temps de sorte que ce ne soit pas nos enfants qui en paient le prix.

Merci également à ma grande famille et mes amis qui se sont intéressés à mon projet du début à la fin, qui ont pris de mes nouvelles, qui ont gardé les enfants pour me permettre des blitz d’études ou qui m’ont donné la tape sur l’épaule nécessaire. Ce sont tous ces petits gestes qui donnent la motivation pour persévérer.

Merci à tous les enseignants et orthopédagogues avec qui j’ai discuté et qui m’ont ouvert leurs classes afin que je puisse observer leur pratique. La diversité de leurs expériences m’a permis de documenter ce mémoire, mais également d’enrichir mon bagage de professionnel. Leurs pratiques m’ont inspirée et elles teinteront certainement ma carrière en éducation.

Enfin, merci à Philippe Tremblay, qui fut le premier professeur que j’ai rencontré alors que j’entamais mon parcours au 2e cycle et qui, finalement, aura été mon directeur de recherche. Alors que j’assistais à son cours portant spécifiquement sur le coenseignement, j’ai été saisie par son engouement sur le sujet et cela m’a fait réfléchir sur mon avenir d’enseignante et/ou d’orthopédagogue. J’ai compris dès lors que peu importe le chemin professionnel que j’allais emprunter, je voulais le faire dans l’esprit collaboratif qu’il nous avait alors témoigné. Je suis reconnaissante pour l’accompagnement reçu qui fût riche en raison de son bagage personnel et professionnel. Enfin, merci pour les différentes occasions où il m’a permis de me dépasser et d’élargir mes horizons.

À tous ceux qui m’ont demandé « Et puis, ça avance ton projet de mémoire? » Je vous réponds : J’ai terminé!

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Introduction

La création de milieux scolaires inclusifs, où chaque enfant est inclus de prime abord (Tremblay, 2012a), est une volonté affirmée par les différentes instances éducatives1 (Gaudreau & al., 2008; MEES, 2017; ONU, 2017). Un tel projet de société demande aux acteurs de l’éducation de mettre en place des modèles pédagogiques souples permettant une gestion des différences au sein de la classe ordinaire ainsi qu’une réponse adaptée aux besoins spécifiques de chacun (Dionne & Rousseau, 2006). Selon les dernières données statistiques sur le sujet, un peu plus de 20% des élèves des écoles publiques du Québec vivraient avec un handicap ou une difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (MEES, 2016). Devant cette réalité, divers chercheurs se sont intéressés aux défis vécus par les enseignants et ont fait ressortir le manque de collaboration ainsi que l’isolement comme étant des facteurs nuisant au sentiment de compétence pour soutenir les élèves (Borman & Dowling, 2008; Gingras & Mukamurera, 2008; Karsenti, 2017). D’autre part, l’aide individualisée offerte aux élèves comme moyen principal d’intervention ne suffirait pas pour répondre à l’ensemble des besoins, faute de temps et de ressources limitées : « La croissance du nombre d’élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage et la nature des défis à relever, conjuguées à la rareté de certaines ressources spécialisées, créent une forte pression sur les services d’aide à l’élève, qui ne suffisent plus à la demande. » (CSE, 2017b, p.15). Ainsi, les intervenants du milieu scolaire doivent continuellement repenser leurs pratiques pour s’adapter au mieux qu’ils le peuvent. Les pratiques collaboratives, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la classe, seraient un élément clé pour l’inclusion scolaire (Friend & Cook 2013 ; MEES, 2017 ; Rousseau & al., 2010 ; UNESCO, 2017 ; Vienneau, 2006). Cette collaboration entre les différents acteurs de l’éducation peut se vivre de diverses manières, soit par la consultation collaborative, la co-intervention, et le coenseignement (Tremblay, 2012a). La revue des écrits semble démontrer, à ce jour, que la co-intervention externe est le modèle privilégié en matière d’intervention orthopédagogique (Filion & Goupil, 1995 ; Gravel & Trépanier, 2010 ; Parent, 2008). Or, la volonté de tendre vers des milieux plus inclusifs laisse désormais place à différentes initiatives de collaboration dans les classes de nos écoles, le coenseignement en faisant partie (CSE, 2017a ; Trépanier & Paré, 2010). Malgré cette transformation qui s’opère, trop peu de

1 Par instances éducatives on fait référence aux milieux de la petite enfance, scolaires et ceux de l’enseignement

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documentation permet de mettre en lumière ces différents efforts de faire intervenir une ressource à même la classe ordinaire dans l’optique de soutenir l’enseignement et l’apprentissage (Gravel & Trépanier, 2010).

Puisque le coenseignement est un dispositif inclusif, collaboratif et qu’il s’axe tant autour de l’enseignant que de l’élève (Tremblay, 2012a), la présente étude s’y est intéressée en réponse aux problématiques présentées. Plus précisément, il sera exploré sous l’angle de la pratique de l’orthopédagogue qui est appelé à travailler de concert avec les enseignants dans le soutien des élèves présentant des difficultés d’apprentissage (Beaupré & al., 2010). Le Ministère précise d’ailleurs que son travail, comme celui des autres professionnels, « doit, le plus possible, se faire en classe » (MEQ, 2003, p.16). Il s’avère également pertinent de se pencher sur les rôles de ce professionnel en raison de la prévalence des difficultés d’apprentissage dans la population scolaire (MEQ, 2003 ; Goupil, 2007).

Quant au coenseignement, il est présenté dans la littérature comme une modalité pédagogique permettant de répondre aux besoins des élèves et des enseignants en plus d’offrir divers avantages (Friend & Cook, 2013). De fait, par la collaboration que suppose un tel dispositif, tant l’enseignant que l’orthopédagogue gagnent en expérience par l’observation et le travail auprès de leur collègue (Austin, 2001; Moldoveanu & al., 2015 ; Rousseau et al., 2014). C’est en coopérant davantage que les acteurs de l’éducation, avec leur formation respective et leur bagage personnel, offriront un enseignement de plus grande qualité à l’élève (Murawski, 2009). De plus, cette collaboration permet de diminuer le sentiment d’isolement professionnel (Trépanier, 2005). Du côté des élèves en difficulté, le fait que l’orthopédagogue intervienne à même la classe comporte plusieurs avantages tels que la diminution de la stigmatisation, le maintien de l’appartenance au groupe ainsi qu’un meilleur transfert des connaissances acquises avec le professionnel aidant (Trépanier, 2005). Également, diverses études rapportent des effets positifs tant sur le rendement scolaire des élèves en difficulté (Fontana, 2005; Hang & Rabren 2009 ; Rea & al., 2002 ; Tremblay, 2012b) que sur ceux sans difficulté particulière (Prud’homme & al., 2016 ; Welch, 2000). Or, bien qu’il soit avantageux à plusieurs égards, le coenseignement avec l’orthopédagogue, dans les classes du Québec, semble encore peu exploré ou du moins documenté. Cela peut d’une part s’expliquer par les défis inhérents à la mise en place du coenseignement, notamment le caractère volontaire de la collaboration, et ce, avec un souci

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d’égalité dans la relation. (Friend & Cook, 2013). Il n’est pas surprenant que plusieurs auteurs abordent cette pratique en parlant d’un mariage professionnel (Friend & Cook, 2013 ; Murawski, 2009 ; Tremblay, 2013).

La littérature scientifique nous présente différentes études portant sur le coenseignement entre deux enseignants réguliers et plusieurs autres avec des enseignants spécialisés (Scruggs & al., 2007). Or, bien que ces études nous éclairent par rapport à la pratique du coenseignement entre deux professionnels, elles ne mettent pas précisément en lumière la spécialisation de l’orthopédagogue telle qu’elle se définit au Québec (Brodeur & al., 2015 ; CPNCF, 2015 ; OPQ, 2014). D’autre part, selon une méta-synthèse des recherches qualitatives menées sur le coenseignement en classe inclusive, lorsque le partenaire de l’enseignant régulier est un enseignant spécialisé (pouvant s’apparenter à un orthopédagogue), l’idée d’une réelle collaboration est rarement atteinte. En effet, il semblerait que ce spécialiste joue la plupart du temps un rôle de support plutôt que d’enseignement (Scruggs & al., 2007), ce qui supposerait qu’il laisse derrière son mandat d’évaluation-intervention dynamique auprès des élèves en difficultés d’apprentissage (Brodeur & al., 2015). Pourtant, le besoin de collaboration entre ces acteurs aux expertises uniques semble plus que primordial pour arriver à s’adapter à la diversité des élèves dans les classes (CSE, 2017a ; MEES, 2017).

À la lumière de ces précisions, il semble pertinent d’enrichir les écrits entourant la pratique collaborative de coenseignement avec l’orthopédagogue en classe ordinaire. L’objectif de cette recherche empirique est donc d’explorer, et ainsi mieux comprendre, comment un dispositif

de coenseignement permet à l’orthopédagogue d’exercer son rôle d’évaluation et d’intervention auprès de l’élève ainsi que de soutien et collaboration à l’enseignement. Devant le défi que semble poser une telle relation de collaboration, notamment au regard de la parité entre les partenaires, il sera notamment intéressant le rôle secondaire délaissant ainsi ses compétences spécifiques.

Afin d’atteindre cet objectif, cette étude se penchera sur divers enjeux contextuels gravitant autour de ce professionnel de l’éducation. Le premier chapitre survolera l’organisation du soutien offerts aux élèves en difficulté au Québec. Dans le chapitre suivant, la recension des écrits ayant permis l’élaboration du cadre conceptuel en lien avec la profession de l’orthopédagogue et le

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concept de coenseignement sera présentée. Le troisième chapitre exposera la démarche méthodologique mise de l’avant par l’étudiante-chercheur. Enfin, les résultats ayant découlés de cette étude seront présentés, discutés et nuancés au regard de la littérature

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Chapitre 1 : Éléments contextuels et historiques

1.1LE SOUCI POUR L’ÉLÈVE EN DIFFICULTÉ AU QUÉBEC

Les façons de percevoir et d’intervenir auprès des élèves ayant besoin d’un soutien adapté afin de progresser adéquatement dans nos établissements scolaires ont évolué parallèlement au système éducatif québécois. De fait, jusqu’à la fin des années 1970, ces élèves dits « exceptionnels » ou « inadaptés » étaient davantage perçus comme des cas médicaux, classés selon leurs limites et leurs retards (CSE, 2001). C’est notamment pour répondre à leurs besoins que fut mis en place un réseau de classes et d’écoles spéciales au fil des ans (Goupil, 2007). En 1976, le rapport COPEX revendiqua la possibilité pour tous d’évoluer dans des cadres scolaires les plus normaux possible (MEQ, 1976). Le rapport dénonça entre autres le « modèle médical » et mit de l’avant la nécessité de considérer les besoins de l’enfant de manière plus globale, selon une sphère plus complexe que l’apprenant lui-même (cellule familiale, milieu socio-économique, contexte scolaire) (CSE, 2001). Ainsi, ce rapport mena à la première politique en adaptation scolaire, mise en place en 1978 (MEQ,1978). Cette politique ouvra la porte à l’intégration de tous les élèves en classe ordinaire notamment par le « système en cascade » qui constitue un continuum de mesures d’intégration allant d’un enseignement en centre spécialisé vers un soutien en classe régulière avec le souci de limiter le recours aux mesures spéciales (MEQ, 1978). Cet élan vers l’insertion sociale de tous fut réitéré en 1992 lors de la mise à jour de ladite politique (CSE, 1996).

À l’aube des années 2000, un renouveau éducatif prend place avec la Réforme de l’Éducation qui vise à mener le plus grand nombre d’élèves possible à la réussite (MEQ, 1997). Ce projet ambitieux posa de nouveaux enjeux entourant les défis des élèves en difficulté dans un tel contexte et c’est pourquoi le Ministère de l’Éducation publia une nouvelle politique en adaptation scolaire intitulée Une école adaptée à tous ses élèves (MEQ, 1999). Le but de cette politique, toujours en vigueur aujourd’hui, est de proposer des pistes d’actions concrètes en lien avec l’accompagnement des élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (EHDAA) « vers la réussite ». En voici l’orientation fondamentale :

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Aider l’élève handicapé ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage à réussir sur les plans de l’instruction, de la socialisation et de la qualification. À cette fin, accepter que cette réussite éducative puisse se traduire différemment selon les capacités et les besoins des élèves, se donner les moyens qui favorisent cette réussite et en assurer la reconnaissance (MEQ, 1999, p.17).

Désormais, on parlera davantage d’une approche individualisée, non catégorielle, où « la mise en place de mesures préventives ou de services éducatifs adaptés ne devrait pas être établie sur la base de l’appartenance à une catégorie de difficulté ni à partir des modalités de financement utilisées par le Ministère, mais bien selon cette évaluation des besoins et des capacités de chaque élève. » (MELS, 2007, page 3)

Malgré ce retour historique condensé, il est possible d’observer des changements de mentalités faisant évoluer les approches alors ségrégatives vers des pratiques davantage intégratives, pour enfin, tendre vers l’inclusion de tous (CSE, 2017b; Tremblay, 2012a). Alors que les approches ségrégatives impliquaient d’isoler les élèves nécessitant du soutien spécialisé (Figure 1), les élans d’intégration ont laissé voir la différence comme « un défaut de fonctionnement » chez l’élève pour qui des adaptations sont nécessaires pour évoluer dans un contexte « normal » ou « socialement accepté ». Or, au travers de l’inclusion, la différence devient la nouvelle « norme » (AuCoin & Vienneau, 2010). Ce qui distingue l’inclusion scolaire des autres approches, c’est l’idée d’un environnement où tous les apprenants sont inclus dès le départ, et ce, peu importe leurs besoins (Tremblay, 2012a). Les élèves en difficulté ne sont donc plus des étrangers au système régulier ; ils en font partie (Figure 1). C’est à l’école d’adapter son milieu et les contenus enseignés.

Figure 1 – De l’exclusion à l’inclusion

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Cela dit, le langage utilisé dans les documents actuels du Ministère de l’Éducation laisse plutôt transparaitre l’idée d’intégration scolaire et ne colle pas à l’idée d’une pratique inclusive authentique (Rousseau & al., 2010). Par ailleurs, la présence des classes spéciales dans nos écoles québécoises ainsi que les statistiques entourant l’intégration des élèves en difficulté dans les classes ordinaires démontrent également que cet idéal n’est pas atteint (Statistiques du MELS, dans Goupil, 2007). De plus, malgré son occurrence dans les documents universels tels que ceux de l’Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture (UNESCO, 2017), le concept d’inclusion scolaire se traduit, dans les milieux, par des pratiques de degrés différents (Ramel & Viennau, 2016). Les auteurs l’abordent également différemment dans la littérature, tantôt comme un moyen et parfois comme une finalité, à d’autres instants comme un continuum (Beauregard & Trépanier, 2010). Certains verront le concept d’intégration péjorativement lorsque comparé à l’inclusion, puisque les apprenants sont d’abord « étiquetés » comme ayant des besoins spéciaux avant d’être intégrés dans les contextes « ordinaires » (UNESCO, 2017). Enfin, malgré la polysémie de ces termes (intégration et inclusion), il importe plutôt de s’intéresser à la portée et au sens attribués à chacun (Trépanier, 2019). Ces appellations peuvent donc être considérées synonymes si elles représentent « un moyen ou un ensemble de moyens pour soutenir la réussite éducative de tous les élèves et, en particulier celle des élèves que l’on dit en situation de handicap. » (Ibid., p.24). C’est dans cette optique que les concepts seront employés dans la présente étude.

Le concept d’inclusion étant mieux défini, il semble pertinent de se pencher sur les différents facteurs pouvant nuire ou, inversement, favoriser la mise en place des pratiques inclusives et équitables. Dans son Guide pour assurer l’inclusion et l’équité dans l’éducation, l’UNESCO identifie « les compétences et les attitudes des enseignants, l’infrastructure, les stratégies pédagogiques, et le programme d’étude ». (UNESCO, 2017, p.13). L’organisation mentionne également que les « difficultés des apprenants découlent parfois du système éducatif lui-même, y compris la manière dont il est organisé, les formes d’enseignement proposées, l’environnement d’apprentissage et la façon dont les progrès des apprenants sont appuyés. » (Ibidem) De fait, l’idée d’incarner une inclusion scolaire authentique va bien au-delà de placer physiquement des élèves à besoins particuliers au sein de la classe ordinaire : plusieurs éléments clés permettent de tendre vers une inclusion authentique (Tremblay, 2012a). Tremblay (2012a) a recensé au travers de la littérature diverses de ces conditions, ou plutôt objectifs, à rechercher pour y arriver. Il

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parle entre autres d’une vision qui se doit d’être partagée par l’ensemble des acteurs de l’éducation à laquelle ces derniers s’engagent collectivement. En plus de favoriser les groupements hétérogènes d’élèves, il importe d’offrir un enseignement différencié et de qualité à l’ensemble du groupe, et ce, tout en offrant un soutien plus individualisé et intensif à ceux pour qui il le serait nécessaire. Cela est notamment possible grâce à une collaboration étroite entre les professionnels gravitant autour des apprenants, aspect pour lequel les administrateurs jouent un rôle crucial par leur gestion des ressources disponibles.

1.2.LES APPRENANTS INCLUS DANS L’APPELLATION EHDAA

Dans son avis sur la concrétisation des visées d’un système inclusif pour tous, le Conseil Supérieur de l’Éducation met en lumière la complexité derrière la diversité des élèves dans nos écoles (CSE, 2017b). Cette hétérogénéité est le résultat de plusieurs réalités, soit la pluralité des types de familles, les profils socio-économiques variés, les différentes origines ethniques, et enfin les habiletés et aptitudes uniques des apprenants (Ibid.). Enfin, peu importe les croisements possibles au travers de cette diversité, certains élèves auront besoin d’un enseignement adapté en raison d’un handicap, d’une difficulté d’adaptation ou d’apprentissage. Ces élèves se retrouvent sous l’appellation EHDAA et sont recensés, au regard des statistiques, lorsqu’un plan d’intervention2 leur a été émis par un établissement d’enseignement du Québec (MEES, 2016). Parmi ces élèves se trouvent entre autres ceux ayant un trouble grave du comportement, un handicap reconnu par la loi, ainsi que ceux présentant des difficultés d’apprentissage. Au cours de la dernière décennie, on assiste à une hausse importante des élèves déclarés EHDAA en comparaison à la population totale des établissements publics, passant de 13,6% en 2002-2003 à 21,6% en 2015-2016 (CSE, 2017b) (Tableau 1). Parmi la population EHDAA, les élèves ayant des difficultés d’apprentissage et/ou un trouble d’apprentissage sont ceux les plus représentés (Brodeur & al., 2015).

2 Le plan d’intervention est un outil pour planifier les interventions et les services qui seront nécessaires à l’élève et

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Tableau 1 - Effectif des EHDAA à la formation générale des jeunes dans le réseau public

1.2.1.LES DIFFICULTÉS D’APPRENTISSAGE ET LES ÉLÈVES À RISQUE

Les élèves du primaire étant considérés en difficulté d’apprentissage sont plus précisément ceux dont l’analyse de sa situation démontre que les mesures de remédiation mises en

place, par l’enseignante ou l’enseignant ou par les autres intervenantes ou intervenants durant une période significative, n’ont pas permis à l’élève de progresser suffisamment dans ses apprentissages pour lui permettre d’atteindre les exigences minimales de réussite du cycle en langue d’enseignement ou en mathématique conformément au Programme de formation de l’école québécoise (MELS, 2007, p.24).

Ainsi, les difficultés d’apprentissage sont évaluées au regard des compétences définies dans cedit programme et toucheront donc plus particulièrement les « compétences à lire, à communiquer oralement ou par écrit, et à utiliser la mathématique. » (MELS, 2007, p.2). Alors que le Ministère préconise de s’attarder aux manifestations des difficultés au regard des attentes du programme, la littérature regorge d’appellations et de diagnostics pour aborder la difficulté d’apprentissage (dyslexie, dysorthographie, troubles d’apprentissage, mauvais lecteur, etc.) (Goupil, 2007). Pour les biens de cette étude, l’appellation utilisée par le MEES, soit « difficulté d’apprentissage », sera préconisée puisque l’intérêt devrait se porter non pas sur les incapacités de l’élève, mais plutôt

sur les efforts à mettre de sorte qu’il puisse progresser dans ses apprentissages (Goupil, 2007).

Trépanier va dans le même sens en spécifiant que l’offre de services individualisés ne doit pas dépendre uniquement des diagnostiques déjà posés ou qui seront posés sur les élèves, mais bien sur une analyse des besoins pédagogiques et éducatifs de ces derniers (Trépanier & Paré, 2010).

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À l’heure actuelle, il est difficile de circonscrire précisément la population d’élèves en difficulté d’apprentissage au travers de l’ensemble des EHDAA de nos écoles, puisqu’aucun code3 ne leur est attribué. Ainsi, ils sont représentés dans la catégorie « autre difficulté, plan d’intervention sans code » au terme des dernières statistiques de l’Éducation (MEES, 2016). On retrouve également, sous l’appellation « élèves à risque », une majorité d’élèves en difficulté d’apprentissage (MEQ, 2003 ; Goupil, 2007). Par « élèves à risque », le Ministère de l’Éducation fait référence à des « élèves du préscolaire, du primaire et du secondaire qui présentent des facteurs de vulnérabilité susceptible d’influer sur leur apprentissage ou leur comportement et peuvent ainsi être à risque, notamment au regard de l’échec scolaire ou de leur socialisation, si une intervention n’est pas effectuée. » (MELS 2007) Encore ici, un flou quant au nombre s’impose : les élèves à risque ne sont pas inclus dans les statistiques de l’Éducation. Ils s’y retrouveront, tel que mentionné précédemment, seulement s’ils ont un plan d’intervention actif à leur égard. À ce propos, il importe de mentionner que le recours au plan d’intervention varie d’un établissement à un autre : certains le mettront en place dès les premiers signes de vulnérabilité et d’autres seulement en vue d’obtenir les adaptations nécessaires pour les épreuves ministérielles (CSE, 2017b). D’autre part, l’attribution d’un code à un élève, par exemple un trouble grave du comportement, n’exclut pas le fait que cet élève puisse rencontrer des difficultés d’apprentissage. Or, ce dernier ne sera comptabilisé que selon sa première appellation codifiée (MEQ, 2003).

Enfin, malgré les différents enjeux qui rendent difficile le dénombrement des élèves éprouvant des difficultés d’apprentissage, il s’agit toutefois de la réalité la plus observée au regard de la population EHDAA (MEQ, 2003 ; Goupil, 2007).

1.3.L’ATTRIBUTION DES SERVICES DESTINÉS AUX ÉLÈVES HDAA ET CEUX À RISQUE

L’adoption de la Politique de l’adaptation scolaire au Québec au cours de l’année 1999, avec ses fondements visant l’intégration scolaire des EHDAA (MEQ, 1999), a certainement amené les dirigeants de l’éducation à réorganiser le financement et l’attribution des services destinés à ces élèves. À cet effet, la Loi sur l’instruction publique (Gouvernement du Québec, 1988) mentionne que les commissions scolaires sont dans l’obligation d’élaborer un énoncé politique en matière

3 Un code est attribué à la suite d’une évaluation diagnostique réalisée par un personnel qualifié servant à préciser

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de soutien à l’élève en difficulté (LIP, art.235). Au cours d’une vaste enquête visant l’évaluation de la Politique de l’adaptation scolaire (Gaudreau et al., 2008), divers de ces énoncés ont été analysés, ce qui a permis de voir que ceux-ci se conformaient aux grandes orientations émises par le Ministère. De fait, les diverses commissions scolaires ayant participé à l’enquête avaient comme préoccupations premières la prévention, l’intégration des élèves EHDAA dans la classe régulière, ainsi que l’individualisation des services. Toutefois, malgré des intentions communes, l’organisation et l’attribution des services offerts à ces élèves varient d’une commission scolaire à une autre et bien souvent d’une école à une autre (Gaudreau, 2010).

Chaque année, le Ministère alloue des montants aux commissions scolaires afin qu’elles organisent au mieux les services par la suite. Ces sommes sont attribuées entre autres en fonction de l’identification des élèves (codes). Cela semble être, pour les commissions scolaires, la première étape dans le processus, car chaque élève identifié par un code reçoit des services prioritairement (Gaudreau, 2010). Par la suite, les services sont généralement dirigés vers les élèves à risque et ceux plus jeunes, et ce, dans l’optique de prévenir l’apparition ou l’aggravation des difficultés. Finalement, divers critères tels que le milieu socioéconomique ou la taille de l’école viennent influencer le nombre de ressources qui peuvent être attribuées de la part de la commission scolaire aux écoles, leur laissant la responsabilité de les organiser au mieux pour soutenir les élèves en besoin (Ibid.). À cet effet, le Ministère de l’Éducation préconise une approche individualisée, non catégorielle, et rappelle aux équipes-écoles que « la mise en place de mesures préventives ou de services éducatifs adaptés ne devrait pas être établie sur la base de l’appartenance à une catégorie de difficulté ni à partir des modalités de financement utilisées par le Ministère, mais bien selon cette évaluation des besoins et des capacités de chaque élève. » (MELS 2007, p.3) Or, malgré un discours autour d’une approche non catégorielle, on semble encore tendre vers une approche de médicalisation de la difficulté en accordant une importance aux codes pour recevoir un financement (CSE, 2017b).

Enfin, il est possible d’observer que plusieurs facteurs entrent en jeu pour déterminer le budget reçu et ipso facto l’aménagement des services destinés à répondre aux besoins des élèves. Il est donc primordial que l’adaptation à la diversité des élèves soit une responsabilité partagée par l’ensemble des acteurs de l’éducation (CSE, 2017b ; UNESCO, 2017) si l’on veut servir au mieux l’élève.

(23)

À l’échelle de l’école, lorsque l’évaluation des besoins de l’élève en classe ordinaire demande l’apport de services plus spécifiques, l’enseignant sera appelé à collaborer avec les professionnels des services complémentaires (MEQ, 2002). Ces services sont offerts notamment par l’orthopédagogue, le psychologue, le technicien en éducation spécialisé, l’orthophoniste, etc. (Allenbach & al., 2016). En présence de difficultés d’apprentissage, c’est le travail de l’orthopédagogue qui entre en jeu.

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Chapitre 2 : Recension des écrits et cadre conceptuel

Les éléments qui seront présentés et définis dans ce chapitre serviront à mieux comprendre les enjeux gravitant autour de l’objet d’étude en plus de servir de cadre conceptuel pour l’analyse des données.

2.1. LE MANDAT DE L’ORTHOPÉDAGOGUE AU QUÉBEC

2.1.1. BREF HISTORIQUE DE LA PROFESSION

Bien que le champ de l’orthopédagogie ait vu le jour dans le courant des années 1960 (Laplante, 2012), il demeure, encore aujourd’hui, certains éléments indéfinis tant sur les plans de la formation que sur les rôles qu’occupe l’orthopédagogue. De fait, à divers tournants dans l’histoire de la profession, on évoque un besoin de mieux définir le mandat et d’encadrer davantage la formation de ce professionnel de l’éducation (Prud’homme, 2018). Dans l’optique de former des maîtres spécialisés dans « l’enfance inadaptée », le premier « baccalauréat en orthopédagogie » a vu le jour en 1967 à Montréal et en 1968 à Sherbrooke sous le nom de « psychopédagogie de l’enfance inadaptée » (Ibid.). Avec ces premiers programmes, on cherchait à former des cliniciens dans l’optique d’une correction cognitive, ce qui allait se distinguer des programmes traditionnels, alors destinés aux enseignants de classes spéciales (Ibid). Or, ces approches furent rapidement identifiées comme étant incompatibles avec les orientations d’intégration sociale soulevées par le rapport COPEX (1976) (Ibid). On proposera alors de se rapprocher de la réalité de la classe afin de mieux comprendre les enjeux gravitant autour de l’apprenant en difficulté de sorte qu’un travail au niveau des pratiques pédagogiques puisse se faire (Laplante, 2012). Ainsi, à la demande du Ministère, les universités québécoises mirent fin aux baccalauréats en orthopédagogie (de 1982 à 1987) et firent une refonte de ces programmes avec ceux destinés à l’enseignement spécialisé. Cela permit aux baccalauréats en « adaptation scolaire » de voir le jour en 1985 (Prud’homme, 2018). C’est entre autres ce qui a mené plusieurs enseignants en adaptation scolaire à obtenir des postes en orthopédagogie alors que l’accroissement des services était nécessaire pour répondre aux besoins (Laplante, 2012). Par ailleurs, un vaste sondage mené auprès d’orthopédagogues en poste a révélé que ceux-ci

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expriment un besoin en lien avec une formation plus spécifique sur les difficultés d’apprentissage en lecture, en écriture et en mathématiques (Laplante & al., 2006). Quelques universités québécoises ont élaboré des programmes de 2e cycle dans ce sens. Ces programmes ont notamment été enrichis et de nouveaux parcours ont vu le jour, en réponse à la demande du MELS, en 2008 (MELS, 2008, p.4). Ces initiatives auront également permis de mettre à jour les programmes en fonction des dernières connaissances issues de la recherche en matière d’apprentissage et de soutien à la difficulté scolaire.

En 2014, un comité interuniversitaire s’est concerté afin de mieux définir le rôle des orthopédagogues au Québec en vue d’orienter leur formation professionnelle (Bordeur & al., 2015). Le fruit de leur travail aura été l’élaboration d’un référentiel des compétences qui devraient être attendues au terme de la formation de ces professionnels de l’éducation. Malgré les diverses tentatives et demandes faites pour mieux encadrer la pratique, de nombreux débats demeurent autour de la profession, notamment celui de la création d’un ordre professionnel (OPQ, 2014 ; ADOQ, 2016 ; MEES, 2017). À l’heure actuelle, avec la même formation, certains d’entre eux peuvent occuper un poste d’orthopédagogue professionnel4 et d’autres un poste d’orthopédagogue enseignant5 (OPQ, 2014). Le comité d’expert s’étant penché sur la situation des orthopédagogues en 2014 soulève les enjeux de cette réalité, notamment en raison du fait que ces deux titres relèvent de conventions collectives différentes (personnel enseignant vs personnel professionnel). Par ailleurs, le poste d’enseignant orthopédagogue n’est pas défini officiellement comme l’est celui détenant l’appellation « professionnel » (CPNCF, 2015). Ces ambiguïtés peuvent donc être source des tensions en ce qui concerne les rôles respectifs de chacun.

Ces derniers peuvent travailler dans différents secteurs, mais majoritairement dans les milieux scolaires allant du préscolaire au secondaire. L’Office des Professions du Québec a estimé, en 2014, que le nombre total d’orthopédagogues enregistrés dans les commissions scolaires se situent entre 6000 et 7000 et que seulement 400 d’entre eux sont des orthopédagogues professionnels. Les orthopédagogues qui dispensent des services en pratique privée le font à

4 Qui détient un diplôme de 1er cycle dans l’une des spécialisations suivantes : orthopédagogie ou adaptation scolaire (fin

de ces programmes depuis 2003). (OPQ, 2014)

5 Qui détient un diplôme de 1er cycle en adaptation scolaire et un permis d’enseignement ou un baccalauréat en

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domicile, en clinique ainsi que dans les établissements privés. À l’heure, tous les orthopédagogues peuvent rejoindre, sur une base volontaire, l’Association des orthopédagogues du Québec (ADOQ), fondée en 1988 (site de l’ADOQ). L’association compte près de 600 membres, pour la plupart œuvrant dans les milieux privés.

Enfin, ce retour historique dans la profession et les précisions apporté par le Rapport sur la situation des orthopédagogues au Québec démontre que «la formation, les compétences, les tâches et les conditions d’exercice des orthopédagogues sont variables » (OPQ, 2014, p.104). Malgré ces disparités, il est toutefois possible de circonscrire des éléments essentiels et communs à leur pratique.

2.1.2. DÉFINITION DE L’ORTHOPÉDAGOGIE

Voici comment le comité patronal de négociation pour les commissions scolaires francophones (CPNCF) décrit la profession dans son plan de classification du personnel professionnel :

L’emploi d’orthopédagogue comporte plus spécifiquement d’une part, le

dépistage, l’évaluation et l’accompagnement des élèves qui présentent ou qui sont susceptibles de présenter des difficultés d’apprentissage ainsi que l’identification de leurs besoins et de leurs capacités, d’autre part, la conception

et la réalisation de programmes de rééducation visant à corriger des difficultés d’apprentissage sur le plan des habilités cognitives ou des compétences; ainsi qu’un

rôle-conseil et de soutien auprès des enseignantes et enseignants et des autres

intervenantes et intervenants scolaires et des parents. (CPNCF, 2015, p.29)

Quant au comité interuniversitaire sur les orientations et les compétences pour une maîtrise professionnelle en orthopédagogie, ils définissent, dans leur référentiel, l’orthopédagogie de la sorte :

L’orthopédagogie est la profession qui a trait à l’évaluation-intervention auprès d’apprenants qui manifestent des difficultés ponctuelles ou persistantes sur le plan des apprentissages, tout au long du cheminement scolaire, de l’enfance à l’âge adulte. Ces difficultés d’apprentissage concernent en particulier la lecture, l’écriture et les mathématiques, de même que les stratégies d’autorégulation (Brodeur & al., 2015, p,3).

Dans les écrits anglais, les pratiques se rapprochant de l’orthopédagogie se retrouvent sous l’appellation plus générale « special education » qui, au Québec, englobe une multitude de services

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relevant de l’adaptation scolaire (Trépanier, 2019), notamment ceux en lien avec le comportement. Or, ici, l’orthopédagogue se spécialise dans la différenciation pédagogique en vue d’aider l’apprenant à surmonter ses difficultés d’apprentissage (Beaupré & al., 2010).

2.1.3. RÉFÉRENTIEL DES COMPÉTENCES EN ORTHOPÉDAGOGIE

Afin de décrire plus spécifiquement les rôles et les actions concrètes que devrait être en mesure de poser l’orthopédagogue au terme de sa formation professionnelle, la concertation interuniversitaire spécifie trois axes de développement des compétences en orthopédagogie. Le premier axe regroupe les compétences en lien avec l’évaluation et l’intervention spécialisées, le deuxième regroupe celles en lien avec la collaboration et le soutien à l’apprentissage et le troisième fait référence à l’éthique et au développement professionnel (Brodeur & al., 2015). À chacune de ces compétences sont reliées un ensemble d’actions clés que pose le professionnel dans le cadre de sa profession.

Puisque le concept de compétence est abordé sous différents angles théoriques au sein de littérature (Lenoir & al., 1999 ; MEQ, 2001), il convient de présenter la définition qui sera préconisée dans le cadre de cette étude soit celle de « compétences de fonction ». Il s’agit d’une vision de la compétence partagée par Rey (1996) et Burchell (1995) où l’accent est mis sur la tâche à atteindre, sur des buts qui sont fixés à priori. Pour le besoin de l’étude, l’emploi du concept de compétences faisant référence à des « capacités démontrées », des degrés de « performance » ou de « rentabilité » seront mis de côté (Lenoir & al., 1999). Ainsi, laissant derrière l’idée de mesurer ou non le rendement de l’orthopédagogue par rapport à des aptitudes et des comportements précis, l’objectif sera de s’intéresser aux tâches qui lui sont confiées afin de voir comment le coenseignement est une modalité qui lui permet d’exercer son mandat. Il ne sera donc pas question de porter un jugement ni d’amener l’orthopédagogue à qualifier son sentiment de compétence ou ses performances au travail.

Dans le référentiel des compétences professionnelles en enseignement du Ministère, on aborde l’idée de bien définir la profession par souci de cohérence en vue de former les professionnels en devenir : « Énoncer des compétences pour orienter la formation à l’enseignement nécessite ainsi d’incliner la réflexion vers la recherche d’une définition de la professionnelle ou du

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professionnel à former. » (MELS, 2001, p. 49). Ainsi, ce référentiel des compétences présente ce « que l'on peut raisonnablement attendre d'une personne débutante dans la profession » (MELS, 2001, p.52). Ces précisions étant apportées, voici l’aperçu des compétences orthopédagogiques6.

2.1.3.1.AXE1 : ÉVALUATION-INTERVENTION SPÉCIALISÉES

Compétence 1 : Évaluer, dans une perspective systémique, les difficultés entravant les

apprentissages scolaires, plus spécifiquement la lecture, l’écriture, les mathématiques, de même que les stratégies d’autorégulation.

Compétence 2 : Intervenir de façon spécifique sur les dimensions pédagogiques et

didactiques liées principalement aux connaissances, aux construits et aux processus utilisés en lecture, en écriture, en mathématiques, de même qu’au regard des stratégies d’autorégulation.

Le référentiel met l’accent sur le caractère dynamique des évaluations et des interventions de l’orthopédagogue, car ces deux actes professionnels s’ajustent continuellement en fonction des besoins de l’apprenant et de la progression de ses apprentissages. Des observations in situ sont

à privilégier afin d’être témoin des processus mis en œuvre par l’apprenant. Dans un premier temps, à la suite d’une de ses observations ou d’une demande d’évaluation de la part d’un collègue, l’orthopédagogue doit dresser le portrait de l’apprenant dans une perspective systémique. Pour ce faire, il pourra observer l’élève au travail, analyser ses productions scolaires, discuter avec l’enseignante et, au besoin, utiliser des outils d’évaluation plus spécifique pour déterminer le niveau de difficulté de l’élève sur les plans de la lecture, de l’écriture, des mathématiques et de ses stratégies d’autorégulation. Au travers d’un rapport, l’orthopédagogue y posera ses observations/conclusions en fournissant des recommandations quant aux adaptations à mettre en place pour soutenir l’apprenant vers une progression qui lui sera optimale compte tenu de ses besoins spécifiques.

6 Les informations présentées dans cette section résument les orientations tirées du référentiel sur les

(29)

Par la suite, en cohérence avec le plan d’intervention de l’élève, l’orthopédagogue met en œuvre un plan d’action afin d’intervenir de manière adaptée, tant sur les aspects pédagogiques, sur les contenus, sur les construits de l’élève et sur ses stratégies d’autorégulation. L’orthopédagogue amène l’élève à réfléchir sur ses propres stratégies et le guide vers un réajustement de celles-ci au besoin. Les progrès sont consignés et l’orthopédagogue s’assure d’une continuité avec le travail fait en classe.

Le caractère dynamique transparait tout au long de ces actions grâce auxquelles l’orthopédagogue ajuste sa pratique au même rythme que progresse l’élève.

2.1.3.2.AXE2 :COLLABORATION ET SOUTIEN À L’ENSEIGNEMENT

Compétence 1 : Soutenir et contribuer à la prévention des difficultés d’apprentissage.

Compétence 2 : Soutenir et contribuer à la mise en œuvre des interventions et des

mesures d’aide susceptibles de favoriser la progression optimale des apprentissages de

l’apprenant.

En travaillant de près avec les enseignants et les différents intervenants, l’orthopédagogue participe à l’identification des élèves à risque et contribue, par son expertise, à l’élaboration et la mise en œuvre de pratiques différenciées qui permettront de répondre aux besoins spécifiques de ces élèves (ADOQ, 2018). Pour ce faire, il s’impliquera dans l’élaboration du

plan d’intervention en y apportant des précisions quant à ses évaluations ainsi qu’en formulant

des recommandations en vue d’un plan d’action à mettre en œuvre. Il pourra également

proposer des services susceptibles d’aider l’élève, que ce soit à l’interne ou à l’externe. Enfin,

l’orthopédagogue joue un rôle de conseiller en matière de différenciation pédagogique au sein de l’établissement (ADOQ, 2018).

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2.1.3.3.AXE3 :ÉTHIQUE, CULTURE ET DÉVELOPPEMENT PROFESSIONNEL

Compétence 1 : Agir de façon éthique et responsable dans l’exercice de ses fonctions.

Compétence 2 : S’inscrire dans une démarche de culture et de développement

professionnel.

L’orthopédagogue s’engage à faire preuve de professionnalisme en agissant de manière éthique et responsable alors qu’il exerce ses fonctions. Cela implique entre autres d’assurer la

confidentialité. Il cherche également à assumer ses responsabilités dans la limite de ses

compétences et est capable de justifier ses actes. L’orthopédagogue s’inscrit également dans une démarche de développement professionnel en mettant à jour ses connaissances en concomitance avec les avancées scientifiques de son domaine et donc et ajuste donc ses

pratiques en fonction de celles-ci.

La présente étude ne s’est pas spécifiquement intéressée à l’axe d’éthique, de culture et de développement professionnel puisque cet aspect est difficilement observable. Afin de répondre à l’objectif de recherche, seules les deux premières compétences nécessitaient d’être étudiées.

2.2.LES APPROCHES DU MODÈLE DE RÉPONSE À L’INTERVENTION (RAI)

Viennent d’être présentés les rôles importants de l’orthopédagogue en lien avec l’évaluation et l’intervention auprès de l’élève en difficulté d’apprentissage, et ce, en collaboration avec l’enseignant titulaire. Mais comment ces deux acteurs en viennent-ils à reconnaitre qu’un élève éprouve des difficultés d’apprentissage? À l’heure actuelle, au Québec et ailleurs, le modèle de Réponse à l’intervention (RAI) est très répendu (CSE, 2017b ; FSE, 2018). Ce modèle d’intervention s’inspire d’une approche développée aux États-Unis connue sous le nom de Response to intervention (RTI) (Fuchs & Fuchs, 2006). Cette démarche qui vise à répondre aux besoins de tous met l’accent sur la prévention et la proaction quant aux difficultés que peuvent rencontrer les élèves sur les plans de l’apprentissage et du comportement. Elle suppose également que la difficulté réside non pas en un problème chez l’apprenant, mais plutôt dans l’approche qui lui est proposée (Murawski & Hughes, 2009). Il existe toutefois deux approches de ce modèle qui sont souvent

(31)

confondues, soit celle du Protocole standardisé à trois paliers (Figure 2) et celle de l’approche par Résolution de problème (Figure3)(FSE, 2018). Dans chacune de ces approches, l’enseignant intervient d’abord avec des méthodes souples, diversifiées et de qualité tout en observant de près l’effet de ses interventions sur les élèves. Un enseignement de qualité qui est planifié en tenant compte des besoins de tous devrait être la première étape et avoir pour effet de limiter le nombre d’élèves requérant un enseignement plus intensif (Trépanier & Paré, 2010)

Dans le Protocole standardisé à trois paliers, cet enseignement universel correspond au niveau 1 (Figure 2). Il est estimé que cette façon de faire fonctionnera auprès de 75% à 90% des élèves, pourcentage variant entre les auteurs (Trépanier, 2019). Or, pour certains apprenants, cet enseignement ne sera pas suffisant pour pallier leurs difficultés et il deviendra nécessaire de planifier des interventions ciblées à leurs égards (niveau 2). Généralement, ils recevront un enseignement en petit groupe soit par l’enseignant, un enseignant-ressource ou l’orthopédagogue, dépendamment des besoins et des ressources disponibles. Enfin, pour une minorité d’élèves, environ 5%, il sera nécessaire d’intensifier et d’individualiser les interventions afin d’assurer leur réussite scolaire (méthodes plus explicites, fréquence, durée, sous-groupe,

expertise externe) (Fusch & Fuchs, 2006). C’est à ce niveau (niveau 3) qu’est généralement mis en place un plan d’intervention (Tremblay, 2012a).

Dans l’approche par résolution de problème (FSE, 2018), l’accent est mis sur l’intervention à même la classe, où le travail de soutien direct à l’élève relève principalement du travail de

Figure 2 - RAI – Approche du Protocole standardisé

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l’enseignant titulaire. Alors que ce dernier se soucie d’offrir d’abord et avant tout un enseignement selon des modalités souples permettant de rejoindre la diversité de ses apprenants, ce dernier reste à l’affût de l’évolution des besoins de chacun. Au fil de ses pistages, l’enseignant collabore auprès de ses collègues et de la direction pour demander conseil, et ce, dans le but d’ajuster continuellement son enseignement (Ibid). Au besoin, ils consultent ses pairs professionnels dans une optique de résolution de problèmes/recherche de solutions. Grâce à ces moments de consultation collaborative, l’enseignant est mieux outillé pour intervenir directement auprès de l’élève. C’est à la fin de ce processus, en cas de persistance des difficultés, que l’élève recevra des services individualisés offerts par un professionnel tel que l’orthopédagogue.

Enfin peu importe l’approche, l’enseignant titulaire joue un rôle important à chacun des niveaux et c’est généralement lui qui parvient à faire le dépistage des élèves présentant des difficultés malgré un enseignement universel dispensé. Toutefois, afin de maximiser la réussite des interventions, la collaboration entre les différents acteurs gravitant autour des apprenants est nécessaire (Murawski & Hughes, 2009). De fait, l’intervention de l’orthopédagogue se fait en prolongement du travail de l’enseignant déjà entamé (OPQ, 2014).

Dans les deux visions du modèle de la RAI qui viennent d’être présentées, on cherche à tendre vers une pédagogie différenciée de sorte à rencontrer les besoins pédagogiques de tous. « Dans ce sens, l’individualisation de l’enseignement est un processus qui peut conduire l’enseignant à puiser parmi diverses pratiques d’enseignement pour permettre à chacun de ses élèves de réussir leurs apprentissages. » (Trépanier & Paré, 2010, p.291). Enfin, ce modèle aux visées préventives

Figure 3 - RAI – Approche par Résolution de problème

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rejoint d’une part les mandats d’évaluation et d’intervention de l’orthopédagogue, mais également ceux en lien avec le soutien donné à l’enseignant en lien avec la prévention des difficultés d’apprentissage. Dans sa Politique d’adaptation scolaire, le Ministère fait justement de la prévention sa première voie d’action. « Reconnaître l’importance de la prévention ainsi que d’une intervention rapide et s’engager à y consacrer des efforts supplémentaires. » (MEQ, 1999, p.18). Cette volonté sera réaffirmée dans les différentes publications ministérielles (MELS, 2003 ; MEES, 2017) Ainsi, l’enseignant et l’orthopédagogue se doivent d’intervenir, dans un souci de prévention, le plus rapidement possible auprès de ces élèves dits « à risque », car l’attente ou l’exigence d’un diagnostic avant d’intervenir serait contradictoire à l’approche non catégorielle mise de l’avant par le Ministère (OPQ, 2014).

2.3.MODALITÉS DE SERVICES D’ORTHOPÉDAGOGIE

Rappelons l’idée selon laquelle le handicap n’est plus perçu comme une « limitation » chez la personne, mais bien comme « l’inadaptation de son environnement à pallier les obstacles qu’elle rencontre lorsqu’elle réalise ses activités » (Trépanier, 2019, p.19). À la lumière de ce postulat, il convient de proposer des modèles pédagogiques souples pour favoriser la réussite scolaire de tous. Ainsi, l’orthopédagogue est appelé à intervenir sous diverses formules. Trépanier (2019) propose une typologie des modes de services d’orthopédagogie qui permet de définir les actions professionnelles de l’orthopédagogue selon les différents contextes dans lequel il intervient ; le soutien de l’apprenant vers sa réussite étant toujours la finalité recherchée. L’auteure définit quatre catégories de modèles de service soit ceux en lien avec des interventions directes à l’extérieur de la classe ordinaire (SDE), des interventions directes auprès de l’élève à l’intérieur de la classe ordinaire (SDI), des services de consultation enseignant-orthopédagogue (SC) et enfin des modèles de services jumelés ou combinés (SJ). Puisque tous les modèles de service d’orthopédagogie devraient permettre de soutenir l’élève en difficulté dans ses apprentissages, ces derniers devraient être choisis judicieusement au regard des besoins de l’élève et de l’évaluation constante de leur efficacité (Trépanier, 2019).

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2.3.1. LES MODÈLES DE SERVICES À L’EXTÉRIEUR DE LA CLASSE

Tel que résumé dans le tableau 2, les modèles de services directs à l’extérieur de la classe SDE font référence aux services offerts dans les lieux autres que la classe ordinaire où l’orthopédagogue travaille auprès d’un ou plusieurs élèves en difficulté d’apprentissage. Ces modèles étaient conçus, au départ, dans l’optique d’une rééducation (Trépanier, 2019). Cette façon de faire correspond également au vocable « dénombrement flottant » désignant le retrait sporadique de certains élèves des classes régulières qui présentent des difficultés d’apprentissage afin d’intervenir auprès d’eux (Fillion & Goupil., 1995). Les données disponibles démontrent que l’intervention externe à la classe est encore la plus dominante (Goupil, Comeau & Doré, 1994 ; Trépanier, 2005 ; Gaudreau, 2010) Toutefois, peu d’études empiriques ou d’enquête à large échelle semblent documenter les modalités privilégiées par les orthopédagogues dans la dernière décennie.

Enfin, les interventions multiples, lorsqu’elles sont successives et ont lieu à l’extérieur de la classe, ont pour conséquence de morceler le temps scolaire de l’élève, réduisant ainsi son temps de présence en classe (CSE, 2017b ; Tremblay, 2012a).

2.3.2. LES MODÈLES DE CONSULTATION

Les modèles de consultation permettent d’offrir un soutien quant à l’accompagnement de l’élève en difficulté par des interventions indirectes (Tremblay, 2012a ; Trépanier, 2019). Tel que démontré dans la figure 4, les interventions de l’orthopédagogue (consultant) sont indirectes puisque ce dernier n’aura pas ou très peu d’interactions avec l’élève même. Son acte professionnel sera dirigé essentiellement vers l’enseignant (consulté) dans le but d’outiller ce dernier tant au regard d’adaptations possibles en lien avec l’enseignement que de l’apprentissage. La consultation collaborative s’appuie sur une démarche de résolutions de problèmes, où la relation non hiérarchisée met l’accent sur la recherche de solutions (Kampwirth, 2006). Cette façon de faire permet à l’enseignant d’intervenir rapidement, sans avoir à attendre l’intervention d’un tiers (ex. l’orthopédagogue) auprès de l’élève (Tremblay, 2012a). Cet échange de conseils est souple et s’effectue différemment selon les contextes (Tremblay, 2012a ; Trépanier, 2019). La consultation peut être planifiée ou informelle, de courte ou longue durée, auprès d’une équipe

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de soutien ou auprès d’un seul spécialiste. Dans ce modèle de service, les élèves touchées par la démarche de consultation ne risquent pas d’être étiquetés par leurs pairs puisque l’intervention se fait par l’enseignant titulaire à même la classe (Tremblay, 2012a ; Trépanier, 2019). D’autre part, les conseils reçus pour un élève en particulier peuvent être réinvestis par l’enseignant auprès d’autres élèves.

2.3.3. LES MODÈLES DE SERVICES MIXTES

« Les modèles mixtes sont les plus courants : ils offrent une diversité de modalités d’intervention qui peuvent prendre trois formes principales, soit la co-intervention, la consultation et le coenseignement, y compris les processus de planification et de mise en œuvre ». (Allenbach & al., 2016)

2.3.4. LES MODÈLES DE SERVICES À L’INTÉRIEUR DE LA CLASSE

Quant à eux, les modèles de service direct à l’intérieur de la classe SDI font référence à l’intervention de l’orthopédagogue à même la classe ordinaire. L’idée d’une pédagogie inclusive nécessite de repenser les pratiques de sorte que les besoins particuliers des élèves puissent être satisfaits sans qu’il soit nécessaire de les exclure du système scolaire. « Il s’agit en particulier de développer des pratiques de différenciation pédagogique permettant d’offrir en classe du soutien à l’apprentissage et à la socialisation de tous les élèves. » (Allenbach & al., 2016, p.73).

Source Kampwirth 2003, dans

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Tableau 2 - Modèles d’organisation des services d’orthopédagogie

Modèle Définition/Rôle de

l’orthopédagogue (O). Avantages Limites

→ Intervention directe → À l’extérieure de la classe → Axé sur la rééducation → Offert en individuel ou en sous-groupe → Support intensif → Ratio maître/élèves moins élevé.

→ Diminution des sources de distraction (attention/concentration +) → Rétroaction immédiate → Respecte le rythme d’apprentissage → Permet d’établir une

relation positive et de confiance avec l’O.

→ Rupture du contact avec le groupe classe

→ Effet sur le sentiment d’appartenance

→ Stigmatisation

→ Nombre d’élèves aidés restreint. → Limites budgétaires et administratives → Transfert des connaissances +/- efficace → Intervention directement à même la classe.

→ Nécessite une collaboration et concertation entre les acteurs.

→ Partage des rôles et responsabilités au sein de la classe. → Organisation du service selon différents arrangements. → Diminution de la stigmatisation → Maintien du sentiment d’appartenance

→ Meilleur transfert des connaissances

→ Partage des décisions et des responsabilités par les intervenants.

→ Peut s’avérer bruyant. → Multiples sources de

distractions possibles pour les élèves.

→ L’aide accordée peut être plus « diffuse ».

→ Moins propice aux interventions de type « rééducation ».

→ Exige davantage de planification commune. → L’O. est une ressource pour

l’enseignant.

→ Intervention indirecte auprès de l’élève.

→ Démarche axée sur la résolution de problème (figure)

→ Relation de collaboration → L’O dresse un bilan de la

situation problème, fournit des pistes de solution et soutient les adaptations nécessaires

*Possibilité de former des équipes de soutien composées de divers professionnels

→ Absence de stigmatisation pour l’élève

→ Favorise l’intégration scolaire

→ Possibilité de réinvestir les solutions trouvées auprès de plusieurs élèves → Favorise le développement professionnel. → Favorise l’inclusion scolaire. → Ne peut remplacer l’intervention intensive. → Exigent en temps (observations en classe, recherche de solution, rencontres avec l’enseignant) → Difficilement applicable en début de formation Danger de tendre vers une relation inégale (novice/expert) SDE (Ser vic es di rec ts à l’e xtér ieur de la clas se ) SDI (Ser vic es di rec ts à l’in rieu r de la clas se ) SC (Ser vic es de co nsult ati on )

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