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Recours aux services de soutien formel par les parents immigrants d'un enfant en situation de handicap

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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Recours aux services de soutien formel par les parents

immigrants d’un enfant en situation de handicap

Thèse

Carine Bétrisey

Doctorat sur mesure en interculturalité et handicap

Philosophiæ doctor (Ph.D.)

(2)

Recours aux services de soutien formel par les parents

immigrants d’un enfant en situation de handicap

Thèse

Carine Bétrisey

Sous la direction de :

Sylvie Tétreault, directrice de recherche

Geneviève Piérart, codirectrice de recherche

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Résumé

Les parents immigrants d’un enfant en situation de handicap présentent davantage de sources de vulnérabilité que d’autres parents. Cette situation peut diminuer le temps disponible et altérer leur implication dans le programme de réadaptation de leur enfant. L’objectif de cette thèse doctorale est de déterminer les attentes et les besoins en services de soutien formel de ces parents, afin de leur proposer une aide adaptée à leurs conditions de vie, et ceci, au fur et à mesure que l’enfant grandit.

D’abord, une étude de la portée des écrits scientifiques est menée dans le but de mieux cerner les connaissances existantes en lien avec le recours aux services de soutien par les parents immigrants (chapitre 1). Les vingt publications sélectionnées indiquent que l’aide pour trouver de l’information s’avère la plus requise, que ce soit au sujet de la condition de l’enfant, du fonctionnement sociosanitaire et éducatif du pays d’accueil, ou encore des services de soutien. En outre, la transmission de ces informations peut se compliquer en cas de non-maîtrise de la langue du pays d’accueil ou lorsque des divergences interculturelles apparaissent entre les parents immigrants et les différents intervenants rencontrés. Quant au non-recours aux aides formelles, il semble principalement dû à l’inadéquation entre l’aide concrète et les attentes des parents, au soutien informel reçu, à la méconnaissance des opportunités d’obtenir des services d’aide destinés aux parents, ou encore à un épuisement non ressenti.

Compte tenu du nombre restreint d’écrits scientifiques recensés, des entrevues semi-dirigées sont conduites auprès de 28 parents immigrants d’un enfant en situation de handicap dans la province du Québec (Canada) dans le cadre d’une recherche de plus grande envergure portant sur la communication avec les intervenants en petite enfance (chapitre 2). Le but de cette deuxième étude est de mieux saisir l’utilisation des services de soutien formel par les parents immigrants et les facteurs influençant leurs choix. Il faut préciser que les propos recueillis restent très centrés sur les services destinés à l’enfant. Le soutien pour recevoir des informations et l’accompagnement à la décision apparaissent comme les aides formelles les plus utilisées par les participants, suivies du soutien à l’éducation, de l’écoute active et de l’aide financière. Cinq facteurs semblent guider le recours au soutien formel qui est destiné aux parents, soit : (1) leur perception de la condition de leur enfant, (2) l’accès à l’information,

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Suite à ces résultats, de nouvelles entrevues semi-dirigées sont menées auprès de huit parents immigrants d’enfants d’âges différents à Montréal et à Québec. Cette démarche permet d’approfondir le thème du recours au soutien formel destiné aux parents, et ce, au fur et à mesure que l’enfant grandit (chapitre 3). Le guide d’entretien conçu pour cette étude met l’emphase sur les attentes et les besoins des parents immigrants afin d’atteindre un équilibre dans toutes les sphères de leur vie. Suite à une analyse thématique exploratoire du discours des parents et par l’application d’un modèle de stress et de coping, sept principales sources de stress sont mises en évidence : (1) le parcours migratoire, (2) la condition de l’enfant, (3) l’organisation sociosanitaire du pays d’accueil, (4) l’insertion professionnelle, (5) la relation de couple, (6) le réseau social, et (7) l’état de santé du parent. Afin de faire face à ces circonstances difficiles, les parents immigrants recourent principalement à de l’aide financière, du soutien pour obtenir des informations, de l’accompagnement à la décision, de l’aide en éducation et pour le transport. La satisfaction exprimée varie, notamment en raison des divergences entre les attentes et les services obtenus (soutien en éducation, écoute active, services de garde), ainsi qu’en termes de quantité d’aide reçue (soutien financier, informations, accompagnement à la décision). Un modèle théorique original est proposé afin d’illustrer le contexte parental en termes d’attentes, de besoins et de recours au soutien. Si certains moments de la vie de l’enfant peuvent entraîner un stress supplémentaire pour les parents (annonce du diagnostic, arrivée à l’école, transition à l’âge adulte), le parcours migratoire semble davantage expliquer le recours aux aides formelles.

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Abstract

Immigrant parents of a child with a disability show more signs of vulnerability than other parents. This situation can reduce their availability and alter their involvement in their child’s rehabilitation program. The objective of this doctoral thesis is to determine the expectations and needs of these parents, in order to provide them with assistance adjusted to their living conditions as the child grows.

First, a scoping review of the scientific literature is carried out to improve the understanding of existing knowledge on immigrant parent support (Chapter 1). The twenty selected publications indicate that informational support is the most needed, about the child’s condition, the functioning of the healthcare, the social, and the educational systems in the host country, or the support services. Furthermore, the transmission of information may be hampered by non-mastery of the host country’s official languages, or because of intercultural differences between immigrant parents and stakeholders. In regard to the non-use of formal supports, it seems mainly due to the inadequate response of formal services to parent’s expectations, unawareness about parental support services opportunities, and non-perceived exhaustion.

Given the few number of documented scientific writings, semi-structured interviews were conducted with 28 immigrant parents of a child with disabilities in the province of Quebec (Canada) as part of a larger study about their communication with stakeholders in early childhood (Chapter 2). The purpose of this second study is to improve the understanding of formal support services use by immigrant parents and the factors influencing their choices. It is worth mentioning that the data gathered is very focused on child services. Informational support and support for decision-making are the formal supports most used by parents, followed by educational support, active listening and financial assistance. Five factors appear to determine the use of formal support to parents: (1) their perception of the child’s condition, (2) access to information, (3) their strategies and capacity to act, (4) the involvement of the informal network, and (5) their perception of their need for support services.

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interview guide designed for this study focuses on the expectations and needs of immigrant parents to achieve a balance in all aspects of their lives. After an exploratory thematic analysis of the speech of parents and the application of a model of stress and coping, seven main sources of tension are highlighted: (1) the migratory path, (2) the child’s condition, (3) the social and healthcare functioning in the host country, (4) the professional integration, (5) the parent’s relationship, (6) their social network, and (7) the parental health. To cope with these stressful circumstances, immigrant parents mainly use financial assistance, informational support, support for decision-making, educational assistance and transportation support. The expressed satisfaction varies, particularly because of the differences between the expectations and the received services (educational support, active listening, child care), and in terms of the amount of aid received (financial support, information, assistance to decision). An original theoretical model can map the context of the parents in terms of expectations, needs and used supports. If certain periods of the child's life can lead to more stress for parents (diagnosis, school transition, transition to adulthood), the use of the formal supports is further explained by the migratory journey.

(7)

Table des matières

Résumé ... iii 

Abstract ... v 

Table des matières ... vii 

Liste des tableaux... ix 

Liste des figures ... x 

Liste des abréviations et des sigles ... xi 

Remerciements ... xiii 

Avant-propos ... xv 

Introduction générale ... 1 

Chapitre 1. Les mesures de soutien privilégiées par les parents immigrants d’un enfant mineur qui présente des besoins spéciaux : une étude de la portée ... 4 

Résumé ... 5 

Abstract ... 6 

Introduction ... 7 

Des familles en situation de mobilité ... 7 

Mesures de soutien destinées aux parents ... 8 

Méthodologie ... 10 

Résultats ... 11 

Étendue des recherches menées ... 11 

Types de mesures de soutien ... 15 

Facteurs modulant le recours aux mesures de soutien ... 18 

Évolution des attentes parentales de soutien ... 24 

Discussion ... 25 

Conclusion ... 29 

Références ... 31 

Chapitre 2. Services de soutien utilisés par les parents immigrants d’un enfant en situation de handicap ... 36 

Résumé ... 37 

Abstract ... 38 

Introduction ... 39 

Services de soutien destinés aux parents d’un enfant en situation de handicap ... 39 

(8)

Mesures et méthode d’analyse des données ... 46 

Résultats ... 47 

Utilisation des services de soutien destinés aux parents ... 47 

Facteurs de recours aux mesures de soutien formel destinées aux parents ... 49 

Discussion ... 53 

Conclusion ... 56 

Références ... 57 

Chapitre 3. Stress et ressources de soutien formel des parents immigrants d’un enfant en situation de handicap ... 61 

Résumé ... 62 

Abstract ... 63 

Introduction ... 64 

Modèle théorique : stress et coping ... 65 

Sources de stress des parents immigrants ... 66 

Ressources formelles des parents immigrants ... 68 

Méthode ... 69 

Résultats ... 71 

Caractéristiques des participants ... 71 

Sources de stress ... 73 

Ressources de soutien formel ... 77 

Besoins non comblés en soutien formel ... 82 

Discussion ... 84  Conclusion ... 90  Références ... 92  Discussion générale ... 96  Principaux constats ... 96  Recommandations ... 99  Possibilités et limites ... 102  Conclusion générale ... 104  Bibliographie ... 105 

Annexe 1 : Documents à l’intention des participants de l’étape 1 ... 116 

Annexe 2 : Guide d’entretien de l’étape 1 ... 123 

Annexe 3 : Modèle du double ABCX de McCubbin et Patterson (1983) ... 129 

Annexe 4 : Documents à l’intention des participants de l’étape 2 ... 131 

Annexe 5 : Guide d’entretien de l’étape 2 ... 137 

(9)

Liste des tableaux

1

Tableau 1.1. Description des 20 écrits scientifiques retenus ... 13 

Tableau 1.2. Synthèse des mesures de soutien traitées dans les 20 écrits scientifiques ... 16 

Tableau 1.3. Facteurs sociodémographiques, soutien social, composantes culturelles et communicationnelles modulant le recours aux mesures de soutien ... 18 

Tableau 1.4. Les perceptions parentales, les attentes des parents et l’évolution du recours aux mesures de soutien ... 23 

Tableau 2.1. Caractéristiques des parents immigrants rencontrés (N=28) ... 44 

Tableau 2.2. Caractéristiques des enfants en situation de handicap (N=28) ... 45 

Tableau 2.3. Utilisation des services de soutien destinés aux parents (N=28)... 48 

Tableau 3.1. Description des huit parents rencontrés ... 72 

Tableau 3.2. Utilisation par les parents des services de soutien formel durant l’année écoulée (N=8) ... 77 

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Liste des figures

2

Figure 1.1. Résultats des requêtes faites auprès des bases de données ... 12  Figure 3.1. Modèle du recours au soutien par les parents immigrants, inspiré des travaux de McCubbin et

Patterson (1983) et de Tétreault et ses collaborateurs (2014) ... 89 

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Liste des abréviations et des sigles

AMEIPH Association multiethnique pour l’intégration des personnes handicapées

ACCI Approche communicationnelle adaptée au contexte de l’immigration

CÉRC CRDITED Comité d’éthique de la recherche conjoint destiné aux centres de réadaptation en déficience intellectuelle et en troubles envahissants du développement

CIRRIS Centre interdisciplinaire de recherche en réadaptation et intégration sociale

CRDI Centre de réadaptation en déficience intellectuelle

CRIR Centre de recherche interdisciplinaire en réadaptation du Montréal

métropolitain

CRSH Conseil de recherches en sciences humaines du Canada

DA Déficience auditive

DD Déficiences diverses

DI Déficience intellectuelle

DMC Déficience motrice cérébrale

É.-U. États-Unis

ÉÉSP Haute école de travail social et de la santé

ELIC Enquête longitudinale auprès des immigrants du Canada

HETS-FR Haute école de travail social de Fribourg

IRDPQ Institut de réadaptation en déficience physique du Québec

MIDI Ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion

MSSS Ministère de la Santé et des Services sociaux

OPHQ Office des personnes handicapées du Québec

R.-U. Royaume-Uni

REPAR Réseau provincial de recherche en adaptation-réadaptation

TD Troubles du développement

TDAH Trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité

TED Trouble envahissant du développement

TSA Trouble du spectre autistique

UQAM Université du Québec à Montréal

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Remerciements

La présente thèse signe, non seulement, l’aboutissement d’un projet académique, mais également la fin d’une étape dans mon parcours personnel, trois ans qui m’ont indéniablement changée. Traverser l’Atlantique pour reprendre des études après dix ans de vie professionnelle, ce défi n’a pas été simple, mais il m’a enthousiasmée et nourrie intellectuellement. J’ai apprécié chacune de mes expériences, enrichissantes, parfois inattendues, ainsi que les difficultés qui m’ont grandie. Je tiens à remercier sincèrement toutes les personnes qui m’ont accompagnée dans cette aventure.

Tout d’abord, à mes directrices de thèse, Sylvie Tétreault et Geneviève Piérart, merci pour tout le soutien et les conseils précieux que vous m’avez apportés au cours de ces années. Sans vous, cette thèse n’aurait jamais existé. Vous avez toujours su vous rendre disponibles lorsque j’en ai eu besoin, malgré vos charges de travail respectives. Sylvie, merci pour ta vision positive, ton incroyable façon d’aborder la recherche et ton expérience si inspirante. Tu m’as fait confiance et tu m’as guidée tout en me permettant de construire mon indépendance. Geneviève, merci de tes encouragements dès les premiers balbutiements de ce projet et d’avoir accepté de suivre cette thèse au-delà de tes obligations professionnelles. Tu as alimenté mes réflexions et tu m’as poussée à développer davantage mes arguments. Je n’aurais jamais pu espérer un meilleur soutien pour cette thèse.

Un grand merci également à Chantal Desmarais, membre du comité de suivi de cette thèse et coauteure des trois articles inclus. Comme directrice du projet de l’Approche communicationnelle adaptée au contexte d’immigration (ACCI) à la suite de Sylvie Tétreault, tu as su m’accompagner grâce à tes conseils et m’apprendre à relever les défis du monde de la recherche. Merci à toute l’équipe du projet de l’ACCI que j’ai côtoyée durant ces trois années, que ce soit les cochercheures (Lilyane Rachédi, pour tes encouragements), les auxiliaires et coordinatrices de recherche (Élisabeth, Dayna, Claudia, Élise et les autres) avec qui j’ai eu l’occasion d’échanger sur mes idées et mes préoccupations. Un merci tout spécial à Pascale pour son écoute et ses conseils précieux, et à David pour ses relectures et son sens de l’humour. L’insertion dans un tel projet de recherche a été très formatrice à tous les niveaux.

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Je remercie aussi Daniel Turcotte, membre du comité de suivi, pour ses commentaires judicieux et sa vision méthodologique sans lesquels cette thèse n’aurait pas été un travail aussi instructif.

Merci aussi à Charles Gaucher pour son accueil à l’Université de Moncton, ainsi qu’à Jessica.

Puis, pour l’appui financier pendant mes études doctorales, un grand merci au Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH), au Centre interdisciplinaire de recherche en réadaptation et intégration sociale (CIRRIS), à l’Université Laval et au Réseau provincial de recherche en adaptation-réadaptation (REPAR). J’ai pu ainsi me consacrer à mon projet de thèse et diffuser les résultats obtenus.

Je ne saurais jamais assez remercier les parents qui m’ont partagé leurs parcours, parfois tragiques, mais passionnants et pleins d’espoirs. Vous m’avez touchée par votre accueil chaleureux, votre force d’avancer et votre regard sur la vie. Cette thèse est née grâce à vous et, je l’espère, servira votre cause.

Merci à mes amis, toujours fidèles au poste malgré la distance. Marlène, la vie n’est pas un long fleuve tranquille! Merci de me soutenir à travers les années. Je remercie également toute ma famille, en particulier mon frère Christian et ma belle-sœur Sandrine, pour leur présence et leur écoute, et mes adorables neveux Alexis et Mathis pour la joie qu’ils me transmettent. Maxime, toi aussi, tu es mon petit rayon de soleil qui grandit trop vite!

Enfin, je remercie mes parents de m’avoir toujours encouragée dans mes projets académiques, même si cela impliquait de me voir partir très loin. Vous avez encore la patience de m’écouter et de me soutenir. Merci de m’avoir transmis l’amour des voyages, le besoin de découvrir d’autres horizons.

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Avant-propos

Cette thèse de doctorat comporte trois articles originaux, incluant une étude de la portée des écrits scientifiques et deux recherches empiriques. L’article 1 s’intitule : « Les mesures de soutien privilégiées par les parents immigrants d’un enfant mineur qui présente des besoins spéciaux : une étude de la portée ». Les auteures sont Carine Bétrisey, Sylvie Tétreault (directrice de thèse), Geneviève Piérart (codirectrice de thèse) et Chantal Desmarais. Il a été publié dans la revue Service Social (2014, vol. 60, no 2, p. 29-52). L’article 2 a pour titre : « Services de soutien utilisés par les parents migrants d’un enfant en situation de handicap ». Les auteures sont Carine Bétrisey, Sylvie Tétreault (directrice de thèse), Geneviève Piérart (codirectrice de thèse) et Chantal Desmarais. Il a été publié dans La Revue Internationale de

l’Éducation familiale (2015, vol. 38, no 2, p. 121-144). L’article 3 s’intitule : « Stress et ressources de soutien formel des parents immigrants d’un enfant en situation de handicap ». Les auteures sont Carine Bétrisey, Sylvie Tétreault (directrice de thèse), Geneviève Piérart (codirectrice de thèse) et Chantal Desmarais. Il a été soumis en mai 2016 pour publication dans la Revue Européenne de Recherche sur le Handicap [ALTER].

L’étudiante au doctorat sur mesure a le statut d’auteure principale pour les trois articles. Elle a assumé le rôle principal dans toutes les étapes liées à la rédaction des articles : recension des écrits, conceptualisation méthodologique de l’étude, recrutement des participants, cueillette de données, analyse et interprétation des résultats et rédaction des manuscrits. Comme pour toute thèse par articles, il arrive que certains passages soient répétitifs. Les articles et le reste du document respectent les normes de présentation du Publication manual of the American

Psychological Association, 6 th edition (American Psychological Association, 2010). Par ailleurs, l’utilisation du masculin englobe les deux genres pour alléger le texte. Pour l’article 1, les tableaux ont été modifiés pour le présent document par souci de lisibilité. Par ailleurs, pour une cohérence de l’ensemble du texte, le terme « migrant » est remplacé par celui d’« immigrant » dans l’article 2, plus couramment utilisé au Québec.

(16)

Introduction générale

En 2011, 21 % de la population du Canada étaient nés à l’étranger et 12,6 % de personnes immigrantes vivaient dans la province de Québec (Statistique Canada, 2013). Or, peu d’informations sont disponibles en ce qui a trait à la présence de personnes en situation de handicap au sein de ces familles immigrantes (King, Esses et Solomon, 2013). L’accompagnement des parents à leur arrivée et leur accès au système de soins et des services sociaux demeurent des enjeux clés pour leur intégration. De façon générale, les sociétés d’accueil ne sont pas préparées à soutenir des parents immigrants d’un enfant en situation de handicap.

Au Québec, lorsque les parents arrivent avec un enfant en situation de handicap ou que l’enfant naît une fois la famille installée, le premier contact se fait généralement rapidement avec les intervenants du réseau de la santé et des services sociaux. Ces derniers doivent comprendre les particularités culturelles des parents immigrants et soutenir le développement de l’enfant qui vit une situation de handicap. À ce propos, la politique gouvernementale « À part entière » (Office des personnes handicapées du Québec [OPHQ], 2009) favorise la prise en compte des barrières culturelles afin d’accroître la participation sociale des personnes en situation de handicap et de leurs proches, quelles que soient leurs origines. Par l’intermédiaire du service de garde, d’un organisme communautaire ou d’un établissement de soins, les parents immigrants doivent être dirigés vers les personnes habilitées à poser un diagnostic.

Dans l’organisation actuelle des services de santé, le diagnostic est essentiel pour s’incrire dans un programme de réadaptation destiné à l’enfant et pour recevoir du soutien forme en tant que parents. Néanmoins, les délais d’attente, l’abondance des évaluations découlant d’une approche en silos, ainsi que le manque de clarté des démarches complexifient le parcours des parents immigrants et ralentissent l’obtention des services (Fellin, Desmarais et Lindsay, 2015). D’une manière généralement, ces parents présentent davantage de sources de vulnérabilité que d’autres (barrière de la langue, adaptation à l’organisation de la société d’accueil, réduction du réseau social, équivalences des diplômes et formations professionnelles). Cette situation peut contribuer à diminuer le temps disponible et à altérer leur implication dans le programme de réadaptation de leur enfant. Toutefois, ces constats restent encore peu documentés par les écrits scientifiques, et pour la province du Québec.

(17)

Lorsqu’un déséquilibre important et persistant apparaît entre les exigences accrues associées aux déficiences et incapacités de l’enfant d’une part, et les ressources familiales disponibles et mobilisables d’autre part, les parents risquent d’expérimenter une situation de crise (Hall et Graff, 2011; Twoy, Connolly et Novak, 2007; Xue, Ooh et Magiati, 2014). Pour l’atténuer ou la prévenir, il existe des ressources de soutien fournies par le réseau de la santé et des services sociaux (centres de réadaptation, hôpitaux, centres locaux de services communautaires, par exemple), des organismes communautaires (associations, regroupements de parents, par exemple), des partenaires du secteur scolaire et des services de garde ainsi que d’autres établissements privés. Néanmoins, ces ressources semblent peu mobilisées par les parents immigrants ou difficilement accessibles (Jennings, Khanlou et Su, 2014; Riggs et al., 2012; Stewart et al., 2008). Les raisons du recours et du non-recours à ce soutien ne sont d’ailleurs pas toujours clairement identifiées dans les écrits scientifiques consultés.

L’objectif de cette thèse doctorale est de déterminer les attentes et les besoins en services de soutien formel des parents immigrants avec un enfant en situation de handicap. Étant donné que le sujet s’avère peu documenté, en particulier au Québec, il s’agit avant tout d’explorer ce que vivent ces parents. Cette étude permettra de leur proposer une aide adaptée à leurs conditions de vie, et ceci, au fur et à mesure que l’enfant grandit. Le choix d’une approche qualitative pour traiter cette question semble s’imposer face à la situation multidimensionnelle de ces parents et le caractère sensible des domaines abordés avec eux (enfant en situation de handicap, vécu migratoire). Pour atteindre les objectifs proposés, une étape préliminaire consiste à documenter l’utilisation des services de soutien par ces parents à partir des écrits scientifiques. Une étude de la portée (chapitre 1) illustre les aides les plus requises et les difficultés parfois rencontrées par les parents pour y accéder. En outre, des pistes de réflexion sont fournies afin d’expliquer le non-recours au soutien formel. Dans un second temps, une étude qualitative est réalisée auprès de 28 parents immigrants d’un enfant en situation de handicap dans la province du Québec (chapitre 2). L’objectif est de mieux saisir quelle utilisation est faite des services de soutien formel par ces parents et les facteurs influençant leurs choix. À la lumière des résultats obtenus, de nouvelles entrevues semi-dirigées auprès de huit parents immigrants d’enfants d’âges différents à Montréal et à Québec permettent d’approfondir le thème du recours au soutien formel destiné aux parents, et ce, en fonction de l’âge de leur enfant (chapitre 3). Lors de cette étape, l’emphase est mise sur les attentes et les

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recours aux services de soutien formel et leur niveau de satisfaction. Un modèle théorique est proposé afin d’illustrer la position des parents immigrants en termes d’attentes, de besoins et de recours au soutien. Pour terminer, une discussion générale de l’ensemble de la démarche et des recommandations pour les acteurs sur le terrain sont présentées.

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Chapitre 1. Les mesures de soutien privilégiées par les

parents immigrants d’un enfant mineur qui présente des

besoins spéciaux : une étude de la portée

Carine Bétrisey1, 2, Sylvie Tétreault1, 2, 3, Geneviève Piérart4 et Chantal Desmarais1, 2

1. Université Laval, Québec, Canada

2. Centre interdisciplinaire de recherche en réadaptation et intégration Sociale (CIRRIS), Québec, Canada

3. Haute école de travail social et de la santé (EESP), Lausanne, Suisse

4. Haute école de travail social de Fribourg (HETS-FR), Givisiez, Suisse

Bétrisey, C., Tétreault, S., Piérart, G. et Desmarais, C. (2014). Les mesures de soutien privilégiées par les parents immigrants d’un enfant mineur qui présente des besoins spéciaux : une étude de la portée. Service Social, 60(2), 29-52.3

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Résumé

Dans un contexte migratoire, de nombreux défis se présentent aux parents d’un enfant ayant des besoins spéciaux. En première ligne, ils nécessitent un accès à des ressources de soutien afin d’accompagner l’enfant de façon optimale. Dans le but d’établir un état des lieux actualisé des connaissances préalables sur le recours aux services d’aide, une étude de la portée a été menée. À partir des bases de données interrogées, 20 écrits scientifiques ont été sélectionnés pour déterminer les types de services utilisés, les composantes qui modulent ce recours et l’évolution des attentes en mesures d’aide. Le soutien informationnel se révèle le plus présent dans les études. Parmi les facteurs modulant l’utilisation des ressources de soutien, les composantes communicationnelles et culturelles se distinguent par le nombre d’écrits dans lesquels elles ressortent. L’évolution du recours dans le temps reste peu documentée dans les recherches retenues. Le choix des parents concernant les modalités de soutien devrait être exploré davantage.

(21)

Abstract

In the context of immigration, there are numerous challenges facing families living with a child with special needs. First, they require access to support services in order to provide continued adequate care to the child. In order to establish an update of the background knowledge on the use of support measures, a scoping review was carried out. Twenty scientific studies were selected from database queries to determine the types of services used, the components modulating this use and the evolution of needs in assistance measures. Informational support is found to be the most present in the studies. Among the factors defining the use of support services, communication and cultural components are distinguished by the number of researches in which they stand out. According to the selected studies, there is little documentation on the evolution of assistance uptake through time. Parents’ choice of support modalities should be explored further.

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Introduction

Dans les pays occidentaux, l’organisation des systèmes de prestations destinées aux personnes présentant des capacités physiques, sensorielles, mentales ou psychiques restreintes s’appuie sur la notion de « besoin », selon laquelle « … le handicap naît lorsqu’une personne atteinte dans sa santé a besoin de l’aide d’autrui pour accomplir des activités normales pour un être humain (se lever, s’habiller, manger, étudier, se déplacer, travailler, etc.) » (Gazareth, 2009, p. 8). Les besoins spéciaux découlent de l’interaction entre les caractéristiques personnelles de l’individu et les exigences de son cadre de vie (Fougeyrollas, 2012; Hamonet, 2012). En première ligne, les parents et leur réseau social constituent les principaux acteurs prenant soin de l’enfant qui présente des besoins particuliers (Dempsey, Keen, Pennell, O’Reilly et Neilands, 2009; Neely-Barnes et Dia, 2008). Non sans conséquences, les difficultés de l’enfant affectent la sphère familiale (Neely-Barnes et Dia, 2008), surtout lorsque des troubles du comportement apparaissent (Cantwell, Muldoon et Gallagher, 2014; Stuttard et al., 2014). Le stress ressenti par les parents s’avère souvent de grande intensité (Dempsey et al., 2009; Pelchat, Lefebvre et Levert, 2005), car des répercussions financières importantes se font sentir par des coûts directs (transport, gardiennage, équipement) et indirects (épuisement, perte d’emploi) (Dionne, Rousseau, Drouin, Vézina et McKinnon, 2006; Neely-Barnes et Dia, 2008; Whiting, 2013). D’autres conséquences s’observent à travers l’altération de l’état de santé physique et psychologique des parents (Cantwell, Muldoon et Gallagher, 2014; Stuttard et al., 2014; Whiting, 2013). Les relations familiales et de couple sont fragilisées par la présence d’un enfant avec des besoins spéciaux (Dionne et al., 2006; Stuttard et al., 2014; Whiting, 2013). Quant aux liens sociaux, ils s’amenuisent, soit par une diminution des activités à l’extérieur du foyer (Dionne et al., 2006; Whiting, 2013), soit par l’éloignement de l’entourage avec le temps (Grant, Nolan et Keady, 2003; Resch et al., 2010). Face à ces multiples incidences, les parents doivent faire face en s’ajustant constamment à une situation en mouvement.

Des familles en situation de mobilité

Il arrive que certains parents dont un enfant présente des besoins particuliers passent par un processus migratoire, lui-même source de déstabilisation. Selon l’Enquête longitudinale auprès des immigrants du Canada (ELIC), les nouveaux arrivants rencontrent des difficultés dans plusieurs domaines lors de leur processus d’établissement : obtenir un emploi, trouver un logement, accéder aux soins (Xue, 2007). Paradoxalement, leur consommation de

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services de santé se révèle moins élevée que celle de la population native malgré leur plus grande vulnérabilité (Barozzino, 2010; Lindsay, King, Klassen, Esses et Stachel, 2012; Riggs et al., 2012). Les parents immigrants doivent non seulement comprendre le système de santé et des services sociaux, les systèmes fiscaux, les services d’éducation, mais également acquérir la langue de la société d’accueil, les habiletés de communication ainsi que les subtilités de l’appropriation de l’information (Barozzino, 2010; Lazure et Benazera, 2006; Lindsay et al., 2012; Neely-Barnes et Dia, 2008). De surcroît, la cohésion familiale s’avère fragilisée à la suite du parcours migratoire (Lazure et Benazera, 2006) et le manque d’aidants naturels se fait sentir, ceux-ci restant généralement au pays d’origine, bien que les nouvelles technologies aient largement contribué à faciliter le maintien des liens de communication et de soutien internationaux (Arsenault, 2010; Vatz Laaroussi et Bolzman, 2010). Les parents immigrants constituent une population vulnérable du fait des défis liés à leur trajectoire migratoire qui s’ajoutent aux conséquences de la présence d’un enfant avec des difficultés. Néanmoins, peu d’écrits scientifiques font état de cette combinaison particulière dans la vie des parents.

Mesures de soutien destinées aux parents

Afin de garantir la continuité d’un soutien optimal de l’enfant, des ressources d’aide accessibles doivent appuyer les parents immigrants s’ils en sollicitent les services. Leurs attentes et leurs besoins en soutien peuvent varier selon leur contexte personnel, leur trajectoire de vie ainsi que leur environnement physique et social. Dans le but de mieux délimiter les modalités d’aide existantes et de les opérationaliser, Tétreault et ses collaborateurs (2012) proposent une typologie ciblant les mesures destinées aux parents. Se basant sur une revue des écrits scientifiques et la validation d’experts de sept pays, les auteurs distinguent quatre grandes catégories de services : le soutien proprement dit, le répit (récurrent ou occasionnel), le gardiennage de l’enfant (récurrent ou occasionnel) et le soutien en cas d’urgence. Le soutien proprement dit est lui-même divisé en neuf types de services : l’aide informationnelle (renseignements concernant l’enfant ou les services disponibles); l’accompagnement et le soutien à la décision (outils, conseils dans les périodes charnières); le soutien juridique; l’appui financier; les services d’aide éducative (apprentissage de méthodes adaptées aux difficultés de l’enfant); le soutien psychosocial (réduction des tensions vers une harmonie familiale); l’assistance au quotidien (mesures

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aux parents visent à leur permettre de remplir leurs rôles et fonctions (Tétreault et al., 2012). Quant aux services de répit qui ciblent la détente ou la réalisation d’autres activités quotidiennes, ils se distinguent selon qu’ils sont centrés sur la garde de l’enfant ou sur l’aide à son développement (Tétreault et al., 2012). Enfin, les services de dépannage permettent aux parents de faire face à des situations imprévues (décès d’un proche, maladie, etc.) sous trois différents aspects : hébergement, financement ou gardiennage (Tétreault et al., 2012). Plus spécifique aux populations immigrantes, le recours à des interprètes constitue une aide proposée par le réseau de la santé et des services sociaux (Bowen, 2001). L’existence des ressources de soutien n’assure cependant ni leur accessibilité à tous, ni leur disponibilité au moment où elles sont requises (Resch et al., 2010). Il faut également s’assurer que les mesures d’aide offertes soient connues des parents et répondent à leurs attentes.

Les travaux menés dans le domaine du soutien aux parents non immigrants d’un enfant présentant des besoins spéciaux permettent de dresser un premier portrait des attentes parentales exprimées. Recevoir davantage d’information ressort particulièrement, que ce soit à propos de l’enfant (diagnostic, soutien éducatif) ou des ressources disponibles (Bedell et al., 2013; Deris, 2012; Pelchat, Lefebvre, Levert et David, 2008; Resch et al., 2010). Tout autant citée, l’aide financière et matérielle s’avère nécessaire pour les parents (Bedell et al., 2013; Deris, 2012; Dionne et al., 2006; Resch et al., 2010). Dans l’étude de Resch et de ses collaborateurs (2010), les parents signalent notamment les difficultés à inclure leur enfant dans les systèmes éducatifs et sociaux ainsi que la diminution du soutien des proches avec les années. Quant à Dionne et ses collaboratrices (2006), elles relèvent des attentes portant sur l’amélioration des services déjà existants et l’augmentation de mesures telles que des systèmes de garde et de l’aide à domicile. En outre, la mise en place d’un soutien psychologique et de congés parentaux en cas de situations particulières est souhaitée (Dionne et al., 2006).

Concernant les parents immigrants, les quelques études menées dans le domaine relèvent certaines spécificités dans les attentes envers les ressources de soutien (Daudji et al., 2011; Kummerer, Lopez-Reyna et Hughes, 2007; Neely-Barnes et Dia, 2008; Ravindran et Myers, 2013). Elles semblent dépendre des croyances liées à la santé, à la maladie et aux causes de la déficience, des représentations de l’enfant et de son développement, et des rôles du père et de la mère selon les cultures et les religions (Daudji et al., 2011; Kummerer et al., 2007; Neely-Barnes et Dia, 2008; Ravindran et Myers, 2013). Afin d’adapter au mieux l’offre

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de services d’aide aux attentes des parents immigrants, il est pertinent d’explorer leurs trajectoires d’utilisation des ressources de soutien. Les questions qui guident la démarche de recherche sont les suivantes : Quels types de mesures de soutien utilisent-ils? Quels sont les principaux facteurs qui modulent cette consommation? Quelle est l’évolution des attentes parentales en fonction de l’avancement en âge de l’enfant?

Méthodologie

En vue d’explorer les écrits scientifiques, Rumrill, Fitzgerald et Merchant (2010) exposent une nouvelle méthode plus spécifiquement liée aux champs de la médecine et des sciences sociales : « l’étude de la portée » (scoping review), qui fut d’abord décrite par Arskey et O’Malley (2005). Elle rend compte de l’ampleur des publications scientifiques produites sur un thème. Cette méthode se place généralement comme une première étape d’analyse d’un objet, permettant par la suite de construire des questions de recherche (Rumrill et al., 2010, reprenant Davis, Drey et Gould, 2009). Comme le thème portant sur les mesures de soutien aux parents immigrants d’un enfant qui présente des besoins spéciaux est novateur, il correspond bien à l’étude de la portée.

De manière à répondre aux objectifs, les bases de données suivantes sont choisies pour leur fréquence d’utilisation dans les écrits scientifiques (Arksey et O’Malley, 2005; Goodridge, Hawranik, Duncan et Turner, 2012; Magalhaes, Carrasco et Gastaldo, 2010; McColl et al., 2009; Uphoff, Pickett, Cabieses, Small et Wright, 2013) ainsi que pour la pertinence de leur contenu : PubMed, Embase, CINHAL, PsycInfo, Eric et Scopus. Les critères d’inclusion comprennent la période de publication s’étendant de 1995 à 2013, ainsi que la langue des documents, soit l’anglais ou le français. Le choix de se concentrer sur des productions récentes sans trop restreindre l’étendue des recherches est propre au thème peu référencé dont il est question ici. Les mots-clés utilisés pour l’exploration des écrits pertinents se basent sur ceux employés dans l’étude de Tétreault et de ses collaboratrices (2013-2016), avec des ajustements quant aux thématiques propres à cette analyse. Cette étape s’est déroulée avec la validation d’une professionnelle en recherche documentaire. En définitive, les mots suivants servent à l’interrogation des bases de données : child, newborn, infant, toddler, preschool AND impairment, disability, handicap,

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support, program, service, resource. Les différents termes couvrent les thèmes de l’enfant,

de la déficience, des parents, de l’immigration, des besoins et de l’utilisation de stratégies de soutien. La présence de l’ensemble de ces éléments définit l’inclusion d’un écrit à l’étude de la portée.

Afin de se concentrer sur la thématique visée, les études portant sur les maladies chroniques (asthme, diabète, etc.) ou infectieuses (hépatite, VIH, etc.) sont exclues. En effet, elles génèrent une prise en charge plus médicalisée et peuvent amener une remise en cause du pronostic vital. Les problèmes de santé mentale ou d’adaptation post-traumatique, souvent liés à un stress post-post-traumatique, ne sont pas retenus. Très présents chez les réfugiés, ces troubles restent inhérents au parcours de migration. En outre, les études en lien avec la vaccination, la santé bucco-dentaire, l’obésité ainsi que toutes les affections reliées au sang sont aussi exclues, s’insérant davantage dans le domaine de la santé publique. Mis à part la catégorie des difficultés rencontrées par l’enfant, il est à noter que les travaux portant uniquement sur les services de santé ou sur l’éducation scolaire sont écartés, car ils ne correspondent pas aux mesures de soutien telles que définies par Tétreault et ses collaborateurs (2012). De même, les études décrivant des ressources de soutien dans un pays étranger, utilisées (ou non) par les habitants de ce pays, ne sont pas retenues, car, dans ce cas, il ne s’agit pas de personnes immigrantes.

Résultats

Après une description des écrits scientifiques retenus à travers l’étude de la portée selon les critères exposés, les types de modalités de soutien commentés par les auteurs seront examinés. L’analyse du recours ou non aux mesures d’aide par les parents immigrants sera suivie d’un portrait des différents facteurs modulant cette consommation. Un dernier point traitera de l’évolution de l’utilisation de ces ressources d’aide avec l’avancée en âge de l’enfant.

Étendue des recherches menées

Lors d’une première étape, les 1 379 publications obtenues à travers les différentes bases de données grâce aux mots-clés sont sélectionnées à partir des titres et des résumés.

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Figure 1.1. Résultats des requêtes faites auprès des bases de données

Comme l’illustre la figure 1.1, cette phase de tri est suivie d’une deuxième sélection plus fine des 165 écrits retenus, en se basant sur l’ensemble du contenu de chaque document. La sélection a été validée par une personne experte dans le domaine du soutien aux parents. Ainsi, 16 articles scientifiques, 6 doublons ayant été soustraits, constituent le résultat final de la consultation des bases de données. À la suite de ce processus, la décision d’ajouter quatre écrits scientifiques retrouvés en référence de plusieurs recherches a été prise, l’étude de la portée permettant ce type de complément (Rumrill et al., 2010).

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Tableau 1.1. Description des 20 écrits scientifiques retenus Auteurs

(Année de publication) Lieu de l’étude N Devis de recherche de l’enfant*Diagnostic Origine des parents Alvarado (2004) É.-U. 2 Qualitatif : Entretien, observation

participante, consultation de dossiers

DD Mexique

Bailey et al. (1999) É.-U. 200 Quantitatif : Test, questionnaire TD Mexique, Porto Rico Balcazar et al. (2012) É.-U. 12 Qualitatif : Étude de cas DA Mexique

Bateson (2013) É.-U. 6 Qualitatif : Entretien semi-structuré DD Somalie Bywaters et al. (2003) R.-U. 35 Qualitatif : Entretien semi-structuré DD Bangladesh, Pakistan Cohen (2013) É.-U. - Opinion : Recension des écrits,

recommandations

DI Amérique latine

Croot (2012) R.-U. 11 Qualitatif : Entretien TD Pakistan Croot et al. (2012) R.-U. 11 Qualitatif : Entretien TD Pakistan

Durà-Vilà et Hodes (2009) R.-U. 242 Quantitatif : Consultation de dossiers DI Asie du Sud, Afrique, Grande-Bretagne, Europe, Moyen-Orient Heer et al. (2012) R.-U. 9 Qualitatif : Focus groupes DI Inde, Pakistan

Kaur-Bola et Randhawa (2012) R.-U. 14 Qualitatif : Entretien DD Bangladesh, Pakistan Kramer-Roy (2012) R.-U. 20 Qualitatif : Recherche active,

rencontre de groupe

TD Pakistan

Pondé et Rousseau (2013) Canada 44 Qualitatif : Entretien semi-structuré Quantitatif : Test

TSA Afrique, Amérique du Nord, Amérique latine, Asie, Europe, Moyen-Orient Radell et al. (2008) Suède 21 Qualitatif : Entretien Autre Érythrée, Gambie, Ouganda, Somalie,

Sri Lanka, Turquie, Yémen Rhoades et al. (2004) É.-U. - Opinion : Recension des écrits DA Afrique, Amérique latine, Asie Sham (1996) R.-U. 12 Qualitatif : Étude de cas DI Hong Kong

Steinberg et al. (1997) É.-U. 14 Qualitatif : Entretien DA Porto Rico, Salvador Welterlin et LaRue (2007) É.-U. - Opinion : Présentation cadre

théorique

TSA Afrique, Amérique latine, Asie, Europe

Won et al. (2004) É.-U. 1 Qualitatif : Étude de cas TSA Corée Yu (2013) É.-U. 15 Qualitatif : Entretien TSA Chine *DA=déficience auditive, DD=déficiences diverses, DI=déficience intellectuelle, TD=troubles du développement, TSA=trouble du spectre autistique

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Vingt écrits scientifiques en anglais composent la sélection des recherches menées sur la question des mesures de soutien aux parents immigrants d’un enfant ayant des besoins spéciaux. L’ensemble des résultats énoncés par la suite portera sur ces 20 études décrites dans le tableau 1.1.

La moitié des écrits scientifiques ont été publiés entre 2012 et 2013. Sept sont parus entre 2000 et 2010. Seulement trois publications ont plus de 15 ans (Bailey et al., 1999; Sham, 1996; Steinberg, Davila, Collazo, Loew et Fischgrund, 1997). Concernant le lieu de réalisation des recherches, il apparaît que 10 se sont déroulées aux États-Unis (Tableau 1.1) et presque autant émanent du Royaume-Uni (n=8). Une seule étude a été menée au Canada (Pondé et Rousseau, 2013) et une autre provient de la Suède (Radell, Tillberg, Mattsson et Åmark, 2008). Parmi les 20 publications, trois textes d’opinion comportent une recension des écrits scientifiques et des recommandations ou une présentation théorique en lien avec le thème (Cohen, 2013; Rhoades, Price et Barris Perigoe, 2004; Welterlin et LaRue, 2007) (Tableau 1.1).

En tenant compte du nombre de personnes interrogées, les 17 articles sélectionnés impliquent majoritairement de petits échantillons (une vingtaine de personnes) (Tableau 1.1). Souvent, les mères représentent la principale, voire l’unique source d’information (Alvarado, 2004; Bateson, 2013; Steinberg et al., 1997; Won, Krajicek et Lee, 2004). Avec 200 participants et plus, deux recherches se différencient non seulement par la taille de leur échantillon, mais également par la méthodologie quantitative utilisée par les auteurs (Bailey et al., 1999; Durà-Vilà et Hodes, 2009). Hormis la recherche de Pondé et Rousseau (2013), adoptant un devis de recherche mixte avec des entretiens semi-structurés et des tests standardisés, les 14 écrits scientifiques restants présentent des protocoles méthodologiques qualitatifs (entretien, étude de cas, observation participante, etc.) (Tableau 1.1).

Sur le plan du diagnostic principal des enfants des familles étudiées, le trouble du spectre autistique (TSA) ressort dans quatre écrits scientifiques, alors que trois traitent de la surdité et des déficiences auditives (Tableau 1.1). Les autres études impliquent des enfants ayant des difficultés plus globales, comme les troubles du développement (n=4) et la déficience

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l’approche des auteurs portant davantage sur les réactions des parents en lien avec ces difficultés (Tableau 1.1). Quant à Radell et ses collaborateurs (2008), leur étude vise spécifiquement l’hémiplégie.

Concernant l’origine des familles immigrantes, l’Asie arrive largement en tête (n=9) (Tableau 1.1). Six études ont été menées auprès des populations du Bangladesh, du Pakistan et d’Inde résidant au Royaume-Uni (Bywaters, Ali, Fazil, Wallace et Singh, 2003; Croot, 2012; Croot, Grant, Mathers et Cooper, 2012; Heer, Larkin, Burchess et Rose, 2012; Kaur-Bola et Randhawa, 2012; Kramer-Roy, 2012). Quant à l’Asie orientale (Chine, Corée, Hong Kong), elle est représentée dans trois autres recherches (Sham, 1996; Won et al., 2004; Yu, 2013). Provenant des États-Unis, des travaux ont été réalisés avec des familles du Mexique, de Porto Rico et du Salvador (Alvarado, 2004; Bailey et al., 1999; Balcazar et al., 2012; Steinberg et al., 1997). L’étude de Bateson (2013) concerne des familles venues de Somalie uniquement. Six autres travaux présentent des échantillons de populations venant d’origines diverses (Amérique latine ou du Nord, Asie, Afrique, Europe ou Moyen-Orient) (Cohen, 2013; Durà-Vilà et Hodes, 2009; Pondé et Rousseau, 2013; Radell et al., 2008; Rhoades et al., 2004; Welterlin et LaRue, 2007).

En résumé, les 20 écrits scientifiques retenus constituent un recueil varié de textes relativement récents, incluant une majorité de recherches qualitatives sur de petits échantillons (inférieurs à 40 personnes) avec une prédominance pour les États-Unis et le Royaume-Uni.

Types de mesures de soutien

La typologie de Tétreault et ses collaborateurs (2012) a été adaptée afin de rendre compte des mesures de soutien utilisées par les parents immigrants d’un enfant en situation de handicap selon les écrits scientifiques. D’une part, les deux types de répit, le gardiennage (ou services de garde) et les trois types de soutien en cas d’urgence (dépannage) ont été réunis dans une même catégorie. D’autre part, le service d’interprètes a été ajouté aux neuf types de soutien comme tel. Avec le non-recours, 12 types de mesures de soutien sont documentée ici.

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Selon un premier constat, l’accès à l’information constitue le principal enjeu pour les parents. Lorsque la langue représente une barrière, les services d’interprètes viennent faciliter la communication, et ainsi, l’utilisation des services. De plus, parmi les travaux menés sur les ressources d’aide proposées aux parents immigrants d’un enfant qui présente des besoins spéciaux, les auteurs ciblent rarement une modalité de soutien unique afin d’en approfondir l’utilisation.

Tableau 1.2. Synthèse des mesures de soutien traitées dans les 20 écrits scientifiques Mesures de soutien4 Non-re cou rs Informations Interprète s Éducation Tran sport

Répit, garde, dépannage Finances Psycho soci

al Assi stan ce au quotidien

Aide à la décision et juridique

Alvarado (2004) X X X Bailey et al. (1999) X X X Balcazar et al. (2012) X X Bateson (2013) X X X X X X X Bywaters et al. (2003) X X X Cohen (2013) X Croot (2012) X Croot et al. (2012) X X X X Durà-Vilà et Hodes (2009) X X X Heer et al. (2012) X X X Kaur-Bola et Randhawa (2012) X X Kramer-Roy (2012) X Pondé et Rousseau (2013) X Radell et al. (2008) X X X Rhoades et al. (2004) X Sham (1996) X X X X Steinberg et al. (1997) X X X X X Welterlin et LaRue (2007) X X X X X Won et al. (2004) X X X X Yu (2013) X X

Pour chaque étude retenue, le tableau 1.2 indique si l’une ou l’autre des différentes modalités du soutien aux parents sont mentionnées selon les catégories adaptées de la typologie de Tétreault et ses collaborateurs (2012). Alors que Pondé et Rousseau (2013) axent davantage leur réflexion sur la relation entre le fait d’accepter ou non le diagnostic de

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trouble du spectre autistique chez l’enfant et le recours aux mesures d’aide, les 19 autres recherches évoquent les types de soutien.

Comme l’indique le Tableau 1.2, la moitié des recherches élaborent des hypothèses sur les raisons qui incitent les parents à ne pas recourir aux services de soutien (n=10). D’après la perception de quelques parents, la gestion des besoins spéciaux de leur enfant relève de la compétence parentale de sorte qu’ils n’acceptent aucune aide extérieure (Croot et al., 2012; Heer et al., 2012; Kaur-Bola et Randhawa, 2012). Le soutien est alors appréhendé de manière négative, soit parce que son utilisation entraîne un sentiment de stigmatisation ressenti par les parents (Alvarado, 2004; Bailey et al., 1999; Durà-Vilà et Hodes, 2009; Heer et al., 2012; Pondé et Rousseau, 2013; Welterlin et LaRue, 2007; Won et al., 2004), soit parce que l’aide offerte ne correspond pas à leurs attentes (Alvarado, 2004; Croot et al., 2012; Durà-Vilà et Hodes, 2009; Radell et al., 2008). Selon Heer et ses collaborateurs (2012), en renonçant à recevoir du soutien pour eux-mêmes, les parents chercheraient à obtenir davantage de services pour leur enfant.

En se basant sur les recherches sélectionnées, le soutien informationnel s’avère la mesure de loin la plus abordée (n=16) (Tableau 1.2). En effet, les parents doivent obtenir les informations nécessaires concernant la disponibilité des ressources de soutien et la manière d’y accéder. En outre, davantage de renseignements leur sont nécessaires à propos du fonctionnement du réseau de la santé et des services sociaux. L’accent est également mis sur les informations en lien avec les causes et la description des difficultés de l’enfant. Le recours à des interprètes professionnels ou informels pour faciliter la transmission de l’information est souligné dans dix publications (Tableau 1.2). Par ailleurs, l’assistance éducative permettant aux parents d’adapter leurs pratiques aux besoins particuliers de l’enfant ressort dans six recherches. De surcroît, l’aide pour le transport de l’enfant apparaît dans cinq écrits scientifiques (Bateson, 2013; Bywaters et al., 2003; Croot et al., 2012; Steinberg et al., 1997; Welterlin et LaRue, 2007). Un quart des études (n=5) soulignent les services de répit, de gardiennage et de dépannage. La difficulté pour les parents de laisser leur enfant dans une structure d’accueil durant la nuit y est évoquée (Croot et al., 2012; Durà-Vilà et Hodes, 2009). Pour sa part, l’apport d’aides financières supplémentaires ressort au sein de trois études (Bateson, 2013; Kramer-Roy, 2012; Sham, 1996). Il faut alors tenir compte des conditions de pauvreté ou de vulnérabilité économique des populations

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immigrantes en général. L’accompagnement et l’aide à la décision, le soutien psychosocial et l’assistance au quotidien ne sont que brièvement abordés (Bateson, 2013; Sham, 1996).

Facteurs modulant le recours aux mesures de soutien

Divers facteurs modulant l’utilisation de mesures d’aide par les parents immigrants d’un enfant ayant des besoins spéciaux ressortent des recherches retenues.

Tableau 1.3. Facteurs sociodémographiques, soutien social, composantes culturelles et communicationnelles modulant le recours aux mesures de soutien

Facteurs modulant le recours aux mesures de soutien Facteurs sociodémographique s Soutien social Facteurs culturels et représentations…

Statut d’immigration Niveau d’éducati

on

Situation civile Genre Réseau social

informel Groupe s de sout ien Réseau social fo rmel … de la déficience … du développe ment de l’enfant et de l’é ducation … des rôles s elon le

genre … des intervena

nts

… de la médecine Maîtrise de la langue

Alvaro (2004) X X X X X X Bailey et al. (1999) X X X X X X X Balcazar et al. (2012) X X Bateson (2013) X X X Bywaters et al. (2003) X Cohen (2013) X X X X X X X Croot (2012) X Croot et al. (2012) X X X X X X Durà-Vilà et Hodes (2009) X X X X Heer et al. (2012) X X X X Kaur-Bola et Randhawa (2012) X X X X X Kramer-Roy (2012) X X X X X X Pondé et Rousseau (2013) X X X X Radell et al. (2008) X X X Rhoades et al. (2004) X X X X Sham (1996) X X X X X X Steinberg et al. (1997) X X X X X X X X Welterlin et LaRue (2007) X X X X X Won et al. (2004) X X X X X X

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Regroupés par thèmes, leur présence ou non dans chacune des études examinées est indiquée dans deux tableaux (Tableaux 1.3 et 1.4). Ces facteurs sont examinés séparément afin de mieux saisir leur implication dans le choix des parents de recourir aux ressources de soutien.

Comme en témoignent les données présentées dans le tableau 1.3, la moitié des écrits scientifiques sélectionnés mettent en évidence un lien entre les facteurs sociodémographiques des parents et la consommation de services d’aide (n=10) (Tableau 1.3).

Le contexte migratoire (sans-papiers, réfugiés, par exemple) ressort majoritairement (n=8). En effet, l’accès aux programmes sociaux peut se révéler plus ardu suivant la situation dans laquelle les parents et l’enfant se trouvent sur le plan juridique, selon le pays d’accueil (Alvarado, 2004; Welterlin et LaRue, 2007). Pour leur part, Kaur-Bola et Randhawa (2012) et Kramer-Roy (2012) soutiennent qu’un plus bas niveau d’éducation des parents, qui se manifeste généralement à travers une moindre capacité de maîtrise de la langue, restreint l’accès aux modalités de soutien (Tableau 1.3). Plus généralement, la majorité des auteurs soulignent la situation de pauvreté et de précarité (emploi, logement) dans laquelle se trouvent souvent les populations immigrantes (Bailey et al., 1999; Croot et al., 2012; Heer et al., 2012; Rhoades et al., 2004; Steinberg et al., 1997; Welterlin et LaRue, 2007). Toutefois, personne ne fait de lien direct entre ce contexte et l’utilisation des mesures de soutien par les parents.

Toujours d’après les données du tableau 1.3, le réseau social exerce une influence sur la décision des parents immigrants de recourir ou non aux services d’aide (n=10). Un élément majeur identifié concerne la présence ou non de ressources de soutien social informel (amis, voisins, collègues, etc.) (n=9). Il arrive souvent que le parcours migratoire ait réduit la densité et la stabilité de ce réseau (Bailey et al., 1999; Steinberg et al., 1997). De même, l’apparition des difficultés chez l’enfant entraîne parfois un rejet de la part de la communauté culturelle, religieuse ou de la famille élargie (mère rendue responsable, punition divine) (Croot et al., 2012; Kramer-Roy, 2012; Sham, 1996; Won et al., 2004). Gérer les troubles du comportement de l’enfant incite aussi les parents eux-mêmes à s’isoler (Won et al., 2004). En outre, seules trois recherches évoquent le soutien social formel, soit celui fourni

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par des organismes publics (services gouvernementaux) ou des agences de soins privés (Bailey et al., 1999; Cohen, 2013; Steinberg et al., 1997) (Tableau 1.3). Les auteurs expliquent comment ces ressources viennent combler l’absence ou la diminution du soutien social informel due au parcours d’immigration (Bailey et al., 1999; Cohen, 2013; Steinberg et al., 1997). Par ailleurs, les groupes de soutien peuvent tenir un rôle important parmi les ressources sociales des parents immigrants (n=6) (Tableau 1.3). Ils contribuent notamment à leur donner un espace d’expression et d’échange sur leur situation particulière (Alvarado, 2004; Bailey et al., 1999; Cohen, 2013; Kramer-Roy, 2012). Néanmoins, il arrive que ces groupes soient inaccessibles à des parents pour une raison linguistique ou parce qu’ils craignent les jugements d’autrui (Radell et al., 2008; Won et al., 2004).

Les facteurs culturels rassemblent tout ce qui touche au bagage identitaire des parents. Une partie de ces acquis se rapportent à la perception des rôles de l’homme et de la femme, du père et de la mère, ainsi que les représentations des liens familiaux. Comme l’indique le tableau 1.3, huit écrits scientifiques relèvent ces éléments. Il apparaît, par exemple, que les mères assument davantage de responsabilités auprès de l’enfant que les pères, suivant leur origine culturelle. En effet, elles sont généralement désignées pour gérer tout ce qui touche à l’enfant et l’organisation des services le concernant (Bateson, 2013; Steinberg et al., 1997). Dans certaines cultures (Asie de l’Est ou du Sud), les mères sont souvent identifiées comme responsables de la déficience de leur enfant, les amenant à ressentir de la gêne dans des démarches de demande d’aide pour elles-mêmes (Kramer-Roy, 2012; Won et al., 2004). À propos des liens familiaux, le soutien, la cohésion et l’honneur ressortent particulièrement chez les populations latino-américaines (Alvarado, 2004; Cohen, 2013; Steinberg et al., 1997). L’honneur familial intervient également dans le cas de la famille chinoise étudiée par Sham (1996), mais davantage en ce qui a trait aux répercussions de la performance scolaire de l’enfant sur l’ensemble de la famille.

Toujours parmi les facteurs culturels, les représentations de l’enfant, de son développement, ainsi que les perceptions de l’éducation et des soins à lui apporter modulent les stratégies de soutien adoptées par les parents, selon 12 écrits scientifiques (Tableau 1.3). À ce propos, Pondé et Rousseau (2013) expliquent que la perturbation des habiletés langagières pousserait généralement les parents immigrants à consulter. Par ailleurs, dans certaines

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plan de l’éducation plus générale, Cohen (2013) met l’accent sur les comportements convenables et le respect comme des préceptes fondamentaux priorisés au sein des familles latino-américaines, parfois davantage que d’autres objectifs comme l’indépendance. Quant aux services et aux soins à donner à l’enfant, les parents latino-américains tendent à créer un environnement agréable et sans conflit afin de le protéger (Cohen, 2013), allant quelquefois jusqu’à des attitudes pouvant passer pour de la « surprotection » (Steinberg et al., 1997).

Également comme facteurs culturels modulant le recours aux ressources de soutien, les représentations des difficultés de l’enfant ainsi que des causes possibles de celles-ci ressortent dans 12 publications scientifiques (Tableau 1.3). La déficience peut trouver du sens pour les parents sur le plan de la spiritualité, notamment chez les populations d’origine asiatique (Heer et al., 2012; Pondé et Rousseau, 2013). Plusieurs auteurs mentionnent la référence à la volonté divine qui s’exprime par le biais des difficultés de l’enfant, soit de manière positive (Rhoades et al., 2004; Steinberg et al., 1997; Welterlin et LaRue, 2007), soit comme une punition (Kaur-Bola et Randhawa, 2012; Kramer-Roy, 2012; Welterlin et LaRue, 2007). Lorsque les incapacités sont perçues comme un don de Dieu, les thérapies offertes à l’enfant peuvent apparaître comme une interférence avec la volonté divine (Rhoades et al., 2004). La stigmatisation des parents et de leur enfant avec des besoins spéciaux proviendrait de pressions culturelles non dites, selon l’interprétation de Kaur-Bola et Randhawa (2012). Considérant cet environnement, les parents tendent à se replier sur eux-mêmes et à cacher leur enfant (Croot et al., 2012; Rhoades et al., 2004). Les représentations négatives et le rejet peuvent aussi venir de la famille élargie, avec pour conséquence l’absence de soutien de leur part (Kramer-Roy, 2012). Reste l’importance pour les parents de croire en la réversibilité des troubles de l’enfant, les poussant parfois à opter pour d’autres façons d’expliquer la situation (Pondé et Rousseau, 2013; Welterlin et LaRue, 2007). Dans ces cas, ils espèrent une guérison ou une compensation du retard de développement par l'enfant (Durà-Vilà et Hodes, 2009; Heer et al., 2012; Won et al., 2004).

Outre les causes des difficultés de l’enfant, sept écrits scientifiques soutiennent que la manière de les prendre en charge diffère selon les représentations parentales des médecines occidentale et traditionnelle (Tableau 1.3). Le recours à la médecine traditionnelle (médication naturelle, représentant religieux, cérémonies, etc.) se retrouve couramment dans les études (Bateson, 2013; Croot et al., 2012; Sham, 1996; Steinberg et

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al., 1997; Won et al., 2004). Toutefois, cette utilisation est généralement dissimulée par les parents, par peur de l’incompréhension des intervenants occidentaux (Pondé et Rousseau, 2013; Welterlin et LaRue, 2007). Bateson (2013) explique comment les mères réfugiées de Somalie, très attachées à leur médecine traditionnelle, éprouvent des difficultés à se procurer la médication adéquate et à en assumer le coût.

Un dernier aspect culturel, abordé dans huit recherches, touche aux perceptions que les parents ont des intervenants, illustrant les tensions entre la médecine traditionnelle et celle occidentale (Tableau 1.3). Les écrits scientifiques illustrent comment les parents ont parfois des représentations négatives des fournisseurs de services (Alvarado, 2004; Bailey et al., 1999; Balcazar et al., 2012; Croot, 2012; Pondé et Rousseau, 2013; Rhoades et al., 2004). Par exemple, si les parents refusent d’accepter les difficultés de leur enfant, un intervenant peut être considéré comme « intrusif » en prônant une évaluation (Pondé et Rousseau, 2013). Le manque de compétences, de sensibilité culturelle et d’honnêteté est aussi désigné par les parents comme une lacune (Alvarado, 2004; Balcazar et al., 2012; Croot, 2012). Par ailleurs, ils éprouvent parfois des craintes envers les services provenant du gouvernement, en raison d’expériences passées ou des conditions de vie dans leur pays d’origine (Bailey et al., 1999; Croot, 2012). Face à des méthodes plus interactives (approche centrée sur la famille) qui ne leur sont pas connues, les parents immigrants peuvent se sentir déconcertés, remettant en question le professionnalisme des intervenants (Rhoades et al., 2004).

Suite à la description des facteurs culturels et en lien avec ces derniers, les facteurs communicationnels découlent souvent du parcours migratoire des parents. Comme l’illustre le tableau 1.3, 13 recherches évoquent la barrière linguistique comme limitant l’accès aux mesures d’aide pour les parents immigrants d’un enfant qui présente des difficultés. Suivant leur niveau de maîtrise de la langue, les parents parviendront ou non à transmettre leurs attentes aux professionnels. En outre, certains craignent de perdre leurs services d’aide s’ils se plaignent de l’inadéquation de ces derniers (Croot et al., 2012). Et lorsqu’une erreur survient dans les demandes de services ou de financement (dans les formulaires suite à des difficultés de langue, par exemple), les parents manquent parfois des ressources auxquelles ils auraient droit (Sham, 1996). Il semble néanmoins que même quand les parents immigrants maîtrisent la langue du pays d’accueil, les échanges avec les

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professionnels dans leur discours peut entraîner de la méfiance chez les parents (Kaur-Bola et Randhawa, 2012).

Tableau 1.4. Les perceptions parentales, les attentes des parents et l’évolution du recours aux mesures de soutien

Facteurs modulant le recours aux mesures de soutien Perceptions et attentes des parents Évolution du recours Perception des service s, besoins non satisfaits Décalage entre l es attentes parents vs. inte rvenants Accompagneme nt à long terme Changement de compréhen sion de la déficience Alvaro (2004) X Bailey et al. (1999) X X Balcazar et al. (2012) X Bateson (2013) Bywaters et al. (2003) X Cohen (2013) X X Croot (2012) X X Croot et al. (2012) X X Durà-Vilà et Hodes (2009) X Heer et al. (2012) X Kaur-Bola et Randhawa (2012) X Kramer-Roy (2012) X X X Pondé et Rousseau (2013) X X Radell et al. (2008) Rhoades et al. (2004) Sham (1996) X Steinberg et al. (1997) X Welterlin et LaRue (2007) X Won et al. (2004) Yu (2013) X X X

Pour clore la réflexion sur les facteurs influençant l’utilisation des prestations de soutien, les perceptions parentales des services de soutien méritent d’être explorées. Comme le souligne le Tableau 1.4, 12 écrits scientifiques parmi les 20 retenus évoquent ce thème, soit sous l’angle des attentes non comblées, soit à propos du décalage entre les attentes des parents et celles des intervenants.

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À une exception près (Welterlin et LaRue, 2007), toutes ces études mettent en évidence les retombées des attentes parentales et du niveau de satisfaction concernant les mesures d’aide sur les choix des ressources de soutien (Bailey et al., 1999; Cohen, 2013; Durà-Vilà et Hodes, 2009). La difficulté d’accéder aux services est relatée (Balcazar et al., 2012; Sham, 1996; Yu, 2013), de même que les investissements (en transport, en nourriture spécifique, en financement) nécessaires pour envoyer un enfant dans une structure formelle (la garderie, l’école, etc.) (Croot et al., 2012).

En général, les parents mettent en avant l’importance de la collaboration entre les différents organismes (Kramer-Roy, 2012). Tout comme la perception des ressources de soutien guide les parents dans leurs choix, la divergence entre les attentes parentales et les objectifs des intervenants concernant l’enfant, relevée par sept publications, peut amener à un refus de l’aide proposée (Tableau 1.4). Il arrive que la valorisation de l’indépendance de l’enfant et le développement de ses capacités à le devenir, visés habituellement par les modèles d’intervention occidentaux, entrent en conflit avec les projets d’avenir que les parents peuvent avoir pour leur enfant (Alvarado, 2004; Cohen, 2013). Ce décalage peut d’ailleurs expliquer le manque d’implication des parents dans les démarches des professionnels (Croot, 2012; Kramer-Roy, 2012; Welterlin et LaRue, 2007). La divergence des perceptions peut aussi se situer dans la représentation de l’enfant avec une incapacité, les parents le considérant comme original et dénonçant le système scolaire, puisque celui-ci serait incapable d’accepter la diversité (Pondé et Rousseau, 2013).

Évolution des attentes parentales de soutien

La dernière question de l’étude de la portée vise à mieux comprendre l’évolution des attentes en ce qui a trait aux mesures d’aide chez les parents immigrants avec l’avancée en âge de l’enfant qui présente des besoins particuliers. Huit écrits scientifiques évoquent ce thème, comme mentionné dans le tableau 1.4. Deux recherches expliquent comment, en percevant différemment les difficultés de leur enfant (de négatif à positif ou neutre, de causes religieuses à médicales, etc.), les parents modifient leur représentation des ressources de soutien et acceptent alors d’y avoir recours (Croot et al., 2012; Kaur-Bola et Randhawa, 2012). Dans les six autres écrits, les préoccupations se centrent sur l’accompagnement à long terme de l’enfant (Tableau 1.4). Bailey et ses collaborateurs

Figure

Figure 1.1. Résultats des requêtes faites auprès des bases de données
Tableau 1.1. Description des 20 écrits scientifiques retenus  Auteurs
Tableau 1.2. Synthèse des mesures de soutien traitées dans les 20 écrits scientifiques
Tableau 1.3. Facteurs sociodémographiques, soutien social, composantes culturelles           et communicationnelles modulant le recours aux mesures de soutien
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