Les représenta+ons
phonologiques des enfants
dysphasiques : données actuelles
et perspec+ves
Christelle MAILLART* & PAULINE QUÉMART° *Université de Liège -‐ Christelle.maillart@ulg.ac.be °Université de Poi+ers
5ème Journées de PhonéHque Clinique, 24 octobre 2013, Liège
Dysphasie / SLI
specific language impairment
! Trouble de développement du langage
! En l’absence de troubles auditifs, intellectuels, émotionnels, neurologiques
! Touche compréhension et /ou de l’expression du langage parlé ! 5-‐8% des enfants Age cogniHf ds la norme Age linguisHque inférieur
AXeintes linguisHques
! Nombreux niveaux linguisHques touchés
(phonologie, lexique, morphosyntaxe)
! Profil langagier hétérogène mais le plus souvent avec aXeintes en phonologie et en morphosyntaxe
! Dysphasie phonologico-‐syntaxique
Origine des troubles
! Plusieurs
pistes envisagées
et parfois
compaHbles f. Bishop 1992)
! Déficit spécifique grammaHcal (Gopnik, Van der Lely, etc.)
! Déficit mnésique (Gathercole & Baddeley) ! LimitaHon des capacités de traitement
(Leonard, etc.)
! Déficit phonologique / acousHque (Tallal, Chiat, etc.)
! Déficit non linguisHque …
La piste phonologique
! Le déficit phonologique peut, à lui seul, générercertaines difficultés morphosyntaxiques (Chiat, 2001)
! les éléments linguisHques les plus abstraits ne peuvent être acquis que grâce à l’input linguisHque qui doit donc être analysé finement
! également, moins il y a transparence sémanHque, plus la phonologie est importante
Retard seulement ?
! ProducHons quanHtaHvement différentes
mais
qualitaHvement similaires :
! phonèmes maîtrisés ou non, etc.
! développement phonologique apparemment idenHque
! Les producHons semblent
similaires à
celles d’enfants plus jeunes
.
! Pour vérifier cela : comparaison avec des enfants de même niveau langagier (appariés sur le MLU – mean length u1erance)
Mais aussi impact théorique :
Si difficultés spécifiques en phonologie quand le niveau langagier est neutralisé,
alors arguments pour les théories phonologiques
Etat de l’art
! présence de différences dysphasiques <contrôle
! déficit plus marqué en phonologie, même si tableau langagier déficitaire
! indépendamment de la langue (anglais, italien, hébreu & espagnol)
! troubles présents même avec des langues cibles ayant des propriétés phonologiques différentes (ne s’exprimant pas nécessairement de la même façon dans toutes les langues)
En français ?
! Retrouve-‐t-‐on ceXe
faiblesse en
phonologie
également en
français
?
aucune donnée descripHve disponible !
! ParHcularités phonologiques
liées au
français ? indices déficitaires idenHques ?
Corpus de langage spontané francophones Maillart & Parisse, IJCLD, 2006
! Appariement sur le MLU
Les enfants contrôles sont choisis dans une tranche d’âge qui correspond au MLU moyen des sujets SLI (dysphasiques)
Type Nombre de sujets
Age MLU Inventaire phonétique SLI 8 8;6 (1;1) 3.7 (1.5) 23.1 (2.75) SLI 8 3;11 (0;7) 2.4 (0.3) 17.9 (4.49) Contrôles 8 4;0 (0) 3.7 (1.0) 22.5 (3.62) Contrôles 8 2;3 (0) 2.7 (0.8) 19.5 (3.50)
Childes
*CHI: sait pas nager%pho: se pa laʒe (phonologie de l’enfant)
%mod: se pa naʒe (cible phonologique adulte)
Erreurs phonologiques
! Codage childes – API
! Nombre total d’énoncés: 4158 ! Nombre total de mots: 13312
• Analyses par mot, structure syllabique, phonème, etc.
Phonèmes corrects (% RC)
77 92,6 75,5 80,3 50 55 60 65 70 75 80 85 90 95 Bas-‐MLU Haut-‐MLU Contrôle SLIEffets d’âge (p = .004), de groupe (p < .0001) et interaction age x type (p = .02)
les difficultés phonologiques des enfants SLI se marquent surtout chez les plus âgés
72 89,3 68,4 75,8 50 60 70 80 90 100 Bas-‐MLU Haut-‐MLU Contrôles SLI 83,8 96,3 82 84,7 50 60 70 80 90 100 Bas-‐MLU Haut-‐MLU Consonnes (%RC) Voyelles (%RC) Effets d’âge (p < .0001), de groupe (p < .0001) interaction age x groupe (p = .002) Effets d’âge (p = .02),
de groupe (p = .0008), pas d’interaction age x groupe
Consonnes/voyelles
Retard uniquement ?
! Globalement, on retrouve en français lafaiblesse en phonologie des enfants SLI
! Mais il y a des résultats spécifiques:
! une faiblesse aussi grande sur les voyelles que sur les consonnes
il y a moins d’erreurs sur les voyelles que sur les consonnes, mais l’effet sur les SLI est plus significaHf è marqueur ?
Développement ?
! Effet développemental
! À MLU égal, chez les jeunes enfants (MLU<2), pas de différence phonéHque
! À MLU égal, chez les plus grands (MLU>3), différence phonéHque importante
! nécessité d’études longitudinales complémentaires
Ces données en producHon sont-‐elles un
bon reflet de ce qui est stocké, mémorisé ?
Les représentaHons
phonologiques ?
! InformaHons sonores (et visuelles)
stockées en mémoire pour chaque mot
(Anthony et al., 2010; Gillon, 2002).
! uHlisées pour reconnaître, produire,
manipuler des mots
Stackhouse & Wells,
1997
Pourquoi s’intéresser aux
représentaHons phonologiques ?
! RP jouent un rôle important dans laconscience phonologique et le développement du langage
! Conscience phonologique
! Capacité à manipuler la structure des sons du langage
! Fort prédicteur du développement du langage écrit (Gillon, 2004)
! Si faible qualité des RP à risque pour le langage écrit
! Influence des RP dans la créaHon des
programmes moteurs pour la parole
(Stackhouse & Wells, 1997)
! Importance d’avoir des représentaHons
précises pour le développement lexical et
syntaxique
Comment se développent les
représentaHons phonologiques ?
! IniHalement holisHques, globales, elles se
précisent avec le développement lexical
(hypothèse de la restructuraHon lexicale :
Mestala & Walley, 1998)
! S’affinent jusqu’à 7 /8 ans avec la maitrise
segmentale du langage écrit (Fowler,
1991 ; Elbro et al., 1998).
Comment évaluer les
représentaHons phonologiques ?
! IntervenHon dans des tâches de
producHon (mais pas une évaluaHon
directe)
! intérêt pour des tâches sans producHon
de la parole
Jugement phonologique / DétecHon de mauvaise
prononciaHon /kobogan/ décision lexicale /kobogan/
Mot connu ou mot fantôme ?
Les épreuves
Principe : modifier la forme sonore d’un mot connu
QuesHon : détecHon de ceXe modificaHon ?
Sensibilité de ces épreuves
! Dépend des sHmuli
! Taille des erreurs à détecter
« maximal mismatch » : plusieurs traits arHculatoires de différentes (voisement, mode, lieu)
« minimal mismatch » : un seul trait (ex. lieu seul, van Alphen et al., 2004) ! Si trop évidente : peu discriminante
En pathologie ?
! Sous quelle forme les enfants
dysphasiques stockent-‐ils leurs
représentaHons phonologique ?
Respect de la structure syllabique ?
Maillart et al., JSLHR, 2004
Décision lexicale pour des mots plurisyllabiques
• Respect du nombre de syllabes ?
téléphone (CV-‐CV-‐CVC) à téXphone (CV-‐CVC)
• Respect du nombre de phonèmes ?
téléphone (CV-‐CV-‐CVC) à téléphoX (CV-‐CV-‐CV)
• PosiHon contrebalancée (PI – PM-‐ PF)
! 25 enfants dysphasiques – 51 enfants
contrôles appariés par SES, QI, niveau
vocabulaire récepHf
20 30 40 50 60 70 80 90 100début milieu fin début milieu fin
% ré po ns es c or re ct es
Enfants contrôles Enfants dysphasiques
syllabe
ModificaHon syllabique : dysphasiques = contrôles Pas d’effet de groupe
Pas d’effet de posiHon
20 30 40 50 60 70 80 90 100
début milieu fin début milieu fin
% ré po ns es c or re ct es
Enfants contrôles Enfants dysphasiques
phonème
ModificaHon syllabique : dysphasiques < contrôles InteracHon groupe * posiHon
à représentaHons précises « à un phonème près », PI/PF
Quelle précision phonémique ?
Maillart et al., Enfance, 2004
Décision lexicale pour des mots plurisyllabiques, ModificaHons avec respect de la structure du mot
• SubsHtuHon par un phonème proche labin pour lapin
• SubsHtuHon par un phonème éloigné larin pour lapin
• PosiHon contrebalancée (PI – PM-‐ PF) 50 60 70 80 90 100
Phonèmes proches Phonèmes éloignés
dysphasiques contrôles
à représentaHons précises « à un trait arHculatoire près »
Analyse du type d’erreurs
McNeil & Hesketh, IJLCD, 2010
• Étude développementale, 139 eƒs anglophones (4-‐>7 ans)
• Jugement d’erreur de prononciaHon avec présentaHon d’images
• 40 items – 24 erreurs
• SubsHtuHon de consonnes (1 trait – simple mismatch) • SubsHtuHon de voyelles (1 trait – simple mismatch) • TransposiHon de consonnes
• Suppression de consonnes
Effet d’âge
Effet du type d’erreurs
Subs. Voyelle = subs. Consonne < reste Les 3 items les plus difficiles de la tâche = subsHtuHon de voyelles
à Tâche valide pour évaluer les RP
à Importance pour être sensible d’inclure des modificaHons fines
Statut du phonème (V/C)
Quémart, MacLeod & Maillart (en prep)
• Enfants SLI , contrôle âge, contrôle voc • Jugement d’erreur de prononciaHon avec
présentaHon d’images
Erreur sur 1 trait
-‐> ampole pour ampoule -‐> labin pour lapin Erreur sur 3 traits
-‐> bégie pour bougie -‐> fufée pour fumée
InteracHon groupe * statut * trait
0 2 4 6 8 10 12 14 1 3 AMC SLI VMC 0 2 4 6 8 10 12 14 1 3 AMC SLI VMC
Effet d’interacHon groupe*trait Nombre de traits significaHf que SLI Effet du groupe n’interagit pas avec
le nombre de traits
Consonnes (% erreurs)
Voyelles (% erreurs)
! DétecHon des erreurs sur les voyelles et les consonnes similaires chez les enfants typiques
• Difficulté parHculière pour les voyelles en pathologie (en producHon et en
reconnaissance)
• Sous-‐spécificaHons des représentaHons phonologiques chez les enfants dysphasiques
D’où viennent ces difficultés à se consHtuer
des représentaHons complètes ?
! Capacité de discriminaHon ?
! Sensibilité à des informaHons sublexicales
! Régularités phonotacHques
! // hypothèses qui proposent un déficit d’extracHon de régularités chez les enfants SLI
Sensibilité à la probabilité phonotacHque ?
Quémart & Maillart (prep)
•
DétecHon de régularités staHsHques -‐>
analyse de la sensibilité aux probabilités
phonotacHques
! Tâche de décision lexicale
! Fréquence phonotacHque élevée
! MOT: souper; PM: capé
! Fréquence phonotacHque faible
! MOT: loto; PM: soto
% d’erreurs (mais similaires aux TR)
Résultat sur les mots (pourcentages d’erreurs) Pas d’interacHon avec le groupe
0 5 10 15 20 25 AMC SLI VMC high low 0 5 10 15 20 25 AMC SLI VMC high low
Résultat sur les pseudomots (pourcentages d’erreurs)
Pas d’interacHon avec le groupe
Les dysphasiques sont aussi sensibles que les enfants contrôle aux probabilités phonotacHques
Conclusion
! Les difficultés en producHon des enfantsdysphasiques s’accompagnement de
représentaHons phonologiques sous-‐spécifiées ! Différences subHles (voyelles, 1 trait) et pas
n’importe où (PI – PF)
! la précision des représentaHons phonologiques est un indice intéressant pour idenHfier des enfants fragiles (acquisiHon langage écrit)