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Unité Africaine à l’Expo 67

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Unité Africaine à l’Expo 67

Essai présenté à Anne-Marie Adams

ARCH 355 : Architectural History 4

par

Alexie Baillargeon-Fournelle 260379227

Université McGill 29 mars 2011

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2

L’Exposition universelle de 1967 soulignait avec vitalité le centenaire de la

Confédération du Canada. Événement déterminant pour la ville de Montréal qui se voulait bien plus qu’une simple commémoration, l’Expo 67 désirait être le théâtre d’un monde en

changement. Selon le commissaire général de la Compagnie canadienne de l’Exposition universelle de 1967 (CCUE), Pierre Dupuy, il était primordial pour un événement de cette envergure de « présenter un tableau fidèle de l’évolution de l’humanité» depuis la dernière exposition universelle.1Parmi les changements mondiaux les plus marquants des années soixante, l’accession de nombreux pays africains à leur indépendance s’imposait de facto. En effet, en 1958, l’Afrique ne comptait que neuf nations souveraines, (Fig.1, Annexe 1) en 1967, elle pouvait se vanter d’en avoir quarante-et-une. (Fig.2, Annexe 1) Devant cette émancipation à l’échelle continentale du peuple africain, Pierre Dupuy comprit rapidement l’importance d’avoir une forte représentation de ces nouveaux états pour assurer le respect du thème de l’Expo, la Terre des Hommes. En 1965, il entreprit un voyage de quatre mois dans une trentaine de jeunes pays pour les convaincre de venir participer à l’Exposition universelle de Montréal.2Sa visite sera couronnée de succès : au total, vingt-et-un pays africains s’inscrivèrent à l’exposition universelle, un record de participation qui ne sera battu qu’à l’exposition d’Hanovre en 2000.3

1

Archive de la municipalité de Montréal (AMM), Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11, microfiche 4-37 : C. Gendron : « M. Dupuy prévoit une forte participation des nouveaux pays d’Afrique à l’Expo 67 » dans Le Devoir,

14 mai 1965

Si les pays de la ligue arabe, soit la Tunisie, l’Algérie, le Maroc et l’Éthiopie décidèrent de

présenter un pavillon national séparé, seize nations de l’Afrique noire se réunirent pour former la

2 Ibid. 3

Aude Hendrick, “Les pays africains à l’expo 67 : symboles de changement,” Bulletin d’histoire politique 17, no 1 (2008): 89.

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Place de l’Afrique : Le Ghana, le Niger, la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Tchad, le Dahomey, la République Démocratique du Congo, la Tanzanie, le Gabon, le Sénégal, le Togo, le Kenya, l’île de Madagascar, l’Ouganda, le Rwanda et le Nigéria.4Cette structure de la Place de l’Afrique permet de constater l’importance des changements politiques qui ont eu lieu dans ce continent. Elle propose également un modèle pour repenser la coopération entre les pays africains suite à la décolonisation récente.

Une redéfinition de l’unité africaine

L’Afrique des années 60, encore marquée par les traces de la colonisation, est le théâtre de la montée du panafricanisme et de cette volonté d’union et de coopération entre les pays. Dans les années qui suivirent la conférence africaine de Berlin (15 novembre 1884-26 février 1885), l’Afrique fut séparée par les pays colonisateurs à l’aide de nombreux traités bilatéraux. Considérant les données géographiques peu détaillées des régions partagées, les nouvelles frontières étaient souvent établies suivant des méridiens et des parallèles. Lors de ce processus, la seule forme de consultation qui eut lieu auprès de la population africaine fut l’envoi de

commissions bipartites qui adaptaient ces tracés à la réalité du terrain en s’assurant auprès des habitants de ne pas couper des villages en deux.5

4

Compagnie canadienne de l’Exposition universelle de 1967 (CCUE), Rapport général de l’Exposition universelle

de 1967, tome 1, Ottawa, CCEU, 1969, 394.

Il va sans dire que le nouveau tracé ne prenait pas en compte les différentes traditions ethniques, culturelles et linguistiques du continent africain, séparant ainsi de nombreux groupes ethniques. (Fig.3-4, Annexe 1) Par la suite, conjointement au mouvement de décolonisation qui prit son essor dans les années soixante, l’idée d’une union continentale se développa dans les esprits. La conférence d’Addis-Abeba en

5

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4

1963 permit la concrétisation de ce panafricanisme avec la création de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) regroupant lors de sa fondation trente-deux nations. Les objectifs principaux de l’OUA étaient la décolonisation à court terme et le renforcement de la solidarité et l’unité des États africains à plus long terme.6La Banque africaine de développement (BAD), fondée la même année, et regroupant tous les pays africains sauf l’Afrique du Sud et les pays encore colonisés, constitue un autre exemple de coopération sur le plan continental.7C’est dans cette optique que se développa la Place de l’Afrique de l’Expo 67, permettant au visiteur de

comprendre cette nouvelle relation qui se développait au cœur du continent. Déjà, lors de son voyage en Afrique, Pierre Dupuy réalisa qu’un grand nombre de pays africains étaient « trop jeunes pour avoir réuni les hommes compétents qui leur permettraient de construire chacun un pavillon national avec un budget raisonnable.» Si le Sénégal et la Côte-d’Ivoire se trouvaient, au contraire, en mesure de réaliser leur propre pavillon, ils acceptèrent, par solidarité, de joindre les nations africaines dans un ensemble africain.8 Cette relation d’unité est également démontrée dans la conception de la Place de l’Afrique. L’intéressant jeu géométrique des toits présente une perspective où les différents pavillons de la Place de l’Afrique semble ne faire qu’un. (Fig. 5, Annexe 2) Le toit propose une suite de formes triangulaires, parfois prolongée. Servant à la fois de points de repères pour les visiteurs et de manches à air ou de ventilation9

6

Boutros Boutros-Ghali, L'Organisation de l'XQLWp̗DIULFDLQH. (Paris: A. Colin, 1968), 25.

, la géométrie du toit de la Place de l’Afrique semble annoncer la diversité des pays présents bien que solidement ancrés dans un ensemble cohérent. En fait, le complexe de la Place de l’Afrique est divisé en six groupes de pavillons répartis autour d’une place centrale. (Fig. 6, Annexe 2) Ces pavillons, construits en briques rouges et arborant de charmants petits toits inclinés jaunes et blancs,

7 Hélène d'Almeida-Topor, op. cit., 257.

8

Aude Hendrick, op.cit., 80.

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5

proposent un ensemble plutôt uniforme vu de l’extérieur. La place elle-même a été conçue de façon à recevoir un nombre indéterminé de pays pouvant occuper un espace lui aussi

indéterminé. Chaque pavillon national est indépendant et interdépendant à la fois. Ainsi, le visiteur peut visiter un pavillon sans devoir en traverser un autre, mais peut également avoir accès au pavillon suivant sans devoir y accéder par l’extérieur. La différentiation entre les pavillons des différents pays est également assurée à l’aide de changements de niveaux

savamment élaborés.10Le plan de la Place de l’Afrique (Fig.7, Annexe 3) révèle également cette relation d’interdépendance : les murs semblent s’emboîter, proposant une référence au pays précédant. Il est également intéressant de constater que le plan ne semble pas présenter de pavillons distincts et fermés, mais bien une continuité de murs perpendiculaires autour de la place centrale. L’aménagement de la Place permet également de réaliser l’importance

économique de la solidarité des pays par la présence d’une seule boutique, commune à tous les pays, sur la Place de l’Afrique. Cette boutique permettait entre autre de concentrer les

marchandises à un seul endroit et de libérer plus d’espace pour les pays exposants. Comme le souligne Pierre Billon, commissaire général de la Côte-d’Ivoire, «il faut dire que nos nations n’ont pas les pouvoirs monétaires de la plupart des pays, ce qui a contribué à l’entente

générale.»11De plus, certains pays ne pouvant assumer les coûts associés à l’envoi de troupes de danses folkloriques, une commission fut organisée pour sélectionner les meilleures troupes pour constituer un ensemble africain unique.12

10

CCEU, op. cit., tome 1, 393-394.

La commission fut invitée au festival mondial des arts nègres de Dakar, en avril 1966, un des premiers événements qui permit aux Africains de se rencontrer et de démontrer l’existence d’une extrême variété et d’une très grande richesse

11

AMM, op. cit., microfiche 4-96 : J. Trait, « Le s Africains à l’Expo : ‘‘Nous ne sommes pas venus pour faire des affaires, mais pour nous faire connaître », dans Le Petit Journal, semaine du 14 mai 1967.

12

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6

culturelle. Par ailleurs, cette nouvelle et inspirante solidarité encourage même la fierté africaine. Dans un billet rédigé dans La Presse par Pierre Olivier, un jeune homme noir qu’on prénomme Simple raconte la fierté qu’il a ressentie devant la vue de la Place de l’Afrique. « (…) j’ai été fier de voir que des hommes de couleur ont pu réussir à faire tellement de choses. On a toujours voulu nous faire croire qu’ils n’étaient pas capable de faire quoi que ce soit.»13Le jeune homme poursuit en démontrant que ce qui est réellement impressionnant, c’est de voir ces états qui n’étaient même pas indépendants il y a quelques années aux côtés des tous les autres pays. Bien qu’il reconnaisse les moyens réduits des nations africaines en comparaison avec les budgets des superpuissances de l’époque, il conclut en affirmant que ce qui est le plus touchant est «de voir qu’ils ont réussi à s’entendre entre eux et s’unifier.»14

La montée de la solidarité régionale

En plus de l’OUA, de nombreuses initiatives d’unions sur une base régionale ou culturelle eurent lieu dans les années soixante, démontrant l’importance de la solidarité des nations africaines à l’époque. Parmi eux, les pays francophone créèrent une union économique de 12 pays francophones nommée l’Organisation africaine et malgache de coopération

économique (OAMCE) à partir de 1966. Leur but était « d’organiser et développer la solidarité et la coopération économique entre les États membres ».15

13

AMM, op. cit., microfiche 4-136 : P. Olivier, « D’un petit nègre à un autre », dans La Presse, 11 juillet 1967.

Par ailleurs, il faut également

mentionner la création d’unions douanières, dont l’union douanière des États d’Afrique centrale (UDEAC) qui créait un marché commun entre le Congo, le Cameroun, le Gabon, la République

14 Ibid. 15

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7

centrafricaine et le Tchad.16Certains groupements régionaux furent également crées, comme le Conseil de l’Entente en 1958 qui réunit la Côte-d’Ivoire, le Dahomey, la Haute-Volta, le Niger et le Togo à partir de 1966. Leur but est « d’organiser et développer la solidarité et la coopération économique entre les États membres. »17Sensible à cet esprit de rassemblement et également aux dommages que les découpages coloniaux ont eu sur les nouveaux états, le choix des emplacements des pavillons nationaux fut étudié avec soin pour exprimer cette nouvelle solidarité. En effet, la répartition des pavillons distinctifs a été structurée en fonction de la langue, des groupes ethniques et des liens économiques politiques et économiques, comme l’Union douanière et économique de l’Afrique centrale.18 19Par ailleurs, il faut mentionner que si les pays africains prenaient le parti de présenter leur caractère particulier, trois pays du Conseil de l’Entente, soit la Côte-d’Ivoire, le Togo et le Niger, se sont réunis pour présenter un thème commun à l’expo 67 : l’Homme Artisan.20Le directeur du pavillon du Niger, Monsieur

Diaroumey souligne également que « c’est dans cette collaboration et cette entente parfaite que réside notre force.»21

16

Hélène d'Almeida-Topor, op. cit., 258.

De plus, suite à une série d’événements malheureux, huit pays africains francophones fermèrent leurs pavillons le 17 et 18 juillet. Ce différend avec la CCUE s’explique par le signalement de nombreux vols dans les pavillons du Gabon, du Congo, du Tchad et du Togo, un entretien souvent négligé des lieux et un manque de respect envers les dignitaires

17 Ibid. 18

CCEU, op. cit., 1636.

19

AMM, op. cit., microfiche 4-71 : B. Bantey, « African Place », dans The Gazette, 13 avril 1966.

20

AMM, op. cit., microfiche 4-101 : « Trois pays présentent l’artisan d’Afrique », dans La Presse, 16 mai 1967.

21

AMM, op. cit., microfiche 4-104-105 : C. Christoudilidis, « Inauguration des pavillons de la Côte d’Ivoire, du Niger et du Togo », Communiqué de presse du CCUE.

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africains.22La situation fut réglée par l’assurance de la CCUE de «prendre toutes les mesures nécessaires pour apporter une solution adéquate et durable.»23

L’image d’une Afrique forte et libre

L’aménagement de la Place de l’Afrique permettait aux visiteurs de l’Expo 67 de

comprendre la nouvelle liberté du peuple africain. Premièrement, la Place de l’Afrique proposait un attrait particulièrement invitant pour le visiteur, avec le jeu de ses toits de couleurs. (Fig.8, Annexe4) Si l’Exposition universelle de 1967 présentait une très grande diversité

d’expérimentations sur les toits, la plupart étaient peu visibles car le toit était positionné trop haut pour le regard du visiteur. Au contraire, dans le cas de la Place de l’Afrique, le toit était

remarquablement mis en valeur car la Place était installée sur une plateforme située en-dessous du niveau normal de l’île Notre-Dame.24 Par ailleurs, force est de constater que le

positionnement de la Place de l’Afrique sur l’île Notre-Dame jouait également un rôle majeur dans la perception de l’Afrique noire. Pour accentuer la présence des nations africaines,25

22

AMM, op. cit., microfiche 4-139 : S. Dolan, « Eight African Pavilions Close Up, Claming Unfair Expo Treatment », dans The Gazette, 18 juillet 1967.

le pavillon était situé proche des pavillons de l’Éthiopie, de la Tunisie, du Maroc et de l’Algérie, (Fig. 9, Annexe 4) créant ainsi un ensemble cohérent et démontrant les aspirations de l’OUA. L’emplacement de la Place de l’Afrique, au centre de l’île Notre-Dame, démontrait également l’intérêt des organisateurs à souligner l’arrivée de ces nouvelles nations. De plus, il est

intéressant de constater que la Place de l’Afrique était ceinturée de canaux, permettant à la fois

23

AMM, op. cit., microfiche 4-142 : O. Mamo, « Les pavillons africains rouvrent leurs portes », dans La Presse, 19

juillet 1967. 24

AMM, op. cit., microfiche 4-159 : S. Dhar, « Africa Place at Expo –Playful », dans The Gazette, 30 septembre

1967. 25

Le pavillon de l’île Maurice est isolé des autres pays africains. Cette situation peut peut-être s’expliquer par le fait que l’île Maurice était toujours lors de l’Expo 67 une colonie britannique.

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de démontrer sa nouvelle indépendance face au reste du monde, autant physique que politique, et propose une introspection quant au nouveau monde qu’il vient de créer. Les canaux permettaient aussi au vaporetto de s’arrêter à la Place de l’Afrique et ainsi fournir un accès supplémentaire au site. L’aménagement de la Place de l’Afrique proposait une grande place publique presque unique en son genre à l’Expo 67. Si la plupart des autres pavillons n’avaient que peu d’espace extérieur en comparaison avec les dimensions de leur bâtiment, la place de l’Afrique proposait une esplanade ouverte, calme et confortable.26Un souci fut également porté à l’accommodement des visiteurs par la plantation de grands arbres africains aux points de rencontre pour assurer le maximum d’ombre aux différentes allées du site.27 Bref, la présence de la grande place et des différentes allées permettaient une circulation fluide à travers le site, traduisant la nouvelle liberté du continent.

Des relents de colonialisme

Dans un autre ordre d’idée, malgré les efforts de M. Pierre Dupuy pour intégrer

respectueusement les pays africains, de nombreuses anomalies tendent à démontrer la présence de valeurs colonialistes. Tout d’abord, il faut savoir que pour permettre la création de la Place de l’Afrique, une demande fut instituée auprès du Bureau international des expositions (BIE) pour faire une entorse au règlement qui prévoit que dans une Exposition de première catégorie, les pays participants doivent construire leurs propres pavillons. La construction fut finalement entamée par la CCUE grâce à des contributions fédérales, provinciales et municipales. Les conditions de location étaient de trente dollars par pied de surface construite. Le loyer

26

AMM, op. cit., microfiche 4-159 : S. Dhar, « Africa Place at Expo –Playful », dans The Gazette, 30 septembre

1967. 27

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10

comprenait le prix de la construction, des installations électriques, de l’aménagement paysager et des jardins, de l’entretien et des services de sécurité. Cependant, certaines critiques tendent à démontrer qu’en fin de compte la proposition de la Compagnie de l’Exposition universelle ne comportait pas que des avantages. En effet, le site de la Place de l’Afrique représentait une superficie de 50 000 pieds carrés, ce qui représente un loyer total de 1 500 000 dollars.28En plus, il semblerait que les pavillons n’aient pas été pourvus de systèmes d’aqueduc. En tout, pour les 16 pays, seulement deux cabinets de toilettes furent aménagés : un pour femme et un second pour homme. La seule source d’eau courante est au fond de la Place, dans l’endroit où l’accès est interdit aux visiteurs. Il semblerait par ailleurs que les pavillons de la Place de l’Afrique n’aient pas été équipés de système de chauffage, bien que l’Expo se soit tenu du 27 avril jusqu’à la fin octobre.29 Le positionnement de la Place de l’Afrique en fonction des différents pays

d’influence de l’Expo 6730

28

AMM, op. cit., microfiche 4-147 : U. Lefebvre, « On a logé les pays africains dans de véritables ‘‘taudis’’ » , dans

Montréal-Matin, 28 juillet 1967.

semble également imposer une vision rétrograde de la Place de l’Afrique. Premièrement, l’aménagement de l’Expo 67 (Fig. 10, Annexe 5) positionnait les pays colonisateurs présents à l’Expo 67, soit l’Italie, la France, la Grande-Bretagne, la Belgique et l’Allemagne proche de grandes étendues d’eau. Si la Belgique était directement sur le Fleuve St-Laurent, l’Italie était sur le chenal LeMoyne, l’Allemagne, la France et la Grande-Bretagne sont sur le lac des Régates. Le pavillon de l’URSS, des États-Unis, celui du Canada et du Québec en plus de la Place des nations, étaient eux-aussi situées proche du rivage. Cette relation avec l’eau peut probablement s’expliquer avec l’aménagement incomparable de l’expo 67, bâtie sur une série d’îles dans le fleuve St-Laurent, éliminant la nécessité de clôture ou de barrière. Le

sentiment et l’air du temps est alors à la liberté et le site le rend bien : des îles Notre-Dame et

St-29 Ibid. 30

Pieter Sijpkes (Professeur de design en architecture à l’Université McGill) en discussion avec l’auteur , mars 2011.

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11

Hélène, les Montréalais ont une toute nouvelle vue sur leur cité et cela sans aucun contrainte massive.31La place de l’Afrique, quant à elle, se situait davantage à l’intérieur de l’île. Encerclée par trois canaux, elle semble occuper une place d’une importance moindre, davantage isolée du fleuve. Par ailleurs, il faut noter que le choix de l’architecte de la Place de l’Afrique a été imposé. L’australien John Andrews, alors recteur du programme d’architecture à l’Université de Toronto, n’était jamais allé en Afrique. Cette attitude traduisait un manque de sensibilité de la part de la compagnie. Le commissaire de la Côte-d’Ivoire, Pierre Billon, bien qu’il reconnaissait que sans l’appui de M. Pierre Dupuy peu de pays africains auraient participés à l’expo 67, constatait en effet que « toute la conception de la Place de l’Afrique est absolument fausse et nuit à certains pays exposants. Elle n’a rien de caractéristique de l’Afrique (…).» Il ajoutait que « si [les pays africains] avaient pu construire [eux-mêmes] leur pavillons, la Place d’Afrique aurait été une toute autre chose.»32 Pourtant, le directeur de l’aménagement, le Colonel Edward Churchill affirma que « la Place de l’Afrique présentera l’Afrique telle que la conçoivent et la voient les Africains. (…) Elle correspondra bien à cela plutôt qu’à la conception occidentale de l’Afrique. Je suis fermement convaincu que les Africains ne tiennent pas à venir construire des paillottes à l’Expo ou à y présenter quelque autre choses correspondant à l’image que nous nous sommes faite de leur contient. » 33Cette pratique démontre l’attitude qu’avaient les

planificateurs à cette époque, à procéder de haut en bas, sans vraiment faire de consultation au préalable. 34

31

Pieter Sijpkes (Professeur de design en architecture à l’Université McGill) en discussion avec l’auteur, mars 2011.

32

AMM, op. cit., microfiche 4-147 : U. Lefebvre, « On a logé les pays africains dans de véritables ‘‘taudis’’» , dans

Montréal-Matin, 28 juillet 1967. 33

AMM, op. cit., microfiche 4-74 : B. Chroll, « l’Afrique nouvelle à l’Expo 67 » , Communiqué de Presse, 1966.

34

François Desrochers (planificateur urbain à la Communauté métropolitaine de Montréal) en discussion avec l’auteur, mars 2011.

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En définitive, les efforts de la CCUE pour permettre aux nations africaines de participer à l’Expo 67ont pu illustrer à la face du monde entier les changements majeurs de la politique africaine. Différents organisations régionales purent également démontrer leur solidarité. Malgré quelques anomalies de la part de la Compagnie, une vingtaine de pays indépendants de l’Afrique purent, pour la première fois, démontrer leur diversité lors d’une exposition universelle. L’Expo 67 fut donc l’hôte d’une fête mondiale à la fois pour son centenaire et l’indépendance de ces nouvelles nations.

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13

Bibliographie

Ajala, Adekunle. 1973. Pan-Africanism: evolution, progress and prospects. [London]: A. Deutsch.

Almeida-Topor, Hélène d', L'Afrique au XXe siècle à nos jours. Paris: Armand Colin, 2010. Archive de la municipalité de Montréal , Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle

de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11, microfiche 4-71 : Bantey, B. « African Place », dans The Gazette, 13

avril 1966.

Archive de la municipalité de Montréal, Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11, microfiche 4-104-105 : Christoudilidis, C. « Inauguration des pavillons de la Côte d’Ivoire, du Niger et du Togo », Communiqué de presse du CCUE. Archive de la municipalité de Montréal, Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle

de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11,microfiche 4-74 : Chroll, B. « l’Afrique nouvelle à l’Expo 67 » ,

Communiqué de Presse, 1966.

Archive de la municipalité de Montréal, Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11,microfiche 4-159 : Dhar, S. « Africa Place at Expo –Playful », dans

The Gazette, 30 septembre 1967.

Archive de la municipalité de Montréal, Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11, microfiche 4-139 : Dolan, S. « Eight African Pavilions Close Up, Claming Unfair Expo Treatment », dans The Gazette, 18 juillet 1967.

Archive de la municipalité de Montréal, Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11, microfiche 4-37 : Gendron, C. : « M. Dupuy prévoit une forte participation des nouveaux pays d’Afrique à l’Expo 67 » dans Le Devoir, 14 mai 1965 Archive de la municipalité de Montréal, Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle

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dossier D.23560.11, microfiche 4-147 : Lefebvre, U. « On a logé les pays africains dans de véritables ‘‘taudis’’» , dans Montréal-Matin, 28 juillet 1967.

Archive de la municipalité de Montréal, Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11, microfiche 4-142 : Mamo, O. « Les pavillons africains rouvrent leurs portes », dans La Presse, 19 juillet 1967.

Archive de la municipalité de Montréal, Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11,, microfiche 4-136 : Olivier, P., « D’un petit nègre à un autre », dans

La Presse, 11 juillet 1967.

Archive de la municipalité de Montréal, Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11,., microfiche 4-96 : Trait, J., « Le s Africains à l’Expo : ‘‘Nous ne sommes pas venus pour faire des affaires, mais pour nous faire connaître », dans Le Petit

Journal, semaine du 14 mai 1967.

Archive de la municipalité de Montréal, Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11, microfiche 4-77 : « Le tam-tam à l’Expo ? », dans La Presse, 16

janvier 1967.

Archive de la municipalité de Montréal, Collection de la Compagnie de l’Exposition universelle de 1967, P67, Expo 67 et TDH, 516, Coupure de presse par thème : Place d’Afrique, dossier D.23560.11, microfiche 4-101 : « Trois pays présentent l’artisan d’Afrique », dans

La Presse, 16 mai 1967.

Boutros-Ghali, Boutros. L'Organisation de l'XQLWp̗DIULFDLQH. Paris: A. Colin, 1968.

Compagnie canadienne de l’Exposition universelle de 1967 (CCUE), Rapport général de

l’Exposition universelle de 1967, tome 1, Ottawa, CCEU, 1969.

Compagnie canadienne de l’Exposition universelle de 1967 (CCUE), Rapport général de

l’Exposition universelle de 1967, tome 3, Ottawa, CCEU, 1969.

Desrochers François (planificateur urbain à la Communauté métropolitaine de Montréal) en discussion avec l’auteur, mars 2011.

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Expo 67 (Montreal). 1967. Expo 67: guide officiel = Expo 67 : official guide. Toronto ; Montréal: Maclean-Hunter.

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politique 17, no 1 (2008).

Jasmin, Yves. 1997. La petite histoire d'Expo 67: l'Expo 67 comme vous ne l'avez jamais vue. Montréal: Eds. Québec/Amérique.

Sagay, J. O., and Derek A. Wilson. 1980. Africa, a modern history, 1800-1975. New York: Africana Pub. Co.

Sijpkes, Pieter, interviewé par Alexie Baillargeon-Fournelle, 25 mars 2010, interview 1, notes.

Je tiens à remercier pour leur soutien Olivier Vallerand, Annmarie Adams, Peter Sijpkes, François Desrochers, Yves Jasmin, Robert Desmarais, Roger Desmarais, les archives de la municipalité de Montréal et

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Annexe I –Cartes d’Afrique

Fig. 1. Pays indépendants en 195835

35

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17 Fig. 2. Indépendance des pays africains36

36

J.Sagay et Derek Wilson.. Africa, a modern history, 1800-1975. (New York: Africana Pub. Co, 1980), 316. 316.

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18

Fig. 3. L’Afrique à la veille du partage : États africains et colonies européennes37

37

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19

Fig. 4. L’Afrique à la phase finale du partage38

38

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Annexe 2 – Photos de la Place d’Afrique

Fig. 5. Place de l’Afrique39

39

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Fig. 6. Vue aérienne de la Place d’Afrique à l’Expo 6740

40

Bibliothèque et Archives Canada, Vue aérienne de la Place d’Afrique, < http://www.collectionscanada.gc.ca/expo/fullscreen/e000990843_f.html>

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22

Annexe 3- Plan de la Place d’Afrique

Fig. 8. Plan de la Place de l’Afrique41

41

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23

Annexe 4 – Jeux du toit de la Place d’Afrique

Fig. 7. Vue aérienne de la Place d’Afrique42

42

Bibliothèque et Archives Canada, Vue aérienne de la Place d’Afrique, < http://www.collectionscanada.gc.ca/expo/fullscreen/e000990843_f.html>

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Annexe 5 – Vue du Site de l’Expo

Fig. 9. Vue aérienne de l’Expo 67 et emplacement des pavillons africains43

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Fig. 10. Plan du site de l’expo 67 et son système d’influence44

44

Figure

Fig. 1. Pays indépendants en 1958 35
Fig. 5. Place de l’Afrique 39
Fig. 8. Plan de la Place de l’Afrique 41
Fig. 7. Vue aérienne de la Place d’Afrique 42
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