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Soutien des comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans par leur éducatrice en contexte d'éducation par la nature

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Academic year: 2021

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© Camille Lévesque-Desrosiers, 2020

Soutien des comportements prosociaux des enfants

âgés de 3 à 5 ans par leur éducatrice en contexte

d'éducation par la nature

Mémoire

Camille Lévesque-Desrosiers

Maîtrise en psychopédagogie - avec mémoire

Maître ès arts (M.A.)

(2)

Soutien des comportements prosociaux des enfants

âgés de 3 à 5 ans par leur éducatrice en contexte

d’éducation par la nature

Mémoire

Camille Lévesque-Desrosiers

Sous la direction de :

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II

Résumé

La présente recherche a pour but d’étudier les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans en contexte d’éducation par la nature. Six éducatrices et trente-six enfants en services de garde éducatifs qui font partie d’un projet d’éducation par la nature dans la région de Québec (Québec) participent à cette étude de cas. Un entretien individuel et une observation ont été menés afin de documenter les pratiques éducatives en soutien aux comportements prosociaux des enfants. Les résultats permettent d’identifier et de décrire les pratiques de chacune des six éducatrices à partir de l’analyse de ses propos et des données issues de l’observation menée dans son groupe. Il en ressort que les éducatrices soutiennent les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans en contexte d’éducation par la nature en misant sur le jeu en nature qui suscite des occasions d’interagir positivement avec autrui, en ayant confiance en les capacités des enfants, en étant sensible aux occasions pour soutenir leurs comportements prosociaux et en les saisissant, en observant les enfants et en documentant leurs comportements prosociaux. De plus, les résultats montrent qu’en nature, les éducatrices soutiennent l’autonomie des enfants et évitent parfois d’intervenir, demandent à un enfant de poser un comportement prosocial, modélisent un tel comportement, manifestent de l’intérêt envers les enfants, soutiennent leur autoévaluation ou leur donnent une rétroaction et enfin, utilisent la littérature jeunesse. Ces résultats sont discutés à partir des points de convergence entre les pratiques relevées chez les éducatrices. Ce mémoire de maîtrise contribue aux connaissances scientifiques sur l’éducation par la nature en petite enfance au Québec en ce sens où il documente pour une première fois dans ce contexte le soutien des éducatrices aux comportements nécessaires à la socialisation et à la réussite éducative des enfants.

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III

Table des matières

Résumé ... II Liste des tableaux ... VI

Liste des figures... VII

Remerciements ... VIII

Introduction ... 1

Chapitre I : Problématique ... 3

1.1. L’éducation par la nature ... 3

1.2. L’importance des comportements prosociaux chez les enfants âgés de 3 à 5 ans dans leur socialisation et leur réussite éducative ... 4

1.3. Les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans ... 5

1.4. Les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans en contexte d’éducation par la nature ... 8

1.5. Question de recherche ... 12

Chapitre II : Cadre conceptuel ... 13

2.1. L’éducation par la nature ... 13

2.1.1. La fréquence et la durée des séances ... 14

2.1.2. L’environnement naturel ... 14

2.1.3. La perspective de développement global ... 14

2.1.4. La pédagogie émergente ... 15

2.1.5. Le rôle de l’éducatrice ... 15

2.1.6. La collaboration ... 15

2.1.7. La prise de risques ... 16

2.1.8. La sensibilité écologique ... 16

2.2. Les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux ... 16

2.3. Le modèle bioécologique du développement de Bronfenbrenner ... 19

(5)

IV

Chapitre III : Méthode ... 23

3.1. L’approche méthodologique ... 23

3.2. Le projet d’éducation par la nature et les éducatrices qui le mènent ... 24

3.2.1. Présentation des éducatrices ... 25

3.3. Le matériel utilisé pour recueillir les données ... 27

3.3.1. Le canevas d’entretien individuel semi-dirigé ... 27

3.3.2. Le canevas d’observation des pratiques en soutien aux comportements prosociaux ... 28

3.4. La procédure de la collecte de données ... 29

3.5. La démarche d’analyse des résultats ... 30

Chapitre IV : Résultats ... 33

4.1. Les pratiques éducatives de Maude dans le groupe des Bouleaux ... 33

4.1.2. Les pratiques qui ont été observées chez l’éducatrice en lien avec son soutien aux comportements prosociaux ... 35

4.2. Les pratiques éducatives de Denise dans le groupe des Hêtres ... 36

4.2.2. Les pratiques qui ont été observées chez l’éducatrice en lien avec son soutien aux comportements prosociaux ... 37

4.3. Les pratiques éducatives de Mélissa dans le groupe des Pins ... 38

4.3.2. Les pratiques qui ont été observées chez l’éducatrice en lien avec son soutien aux comportements prosociaux ... 40

4.4. Les pratiques éducatives d’Audrey dans le groupe des Frênes ... 42

4.4.2. La pratique qui a été observée chez l’éducatrice en lien avec son soutien aux comportements prosociaux ... 42

4.5. Les pratiques éducatives de Marie-Ève dans le groupe des Frênes ... 43

4.5.2. La pratique qui a été observée chez l’éducatrice en lien avec son soutien aux comportements prosociaux ... 44

4.6. Les pratiques éducatives de Danielle dans le groupe des Pruches ... 45

4.6.2. Les pratiques qui ont été observées chez l’éducatrice en lien avec son soutien aux comportements prosociaux ... 46

Chapitre V : Discussion ... 48

5.1. Les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans dans un contexte d’éducation par la nature ... 48

(6)

V

5.1.1. Miser sur le jeu en raison des occasions pour l’enfant d’interagir positivement

avec autrui ... 48

5.1.2. Avoir confiance en les capacités des enfants ... 50

5.1.3. Être sensible aux occasions offertes pour soutenir les comportements prosociaux des enfants et les saisir ... 52

5.1.4. Observer les enfants et documenter leurs comportements prosociaux ... 53

5.1.5. Soutenir l’autonomie des enfants et éviter parfois d’intervenir ... 53

5.1.6. Demander à un enfant de poser un comportement prosocial ... 54

5.1.7. Modéliser un comportement prosocial ... 55

5.1.8. Manifester de l’intérêt envers les enfants, soutenir leur autoévaluation ou leur donner une rétroaction ... 56

5.1.9. Utiliser la littérature jeunesse pour soutenir les comportements prosociaux des enfants ... 57

5.2. Limites de l’étude ... 57

5.3. Pistes pour la recherche et pour la pratique ... 59

Conclusion ... 61

Références ... 64

Annexe 1 : Définitions des comportements prosociaux ciblés... 73

Annexe 2 : Canevas d’entretien individuel semi-dirigé ... 76

Annexe 3 : Canevas d’observation des pratiques en soutien aux comportements prosociaux ... 77

(7)

VI

Liste des tableaux

Tableau 1. Les pratiques observées chez Maude ... 35

Tableau 2. Les pratiques observées chez Denise ... 38

Tableau 3. Les pratiques observées chez Mélissa ... 40

Tableau 4. La pratique observée chez Audrey ... 43

Tableau 5. La pratique observée chez Marie-Ève ... 44

(8)

VII

Liste des figures

Figure 1. Liste des comportements prosociaux retenus dans le cadre de la présente étude . 19 Figure 2. Modèle bioécologique de Bronfenbrenner (2005) (à partir de la figure Modèle écologique de Bronfenbrenner [1979] de Charras, Depeau, Wiss, Lebihain, Brizard et Bronsard, 2012). ... 21

(9)

VIII

Remerciements

Dans un premier temps, j’aimerais remercier ma directrice Caroline Bouchard pour le soutien exceptionnel qu’elle m’a apporté au cours de maîtrise. Son encadrement m’a permis d’apprendre et développer mes compétences tant sur le plan de la recherche que sur le plan personnel. Je la remercie pour sa disponibilité, sa générosité, ses conseils éclairants et sa grande sensibilité. Je la remercie aussi pour sa bienveillance qui a su me donner le courage dont j’avais besoin en fin de parcours.

Je souhaite remercier Joanne Lehrer et Mathieu Point d’avoir accepté de faire partie du comité d’évaluation de mon mémoire. Leur contribution me permettra de bénéficier de leur précieuse expertise.

Je tiens également à remercier l’inspirante Michèle Leboeuf pour son chaleureux accueil et son aide, et pour l’enthousiasme qu’elle a porté pour mon projet. J’en profite pour remercier Julien, Anne-Sophie et Noémie pour leur soutien et pour les délicieux moments de complicité.

Mes remerciements les plus sincères vont également aux éducatrices qui ont participé à cette étude et aux enfants de leur groupe. Je les remercie de m’avoir si généreusement partagé leur vécu et de m’avoir fait confiance pour que je le raconte. Mon immersion dans leur quotidien m’a bouleversée et m’a inspirée.

La réalisation de ce mémoire de maîtrise n’aurait pas pu être possible sans l’extraordinaire appui de ma famille et de mes amis. Un merci spécial à mes parents, mes frères, Claude, Morille, Maude, Rodolphe, Audrey et Fabrice pour leurs encouragements. Merci à Anatole et Charlotte pour le bonheur infini qu’ils m’ont apporté chaque jour. Merci, mes tout-petits, de votre amour et de votre tolérance.

Finalement, je remercie de tout cœur Joseph qui a rendu tout ceci possible et dont la patience et le courage raisonnent dans chaque ligne que j’ai écrite et réécrite. Merci, Joseph, de m’avoir donné le temps pour mener mon projet et d’avoir bercé les enfants la nuit pour m’en donner l’énergie. Merci d’avoir été à mes côtés dans ce parcours tumultueux, de m’avoir écoutée, réconfortée, encouragée et félicitée.

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1

Introduction

La nature constitue un environnement de qualité pour le développement et l’apprentissage de l’enfant (Adams et Savahl, 2017 ; Cooper, 2015 ; Schäffer et Kistemann, 2012 ; Tremblay et

al., 2015). Elle est luxuriante par son dynamisme, en constant mouvement et évolution

(Davis, Rea et Waite, 2006 ; Kirkby, 1989). Elle n’est pas la même sous la pluie ou sous un soleil éclatant, sa lumière et ses ombres étant alors changeantes. Elle se transforme par les activités des êtres vivants qui y habitent et elle se modifie au fil des saisons (Davis et al., 2006). Ce dynamisme pique la curiosité des enfants et nourrit leurs expérimentations (Kirkby, 1989 ; Waite, 2010).

De plus, ce qui compose la nature se transforme au gré de l’imagination et des idées de ceux qui emploient ses éléments (Herrington et Studtmann, 1998 ; Kemple, Oh, Kenney et Smith-Bonahue, 2016 ; Jørgensen, 2016). Par exemple, pour l’enfant, une branche sera tantôt une épée, tantôt une baguette magique. On la cassera pour en faire des aliments. On la mettra contre un tronc pour bâtir une maison. Cette polyvalence permet de rejoindre une grande variété de besoins et d’atteindre des objectifs dans le jeu des enfants, à condition qu’ils utilisent un peu de créativité (Kirkby, 1989 ; McClain et Vandermaas-Peeler, 2016). Ainsi, un groupe d’enfants pourrait utiliser des cônes de conifères pour en faire un trésor et utiliser ces mêmes objets le lendemain pour les transformer en friandises.

Bref, les objets qu’on trouve en nature, qui s’avèrent riches par leur diversité et les multiples usages qu’ils proposent, donnent cours à une multitude de possibilités de jeux, ce qui augmente les occasions d’échanger avec les autres (Beyer et al., 2014 ; Davis et al., 2006 ; Dowdell, Gray et Malone, 2011 ; Fjørtoft, 2001 ; Fjørtoft et Sageie, 2000 ; Herrington et Studtmann, 1998 ; Jørgensen, 2016 ; Kemple et al., 2016 ; Schäffer et Kistemann, 2012). En nature, dans leurs jeux, les enfants âgés de 3 à 5 ans coopèrent, interagissent et communiquent avec leurs pairs (Dowdell et al., 2011 ; Herrington et Studtmann, 1998 ; Jørgensen, 2016). Cela leur donne l’occasion de faire usage de leurs comportements prosociaux, ce qui leur permet de les développer par le fait même (Dyment, 2005 ; McClain et Vandermaas-Peeler, 2016). En contexte d’éducation par la nature, les enfants apprennent à coopérer, à partager les trésors issus de leurs découvertes, à négocier, à résoudre des conflits

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2

et à demander pardon avec le soutien de l’adulte par exemple, autant de comportements prosociaux (Acar et Torquati, 2015).

Parallèlement, en contexte d’éducation par la nature, l’éducatrice a de multiples occasions pour soutenir les comportements prosociaux, les enfants en faisant grandement usage (Dyment, 2005 ; McClain et Vandermaas-Peeler, 2016). Elle peut alors agir de manière à les influencer positivement par ses pratiques éducatives, par exemple en passant par l’induction ou par le renforcement (Catania, 2007 ; Henderlong et Lepper, 2002 ; Ramaswamy et Bergin, 2009). L’éducation par la nature offre donc à l’éducatrice l’occasion de soutenir les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans. On en sait toutefois peu sur les pratiques qu’elles déploient pour soutenir ces comportements dans ce contexte extraordinaire. C’est pourquoi ce mémoire a pour visée d’étudier les pratiques éducatives en matière de soutien aux comportements prosociaux dans un contexte d’éducation par la nature.

Cette étude se divise en cinq chapitres. Le premier présente la problématique de la recherche en situant sa pertinence sur le plan social et scientifique. Le second définit le cadre conceptuel de l’étude. Les concepts de l’éducation par la nature et des pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux seront définis, et le modèle bioécologique du développement de Bronfenbrenner sera présenté. Le troisième chapitre présente la méthode qui est employée dans cette recherche. Le quatrième dévoile les résultats et le cinquième présente les interprétations qui s’en dégagent. Pour finir, une conclusion rappelle les principaux constats de l’étude.

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3

Chapitre I : Problématique

Ce chapitre présente la problématique de la recherche en soulignant la pertinence d’étudier les pratiques éducatives en matière de soutien aux comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans en contexte d’éducation par la nature. Après avoir circonscrit cette étude dans ce contexte éducatif, il montre l’importance des comportements prosociaux pour la socialisation et la réussite éducative des enfants de cet âge. Il fait ensuite état des enjeux entourant les pratiques des éducatrices en matière de comportements prosociaux, notamment en contexte d’éducation par la nature. Il fait ainsi valoir la pertinence d’ancrer l’étude des comportements prosociaux dans ce contexte qui semble favorable à leur soutien par les éducatrices, ce que peu d’études ont fait jusqu’à maintenant.

1.1. L’éducation par la nature

L’éducation par la nature a pris naissance dans les pays scandinaves dans la seconde moitié du 20e siècle pour se populariser ailleurs dans le monde, notamment au Royaume-Uni et aux États-Unis, et, plus récemment au Canada et en Australie. Entre autres par l’organisation Forest School, elle répond au pays au besoin de créer des contextes éducatifs où les enfants se développent et apprennent par le biais du jeu, parfois en prenant des risques sains, en nature (MacEachren, 2013).

L’éducation par la nature se caractérise par une activité prolongée non structurée qui prend place dans des environnements naturels extérieurs de manière fréquente et régulière (Davis et al., 2006). À l’opposé des activités dirigées et conçues par les adultes, c’est le jeu qui occupe l’horaire de la journée en nature, à l’exception de quelques routines et transitions, limitées à l’essentiel. En effet, les éducatrices qui expérimentent l’éducation par la nature avec leur groupe adoptent une pédagogie émergente, où le déroulement des activités du groupe ne suit pas une programmation préétablie par l’adulte, mais des intérêts des enfants qui émergent dans l’action, des questions, des idées, des jeux et des manipulations qui se présentent (Hyun, 2006 ; Stacey, 2011).

Dans l’éducation par la nature, les jeux naissent spontanément dans le groupe, se nourrissant de la contribution de chacun (Dowdell et al., 2011 ; Jørgensen, 2018). Leur émergence et leur évolution se forment donc par les idées et les actions des enfants et des adultes qui s’y engagent et par les interactions entre ces individus qui sont appelés à coopérer

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(Müller et al., 2017). Cette coopération n’est pas factice puisqu’elle est essentielle au jeu : c’est par la contribution de chacun qu’il se crée et évolue (Dyment, 2005 ; Harris, 2017).

Il en va de même pour les autres comportements prosociaux des enfants. Ces comportements renvoient à des actions observables qui sont orientées vers le bénéfice des autres ou le partage de coûts et bénéfices avec eux (Bouchard, Gravel et Coutu, 2006). Par exemple, des enfants qui entreprennent de pêcher des têtards avec leur éducatrice pour les observer pourraient coopérer pour construire un bassin et pour capturer les petits animaux. Cela les amènerait à partager le matériel, à laisser la chance à chacun de participer au jeu et à s’entraider avec le soutien de leur éducatrice.

En effet, en contexte d’éducation par la nature, des études démontrent que les enfants âgés de 3 à 5 ans encouragent leurs pairs, les incluent dans le jeu, partagent, donnent, coopèrent, aident, prennent soin des autres, réconfortent et félicitent, par exemple (Acar et Torquati, 2012, 2015 ; Dyment, 2005 ; Jørgensen, 2016 ; McClain et Vandermaas-Peeler, 2016). Ce contexte semble favorable à ce qu’ils manifestent des comportements prosociaux et qu’ils les développent avec le soutien de l’adulte. Cela n’a rien de banal, car les comportements prosociaux inscrivent les enfants âgés de 3 à 5 ans dans une trajectoire développementale positive (Bouchard, Sylvestre et Forget-Dubois, 2020 ; Bouchard, Sylvestre, Leblond et Trudel, accepté ; Eisenberg, Fabes et Spinrad, 2006).

1.2. L’importance des comportements prosociaux chez les enfants âgés de 3 à 5 ans dans leur socialisation et leur réussite éducative

La période de 3 à 5 ans est primordiale pour développer des comportements prosociaux chez l’enfant (Fabes, Martin et Hanish, 2009 ; Rubin, Coplan, Chen, Bowker et McDonald, 2011). De plus en plus habile à prendre en compte la perspective de l’autre et à communiquer (Goldstein, Kaczmarek et English, 2002 ; Rubin et al., 2011), l’enfant de cet âge manifeste des comportements prosociaux. Ainsi, au cours de cette période, il les modifie, les multiplie, les complexifie, de sorte qu’il s’outille graduellement d’habiletés à interagir positivement avec autrui (Bouchard, Coutu et Landry, 2012, 2014 ; DiLalla, Bersted et John, 2015 ; Dunn, Cutting et Fisher, 2002 ; Eisenberg, Eggum-Wilkens et Spinrad, 2015).

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Les comportements prosociaux permettent à l’enfant âgé de 3 à 5 ans d’établir des relations harmonieuses avec les autres enfants et avec les adultes, de régler des conflits interpersonnels et, ainsi, de s’intégrer aux groupes auxquels il appartient (Bouchard et al., 2012, 2014 ; DiLalla et al., 2015 ; Dunn et al., 2002 ; Eisenberg et al., 2015). En adoptant des comportements sociaux positifs auprès des autres, l’enfant peut créer et maintenir des amitiés, ainsi que des relations affectives positives avec les adultes qui soutiennent son développement et son apprentissage (Birch et Ladd, 1998 ; DiLalla et al., 2015 ; Eisenberg

et al., 2006). Ceux qui l’entourent sont susceptibles de l’apprécier et de rechercher son

contact, ce qui peut influencer positivement l’image qu’il a de lui-même et de sa place dans les groupes sociaux (Bélinda, 2016 ; DiLalla et al., 2015).

Ultérieurement, à l’âge scolaire, la réussite des enfants dans leurs apprentissages repose notamment sur la relation positive qu’ils entretiennent avec les autres enfants et avec les adultes (Coolahan, Fantuzzo, Mendez et McDermott, 2000). Autrement dit, les comportements prosociaux permettent à l’enfant d’avoir des interactions sociales positives, un élément clé de sa socialisation, elle-même garante de sa réussite éducative (Eisenberg et

al., 2006 ; Laferrière et al., 2011). D’ailleurs, l’UNESCO considère les comportements

prosociaux parmi les compétences du 21e siècle à développer pour s’épanouir et pour contribuer à la société (UNESCO, 2012, 2014).

Il est donc nécessaire, pour l’éducatrice, de soutenir ces comportements par ses pratiques éducatives. Lorsque l’éducatrice soutient l’enfant de 3 à 5 ans dans la manifestation de comportements prosociaux, elle l’appuie dans ses capacités à entrer en relation avec ses pairs de façon harmonieuse, à créer des amitiés et à les conserver en faisant des compromis et en usant de stratégies de résolutions de conflits de plus en plus diversifiées et efficaces par exemple (DiLalla et al., 2015 ; Dunn et al., 2002).

1.3. Les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans

Les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des enfants peuvent prendre plusieurs formes. L’éducatrice peut s’assurer qu’ils aient une multitude d’occasions de manifester des comportements prosociaux. Pour ce faire, elle gagne à miser sur les opportunités relationnelles qu’engendrent les jeux (De-Souza et Radell, 2011 ; Girard,

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Girolametto, Weitzman et Greenberg, 2011 ; Landry, 2014). Dans le jeu, l’éducatrice peut adopter des pratiques éducatives pour aviver l’engagement des enfants âgés de 3 à 5 ans et favoriser des interactions positives entre eux (Girolametto, Weitzman et Greenberg, 2004). Cela a pour effet d’augmenter la fréquence des manifestations de comportements prosociaux (Corbit, 2019 ; Girard et al., 2011). Plus précisément, l’éducatrice peut inviter les enfants à jouer et à discuter ensemble (Girard et al., 2011). Elle peut notamment suggérer des rôles pour les enfants dans le jeu, rediriger la conversation qu’elle a avec un enfant vers ses pairs et modeler des interactions positives (Girard et al., 2011).

Elle peut aussi soutenir la qualité du jeu de manière à amener les enfants à partager un objectif commun. Ce faisant, l’éducatrice influence non seulement la coopération, mais aussi le partage de matériaux entre les enfants, puisque le nombre de manifestations de ce comportement s’en voit augmenté (Corbit, 2019). Aussi, l’éducatrice doit savoir se retirer du jeu et éviter d’en devenir le chef d’orchestre pour éviter d’étouffer les initiatives d’actions prosociales (Girard et al., 2011).

Par ailleurs, lorsque les enfants vivent des différends avec leurs pairs, l’éducatrice doit les accompagner dans leurs tentatives de résolution d’un problème, sans leur imposer son point de vue (De-Souza et Radell, 2011). En effet, lorsqu’un problème survient, l’éducatrice peut inviter l’enfant âgé de 3 à 5 ans à réfléchir au comportement inapproprié, comme refuser de partager ou d’inclure un pair dans un jeu, pour le changer en comportement prosocial (Ramaswamy et Bergin, 2009). Par exemple, l’éducatrice peut amener un enfant à comprendre comment un pair peut se sentir lorsque l’enfant refuse de partager avec lui un livre et l’inviter à réfléchir au comportement qu’il pourrait alors manifester envers son pair.

On sait en effet qu’amener les enfants à réfléchir à la perspective de l’autre et les accompagner dans leur réflexion, notamment en invitant les enfants à s’exprimer et en donnant des rétroactions positives et constructives augmentent la fréquence des comportements prosociaux chez les enfants de cet âge (Cigala, Mori et Fangareggi, 2015 ; Mori et Cigala, 2019). Il est donc nécessaire que l’éducatrice accompagne efficacement les enfants de son groupe dans leurs résolutions de conflits.

Aussi, lorsque les enfants manifestent des comportements prosociaux, l’éducatrice peut renforcer les comportements en récompensant, en complimentant ou en félicitant l’enfant, ou

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en reconnaissant verbalement ses gestes par exemple (Catania, 2007 ; De-Souza et Radell, 2011 ; Henderlong et Lepper, 2002). À cet effet, on sait que les renforcements comme l’attention portée par les adultes sur les comportements prosociaux ont une plus grande portée que des récompenses, des compliments, des félicitations et des reconnaissances verbales (Bower et Casas, 2015 ; Catania, 2007 ; Henderlong et Lepper, 2002). Ces renforcements sont délivrés immédiatement et régulièrement lors de la manifestation d’un comportement prosocial et ils misent sur une motivation intrinsèque plutôt qu’extrinsèque (Bower et Casas, 2015). Par exemple, un enfant qui vivrait un moment agréable et intime avec une éducatrice en l’aidant à transporter du matériel pourrait ultérieurement vouloir initier un comportement prosocial pour l’intérêt et le plaisir qu’une telle action lui apporte.

Ainsi, l’éducatrice gagne à entretenir des interactions positives entre les enfants et elle, et entre les enfants eux-mêmes, et à se montrer réceptive et sensible aux efforts des enfants dans leurs tentatives de manifestations de comportements prosociaux. D’ailleurs, des études montrent qu’une forte relation affective entre l’éducatrice et chaque enfant de son groupe, teintée d’interactions chaleureuses et affectueuses, et d’une communication positive, peut modifier et encourager les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans (Ferreira, Cadima, Matias, Vieira, Leal et Matos, 2016 ; Myers et Morris, 2009 ; Spivak et Howes, 2011).

Pour offrir un tel soutien affectif aux enfants de son groupe, il faut que l’éducatrice soit disponible pour interagir avec eux, plutôt qu’occupée à des tâches ménagères ou à la préparation du matériel d’une activité par exemple. Il est nécessaire qu’elle soit disposée à saisir les occasions pour renforcer et modifier les comportements prosociaux. De plus, elle doit miser sur les opportunités pour les enfants de manifester ces comportements dans le jeu et soutenir les interactions qu’ils ont les uns avec les autres dans ce contexte pour encourager leurs initiatives (De-Souza et Radell, 2011 ; Girard et al., 2011 ; Landry, 2014).

L’Enquête québécoise sur la qualité des services de garde éducatifs, aussi connue sous le nom de Grandir en qualité, a examiné la qualité des services offerts dans 560 groupes d’enfants de 0 à 5 ans en services de garde éducatifs à l’enfance (Gingras, Lavoie et Audet, 2015). Les données recueillies à travers cette enquête rapportent que les éducatrices adoptent

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peu de pratiques éducatives pour soutenir les comportements prosociaux des enfants, comme la coopération et la résolution de problèmes, au travers du jeu (Gingras et al., 2015).

Or, l’éducation par la nature repose notamment sur l’accompagnement des éducatrices dans les jeux que créent ensemble les enfants (Davis et al., 2006 ; Louv, 2005 ; Lysklett et Berger, 2016 ; Schäffer et Kistemann, 2012 ; Tremblay et al., 2015), au bénéfice des comportements prosociaux (Dyment, 2005 ; McClain et Vandermaas-Peeler, 2016). Les adultes mobilisent effectivement des pratiques éducatives au sein des jeux qui émergent des enfants, dans un environnement propice aux manifestations de comportements prosociaux (Dyment, 2005 ; McClain et Vandermaas-Peeler, 2016).

1.4.Les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans en contexte d’éducation par la nature

L’éducation par la nature serait favorable à ce que les enfants s’engagent auprès des autres et à ce qu’ils fassent usage de leurs comportements prosociaux avec le soutien de leur éducatrice (Dyment, 2005 ; McClain et Vandermaas-Peeler, 2016). Une multitude d’occasions de soutenir les enfants dans leurs tentatives de manifestations de comportements prosociaux se présentent donc à l’éducatrice. Lorsque les enfants sont confrontés à des défis dans leurs jeux et leurs explorations, ils coopèrent et partagent le matériel pour les relever, et ils aident et prennent soin des autres pour les soutenir dans leurs prises de risques (McClain et Vandermaas-Peeler, 2016). Par exemple, un enfant peut tenir la main d’un pair pour l’aider à marcher en équilibre sur un tronc, lui donner des conseils, le prévenir d’un danger ou le féliciter de ses efforts (McClain et Vandermaas-Peeler, 2016). Dans ces situations, l’éducatrice doit permettre aux enfants de faire face aux risques qu’ils se sentent capables d’affronter et de prendre soin de leurs pairs à leur façon (Norðdahl et Jóhannesson, 2016). Il lui faut donc faire confiance aux enfants afin qu’ils relèvent leurs défis et qu’ils aident eux-mêmes les autres à en faire autant (Maynard, Waters et Clement, 2013)

L’éducatrice doit soutenir les initiatives que prennent les enfants du groupe pour s’engager auprès de leurs pairs (Maynard et al., 2013 ; Norðdahl et Jóhannesson, 2016). Les enfants ont alors l’occasion de décider d’initier un comportement prosocial et de le faire à leur façon, et cette liberté d’agir selon leur motivation intrinsèque agit en faveur de la manifestation de comportements prosociaux (Chernyak et Kushnir, 2018 ; Griebling, Elgas

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et Konerman, 2015 ; McClain et Vandermaas-Peeler, 2016). Les quelques routines et transitions en contexte d’éducation par la nature ne font pas exception à la règle. À ces moments, les enfants prennent en charge des tâches, comme préparer la nourriture ou transporter les bagages, ce qui les amène à poser de tels comportements envers les autres, comme aider, coopérer et partager (Schäffer et Kistemann, 2012).

En contexte d’éducation par la nature, l’éducatrice est disposée à saisir ces moments clés pour soutenir les comportements prosociaux des enfants de son groupe. En effet, en nature, les éducatrices ne se soucient pas du rangement et de la stérilisation du matériel, du ménage, des nombreuses transitions pour passer d’une activité à une autre ou de la préparation du matériel comme c’est le cas en milieu traditionnel (en installation en centre de la petite enfance [CPE]) par exemple. Ces tâches et ces transitions exerceraient une influence négative sur la disposition des éducatrices à soutenir les enfants dans les jeux au sein des services de garde éducatifs (Siraj-Blatchford, 2009). De plus, en milieu traditionnel à l’extérieur, les éducatrices supervisent parfois les jeux des enfants dans la cour du service de garde au lieu de soutenir leur développement et l’apprentissage (Coleman et Dyment, 2013). En contexte d’éducation par la nature, puisqu’elles sont dispensées de tâches chronophages et préoccupantes, et qu’elles font confiance aux enfants dans leurs prises de risques, elles peuvent être pleinement disponibles pour mettre en place des pratiques éducatives visant à soutenir les comportements prosociaux des enfants.

Acar et Torquati (2012, 2015) se sont notamment intéressés aux pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans en contexte d’éducation par la nature. Ils ont mené leur étude au sein du projet nommé Schlitz Audubon

Nature Center Preschool dans le Wisconsin (États-Unis). Ils y ont fait des observations des

comportements des enfants et des adultes, ainsi que des entretiens avec quelques enfants au sujet de leur relation avec la nature (Acar et Torquati 2012, 2015). Leurs résultats montrent notamment qu’en nature, les adultes expliquent aux enfants les effets de leurs actions sur les autres et sur leur environnement. Ils indiquent que les adultes expriment leurs attentes aux enfants pour qu’ils fassent preuve de respect envers autrui et la nature. Dans la même visée, ils signalent que les adultes expliquent les limites des enfants qui ont des besoins particuliers.

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Les résultats de leur étude révèlent aussi que pour amener les enfants à partager, à aider, à coopérer et à attendre leur tour, ou à modifier leurs comportements, les adultes leur donnent des rétroactions pour leur faire prendre conscience de la perspective de l’autre ou des effets positifs des comportements prosociaux sur les autres. Dans le même but, ils les invitent à manifester ces comportements envers ceux qui ont des besoins particuliers.

De plus, ils créent des situations où il est nécessaire, pour les enfants de recourir à des comportements prosociaux. Ils donnent notamment l’exemple d’une activité organisée par l’adulte où les enfants ont transporté des copeaux de bois avec des seaux et des brouettes pour couvrir une zone boueuse. Aussi, selon Acar et Torquati (2012, 2015), en contexte d’éducation par la nature, les adultes offrent des modèles aux enfants pour qu’ils créent des amitiés et qu’ils expriment leur esprit d’équipe ou leur gratitude, ou ils guident les enfants pour qu’ils le fassent.

Somme toute, l’étude menée par Acar et Torquati (2012, 2015) a documenté des pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans dans un contexte d’éducation par la nature. Elles font preuve du soutien de l’adulte en nature aux comportements qui sont sous-jacents à la socialisation des enfants de cet âge. Toutefois, dans l’étude d’Acar et Torquati (2012, 2015), les adultes dirigeaient une partie des activités quotidiennes, amorcées par une question ou par une idée de l’adulte et poursuivies par une randonnée dirigée autour du concept ou du thème proposé. Or, rappelons qu’en contexte d’éducation par la nature, le déroulement des activités du groupe ne suit pas une programmation préétablie par l’adulte, mais ce qui émerge dans l’action selon une pédagogie émergente. Il est ainsi nécessaire d’examiner les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des jeunes enfants en éducation par la nature. En effet, rappelons que ce contexte éducatif qui mise sur le jeu, c’est-à-dire sur les activités spontanées, donne aux adultes de multiples occasions pour soutenir les comportements prosociaux (Corbit, 2019 ; De-Souza et Radell, 2011 ; Girard et al., 2011 ; Landry, 2014).

À l’exception de l’étude d’Acar et Torquati (2012, 2015), à notre connaissance, aucune autre recherche ne s’est intéressée à ce que font les éducatrices en contexte d’éducation par la nature pour soutenir les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans. De plus, il se pourrait que le soutien aux comportements prosociaux en contexte d’éducation par la

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nature au Québec diffère de celui décrit par Acar et Torquati (2012, 2015) aux États-Unis. En effet, le réseau des services de garde éducatifs à l’enfance au Québec se distingue de ceux ailleurs dans le monde.

Au Québec, les services de garde éducatifs à l’enfance, que plus de 230 000 familles utilisent, comprennent les CPE, les services de garde éducatifs en milieux familiaux et les garderies subventionnées ou non (Gouvernement du Québec, 2019). Les CPE sont des organisations constituées de plusieurs groupes d’enfants âgés de 0 à 5 ans, regroupés par âges, au nombre de 5 à 10 enfants par éducatrice. La capacité moyenne d’accueil pour les CPE est de 61 enfants (Gouvernement du Québec, 2019). Les CPE sont des prestataires de services de garde reconnus et leurs services sont subventionnés. Ils sont gérés par des conseils d’administration majoritairement composés de parents. Quant aux milieux familiaux, ils peuvent accueillir jusqu’à 6 enfants âgés de 0 à 5 ans en même temps dans la résidence privée de la responsable du service de garde éducatif lorsque celle-ci n’est pas accompagnée d’une aide. Quand une aide-éducatrice est présente, jusqu’à 9 enfants peuvent constituer le groupe. La majorité des services de garde en milieux familiaux sont subventionnés (Gouvernement du Québec, 2019).

Les CPE et les services de garde éducatifs en milieux familiaux ont des obligations à respecter en lien avec la santé, la sécurité, le bien-être et le développement des enfants (Gouvernement du Québec, 2019). Leurs éducatrices articulent leurs pratiques autour d’un programme éducatif, Accueillir la petite enfance (2019), qui vise notamment à favoriser la qualité éducative des services offerts aux enfants (ministère de la Famille, 2019). Étant donné que les programmes et les mesures qui concernent le travail des éducatrices exercent une influence sur leurs pratiques éducatives (voir Bronfenbrenner, 1996), leur soutien aux comportements prosociaux en contexte d’éducation par la nature pourrait différer de celui documenté par Acar et Torquati (2012, 2015).

Parmi les services de garde éducatifs à l’enfance québécois, un intérêt grandissant pour l’éducation par la nature est observable depuis la toute récente apparition de projets menés dans la province, dont celui initié dans un quartier de la ville de Québec (Québec) par six éducatrices et par un organisme communautaire qui épaule ces praticiennes et coordonne le projet. Populaires au sein des médias traditionnels et des médias sociaux, les groupes en

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contexte d’éducation par la nature captent l’attention des éducatrices et des familles d’ici. Par exemple, depuis sa création, il a inspiré le projet Alex, pour « à l’extérieur », qui regroupe quatorze CPE à travers la province. Le soutien des éducatrices aux comportements prosociaux dans un contexte qui crée un tel engouement, mais qui est peu étudié au Québec, mérite d’être documenté.

En somme, l’étude des pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux dans un contexte où les enfants s’engagent dans des jeux en nature avec leurs pairs et avec leur éducatrice gagne à être menée au Québec. Compte tenu du rôle clé que jouent ces comportements dans la socialisation de l’enfant âgé de 3 à 5 ans et dans sa réussite éducative, il est nécessaire d’étudier le soutien des éducatrices dans ce contexte favorable aux comportements prosociaux.

1.5. Question de recherche

La présente étude vise à identifier et à décrire les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des enfants de leur groupe âgés de 3 à 5 ans dans un contexte d’éducation par la nature. De manière plus précise, elle tente de répondre à la question suivante : « Comment les éducatrices soutiennent-elles les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans en contexte d’éducation par la nature ? »

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Chapitre II : Cadre conceptuel

Ce chapitre présente les principaux concepts qui soutiennent cette recherche. Ainsi, les concepts liés à l’éducation par la nature et aux pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux seront tour à tour définis. Comme nous ancrons les concepts de la présente étude dans le modèle bioécologique du développement de Bronfenbrenner (2005), celui-ci sera ensuite présenté.

2.1. L’éducation par la nature

L’éducation par la nature peut prendre diverses formes et appellations, car elle n’impose pas une structure rigide aux éducatrices qui veulent l’intégrer à leur pratique éducative (Davis et

al., 2006). Concernant la petite enfance, et plus spécifiquement les enfants de 3 à 5 ans, on

la retrouve notamment sous les noms de « outdoor learning », « nature-based preschool » ou « forest school » en anglais. Dans le cadre de ce mémoire, l’appellation « éducation par la nature » sera privilégiée, considérant le contexte de l’éducation à la petite enfance dans lequel elle prendra racine, et du rôle central qu’y jouent les environnements naturels. En effet, il ne s’agit pas de dispenser à l’enfant un enseignement sur la nature, mais d’exercer sur lui une influence qui lui permet de se réaliser dans sa vie personnelle et sociale (Centre national de ressources textuelles et lexicales [CNRTL], 2012 ; Office québécois de la langue française, 2009)

Dans le choix du nom donné à cette approche innovante, la préposition « par » n’a rien d’anodin : l’enfant ne fait pas que se développer dans la nature, il se développe par celle-ci. Cela signifie que l’environnement dans lequel il joue, explore et s’adonne à ses activités de routines et de transitions (p. ex., l’accueil, le dîner) permet à l’enfant d’apprendre et de se développer. De manière plus précise, les enfants se développent par la nature dans la mesure où ils ne jouent pas dans ce milieu, mais ils jouent à travers lui. Ils touchent, sentent, goûtent, creusent, secouent, mélangent, attrapent, lancent, etc.

Tel qu’au sein du programme éducatif des services de garde éducatifs québécois

Accueillir la petite enfance, l’éducation par la nature place le jeu au cœur de ses fondements,

lequel est considéré comme l’outil par excellence pour que l’enfant apprenne et se développe, et pour l’accompagner (ministère de la Famille, 2019). Plus précisément, les éducatrices y

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adoptent une pédagogie émergente où leur soutien passe par l’activité spontanée, par le jeu. Ainsi, le chemin que les expériences d’apprentissage empruntent se dessine au fil des actions de ceux qui participent aux jeux (Stacey, 2011). Les enfants et l’éducatrice du groupe acceptent de ne pas connaître à l’avance le point d’arrivée, ni le sentier pour s’y rendre, ni la distance à parcourir, ni les différentes trajectoires que la route pourrait prendre.

Selon Leboeuf (2017), l’éducation par nature respecte les huit principes que l’on pourrait nommer ainsi : 1) la fréquence et la durée des séances ; 2) l’environnement naturel ; 3) la perspective de développement global ; 4) la pédagogie émergente ; 5) le rôle de l’éducatrice ; 6) la collaboration ; 7) la prise de risques ; et 8) la sensibilité écologique. Ces principes sont définis dans les paragraphes suivants.

2.1.1. La fréquence et la durée des séances

Dans l’approche d’éducation par la nature, les enfants ont l’occasion d’être en milieu naturel de manière fréquente, régulière et prolongée, et ce, tout au long de l’année, peu importe les conditions météorologiques (Davis et al., 2006 ; Louv, 2005 ; Lysklett et Berger, 2016 ; Schäffer et Kistemann, 2012 ; Tremblay et al., 2015). De plus, les séances se déroulent habituellement dans le même environnement (Leboeuf, 2017). Les enfants peuvent alors observer le dynamisme de la nature et son évolution au fil des heures de la journée et des saisons (Davis et al., 2006 ; Kirkby, 1989).

2.1.2. L’environnement naturel

L’environnement naturel que les groupes fréquentent comprend divers habitats (p. ex., un boisé, une plage, un champ, une rivière) et une grande biodiversité (Leboeuf, 2017). Les éléments de la nature sont des matériaux simples, ouverts et polyvalents (p. ex., des cailloux, des cônes, du sable, de l’eau) (Kemple et al., 2016 ; Kirkby, 1989). Les enfants usent de leur imagination pour les transformer dans leurs jeux (Herrington et Studtmann, 1998 ; Kemple

et al., 2016 ; Jørgensen, 2016).

2.1.3. La perspective de développement global

Dans le cadre de l’éducation par la nature, l’éducatrice tente de soutenir les enfants dans leur développement moteur, social, cognitif, langagier et émotionnel (Davis et al., 2006). Elle ne vise pas à enseigner des notions à propos de la nature avec des activités éducatives

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préconçues ou d’amener l’enfant à exercer une habileté spécifique. Elle saisit plutôt les occasions d’apprentissage et de développement qui émergent dans l’action des enfants pour les soutenir dans leur émerveillement, leurs explorations et leurs interprétations du monde qui les entoure (Bennet, 2010). Ainsi, elle soutient le développement global des enfants de son groupe en considérant leurs intérêts plutôt qu’en suivant une liste d’habiletés et de savoirs à acquérir progressivement (Blaise, Hamm et Iorio, 2016).

2.1.4. La pédagogie émergente

Ainsi, le déroulement des activités s’organise à partir des initiatives des enfants. Le programme pédagogique est dit émergent (Leboeuf, 2017). Cela exclut toute planification rigide des activités à long terme et demande à l’éducatrice de mettre en place un horaire quotidien souple aux transitions limitées dans le groupe (Leboeuf, 2017 ; Lysklett et Berger, 2017).

2.1.5. Le rôle de l’éducatrice

L’adulte soutient les jeux et les explorations de diverses manières et entretient une relation affective chaleureuse avec les enfants. Il montre son enthousiasme et son intérêt pour les actions prises par l’enfant, tout en l’encourageant et le soutenant (Bennet, 2010). Il observe les enfants, joue et explore avec eux et accompagne les apprentissages et les interactions, au besoin (Fraser, 2011). Par exemple, dans les explorations de l’enfant, il peut adopter un rôle de partenaire et de co-constructeur de connaissances (Fraser, 2011) et il peut mettre en scène des provocations qui invitent les enfants à engager des expérimentations ou à les prolonger (Acar et Torquati 2015).

2.1.6. La collaboration

L’éducatrice reçoit une formation et participe régulièrement à des rencontres avec ses collègues (Leboeuf, 2017). Elle travaille en collaboration avec les autres éducatrices, avec les enfants et avec les parents. Elle peut utiliser la documentation pédagogique en collectant des traces (p. ex., photographies, enregistrements vidéo, notes, artefacts) pour impliquer les familles et les enfants en partageant avec eux les fruits de ses collectes de données et pour y poser une réflexion conjointe (Buldu, 2010 ; Edwards et Gandini, 2015). Elle collabore

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également avec les autres personnes qui fréquentent le milieu naturel ou qui y travaillent (Leboeuf, 2017).

2.1.7. La prise de risques

L’éducatrice accompagne également les enfants dans leur évaluation des défis liés à la topographie de l’environnement et à ses éléments (Sandseter, 2009). Les milieux naturels peuvent donner aux enfants des occasions de relever des défis excitants et enthousiasmants vu le contrôle des risques qu’ils provoquent (McClain et Vandermaas-Peeler, 2016 ; Sandseter, 2009). Autrement dit, les enfants ont l’occasion de prendre des risques pour franchir les obstacles créés par l’environnement ou pour poser des actions comme courir entre les arbres ou manipuler un outil (Kirkby, 1989 ; Sandseter, 2009).

2.1.8. La sensibilité écologique

À force de côtoyer la nature, de l’explorer et d’y vivre des expériences agréables, les enfants développent une relation particulière avec elle et ils s’efforcent d’en prendre soin (Acar et Torquati, 2012, 2015 ; Davis et al., 2006 ; Kemple et al., 2016 ; Tremblay et al., 2015). Ils développent ainsi un souci pour le milieu qui les entoure et une conscience écologique (Acar et Torquati, 2012, 2015 ; Dyment, 2005).

Ainsi, en éducation par la nature, ces huit principes teintent les pratiques des éducatrices, comme celles qui soutiennent les comportements prosociaux. Avant d’aller plus loin, le mémoire définira, dans la prochaine section, le concept de pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux.

2.2. Les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux

Selon Perrenoud (1983), les actions des éducatrices ne proviennent pas d’une mise en pratique de recettes ou de modèles conscients de ce qu’il convient de faire, mais de schèmes dont elles n’ont pas nécessairement conscience. Les éducatrices peuvent se doter d’un scénario d’intervention éducative, mais les situations effectives leur demanderont de prendre une foule de décisions sur le vif (Perrenoud, Altet, Lessard et Paquay, 2008). Compte tenu de la complexité des situations auxquelles elles font face, le travail des éducatrices n’est que

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très peu guidé par des représentations préalables à propos des décisions à prendre (Perrenoud, 2004 ; Perrenoud et al., 2008).

Ainsi, les pratiques permettent aux éducatrices d’agir dans l’immédiateté pour comprendre les situations, pour prendre des décisions et pour poser des actions (Perrenoud, 1994). Ces « improvisations réglées » (Perrenoud, 1983) sont le fruit de l’adaptation des pratiques aux situations éducatives qui se présentent. D’ailleurs, c’est par elles que les pratiques éducatives se transforment, au fil des expériences vécues par les éducatrices (Perrenoud, 2004 ; Perrenoud et al., 2008). En effet, les pratiques éducatives se développent dans l’action, au cours de la formation et des expériences professionnelles des éducatrices (Perrenoud, 2004 ; Perrenoud et al., 2008).

Les pratiques éducatives consistent donc en des structures de conduites que les éducatrices utilisent dans des situations qui se ressemblent, en les adaptant au contexte donné (Perrenoud, 1983, 1994, 2004 ; Perrenoud et al., 2008). Étant donné la complexité de ces situations, dans l’étude des pratiques éducatives, il convient de joindre à l’analyse du point de vue des éducatrices l’observation de leurs actions en contexte réel. En effet, des pratiques que les éducatrices n’ont pas connaissance de mobiliser dans leurs interactions avec les enfants peuvent être mises en lumière par l’observation (Hegde et Cassidy, 2009).

Ce projet de maîtrise s’intéresse plus précisément aux pratiques que les éducatrices utilisent pour soutenir les comportements prosociaux. Le terme « soutenir » vient du latin classique sustinēre (CNRTL, 2012). Il est composé de sus, qui signifie « au-dessus, plus haut » (Larousse, n. d.) et de tĕnĕo, qui prend le sens de « tenir » (Gaffiot, 1934). « Sustinēre » peut prendre diverses significations : « tenir par-dessus, maintenir », « entretenir, sustenter, nourrir, conserver en bon état », « avoir charge de » et « endurer, résister à » (CNRTL, 2012). Par analogie, « soutenir » peut être défini comme « contribuer à quelque chose afin que cela puisse se développer et atteindre sa pleine extension » (CNRTL, 2012).

2.2.1. Les comportements prosociaux

Les comportements prosociaux sont souvent définis comme des actions volontairement dirigées dans le but d’apporter des bénéfices à autrui ou pour consoler quelqu’un (Eisenberg

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et al., 2015). Cette définition crée une sous-catégorie de comportements prosociaux : les

comportements altruistes (Bouchard et al., 2014 ; Eisenberg et al., 2006 ; Eisenberg et al., 2015). Ceux-ci renvoient à des conduites qui sont intrinsèquement motivées et qui sont orientées vers le bénéfice d’autrui (Eisenberg et al., 2015).

Or, les raisons pour lesquelles les comportements prosociaux peuvent être utilisés sont d’un plus grand éventail : la préoccupation pour autrui, l’attente d’une approbation ou d’une récompense, l’anticipation d’une punition ou d’une désapprobation, le désir de se conformer aux normes ou aux devoirs, ou le sens de l’équité ou de la justice (Eisenberg et al., 2015). Ainsi, les comportements prosociaux ne sont pas qu’émis dans le but d’aider l’autre ; la personne qui pose le geste prosocial en bénéficierait aussi (Bouchard et al., 2006 ; Bouchard

et al., 2014 ; Bowen, 1990).

Bowen (1990) a alors proposé une tout autre conception des comportements prosociaux en les divisant en deux catégories. La première est celle des interactions symétriques et elle concerne un partage des bénéfices avec autrui (Bouchard et al., 2006 ; Bouchard et al., 2014 ; Bowen, 1990). Elle englobe donc des dimensions telles que le partage, l’échange, la collaboration ou la coopération. La seconde est celle des interactions asymétriques où seule la personne vers qui le geste est dirigé en tire profit (Bouchard et al., 2006 ; Bouchard et al., 2014 ; Bowen, 1990). Elle a trait, par exemple, au don, au soutien, au réconfort ou au compliment.

De cette proposition, Bouchard et ses collaborateurs (2006) en sont arrivés à les définir ainsi : « comportements sociaux observables orientés vers le bénéfice d’autrui ou le partage de coûts et bénéfices avec autrui » (p. 380). La présente étude s’intéresse donc aux pratiques éducatives qui contribuent au développement des comportements présentés dans la Figure 1, sans pour autant s’y limiter. Ces comportements sont définis dans l’Annexe 1.

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Comportements prosociaux

Partager Coopérer Réconforter Aider ou protéger

Encourager Inviter à jouer Arrêter un conflit Donner ou offrir

Échanger S’excuser Montrer de la gratitude Exprimer de l’affection

Figure 1. Liste des comportements prosociaux retenus dans le cadre de la présente étude Les comportements prosociaux ont un rôle central dans le processus de socialisation de la personne (Eisenberg et al., 2006). Lorsque l’enfant de 3 à 5 ans développe ses comportements prosociaux, il crée des amitiés et les conserve en faisant des compromis et en usant de stratégies de résolutions de conflits de plus en plus diversifiés et efficaces (Bouchard

et al., 2012, 2014 ; DiLalla et al., 2015 ; Dunn et al., 2002). Par exemple, en prenant soin de

ses pairs, en leur venant en aide lorsqu’ils en ont besoin et en partageant avec eux, l’enfant établit des interactions positives avec eux. Il est alors susceptible de créer et d’entretenir des relations harmonieuses avec eux et avec les adultes, et d’être apprécié et populaire (DiLalla

et al., 2015 ; Eisenberg et al., 2006).

En s’intéressant aux pratiques éducatives qui soutiennent ces comportements, nous centrons notre étude sur des processus primaires qui influencent le développement de l’enfant, bien que nous prenions en compte le contexte dans lequel s’inscrivent ces processus (l’éducation par la nature). En effet, dans le modèle bioécologique du développement de Bronfenbrenner (2005), l’éducatrice agit directement sur le développement de l’enfant par les pratiques éducatives qu’elle mobilise au quotidien avec celui-ci (Bronfenbrenner, 1996).

2.3. Le modèle bioécologique du développement de Bronfenbrenner

Plus précisément, selon le modèle bioécologique (2005), le développement de l’enfant est influencé par les interactions de l’individu avec son environnement, les caractéristiques individuelles de la personne, ainsi que les contextes dans lesquels il évolue, et ce, dans un moment donné (Bronfenbrenner, 1996). Le modèle de Bronfenbrenner (2005)

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tente d’expliquer le développement de l’humain par quatre éléments : 1) les processus ; 2) la personne ; 3) le contexte ; et 4) le temps (Bronfenbrenner, 1996).

Les processus concernent les interactions de l’enfant avec son environnement (Bronfenbrenner et Morris, 1998). Les formes d’interaction qui se produisent régulièrement et sur une longue durée dans l’environnement immédiat de l’enfant sont considérées comme des processus proximaux (Bronfenbrenner et Morris, 2006). Ici se situent les pratiques éducatives qu’adoptent les éducatrices pour soutenir les comportements prosociaux de l’enfant.

Le concept de personne a trait aux caractéristiques individuelles de l’enfant, telles que son âge, son sexe, ses ressources ou ses compétences (dont les comportements prosociaux) et son tempérament, sa motivation et sa persévérance (Bronfenbrenner et Morris, 1998). Les caractéristiques personnelles de l’enfant peuvent influencer les interactions qu’il vit avec son environnement physique et social, dont fait partie son éducatrice. Dans la Figure 2, qui résume les propositions théoriques de Bronfenbrenner (2005), l’enfant occupe une place centrale dans son développement.

Le contexte fait référence à ce qui influence indirectement l’enfant (Bronfenbrenner et Morris, 1998). Comme le montre la Figure 2, il est d’abord constitué de microsystèmes que sont les contextes sociaux et physiques avec lesquels l’enfant est directement en interaction (p. ex., son groupe d’enfants et d’éducatrice, le parc nature qu’il fréquente et le service de garde éducatif à l’enfance dont il fait partie). Le mésosystème renvoie quant à lui aux interactions entre des microsystèmes (p. ex., la relation entre son groupe et le parc nature).

Le contexte comporte aussi l’exosystème qui consiste en une structure environnementale qui influence indirectement le développement de l’enfant (p. ex., le programme éducatif, l’approche de l’éducation par la nature, le milieu socioéconomique du quartier) (Bronfenbrenner et Morris, 2006). Enfin, le macrosystème englobe les trois autres composantes du contexte en regroupant des individus qui partagent des systèmes de croyances, de valeurs et de règles, par exemple.

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Le concept lié au temps concerne la période où les interactions ont lieu, le chronosystème, en ce sens où celle-ci influence l’effet du contexte ou du processus sur l’enfant (Bronfenbrenner et Morris, 1998). Le modèle bioécologique est dynamique puisqu’il évolue en fonction des éléments changeants qui le constituent et des expériences que vit l’enfant (Bronfenbrenner et Morris, 1998).

Figure 2. Modèle bioécologique de Bronfenbrenner (2005) (à partir de la figure Modèle écologique de Bronfenbrenner [1979] de Charras, Depeau, Wiss, Lebihain, Brizard et

Bronsard, 2012).

Selon le modèle de Bronfenbrenner (2005), les pratiques éducatives, l’éducation par la nature, et les caractéristiques des enfants et des éducatrices agissent sur les comportements prosociaux de l’enfant. De plus, ces éléments sont interreliés dans des systèmes d’influences mutuelles. Ainsi, les pratiques éducatives varient en fonction du parc nature fréquenté par les groupes (p. ex., le quartier où il est situé, ses habitats, sa biodiversité), des caractéristiques propres aux groupes (p. ex., le service de garde éducatif dont ils font partie, la fréquence des

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journées où ils sont en nature) et aux individus qui les composent (p. ex., le nombre d’enfants et leur âge, les années d’expérience de l’éducatrice et ses expériences en plein air).

De plus, l’approche de l’éducation par la nature exerce une influence sur les pratiques éducatives. Par exemple, son principe de pédagogie émergente pourrait agir sur les pratiques des éducatrices en matière de soutien aux comportements prosociaux, en ce sens où elles pourraient être mobilisées sur le vif plutôt que d’être choisies en avance selon une planification rigide. Ainsi, notre étude des pratiques éducatives se centre sur les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans et elle prend compte des éléments des microsystèmes et de l’approche de l’éducation par la nature.

2.4. Objectif de la recherche

La présente étude descriptive et interprétative a un objectif unique de recherche. Il vise à étudier les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans en contexte d’éducation par la nature. Étant donné la teneur des influences du contexte dans lesquelles les pratiques éducatives s’inscrivent, une étude de cas sera menée pour identifier et pour décrire les pratiques que quelques éducatrices mobilisent auprès des enfants de cet âge dans leur groupe pour soutenir ces comportements dans un projet d’éducation par la nature au Québec. Le prochain chapitre du mémoire décrit la méthode qu’emploie la recherche pour parvenir à son but.

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Chapitre III : Méthode

Dans ce chapitre, l’approche méthodologique sera présentée, de même que les participants à l’étude et le matériel utilisé pour recueillir les données. Le déroulement de la collecte de données et la méthode d’analyse des données sont ensuite décrits.

3.1. L’approche méthodologique

L’approche de l’étude de cas est privilégiée dans le cadre de ce mémoire de maîtrise puisqu’elle vise la compréhension de phénomènes complexes dans leur contexte réel (voir Gagnon, 2005 ; Karsenti et Demers, 2018 ; Roy, 2009 ; Stake, 1995). Selon Mucchielli (1996), cette approche méthodologique est propice à l’étude de l’interaction entre un grand nombre de variables afin de comprendre des situations sociales dans leur complexité et dans leur richesse, dans leur contexte naturel. Dans la présente étude, les pratiques éducatives qui soutiennent les comportements prosociaux constituent un phénomène complexe qu’on ne peut dissocier du contexte dans lequel elles s’inscrivent, notamment en raison de l’influence que ce contexte exerce sur elles. L’étude de cas permet justement de considérer l’interaction entre le phénomène et son contexte (Stake, 2008).

Les travaux de Stake (1995) ont guidé les choix méthodologiques pour cette étude de cas. Selon la perspective de Stake (1995), l’étude de cas donne accès à une compréhension approfondie d’un système délimité (le cas) qui comprend des composantes et leurs interactions. Ainsi, bien qu’elle soit essentiellement descriptive, l’étude de cas peut être interprétative (Karsenti et Demers, 2018). Dans le cadre de notre étude, c’est à partir de la description du soutien offert par les éducatrices aux comportements prosociaux des enfants en contexte d’éducation par la nature que nous pourrons identifier et décrire leurs pratiques éducatives.

Notre étude exploratoire s’intéresse à un cas unique d’un projet d’éducation par la nature et à ses unités d’analyse encastrées qui correspondent aux éducatrices et son groupe d’enfants qui mettent en œuvre ce projet. À un premier niveau d’analyse, les pratiques éducatives de chaque éducatrice sont étudiées. À un second niveau, une interprétation des résultats tirés des différentes unités d’analyse du cas est effectuée. De cette manière, les pratiques déclarées par les éducatrices du projet d’éducation par la nature ou les pratiques observées chez elles pour

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soutenir les comportements prosociaux des enfants âgés de 3 à 5 ans sont identifiées et décrites tout en prenant en compte les différences individuelles des éducatrices.

Le cas est instrumental (Stake, 2008) puisqu’il a été choisi dans l’intérêt premier de comprendre les pratiques de ses éducatrices en matière de comportements prosociaux. Il a été sélectionné en raison de ses conditions d’accès au site et de son inscription dans la représentation théorique de l’éducation par la nature développée dans le cadre conceptuel. D’abord, il fallait que le projet soit situé au Québec. Ensuite, il était nécessaire que les groupes d’enfants et leur éducatrice qui y participent fréquentent régulièrement un environnement naturel, et ce, pendant une grande partie de la journée. Enfin, il était important que les activités qui s’y déroulent suivent une pédagogie émergente. La section suivante porte sur le projet d’éducation par la nature qui a été choisi et sur les éducatrices qui le composent.

3.2. Le projet d’éducation par la nature et les éducatrices qui le mènent

Le projet d’éducation par la nature qui a été choisi dans ce projet de maîtrise est mis en œuvre dans un quartier central et défavorisé de Québec (Québec). Le projet Apprendre et se

développer en nature1 a vu le jour en septembre 2017. Au moment où la collecte de données a lieu, en juin 2018, la première année du projet tirait à sa fin. Apprendre et se développer en

nature est coordonné par un organisme communautaire dont la mission vise le bien-être des

enfants et de leur famille du quartier. Les groupes qui participent au projet fréquentent la forêt, l’étang, le marais, le champ et la rivière d’un parc urbain du quartier à raison de deux journées par semaine, de septembre à juin. Les groupes s’y rendent en autobus le matin, commencent la journée par une chanson et une discussion à l’orée de la forêt, au camp de

base, puis explorent différents endroits du parc, en compagnie ou non d’un autre groupe. Les

éducatrices, les coordonnateurs du projet et parfois même des invités, comme des étudiants ou des gestionnaires de services de garde éducatifs, se rencontrent mensuellement pour parler de leurs expériences en nature.

L’ensemble des éducatrices du projet d’éducation par la nature, au nombre de six (n = 6), et trente-six (n = 36) enfants de leur groupe âgés de 3 à 5 ans participent à notre étude.

1 Un nom fictif a été donné au projet d’éducation par la nature afin de s’assurer de l’anonymat des éducatrices à qui nous avons également donné d’autres prénoms.

(34)

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Les éducatrices travaillent dans cinq services de garde éducatifs à l’enfance situés à proximité du parc nature. Trois d’entre elles sont responsables d’un service de garde éducatif en milieu familial. Les trois autres éducatrices qui participent à la recherche travaillent au sein de deux CPE du quartier. La section suivante donne une description générale de chacune des six éducatrices et du groupe d’enfants dont elles ont la charge.

3.2.1. Présentation des éducatrices

Maude. Maude a obtenu un diplôme en techniques d’éducation à l’enfance en 2007 et elle a

ouvert un service de garde éducatif en milieu familial en janvier 2016. Elle est la mère de deux enfants de son groupe. Elle expérimente l’éducation par la nature depuis septembre 2017 avec le groupe des Bouleaux. Les Bouleaux comptent 7 enfants, dont un garçon et deux filles qui sont âgés de 4 ans et un garçon qui est âgé de 3 ans. Les autres enfants ont moins de 3 ans et ils participent également au projet d’éducation par la nature. Puisque l’étude s’intéresse aux enfants âgés de 3 à 5 ans, ces trois enfants n’y participent pas.

Denise. Denise a une formation technique en éducation à l’enfance et elle travaille depuis

16 ans dans un CPE. Elle fait de la documentation pédagogique dans le cadre de son travail depuis septembre 2016. Denise et les 10 enfants de son groupe, les Hêtres, participent à

Apprendre et se développer en nature depuis septembre 2017. Dans ce groupe, trois garçons

et cinq filles sont âgés de 5 ans, une fille est âgée de 4 ans et une autre de 3 ans.

Mélissa. Mélissa est éducatrice depuis 14 ans et, en plus des études techniques en

éducation à l’enfance, elle a fait des études techniques en santé animale. Son service de garde en milieu familial accueille 7 enfants qui forment ensemble le groupe des Pins. Parmi eux, une fille a 5 ans, un garçon a 4 ans et deux filles ont 3 ans. Les trois autres enfants sont plus jeunes et ils ne font donc pas partie de l’étude, malgré leur présence dans le groupe lors des observations. Les enfants de 4 et 5 ans expérimentent l’éducation par la nature avec l’éducatrice depuis septembre 2016. Les enfants de 3 ans le font depuis septembre 2017, bien qu’à certaines exceptions, ils ont accompagné les plus vieux au parc nature au cours de l’année précédente.

Audrey. Le groupe des Frênes est composé de deux groupes d’un CPE qui n’en forment

Figure

Figure 1. Liste des comportements prosociaux retenus dans le cadre de la présente étude  Les comportements prosociaux ont un rôle central dans le processus de socialisation de  la  personne  (Eisenberg  et  al.,  2006)
Figure 2. Modèle bioécologique de Bronfenbrenner (2005) (à partir de la figure Modèle  écologique de Bronfenbrenner [1979] de Charras, Depeau, Wiss, Lebihain, Brizard et
Tableau 1. Les pratiques observées chez Maude
Tableau 2. Les pratiques observées chez Denise
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