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Apports en azote d'engrais verts de légumineuses ou non-légumineuses, combinés à une fertilisation minérale ou organique, et effet sur le rendement du blé

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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© Maude Langelier, 2018

Apports en azote d'engrais verts de légumineuses ou

non-légumineuses, combinés à une fertilisation

minérale ou organique, et effet sur le rendement du blé

Mémoire

Maude Langelier

Maîtrise en biologie végétale - avec mémoire

Maître ès sciences (M. Sc.)

(2)

ii

Apports en azote d’engrais verts de

légumineuses ou non-légumineuses, combinés à

une fertilisation minérale ou organique, et effet

sur le rendement du blé

Mémoire

Maude Langelier

Sous la direction de :

Anne Vanasse, directrice de recherche

Martin Chantigny, codirecteur de recherche

(3)

iii

Résumé

Prédire les apports en azote (N) des engrais verts (EV) à une culture subséquente demeure un défi, étant donné la variabilité de production de biomasse, de teneur en N et de minéralisation des EV selon les conditions environnementales et les pratiques culturales. Les objectifs de ce projet étaient (1) de comparer l’accumulation d’azote et la production de biomasse d’un mélange de trèfles rouge (Trifolium pratense L.) et blanc (Trifolium repens L.) semé en intercalaire avec l’orge, ou d’avoine (Avena sativa L.), de pois fourrager (Pisum sativum L. var. arvense) ou de radis huileux (Raphanus sativus L.) semés en dérobée après l’orge, sans apport d’azote, ou avec une fertilisation minérale ou organique; (2) de déterminer l’influence des EV et de la fertilisation sur le prélèvement en N et le rendement du blé (Triticum

aestivum L.) l’année suivante et (3) d’établir le bilan azoté sol-plante sur un cycle de

production de deux ans. Cette expérience a été répétée deux fois. Les EV de légumineuses ont généré les apports potentiels en N les plus élevés (63 à 127 kg N ha-1) et le mélange de trèfles en intercalaire a entraîné les plus fortes augmentations de rendements de blé (23 à 92 %). La fertilisation a augmenté les rendements des EV d’avoine et de radis huileux, mais a eu peu d’effet sur les EV de légumineuses. L’avoine et le radis huileux ont été très efficaces à récupérer et conserver l’azote des fertilisants, mais ont eu moins d’effet que le trèfle sur les rendements du blé. En conclusion, les EV de légumineuses montrent une capacité limitée à utiliser l’azote des fertilisants. Cependant, l’azote accumulé par fixation symbiotique chez le trèfle semble plus efficace à stimuler les rendements subséquents de blé, alors que celui dérivé des non-légumineuses semble contribuer davantage au renouvellement de la réserve du sol.

(4)

iv

Abstract

Estimating the contribution of nitrogen (N) from cover crops (CC) to subsequent crop remains a challenge because CC biomass, N content and biomass mineralization rate vary depending on environmental conditions and management practices. The objectives of this study were (1) to compare N accumulation and biomass production from a mixture of red clover (Trifolium pratense L.) and white clover (Trifolium repens L.) intercropped with barley, or oat (Avena sativa L.), field pea (Pisum sativum L. var. arvense) or oilseed radish (Raphanus sativus L.) grown as catch crops after barley harvest, without N, or with mineral or organic fertilization at CC planting; (2) to determine the influence of CC type and fertilization on N uptake and yield of spring wheat (Triticum aestivum L.) in the next year; (3) to determine the soil-plant N budget over a 2-year cropping cycle. The experiment was repeated twice. The legume CCs generated the greatest N accumulation (63 to 127 kg N ha-1), and intercropped clover mixture resulted in the largest increases in wheat yields (23 to 92 %). Fertilization increased aboveground biomass production in oat and oilseed radish, but had little effect on legume CCs. Oat and oilseed radish were the most efficient at recovering fertilizer N, but had less effect than clover on wheat yields. In conclusion, legume CCs showed limited capacity to use fertilizer N. However, symbiotically fixed N by clover appeared more efficient at stimulating wheat yields the following year, whereas N derived from non legume CCs appeared to be mainly involved in renewal of the soil N reserve.

(5)

v

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux ... vii

Liste des figures ... viii

Liste des tableaux et des figures en annexe ... ix

Remerciements ... x

Avant-propos ... xii

1. Introduction ... 1

2. Revue de littérature ... 3

2.1 Cycle de l’azote dans le sol ...3

2.2 Engrais verts ...5

2.2.1 Avantages et défis des engrais verts ... 6

2.2.2 Méthodes d’évaluation de la contribution azotée des engrais verts ... 10

2.2.3 Prélèvement de l’azote par la culture subséquente à l’engrais vert... 12

2.2.4 Contribution des engrais verts aux apports d’azote et aux rendements de la culture subséquente : exemples issus de la littérature ... 13

3. Hypothèses et objectifs ... 20

4. Apports en azote d’engrais verts de légumineuses ou non-légumineuses,

combinés à une fertilisation minérale ou organique, et effet sur le rendement de blé .... 21

Résumé ...21

Abstract ...23

Introduction ...24

Matériels et méthodes ...26

Description du site et des traitements ... 26

Échantillonnages et analyses ... 30

Analyses statistiques ... 34

Résultats et discussion ...34

Données météorologiques ... 34

Rendements des EV ... 35

Teneurs en azote, C/N et apports potentiels en azote des EV ... 36

Rendements en blé ... 37

Azote minéral du sol ... 38

Récupération de l’azote des fertilisants par l’EV et rétention dans le système sol-plante ... 40

Conclusion ...45

Remerciements ...46

(6)

vi

Tableaux et figures ... 51

5. Discussion générale ... 61

5.1 Rendements et accumulation d’azote selon le type d’EV ... 61

5.1.1 Rendement en biomasse des EV ... 61

5.1.2 Accumulation d’azote, rapport C/N et apport potentiel en azote des EV... 62

5.2 Effets des EV sur les rendements en blé ... 63

5.3 Effets des traitements sur l’azote du sol... 64

5.4 Effets des traitements sur la rétention de l’azote dans le système sol-plante ... 65

6. Conclusion générale ... 70

Bibliographie ... 72

(7)

vii

Liste des tableaux

Tableau 1. Caractérisation du lisier de porc appliqué en 2014 et en 2015 à

Saint-Augustin-de-Desmaures, Québec, Canada. ... 51

Tableau 2. Rendement en biomasse aérienne et racinaire, teneur en N, C/N et apport

potentiel en N des engrais verts pour différents types de fertilisation (octobre

2014 et 2015). ... 52

Tableau 3. Rendement, nombre d'épis/m

2

, poids de mille grains et poids à l’hectolitre

des grains de blé suivant les engrais verts et différents types de fertilisation (août

2015 et 2016). ... 53

Tableau 4. Teneurs en azote minéral des sols à 0-20 cm à la fin de la saison des

engrais verts (octobre 2014 et 2015). ... 54

Tableau 5. Teneurs en azote minéral des sols à 0-20 cm mesurées au semis et après la

récolte du blé (2015 et 2016). ... 55

Tableau 6. Proportion de

15

N des fertilisants (%) récupérée par la biomasse végétale

des engrais verts et dans le sol (0-20 cm) pour différents types d’engrais verts et

de fertilisation (2014 et 2015). ... 56

Tableau 7. Proportion de

15

N des fertilisants (%) récupérée par le blé et mesurée dans

le sol (0-30 cm) et dans le système sol-plante pour différents types d’engrais

verts et de fertilisation (2015 et 2016). ... 57

(8)

viii

Liste des figures

Figure 1. Cycle de l’azote en agriculture (tiré de UNIFA 2017). ... 5

Figure 2. Demande en azote de la culture de blé de printemps en fonction des stades

de développement (tiré de Jones et al. 2011). ... 13

Figure 3. Précipitations (mm), quantités de neige au sol le dernier jour du mois (cm)

et températures (°C) mensuelles enregistrées entre août 2014 et août 2016, et

températures et précipitations normales de 30 ans (1981-2010) mesurées à la

station météorologique d'Environnement Canada de l'aéroport Jean-Lesage

située à environ 10 km de la station agronomique de Saint-Augustin. ... 58

Figure 4. (a) Rendement de la biomasse aérienne et (b) apport potentiel en azote des

engrais verts selon différentes fertilisations (2014). ... 59

Figure 5. Teneur en azote minéral dans le sol au moment du semis de blé (mai 2015)

selon différentes fertilisations appliquées aux engrais verts l’année précédente

(2014). ... 60

(9)

ix

Liste des tableaux et des figures en annexe

Tableau A1. Dates des principales opérations culturales et échantillonnages lors des

deux cycles de production (2014-2015; 2015-2016)………...79

Tableau A2. Rendement en grain des parcelles d’orge avec engrais vert intercalaire

de trèfles, non marquées au

15

N, pour différents types de fertilisation (2014 et

2015)….………...80

Tableau A3. Proportion de

15

N des fertilisants (%) récupérée par la biomasse

végétale des engrais verts pour différents types de fertilisation (2014 et

2015).…………...81

Tableau A4. Proportion de

15

N des fertilisants (%) mesurée dans le sol à 0-20 cm et

récupérée dans le système sol-plante pour différents types d’engrais verts et de

fertilisation (2015 et 2016).………...82

Figure A1. Représentation d’une parcelle….………...………...83

Figure A2. Teneur en azote des engrais verts selon différentes fertilisations

(2015).……….………...…………...84

Figure A3. Rapport carbone sur azote des engrais verts selon différentes fertilisations

(2015)……….………...………...85

Figure A4. Teneur en azote minéral dans le sol à la fin de saison de croissance des

EV selon différentes fertilisations (2015)…..………...………...86

Figure A5. Proportion d’azote-15 des fertilisants récupérée par les engrais verts selon

différentes fertilisations (2014)………..………...………...87

Figure A6. Proportion d’azote-15 des fertilisants récupérée par les engrais verts selon

différentes fertilisations (2015)…...……..………...………...88

Figure A7. Proportion d’azote-15 des fertilisants récupérée par les engrais verts et

dans le sol selon différentes fertilisations (2015)……...………...89

Figure A8. Proportion totale d’azote-15 des fertilisants récupérée du système

sol-plante (Blé + Sol) selon différentes fertilisations (2015)…...………...90

(10)

x

Remerciements

J’aimerais tout d’abord remercier ma directrice, Anne Vanasse, une femme exceptionnelle. Très impliquée dans son domaine de recherche et pour l’Université Laval, Anne a toujours su accorder de son temps à chacun de ses étudiants. Merci de m’avoir guidée au cours de ces deux dernières années. Merci pour ton écoute, ta générosité et ton sens critique. J’ai appris énormément auprès de toi. De plus, j’ai pu réaliser un projet de maîtrise qui me représente bien et qui m'a permis de me dépasser tant professionnellement que personnellement.

Je souhaiterais également remercier mon codirecteur, Martin Chantigny, un chercheur hors pair dans la gestion de l’azote. Je tiens à souligner ta précieuse aide dans la partie « azote-15 » de mon projet. Merci pour ta grande disponibilité et pour tes conseils inestimables. Anne et Martin, vous m’avez transmis votre passion de chercheur et un important bagage de connaissances qui me suivra toute ma vie.

Mon projet n’aurait pas eu lieu sans la collaboration de plusieurs autres personnes. Je souhaiterais remercier Marie-Ève Giroux, pour son aide indispensable sur le terrain. De plus, j’aimerais remercier Annie Brégard pour son important soutien dans mes analyses statistiques. Merci à Francis Gagnon et à toute l’équipe de la ferme de Saint-Augustin-de-Desmaures pour tout le travail dans mes parcelles. Merci aux étudiants d’été : Audrey, Anne-Marie, Sidonie, Annie, Héloïse, Stéphane et Mathilde pour votre bonne humeur et votre contribution à toutes les étapes de mon projet. Merci à mes collègues gradués : Anaïs Charles, Emmanuelle d’Amours, Francis Allard, Félix Marsan-Pelletier, Samuel Gagné, Hugo Alix, Benoit Bérubé, Cindy Denoncourt pour vos précieux conseils et votre coup de main sur le terrain. Un merci tout spécial à Mathieu Vaillancourt pour m’avoir épaulée tout au long de ma maîtrise avec tes encouragements et ta grande écoute. Merci de m’avoir donnée de ton temps lors des échantillonnages et des analyses. Quelle complicité on avait au champ, sur la route ou au laboratoire! J’en garderai de très beaux souvenirs.

Merci à toute l’équipe d’Agriculture et Agroalimentaire Canada à Québec et tout particulièrement à Johanne Tremblay, Annie Robichaud et Gabriel Lévesque. Votre aide a été indispensable tant au laboratoire que sur le terrain. Merci à Denis Pageau et Isabelle Morasse d’Agriculture et Agroalimentaire Canada à Normandin pour nous avoir prêté main-forte dans les analyses. Ce fut un plaisir de travailler avec chacun d’entre vous.

(11)

xi

Finalement, j’aimerais remercier ma famille et mes amis pour m’avoir épaulée tout au long de mes études universitaires. Merci à ma mère Claire de m’avoir encouragée à persévérer à chaque étape importante de mon parcours académique. Merci pour ta précieuse écoute, tes bons petits plats et ton aide inestimable! Merci à Louis-Charles pour ton inconditionnel soutien. Merci à mon frère, mes beaux-parents et mes très chers amis pour votre important soutien moral. Pour finir, je tiens à remercier tout particulièrement Luc de m’avoir transmis sa passion pour le monde agricole.

(12)

xii

Avant-propos

Le présent mémoire compte six chapitres. Le premier chapitre est une brève introduction du sujet de recherche. Le deuxième chapitre est une revue de la littérature permettant de rassembler les principales connaissances concernant l’utilisation des engrais verts et leurs effets sur les rendements d’une culture subséquente. Le troisième chapitre énonce les hypothèses et les objectifs du projet. Le quatrième chapitre traite des principaux résultats de l’étude et est présenté sous la forme d’un article scientifique. Il sera éventuellement soumis pour publication dans une revue scientifique. L’auteure principale est Maude Langelier, appuyée dans la rédaction par les coauteurs Anne Vanasse, Martin Chantigny et Denis Pageau. Le cinquième chapitre est une discussion générale faisant un retour sur les objectifs et les résultats obtenus, alors que le sixième et dernier chapitre porte sur les grandes conclusions de l’étude.

Les résultats du projet ont été diffusés en 2016 sous forme d’affiches scientifiques lors du 30e congrès annuel de l’Association québécoise de spécialistes en sciences du sol (AQSSS) ainsi qu’au congrès conjoint de la Société canadienne d’agronomie (SCA) et de la Société canadienne de science horticole (SCSH). Le projet a été rendu possible grâce à l’aide financière du Programme de soutien à l’innovation agroalimentaire, un programme issu de l’accord du cadre Cultivons l’avenir conclu entre le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) ainsi que Agriculture et Agroalimentaire Canada.

(13)

1

1. Introduction

Un engrais vert (EV) est une plante (ou un mélange de plantes) semée après la culture principale (EV en dérobée) ou semée pendant la croissance d’une culture principale (EV en intercalaire). L’utilisation des EV entraîne de nombreux bénéfices en agriculture. Tout d’abord, les EV emmagasinent les éléments nutritifs dans leurs tissus et les remettent en circulation dans le sol pour une culture subséquente. Ainsi, ils permettent de diminuer l’application d’engrais azotés de synthèse, ce qui minimise les coûts de production (Liebman et al. 2012; Tonitto et al. 2006). Enfin, le maintien d’un couvert végétal à l’automne apporte de la matière organique au sol (Ross et al. 2009) et permet de réduire l’érosion (Dapaah et Vyn 1998; Tonitto et al. 2006), ce qui a un effet positif sur la santé du sol et diminue les pertes d’éléments nutritifs ou de fertilisants dans les cours d’eau (Tonitto et al. 2006).

Parmi les plantes disponibles comme EV, il y a celles de la famille des légumineuses qui ont comme particularité de fixer l’azote (N) atmosphérique, via la relation symbiotique établie au niveau de leurs racines avec la bactérie du genre Rhizobium. Cet apport en N dans le sol permet de réduire les besoins en intrants azotés sous forme de fertilisant minéral ou organique. Les familles des graminées et des crucifères, des non-légumineuses, permettent un captage de l’azote résiduel à l’automne, ce qui diminue les pertes d’éléments nutritifs dans l’environnement.

Dans la littérature,

i

l est possible de constater une grande variabilité des apports en N selon les EV implantés. Chez les légumineuses, les apports potentiels en N (APN) peuvent varier selon l’étude entre 44 et 201 unités d’azote (Askegaard et Eriksen 2007; Breland 1996; Leibman et al. 2012; Piotrowska et Wilczewski 2012; Reeves 1994; Vyn et al. 2000). Dans les différentes études sur les EV de graminées ou de crucifères, l’APN se situe entre 7 et 91 unités d’azote (Andraski et Bundy 2005; Piotrowska et Wilczewski 2012; Vyn et al. 2000). En général, les apports en N des graminées et des crucifères sont inférieurs à ceux des légumineuses, car les non-légumineuses recyclent l’azote du sol, au lieu de fixer l’azote atmosphérique, et elles sont donc dépendantes de la disponibilité de l’azote du sol et des apports de fertilisants.

(14)

2

Il est possible d’évaluer la contribution des EV à la nutrition azotée des cultures principales selon les méthodes suivantes. La prédiction de l’apport en N peut se faire à l’aide du rapport carbone sur azote (C/N) de l’EV (Kuo et Jellum 2000). Un rapport C/N faible prédit une minéralisation importante et rapide de l’azote, alors qu’un rapport C/N élevé prédit une minéralisation faible et lente (Marstorp et Kirchmann 1991; Reeves 1994; Thorup-Kristensen et al. 2003). Parmi les autres méthodes d’évaluation, il y a l’incubation de sol (Sullivan et Andrews 2012), le coefficient d’utilisation apparent de l’azote (Motavalli et al. 1989), l’équivalent en N minéral (Motavalli et al. 1989) et le marquage isotopique à l’azote-15 (Varco et al. 1989). L’azote-15 (15

N) est un isotope stable et non radioactif et est un marqueur idéal pour faire le suivi de l’azote dans le sol et dans les plantes. Le marquage isotopique permet d’établir le coefficient d’utilisation réelle de l’azote des fertilisants, de distinguer la contribution du fertilisant de celle de la réserve du sol à la nutrition des cultures, et d’établir un bilan de récupération de l’azote appliqué dans le système sol-plante au cours du temps (Unkovich et al. 2001).

Les apports en N des systèmes avec EV à une culture subséquente demeurent difficiles à prédire puisqu’il y a une grande variabilité de production de biomasse, de teneur en N et de taux de minéralisation de la biomasse des EV, en lien avec la variabilité des conditions climatiques et des pratiques culturales utilisées. La combinaison des EV à une fertilisation azotée doit être documentée davantage, car le cheminement de l’apport en N par l’EV jusqu’aux cultures subséquentes est encore plus complexe à mesurer. Ce présent mémoire a pour objectifs (1) de comparer l’accumulation d’azote et la production de biomasse chez différents EV, implantés en intercalaire ou en dérobée d’une culture d’orge, combinés ou non à une fertilisation minérale ou organique; (2) de déterminer l’influence des EV sur le prélèvement en N et le rendement d’une culture subséquente de blé non fertilisée et (3) d’établir le bilan azoté sol-plante sur un cycle de production de deux ans.

(15)

3

2. Revue de littérature

2.1 Cycle de l’azote dans le sol

Les plantes vasculaires ont besoin de plus de 17 éléments essentiels pour leur croissance et l’azote en est un majeur (Raven et al. 2007). Dans la nature, l’azote est principalement retrouvé sous sa forme libre, le dioxyde gazeux (N2), constituant environ 80 % de

l’atmosphère. L’azote peut être aussi retrouvé dans une moindre mesure sous forme organique ou sous forme minérale (ammoniaque, nitrite et nitrate), la dernière étant la principale source directement disponible pour les cultures. La plupart des plantes ne peuvent utiliser tel quel le N2 comme élément nutritif. Des processus de transformation de l’azote,

d’origine biologique, peuvent être alors déclenchés par des microorganismes (Figure 1). Tous ces processus de transformation de l’azote sont dépendants de plusieurs facteurs étant très variables comme le type de sol, l’espèce végétale cultivée, les conditions météorologiques et les pratiques culturales.

Tout d’abord, il y a la fixation qui permet de réduire le N2 en ammonium (NH4 +

) grâce à certains microorganismes (actinomycètes, cyanobactéries et bactéries) à l’état libre ou en association avec des plantes. Le complexe enzymatique de dinitrogénase rend possible la réduction du N2 en NH4

+

et les microorganismes possédant ce complexe peuvent alors incorporer cet azote pour la synthèse protéique (Hopkins 2003). La fixation du N2 par le biais

d’une symbiose entre les bactéries du genre Rhizobium et les légumineuses est la plus répandue et la plus efficace, représentant 50 % de tout l’azote fixé biologiquement sur terre (FAO 1992). Ce ne sont pas toutes les plantes qui ont la capacité de fixer le N2 et de l’utiliser

pour leur croissance. Les plantes non fixatrices de N2 prélèvent donc l’azote provenant soit de

la minéralisation de la matière organique dans la réserve du sol ou des engrais de synthèse et des engrais de ferme. L’arrivée du procédé de fixation industrielle d’Haber-Bosch en 1914 a révolutionné l’agriculture en rendant possible la synthèse chimique d’azote minéral à partir du N2. Ces engrais de synthèse ont la particularité d’être immédiatement et complètement

disponibles pour la plante comparativement aux engrais de ferme qui doivent en bonne partie subir une minéralisation préalable à la libération d’azote disponible (Raven et al. 2007).

(16)

4

Lors de la sénescence des plantes ou d’un apport de résidus organiques, deux processus peuvent être déclenchés simultanément : la minéralisation et l’immobilisation de l’azote. Lors de la minéralisation, il y a une déamination des groupements amines (-NH2) des composés

protéiques, suivi d’une ammonification de l’azote libéré qui se retrouve sous forme d’ammonium (NH4

+

) dans le sol. Cet NH4 +

peut ensuite être nitrifié par une réaction d’oxydation menant à la production d’ions nitrate (NO3

-), la forme la plus disponible pour les plantes agricoles. L’immobilisation de l’azote, aussi appelé organisation, survient lorsque les microorganismes assimilent l’azote minéral du sol et la convertissent en azote organique (protéique) pour leurs propres besoins. L’azote immobilisé ne doit pas être considéré comme une perte, mais plutôt comme une source d’azote temporairement non disponible pour la plante.

Enfin, le cycle de l’azote se termine par la dénitrification où le NO3

retourne dans l’atmosphère sous forme gazeuse (N2O et N2). Ce processus constitue une perte d’azote dans

le système sol-plante. De plus, l’azote des fertilisants peut être perdu par volatilisation de l’ammoniac après un épandage d’engrais de ferme ou d’engrais ammoniacaux comme l’urée, ou par lessivage de NO3

(aussi appelé lixiviation) ou ruissellement de l’azote organique et minéral (NO3

et NH4 +

) sous des conditions de fortes pluies (CRAAQ 2010; Raven et al. 2007).

(17)

5

Figure 1. Cycle de l’azote en agriculture (tiré de UNIFA 2017).

Au Québec, une culture prélève environ 50 % (en moyenne) de l’azote des fertilisants minéraux azotés appliqués, alors que 10 à 40 % de l’azote des engrais organiques peut être absorbé en fonction du type d’engrais et de son rapport C/N (CRAAQ 2010). Le prélèvement de l’azote des fertilisants par la plante peut se mesurer entre autres à l’aide d’un marquage de l’engrais avec de l’azote-15. Cette approche, présentée à la section 2.2.2, permet ainsi d’établir le coefficient d’utilisation réelle de l’azote (CUN), un indice permettant de mesurer l’efficacité de la fertilisation azotée d’un point de vue agroenvironnemental (CRAAQ 2010).

2.2 Engrais verts

Les cultures de couverture peuvent être définies comme des cultures établies spécifiquement pour couvrir le sol afin de le protéger contre l’érosion et les pertes d’éléments nutritifs par le lessivage et le ruissellement (Dabney et al. 2001; Reeves 1994). Lorsque ces cultures sont implantées dans le but d’améliorer la nutrition azotée des cultures subséquentes, elles sont définies comme des engrais verts (Blanco-Canqui et al. 2015; Thorup-Kristensen et al. 2003). Puisque la présente étude traite de l’apport potentiel en azote (APN) des cultures de

(18)

6

couverture, c’est le terme engrais vert (EV) qui sera utilisé. Ainsi, un EV est une plante (ou un mélange de plantes) pouvant être implantée soit i) pendant une saison culturale complète où aucune culture principale ne sera semée (EV de pleine saison); ii) avant le semis ou après la récolte d’une culture principale (EV en dérobée) ou iii) simultanément avec une culture principale ou pendant la croissance d’une culture principale (EV en intercalaire) (Weill et Duval 2009). Dans ce dernier cas, il peut y avoir des risques de compétition entre les cultures pour les éléments nutritifs. De plus, la hauteur de coupe doit être ajustée à la récolte de la culture principale afin d’épargner l’EV et de le laisser croître. Les mélanges d’EV peuvent être avantageux pour les producteurs agricoles, puisqu’ils augmentent la biodiversité au champ, permettent d’obtenir une plus grande biomasse et apportent au sol une variété de différents systèmes racinaires comparativement à une monoculture (Miguez et Bollero 2005; Smith et al. 2014; Weill et Duval 2009). Les mélanges d’EV peuvent être sous forme de bicultures ou combinaison de plusieurs espèces différentes d’EV où les propriétés de chaque espèce d’EV s’additionnent. Par exemple, le mélange céréale-légumineuse, très bien représenté dans la littérature, peut non seulement diminuer les teneurs en N minéral résiduel après la récolte, mais aussi contribuer à la nutrition azotée de la culture subséquente (Blanco-Canqui et al. 2015; Miguez et Bollero 2005).

2.2.1 Avantages et défis des engrais verts

Depuis quelques années, plusieurs études ont souligné la problématique de l’usage des engrais de synthèse et des systèmes culturaux intensifs. D’une part, les engrais azotés industriels ne sont pas des sources d’énergie renouvelable et, comme ils sont générés à partir de combustibles fossiles, leur fabrication émet beaucoup de gaz à effet de serre. Ils sont aussi très polluants lorsque perdus dans l’environnement (Tonitto et al. 2006). D’autre part, les pratiques culturales intensives (labour, pesticides, fertilisation azotée) amènent une diminution de la biodiversité (Elité 2014), une résistance aux pesticides et une contamination des eaux souterraines (Bureau d’audiences publiques sur l’environnement [BAPE] 1999). Depuis les trente dernières années, il y a eu une expansion des grandes cultures comme le maïs-grain et le soya au Québec et dans l’ensemble de l’Amérique du Nord, principalement à cause de leur grande demande sur le marché (Gasser et al. 2010). L’intensification de la monoculture ou des rotations comprenant uniquement du maïs et du soya dans les systèmes agricoles actuels ainsi que l’usage important des engrais de synthèse qui y est lié ne fait

(19)

7

qu’accentuer les impacts négatifs sur la biodiversité agricole et l’environnement. Pourtant, avant l’arrivée du procédé d’Haber-Bosch pour synthétiser l’azote minéral, les producteurs utilisaient une combinaison de pratiques culturales comme la rotation de plusieurs espèces de cultures, les engrais de ferme, les cultures de couverture et les EV.

L’intégration des EV dans les systèmes culturaux conventionnels est une solution afin d’améliorer la fertilité du sol tout en protégeant l’environnement (Gentry et al. 2013; Thorup-Kristensen et al. 2003; Tonitto et al. 2006). Tout d’abord, les EV ont la capacité d’améliorer la structure du sol, ce qui entraîne une diminution des risques d’érosion (Abdallahi et N’Dayegamiye 2000; Breland 1995; Dapaah et Vyn 1998; Lal et al. 2011; N’Dayegamiye et al. 2015). Les EV produisant une biomasse élevée comme les céréales d’automne (seigle, triticale, blé) ou les graminées annuelles sont très efficaces pour réduire l’érosion hydrique et éolienne, en raison de la quantité importante de résidus laissés au sol et de la lenteur de leur décomposition (Blanco-Canqui et al. 2015). Les espèces végétales développant un vaste réseau de racines favorisent l’agrégation du sol, ce qui permet une meilleure infiltration de l’eau et une matière organique plus abondante dans le sol (Blanco-Canqui et al. 2015). Dans une étude réalisée au Québec, N’Dayegamiye et al. (2015) ont montré que les EV de légumineuses (luzerne, vesce velue, trèfle incarnat, vesce velue/blé) peuvent aussi améliorer l’agrégation du sol. Dans la littérature, il a été observé à long terme que les EV augmentent la concentration de carbone organique dans le sol, ce qui améliore aussi la stabilité des agrégats et réduit par le fait même l’érosion du sol (Blanco-Canqui et al. 2015). De plus, le stockage de carbone organique dans le sol permet de diminuer l’utilisation d’engrais de synthèse, un moyen efficace de lutter contre les changements climatiques et de diminuer les coûts de production (Liebman et al. 2012; Tonitto et al. 2006). Les EV, en particulier les graminées avec leur système racinaire profond, peuvent également améliorer la structure et la porosité du sol. Dans la littérature, il a été observé que l’utilisation d’un EV de graminée seul ou mélangé à d’autres espèces dans un système cultural sans labour augmente la macro-porosité du sol, ce qui est avantageux pour le développement des racines de la culture subséquente et la circulation de l’eau et de l’air (Blanco-Canqui et al. 2015). D’autres études ont montré que la racine pivotante du radis fourrager améliore la porosité du sol et permet un drainage plus rapide des eaux de surface au printemps (Martin et al. 2011).

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8

Les EV jouent aussi un rôle important dans la dynamique et l’équilibre des nutriments du sol, soit en fixant l’azote atmosphérique, en recyclant les nutriments disponibles dans le sol ou en réduisant leurs pertes par lessivage ou érosion. Par exemple, un semis hâtif d’EV, particulièrement après l’épandage d’engrais organique en post-récolte, permet d’immobiliser les éléments nutritifs du fertilisant dans la biomasse végétale et ainsi de diminuer les risques de perte (lessivage et dénitrification du NO3

-) pendant l’hiver (CRAAQ 2010-). Des méta-analyses récentes basées sur des données européennes et nord-américaines ont montré que l’utilisation d’EV permettait de réduire le lessivage de NO3

de 40 à 70 % en comparaison à un système conventionnel sans EV (Quemada et al. 2013; Tonitto et al. 2006; Valkama et al. 2015). La variabilité de l’efficacité de réduction du lessivage par les EV pourrait s’expliquer par le choix de la date du semis, le type de sol et les conditions météorologiques (Teixeira et al. 2016).

Les EV peuvent également limiter la propagation des mauvaises herbes. Pour ce faire, les EV peuvent entrer en compétition directement avec les mauvaises herbes pour la lumière, les éléments nutritifs et l’eau ou les supprimer physiquement ou chimiquement (Blanco-Canqui et al. 2015; den Hollander et al. 2007; Thorup-Kristensen et al. 2003). Certains EV, comme les légumineuses, les crucifères et le seigle, produisent des composés phytotoxiques stimulant la pourriture racinaire des mauvaises herbes (Haramoto et Gallandt 2004; Liebman et Davis 2000). Ces substances produites par les plantes agissent comme des herbicides naturels. Ce phénomène se définit comme un effet allélopathique (Martin et al. 2011). Finalement, en diversifiant la rotation des cultures, les EV peuvent interrompre le cycle de certaines maladies (pourriture racinaire : Reeves 1984; Thorup-Kristensen et al. 2003) et de certains ravageurs (nématodes : Abawi et Widmer 2000; Rodríquez-Kábana et al. 1991). Cependant, les mécanismes d’action des EV contre les mauvaises herbes ainsi que les maladies et les ravageurs des plantes demeurent encore méconnus dans le milieu scientifique. Il serait donc très intéressant de réaliser de nouvelles recherches dans ces domaines, en particulier pour l’agriculture biologique.

Selon les bénéfices recherchés, les producteurs agricoles peuvent utiliser une variété d’espèces de plantes de la famille des légumineuses, des graminées, des crucifères, des hydrophyllacées (phacélie) et des polygonacées (sarrasin) comme EV. Le choix de l’espèce est primordial, car plusieurs facteurs influencent la contribution en N des EV à la culture

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subséquente. Parmi ces facteurs, il y a la production de biomasse, la teneur en N et la minéralisation de la biomasse produite qui varient selon le type d’EV choisi. De plus, les conditions météorologiques, le type de sol et les pratiques culturales (date du semis/destruction des EV et travail du sol) ont aussi une grande influence sur ces facteurs. Les légumineuses ont comme particularité de fixer l’azote atmosphérique, via une relation symbiotique établie au niveau des nodules de leurs racines avec les bactéries fixatrices du genre Rhizobium (Tonitto et al. 2006). Les EV de légumineuses contribuent à la nutrition azotée ainsi qu’aux rendements de la culture subséquente (Dabney et al. 2001). Tel que mentionné à la section sur le cycle de l’azote, lors de l’arrêt de croissance de la plante (causé par un gel mortel, une application d’herbicide ou une action mécanique [labour, roulage, tonte]), la biomasse se décompose et libère les nutriments accumulés durant la croissance. La prédiction de la dynamique de décomposition peut être faite à partir du rapport C/N de l’EV (Kuo et Jellum 2000). En général, les EV de légumineuses ont un rapport C/N inférieur à 20 (Dabney et al. 2001), ce qui favorise une décomposition des résidus et une minéralisation de l’azote plus rapides que les EV de non-légumineuses dont le rapport C/N est généralement supérieur à 30 (Thorup-Kristensen et al. 2003). Cet apport net d’azote dans le sol permet de réduire les besoins en intrants azotés sous forme de fertilisant minéral ou organique. Par contre, la décomposition rapide des EV de légumineuses peut diminuer l'efficacité des résidus d’EV à protéger la surface du sol contre l’érosion, ou à contrôler la température du sol (Blanco-Canqui et al. 2015).

Les non-légumineuses peuvent capter l’azote résiduel provenant de la fertilisation ou de la minéralisation de la réserve du sol. Dabney et al. (2001) ont montré que les EV de graminées et de crucifères captent plus efficacement l’azote résiduel que les EV de légumineuses à cause de la croissance rapide de leurs racines. Les EV de graminées et de crucifères sont également plus efficaces que les EV de légumineuses pour accumuler et immobiliser l’azote minéral du sol (Reeves 1994). Par contre, en se décomposant, la libération de l’azote récupéré par les EV de non-légumineuses est plus lente et se fait graduellement après l’arrêt de leur croissance (Thorup-Kristensen et al. 2003). Bien que cela permette de limiter les risques de perte d’azote, en comparaison à l’azote très mobile des engrais minéraux (Blanco-Canqui et al. 2015), une libération lente de l’azote des EV de non-légumineuses pourrait réduire le transfert d’azote aux cultures subséquentes par rapport aux EV de légumineuses. Il n’y a

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cependant pas d’étude à cet effet ayant fait une comparaison systématique de l’efficacité de captage de l’azote du sol et de son transfert aux cultures subséquentes entre les EV de légumineuses et de non-légumineuses.

2.2.2 Méthodes d’évaluation de la contribution azotée des engrais

verts

Différentes méthodes peuvent être utilisées afin de mesurer la contribution azotée des EV. Plusieurs publications scientifiques rapportent l’apport potentiel en azote (APN) qui est déterminé en multipliant le rendement en matière sèche (MS) par la teneur en N correspondante. L’estimation de la contribution azotée d’un EV à l’aide du rapport C/N de sa biomasse est aussi couramment utilisée dans la littérature. Comme il a été vu précédemment, un rapport C/N faible (< 20) prédit une minéralisation importante et rapide, alors qu’un rapport C/N élevé (> 30) prédit une minéralisation faible et lente (Kuo et Jellum 2000; Reeves 1994; Thorup-Kristensen et al. 2003). Cependant, le rapport C/N des EV peut varier selon le type d’EV (N’Dayegamiye et Tran 2001), le stade de maturité au moment de l’arrêt de sa croissance (Reeves 1994; Verville 2014) ou la fertilité du sol (Ranells et Wagger 1997). Parmi les autres méthodes de prédiction plus précises, il y a l’incubation de sol où le potentiel de minéralisation d’azote est mesuré pour un temps fixe en conditions de température et d’humidité contrôlées (Sullivan et Andrews 2012). Il y a également le calcul du coefficient d’utilisation apparent de l’azote (CUA) qui consiste à mesurer la différence entre la quantité d’azote accumulée par une culture subséquente suite à un précédent d’EV et la quantité d’azote accumulée par la même culture sans précédent d’EV (Gentry et al. 2013). En général, le CUA diminue lorsque les doses d’engrais minéral ou organique appliquées à la culture sont augmentées puisque l’absorption d’éléments nutritifs par la plante tend à plafonner (Motavalli et al. 1989).

Il existe une façon plus précise de calculer la contribution azotée des EV, grâce au marquage isotopique à l’azote-15 (15

N), un isotope stable et non radioactif, qui permet de faire le suivi de l’azote dans le sol et dans la culture (Varco et al. 1989). Le 15N permet d’établir le

coefficient d’utilisation réelle de l’N (CUN) des fertilisants, de distinguer la contribution des sources d’N apportées au système de celle de la réserve du sol à la nutrition azotée d’une culture, et d’établir un bilan de récupération de l’azote appliqué dans le système sol-plante au

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cours du temps (Unkovich et al. 2001). Le marquage isotopique 15N a permis de montrer une grande variabilité du recouvrement d’azote pour différentes cultures. En général, le taux de récupération d’un engrais minéral ou organique l’année même varie entre 22 et 60 % pour les cultures annuelles (Chantigny et al. 2004; 2014; Liang et MacKenzie 1994; Nyiraneza et al. 2010; Reddy et Reddy 1993; Stevens et al. 2005; Tran et al. 1997). Lorsque l’azote est appliqué à un EV l’année précédant la culture principale, ce taux de récupération diminue. En Finlande, Müller et Sundman (1988) ont obtenu une récupération d’azote par l’orge de 6 à 25 % suivant des précédents de trèfles. Au Danemark, 6 % de l’azote des résidus de pois fourrager a été récupéré dans une culture subséquente d’orge de printemps (Jensen 1994). Au Québec, N’Dayegamiye et Tran (2001) ont évalué la contribution d’EV à une culture subséquente de blé dans un contexte de fertilisation azotée selon la dose recommandée. La récupération de l’azote des fertilisants par le blé a varié de 19 à 36 %. Dans cette dernière étude, les taux de récupération par le blé ont été très élevés puisque le marquage à l’azote-15 a été fait l’année de la culture subséquente de blé dans les parcelles ayant reçu une dose de 90 kg N ha-1, alors que pour les deux études scandinaves (Jensen 1994; Müller et Sundman 1988), l’azote-15 avait été appliqué sur les précédents culturaux (trèfle et pois).

Finalement, il y a la méthode de l’équivalent en N minéral (ENM), qui se base sur une courbe de réponse du rendement de la culture principale en fonction de doses croissantes d’N minéral. Le rendement obtenu suite à un EV peut alors être comparé au rendement de la courbe de réponse afin de déterminer la dose équivalente d’azote dérivée de l’EV (Garand et al. 2001; Thilakarathna et al. 2015). Motavalli et al. (1989) ont établi que l’ENM suppose (i) que le prélèvement en N par la plante est une mesure appropriée et indirecte de l’N disponible pendant la saison culturale et (ii) que l’efficacité d’assimilation de l’N est la même dans la parcelle fertilisée avec un fertilisant organique que dans celle fertilisée avec un engrais minéral. Dans certains cas, les auteurs vont mesurer l’équivalent en N minéral en se basant sur une dose optimale calculée à partir d’un modèle économique (méthode de l’optimum économique, Vyn et al. 2000) ou à partir d’une courbe de fertilisation quadratique (méthode de l’optimum mathématique, N’Dayegamiye et al. 2015).

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2.2.3 Prélèvement de l’azote par la culture subséquente à l’engrais

vert

Comme il a été mentionné précédemment, les EV peuvent contribuer à la nutrition azotée d’une culture subséquente et leur apport potentiel en N peut être évalué à l’aide de diverses méthodes. Afin de maximiser la contribution en N des EV pour la culture suivante et de réduire les risques de perte dans l’environnement, il faut s’assurer que la décomposition des EV et la minéralisation de l’azote qui en découle soient synchronisées avec la période où la culture subséquente est au plus fort de sa croissance, c’est-à-dire le moment où sa demande en N est la plus forte. Par conséquent, il est nécessaire au préalable de bien comprendre le fonctionnement du prélèvement de l’azote par une culture dans le cas d’une application d’engrais minéral ou d’engrais de ferme.

Les taux de prélèvement de l’azote par la culture sont différents à chaque stade de développement, alors que les stades de développement sont spécifiques à chaque culture et que la vitesse d’atteinte de ces stades varie selon les conditions de croissance (Jones et al. 2011). Pour une culture céréalière comme le blé de printemps, le taux de prélèvement d’azote est important dès le début de la croissance avec une période de prélèvement maximal au stade mi-tallage (Figure 2). Lors du stade d’épiaison du blé, la plante a récupéré la totalité de l’azote dont elle a besoin (Jones et al. 2011).

Au Québec, le CRAAQ (2010) recommande un apport total de 90 à 120 kg N ha-1 en fonction de la variété de blé cultivée et du précédent cultural. L’application en une seule dose se fait avant le semis, entre la fin avril et la mi-mai. Par contre, des apports uniques et élevés en N peuvent occasionner des pertes importantes dans l’environnement surtout dans le cas de précipitations abondantes. Une option intéressante qui s’offre alors aux producteurs est le fractionnement des apports d’azote, c’est-à-dire une application d’azote en deux ou trois temps. Cela permet une meilleure efficacité d’utilisation de l’azote dans la culture et améliore ainsi la teneur en protéines et la qualité des grains (Tran et Tremblay 2000). Dans le cas d’un fractionnement des apports azotés pour le blé, il est recommandé d’appliquer la moitié de la dose totale au moment du semis et l’autre moitié au stade du tallage.

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Figure 2. Demande en azote de la culture de blé de printemps en fonction des stades de développement (tiré de Jones et al. 2011).

Parmi les nombreuses études portant sur la fertilisation azotée dans les cultures céréalières, un constat fait l’unanimité auprès des chercheurs : une bonne gestion de l’azote est primordiale afin d’assurer aux producteurs de meilleurs rendements, des céréales de qualité, une rentabilité maximale et une diminution des risques de perte d’azote dans l’environnement. La section suivante présente différents exemples tirés de la littérature sur l’évaluation de l’apport en N des EV et de leur effet sur les rendements d’une culture subséquente.

2.2.4 Contribution des engrais verts aux apports d’azote et aux

rendements de la culture subséquente : exemples issus de la

littérature

Badaruddin et Meyer (1990) ont étudié au Dakota du Nord l’effet de cinq espèces d’EV de légumineuses (luzerne annuelle, luzerne vivace, mélilot, trèfle rouge et vesce velue) implantées durant toute une saison et de deux témoins (un précédent cultural de blé fertilisé avec 112 kg N ha-1 et une jachère) sur les rendements d’une culture subséquente de blé de printemps fertilisé à différentes doses d’azote minéral (0, 75 et 150 kg N ha-1

). L’expérience a été répétée à deux reprises sur deux sites : une argile limoneuse et un loam limono-argileux. Pour les deux années d’EV, l’apport potentiel en N (APN) des EV de légumineuses (en

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moyenne 125 kg N ha-1) a été supérieur à celui du précédent cultural de blé (en moyenne 18 kg N ha-1), compte tenu de leurs rendements élevés en biomasse aérienne. Au moment du semis du blé le printemps suivant, la quantité de nitrates présents dans les sols a été significativement plus élevée dans les parcelles d’EV (moyenne de 122 kg NO3-N ha

-1

) que dans les parcelles ayant eu un précédent cultural de blé (moyenne de 69 kg NO3-N ha

-1

), mais inférieure aux parcelles de jachère (moyenne de 142 kg NO3-N ha

-1

). Cependant, les auteurs n’ont fourni aucune justification pour expliquer cette quantité de nitrates élevée suite au traitement de jachère. Pour les deux années de blé de printemps, les auteurs ont observé que les EV de légumineuses ont permis d’augmenter de 31 à 57 % les rendements de blé n’ayant reçu aucune fertilisation par rapport au précédent cultural de blé. Aucune différence significative n’a été observée entre le traitement de jachère et les traitements d’EV pour les rendements de blé de printemps non fertilisé. Dans le cas des rendements de blé de printemps fertilisé (75 ou 150 kg N ha-1), il n’y a pas eu de différence significative entre les traitements d’EV et les deux traitements témoin, sauf pour un site.

Au sud de la Suède, Bergkvist et al. (2011) ont comparé l’effet de six traitements d’EV (trèfle rouge, trèfle blanc, raygrass vivace en monoculture; mélange de chaque trèfle avec le raygrass et témoin sans EV) implantés en intercalaire d’un blé d’automne soumis à différentes doses d’azote minéral (0, 60, 120 ou 180 kg N ha-1

) sur les rendements d’une culture subséquente d’orge de printemps non fertilisé. L’expérience a été répétée à deux reprises sur deux sites : une argile limoneuse et un loam sablo-argileux. Pour les deux années d’EV, l’APN des EV de trèfles (monoculture et mélange) en intercalaire du blé non fertilisé a varié entre 70 et 80 kg N ha-1 alors qu’avec une fertilisation de 120 kg N ha-1, l’APN a varié entre 30 et 40 kg N ha-1. Dans le cas du raygrass en intercalaire du blé, l’APN a été très faible (environ 20 kg N ha-1) par rapport aux traitements d’EV de trèfles, et ce peu importe la dose d’azote appliquée. En absence de fertilisation, l’EV de raygrass en intercalaire du blé a été plus efficace pour réduire la teneur en N résiduel en surface du sol (0-30 cm) que les traitements d’EV de trèfles et témoin sans EV. Avec une dose de 120 kg N ha-1

, il y a eu une réduction de l’azote résiduel à 0-30 cm avec les traitements d’EV de raygrass (monoculture ou mélange), mais l’effet a été moins important en comparaison aux traitements sans N. Néanmoins, tous les traitements d’EV en intercalaire avec le blé non fertilisé ont été efficaces pour réduire l’azote résiduel en profondeur (30-90 cm). Pour les deux années d’orge de printemps, tous les traitements d’EV de trèfles en intercalaire du blé non fertilisé ont permis

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d’augmenter les rendements d’orge de 1,9 à 2,4 t ha-1

(en moyenne), soit environ 50 % de plus par rapport au témoin sans EV. Dans le cas de l’EV de trèfles en intercalaire du blé fertilisé à fortes doses d’azote (120 et 180 kg N ha-1), les rendements d’orge ont augmenté seulement de 1 t ha-1 par rapport au témoin sans EV. Par rapport aux traitements d’EV de trèfles, les rendements d’orge suivant l’EV de raygrass en monoculture ont été plus faibles, mais similaires au témoin sans EV, et ce, peu importe la dose d’azote appliquée.

Dans le sud de l’Ontario, Vyn et al. (2000) ont étudié l’effet de différents traitements d’EV (trèfle rouge en intercalaire avec blé d’automne; seigle, radis huileux ou avoine en dérobée après la récolte du blé et témoin sans EV), combinés ou non à un travail du sol, sur les rendements en grains d’une culture subséquente de maïs avec ou sans fertilisation azotée (0 ou 150 kg N ha-1). Dans les systèmes d’EV, seul le blé d’automne du traitement en intercalaire a été fertilisé (90 kg N ha-1). L’expérience a été répétée à deux reprises sur deux sites : un loam sableux et un loam limoneux. Pour les deux années d’EV des deux sites, l’APN de l’EV de trèfle rouge en intercalaire du blé (44 à 98 kg N ha-1

) a été supérieur à celui des EV de non-légumineuses implantés à la dérobée (12 à 31 kg N ha-1). Pour les deux années de maïs, l’effet des traitements d’EV a été significatif sur les rendements de maïs n’ayant reçu aucune fertilisation, et ce pour les deux sites. Les rendements de maïs non fertilisé suivant les traitements d’EV enfouis par un labour (en moyenne 7,1 t ha-1

) ont été plus élevés que ceux d’EV laissés à la surface du sol (en moyenne 6,3 t ha-1). De plus, les rendements de maïs non fertilisé ont augmenté de 14 à 45 % suite au traitement d’EV de trèfle en intercalaire du blé labouré en comparaison au traitement témoin sans EV labouré. Dans le cas des rendements de maïs fertilisé (150 kg N ha-1), il n’y a pas eu de différence significative entre les traitements d’EV et de travail du sol. Les auteurs concluent que la gestion de l’azote dans des successions de cultures céréale-maïs peut être améliorée en semant une légumineuse en intercalaire de la céréale afin de bénéficier à la fois d’un captage de l’azote résiduel du sol par la céréale et de la fixation de l’azote atmosphérique par la légumineuse.

Dans la littérature, il existe peu d’études utilisant le marquage isotopique à l’azote-15 pour évaluer la contribution des EV à la nutrition azotée de cultures subséquentes de céréales comme le blé. N’Dayegamiye et Tran (2001) ont étudié l’effet de cinq EV (trèfle rouge, sarrasin, millet japonais, moutarde blanche et canola) et d’un témoin d’orge sans EV sur les rendements et les prélèvements en N d’une culture subséquente de blé de printemps soumise

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à différentes doses d’azote minéral (0, 30, 60, 90 kg N ha-1). L’expérience a été répétée à

deux reprises sur un loam limoneux au Québec. Le trèfle rouge a été implanté en intercalaire de l’orge au début mai, alors que les EV de non-légumineuses (sarrasin, millet, moutarde et canola) ont été semés en monoculture au début juin. Au printemps suivant, le blé a été semé et une fertilisation minérale a été appliquée. Pour évaluer la contribution des EV au blé dans un contexte de fertilisation selon la dose recommandée, un marquage à l’azote-15 de l’engrais minéral a été fait seulement dans les parcelles de blé ayant reçu une dose de 90 kg N ha-1. Les auteurs ont observé un effet significatif des EV sur les rendements de blé. Par rapport au témoin d’orge sans EV, les EV de non-légumineuses ont permis d’augmenter de 27 à 68 % les rendements de blé, alors que les augmentations ont été de 13 à 21 % suite à l’EV de trèfle rouge en intercalaire de l’orge. La bonne performance du blé suivant les EV de non-légumineuses pourrait s’expliquer par les rendements très élevés en biomasse ces EV (2,1 à 11 t ha-1) comparativement à l’EV de trèfle rouge (en moyenne de 0,6 t ha-1). Par rapport à la fertilisation, les rendements de blé fertilisé avec les doses de 30 et 60 kg N ha-1 ont été plus élevés pour les parcelles suivant les précédents d’EV que les rendements de blé fertilisé avec 90 kg N ha-1 suivant les parcelles témoins sans EV. Les auteurs ont montré que les EV ont eu aussi un effet significatif sur les prélèvements du fertilisant azoté par le blé. La récupération d’azote-15 du fertilisant azoté fut exceptionnelle (< 100 %) dans les parcelles de blé suivant le précédent d’EV de trèfle en intercalaire, alors que les pourcentages de récupération par le blé suivant les EV de non-légumineuses ont varié de 19 à 36 %. Les auteurs ont souligné que les EV ont apporté de 15 à 36 kg N ha-1 à la culture subséquente de blé, ce qui équivaut à une contribution de 25 à 31 % du prélèvement total en N du blé. Les auteurs concluent que, dans une zone au climat tempéré, l’utilisation d’EV est un moyen efficace pour améliorer la productivité et la disponibilité de l’azote d’une culture subséquente de blé.

Au Danemark, Li et al. (2015) ont étudié l’effet de trois traitements d’EV semés en intercalaire d’une culture d’orge à la mi-mai (trèfle rouge, raygrass vivace et mélange trèfle rouge-raygrass vivace) et de deux traitements d’EV semés en dérobée après la récolte de l’orge au début août (vesce d’automne et radis fourrager) sur les prélèvements en N et les rendements d’une culture subséquente d’orge de printemps non fertilisé sur un sable loameux. Une application de lisier de bovins (80 kg N ha-1) a été faite au printemps avant le semis des EV et de l’orge et un engrais minéral marqué à l’azote-15 (10 kg N ha-1) a été

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appliqué sur tous les traitements d’EV au début de l’automne. Le bilan de récupération de l’azote-15 a été maximal avec l’EV de radis fourrager (58 %), suivi par les EV de raygrass vivace (49 %), du mélange trèfle-raygrass (48 %) et du trèfle rouge et de la vesce d’automne (tous les deux à 45 %). Les auteurs ont observé un effet significatif des EV sur les rendements de la culture subséquente d’orge de printemps. Les EV ayant occasionné les plus fortes augmentations de rendements d’orge ont été la vesce d’automne (9,2 t ha-1), le trèfle rouge (8,5 t ha-1) et le mélange trèfle-raygrass (7,3 t ha-1) en comparaison au témoin sans EV et sans N (6,2 t ha-1). Dans le cas des EV de non-légumineuses (radis fourrager et raygrass vivace), les rendements de l’orge ont été plus faibles (5,4 à 5,7 t ha-1) par rapport aux autres traitements d’EV et au témoin sans EV et sans N. Les auteurs ont également observé un effet significatif des EV sur les prélèvements en N de la culture subséquente d’orge de printemps. La récupération d’azote-15 par l’orge suivant les traitements d’EV de trèfle rouge, de mélange trèfle-raygrass et de vesce d’automne a été plus élevée (17 à 24 %) par rapport aux traitements d’EV de non-légumineuses (14 % en moyenne).

Dans le cadre d’une dynamique de décomposition, Müller et Sundman (1988) ont vérifié l’effet de cinq précédents culturaux (trèfle blanc, trèfle rouge, trèfle souterrain, fève et fléole des prés enfouis dans le sol avec des sacs en filet) sur les prélèvements en N d’une culture subséquente d’orge non fertilisée sur un loam en Finlande. Les précédents culturaux ont été préalablement cultivés en serre et une fertilisation minérale marquée à l’azote-15 a été app1iquée au semis. La quantité d’azote dérivé des précédents culturaux en décomposition a été retenue majoritairement dans le sol à une profondeur de 0-25 cm (de 27 à 46 %), et seulement 0,6 à 1,1 % de l’azote a été retrouvé à une profondeur de 25-35 cm. Les auteurs ont obtenu une récupération de l’azote-15 par l’orge suivant les précédents culturaux de 6 à 25 % (en moyenne) alors que la récupération totale de l'azote par le système sol-plante (résidus de précédents culturaux + sol 0-35 cm + orge) a varié entre 89 et 102 %. Les auteurs ont souligné par ces résultats que les résidus de cultures fertilisés avec l’engrais minéral marqué n’ont pas été la seule source d’azote pour l’orge. En effet, la principale source d’azote de l’orge provenait de la réserve du sol (l’azote organique). Les faibles taux de récupération d’azote-15 par l’orge peuvent démontrer qu’une grande portion de l'azote-15 des résidus de cultures est restée dans le sol et pourrait possiblement constituer un arrière-effet pour les cultures suivantes. Par la grande capacité du sol à conserver l’azote dérivé des précédents culturaux et par les faibles pertes d’azote observées, les auteurs concluent que

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même si la libération d’azote à partir de la matière organique azotée produite par les plantes est rapide, l’apport en N à une culture subséquente s’observerait à plus long terme.

Dans une autre étude sur la dynamique de décomposition de résidus menée au Danemark, Jensen (1994) a étudié pendant trois ans l’effet d’un seul apport de biomasse végétale de pois fourrager sur les prélèvements en N de cultures subséquentes d’orge, de canola et de blé non fertilisées implantées à l’automne ou au printemps. Le pois fourrager a été préalablement cultivé en pots et a reçu une fertilisation minérale marquée à l’azote-15 au moment du semis. Le pois fourrager a été récolté à maturité et les résidus de pois ont été incorporés dans le sol des parcelles de cultures implantées seulement à l’automne, et ce, avant le semis de ces cultures. La récupération d’azote-15 dérivé des résidus de pois par les cultures subséquentes d'orge, de canola et de blé semées en automne a été de 14 %, 3 % et 2 %, respectivement. Dans le cas des cultures subséquentes d’orge, de canola et de blé semées au printemps suivant, la récupération d’azote-15 a été seulement de 6 %, 2 % et 2 %, respectivement. Selon l’auteur, les faibles pourcentages de récupération d’azote-15 dérivé des résidus de pois par les cultures subséquentes semées au printemps pourraient s’expliquer par un lessivage de l’azote minéralisé des résidus de pois pendant l’automne, l’hiver et le début du printemps avant l’établissement des cultures. Après trois années consécutives de cultures semées à l’automne à la suite d’un seul apport initial de résidus de pois marqués à l’azote-15, 45 % de l’azote-15 de l’apport initial du pois a été conservé dans la couche superficielle du sol (0-10 cm), alors que 41 % de l’azote-15 de cet apport a été conservé dans le sol après trois années de cultures semées au printemps. L’auteur a mentionné que cette rétention élevée de l'azote marqué dans le sol est probablement due à une immobilisation de l’azote dans les racines des plantes cultivées. Du fait que la minéralisation des résidus de pois a été principalement à l’automne, l’auteur a souligné l’importance de choisir une culture ayant une grande capacité à accumuler l’azote en conditions automnales. De plus, l’auteur a mentionné que l'incorporation de résidus de pois dans un système cultural pourrait augmenter les réserves d’azote du sol et contribuer à long terme à l’apport en N disponible par la minéralisation.

En faisant un survol des nombreuses études réalisées sur les EV, peu d’entre elles comparent l’efficacité des EV de légumineuses et de non-légumineuses à accumuler de l’azote et à le transférer à une culture subséquente de céréale à l’aide du marquage isotopique 15

N. Il y a également peu d’études qui comparent des sources minérales et organiques dans des systèmes

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avec EV. Il était donc pertinent (1) d’évaluer l’apport potentiel en N de différentes espèces d’EV implantées en intercalaire ou en dérobée d’une céréale, combinés ou non à une fertilisation minérale ou organique; (2) de déterminer l’influence de ces EV sur le prélèvement en N et le rendement d’une culture subséquente de céréale non fertilisée et (3) d’établir le bilan azoté sol-plante sur un cycle de production de deux ans grâce à l’azote-15.

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3. Hypothèses et objectifs

Selon la revue de littérature présentée, trois hypothèses ont été énoncées concernant l’utilisation des EV et des types de fertilisation :

• L’apport potentiel en azote des EV de légumineuses est plus élevé que celui des EV de non-légumineuses pour la culture subséquente de blé;

• Les EV de non-légumineuses bénéficient davantage d’une fertilisation minérale ou organique que les EV de légumineuses;

• Un EV de légumineuses en intercalaire la première année permet d’obtenir un rendement plus élevé de la culture subséquente de blé qu’un EV en dérobée.

L’objectif général de ce projet était de vérifier les apports potentiels en azote de différents EV implantés en culture intercalaire ou en dérobée dans un système de grandes cultures sous les conditions climatiques du Québec. Plus précisément, les objectifs spécifiques étaient de :

 Déterminer l’accumulation d’azote et la production de biomasse d’un mélange de trèfles implanté en intercalaire de l’orge la première année, ainsi que de trois EV (avoine, radis huileux et pois fourrager) semés en dérobée après la récolte de l’orge, suite à un apport ou non d’azote sous forme minérale ou organique.

 Vérifier la synergie possible des EV et de la fertilisation azotée minérale ou organique sur le rendement d’une culture subséquente de blé.

 Établir le bilan azoté sol-plante pour un cycle complet de production (deux ans : année EV + année blé) grâce au marquage isotopique de l’azote des fertilisants à l’azote-15.

(33)

21

4. Apports en azote d’engrais verts de légumineuses

ou non-légumineuses, combinés à une fertilisation

minérale ou organique, et effet sur le rendement de

blé

Maude Langelier1, Martin Chantigny2, Denis Pageau3, Anne Vanasse1

1

Département de phytologie, Université Laval, Québec, Qc, G1V 0A6, Canada;

2

Agriculture et Agroalimentaire Canada, Québec, Qc, G1V 2J3, Canada;

3

Agriculture et Agroalimentaire Canada, Normandin, Qc, G8M 4K3, Canada.

Résumé

Prédire les apports en azote (N) des engrais verts (EV) à une culture subséquente demeure un défi, étant donné la variabilité de production de biomasse, de teneur en N et de minéralisation des EV selon les conditions environnementales et les pratiques culturales. Les objectifs de ce projet étaient (1) de comparer l’accumulation d’azote et la production de biomasse d’un mélange de trèfles rouge et blanc semé en intercalaire avec l’orge, ou d’avoine, de pois fourrager ou de radis huileux semés en dérobée après l’orge, sans apport d’azote, ou avec une fertilisation minérale ou organique; (2) de déterminer l’influence des EV et de la fertilisation sur le prélèvement en N et le rendement du blé l’année suivante et (3) d’établir le bilan azoté sol-plante sur un cycle de production de deux ans. Cette expérience a été répétée deux fois sur un loam sableux. Les EV de légumineuses ont généré les apports potentiels en N (APN) les plus élevés (63 à 127 kg N ha-1) et le mélange de trèfles en intercalaire a entraîné les plus fortes augmentations de rendements de blé (23 à 92 %). La fertilisation a augmenté les rendements des EV d’avoine et de radis huileux, mais a eu peu d’effet sur les EV de légumineuses. L’avoine et le radis huileux ont été très efficaces à récupérer et conserver l’azote des fertilisants, mais ont eu moins d’effet que l’EV de trèfles sur les rendements du blé. En conclusion, les EV de légumineuses ont montré une capacité limitée à utiliser l’azote des fertilisants. Par contre, l’azote accumulé par fixation symbiotique chez le trèfle semble plus efficace à stimuler les rendements du blé l’année suivante, alors que celui dérivé des non-légumineuses semble davantage contribuer au renouvellement de la réserve du sol. Dans le bilan total du système sol-plante pour le cycle de deux saisons (EV et blé), la récupération

(34)

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de l’azote ammoniacal des fertilisants dans la couche 0-30 cm a varié de 32 à 71 % selon les EV et les années.

Mots clés : Azote-15, Triticum aestivum, Culture de couverture, Intercalaire, Culture en dérobée.

Figure

Figure 1. Cycle de l’azote en agriculture (tiré de UNIFA 2017).
Figure  2.  Demande  en  azote  de  la  culture  de  blé  de  printemps  en  fonction  des  stades  de  développement (tiré de Jones et al
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