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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Le traitement des questions socialement vives par le musée : Attentes de jeunes de filières agricoles

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LE TRAITEMENT DES QUESTIONS SOCIALEMENT VIVES PAR

LE MUSÉE : ATTENTES DE JEUNES DE FILIÈRES AGRICOLES.

Marine BIROUSTE

Master 2 Recherche, UMR STEF ENS Cachan/INRP UniverSud, Paris

MOTS-CLÉS : QUESTIONS SOCIALEMENT VIVES, MUSÉES, JEUNES, FILIÈRE

AGRICOLE, ATTENTES.

RÉSUMÉ : Les musées sont confrontés à un changement de médiation lors de l’abord des

questions socialement vives. Afin de connaître les attentes de lycéens de filières agricoles pour le traitement de ces questions par le musée, des questionnaires leur ont été distribués. Cent huit questionnaires d’élèves de lycée agricole en seconde, première et terminale ont été analysés.

ABSTRACT : Museums are changing their mediation when they talk about controversial

socio-scientific issues. In order to know the waiting of school students for the treatment of these issues by museums, questionnaires have been distributed to them. One hundred and eight questionnaire of students from the three levels of agricultural high school have been analyzed.

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1. INTRODUCTION

Les questions socialement vives sont des questions qui suscitent le débat dans la sphère publique mais aussi scientifique. Legardez & Alpe (2001) les décrivent comme « des questions « de société » qui interpellent les pratiques et/ou les représentations sociales des acteurs scolaires ; elles représentent un enjeu pour la société (globalement ou dans l’une de ses composantes) et suscitent des débats, voire des conflits ; elles font souvent l’objet d’un traitement médiatique tel que la majorité des acteurs scolaires en ont, même sommairement, connaissance ». Contrairement aux questions scientifiques une réponse-vérité n’existe pas pour ces questions.

Les musées de sciences et leur rôle évoluent. Ils se trouvent aujourd’hui confrontés au traitement de ces questions socialement vives. Comment traiter alors ces nouvelles questions ? Lors de cette étude, nous nous sommes particulièrement intéressés aux réponses de lycéens à ce problème.

Les lycéens sont un public particulièrement sensible sur ces questions. Ils sont en pleine construction de leurs idées, leurs opinions, leurs convictions. Les élèves de lycées agricoles sont d’autant plus touchés qu’ils risquent d’être directement confrontés à ces questions socialement vives dès leur entrée dans le monde du travail et qu’ils devront prendre des décisions. L’impact du musée peut donc être particulièrement important sur eux. De plus, les lycées agricoles offrent une pédagogie différente de celle des lycées d’enseignement général. L’interdisciplinarité y est favorisée et un des buts des formations est l’éducation à la citoyenneté.

Quelles sont les attentes des lycéens de filières agricoles concernant le traitement des questions socialement vives par le musée ? C’est la question que nous nous sommes posée dans cette étude. Pour y répondre, un questionnaire a été réalisé et distribué à des lycéens de seconde, première et terminale dans trois lycées agricoles de la région parisienne. Les pratiques culturelles des lycéens ont été interrogées mais aussi leur intérêt et leurs représentations concernant des questions socialement vives et leur opinion concernant les postures à prendre par les musées et ses médiateurs pour les traiter. Cent huit questionnaires ont été analysés. L’étude menée reste largement exploratoire. Il s’agit d’une première étude sur le thème qui devrait se poursuivre au fil des ans.

2. MÉTHODOLOGIE

Les attentes des lycéens vis-à-vis des musées sur les questions socialement vives ont été étudiées à partir d’un questionnaire (annexe 1) abordant les pratiques culturelles déclarées des lycéens, leurs représentations et intérêts pour les questions socialement vives, leurs attentes vis-à-vis des musées pour le traitement de ces questions, et leur identité. Les thèmes de la perte de biodiversité, du

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réchauffement climatique, du dopage dans le sport, des OGM, de la mondialisation économique, de l’exploration spatiale ou encore de la musique face à l’essor d’internet ont été sélectionnés et utilisés pour le questionnaire.

Les questions sur les postures à adopter par le musée, l’animateur du musée ou le professeur accompagnateur s’inspirent de l’étude de Kelly (1986) reprise par Simonneaux et Simonneaux (2006). Quatre postures sont décrites : 1- « neutralité exclusive » les aspects controversés ne sont pas abordés ; 2- « partialité exclusive » : intention délibérée de développer chez les élèves une opinion particulière ; 3- « impartialité neutre » : expression et confrontation des différents points de vue tout en restant neutre ; 4- « impartialité engagée » : les différents points de vue sont envisagés tout en clarifiant et en formalisant un positionnement propre.

Ces questions sur la posture à adopter ont été, dans un premier temps, posées de façon indirecte aux lycéens (question 10 - annexe 1). Une liste de deux ou trois propositions d’expositions par thème était proposée aux lycéens qui devaient sélectionner celle(s) qu’ils préféraient. Chaque proposition correspondait à une des quatre postures de Kelly mentionnées. Dans un second temps, les questions étaient directes (questions 11, 12 et 13). Le lycéen devait dire s’il souhaitait que le musée (ou le médiateur ou le professeur accompagnateur selon la question) soit neutre, prenne position, donne tous les points de vue…

Le questionnaire a été distribué dans trois lycées agricoles de la région Île de France, deux publics, Saint Germain en Laye (78) et Bougainville à Brie-Comte-Robert (77), et un privé, Fenelon à Vaujours (93). Dans chaque lycée, trois classes ont été concernées, une de chaque niveau. La passation dans chaque classe était d’une durée approximative de 30 minutes. Le questionnaire a été distribué à l’ensemble des élèves dans chaque classe. Cependant, tous n’ont pas été dépouillés et analysés. Une sélection aléatoire de 12 questionnaires par classe a été effectuée. Les 108 questionnaires sélectionnés ont été analysés par des statistiques descriptives puis par des statistiques exploratoires avec les logiciels Excel et R 2.2.0.

3. RÉSULTATS

3.1 Les habitudes muséales des lycéens

Les lycéens semblent aller peu au musée (près de 40 % déclarant avoir visité entre 0 et 2 musées au cours des deux dernières années), et leurs visites se font principalement dans un cadre scolaire qui semble donc être initiateur à la pratique muséale. Nous avons également pu nous rendre compte de la difficulté pour ces jeunes à cerner la définition de « musée ». Ceci se traduit par un large éventail de réponses à la question « lesquels (avez-vous visité cette année) ? », mais aussi par de nombreuses

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questions posées lors du passage des questionnaires (ex : « Qu’est-ce que c’est un musée ? »). Les lycéens déclarent aimer les musées de sciences (davantage que d’autres types de musées). Pourtant, les visites de musées scientifiques ne sont pas estimées comme les plus fréquentes. Il est d’ailleurs à noter qu’en visite libre, les lycéens visitent le plus les musées qu’ils apprécient le moins.

3. 2 Les questions socialement vives et les lycéens : préférences, représentations.

Parmi la liste de thèmes dans laquelle les lycéens devaient relever leurs préférences, le réchauffement climatique ressort majoritairement tandis que le dopage dans le sport, la sécurité routière ou encore la mondialisation économique ne touchent que peu ces jeunes. Les quatre thèmes préférés des lycéens (réchauffement climatique, biodiversité, exploration spatiale, OGM) sont des thèmes qu’ils considèrent comme étant essentiellement scientifiques. Tandis que la majorité des thèmes sont considérés comme relevant principalement d’un domaine (scientifique, économique ou social), certains thèmes, comme la musique face à l’essor d’Internet, ou le dopage sportif, ne sont pas jugés comme dépendant d’un domaine principal, mais de plusieurs.

3.3 Les postures de Kelly appliquées aux musées

La question de la posture à adopter par le musée a été, dans un premier temps, posée indirectement. Les lycéens, lorsqu’ils l’ont comme possibilité, choisissent en majorité (plus ou moins nette) une exposition incarnant l’« impartialité engagée » (figure 1). Selon eux, le musée devrait donc montrer un thème dans toute sa globalité (en traitant tous les aspects) tout en donnant son point de vue.

Figure 1 : Réponses des lycéens à la question indirecte sur la position à adopter par les musées.

En revanche, lorsqu’on le leur demande de manière directe, les résultats sont différents. Certes, pour eux, le musée devrait exposer la totalité d’un sujet en donnant tous les points de vue, mais il devrait rester neutre pour la grande majorité d’entre eux (figure 2). Dans l’absolu, ils souhaiteraient avoir

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tous les points de vue sans être influencés. Le fait que le musée donne son avis leur ôterait leur liberté d’opinion. Cette attitude se dégage largement lorsqu’on leur demande d’expliquer leurs choix. Les réponses des élèves vont de : « je pense qu'un musée doit être avant tout un moyen de s'informer et non pas d'influencer, il doit juste nous permettre d'être assez cultivé pour faire nos propres choix » au plus catégoriques : « sinon on formate l’idéologie des gens ». Cette neutralité du musée permettrait aussi, selon eux, à tous les publics de venir, que le musée ne s’adresse pas à un seul public qui partagerait les mêmes opinions : « si un musée prend position seulement une certaine partie des gens iront le voir. Si au contraire il reste neutre, il n'y aura pas d'avis et donc tout le monde, quels que soient les avis, pourront s'y retrouver ». Le musée semble donc avoir tout son rôle dans le traitement des questions socialement vives. La crainte des lycéens réside davantage dans la prise de position qui pourrait restreindre leur libre arbitre.

Figure 2 : Réponses des lycéens à la question directe sur la position à adopter par les musées.

De la même manière qu’ils le pensaient concernant le musée, une grande majorité d’élèves pensent que le professeur et l’animateur doivent rester neutres, ne pas prendre position.

Si la majorité des lycéens interrogés voient une nécessité de neutralité de la part des musées pour traiter des questions socialement vives, un groupe d’élèves se distingue en pensant qu’ils peuvent prendre position. Ces élèves justifient leur point de vue principalement par un besoin d’engagement pour sensibiliser le public sur certains sujets jugés importants « je pense que dans la plupart des sujets traités un musée doit rester neutre, mais qu'il prenne aussi un parti car cela pourrait permettre de lutter plus efficacement dans certains moments ». Ils gardent donc une logique dans leur propos et ne se contredisent pas : quelle que soit la façon de le leur demander, ils pensent que le musée peut donner son avis.

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4. DISCUSSION

Recueillir l’avis des lycéens, connaître leurs attentes sur le traitement des questions socialement vives par le musée, n’a pas pour objectif de répondre à toutes leurs attentes. Cependant, ce travail est important pour le musée et son évolution dans le cadre des recherches et des mouvements aujourd’hui en cours.

Tandis que la relation des lycéens au musée semble faible, leur relation avec les questions socialement vives est plus importante. Les thèmes qui les intéressent, parmi la liste de questions socialement vives proposée, sont principalement des thèmes qu’ils perçoivent comme scientifiques : réchauffement climatique, perte de biodiversité, exploration spatiale. Cependant, ils ne négligent pas et perçoivent bien l’aspect multidomaines de ces thèmes.

Les visites scolaires sont le cadre de visite le plus fréquent des lycéens interrogés. En dehors de ce cadre, les visites au musée sont rares. Si la place occupée par l’école dans les visites au musée est importante, alors la posture du professeur accompagnateur est également un enjeu. Bien que les lycéens semblent reconnaître que le professeur est une personne et qu’en tant que tel l’empêcher d’avoir des idées et des points de vue serait une aberration, la majorité des lycéens souhaitent qu’il s’abstienne de les donner. Cependant, un de ses rôles qui lui est attribué aussi bien par des élèves souhaitant que ne souhaitant pas avoir ses opinions, serait de conduire la classe au débat, à la faire entrer dans une discussion à propos des sujets soulevés par l’exposition.

Le musée est une institution publique et démocratique qui doit pouvoir accueillir tout le monde sans distinction d’idées. Pour cela, la majorité des lycéens lui voient la nécessité de rester neutre et de ne pas prendre position. De plus, ils craignent qu’en donnant son avis, le musée empêche les visiteurs de penser par eux-mêmes et se forger une opinion. Le musée les manipulerait, comme le font les autres médias. Cependant, lorsqu’une liste d’expositions est présentée aux lycéens, ils choisissent principalement les expositions où une position est clairement adoptée par le musée. Le musée semble alors pouvoir afficher ses opinions. Le discours des lycéens change selon la façon de les questionner. Cette ambiguïté semble faire ressortir la période de prise de position dans laquelle les lycéens se trouvent et leur désir de se forger leur propre opinion. Ainsi, elle pourrait se traduire par l’envie de voir des expositions qui correspondent à ce qu’ils pensent, pour renforcer leur opinion, consolider leur argumentation mais aussi par la crainte d’être influencé, manipulé.

Le musée n’est pas vu comme un lieu où seuls les aspects scientifiques et consensuels peuvent être abordés, mais comme un lieu où les aspects polémiques doivent être évoqués. Le débat peut entrer au musée. L’idée de musée espace public (Rasse, 1999) est une idée soutenue par les lycéens interrogés. Cependant, pour eux, l’ensemble des points de vue doit être évoqué pour apprécier l’ensemble du débat et se faire sa propre opinion. L’idée développée par Débart, Girault et Rasse en

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2000 selon laquelle le débat peut permettre de conserver l’indépendance du musée et de l’empêcher d’être partisan du débat, pourrait alors être une façon de répondre aux attentes des lycéens.

Cette étude, exploratoire, apporte déjà quelques pistes de réflexions pour poursuivre des recherches, sans doute plus qualitatives, pour tenter de cerner ces différences dans les attentes des lycéens, comprendre les raisons de leurs attentes.

5. BIBLIOGRAPHIE

DEBART, C., GIRAULT, Y., & RASSE, P. (2000). Diffuser ou débattre : Rôle de la muséologie des sciences. In Muséum national d’Histoire naturelle (Ed.), Des expositions scientifiques à l’action culturelle, des collections pour quoi faire, sous la direction de Girault Y. Paris.

KELLY, T .E., 1986, Discussing controversial issues : four perspectives on the teacher’s role. Theory and Research in Social Education, 19, 113-138.

LEGARDEZ, A., & ALPE, Y. (2001, septembre). La construction des objets d’enseignement scolaires sur des questions socialement vives : problématisation, stratégies didactiques et circulation des savoirs ». Communication présentée au 4e Congrès de l’AECSE, Lille, France.

RASSE, P. (1999). Les musées à la lumière de l'espace public : Histoire, évolution, enjeux. Paris : L'Harmattan.

SIMONNEAUX, L. & SIMONNEAUX, J. (2006). How do french teachers perceive their role in the teaching of controversial socio-scientific issues ? Communication présentée à NARST Conference (National Association for Research in Science Teaching), San Francisco, États-Unis.

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Figure 1 : Réponses des lycéens à la question indirecte sur la position à adopter par les musées
Figure 2 : Réponses des lycéens à la question directe sur la position à adopter par les musées

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