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Epidémiologie et santé mentale du couple : etude comparée de données populationnelles et de données cliniques

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ÉPIDÉMIOLOGIE ET sANTÉ MENTALE DU COUPLF.: ÉTUDE COMPARÉE DE DONNÉES POPULATIONNELLES

ET DE DONNÉES CLINIQUES

par

Guillaume Galbaud du Fort, M.D.

Département de Psychiatrie Université McGill, Montréal

Mars 1991

Thèse présentée à la faculté d'études supérieures et de recherche dans le cadre de l'obtention du diplôme de

Maitrise ès Sciences (M. Sc.) en Psychiatrie

C Guillaume Galbaud du Fort, 1991

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ü

-[

REMERCIEMENTS

À notre superviseur, Madame le Professeur Vivianne Kovess; ses judicieux conseils ont représenté un apport essentiel dans la réalisation de ce travail.

Aux membres de mon comité de Master, Messieurs les Professeurs Jean-François Boivin et Raymond Prince; leurs pertinentes remarques ont profondément influencé l'évolution de ce travail.

A

l'équipe de thérapie conjugale et familiale du CLSC Métro, et en particulier à Mesdames Sharon Bond et Lucille Fleury, pour leur accueil et leur collaboration.

À l'Unité de recherche psychosociale, et en particulier à Serge Charlebois et Daniel Girard, dont l'efficace soutien a représenté un élément essentiel dans la réalisation de ce travail.

À mes parents, et à mes soeurs.

À Fred et Dora, un couple que, malgré l'océan traversé et les années passées, je n'oublie pas ...

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r

t

,

• 111 •

RÉSUMt

Cette étude a comparé sur deux types de population différents, générale et

clinique, l'intérêt des approches individuelle et systémique dans l'étude épidémiologique de la santé mentale du couple.

L'analyse e:t population générale, réalisée sur un échantillon de 845 couples, a montré l'existence d'une ressemblance conjugale significative pour les différentes dimensions de la santé mentale explorées (détresse psychologique, bien-être général, satisfaction globale par rapport aux rôles).

L'analyse de l'échantillon clinique, qui comprenait 17 couples consultants en thérapie conjugale, a permis d'observer des différences entre hommes et femmes pour les caractéristiques de l'ajustement dyadique et pour les relations entre ajustement dyadique et symptomatologie dépressive.

En conclusion, il apparaît que la recherche épidémiologique sur la santé mentale du couple doit se donner comme objectif, en ce qui concerne le type d'approche du couple comme le choix de la population d'étude, d'élaborer une complémentarité là où elle paraissait confrontée à une dichotomie.

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IV

-SUMMARY

In an epidemiologicaI study of mental health in couples, individual and systecùc approaches were compared in terms of their appropriateness for general versus clinical populations.

The primary results from the study of 845 couples in the generaI population suggest that there exists a significant spouse-similarity across the various mental health

dimensions examined (psychological distress, general well-being, and role satisfaction). The main results from the study of 17 couples in marital therapy suggest that significant sex differences exist in dyadic adjustment. Sex differences were ~lso noted in the correlations between dyadic adjustment and depressive symptoms.

In conclusion, it appears that epidemiological research on the mental health of couples should have as its objective a simultaneous consideration of both the individual and the couple, as weIl as a simultaneous consideration of clinical and general

populations, in order to create a double complementarity out of this apparent double dichotomy.

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v

-TABLE DES MATIÈRES

CHAPITRE 1: INTRODUCTION ... 1

CHAPITRE II: REVUE DE LIITÉRA'fURE ... 3

A - SATISFACTION CONJUGALE ET SANTÉ MENTALE ... .4

1 - LES ÉTUDES RÉALISÉES EN POPULATION GÉNÉRALE ... .4

II - LES ÉTUDES RÉALISÉES SUR DES POPULATIONS DE PATIENTS PSYCHJATRIQUES ... _ ... 5

B - R:b:':'SEMBLANCE CONJUGALE POUR LA SANTÉ MENTALE ... 12

1 - DÉFINITION DE LA RESSEMBLANCE CONJUGALE ... 12

II - IMPLICA110NS GÉNÉTIQUES DE LA RESSEMBLANCE CONJUGALE PRIMAIRE ... 16

III - DESCRIPTION DE LA RESSEMBLANCE CONJUGALE: REVUE DE LA LITIÉRA TURE ... 1 8 A) LA RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR LES CARACTÉRISTIQUES SOCIO-DÉMOGRAPHIQUES ET PHySIQUES ... " ... 18

1) Caractéristiques sodo-démographiques ... 18

2) Caractéristiques physiques ... 22

B) RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR L'INTELLIGENCE ET LES APTITUDES COGNITIVES ... 25

1) Intelligence ... 25

2) Aptitudes cognitives ... 27

C) RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR LES A TIl TU DES ET VALEURS ET LES TRAITS DE PERSONNALITÉ ... 28

1) Attitudes et valeurs ... 28

2) Traits de personnalité ... 28

D) RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR LA SANTÉ MENTALE .. 33

1) Étude globale des troubles psychiatriques ... 37

2) Névroses ... 38

3) Troubles affectifs ... 38

(6)

vi

-4) Autres troubles psychiatriques ... .41

5) Explications de la concordance pour la pathologie psychiatrique ... .44

6) Conséquences de la ressemblance conjugale sur la pathologie psychiatrique ... 47

7) Critique de la littérature: le biais de sélection dans les études de populations cliniques ... 49

CHAPITRE III: OBJECTIFS DE L'ÉTUDE ... 53

A· LES OBJECfIFS DE L'ANALYSE DU FICHIER DES COUPLES DE L'ENQU~TE SANTÉ-QUÉBEC PILOTE ... 57

B - LES OBJECfIFS DE L' ANALYSE DES DONNÉES RECUEILLIES AUPRÈS DES COUPLES CONSULTANTS DU CLSC MÉTRO ... 60

CHAPITRE IV: MATÉRIEL ET MÉTHODES ... 63

A - LES DONNÉES POPULA TIONNELLES: L'ENQU~TE SAN1'É-QUÉBEC PILOTE ... 63

1 - MÉTHODOLOGIE DE L'ENQU~TE SANTÉ-QUÉBEC PILOTE ... 64

Il - V ALIDATION DES DONNÉES CONCERNANT LA SANTÉ MENTALE.66 III - LE FICHIER DES COUPLE~ ... 72

IV - MESURE DE LA sANTÉ MENTALE ... , ... " ... 76

A) MESURE DE lA SANTÉ MENTALE NÉGATIVE: L'ÉCHELLE DE DÉTRESSE PSYCHOLOGIQUE DE F. W. ILFELD ... 76

1) Description de l'Échelle ... 76

2) Utilisation de l'échelle dans notre étude ... 78

B) MESURE DE LA SANTÉ MENTALE POSmVE ... 87

1) La satisfaction dans différents rôles ... 88

2)

Le

bien-être ... 88

a) Le concept de santé mentale positive ... 88

b) Description de l'échelle de bien-être général ... 90

c) Utilisation de l'échelle de Bien-être Général dans notre étude .. 9Z V - ANALYSE ET TRAITEMENT DES NON-RÉPONSES ... 95

(7)

- - - -- ---

vii

-B) ATIRIBUTION DE VALEURS AUX DONNÉES

MANQUANTES ... 100 B - LES DONNÉES CLINIQUES: LE RECUEIL AUPRÈS DES COUPLES

CONSULTANTS DU CLSC MÉTRO ... 10.5 CHAPITRE V: ANALYSE DES DONNÉ:ES POPULATIONNELLES ... 111 A - ÉTUDE DESCRIPTIVE DE LA RESSEMBLANCE CONJUGALE

POUR LA SAN'fÉ MEN1'ALE ... 111 B - ORIGINE PRÉ MARITALE OU POSTMARITALF. DE LA

RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR LA SANTÉ MENTALE ... 116 C- CARACTÈRE ACTIF OU PASSIF DE LA RESSEMBLANCE

CONJUGALE POUR LA SANTÉ MENT ALE ... 132 D - RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR LA SANTÉ MENTALE ET

NIVEAU DE sANTÉ MENTALE ... t35 E - RESSEMBlANCE CONJUGALE ET SATISFACTION CONJUGALE ... 141 1- MESURE DE LA SATISFACTION CONJUGALE ... 142 II - SATISFACTION CONJUGALE ET SANTÉ MENTALE ... 144 III - RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR LA SANTÉ MENTALE

ET SATISFACTION CONJUGALE ... 147 IV - RESSEMBIAl\lCE POUR LA SATISFACTION CONJUGALE

ET SANTÉ MENTALE ... 149 V - RESSEMBLANCE POUR LA SATISFACfION CONJUGALE ET

RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR LA SANTÉ MENTALE ... 151 F- RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR LA SANTÉ MENTALE,

SATISFACTION CONJUGALE ET SANTÉ MENTALE ... 153 CHAPITRE VI: ANALYSE DES DONNÉES CLINIQUES ... 158 A - ÉTUDE DESCRIPTIVE DE LA RESSEMBLANCE CONJUGALE ... 158 B- AJUSTEMENT DYADIQUE ET NIVEAU DE SYMPTOMATOLOGIE

(8)

vili

-.f

,i

CHAPITRE VII: DiSCUSSiON ... " ... 168

A- PRINCIPAUX RÉSULTATS DE L'ANALYSE DES DONNÉES

POPULATIONNELLES ... 168 B - PRINCIPAUX RÉSULTATS DE L'ANALYSE DES

DONNÉES CLINIQ'JES ... 171 ANNEXE: VERSIONS FRANÇAISES DE L'ÉCHELLE D'AJUSTEMENT

DYADIQUE ET DE L'ÉCHELLE CES-D ... 179 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ... 186

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-LISTE DES TABLEAUX

..

Tableau II.1 - Études de la ressemblance entre mari et femme pour les traits de

personnalité ... 30

Tableau II.2 - Études de la concordance entre mari et femme pour la pathologie psychiatrique ... 35

Tableau iV.1 - Dé}Jression ... 70

Tableau IV.2 - Névrose ... 70

Tableau IV.3 - Maladie Mentale Sévère ... 70

Tableau IVA - Alcoolisme ... 70

Tableau IV.S - Code de l~en ... 72

Tableau IV.6 - Dénomblement des ménages ... 73

Tableau IV.7 - Diagnostic d'Episode Dépressif Majeur ... 85

Tableau IV.8- Comparaison IlfeldjDiagnostic DSM-III du psychiatre ... 87

Tableau l V.9 - Évaluation de la satisfaction par rapport à différents rôlcs ... 89

Tableau IV.10- Matrice d'association de l'échelle de bien-être général ... 94

Tableau JV.II - Distribution par sexe du compteur de réponses à l'Ilfeld ... 97

Tableau IV.12- Croisement intra-couples des compteurs de répon~es à }' échelle d'Ilîeld ... 98

Tableau IV.l3 - Classes pour l'âge et le nombre d'années de scolarité ... 103

Tableau IV.14- Score moyen à l'échelle d'Ilfeld en fonction de l'âge et du nombre d'années de scolarité ... 104

Tableau V.l - Ressemblance conjugale pour la santé mentale ... 115

Tableau V.2 - Distribution des couples en fonction de leur ancienneté ... 11R Tableau V3- Ressemblance conjugale / Âge couple - Détresse psychologique ... 123

Tableau V.4 - Ressemblance conjugale / Âge couple - Bien-être généraL ... 124

Tableau V.S - Ressemblance conjugale

1

Âge couple - Satisfaction glohale ... 125

Tableau V.6 - Probabilité cumulée de dissolution du premier mariage en fonction de certaines caractérirtiques chez les femmes ... 130

Tableau V.7 - Scores Individuels de Détresse Psychologique et Différence entre Conjoints pour la Détresse Psychologique ... 138

Tableau V.8- Scores Individuels de Bien-être Général et Différence entre Conjoints pour le Bien-être Général ... 139

Tableau V.9 - Scores Individuels de Satisfaction Globale et Différence entre Conjoints pour la Satisfaction Globale ... 140

Tableau V.lO- Degré de satisfaction conjugale ... 143

(10)

.'

Tableau V.12 Tableau V.13 -Tableau V.14 -Tableau Vl.l Tableau VI.2 Tableau VI.3 Tableau VI.4 Tableau VI.5 Tableau VI.6 • x

-Satisfaction Conjugale, Santé Mentale et Ressemblance Conjugale .. 148

Détresse psychologique des hommes et différence de satisfaction conjugale entre époux ... 151

Analyses de régre~sion des scores de santé mentale ... 156

Description des variables et comparaison entre sexes ... 160

Mesure de la ressemblance conjugale ... 162

Mesure de l'association entre ajustement dyadique et niveau de symptomatologie dépressive ... 163

Ajustement dyadique, symptomatologie dépressive et ressemblance conjugale ... 165

Affection exprimée et dépression " ... 166

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1

-CHAPITRE 1: INTRODUCTION

Dans l'abord de la santé mentale du couple, l'épidémiologie est confrontée à la même alternative que le clinique psychiatrique: doit-elle approcher le couple par le biais des indIvidus qui le comp~sent, ou considérer le couple comme une entité propre?

En effet, si l'approcbe traditionnelle en clinique p~ychiatflqlle est indIviduelle. les psychiatres, avec l'application de la théorie des systèmes à la communication humaine par l'école de Palo Alto, ont été amenés à s'intéres':>er au fonctionnement des sy~tèrne~

humains, couple et famille, comme déterminant important de la santé mentale individuelle, ce qui s'est traduit au cours des deux dernières décennie~ par le développement rapide des écoles et techniques de thérapie conjugale et familiale.

Cette dualité est également présente dans le champ de l'épidémiologie

psychosociale: l'approch~ individuelle prend en compte le conjoint comme élément de base du réseau social de l'individu et étudie les relations entre d'une part la perception que l'individu a de sa relation de couple, en particulier sa satisfaction, et d'autre part son niveau de santé mentale; l'approche épidémiologique du couple en tant que systeme, qu'entité distincte, s'intéresse aux relations entre les caractéristiques des conjoints, et en particulier aux relations entrf les valeurs chez chaque conjoint d'une même variable, donc à la ressemblance conjugale pour cette variable (il peut également s'agir d'une ressemblance négative, ou dissemblance).

Il faut noter que l'épidémiologie psychosociale n'a pas été la s\. 'Ile hranche de l'épidémiologie à intégrer le couple comme sujet d'étude, l'épidémiologie génétique s'étant également intéressée à la î~ssemblance conjugale. En effet, si les individlJs qui

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1

2

-hasard (c'est à dire plus ressemblants qu'en situation de «random mating»), ce qui la sagesse populaire illustre par le dicton «Qui se ressemble s'assemble», alors ce phénomène doit être pris en compte par les études génétiques familiales.

Outre cette dualité propre à l'étude du couple, l'épidémiologie est l'objet d'une seconde dualité, dualité qui concerne le type de population étudiée. En effet,

l'épidémiologie peut s'intéresser à des échantillons de population générale comme à des populations cliniques, c'est-à-dire prises en charge par le système de soins. De plus, il faut noter que le terme de population clinique peut s'appliquer

a

deux groupes différents dans le cas des couples: celui des couples où au moins un des deux conjoints est pris en charge pour une pathologie psychiatrique, et celui des couples qui ont entamé une thérapie conjugale.

Dans cette étude consacrée à l'épidémiologie de la santé mentale du couple, nous allons explorer les possibilités offertes par cette double dualité pour évaluer quelles articulations apparaissent les plus adéquates entre type de population étudiée, générale ou clinique, et type d'approche du couple, individuelle ou systémique. Pour cela, nous allons donc comparer l'intérêt de ces deux approches, individuelle et systémique, d'une part sur un échantillon de population générale, et d'autre part sur un groupe de couples ayant débuté une thérapie conjugale. Comme on l'a vu plus haut, notre approche individuelle s'intéressera essentiellement aux relations entre satisfaction conjugale et santé mentale, alors que l'approche systémique aura pour objectif principal, dans notre cas, l'étude de la ressemblance conjugale pour la santé mentale.

Nous allons dans un premier temps examiner la littérature consacrée à ces deux thématiques de recherche, ce qui nous permettra ensuite de définir de manière précise les objectifs de notre recherche.

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3

-CHAPITRE II: REVUE DE LITI'ÉRATURE

Cette revue de la littérature va s'intéresser aux deux thèmes d'étude que nous avons dégagés dans l'introduction, soit d'une part les relations entre satisfaction conjugale et santé mentale, et d'autre part la ressemblance conjugale pour la santé mentale.

Mais, avant ceci, il nous faut aborder la première question que se sont posés les épidémiologistes quand ils se sont intéressés à l'étude des relations entre couple et santé mentale, c'est-à-dire le problème des liens entre statut marital et santé mentale. Les travaux qui ont abordé cette question ont, pour la plupart, été concordants pour conclure que ce n'était pas le statut marital en tant que tel qui était relié au niveau de santé mentale, mais plutôt la qualité de la relation maritale; ainsi si globalement les individus mariés présentent une morbidité psychiatrique plus faible que ceux qui sont divorcés, séparés, ou célibataires, ceci est dtl, parmi les personnes mariées, au sous~groupe de celles qui ont une relation maritale satisfaisante, les individus mariés mais insatisfaits de leur relation maritale présentant eux une mDTbidité psychiatrique comparable aux individus divorcés, séparés, ou célibataires.

Au vu de la Httérature, il semble donc caduque de s'intéresser au statut marital en tant que tel. C'est plutôt la satisfaction conjugale dont il faut étudier les relations avec la santé mentale individuelle, ce que nous allons faire maintenant.

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4

-t.

A - SATISFACTION CON.TUGALE ET sANTÉ MENTALE

:{

Au cours des vingt dernières années, de nombreux travaux se sont intéressés aux relations entre insatisfaction maritale et pathologie psychiatrique, avec un intérêt particulier pour la symptomatologie dépressive.

('elon le type de population à laquelle ils se sont adressés, on peut distinguer quatre types de travaux: ceux réalisés en population générale, ceux s'intéressant à une population de patients psychiatriques, ceux concernant des couples souffrant de

problèmes conjugaux, et finalement ceux ayant étudié de manière comparative des groupes issus de deux de ces trois types de population. Nous allons maintenant rapidement présenter les principaux travaux retrouvés dans chacun de ces groupes.

1 - LES ÉTUDES RÉALISÉES EN POPULATION GÉNÉRALE

De nombreuses enquêtes épidémiologiques se sont intéressées à la relation entre statut marital et santé mentale et elles ont identifié les individus célibataires, séparés, divorcés ou veufs comme un groupe à haut risque par rapport à l'hospitalisation psychiatrique comme par rapport à l'utilisation des services de soins psychiatriques externes (Bachrach, 1975; Milazzo-Sayre, 1977). Mais ces travaux ne prenaient pas en compte la qualité de la relation conjugale; elles comparaient simplement les individus mariés aux autres, traitant donc de manière indifférenciée l'ensemble des individus mariés.

Néanmoins, on retrouve quelques travaux qui se sont intéressés aux liens entre qualité de la relation conjugale et santé mentale. Dans ce cadre, on peut citer l'étude de Renne (Renne, 1971), ainsi que les travaux de Brown et Harris (Brown, 1978), ou ceux de Birtchnell et Kennard (Birtchnell, 1983a), qui ont tous retrouvé une corrélation

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5

-1

négative entre qualité de la relation conjugale et santé mentale, celle-ci étant

appréhendée de manière assez globale. De même, Ilfeld, après avoir étudié un large échantillon urbain, conclut qu'il existe une corrélation étroite entre dépression et stress liés à la vie conjugale et parentale (Ilfeld, 1977); dans une étude récente, Waring

retrouve l'existence d'une corrélation négative entre la qualité de l'intimité maritale et la prévalence de la pathologie émotionnelle (Waring, 1986). Ces différents résultats nous paraissent souligner la justesse des propos de Greenblatt, Becerra et Serafitinides quand ils notaient, dans leur revue consacrée aux effets du réseau social sur la santé mentale, que c'est probablement plus la qualité de la relation que la simple existence de la relation qui a une influence importante sur la santé mentale (Greenblatt, 1982).

II - LES ÉTUDES RÉALISÉES SUR DES POPULATIONS DE PATIENTS PSYCHIATRIQUES

Au sein de ces études, on retrouve un premier groupe de travaux qui se sont intéressés à l'insatisfaction conjugale comme symptôme d'une pathologie psychiatrique. Ainsi, à l'issue de leur travail qui s'était intéressé à des patients consultants en

psychiatrie dont l'insatisfaction maritale étaient une des plaintes principales, Ü'verall et Henry concluaient que l'insatisfaction maritale peut être un symptôme d'un prohlème dépressif plus global (Overall, 1974). Dans une étude ultérieure, les mêmes auteurs notaient que les individus présentant un tableau dépressif névrotique avec agitation et hostilité se plaignaient plus fréquemment de l'existence de problèmes conjugaux (Henry, 1975). Dans le même ordre d'idées, Birtchnell a étudié un groupe de patients

psychiatriques en recherchant la présence de particularités symptomatologiques chez ceux qui avaient une relation conjugale insatisfaisante (BirtchneIl, 1983b).

Un deuxième groupe de travaux s'est intéressé à la relation entre dépression et

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l

1

6

-cette relation. Ainsi, Coleman et Miller ont trouvé une corrélation négative entre dépression et ajustement marital, mesurés à partir de deux auto-questionnaires, ceci sur une population de patients externes (Coleman, 1975). Dans leur étude sur les relations entre statut de santé rapporté, satisfaction maritale, et dépression, Weiss et Aved ont également retrouvé une corrélation négative entre dépression et ajustement marital, ceci sur deux populations, l'une constituée de patients externes d'une clinique psychiatrique, l'autre de patients de praticiens de médecine familiale (Weiss, 1978). Crowther a étendu l'étude des relations entre ces deux variables à une population de sujets hospitalisés en milieu psychiatrique. Elle retrouve une corrélation négative entre dépression et ajustement marital, tant pour leur auto-évaluation par le patient que pour leur évaluation par le thérapeute (Crowther, 1985).

Un troisième groupe de travaux a étudié l'influence de la pathologie psychiatrique sur l'ajustement marital. Ainsi, Hooley et al. ont étudié l'influence de la

symptomatologie sur la satisfaction conjugale du conjoint; leur groupe de patients présentait des diagnostics de schizophrénie, ou de dépression unipolaire ou bipolaire (Hooley, 1987). Arrindell s'est lui intéressé à l'ajustement marital des patients agoraphobiques (Arrindell, 1986). Mais la plupart des travaux de ce type se sont intéressés de manière spécifique à la pathologie dépressive; ainsi Dobson a cùmparé l'ajustement marital et social de femmes actuellement déprimées, de femmes ayant souffert de dépression, et de femmes non déprimées sans antécédents de dépression (Dobson, 1987); Merikangas et al. ont étudié l'ajustement marital de couples dans lesquels un des conjoints souffrait de trouble dépressif majeur, et l'a comparé à celui de couples témoins (Merikangas, 1985); Fadden a étudié de manière très détaillée les conséquences matérielles et psychologiques de la pathologie dépressive pour les conjoints de patients souffrant de dépression chronique (Fadden, 1987).

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-"

7

-Un quatrième groupe d'études s'est intéressé au mauvais ajustement conjugal comme facteur de risque de la dépression. Ainsi, McLean et Ogston, après avoir constaté que la relation entre un individu déprimé et son conjoint était souvent caractérisée par des types de communication inadaptés, suggéraient qu'un mauvais ajustement conjugal pouvait précéder l'apparition de la dépression (McLean, 1973). De même, Paykel et al., dans leur travail sur les relations entre événements de vie et

dépression, notaient que les difficultés conjugales étaient l'événement stressant le plus fréquemment rapporté pour la période de six mois ayant précédé l'apparition du

syndrome dépressif, et étaient également le problème le plus fréquemment mis en avant par les femmes déprimées entrant en traitement (Paykel, 1969). On peut ranger

également dans ce groupe le travail de Hooley et Teasdale qui se sont eux intéressés, ~ur

un échantillon de patients unipolaires dépressifs hospitalisés, à la valeur de prédiction du risque de rechute au cours des neuf mois suivant l'hospitalisation de trois variables psychosociales, soit les émotions exprimées, la détresse maritale, et la perception par le patient du degré de critique du conjoint à son égard. L'intérêt des auteurs !'l0rtait essentiellement sur les émotions exprimées (EE), et ils considéraient les deux autres variables comme conceptuellement reliées aux EE, mais plus faciles à mesurer. Ces troi~

variables étaient liées significativement au risque de rechute à 9 mois; les émotion~

exprimées et la détresse maritale expliquaient le même pourcentage de variance du devenir du patient, mais le meilleur prédicteur de rechute était la troisième variable, c'est-à-dire la réponse du patient à la question «À quel degré votre conjoint est-il critique par rapport à vous?». À elle seule, cette variable de critique perçue expliquait un pourcentage plus élevé de la variance du taux de rechute que n'en expliquaient les émotions exprimées et la détresse maritale combinées (Hooley, 1989).

Comme on peut le constater, parmi ces quatre groupes de travaux réalisé~ sur de~

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8

-( insatisfaction maritale et pathologie psychiatrique sous l'angle du rôle du mauvais ajustement marital dans le déclenchement de la décompensation psychopathologique. Mais, dans J'étude de Paykel, 1'insatisfaction conjugale est prise en compte seulement comme élément d'une liste de facteurs de risque potentiels; dans le cas de McLean, il ne s'agit que d'une observation marginale au sein d'une étude centrée sur un autre thème; dans l'étude de Hooley, outre le fait que ce sont les rechutes dépressives qui sont étudiées, l'intérêt de auteurs est centré sur les émotions exprimées, et la détresse maritale est étudiée de manière uniquement quantitative.

Néanmoins, certains auteurs ont essayé d'analys\.!r de manière un peu plus détaillée la relation entre insatisfaction maritale et dépression. Ainsi, Crowther, dont J'étude a été citée plùs haut, a, après avoir trouvé une corrélation négative entre dépression et ajustement marital sur une population de sujets hospitalisés en milieu psychiatrique, étudié les différences retrouvées entre sexes; cette analyse montrait que, alors qu'il n'y avait pas de différence entre hommes et femmes pour la sévérité de la dépression, les hommes déprimés évaluaient l'ajustement marital de manière

significativement plus positive que les femmes déprimées. Reprenant les résultats de Barnett et Nietzei qui trouvaient une corrélation plus étroite entre ajustement marital et estime de soi pour les femmes par rapport à leurs maris (Barnett, 1979), Crowther suggère que le plus mauvais ajustement marital qu'elle retrouve chez les femmes

déprimées reflète la plus grande influence pour elles de l'ajustement marital sur l'estime de soi (Crowther, 1985).

III· LES ÉTUDES RÉALISÉES SUR DES POPULATIONS DE COUPLES CONSULTANTS

On retrouve en fait dans la littérature peu de travaux qui se sont intéressés à la symptomatologie psychiatrique des sujets consultant pour des problèmes conjugaux.

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'

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-Feldman et coll. se sont intéressés à l'ensemble des symptômes psychiatriques présentés par maris et femmes consultant pour détresse conjugale. ceci à partir de leur éVé:lluation sur l'échelle SCL-90, dérivée de l'Hopkins Syrnptom Checklist (Feldman. 1983). Les résultats montraient que les femmes présentaient plus de symptômes, en intensité comme en nombre, que leurs maris, cette différence étant significative sur l'échelle globale ainsi que sur quatre des huit sous-échelles: anxiété phobique. somatisation, obsession-compulsion, et dépression anxieuse. Deux hypothèses différentes sont avancées par Feldman pour expliquer ses résultats:

- le fait que hommes et femmes réagissent différemment aux événements stressants: plusieurs études ont montré que les hommes sont généralement moins capables que les femmes d'expérimenter de manière consciente les émotions négatives (Allen. 1976; Buck, 1974), et ceci en particulier pour les sentiments de crainte et de tristesse

(Feldman, 1982). À la lumière de ces travaux, on peut penser que maris et femmes réagiront différemment au stress conjugal, les femmes réagissant de manière plus émotionnelle tandis que leurs maris montreront plus de déni et de répression des sentiments négatifs. Cette hypothèse est un accord avec les résultats de Feldman: les scores des maris étaient très nettement inférieurs à ceux des femmes pour l'axe «dépression anxieuse», alors qu'ils étaient du même ordre pour l'axe «dépression retardée».

- une autre explication pos~ible des différences observées entre maris et femmes est que l'harmonie maritale a plus d'influence sur le bien-être psychologique des femmes que

,SlJr celui de leurs maris et que, en conséquence, les difficultés conjugale!) sont plu!)

stressantes pour elles que pour eux. Cette hypothèse est en accord avec les résultats de Glenn qui indiquaient que la corrélation entre satisfaction conjugale et sati~faction

globale est plus forte pour les femmes que pour les hommes (Glenn, 1975). Comme précédemment, cette différence peut être le reflet du déni par le mari de la

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-IV. LES TRAVAUX AYANT ÉTUDIÉ DE MANIÈRE COMPARATIVE DES GROUPES ISSUS DE 1YPES DE POPULATIONS DIFFÉRENTS

Dans cette catégorie, on retrouve d'abord des études ayant comparé l'ajustement marital chez des couples de personnes déprimées et chez des couples témoins. On peut intégrer dans ce cadre des travaux que nous avons déjà cités plus haut, comme celui de Dobson qui a comparé l'ajustement marital et social de femmes actuellement déprimées, de femmes ayant souffert d~ dépression, et de femmes non déprimées sans antécédents de dépression (Dobson, 1987), ou celui de Merikangas et al. qui ont comparé

l'ajustement marital de couples dans lesquels un des conjoints souffrait de trouble dépressif majeur et celui de couples témoins (Merikangas, 1985). Dans le même ordre d'idées, Gotlib et Whiffen ont comparé des couples de patients hospitalisés pour

dépression, des couples de patients hospitalisés pour une raison médicale, et des couples témoins. Les couples de sujets déprimés et les couples de patients médicaux montraient, par rapport aux couples normaux, une insatisfaction maritale et des interactions

dysfonctionnelles; les couples de patients déprimés étaient de plus caractérisés par des affects négatifs à la suite des interactions avec le conjoint et par une évaluation négative des comportements du conjoint; les affects I1~gatifs étaient particulièrement marqués chez les femmes déprimées (Gotlib, 1989).

Chamberlaine et Barnes ont eux étudié le rôle de l'intimité maritale dans la recherche d'aide psychiatrique (Chamberlaine, 1989). L'intimité maritale est une mesure de l'ajustement marital qui a été élaborée par Waring (Waring, 1983).

Chamberlaine et Barnes ont comparé l'intimité maritale de deux groupes d'individus: le premier groupe était constitué par 57 patients mariés provenant de la liste des premières admissions dans une clinique psychiatrique externe; le second groupe comprenait 90 individus considérés comme symptomatiques, ceci à partir de leurs réponses au «General {[ Health Questionnaire» de Goldberg (Goldberg, 1979); ces 90 individus étaient issus d'un

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11

-'"_- échantillon de 250 couples de population générale. La comparaison de ces deux groupes montrait que les patients de clinique externe rapportaient, par rapport aux individus symptomatiques issus de l'échantillon de population générale, une plus faible intimité maritale pour plusieurs des dimensions relationnelles mesurées par le Waring Intimacy Questionnaire. Les auteurs en concluaient que le niveau d'intimité maritale apparaissait comme un bGn prédicteur du comportement de recherche d'aide chez des individus symptomatiques, ce comportement pouvant être en partie favorisé par une relation maritale insatisfaisante (Chamberlaine, 1989).

''''

Un dernier glOupe est constitué par les travaux qui ont étudié de manière

concomitante les rôles joués par la présence ou l'absence d'une pathologie dépressive et par le niveau de satisfaction conjugale sur les caractéristiques des \nteractions entre époux. Dans ce cadre, Biglan et Hops ont, pour comprendre le rôle joué par la relation maritale dans l'apparition et l'évolution d'une symptomatologie dépressive, cherché à établir, à un niveau descriptif, si il existait des caractéristiques interactionnelles

spécifiques des couples dans lesquels un des deux conjoints est déprimé. Pour cela, ib ont comparé trois groupes de couples: des couples en situation de détresse maritale dans lesquels de plus la femme était déprimée, des couples sans détresse maritale dans lesquels la femme était déprimée, et des couples sans détresse maritale et sans

dépression. Ces auteurs ont observé que plusieurs caractéristiques interactionnelle~

apparaissaient comme spécifiques des cou pIes dans lesquels la femme est déprimée, ceci tant pour les interactions en laboratoire que pour les observations faites au domicile; en particulier, le comportement de la femme déprimée semblait jouer un rôle suppresseur des comportements négatifs de son époux (Biglan, 1985; Hops, 1987).

Considérant que, dans les travaux de Biglan et Hops, l'absence d'un groupe contrôle composé de couples en situation de détresse maritale sans dépression chez un des conjoints était à l'origine de difficultés et d'ambiguïtés quant à l'interprétation de~

(22)

n.

-( résultats, Schmaling et Jacobson ont réalisé une recherche du même type, avec pour objectif de distinguer parmi les caractéristiques interactionnelles dysfonctionnelles celles qui étaient spécifiques de la dépression de celles qui 6taient associées à la détresse maritale. La présence ou l'absence d'une femme déprimée était croisée avec le niveau de satisfaction maritale du couple (détresse versus non détresse) pour produire quatre groupes de couples qui comprenaient chacun environ une trentaine de couples. Les couples dans lesquels la femme était déprimée montraient plus de comportements dépressifs que le faisaient les couples sans dépression, mais ceci uniquement lors de la discussion de sujets conflictuels (par opposition à des sujets neutres). On retrouvait, pour les comportements agressifs, une interaction entre sexe, dépression, et détresse maritale: les femmes déprimées dans des relations sans détresse avaient un

comportement caractéristique des couples en détresse (c'est-à-dire un degré élevé d'agression), alors que au contraire leurs maris avaient un comportement retrouvé dans les couples sans détresse (c'est-à-dire un faible degré d'agression). Schmaling et

Jacobson n'ont pas retrouvé que le comportement des Îemmes déprimées semblait jouer un rôle suppresseur des comportements négatifs de leurs époux, comme cela avait été ohservé par Biglan et Hops. La synthèse de leurs résultats amenait ces auteurs à suggérer que c'était plus la détresse maritale que la dépression qui était à l'origine des caractéristiques interactionnelles dysfonctionnelles observées dans les couples des femmes déprimées (Schmaling, 1990).

B - RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR lA sANTÉ MENTALE

1 - DÉFINITION DE LA RESSEMBLANCE CONJUGALE

On retrouve dans la littérature de langue anglaise d'assez nombreux travaux

,1

consacrés à l' «assortative mating». Comment peut-on traduire ce terme en français?

(23)

13

-«Mating» correspond au processus de formation du couple. «Assortative» signifie que ce processus se réalise de manière à ce que les conjoints soient assortis. Une traduction littérale serait donc «processus de formation des couples par similitude», ce qui renvoie au dicton «Qui se ressemble s'assemble». Mais, quand on étudie la littérature de langue anglaise, on se rend compte d'une part que ce terme d'(,assortative mating» n'est pas utilisé avec toujours exactement la même signification par les différents auteurs qui l'emploient, et d'autre part que cette signification est généralement plm. extensive que celle de la traduction littérale que nous avons indiquée ci-dessus. Ain"i, Merikangas définit l'«assortativ~ mating» comme la tendance des membres d'un couple à être plus ressemblants pour certains traits phénotypiques que si les deux conjoints avaient été choisis au hasard (MerikaI.gas, 1982a).

Dans la suite de ce texte, pour éviter toute ambiguïté, nous emploierons les termes suivants: la ressemblance conjugale telle que mesurée pour un trait particulier sera dénommée ressemblance conjugale observée (c'est l'équivalent de le «spouse similarity» des auteurs de langue anglaise); cette ressemblance conjugale observée est la somme de deux phénomènes: la ressemblance conjugale primaire ou prémaritale, ressemblance conjugale qui existait au moment où les individus se sont associés en couple, et la

ressemblance conjugale secondaire, ou postmaritale, qui elle s'est développée à partir du début de l'existence du couple en tant que tel.

Pour les traits dont la valeur est fixée de manière définitive chez les deux individus qui vont se marier, traits tels que la taille, la date de naissance, la couleur des yeux, l'ethnie, la religion, le niveau d'éducation, et les caractéristiques du milieu familial

d'origine, le problème de la me!;ure de la ressemblance conjugale primaire est simple car

il y a identité entre ressemblance conjugale primaire et ressemblance conjugale observée. Mais pour les traits qui sont évolutifs au fil de la vie de l'individu, tels par exemple que les comportements ou le niveau de santé mentale, le degré de resl.,emblance

(24)

• 14

-conjugale primaire ne se déduit pas aussi simplement à partir de la mesure de la

ressemblance conjugale observée, car il faut tenir compte de la ressemblance conjugale secondaire ou postmaritale.

La ressemblance conjugale secondaire fait intervenir trois facteurs différents: - Premièrement, les deux membres d'un couple interagissent entre eux, et ces

interactions peuvent être à l'origine du développement d'une ressemblance pour certains traits; qu'elle soit positive ou négative (dissemblance) le degré de

ressemblance liée à l'interaction entre conjoints s'accroît en fonction de la durée du mariage.

. Deuxièmement, les deux membres d'un couple sont soumis à des facteurs

environnementaux identiques, et ceci peut également être à l'origine d'un certain degré de ressemblance; pour les facteurs environnementaux qui ont une action

continue, le degré de ressemblance s'accroît en fonction de la durée du mariage; pour les facteurs environnementaux qui int~rviennent en tout ou rien, comme par exemple les événements stressants, c'est la probabilité d'observer la ressemblance liée à ce facteur qui s'accroît en fonction de la durée du mariage .

• Troisièmement, certains traits se développent avec l'âge, ou n'apparaissent qu'à partir d'un certain âge. et ceci peut également à l'origine d'un certain degré de

ressemblance conjugale; celui·ci ne s'accroît pas en fonction de la durée du mariage, mais en fonction de l'âge des individus.

Globalement, on peut donc supposer que le degré de ressemblance conjugale secondaire évolue essentiellement en fonction de l'ancienneté du couple, mais

également en fonction de l'âge des conjoints. Par ailleurs, si il y a plus de séparations et de divorces parmi les couples dissemblables que parmi les couples qui se ressemblent (ce qui appuierait l'hypothèse qu'il y a un lien entre degré de ressemblance et satisfaction

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1

15

-conjugale), ceci entraînerait une augmentation apparente mais artificielle du degré de ressemblance conjugale secondaire (Priee, 1980).

La ressemblance conjugale primaire pourrait ètre la règle pour de nomhreuses caractéristiques, et ceci dans différentes espèces (Crow 1970). Dans l'espèce humaine, cette ressemblance conjugale primaire ou homogamie semble exister pour de nombreux traits, qu'il s'agisse de caractéristiques physiques, de la race, de la religion. de l'âge. de l'ethnie, de la parenté, du statut marital antérieur, de l'éducation, ou de la classe sociale (Burgess, 1943; Hollingshead, 1950; Vandenberg, 1972).

Concernant la ressemblance conjugale primaire, il faut souligner que le fait d'observer un certain degré de ressemblance conjugale prémaritale pour un trait donné n'implique pas que cette ressemblance ait un lien direct avec le processus de constitution du couple. La similit'lde observée pour ce trait peut résulter de la covariance entre ce trait et un autre trait pour lequel il y a lien direct avec la formation du couple. Les auteurs de langue anglaise parlent alors de «secondary assortative mating», par

opposition au «primary assortative mating» qui correspond aux variahles pour lesquelles il y a lien direct (Cloninger, 1979; Eckland, 1972; Warren, 1966). Ce problème de l'existence possible rie corrélation:: entre les variables pour lesquelles on étudie la

ressemblance conjugale souligne l'intérêt d'une approche multivariée de la ressemblance conjugale par rappwt à l'approche univ~riée qui a été utilisée par la grande majorité des auteurs (Warren 1966). Il faut noter que ce point avait été soulevé des 1900 par Karl Pearson dans la conclusion d'une étude de la ressemblance conjugale pour la taille et la couleur des yeux (Pearson, 1900, pp. 436-437).

D'autre part, le fait qu'il y ait un lien direct entre Ja ressemblance conjugale primaire pour un trait donné et le processus de formation du couple n'implique pas que

(26)

c'està 16 c'està

-dire qu'elle ait été un critère conscient de choix du partenaire. En effet, une grande partie des contacts entre humains sont secondaires à une proximité ou une ressemblance, qu'il s'agisse d'une proximité géographique, ou d'une ressemblance éducationnelle ou sociale. Ceci a amené certains auteurs a essayer de distinguer la part de l'influence «passive» de ces variables de celle de l'influence «active» de la préférence personnelle (Mascie-Taylor, 1985, 1988; Warren, 1966).

II • IMPLICATIONS GÉNÉTIQUES DE LA RESSEMBLANCE CONJUGALE PRIMAIRE

Le rôle de la ressemblance conjugale dans la formation des couples constitue en fait un mécanisme de sélection du conjoint et a donc une influence sur les

caractéristiques de la descendance. En conséquence, la ressemblance conjugale primaire a été intégrée comme paramètre dans les modèles génétiques de description et d'analyse des facteurs polygéniques et culturels (Cannings, 1979; Cloninger, 1979; Rao, 1976). Dans ce cadre, les auteurs ont été amenés à introduire des distinctions selon le caractère transmissible ou non des traits étudiés, et selon leur mode de transmission. Ainsi, par exemple dans le modèle proposé par Cloninger et al., la ressemblance conjugale est subdivisée en trois composantes qui sont définies comme suit: la ressemblance conjugale phénotypique qui est par définition transmissible, la ressemblance conjugale pour les caractéristiques socio-culturelles, qui est transmissible, et la ressemblance conjugale pour les caractéristiques liées à l'environnement. qui n'est pas transmissible (Cloninger,

1979).

D'autre part, le phénomène de la ressemblance conjugale prémaritale a également un impact dans le domaine de; la génétique des populations. Comme les individus qui présentent une ressemblance phénotypique ont le plus souvent un peu de similitude sur

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17

-...

"""'" conjugale primaire soient globalement les mêmes que celles de la consanguinité (Crow. 1968). Les conséquences sur la composition génique de la population totale d'un excès de croisement par consanguinité sont de deux ordres: une augmentation du taux moyen d'homozygotie d'une part, et d'autre part une augmentation de la variance génique dans la population totale. Il n'y a pas de modifications des fréquences géniques dans la population, sauf si le taux de fertilité diffère selon les types de couples. Si les

conséquences de la ressemblance conjugale primaire sont qualitativement du même ordre, il y a des différences sur le plan quantitatif. En générale, la ressemblance

conjugale pré maritale est à l'origine d'une augmentation du taux d'homozygotie moindre que dans le cas de la consanguinité, en particulier si le trait en question est déterminé par plusieurs loci. Par contre, l'augmentation de la variance d'un trait multifactoriel est plus grande avec la ressemblance conjugale primaire que dans le cas de la consanguinité. Une dernière différence est que la consanguinité affecte tous les loci qui ségrégent ensemble, alors que la ressemblance conjugale ne touche que ceux qui sont liés au trait en question (Crow, 1968).

Les effets de la ressemblance conjugale primaire sur les caractéristiques génétiques de la population dépendent cependant du degré de contrôle génétique du facteur étudié et de son mode de transmission. Pour les traits qui sont en grande partie contrôlés par des mécanismes génétiques (homogamie phénotypique), la ressemblance conjugale aurait pour résultat des pourcentages plus élevés d'individus exprimant les degrés les plus extrêmes de ces traits. De plus, les familles tendraient à être plus

homogènes pour ces traits que si l'association des conjoints s'était faite au hasard. Pour les traits qui ne sont pas génétiquement déterminés (homogarnie sociale), comme la religion ou la classe sociale, la ressemblance conjugale augmenterait l'homogénéité de ces caractéristiques dans la génération suivante et maintiendrait les limites respectives

l~ des différents sous-groupes dans la population (Cavalli-Sforza, 1971).

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18

-1

III - DESCRIPTION DE LA RESSEMBLANCE CONJUGALE: REVUE DE LA LITTÉRATURE

Nous allons passer en revue les études consacrées à la ressemblance conjugale, en nous intéressant essentiellement à celles concernant les caractéristiques psychologiques et la morbidité psychiatrique. Pour cette dernière, la ressemblance conjugale serait un facteur important dans les études familiales génétiques de la pathologie psychiatrique car elle doit être prise en compte dans l'analyse du mode de transmission du ou des traites) génétique(s) impliqués et peut influencer la distribution de la pathologie étudiée dans la population. De plus, la ressemblance conjugale peut également avoir des

implications cliniques, car la sélection de couples comprenant certains traits

psychologiques et/ou maladies psychiatriques peut être rapporté à l'ajustement marital et social de tels couples à plusieurs niveaux: premièrement, la présence d'une pathologie psychiatrique chez le conjoint peut influencer le résultat du traitement d'un patient psychiatrique; deuxièmement, le déroulement et le résultat d'une thérapie de couple peut être modifiée par l'existence d'une pathologie psychiatrique chez les deux membres du couple; troisièmement, l'entourage familial et le risque d'apparition d'une pathologie psychiatrique chez les enfants peut être influencé par la présence d'une pathologie psychiatrique chez les deux parents (Merikangas, 1982a).

A) LA RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR LES CARACTÉRISTIQUES

SOCIO-DÉMOGRAPHIQUES ET PHYSIQUES 1) Caractéristiques socio-démographiques

Une des premières caractéristiques socio-démographiques à avoir été étudiée a été l'âge. Aux USA, Lutz retrouvait en 191f. une corrélation de 0,76 entre âges des époux (Lutz, 1918), alors qu'en 1950 Hollingshead observait sur un échantillon de la population

,of

de New-Haven (Connecticut) un coefficient de contingence de 0,76 (Hollingshead,

(29)

19

-__ 1950); dans une revue de la littérature, Roberts notait que pour les sociétés occidentales toutes les corrélations étaient situées entre 0,51 et 0,94, et que, si on excluait les couples sans enfant, la fourchette était de 0~66 à 0,94 avec la plupart des corrélations situées entre 0,8 et 0,9 (Roberts, 1977). Récemment, Mascie-Taylor observait sur un échantillon représentatif de la population britannique un coefficient de corrélation global de 0,79 (p < 0,001), mais il existait des différences significatives entre corrélations calculées pour les différentes classes sociales, et a un moindre degré entre régions, avec une interaction significative entre ces deux variables (Mascie-Taylor, 1987).

La ressemblance conjugale pour l'âge explique probablement en grande partie le fait que l'on retrouve une ressemblance conjugale pour le statut marital antérieur, c'est-à-dire que les individus qui n'ont jamais été mariés ont tendance à se marier entre eux, et les sujets divorcés entre eux (Bowerman, 1952).

Comme on l'a vu plus haut, une certaine part de la ressemblance conjugale est due au fait que les jeunes adultes sont exposés en général a un échantillon assez limité de conjoints possibles: les étudiants de leur école ou université, les jeunes habitant dans le même quartier, ou ceux pratiquant les mêmes activités de loisirs représentent l'6,,~ntiel

'-de cet échantillon. Cette «proximité» qui joue le rôle '-de facteur limitant a été ~uhdivisée

en deux composantes: la proximité géographique et la proximité de voisinage.

Pour ce qui concerne la proximité géographique, elle est due au fait que pour se rencontrer les individus doivent, sauf rares exceptions, vivre au moins temporairement dans une même zone géographique limitée. En 1932, Bossard avait montré sur un échantillon de couples de Philadelphie que, pour plus de la moitié de ceux-ci, les futurs conjoints vivaient à moins de vingt blocs de distance l'un de ,'autre à l'époque où ils ont obtenu leur licence de mariage (Bossard, 1932). Des résultats assez semblables ont été 0,", retrouvés dans d'autres villes américaines ainsi qu'en Europe Occidentale (Burr, 1973) .

(30)

20

-\l

La mobilité géographique individuelle s'étant accrue au cours du vingtième siècle, cette tendance à la proximité géographique a légèrement diminué dans le même temps. Ainsi, à Ann-Arbor, dans le Michigan, la distance moyenne entre le lieu de naissance des époux et leur lieu de mariage est passée de 40 milles en 1900 à 110 en 1950 (Spuhler, 1961). Au Brésil, cette distance moyenne est passée de 26 km à 48 km durant la première moitié du vingtième siècle (Salzano, 1970).

L'autre composante de la ressemblance par proximité, c'est-à-dire J'homogamie par voisinage est en grande partie reflétée dans la ressemblance pour le niveau

d'éducation. Le statut socio-économique des parents est en effet un des principaux déterminants, d'une part du type de quartier dans lesquels vivent les adolescents et les jeunes adultes, et d'autre part du type d'école dans laquelle ils étudient (Katz, 1958). Ainsi, Hollingshead, dans une étude de New-Haven que nous avons déjà citée, retrouvait une ressemblance significative pour la classe sociale et pour le niveau d'éducation

(Hollingshead, 1950). De même, Burgess, sur un échantillon de 1 000 couples fiancés de la région de Chicago, retrouvait une ressemblance significative pour le statut socio-économique des parents, le lieu de résidence dans l'enfance, et le nombre d'années de scolarité avec des coefficients de contingence respectifs de 0,32, 0,43, et 0,50 (Burgess, 1943). Des études plus récentes ont confirmé ces résul,ats, pour le statut

socio-économique (Girard, 1981; Johnson, 1976; Mascie-Taylor, 1987; Williams, 1975) comme pour le niveau d'éducation (Girard, 1981; Mascie-Taylor, 1987; Rockwell, 1976). Mais cette ressemblance varie probablement en fonction de l'époque et du milieu d'origine; ainsi, dans une étude s'intéressant aux trois principaux groupes ethniques de Hawaï, c'est-à-dire les sujets d'ascendance chinoise, européenne et japonaise, Ahern retrouve une décroissance intergénérationnelle (entre grands-parents et parents) de la

ressemblance conjugale pour le niveau d'éducation pour les individus d'origine

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1

21

-\

dans la mesure ou le niveau d'éducation et le statut socio-économique des parents sont deux variables intercorrélées, Warren a essayé d'analyser les relations entre les

corrélations conjugales pour ces deux variables; il montre qu'en ajustant sur le niveau d'éducation, la corrélation pour le statut socio-économique des parents se trouve réduite environ de moitié, c'est-à-dire que la ressemblance pour le niveau d'éducation

expliquerait environ 50% de la ressemblance retrouvée pour le statut socio-économique des parents (Warren, 1966).

D'autres variables socio-démographiques interviennent de manière évidente dans le processus d'association conjugale: la religion, l'ethnie, la race. Certaines religions réprouvent sévèrement le mariage avec quelqu'un d'une autre religion, et presque aucune religion ne regarde favorablement ce type d'union. Même si ces restrictions étaient déjà moins vives dans les années cinquante, Burgess comme Hollingshead retrouvent un degré élevé de ressemblance conjugale pour la religion, le coefficient de contingence retrouvé par Hollingshead sur un échantillon de 1848 couples de New-Haven étant de 0,77 (Burgess, 1943; Hollingshead, 1950). Sur la même population de New-Haven que Hollingshead, Kennedy a distingué au sein des appartenances

religieuses les individus selon leur origine ethnique; elle a donc divisé son échantillon en huit sous-groupes: les catholiques répartis selon leur ascendance irlandaise, italienne ou polonaise, les protestants répartis selon leur ascendance britannique, américaine,

germanique ou scandinave, et les juifs. Outre le fait de retrouver une homogamie pour la religion, elle a observé pour les individus de religion catholique une ressemblance conjugale pour l'origine ethnique, avec une proportion de mariages intraethniques de 45% pour les catholiques irlandais, de 82% pour les catholiques italiens, et de 53% pour les catholiques polonais (Kennedy, 1944).

Quand il s'agit non plus de différences ethniques mais de différences raciales, la

(32)

22

-1

comme ceux de Kennedy ont ainsi retrouvé une absence presque totale de mariages interraciaux dans la population de New-Haven (Hollingshead, 1950; Kennedy, 1944). Mais dans la plupart des pays on dispose de peu d'informations sur les mariages interraciaux car il n'y a pas d'enregistrement de l'origine raciale des personnes qui se marient. L'état américain d'Hawaï constitue une exception, car cet enregistrement y est pratiqué. Dans leur étude des croisements interraciaux à Hawaï, Morton et coll. ont analysé les certificats de naissance de 179.327 enfants; en excluant les cas dans lesquels les parents étaient eux-même d'ascendance mixte, ils observent sur l'échantillon restant que 87,9% des enfants sont issus de parents de la même origine raciale. Si on suppose que le taux de fertilité ne diffère pas dans les différents groupes raciaux, alors ce chiffre de 87,9% représente le taux d'homogamie raciale, et 12,1% l'estimation de la fréquence des mariages interraciaux (Morton, 1967).

2) Caractéristiques physiques

Comme on l'a évoqué plus haut, Karl Pearson a été un des premiers à étudier la ressemblance conjugale pour les caractéristiques physiques. Il observait sur un

échantillon de 1,000 couples une corrélation de 0,28 pour la taille (Pearson, 1903), de 0,26 pour le poids et de 0,26 pour la couleur des yeux (Pearson, 1906). À la même époque, Harris observait une corrélatIOn de 0,34 pour la couleur des cheveux (Harris, 1912), ceci sur un échantillon de 774 couples. Plus près de nous, en 1944, Burgess et Wallin retrouvaient une corrélation de 0,31 pour la taille (Burgess, 1944). Roberts, qui a revu la plupart des études réalisées dans ce domaine, indique que les corrélations sont situées pour la taille dans une fourchette de 0,093 à 0,34 et de 0,153 à 0,26 pour le poids (Roberts, 1977). Mascie-Taylor qui, sur son échantillon représentatif de la population britannique retrouvait une corrélation de 0,277 pour la taille (p < 0,001) et de 0,109 pour le poids (p < 0,001), a essayé de déterminer si cette ressemblance conjugale pour la

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23

-si elle pouvait être expliquée par la ressemblance pour certaines variables socio-démographiques. En effet, il y a une association entre taille et classe sociale. les personnes de grande taille étant en moyenne de classe sociale plus aisée que les personnes plus petites (Mascie-Taylor, 1985), et la classe sociale est elle même

fortement corrélée au niveau d'éducation. Il a donc pour le poids comme pour la taille extrait la part de variance expliquée par la classe sociale, le nombre d'années de

scolarité, l'âge et la région, part qui était significative pour la taille dans les deux sexes et pour le poids chez les femmes. Mais les corrélations entre valeurs résiduelles restaient significatives, avec des valeurs respectives de 0,268 pour la taille (p < 0,001) et 0,115 pour le poids (p < 0,001). Il concluait donc que le rôle des variables

socio-démographiques dans la ressemblance observée pour la taille et le poids était négligeable (Mascie-Taylor, 1987).

Puisque les membres d'un couple ont tendance à se ressembler pour un certain nombre de caractéristiques physiques et notamment plusieurs indices anthropométriques (Spuhler, 1968) certains sociologues ont cherché à déterminer si il existait une

ressemblance conjugale sur le plan physionomique. Pour cela, ils ont demandé à des juges de reconstituer les couples à partir de photos de maris et de femmes. Dans des conditions expérimentales assez rigoureuses, Griffiths et é()lJ. tout comme Chambers et cO,ll. observent que leurs juges apparient correctement un nombre de couples

,~

significativement plus élevé que celui dÎ' au hasard; Griffiths note qu'il ne semble pas y avoir d'accroissement de cette tendance avec l'ancienneté du couple; finalement, ces deux auteurs revoient les différentes hypothèses .éprouvant expliquer cette ressemblance physionomique, qu'elles soient d'origine psychologique, psychanalytique ou sociologique (Chambers, 1983; Griffiths, 1973).

Dans un tout autre domaine, 011 observe une ressemblance entre époux pour le

niveau de tension artérielle, systolique comme diastolique, résultat qui a été retrouvé par

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24

-de nombreux auteurs (Chazan, 1964; Havlik, 1979; Haynes, 1983; Rose, 1979; Sackett, 1975; Speers, 1986; Suarez, 198; Tseng, 1967). Différentes hypothèses peuvent être avancées pour expliquer cette ressemblance conjugale pour le niveau de tension artérielle:

1) Il peut s'agir d'une ressemblance; prémaritale comme le niveau de tension artérielle ne peut pas avoir de rôle direct dans le processus d'association des conjoints, la ressemblance conjugale pour le niveau de tension artérielle serait alors secondaire à la ressemblance conjugale pour des variables qui ont une influence sur le niveau de tension artérielle telles que la corpulence, le niveau d'activité physique, la

consommation d'alcool et de tabac. Mais si cette hypothèse de ressemblance pré maritale était vérifiée, la ressemblance conjugale pour le niveau de tension artérielle devait être observée dès le début du mariage, ce qui ne semble pas le cas puisque certains auteurs ont observé que le taux de concordance s'accroît avec la durée du mariage (Sackett, 1975), ou même que la concordance n'était observée que pour les couples mariés depuis un certain temps (Haynes, 1983). Mais

l'augmentation de la concordance avec la durée du mariage n'exclut pas la possibilité d'une ressemblance prémaritale; Speers souligne qu'elle peut être due a un effet retardé et cumulatif d'une ressemblance présente au moment du mariage comme par exemple dans le cas de l'union de deux conjoints tous les deux obèses au moment du mariage dont l'un a déjà une hypertension à cette époque alors que chez l'autre elle se développe ultérieurement (Speers. 1986).

2) Une autre explication possible est le fait que les conjoints partagent le même environnement, environnement dont font partie des variables qui ont une influence sur le niveau de tension artérielle, telles que le régime alimentaire ou le niveau de stress.

(35)

f

25

-3) Une dernière explication est présentée par le fait que la ressemblance conjugale pour des variables ayant une influence sur le niveau de tension artérielle peut augmenter avec la durée du mariage, comme par exemple la consommation d'alcool et de tabac ou la pratique d'exercice physique.

Ces deux dernières hypothèses explicatives ont été relativement infirmées par le travail de Speers qui dans une étude menée sur 1.260 couples du Connecticut, montrait que la corrélation entre époux pour le niveau de tension artérielle restait hautement significative (p < 0,001) après extraction de la part de variance expliquée par à la fois les valeurs individuelles et les mesures de similitude entre époux pour l'âge, le statut

pondéral, les apports sodés, le statut socio-économique, les revenus, le statut d'activité, le niveau d'éducation, la consommation de tabac et la quantité d'exercice physique; ce résultat conduisait Speers à suggérer de prendre en compte pour les analyses ultérieures de ce problème les variables décrivant les interactions entre époux, comme par exemple les émotions exprimées (Speers, 1986).

B) RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR L'INTELLIGENCE ET LES APTITUDES COGNITIVES

1) Intelligence

La similitude entre époux pour l'intelligence a été la caractéristique psychologique qui a été la plus largement étudiée. Dans une revue de la littérature parue avant 1939, Richardson (Richardson, 1939) rapporte les résultats de onze études avec une

corrélation mari·femme moyenne de 0,49. Roff (Roff, 1950), dans une revue ultérieure, trouvait des résultats très voisins, avec une corrélation de 0,50. Une étude de Reed et Reed (Reed, 1965) a examiné les quotients intellectuels mesurés pendant l'enfance de 1,866 couples mariés. Ces auteurs rapportent un coefficient de corrélation de 0,33, avec quelques différences très marquées empêchant les corrélations d'être même plus

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26

-( élevées. Des différences de quotient d'intelligence de dix points ou moins étaient observées sur 47% de l'échantillon, de quinze points ou moins sur 66%. De la même manière, dans une revue sur les études familiales récentes de l'intelligence, Bouchard et McGue (Bouchard, 1981) rapportent une corrélation moyenne pondérée pour les époux de 0,33, corrélation moyenne calculée sur 16 études différentes englobant au total 3 817 couples. Il est intéressant de noter que les corrélations mari-femme pour l'intelligence sont égales ou supérieures aux autres corrélations intrafamiliales (Roff, 1950).

Mascie-Taylor s'est intéressé de manière analytique à la ressemblance conjugale pour l'intelligence, et ceci sous deux angles différents. D'une part, il a essayé de

déterminer si cette ressemblance conjugale pour l'intelligence était soit secondaire à la «proximité» géographique, éducationnelle et sociale, soit due à la préférence

personnelle, ceci sur un échantillon de 193 couples. La corrélation moyenne entre époux pour le quotient intellectuel était de r = 0,40 (p < 0,001); après ajustement sur les

variables mesurant la ressemblance pour le type et le nombre d'années d'éducation, la classe sociale, et certaines variables individuelles comme la taille de la famille d'origine, le rang de naissance, la corrélation partielle restait significative (p < 0,01) avec r = 0,21; Mascie-Taylor attrihuait cette considération résiduelle à la préférence personnelle pour des traits physiques ou psychologiques. Il concluait donc que, même si la ressemblance pour les caractéristiques géographiques, éducationnelles et sociales joue un rôle

important dans la ressemblance pour le quotient intellectuel, la préférence personnelle intervient également (Mascie-Taylor, 1988).

D'autre part, cet auteur a également cherché à déterminer si cette ressemblance était essentiellement de nature préIl'aritale ou postmaritale. Il a donc étudié la relation entre corrélation entre époux pour le quotient intellectuel et nombre d'années de

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27

-pour l'intelligence résulte plutôt du choix initial des conjoints que d'une convergence développée au fil de la vie conjugale (Mascie-Tayic r, 1989).

2) Aptitudes cognitives

Deux études récentes sur la similitude à l'intérieur des couples pour des aptitudes cognitives spécifiques (spatiale, verbale, vitesse de perception, mémoire) ont rapporté des résultats contradictoires (Johnson, 1976, Zonderman, 19ï 7). Dans l'étude de Johnson et coll. (Johnson, 1976), les corrélations moyennes ajustées sur l'âge pour deux échantillons d'américains d'origine japonaise et d'américains d'origine européenne étaient respectivement de +0,07 et +0,13. Le calcul de coefficients de corrélation

partielle, soustrayant l'effet de l'éducation, réduisait encore les corrélations. Zonderman et coll. (Zonderman, 1977), cependant, dans une étude sur les aptitudes cognitives

spécifiques de 123 couples mariés. ont trouvé des corrélations mari-femme

statistiquement significatives pour I l des 15 tests cognitifs. Ces corrélations restaient significatives après contrôle des effets de l'âge et du sexe. Bien que les deux études aient rapporté des résultats positifs, la différence entre les valeurs des corrélations observées pourrait être expliquée par les méthodologies différentes employées par les deux types d'investigateurs, ou par les différences existant entre les échantillons étudiés.

Cepenàant, dans une revue récente de la littérature concernant la similitude entre conjoints pour les aptitudes, Johnson et coll. (Johnson, 1980) remarquent une

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-l

C) RESSEMBLANCE CONJUGALE POUR LES ATfITUDES ET VALEURS ET LES TRAITS DE PERSONNALITÉ

1) Attitudes et valeurs

Ces travaux effectués dans le champ des attitudes et des valeurs fourI1Îssent une preuve encore plus forte de l'homogamie à l'intérieur des couples. Dans sa revue de la littérature parue avant la seconde guerre mondiale, Richardson (Richardson, 1939) retrouvait une corrélation moyenne entre époux de 0,55 sur dix études utilisant des échelles telles que l'échelle de valeurs de Allport-Vernon (Allport-Vernon Value Scale), l'échelle d'attitudes de Thurstone (Thurstone Scale of Attitudes), l'échelle de

libéralisme-conservatisme de Harper (Harper Liberalism - Conservativism Scale) et l'échelle de modèles de croyances (BeliefPattern Scale). Durant la décennie suivante, quatre études importantes de la ressemblance mari-femme pour les opinions et les attitudes ont été publiées et retrouvaient des corrélations encore plus élevées: échelle de jugement moral (Moral Opinion), r = 0,65; échelle d'attitudes de Pur due (Purdue Attitudes Seales), r = 0,59; et sondage d'opinion de Purdue (Purdue Opinion PoIl), r = 0,89. Dans chacune de ces études, la similitude pour les autres relations

intrafamiliale-:; était également déterminée (entre mari et enfants, femme et enfants, et entre enfants eux-même) et la similitude était significativement plus élevée pour la relation entre conjoints que pour les autres relations intrafamiliales (Roff, 1950). Une étude plus récente menée par Eysenck (Eysenck, 1974) retrouvait un degré élevé de similitude entre époux pour la permissivité sexuelle prémaritale.

2) Traits de personnalité

Les données sur la ressemblance conjugale pour les traits de personnalité sont généralement en faveur de la théorie de l'homogamie, mais à un moindre degré que

~r dans le cas de l'intelligence et de celui des attitudes et des valeurs. De nombreuses d.

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l

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-études se sont intéressées au problème de la ressemblance conjugale pour les traits de personnalité, mais on peut difficilement comparer leurs résultats car elles ont utilisé des instruments reposant sur des définitions différentes des traits de personnalité. Le tableau II.1 présente les principales caractéristiques de ces études.

Dans ce tableau, les corrélations observées sont généralement peu élevées. et même négatives dans quelques cas. Celles de ces études qui testaient le caractère significatif des associations ont retrouvé des corrélations entre maris et femmes significativement différentes de zéro ou des contrôles pour environ la moitié des traits mesurés.

Richardson (Richardson, 1939), dans son étude de la littérature parue avant la seconde guerre mondiale, a revu les travaux examinant la ressemblance entre mari et femme pour les tendances névrotiques, l'introversion-extraversion, l'indépendance et la dominance. Les tendances névrotiques, qui étaient mesurées dans six études, était le trait psychologique le plus hautement corrélé, avec un coefficient de corrélation mari-femme moyen de 0,20. Les résultats les plus variables étaient observées pour la dominance, avec des corrélations entre époux négatives dans deux études, et significativement positives dans deux autres études.

Ensuite, la plus grande étude sur les traits de personnalité des conjoints a été celle de Burgess et Wallin (Burgess, 1944), qui ont étudié les traits de personnalité de 1000

couples fiancés, en utilisant le questionnaire sur les traits névrotiques de Thurstone (Thurstone Nevrotic Inventory). Les corrélations pour les huit traits névrotiques

mesurés par ce questionnaire (qui sont, d'après les définitions de Thurstone: la tendance autistique, la réaction cycloïde, la tendance dépressive, le facteur cognitif,

l'hypersensibilité, le sentiment d'infériorité, l'introversion sociale, et la timidité en public) étaient toutes significativement positives, la tendance autistique étant le trait

Figure

Tableau II.2 - Études de la concordance entre mari et femme DOur la oatholo2.ieosvchiatriaue (1/2) (adapté d'après Merikangas, 1982a)
Tableau IV.1:  Dépression  Sensibilité  =  90,0%
Tableau  IV.6  - Dénombrement des ména.:es
Tableau IV.8:  Comparaison  Ilfeld/Di3iPostic DSM-III du psychiatre
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