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La bigorexie : rôle du pharmacien d'officine dans sa prévention et sa détection

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Academic year: 2021

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HAL Id: dumas-01812118

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01812118

Submitted on 11 Jun 2018

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prévention et sa détection

Arthur Cocaign

To cite this version:

Arthur Cocaign. La bigorexie : rôle du pharmacien d’officine dans sa prévention et sa détection. Sciences du Vivant [q-bio]. 2017. �dumas-01812118�

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THÈSE D'EXERCICE / UNIVERSITÉ DE RENNES 1

sous le sceau de l’Université Bretagne Loire

Thèse en vue du

DIPLÔME D'ÉTAT DE DOCTEUR EN PHARMACIE

présentée par

Arthur Cocaign

La bigorexie : rôle du

pharmacien d’officine

dans sa prévention et sa

détection.

Thèse soutenue à Rennes Le 30/10/2017

devant le jury composé de : Carole NÉDÉLEC

Docteur en pharmacie

Éric LE FERREC

Maître de conférences, université de Rennes 1 / directeur de thèse

Caroline ANINAT

Maître de conférences, université de Rennes 1/ présidente de thèse

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Remerciements

Je tiens tout d’abord à remercier Mme Caroline Aninat d’avoir accepté d’être ma présidente de thèse, et de juger ce travail.

Je souhaite remercier chaleureusement Mr Éric Le Ferrec d’avoir accepté d’être mon directeur de thèse, de m’avoir fait confiance pour traiter ce sujet que je me suis approprié avec plaisir. Merci pour votre disponibilité, vos conseils, et votre bienveillance.

Mes remerciements vont aussi à Mme Carole Nédélec, pharmacienne d’officine, qui a généreusement accepté d’être membre de mon jury. Je suis aussi grandement reconnaissant envers toi et l’équipe de la pharmacie Duval-Guihart d’avoir partagé leurs connaissances avec moi lors de mon été passé avec eux. Merci de m’avoir poussé à trouver un sujet de thèse et à la terminer au plus vite.

Je souhaite également remercier Mme Véronique Plougoulen, pharmacienne d’officine, et toute son équipe, Audrey, Magali, Morgane, Fanny et Laurianne de m’avoir fourni des bases solides lors d’un été et de mon stage de fin d’études, ceci tant sur le plan de la connaissance que sur le celui de la rigueur que nécessite notre métier. J’espère pouvoir un jour revenir travailler au sein de votre pharmacie.

Merci à Mme Caroline Hery-Bozec, pharmacienne d’officine, et à toute son équipe, Virginie, Nadine et Jean-Bernard d’avoir accompagné mes premiers pas dans le monde de la pharmacie et de m’avoir donné goût au métier de pharmacien.

Je tiens tout particulièrement à remercier mes parents pour leur soutien et leur confiance d’abord dans mon choix d’orientation puis tout au long de mes études. Merci à toi papa, de m’avoir inspiré dans le choix de ce métier, merci à toi maman de m’avoir

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poussé à mettre le pied à l’étrier lors de ma première année d’étude, merci à vous deux de m’avoir si souvent montré que vous étiez fiers de moi, de m’avoir élevé comme vous l’avez fait. Un grand merci à toutes mes sœurs, Éloïse, Léa, Angélique et Diane, d’avoir contribué à faire de moi celui que je suis aujourd’hui et d’avoir toujours été fières de moi, moi aussi je suis fier de vous avoir comme sœurs, on forme une belle brochette! Une dédicace spéciale à Léa pour sa grande aide à la réalisation de la brochure, et à Angélique pour ses conseils dans l’écriture de cette thèse.

Un merci bien spécial à tout mes amis sans qui cette année d’écriture de thèse aurait été bien plus laborieuse. D’abord mes amis de la région brestoise, Margot, Gwen, Louise, Clémence, Yann, Florian, Florian, et Jonathan pour les sorties, les marrades, les blagues de trop, les fritz, les séances de kiné du doigt et j’en passe. Merci à toi Yann pour tes conseils, et d’être à mes côtés depuis un sacré bout de temps, et j’espère pour longtemps encore!

Merci à tous mes amis de pharma et particulièrement à Margot, Cécile, Marion, Pauline, Isabelle, Nicolas, Guillaume, Matthieu pour ces années géniales à Rennes, tous ces « chapeaux pointus », ces « Ouh!Ouh!Ouh ! », ces cris de Léon et autres étranges idées!

Enfin merci Yanna de m’avoir quotidiennement supporté durant cette année de thèse et de m’avoir remis sur les rails quand ça n’allait pas. Heureusement qu’on a pu se coacher mutuellement sinon je crois que j’aurais pu attendre la crise de la cinquantaine pour boucler ma thèse.

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Table des matières

Introduction ...………... 14

1. Place du sport dans la société ………. 14

2. Apparence corporelle en occident ……… 16

3. Culture de la performance ………. 18

PARTIE I : La bigorexie : une histoire de bodybuilding ………... 19

1. Qu’est ce que le bodybuilding ………...….. 19

2. Historique du bodybuilding ………... 19

3. La bigorexie au sens premier du terme ……… 20

3.1 Définition et critères diagnostiques ………... 20

3.2 Outils de mesure de la dysmorphie musculaire ………... 23

3.3 Prévalence ………... 24

3.4 Facteurs de risque ………... 25

3.4.1 Facteurs socio-environnementaux ... 25

3.4.2 Facteurs biologiques et génétiques ...….. 26

3.4.3 Facteurs individuels ………...…... 27

4. Le dopage dans le culturisme ………... 28

4.1 Quels types d’usages ? ………..………. 28

4.2 Les substances employées et leurs effets ……….… 29

4.2.1 Les stéroïdes anabolisants androgènes ……….. 29

4.2.2 Les autres substances ……… 36

5. Le régime et les compléments alimentaires ………. 38

5.1 Particularités du régime alimentaire chez le culturiste ……….………... 38

5.2 Les compléments alimentaires ……….………..………... 40

5.2.1 Substances visant à l’augmentation de la masse musculaire ……….. 41

5.2.2 Substances visant à la diminution de la masse grasse ………. 43

PARTIE II :La nouvelle application du terme bigorexie : l’addiction à l’exercice ...…… 45

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2. L’addiction ...………... 47

3. Les addictions comportementales ………... 48

4. L’addiction à l’exercice physique ... 49

4.1 Une addiction positive ? ………... 50

4.2 Addiction primaire et secondaire ………... 51

4.3 Critères diagnostiques ………... 52

4.4 Les mécanismes ………... 55

4.4.1 Mécanismes physiologiques ...…….. 55

4.4.2 Mécanismes psychologiques ………... 65

4.5 Outils de mesure de l’addiction à l’exercice...…. 68

4.5.1 Le questionnaire de dépendance à l’exercice ……….. 68

4.5.2 L’échelle de dépendance à l’exercice ...…... 70

4.5.3 Recensement de l’addiction à l’exercice …………... 72

4.6 Prévalence ………...…... 73

4.7 Facteurs de risque ………... 76

4.7.1 Facteurs sociaux environnementaux ……….. 76

4.7.2 Facteurs biogénétiques ……… 77

4.7.3 Facteurs individuels ………. 78

5. Pratiques de dopage et d’automédication ………. 79

5.1 Le dopage ………. 79

5.1.1 L’érythropoïétine ……….. 81

5.1.2 Les glucocorticoïdes ……….. 82

5.1.3 Les β2-mimétiques ……….. 83

5.2 L’automédication ……….. 84

5.3 Le régime et les compléments alimentaires ………. 85

5.3.1 Particularités du régime alimentaire dans les sports d’endurance ……….. 86

5.3.2 Les compléments alimentaires ……….….. 87

(10)

6.1 Points communs et similarités ………..…. 91

6.2 Divergences ……….. 92

PARTIE III : Rôle du pharmacien dans la prévention et la détection de la bigorexie …... 93

1. État des lieux ………... 93

1.1 Le lien privilégié patient/pharmacien ……… 93

1.2 Les compléments alimentaires pour sportifs, les demandes de conseils spontanées, et le libre accès ………. 93 1.3 Les ordonnances ……….. 94 2. Prévention ...………... 95 2.1 Prévention universelle ……….. 95 2.1.1 Le dialogue ……… 96 2.1.2 L’information manuscrite ………. 97 2.2 Prévention sélective ………. 101 2.2.1 Bases de l’entraînement ...………. 101 2.2.2 Conséquences ...……… 102

2.2.3 Les risques d’une supplémentation médicamenteuse ………... 107

2.2.4 Les risques de la consommation de compléments alimentaires ……… 108

2.2.5 Orientation vers un autre professionnel de santé ………. 109

Conclusion ……… 111

Autorisation d’imprimer ………. 113

Bibliographie ………... 114

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Liste des abréviations

2-AG 2-Arachidonoylglycérol

AA Acide aminé

AE Addiction à l’exercice

AEA Anandamide

AINS Anti-Inflammatoires Non Stéroïdiens

ANSES Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail

ATP Adénosine Tri-Phosphate

ATV Aire Tegmentale Ventrale

BB Bodybuilding

DM Dysmorphie Musculaire

DSM Diagnostic and Satistical Manual of mental disorders

EAI Exercise Addiction Inventory

EDQ Exercise Dependance Questionnaire

EDS Exercise Dependance Scale

EFSA Autorité Européenne de Sécurité des Aliments

EPO Érythropoïétine

GC Glucocorticoïdes

Nac Noyau acumbens

PEA Phényléthylamine

PETscan Positrons Emission Tomography scanner

SAA Stéroïdes Anabolisants Androgènes

SEC Système Endo-Cannabinoïde

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Liste des tableaux

Tableaux n°1 Classement et proportions des activités physiques pratiquées parmi la

population française des plus de 15 ans (CNDS, 2010) ……… 15

n°2 Critères diagnostiques de la dysmorphie musculaire (Pope et al., 1997) ………..………. 22

n°3 Liste des stéroïdes anabolisants et des esters de testostérone employés par les culturistes de l’étude d’Evans en 1997………... 32

n°4 Autres substances utilisées et leur proportions d’utilisation par les culturistes de l’étude d’Evans (Evans, 1997) ………... 36

n°5 Critères diagnostiques de l’addiction (Goodman, 1990) ……… 48

n°6 Critères de dépendance à l’exercice physique (Veale David, 1995) ……… 52

n°7 Critères de dépendance au body-building (Smith et al., 1998) ………. 53

n°8 Les 8 catégories de l’EDQ (Kern & Baudin, 2011) ……… 69

n°9 Les 7 dimensions de l'addiction dans l’EDS (Kern, 2007) ………... 71

n°10 Les 6 items de l’EAI (Griffith et al., 2005) ………. 72

n°11 Récapitulatifs des résultats de prévalence obtenu grâce à l’EAI (Griffiths et al., 2011) ………..………... 74

n° 12 Liste des gènes associés à une addiction et fonction de leurs protéines (Ramoz & Gorwood, 2015) ………..78

n°13 Résultats des contrôles anti-dopages sur l’année 2015, exprimés en nombres et pourcentages par classe de produits dopants. (AMA, 2015) …… 80

n°14 Exemples de coût de programmes de dopages pour un novice, un utilisateur vétéran et un utilisateur en précompétition (Evans, 1997) ………. 107

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Liste des figures

Figures n°1 Fréquence de pratique d’une activité physique chez les plus de 15 ans en

France (CNDS, 2010) ……… 14

n°2 Poupées Star Wars en 1978 (à gauche) en 1998 (à droite) (Pope et al., 1999) ……… 17

n°3 Poupée Barbie (à gauche), Poupée aux proportions humaines moyennes (à droite)………. 17

n°4 Exemple d'une échelle de Likert en 5 points ……….. 23

n°5 Différences entre la vision moyenne d'hommes de 4 pays de la « muscularité d'un homme lambda » et du corps « préféré par les femmes » (Jeffrey Yang Peter Gray et al., 2005) ………... 25

n°6 Mécanismes d'action et effets sur le muscle d'un entraînement de type musculation et/ou du dopage par stéroïdes anabolisants (Duclos, 2007) … 31 n°7 Évaluation des synthèses protéiques totales de l’organisme chez des athlètes entraînés dans un sport de force et soumis à un régime à faible apport en protéines, modéré et élevé (HP, 2,4g/kg/j) (Gomez-Merino & Portero, 2007) ………... 39

n°8 Créatinine représentée dans sa formule de Lewis ………... 41

n°9 Leucine (formule de Lewis) ………... 42

n°10 Arginine (formule de Lewis) ……….. 42

n°11 L-carnitine (formule de Lewis) ………. 43

n°12 Choline (formule de Lewis) ……… 43

n°13 Phényléthylamine (formule de Lewis) ……… 44

n°14 Nombre de licenciés des dix dernières années en triathlon (FFTri, 2013) ……….……….……….……….……….……….……….…….. 46

n°15 Aperçu anatomique du système limbique (Tortora & Derrikson, 2015) ………….……….……….……….……….……….……….……….………. 56

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n°16 Les différentes structures jouant un rôle dans le circuit de la

récompense (Benyamina, 2014) ……….. 57

n° 17 Les différentes structures du circuit de la récompense et leurs

interactions ………. 59

n°18 Représentation schématique de la localisation des récepteurs CB1 sur

une coupe saggitale de cerveau humain(Quertemont et al., 2013) ………. 62

n°19 Figure 19. Représentation schématique des interactions entre le

l'activité physique et le SEC dans le cerveau(Tantimonaco et al., 2014) ……... 63

n°20 Influence de la déplétion en CB1 de l’ATV sur la libération de

neurotransmetteurs et la motivation à la course chez le rat ………. 65

n°21 Les composantes de la dysmorphie musculaire(Leone et al., 2005) ….. 91

n°22 Brochure informative à destination du patient ……….………. 99

n°23 Illustration du principe de surcompensation (Martin-Krumm et al., 2016) ……… 101

n° 24 Écarts de mesures, entre un groupe témoin et un groupe d'addictés, observés parmi différents paramètres (dépression, confusion mentale,

irritabilité, fatigue) mesurés après un arrêt de l'exercice à J+7, J+14 et après la reprise de l'exercice physique. (Hanna Karen Moreira Antunes et al., 2016) …….……….……….……….……….……….……….……….………….. 104

n°25 Cercle vicieux du surentraînement (Van Den Bosch Paul, 2007) ………. 105

n°26 Nombres de cas d’effets indésirables signalés à l’Anses après l’ingestion de compléments alimentaires pour sportif, répartis selon l’origine de ces derniers (ANSES, 2016) ………... 108

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Introduction

1- La place du sport dans la société

Avant la 1ère guerre mondiale seule une infime partie de la population s’adonne à la pratique sportive, elle est cantonnée aux élites. Par la suite, la médiatisation croissante des événements sportifs (Jeux Olympiques de Paris en 1924), la parution de presse sportive, la croissance du spectacle sportif, la construction de grands stades et l’avènement des sports collectifs va populariser cette pratique. En France la formation d’un gouvernement Front Populaire en 1936 et la réforme des congés payés et des 40 heures de travail hebdomadaires participeront au développement de la pratique sportive dans les classes populaires : « La masse doit pouvoir pratiquer les sports pour trouver joie et santé, détente et épanouissement ; le but à poursuivre doit s’écarter résolument de l’état d’esprit qui fait déboucher cette pratique sur la préparation militaire et les visées bellicistes » (Lagrange, sous secrétaire d’État aux loisirs et aux sports, 1936). C’est enfin dans les années 60 qu’on observe une véritable démocratisation de la pratique sportive en France et dans le monde occidental.

Le sport et plus généralement l’activité physique occupent dorénavant une place privilégiée dans la pensée collective. Elle est valorisée et estimée comme bénéfique par la société, et ce, à juste titre. En 2010, 65% des français sondés déclaraient s’adonner à l’exercice physique (Figure 1) au moins une fois par semaine, environ 15,7 millions de

Figure 1. Fréquence de pratique d’une activité physique chez les plus de 15 ans en France.

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français étaient licenciés d’un club sportif en 2012 et 89% des français se revendiquaient pratiquants d’au moins 1 activité physique ou sportive (Tableau 1) (CNDS, 2010)

lutte contre la sédentarité et la prévention primaire et secondaire des maladies chroniques occupent une place importante. En effet les bienfaits d’un mode de vie non sédentaire ne sont plus discutés en terme de prévention des maladies cardiovasculaires, du diabète, des

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cancers et de régulation des valeurs biologiques (Warburton D., Nicol C.W, & Bredin S, 2006). Certaines études soulèvent aussi les bienfaits qu’elle apporterait en terme de cognition chez la personne âgée (Hanna Karen M Antunes et al., 2015). Une autre note des symptômes d’anxiété et de dépression deux fois plus présents chez des personnes ne déclarant pas de pratiques sportives régulières (De Mello et al., 2013) respectivement 4,8 vs 12 % et 5 vs 13,9 %. L’activité physique est ainsi encouragée et acceptée par une large frange de la population comme une pratique à haute « valeur ajoutée » et positive à tout point de vue.

2- Apparence corporelle en occident

Les critères de beauté les plus largement répandus tendent aujourd’hui vers l’atteinte, pour les femmes d’un idéal de minceur tandis que les hommes devraient viser un corps athlétique dépourvu de gras, le tout poussé à l’extrême. Si longtemps ces préoccupations ont traditionnellement été associées aux femmes, il devient évident que celles-ci occupent dorénavant une place importante chez les hommes (Henwood, Gill, & Mclean, 2002).

Les différents médias jouent un rôle prépondérant dans ces aspirations, exposant des modèles aux proportions souvent irréalistes ou inatteignables pour le commun des mortels, et influençant les esprits dès le plus jeune âge. En 2014 en France le budget publicitaire des entreprises du secteur de la beauté et de l’hygiène représentait 2 milliards d’euros sur les 15 dépensés au total (Statista, 2014). On note aussi une forte exposition de corps dénudés dans les publicités papiers, sans que ces publicités ne promeuvent forcément des produits d’hygiène ou de beauté (Jeffrey Yang Peter Gray & Pope, 2005). Au cinéma depuis la fin des années 70, avec des films comme « Conan le barbare » et « Rambo », l’image du héros de film d’action a été fondue dans le moule d’un homme surdimensionné, tandis que les héroïnes sont minces. Aujourd'hui des acteurs comme Dwayne Jonhson, Vin Diesel, Chris Evans, Channing Tatum etc.. s'inscrivent dans la

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continuité et incarnent les héros de films très populaires chez les enfants et adolescents. L'influence sur les plus jeunes passe aussi par les jouets populaires de type poupées (Figures 2 et 3), dont les mensurations ont évolué vers les mêmes archétypes ces 50 dernières années (Pope et al., 1999, Rice et al., 2016).

Une méta-analyse1

de 25 études compare l’effet d’images de modèles minces issues des médias versus images de corps normalement proportionnés, sur la satisfaction corporelle d’environ 2200 femmes (Blaivas, Levine, & Murnen, 2002). Elle montre une influence négative des images médias sur la satisfaction corporelle pour 38 groupes sur 43, la satisfaction était bien plus faible qu’après la visualisation des images contrôles. D’autres recherches ont été menées sur la population masculine, et les résultats ont montré que la pression des médias de masse est négativement associée à la satisfaction corporelle, l’estime de soi, les troubles psychologiques (Barlett C. P. et al., 2008).

1méta-analyse : elle permet de synthétiser les résultats d’études répondant à une même problématique. Cette synthèse se déroule en suivant une méthodologie rigoureuse qui a pour but d'assurer l'impartialité de la synthèse et sa reproductibilité.

Figure 3: Poupée Barbie (à gauche), Poupée aux proportions humaines moyennes (à droite)

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Avec une approche opposée, une étude s’est intéressée à une trentaine d’adolescents de 14 ans ayant une image corporelle positive, les interrogeant sur leur ressentie des critères de beautés actuels et leur propre expérience de la beauté. Il en ressort pour une grande part un regard critique sur les idéaux actuels, jugés artificiels et inatteignables, et la plupart considère la notion de beauté comme quelque chose de subjectif, les critères pour la définir sont larges et flexibles (Holmqvist & Frisén, 2012).

3- Le culte de la performance

Avec l’avancé et la diffusion des technologies de l’information de masse telle que la télévision, internet et smartphones, la compétition sportive de haut niveau est entrée dans presque tout les foyers d’occident, banalisant de fait la performance et condamnant les sportifs à une course à l’exploit pour recueillir applaudissements et reconnaissance du public. Loin de cette effervescence médiatique l’individu lambda peut cependant être impacté par ces considérations. Inspiré par ces exploits, en quête de reconnaissance de l’entourage, et avec l’envie de repousser ses limites physiques, il peut décider de s’engager ou d’intensifier sa pratique sportive. L’individu est aussi sollicité par les équipementiers sportifs dont les publicités ou slogans mettent fréquemment en avant cette notion de dépassement de soi, de « sport aventure ». Ainsi la dernière campagne de la marque

Asics© incitait métaphoriquement à ne pas courir mais voler (« Don’t run, fly. »), le slogan

d’Adidas© revendique que rien n’est impossible (« Nothing’s impossible ») etc. (Ehrenberg, 2000). Dans une société où la pratique sportive semble se généraliser, et où elle semble s’intégrer à la définition très subjective que l’on fait de la normalité, la performance est de fait valorisée et reconnue comme un facteur d’intégration sociale fort . Ce contexte général peut-être caractérisé par la formule de « culte de la performance ».

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Partie I - La bigorexie : une histoire de bodybuilding

1- Qu’est-ce que le bodybuilding ?

On peut définir le bodybuilding (BB) ou culturisme comme la recherche d’un corps musclé, à laquelle se mêle une part importante d’esthétique. Lors des compétitions de BB ce n’est qu’après une préparation rigoureuse que les candidats défilent devant un panel de juges et sont départagés sur la base de la taille, de la symétrie et sur la description de leur musculature. Cette notion d’esthétisme est ce qui différencie cette pratique de l’haltérophilie où ne rentre en compte que la charge maximale soulevée.

Cette sculpture du corps est atteinte via la mise en œuvre d’un entraînement aux poids et d’une adaptation du régime alimentaire impliquant principalement une augmentation de la ration protéique. Comme tout autre sport pratiqué à haut niveau les bodybuildeurs revendiquent une grande part de force mentale dans ce processus de sculpture du corps, d'une part pour soulever de tels poids, résister aux douleurs provoquées par des exercices exclusivement anaérobies et éviter l'ennui provoqué par la répétition de ces exercices : « Il faut s'enthousiasmer de l'intérieur, se projeter, penser au prochain résultat que l'on veut obtenir sur le muscle que l'on a choisi de travailler, isoler ce muscle » (Arnold Schwarzenneger, Pumping Iron 1977)

2- Historique du bodybuilding

Eugen Sandow (1867-1925) d’origine prussienne est peut-être le premier culturiste à part entière. S’il débute sa carrière par des spectacles de force, il se distingue par le soin porté à son apparence et par là, la recherche d’un idéal antique. Bientôt il préférera jouer de ce corps qu’il considère comme une œuvre d’art dans films et expositions.

Cette pratique grandit lentement au cours du 20è siècle et n’explose véritablement qu’à la fin des années 70. D’une petite communauté cantonnée à la Californie, elle est

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révélée au grand public en 1977 par le film documentaire d’Arnold Schwarzenneger « Pumping Iron » qui dévoile le style de vie des bodybuildeurs et de celui-ci, qui brigue un septième titre de Mr Olympia (la plus haute distinction en la matière). Viendra ensuite la percée dans le monde d’Hollywood du « Chêne autrichien », et déjà le bodybuilding est banalisé dans la culture occidentale.

Il n’y a jamais eu autant de salles de sports, d’hommes et de femmes qui y sont inscrits, qui lisent des magazines de fitness et expérimentent des suppléments augmentant les performances qu’aujourd’hui. L’industrie du fitness est en pleine croissance et l’évolution de la société vers un culte de l’apparence omniprésent ne semble pas jouer en sa défaveur.

3- La bigorexie au sens premier du terme

3.1- Définition et critères diagnostiques

La bigorexie représente une préoccupation pathologique pour la muscularité globale du corps et la minceur (à comprendre : avec le moins de masse grasse possible), et apparaît comme une nouvelle forme de distorsion de l’image corporelle. De l'étymologie du mot bigorexie on peut tirer « big » de l'anglais grand/gros et « orexie » du grec appétit, qui sous-tend un régime particulièrement riche permettant d'accompagner le gain de masse musculaire. Ce terme s'oppose à celui d'anorexie2, absence ou perte d'appétit. Bien que ce trouble ne soit pas spécifiquement mentionné dans le Diagnostic and Statistical

Manual of Mental Disorders (DSM) dont la 5ème et dernière version date de 2013, la

maladie est reconnue par l’organisation mondiale de la santé depuis 2011. Un nombre

2Anorexie : terme souvent employé en raccourci du terme d’anorexie mentale, qui ne se caractérise pas par une perte d’appétit mais plutôt par une lutte contre celui-ci caractérisée par : un refus de maintenir un poids corporel normal (restriction alimentaire), une peur intense de prendre du poids (amaigrissement), une perturbation de la façon dont le poids et la silhouette corporelle sont perçues, une influence de ceux-ci sur l’estime de soi, une hyperactivité sportive (addiction secondaire au sport), ainsi qu’une aménorrhée.

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important de publications traitent de la problématique et ceux depuis le début des années 90, permettant de mieux cerner les contours de cette problématique.

Le nombre croissant de bodybuildeurs allant de pair avec une part croissante d’hommes insatisfaits par leur apparence, Pope et son équipe (Pope, Katz, & Hudson, 1993) mènent une étude sur une centaine de bodybuildeurs hommes en 1993 et décrivent un trouble nommé « anorexie inversée » (« reverse anorexia ») en référence au passé anorexique de certains des sujets. Certains des hommes interrogés se sentent anormalement petits et faibles, malgré le fait qu’ils puissent être considérés comme très musclés, en opposition à l’anorexie où le corps est ressenti comme n’étant pas assez mince. Ce sentiment les pousse à décliner des événements sociaux, se parer de vêtements amples et couvrants même par de fortes chaleurs, et à refuser d’exposer leur corps aux regards de leurs semblables, si ces situations ne peuvent être évitées ils expérimentent un grand stress. En 1997 le terme de dysmorphie musculaire (DM) est préféré par Pope et ses collègues, il englobe les deux genres dans sa définition et affilie cette affection aux troubles de dysmorphie corporelle ou dysmorphophobie3, c’est d’ailleurs ce terme de DM qui est le plus fréquemment employé dans la littérature sur le sujet (Pope et al., 1997). Ces derniers emploieront aussi le terme de complexe d’Adonis, où s’ajoute une dimension de soin extrême de soi (soins du visage, du corps..) (Pope, Phillips, & Olivardia, 2000) .

Dans le tableau 2 sont exposés les critères diagnostiques proposés par Pope en 1997. Ils sont basés sur leur précédente observation, les sujets sont extrêmement préoccupés par leur musculature, se définissant comme toujours trop faibles alors même qu’ils sont très imposants (critère 1), certains culpabilisant de réaliser l’entrevue sans être au meilleur de leur forme physique. D’un côté certains ont une bonne vision intrinsèque de leur condition et savent qu’ils sont musclés mais cela ne les rassure toujours pas, de l’autre certains se persuadent qu’ils sont plus faibles que d’autres individus du même gabarit (Olivardia et al., 2000). Dans un cas décrit dans l’étude, un jeune homme se pesait jusqu’à

3 Dysmorphophobie : préoccupation ou obsession excessive concernant un défaut, avéré ou non, dans l'apparence.

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dix fois par semaine et contrôlait son aspect dès qu’il passe devant un miroir (Pope et al., 1997). En effet par rapport à un groupe témoin, les bigorexiques se pèsent plus en moyenne (5 versus 2 fois/ semaine), se regardent aussi plus dans le miroir (9 versus 3,4 fois/ jour), et passent huit fois plus de temps à penser à quoi ils ressemblent (près de 3 heures par jour vs 40 min/ jour) (Olivardia et al., 2000).

Tableau 2

Critères diagnostiques de la dysmorphie musculaire

(publication de Pope et al. en 1997)

(1) La personne est préoccupée par l’idée que son corps n’est pas assez fin et musculeux. De cette idée découle un temps important à soulever des poids et une attention excessive portée au régime.

(2) Aux moins 2 de ces 4 critères :

a. L’individu abandonne fréquemment des activités sociales, professionnelles ou de loisirs, répondant au besoin compulsif de maintenir son programme de d’entraînement et de régime

b. Il évite les situations dans laquelle son corps risque d’être exposé ou vivre ces situations provoque une grande détresse et une grande anxiété

c. Les préoccupations corporelles sont accompagnées d’une détresse cliniquement significative et/ou d’un dysfonctionnement social, professionnel ou dans d’autres domaines de fonctionnement

d. Maintien des habitudes au niveau de l’activité physique, de l’alimentation et/ou de la prise de substances pour améliorer la performance en dépit des conséquences physiques ou psychologiques qui y sont associées

(3) Les préoccupations et comportements sont orientés vers une peur de devenir trop petit ou d’être insuffisamment musclé et non vers une peur de prendre du poids (anorexie) ou orientés vers un autre aspect de l’apparence physique (peur d’une dysmorphie corporelle)

Ces personnes expérimentent conjointement des pensées obsessionnelles et des

comportements compulsifs4

, tels que la comparaison, le contrôle, la recherche de paroles

4Comportement compulsif : Comportement caractérisé par la répétition persistante d'une action, sans obtenir de récompense ou de plaisir. L'action est généralement petite et délimitée, presque rituelle, toutefois sans atteindre un niveau pathologique.

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rassurantes concernant leur musculature. Ils respectent à la lettre leur routine d’entraînement et de régime quitte à annuler des événements sociaux, professionnels ou de loisir telle une sortie au restaurant qui empêcherait un compte précis du nombre de calorie ingérées (critère 2a) (Mosley, 2009).

Leur journée s’articule autour de la pratique, certains rapportent ne plus accorder de temps au développement d’une relation amoureuse, quand d’autres travaillent dans les salles de sport pour pouvoir mieux s’adonner à leur obsession et déclinent des rendez-vous entre amis de peur de paraître petits et faibles (critère 2c). Ils peuvent aussi éprouver un grand stress à voir leur corps exposé en public et prennent soin d’éviter la plage, les vestiaires collectif etc. (critère 2b). Le maintien de leurs habitudes s’effectue malgré les conséquences psychiques et/ou physiques négatives observées, qui seront détaillées plus tard (critère 2d). Pope et ses confrères disent pouvoir poser un diagnostique si le sujet remplit les critères 1, au moins deux des quatre critères 2, et le critère 3 qui marque le distinguo avec d’autres troubles présentant des similarités cliniques tels que l’anorexie, ou des dysmorphophobies touchant des parties ciblées du corps (Nez, cheveux, mains etc.)

3.2- Outils de mesure de la dysmorphie musculaire

La majorité des articles traitant de la dysmorphie musculaire évaluent la problématique en employant des mesures auto-rapportées, dont un score est mesuré grâce à une échelle de type Likert (Figure 4), permettant ainsi d’évaluer la sévérité des symptômes de la DM. Ces mesures auto-rapportées sont employées en tant qu’outils d’évaluation du risque d’être atteint d’une DM et n’ont pas valeur de diagnostic.

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Plusieurs outils, certains n’étant pas encore validés, ont récemment été mis au point afin de mesurer les symptômes de la DM, dont le Muscle Dysmorphia Symptom Questionnaire (Olivardia et al., 2000), le Muscle Appearance Satisfaction Scale (Mayville et al., 2002) et le Muscle Dysmorphia inventory (Rhea et al., 2004). Dans la majeure partie des cas, la somme des scores de chacune des sous-échelles est calculée et un score total élevé équivaut à un niveau élevé de caractéristiques associées à la DM.

3.3- Prévalence

Le nombre de personnes concernées par cette condition est difficile à évaluer bien qu’elle semble majoritairement toucher les hommes. Pope évalue à 10 % la part des bodybuildeurs masculins, recrutés dans des salles de musculation aux USA, présentant des symptômes proéminents de dysmorphie musculaire, pourcentage se rapprochant des 9,3 % (tous des hommes) retrouvés dans une de ses autres études (incluant hommes et femmes cette fois-ci) (Pope et al., 1997). Ce problème semble pour l’instant cantonné au monde occidental. Ainsi c’est seulement en l’an 2000 qu’une équipe décrit ce qu’ils pensent être le 1er

cas non-occidental de dysmorphie musculaire chez un jeune chinois (Ung EK, Fones CS, & Ang AW., 2000). Cette différence pourrait s’expliquer par une moindre remise en cause du statut traditionnel de l’homme. En effet dans les sociétés occidentales les compétences des femmes sont de plus en plus reconnues dans tous les domaines, la musculature devenant une valeur refuge pour s’affirmer en tant qu’homme.

Des différences culturelles influent aussi sur la perception corporelle (Jeffrey Yang Peter Gray et al., 2005). Sur la figure 5 est exprimée la différence (en terme de Fat Free Mass Index) entre ce que des hommes, de différentes origines, pensent être la muscularité d’un homme moyen, et celle qu’ils pensent être idéale pour plaire au sexe opposé. L’intervalle entre ces deux valeurs apparaît bien plus important dans les pays occidentaux que chez les taïwanais. Un américain pense qu’il doit être environ plus musclé de 9kg

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qu’un américain lambda pour plaire, tandis que cet écart se réduit à 2.2kg chez un taïwanais.

3.4- Facteurs de risques

3.4.1- Facteurs socio-environnementaux

Il est clair qu’il existe une pression de la société occidentale, notamment via les différents médias, poussant de plus en plus d’hommes et de femmes à se sentir insatisfait de leur corps. Ainsi, comme évoqué dans la partie précédente, dans d’autres sociétés la sphère des médias se fait moins pesante, elle expose par exemple moins de figures dénudés dans les magazines (notamment masculine). En résulte une moins grande insatisfaction corporelle et une préoccupation moindre pour la musculature (Jeffrey Yang Peter Gray & Pope, 2005). Dans nos sociétés ce facteur joue un rôle dans la naissance du malaise constant qu’expérimentent les personnes atteintes. Ainsi dans une étude menée sur 250 haltérophiles, s’approprier l’idéal corporel proposé par les médias se révèle être le facteur avec le risque le plus important d’une course à la musculature (Schneider et al., 2016). Suggérant que cet idéal peut être l’un des facteurs de risques de l’insatisfaction corporelle masculine, menant dans les cas extrêmes à une dysmorphie musculaire. Tous les Hommes sont potentiellement sujets à cette pression, mais tous ne développent pas de

Figure 5. Différences entre la vision moyenne d'hommes de 4 pays de la « muscularité d'un homme lambda » et du corps « préféré par les femmes » (Jeffrey Yang Peter Gray et al., 2005)

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troubles, si bien que l’on doit pouvoir identifier d’autres facteurs pouvant faciliter la genèse du trouble.

La pratique d’un sport dans lequel la masse musculaire est mise en valeur comme étant un critère de performance (exemple : culturisme, football américain, boxe..) semble aussi être un facteur prédictif du développement de la maladie (Grieve, 2007; Mosley, 2009). Cette pression de la performance chez les athlètes s’ajoute à celle, inhérente, de la société occidentale.

Certaines études mettent en avant que le fait d’avoir été en sous ou en surpoids par le passé ou d’avoir été victime d’intimidation seraient un facteur de risque supplémentaire d’insatisfaction corporelle, et par là du développement d’une dysmorphie musculaire (Harrison Pope et al., 2000). D’un autre côté il n’y pas de lien significatif entre les expérience stressantes vécues pendant l’enfance ou l’adolescence et la course à la musculature selon l’étude de Schneider (Schneider et al., 2016).

3.4.2- Facteurs biologiques et génétiques

Les facteurs biologiques impliqués dans le développement de la dysmorphie musculaire ont été très peu documentés à ce jour. Bien que certains auteurs présupposent une ressemblance génétique possible avec des troubles considérés comme appartenant à la même famille, tels les troubles du comportement alimentaire5

et les troubles

obsessionnels-compulsifs6

, aucune étude empirique permettant d’en savoir davantage sur le rôle des marqueurs biogénétiques dans la dysmorphie musculaire n’a été menée, à notre connaissance.

5Trouble du comportement alimentaire ou TCA : conduite alimentaire qualifiée de pathologique car elle diffère en quantité ou en qualité, elle entraîne des conséquences néfaste sur la santé physique ou psychologique, et elle témoigne d’une difficulté existentielle, d’une souffrance psychologique, ou d’une lésion de système biologique qui contrôle la prise alimentaire (exemples : anorexie, boulimie..).

6Trouble obsessionnel-compulsifs ou TOC : Trouble du comportement associé à des angoisses. Il se caractérise par des idées irrépressibles qui vont parasiter la pensée du sujet. Pour faire barrage à ces obsessions, la victime se sent obligée de mettre en œuvre certains comportements compulsifs.

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On peut cependant mentionner l’âge qui semble être une composante importante, en effet l’avancée en âge va de paire avec une diminution du risque d’apparition de la dysmorphie musculaire (Lichtenstein et al., 2014; Schneider et al., 2016). Cette décroissance pourrait s’expliquer en partie par une attention plus marquée des adolescents et étudiants pour la muscularité, doublée d’une augmentation de la satisfaction corporelle et de l’estime de soi chez les individus plus âgés. On peut aussi supposer qu’avec le temps d’autres aspects de la vie, tels que la carrière, la famille, les ressources financières prennent le pas sur l’apparence corporelle. Le rôle du développement et des changements hormonaux chez les plus jeunes serait aussi à investiguer.

3.4.3- Facteurs individuels

Soulignée dans de nombreuses études, l’insatisfaction corporelle est fortement liée à la DM (Grieve, 2007; Harrison Pope et al., 2000; Mosley, 2009; Olivardia et al., 2000; Pope et al., 1997). Comme évoqué précédemment, l’intégration des codes de beauté diffusés par les média peut découler un décalage important dans la perception du soi, et dans l’image du corps idéal (Pope et al., 1999; Schneider et al., 2016). De cette situation ressort une part croissante de personnes insatisfaites de leur apparence corporelle, que ce soit sur le plan de la musculature et/ou celui de la masse graisseuse. Une personne insatisfaite de son corps aura une plus grande tendance à adopter des comportements, parfois extrêmes pour atteindre son idéal, via l’exercice et/ou le régime, et aura ainsi plus de chance de développer une DM (Grieve, 2007). Même si bien sûr toute personne insatisfaite de son corps ne s’engagera pas dans une course à la musculature, ni même n’entreprendra de régime. Olivardia et al. dans leur étude appuient aussi sûr le rôle central de l’insatisfaction corporelle en montrant que 52% des individus souffrant de DM ont répondu non à l’affirmation « J’aime beaucoup mon corps », comparativement à 20% dans le groupe contrôle. 46% de l’échantillon clinique a répondu « totalement » à l’affirmation « Jusqu’à quel point êtes-vous insatisfait par rapport à la façon dont votre corps est proportionné? », comparativement à 10% pour l’échantillon contrôle (Olivardia et al., 2000). De cette

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insatisfaction peut naître une distorsion de l’image corporelle, l’individu considère sa masse musculaire comme étant plus faible qu’elle ne l’est réellement. L’insatisfaction corporelle, la distorsion corporelle et l’internalisation de l’idéal corporel proposé par les médias semblent être les facteurs de risque prépondérants dans le développement de la dysmorphie musculaire (Grieve, 2007).

L’estime de soi, c’est à dire l’opinion émotionnelle qu’un individu a de lui même en dehors de la logique et la rationalisation, est un autre facteur déterminant. Elle est profondément intriquée avec les facteurs évoqués précédemment. Ainsi elle est négativement corrélée avec de nombreuses variables de l’insatisfaction corporelle (ne pas aimer son corps, sous-estimer sa musculature, se sentir gros…) (Olivardia, Jr, Iii, & Cohane, 2004). Une étude menée auprès de licenciés d’une salle de sport a montré une relation positive entre une faible estime de soi et le temps passé à la salle (Bruno et al., 2014), là où une autre a montré une relation négative entre la confiance en ses compétences physiques (estime de soi relative aux compétences physiques) et sa faculté à plaire physiquement (estime de soi relative à l’attractivité) à autrui avec la quête d’une musculature plus importante (Schneider et al., 2016).

4- Le dopage dans le culturisme

L’article L.3631-1 du Code de la santé publique définit le dopage comme « l’utilisation de substances ou de procédés de nature à modifier artificiellement les capacités ou à en masquer l’usage »

4.1- Quels types d’usages ?

La recherche d’une meilleure plastique pousse une partie des culturistes, bigorexiques ou non, à se tourner vers les substances dopantes. Chez les bigorexiques la consommation de dopants peut-être postérieure à l’apparition du trouble et devient un

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moyen supplémentaire de gain en masse musculaire, chez d’autres elle peut être antérieure (Olivardia et al., 2000; Pope et al., 1997). Cette pratique qui semblait plutôt être l’apanage des compétiteurs est aujourd’hui de plus en plus rencontrée à titre « récréationnelle » (Prouteau, 2008 ; Pagonis et al, 2006 ; Evans, 1997). Beaucoup de culturistes de loisir ou amateurs n’ont aucun lien avec des fédérations sportives, ils évoluent alors en dehors d’un cadre éducationnel, éthique et législatif. Le premier contact avec le dopage a souvent lieu dans les salles de musculation via les autres sportifs en employant déjà. Par la suite, n'importe qui peut se « former » à leur usage sur internet, où divers forums et guides sont facilement accessibles. On peut nommer le livre à succès « Underground handbook of steroids » par l'auteur controversé Daniel Duchaine, expérimentateur et un temps fabriquant de stéroïdes. Selon lui, si l'on utilise les bons produits, aux doses appropriées, avec un régime et un entraînement adéquats, alors les stéroïdes anabolisants androgènes ne sont que bénéfiques. Beaucoup de ces spécialités ont été retirées du marché en France, mais il est possible de s’en procurer via le marché noir, principalement sur les sites internet dont le nombre a explosé, et ce avec une facilité déconcertante (Dumestre-toulet, 2000). Les risques de toxicité et de mésusage s’en trouvent ainsi accrus, car aucune vérification et traçabilité des composants de ces produits ne peuvent être mises en place.

4.2- Les substances employées et leurs effets

4.2.1- Les stéroïdes anabolisants androgènes

Ce sont les principes actifs les plus souvent employés dans l’univers du culturisme et leur usage est très répandu dans l’optique d’augmenter la performance et la musculature jusqu’à des standards surhumains. Cependant leur usage sur le long terme pose un vrai problème de santé publique.

Ils sont dérivés de la testostérone, une hormone stéroïdienne mâle que le corps produit de 4 à 10 mg/jour à 95 % d'origine testiculaire. Chez les femmes elle est dix fois

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moins présente et produite à 50 % par les ovaires et 50 % par la glande surrénalienne. Les modifications apportées à la testostérone ont pour but d'améliorer ses capacités anabolisantes, ainsi que sa durée d'action in vivo et d'en diminuer l'androgénicité. Avec comme point de départ un ratio anabolisant7

/androgène8

de 1 pour la testostérone, celui-ci est de 6 pour la nandrolone et de 30 pour le stanozolol.

L'effet anabolique de ces substances passe par deux voies:

- Un effet anti-catabolique par la diminution de l'action catabolique des corticostéroïdes relâchés en période de stress corporel (activité athlétique notamment).

- Le maintien d'une balance positive de l'azote par l'amélioration de l'utilisation des protéines ingérées et de leur réutilisation après dégradation (N. A. Evans, 1997).

7Anabolisant : tout composé, naturel ou synthétique, favorisant la construction de tissus (notamment musculaire) à partir de substances nutritives.

8Androgène : tout composé, naturel ou synthétique, qui contrôle le développement et le maintien des caractères mâles.

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Cela induit une hypertrophie musculaire par augmentation du volume des fibres musculaires (Figure 6). Il y a aussi une mobilisation des cellules satellites péri-musculaires afin d’augmenter le nombre de noyaux des fibres et ainsi maintenir un ratio volume des fibres/nombre de noyaux constant.

Dans des groupes ne subissant pas d’entraînement, l’injection d’une dose de testostérone équivalent à quatre fois la testostéronémie9

classique pendant 10 semaines, a conduit à une augmentation du volume et de la force musculaire comparé à un placebo. Augmentation qui se révèle encore plus importante quand les injections de testostérone sont accompagnées de séances d’entraînements (Duclos, 2007).

9Testostéronémie : taux de testostérone circulant dans le sang

Figure 6. Mécanismes d'action et effets sur le muscle d'un entraînement de type musculation (ET) et/ou du dopage par stéroïdes anabolisants (SA)

RA= Récepteurs aux androgènes (Duclos, 2007)

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Les stéroïdes anabolisants androgènes (SAA) ont aussi des effets sur la motivation, induisent un état d'euphorie et diminuent la fatigue, et ce faisant augmentent les capacités d'entraînement.

L’administration des SAA est orale ou intramusculaire, sachant que les 2 voies sont très souvent utilisées conjointement: dans l’étude d’Evans sur 100 bodybuildeurs, 85 % admettent utiliser les deux conjointement, tandis que seul 11 % n’emploient que la voie injectable (N. A. Evans, 1997)

Les dosages employés sont bien plus élevés qu’en usage thérapeutique, de 1 à 20 fois pour la voie orale, de 5 à 20 fois pour la voie injectable il n’est pas rare qu’ils excèdent 500mg d’équivalent testostérone, voir même 1000mg par semaine. Le tout administré par cycle de plusieurs semaines (4 à 16 semaines, 9,4 semaine en moyenne) (Pagonis et al., 2006). Dans l’étude d’Evans, 48 % des culturistes consommaient pendant moins de 6 mois par an, le reste pendant plus de 6 mois. Trois sondés ont affirmé une prise de stéroïdes continue durant l’année écoulée.

Dans son étude menée en Galles du sud, Evans met en évidence les molécules les plus populaires comme étant le Nandrolone decanoate (84% des cas l’utilisent), les esters de testostérone (75%) et la Methandrostenolone (= Metandienone) (68%) (N. A. Evans,

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1997). Il dresse aussi une liste de l’ensemble des molécules utilisées dans cet échantillon (Tableau 3), dans laquelle on trouve une molécule à usage vétérinaire, la boldenone. On retrouve un panel plus large, mais approximativement les mêmes substances parmi les plus plébiscitées dans une étude grecque menée sur 320 culturistes amateurs et de loisir (Pagonis et al., 2006) , celles-ci pouvant varier selon la disponibilité sur le marché noir.

Ces molécules et leur propriétés anaboliques sont d’ordinaire utilisées dans le traitement des dénutritions, affections au VIH, grands brûlés, impotence, anémie, et dans l’hypogonadisme masculin.

Si la prévalence de ces pratiques reste difficile à évaluer dans la population générale, aux États-Unis 2,5 à 2,7 % des jeunes américains ont déjà utilisé des stéroïdes anabolisants. On peut se forger une idée plus précise de la consommation chez les utilisateurs de salle de sport. Ainsi une étude grecque menée auprès de plus 5000 personnes ayant rempli un questionnaire dont 39% de pratiquant de loisir, 43% d’amateurs et 18% de compétiteurs, révèle que 79% des compétiteurs, 62% des amateurs et 42% des loisirs pouvaient être considérés comme consommateurs de SAA (Pagonis et al., 2006). Au pays de Galles, Evans

et al. avec 100 questionnaires récoltés auprès de quatre salles de sport, rempli par un tiers

de compétiteurs et le reste d’amateurs, tous des hommes, retrouve une prévalence de 100% d’utilisateurs (N. A. Evans, 1997). Parmi les sujets atteints de dysmorphie musculaire, dans leur étude sur 108 culturistes Pope et al., ont observé que neuf présentaient une anorexie inversée et que tous sont consommateurs de SAA (Pope et al., 1993). Dans une autre étude sur 24 sujets mâles atteint de DM, 11 (46%) ont présenté une consommation de SAA tandis que seulement 2 sur 30 (7%) en faisaient l’usage dans le groupe témoin (Olivardia et al., 2000). Malgré une forte prédominance de l’usage masculin, l’emploi de ces substance chez les femmes est loin d’être inexistant et doit être considéré sérieusement. Illustrant ces propos, une étude comprenant exclusivement une population de femmes compétitrices en culturisme, a mis en évidence que 38% étaient consommatrices (12 cas sur 32).

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En plus de la toxicité propre des composants aléatoires des préparations obtenues sur la marché noir, les principes actifs utilisés ont de nombreux effets indésirables spécifiques bien que tous ne sont pas encore clairement identifiés, notamment à cause de la difficulté à réaliser des études à doses supra-thérapeutiques, en particuliers sur le long terme. Ils sont aussi bien physiques que psychologiques. Nous détaillerons les risques et effets secondaires avérés et les hypothèses probantes.

Chez l’homme, comme chez la femme l’abus de SAA induit un hypogonadisme hypogonandotrope par feedback négatif10 sur les gonadotrophines hypothalamiques et hypophysaires.

Chez l’homme cela se traduit par une atrophie testiculaire, une infertilité avec

oligospermie voire une azoospermie11

, une calvitie, ainsi qu’une diminution de la libido. Ces effets sont réversibles à l'arrêt des stéroïdes anabolisants, mais la restauration de l'activité de l'axe gonadotrope, de la production de testostérone et de la spermatogenèse nécessite généralement entre 3 et 12 mois (les effets s'aggravent avec l'importance des doses et la durée) (Jarow & Lipshultz, 1990). On observe aussi une gynécomastie12 conséquence de l’aromatisation périphérique des androgènes en œstradiol. L’acné et l’apparition de vergetures font partis des symptômes extérieurs directement observables par les usagers.

Chez la femme cela se traduit par une pilosité de la face, un hirsutisme, une raucité de la voix (modification structurelle de la pomme d’Adam et des cordes vocales), une hypertrophie clitoridienne, une diminution voire une absence de règles, l’infertilité, une atrophie mammaire, et une calvitie de type masculine. L’élément plus grave est que certaines de ces transformations peuvent êtres définitives même après l’arrêt des SAA,

10 Feedback : ou rétrocontrôle est une autorégulation par laquelle la variation de la sécrétion d’une hormone agit sur la fonction sécrétrice de la glande qui la produit, permettant un équilibre permanent. Une hormone présente en grande quantité exercera un feedback négatif sur la glande qui stimule sa production.

11 Oligospermie et azoospermie : respectivement une présence de spermatozoïdes anormalement faible et une absence totale de spermatozoïdes dans le sperme.

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telles que l’hirsutisme, les modifications de la voix et la calvitie (Duclos, 2007; Prouteau, 2008).

Indépendamment des modifications sexuelles, les stéroïdes anabolisants ont aussi de nombreux effets physiologiques, sur le système cardiovasculaire, comme l’hypertrophie ventriculaire, l’hypertension, l’arythmie, l’infarctus et l’hyper-agrégation plaquettaire (Urhausen, Albers, Kindermann, & Axel, 2004). Ils sont responsables de dyslipidémies, d’hémorragies digestives, perturbent le métabolisme du glucose jusqu’à provoquer une insulino-résistance. Le système musculo-tendineux présente un risque accru de rupture due à la dégénérescence du tissu musculaire, imputée à la diminution de la densité de capillaires sanguins. Ils ont aussi une importante toxicité hépatique responsable d’hépatites, de jaunisses voire de tumeurs. Plusieurs études ont aussi mis en évidence les effets des SAA sur le système de récompense, démontrant une addiction possible à ces substances (Grönbladh, Nylander, & Hallberg, 2016). D’autres effets sur le comportement ont été relevés à savoir une augmentation de l’hostilité (voir hostilité paranoïaque), des attitudes critiques envers les autres et soi même, de la culpabilité, ainsi que de la volonté auto-punitive (Pagonis et al., 2006). Ces effets sur le psychisme ne sont pas anodins quand on connaît la composante mentale de la dysmorphie musculaire. D’une manière générale une étude canadienne a montré que par rapport à un groupe témoin du même âge (40-50 ans), la mortalité chez les utilisateurs de SAA était multipliée pas 4,6 pendant les 12 années de suivis, les morts prématurés étant principalement dues à des suicides, des infarctus du myocarde et des encéphalopathies hépatiques (Parssinen M, Kujala U, Vartiainen E, Sarna S, & Seppala T, 2000).

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4.2.2- Les autres substances

Il n’est pas rare que les culturistes aient un usage pluriel de substances, que celles-ci soient destinées à augmenter la performance comme les SAA, servent à dissimuler l’usage d’autres substances dopantes en cas de contrôles par les autorités du sport, ou bien à atténuer les effets indésirables des autres produits dopants.

Dans son étude de 1997 où la polypharmacie concerne 86% des répondants, Evans dresse une liste non exhaustive (Tableau 4) des produits autres que les SAA, en les classant des plus utilisés au moins utilisés par ce groupe.

a) Les substances non-stéroïdiennes à visée anabolique

Le Clenbutérol est un agoniste β2-adrénergique, utilisé d’ordinaire en clinique vétérinaire comme bronchodilatateur chez le cheval et les bovins. Il est plébiscité par les culturistes pour son action facilitatrice du dépôt de protéines sur les muscles squelettiques (action anabolisante) et sa capacité à diminuer les graisses corporelles via son activité thermogénique qui augmente la dépense en énergie du corps, même s’il semble que ces effets ne soient que transitoires et ne persistent pas lors d’une administration chronique. Ce dernier effet est prisé durant les semaines précédent les compétitions, une diminution de la graisse sous-cutanée permettant mettre en évidence la musculature (les hormones

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thyroïdiennes sont aussi utilisées dans ce but). À dose élevée, il peut provoquer une tachycardie, hypokaliémie, ischémies myocardiques, de l'arythmie cardiaque, des tremblements intenses, de l'hypertension artérielle, des céphalées, de l'agitation, des vertiges, des nausées, de l'hyperglycémie (Anses, 2016)

L’hormone de croissance (growth hormone) est utilisée pour augmenter les performances athlétiques et la force musculaire, de plus en plus courue de part la chute de son prix sur la marché noir. Des effets indésirables ont été relevés, à savoir des œdèmes tissulaires, des arthralgies, des syndromes du canal carpien, de la fatigue, des sueurs. De plus une administration journalière de doses supra-physiologiques d’hormone de croissance peut provoquer des symptômes similaires à ceux de l’acromégalie13

. Chez ces utilisateurs la cause du décès est souvent d’origine cardiovasculaire (Grönbladh et al., 2016).

b) Les stimulants

L’éphédrine, la phénylpropanolamine (retirées du marché en France), et la pseudoéphédrine sont d’ordinaire utilisées comme décongestionnants des voies aériennes supérieures, grâce à leur action vasoconstrictrice. Elles ont aussi un effet supposé sur la perte de masse grasse, l’humeur et la motivation. Ces effets sont plébiscités par de nombreux culturistes. L’éphédrine et ses analogues exercent une action sympathomimétique indirecte en stimulant la libération d’un neurotransmetteur, la noradrénaline (ou norépinéphrine). Les effets indésirables sont directement liés à cette action. En plus de leurs effets hypertenseurs, ils provoquent une vasoconstriction et des vasospasmes coronariens qui sont plus prononcés chez des individus présentant une augmentation du tonus vagal, tels que les sportifs. De nombreux cas d’effets indésirables liés à ces substances ont été rapportés, notamment des infarctus du myocarde chez de

13 Acromégalie : maladie rare due à une hypersécrétion d’hormone de croissance par l’hypophyse. Elle se manifeste par une augmentation progressive du volume du visage et des extrémités (mains et pieds), s’en suivent des douleurs articulaires et des déformations osseuses, fatigue, syndrome du canal carpien fréquent, apnée du sommeil…

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jeunes individus par ailleurs en bonne santé, des arythmies chez des femmes enceintes, des tachycardies, des palpitations, des accidents vasculaires cérébraux, des accidents ischémiques transitoires et des morts subites dues à des hémorragies cérébrales (Anses, 2016).

c) Les substances dissimulatrices

Les diurétiques sont employés pour augmenter l’excrétion urinaire des principes actifs dopants ou de leurs métabolites qui sont éliminés par cette voie, et ainsi les rendre indétectables aux contrôles anti-dopage. Dans certains sports, notamment de combats, où les compétiteurs sont classés en catégories de poids ils sont utilisés pour diminuer la masse corporelle avant les pesées. Ces médicaments peuvent conduire à une perturbation du ionogramme sanguin (hyper ou hypokaliémie selon les molécules, pouvant provoquer des troubles cardiaques graves), une déshydratation et une insuffisance rénale.

d) Les substances palliatives d’effets indésirables

Le tamoxifène, un antagoniste des récepteurs œstrogènes est employé pour limiter les effets de féminisation des SAA, principalement la gynécomastie.

L’HCG (human chorionic gonadotrophine hormone) est employée en fin de cycle de prise SAA pour relancer la production endogène de testostérone, supprimée par ces derniers, et ainsi diminuer les symptômes de manque à l’arrêt.

5- Le régime et les compléments alimentaires

5.1- Particularités du régime alimentaire chez le culturiste

Le but des culturistes est dans un premier temps de prendre de la masse musculaire hors compétition, puis de s’affiner pendant les 6 semaines précédant les compétitions. Pour cela l’adoption d’un régime plus riche en protéine est nécessaire pour maintenir une

(40)

balance azotée positive (ratio assimilation/ dégradation des protéines) malgré les exercices de haute intensité, et ainsi soutenir la croissance du muscle après ces exercices. Chez un individu normal la balance entre les différents macronutriments doit s’approcher de :

Glucides 50 à 55 % - Lipides 30 à 40% - Protéines 12 à 15%. L’apport en protéines doit être d’environ 0,8g/kg/jour, cependant dans nos sociétés occidentale l’apport moyen en protéines s’approche cependant plus souvent des 1,2g/kg/jour (Halbesma et al., 2009). La littérature sur le sujet suggère que pour un bodybuildeur la balance idéale serait :

Glucides 55 à 60% - Lipides 15 à 20% - Protéines 25 à 30%. Le tout en étant légèrement hyper-calorique hors compétition et hypo-calorique en pré-compétition (plus ou moins 15%). Soulignant l’importance de ne pas trop diminuer l’apport en lipides, sous peine de voir le taux circulant de testostérone diminuer (Lambert, Frank, & Evans, 2004). L’apport précis en protéines par kg/jour n’est pas clairement définit mais il semble logique qu’il doive être supérieur à 0,8g/kg/jour. Cependant il n’existe pas de corrélation stricte entre la ration protéique et la synthèse. Ainsi il a été montré que la synthèse protéique n’est pas significativement supérieure quand l’apport est de 2,4g/kg/jour comparé à un apport de 1,4g/kg/jour (Figure 7) (Gomez-Merino & Portero, 2007).

Certains conseillent donc un apport compris entre 1,6 et 2g/kg/jour pour favoriser la prise de masse musculaire (Gomez-Merino & Portero, 2007). Cependant ces besoins pourraient être plus faibles chez les utilisateurs de SAA, ceci expliqué par une optimisation de l’utilisation et du « recyclage » des protéines.

Figure 7. Évaluation des synthèses

protéiques totales de l’organisme chez des athlètes entraînés dans un sport de force et soumis à un régime à faible apport en protéines (LP, 0,9g/kg/j), modéré (MP, 1,4g/kg/j) et élevé (HP, 2,4g/kg/j) (Gomez-Merino & Portero, 2007)

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Cependant dans la pratique il est fréquent que l’apport en protéines par l’alimentation classique et les poudres protéinées atteigne les 3,2 à 4,2g/kg/jour (Almukhtar et al., 2015; Mosley, 2009; Pope et al., 1997). Or on sait qu’un apport protéique trop important peut avoir des conséquences néfastes sur la santé des individus. Une étude sur la population générale a montré que la probabilité de survenue d’événements cardiovasculaires est corrélée positivement avec les apports supérieurs en protéines, mais sans accélération du déclin de la fonction rénale chez la personne saine (Halbesma et al., 2009). Cependant dans une étude de cas sur 4 culturistes employant des SAA, des compléments vitaminiques et consommant en moyenne 3,7g/kg/jour de protéines, on note l’apparition d’une insuffisance rénale aiguë avec des dommages tubulaires chez tous les sujets (Almukhtar et al., 2015). Il est à noter que cette atteinte du rein pourrait avoir été provoquée par une hypervitaminose D. L’apport en suppléments protéinés est fréquent (jusqu’à 9 fois par jour) et souvent indépendamment du sentiment de faim, simplement motivé par la peur de perdre de la masse musculaire. Cette répétition de prise alimentaire peut entraîner une dégradation bucco-dentaire, principalement des caries. Les suppléments sont très riches en sucres, cequi provoque une augmentation de l’acidité buccale responsable d’une déminéralisation dentaire, et le faible intervalle entre chaque prise ne permet pas une reminéralisation adéquate (Ali, Batley, & Ahmed, 2016).

5.2- Les compléments alimentaires

Le concept de complément alimentaire est relativement récent. Il a été défini par la directive 2002/46/CE du parlement européen, transposée par le décret du 20 mars 2006 : « On entend par compléments alimentaires les denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d'autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique seuls ou combinés ». Ces substances sont par définition autorisées lors de la pratique sportive en compétition, toutefois il faut appeler à la vigilance du sportif sur ses sources

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d’approvisionnement. En effet la composition non certifiée de certaines préparations vendues sur internet peut entraîner des contrôles positifs au dopage, ainsi que des effets indésirables non négligeables (Anses, 2016).

5.2.1- Substances visant l’augmentation de la masse musculaire

Protéines : deux types de protéines sont consommées : les protéines de lactosérum appelées « whey protein » et les caséines qui représentent les deux fractions protéiques principales du lait. Les allégations « les protéines contribuent à augmenter la masse musculaire » et « les protéines contribuent au maintien de la masse musculaire » ont été autorisées par la commission européenne.

Créatinine : la créatinine (Figure 8) est un dérivé endogène d’acides aminés. Elle est produite par le corps à raison de 1g/jour L’allégation « la créatinine améliore les capacités physiques en cas de séries successives d’exercices très intenses de courte durée » est autorisée par la commission européenne. Avoir un plus grand taux circulant de créatinine permet une régénération plus rapide de l’adénosine tri-phospate (ATP), et donc de maintenir une plus haute intensité d’entraînement (Cooper et al., 2012). Cet effet bien que modeste, est assez bien reconnu par la communauté scientifique. Ce qui en fait le complément le plus populaire chez les sportifs, et particulièrement chez les haltérophiles au vu des types d’exercices (de haute intensité mais brefs) qu’ils pratiquent. Les doses alors conseillées sont de 25g/jour pendant une semaine, puis 5g/jour pendant toute la durée de la période d’entraînement. Sachant que l’EFSA (European Food Safety Authority) juge qu’une dose de 3g/j n’expose pas aux effets indésirables.

Figure 8. Créatinine représentée dans sa formule de Lewis

Figure

Figure 1.  Fréquence de  pratique d’une  activité  physique chez  les plus de 15  ans en France.
Figure 3: Poupée Barbie (à  gauche), Poupée aux  proportions humaines  moyennes (à droite)
Figure 5. Différences entre la  vision moyenne d'hommes de 4  pays de la « muscularité d'un  homme lambda » et du corps
Figure 6. Mécanismes  d'action et effets sur le  muscle d'un entraînement  de type musculation (ET)  et/ou du  dopage par  stéroïdes anabolisants  (SA)  RA= Récepteurs   aux  androgènes (Duclos, 2007)
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Références

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